Et la chasse fut ouverte. | Vincente

Meca l’impétueuse était toujours là. Lors de sa dernière visite on aurait pu parier que celle-ci allait sombrer dans les eaux et que tous ses habitants périraient pendant que les avatars de Guerre et de Mort valsaient sur le rythme du chaos. Mais il n’en fut rien, Meca était forte, ses habitants aussi, et l’île avait tenu bon se dressant sur l’Eris tel un majestueux gage de sa puissance. Voir l’île depuis le pont de la moisson rouge tira un sourire à Manolesti, de revoir celle-ci après sa dernière mésaventure et il n’aspirait qu’à un peu de paix, se promettant de tuer le prochain gardien qui s’aviserait de pourrir ce séjour. Revenu autant pour les affaires que pour le plaisir, Vincente s’acquittait de quelques tâches tout en allant serrer des mains et boire un coup histoire de garder le contact, entendre parler d'affaires juteuses et acheter quelques babioles qui feraient fureur sur la péninsule. Barnabe plaisantait sur la marchandise et sur sa provenance " Tu sais le problème avec ta combine mon ami, c’est qu’il faut faire attention de ne pas revendre ton objet au type à qui tu l’as volé, arhahahah. "

En cette belle journée, Vincente se sentait en vaine et après avoir passé la mâtiné à s’entrainer sur la plage et déjeuner avec quelques pontes de la ville, il décida de couler le reste de l’après-midi à jouer dans l’une des tavernes de la ville. Réputé autant pour ses tables de jeux que pour son ambiance cossu et feutré, notre pirate s’orienta vers le pied marin et s’installa à la table du fond en ayant au passage commandé une bouteille de vin. Les parties s’enchaînèrent au fil de la journée pendant que l’on jouait à la jacques, un jeu qui avait l’affection de Manolesti et dans lequel à force de pratique, il s’était mis à exceller. Plumant toujours de manière courtoise ses adversaires-de toute manière son gabarit et sa réputation empêchait quiconque de venir lui chercher des noises, sinon une baston à l’ancienne réglait le différend-l’homme au chapeau continuait sa série avec une bonne maitrise du jeu et une bonne fortune qui en aurait énervé plus d’un. Alors qu’il levait à peine les yeux de son jeu pour effectuer les quelques salutations de rigueur lorsqu’un joueur entrait ou quittait la partie la table fut embellie par la présence d’une femme. Plutôt mignonne, assez jeune, des seins comme des bonbons, une jolie frimousse et une chevelure de feu. Vincente se laissa alors a rêvasser, cette couleur de cheveux lui rappelant sa belle danseuse à la peau caramel. Il se demanda un instant ce qu’elle pouvait bien faire et quand leur route se recroiserait de nouveau, mais il comprenait qu’elle n’ait pas voulu retenter sa chance à Meca; la dernière expérience n’avait pas été pour sur des plus plaisante. Les mains s’enchaînèrent dans une ambiance sereine dû moins pour certains alors que d’autres bougonnaient et suaient à grosses gouttes, Manolesti restant inflexible sirotant de temps à autres son godet ou jouant avec une pièce récemment gagné.

Alors qu’il venait encore par une chance insolente (Qui a dit tricheur ?) de gagner cette dernière manche, le vieux Revalo, l’un des doyens de cette communauté fit scintiller les mirettes de plus d’un lorsqu’il sortit de nulle part une carte élimée qui promettait monts et richesse aux vainqueurs du prochain jeu. Mercucio, un jeune pirate encore un peu trop fougueux resta sceptique :

" Qu’est-ce qui nous dit que te carte est vraie, l’ancêtre ? Et si elle vraie pourquoi ne pas être allé chercher le trésor par toi-même ?

- Voyons Mercucio, Revalo est un homme de parole et respecté de notre communauté, si il atteste que cette carte au trésor est une vraie, on ne peut douter de la véracité de ses propos. " Dit Manolesti qui venait de s’allumer sa pipe, relevant légèrement la tête pour mieux toiser le jeune chien fou.

Ce dernier devint tout penaud et préféra s’excuser auprès du vieux pirate avant que ceux qui avaient encore assez de liquidités et de cran pour tenter leurs chances s’essayent à acquérir le bout de papier. Sans doute plus par jeu et pour tenter sa chance, Vincente jeta un coup d’œil à la demoiselle en face de lui qui ma foi s’était bien débrouillé dans cette partie. Celle-ci allait même jusqu’à doubler la mise ce qui eut pour effet de faire coucher deux des joueurs à la table. Avec un sourire en coin, la vipère noire emboita le pas de la pirate sans prendre le temps de la réflexion, alors que le vieux Jim Revalo semblait jouer sa vie sur cette main, un air crispé était affiché sur son visage alors qu’il massait sa barbe de trois jours essayant d’entrevoir la victoire dans ses cartes. Malheureusement pour ce bon Jim et pour la rouquine, Manolesti mit tout le monde d’accord en abattant son jeu et remportant le butin, alors que les mines déconfites et dépitées des joueurs se levèrent pour quitter la table. Vincente ramassa son butin tranquillement triant sur sa pipe en fredonnant un petit air de Meca. Il tapa dans le dos du doyen et lui offrit de rester partager son vin allant même à lui rendre quelques piécettes afin que le bougre ait de quoi se payer une passe cette nuit dans un bordel pas trop rebutant; oui il fallait soigner ce genre de personnalités, en leur temps elles avaient fait les grandes heures de la piraterie. Lui proposant de lui parler plus en détail de l’histoire inhérente à la carte, Vincente versait du vin dans deux verres avant de s’apercevoir que la rouquine se tenait toujours devant eux. Lui adressant un sourire, la vipère noire lui demanda :

" Encore là, Gamine ? "

Grands-pères ? Manolesti regarda un instant Revalo, hum ce dernier aurait pu effectivement jouer ce rôle pour la rouquine, quant à Vincente il avait sans doute l’âge d’être son père. Quoi qu’il en soit l’espiègle jeune femme nous faisait un petit numéro de charme et même si l’homme au chapeau n’était pas dupe, il laissa faire histoire de voir où l’écarlate allait les conduire. Il faut dire qu’elle était culotée la gamine, à s’incruster tout sourire, laissant échapper quelques notes d’un rire cristallin, feintant quelques œillades, elle aurait fait une parfaite trimardeuse. Elle en avait l’étoffe mais cela aurait été gâché ce potentiel car si elle était bien ce qu’elle prétendait être, il se pourrait que la belle aille plutôt loin. Tirant sur sa pipe, le pirate jeta un coup d’œil à Jim qui se remettait peu à peu de la perte d’un bien qui devait sans doute s’avérer être précieux mais tant que l’homme n’en aurait pas plus déballé, on ne pouvait pas vraiment savoir de quoi il en retournait. De retour sur la rouquine celle-ci allait carrément à la pêche à l’info, le genre qui viendrait piquer dans votre assiette comme si de rien n’était avant de vous offrir un sourire innocent. La toisant un instant la vipère noire hésita entre remettre la donzelle à sa place ou bien sourire de sa prestation :

" T’as de la chance, j’ai un faible pour les filles culottées. " Dit-il relâchant un peu la tension que ses iris reptiliennes avaient laissées planer sur la belle. " Pirate hein ? Sur quelle bâtiment navigues-tu Kassandra ? " Faisant signe à ce que l’on lui apporte une autre bouteille, il se sentit l’âme d’un galant en remplissant le verre de son interlocutrice avant de reprendre. " Disons que part lubie, j’ai envie de prendre un associé dans cette affaire qu’est-ce que j’aurais à gagner en m’enjoignant ta compagnie ? J’ai la carte, la réputation, les aptitudes, qu’as-tu à m’offrir à part ton ambition et ta belle gueule ?

- Croyez-le ou non, mais ceci - dit-elle en désignant de la main sa propre présence -suffit à bien du monde. Une femme, par ses propres atouts, peut obtenir bien des choses, je ne vous apprends rien. Et puis qui cracherait sur de tels arguments pour faire plier la concurrence ? " La rouquine lâcha un petit soupir satisfait et reprit sur un ton plus sérieux. " Enfin, n'étant tout de même pas pirate pour rien, sachez que je n'ai pas mon pareil pour ce qui est de tenir la barre...Et le joujou à ma hanche ne sert pas juste à décorer, bien au contraire. Je serais tout aussi enchantée de vous montrer mes talents de danseuse, mais je pense qu'un cadre aussi professionnel ne s'y prêtre guère. Et comme le virus mécan ne s’attrape rarement autrement que par la famille, mon père était un sacré pirate en son temps. Peut-être le nom de Rhamyr ne vous dira t-il rien, vous n’avez pas l’âge de ses anciens matelots, mais, paix à son âme, il a eu le mérite de m’élever sur cette île. Pour le reste... Je ne voudrais pas trop vous en dévoiler, sinon où est l'effet de surprise ? "

Hum, peut-être le discours de la jeune l’avait-il convaincu ou bien était-ce son culot et ses mèches rousses qui lui faisait penser à la pyromancienne mais Vincente se laissa convaincre en se disant qu’au pire, il s’en débarrasserait plus tard.

" Tu me plais bien la rouquine, disons que je vais te prendre à l’essai. "

Jetant un coup d’œil à droite puis à gauche, Vincente et sa nouvelle partenaire se concentrèrent sur un Revalo qui avait eu le temps de digérer sa perte au final et en parlait comme si sa malchance lui était arrivée il y a bien des années. C’était un trait assez intéressant des Mécans et de la population pirate, ne s’attardant jamais vraiment longtemps pour leurs pertes ou sur le passé, généralement allant assez bien de l’avant sans se retourner (Qui a dit que la boisson y était pour quelque chose). Ainsi donc après avoir vidé un godet, le vieux pirate abaissa le ton de sa voix, pour murmurer sa fascinante histoire auprès de ses deux compatriotes. L’histoire prenait place il y a environ une centaine d’années sur le pont de L’intrépide, une célèbre caravelle Mécane, dont le chef était Hérïus Flappaur, aussi connu sous le nom du Colosse Nordique car en dépit de ses proportions il est vrai impressionnante, ce dernier avait son terrain de chasse dans le Nord de L’eris, Barbotant tout ce qui lui passait sous la main et notamment les navires marchands qui convoyaient richesses et marchandises entre la péninsule et la côte naine.

Le problème était que ses juteuses exactions avaient attiré l’œil des autorités royales qui avaient lancé à sa poursuite la marine royale afin de punir comme il se devait le forban. Jouant au jeu du chat et de la souris pendant des mois se croisant parfois dans des escarmouches aussi rapides que meurtrières, la traque pris fin un jour de Barkios sur une mer démontée, alors que l’intrépide au vu de la tempête débarqua sur la pointe Nord de Meca. Le bateau d’Hérïus, chargé ras la gueule de denrées, d’or nain et autres joyeusetés. Au vu de la tempête qui faisait rage et d’un navire de la marine royale qui avait eu l’audace de suivre le pirate aussi près de la sulfureuse Meca-Il faut dire que l’officier de la marine royale était Jean de Morley, l’un des meilleures capitaines que la marine royale n’est jamais eu-il avait été décidé de décharger les biens les plus précieux et d’aller les cacher à l’intérieur de l’île. Le lendemain la mer était toujours autant agité et pour ne rien arrangé Le colosse Nordique dû affronter de Morley et ses hommes; la légende voudrait qu’Eris s’est ouverte en deux fendue par un éclair et aurait emporté les deux navires alors que ceux-ci poursuivaient leur affrontement.

La légende était ma foi assez distrayante et Vincente aimait à s’imaginer la scène alors qu’il tirait pensivement sur sa pipe, jetant un coup d’œil à la carte qui dépassait de son veston. Revalo poursuivit son récit en expliquant que bien entendu le pirate avait fait une carte de l’emplacement du dît trésor et qu’il avait donné la carte à son second, qui avec des vivres et deux hommes rentrerait par la terre afin de conserver la carte hors de mains avides et crochues ou de la marine royale. Cependant sur le chemin du retour, les trois hommes auraient eu des dissensions, l’un serait mort dans d’étranges circonstances tombé dans le piège d’une créature sauvage alors que le second et l’autre pirate se seraient battus, le second en sortant vainqueur mais blessé. Arrivé finalement à Meca, il apprit que l’intrépide avait disparu et sa blessure s’était infectée surtout avec ce temps humide. Délirant à cause de la fièvre, la carte disparu pour réapparaitre au fil des années sans vraiment savoir de quoi il s’agissait, des expéditions même avaient été tenté mais sans véritables succès, certaines équipes ne réapparaissant jamais. Quoiqu’il en soit, aujourd’hui la carte était dans les mains de la vipère noire et même si celui-ci se demandait si le trésor n’était pas maudit, il allait mettre à l’épreuve sa chance en partant à la recherche de celui-ci.

Sortant de son imaginaire un instant pour avaler quelques gorgées, il reposa son verre puis regarda l rouquine d’un air malicieux :

" Et bien, il me semblerait que nous allons partir en expédition. "

La pirate était bien enjouée par la légende qui entourait la carte et on aurait pu jurer que si le soleil n’était pas sur le point de se coucher, que la belle aurait voulu que l’on parte sur l’instant. Manolesti plus pondéré dans son attitude et se demandant encore pourquoi au final, il avait accepté cette situation se dit qu’il n’allait pas non en plus de fournir la carte, apporter les hommes de l’expédition.

" Je te présenterais surement ma fratrie mais je pense que cela peut attendre. J’emmènerais surement un ou deux d’entre eux histoire que ces derniers nous donnent un coup de main. Peut-être que toi et tes charmes, pourriez nous dégotter une paire de traines savates qui finiraient de compléter notre équipe. "

La soirée venait de commencer et même si il n’était pas très opportun d’aller toquer à la porte d’un homme à moitié fou à la nuit tombé, le duo se mit en marche. Vincente après avoir tapé le foyer de sa pipe contre le bord de la table et écrasé les gerbes encore incandescentes, regarda Kassandra commençant à s’éloigner, celle-ci lui lançant un regard plein de malice qui l’invitait à la suivre. Se levant, le pirate réajusta son chapeau et mit une tape amicale dans le dos de Revalo avant de s’éclipser dans la rue. Notre tandem se promena dans les ruelles de Meca qui commençaient à s’animer au fur à mesure que les étoiles se mettaient à scintillaient dans le ciel. C’était une chose étrange de voir comment l’animation de la journée s’effaçait peu à peu pour laisser place à l’effervescence de la nuit et c’était exactement dans cette tranche horaire, dans ce creux de la vague que l’on se situait. Les mains dans le dos, Manolesti marchait à côté de la rouquine qui ayant embarqué l’adresse de Tuco, faisait office de guide. Et pendant que l’homme au chapeau répondait par un signe de tête ou par quelques paroles " chaleureuses " à ceux qui le saluaient, il essayait de faire la conversation à sa nouvelle associée faisant mine de ne pas entendre les grivoiseries que certains de leurs congénères effectuaient sur la prétendue nouvelle pouliche de l’aéromancien :

" Ahhh, j’adore cette île, j’adore cette ville, elle sent bon l’air du large et la liberté. Mis à part peut-être à Thaar mais il ne m’a jamais semblé trouver un endroit pareil dans tout ce que j’ai pu visiter au cours de ma vie et j’avoue qu’on ne peut trouver pareil microcosme nulle part ailleurs. Au fait, tu peux m’appeler Vincente, ça sera bien plus commode pour nos conversations futures. "


Puisqu’elle avait décidé de lui rester dans les pattes, Manolesti comptait un peu se distraire de la présence de la jeune femme. Après avoir jeté un coup d’œil pour détailler la jeune femme des pieds à la tête, il reprit la conversation :

" Donc, Kass- je peux t’appeler Kass ?-Qui es-tu ? Qu’est-ce qui t’as fait croire que je ne t’enverrais pas promener ? "

Alors qu’elle lui répondait, Manolesti jeta un regard par-dessus son épaule mais ce dernier ne vit rien d’alarmant. Cependant un sentiment persistant le mettait sur ses gardes, lui intimait qu’après les effets dramatiques de Revalo dans le tripot, il ne serait en rien étonnant que l’on suive nos deux héros pour les égorger proprement dans une allée sombre avant de s’emparer de la carte. Continuant leur route, ils traversèrent quelques rues, parfois sombres, parfois animées, pour débarquer enfin sur une petite place servant parfois de marché et sur laquelle donnaient des habitations dont celle de l’homme que le tandem cherchait. Se présentant devant une maison à la porte bariolée comme c’est souvent le cas pour les masures de l’île, les deux compères échangèrent un regard avant que la vipère noire ne se décide à frapper à la lourde. Après un léger temps d’attente, une voix faible leur dit d’entrer, on aurait pu s’estimer heureux que l’homme soit chez lui et non pas à la taverne du coin ou encore déjà au lit. Passant en premier, Vincente put constater un petit logis avec une cheminée allumée dans laquelle une odeur de soupe émanée de la marmite. Dans le reste de la pièce on pouvait trouver une table au centre, un bureau dans un coin près d’une petite fenêtre qui donnait sur une rue adjacente et un lit dans le coin opposé. Près du feu, assit sur un tabouret et occupé à touiller le souper, on trouvait un homme qui devait avoir la cinquantaine, le cheveu court voire mi-long et dans une forme physique qu’on aurait pu juger convenable. Plutôt surpris par l’aspect de l’homme qui avait été dépeint comme fou, le genre prostré par terre à manger son vomi, alors qu’il n’en était rien, l’homme au chapeau avança dans la pièce examinant son environnement. Se posant sur la chaise qui était libre en face du feu, il regarda Tuco qui leva un regard pour adresser un sourire à ses invités et notamment à Kassandra qui ne devait pas laisser le quinquagénaire insensible à la présence féminine et ses charmes. On aurait pu se laisser aller à la suspicion ou du moins être déconcerté par cet accueil ma foi chaleureux alors que notre équipe aurait pu être ici pour bien autre chose qu’une visite de courtoisie mais il semblait que Pagileri s’en moquait. Un silence s’installa pendant une minute ou deux, où les deux hommes se regardèrent sans parler, comme si quelque chose se passait en interne. Puis finalement Manolesti bougea le bras, passant sa main dans ses frusques, il en ressortit la carte qu’il déroula pour la coller sous les yeux d’un Tuco qui s’éveilla devant le morceau de papier. Une étincelle se produisit dans le regard de l’homme qui sortait de sa léthargie pour laisser apparaitre des signes d’anxiété, d’avidité mais surtout d’inquiétude voire de peur.

" Qu’est-ce tu peux me dire sur ça ? Qu’as-tu vu dans la jungle ?

-Je…J’ai vu la mort. Le colosse…le colosse n’abandonnera jamais son trésor. " Les souvenirs refluaient dans l’esprit de l’homme alors que ceux-ci exhumaient des images que le pirate avait préféré oublier. Se ressaisissant, il regarda ses deux invités. " N’allez pas dans là-bas, oubliez la carte, la légende et le trésor, oubliez… "

Alors que le pauvre homme semblait se replonger dans les chimères qui l’habitaient et que Vincente se demandait s’ils pourraient quand même embarquer ce pauvre homme dans l’aventure, Il entendit un bruit à l’extérieur qui se confirma rapidement lorsque la porte s’ouvrit pour laisser passer deux hommes suivi de Mercucio, la situation semblait se corser.

Le problème dans le monde pirate lorsque l’on est jeune, c’est que l’on veut toujours faire ses preuves afin d’être reconnu. Cela vous pousse notamment à toujours plus de culot, de violence et surtout d’actes inconsidérés, comme tenter de voler une carte au trésor à la vipère noire. Dans un premier temps dubitatif, Vincente se leva pour faire face à la porte et toisait d’un air amusé le freluquet qui le menaçait de son sabre. Dans ce monde régit essentiellement par la violence et où dominait la loi du plus fort ou celle du plus sournois, il fallait sans cesse faire preuve de sa puissance que l’on soit jeune ou moins jeune, afin d’éloigner les charognards et autres gagnes-petits toujours prêt à fondre sur vous dès qu’un moment de faiblesse se faisait ressentir. S’apprêtant à mettre une branlée aux trois arrivistes, Kassandra prit les devants et fit démonstration de quelques uns de ses talents. Si Manolesti s’interrogeait encore sur les raisons qui l’avaient poussé à intégrer la rouquine dans cette aventure, celles-ci disparurent bien vite. En effet la pirate fit montre d’un comportement exemplaire qui prouvait qu’elle ne mentait pas du moins sont tempérament de feu et d’acier. Passant devant le vicomte, la belle lui lança un regard entendu avant de jeter la pitance du pauvre Tuco qui à la vue de son diner se rependant sur le sol se prit la tête entre les mains tout en émettant une plainte qui aurait pu se traduire par " Pauvres fous, qu’avez-vous fait ?! " . Mais l’on ne pouvait pas se permettre de perdre du temps à se recueillir sur le sort de la brave soupe tombait au champ d’honneur car les narines de l’aéromancien furent titiller par une odeur bien singulière, quelques choses de iodé mais aussi de fleurie (peut-être de la violette). Ce parfum aux volutes entêtantes émanait de la jeune femme qui après avoir agitait la main en direction du liquide fumant sur le sol, se transformant en jets de vapeur qui engloutirent la pièce. Alors que celle qui se révélait pleine de surprises-et qui sentait bon la magie- sortait son sabre pour en découdre avec nos trois énergumènes, Manolesti l’attrapa par l’épaule et-sourire aux lèvres-lui fit signe qu’ils feraient tout aussi bien de s’esquiver afin de retrouver leur piste ambulante. Le problème c’est qu’une fois arrivé dans l’arrière court, notre duo de choc tomba nez à nez avec une dizaine de maroufles qui avait mit sous bonne garde Tuco ; surement d’autres gars à la solde de Merucio.

Si du deux contre trois était plus qu’envisageable, la partie semblait quelque peu se désavantageait pour nos deux héros qui en plus de cela perdait leur guide au trésor ; pire encore il venait de tomber aux mains de ce qui semblait devenir des concurrents dans cette affaire. Il allait falloir rapidement trouver une échappatoire à cette déplaisante situation. Tirant son sabre, le pirate ne fit pas dans la demi-mesure, après tout le temps jouait contre eux et il envoya sa lame dans le bide du premier homme qui passait la porte derrière eux. Manque de chance ce ne fut pas Mercucio, mais le chassé qu’envoya Manolesti dans le corps du pirate le projeta sur ses camarades derrière lui, bloquant provisoirement les assaillants qu’ils pouvaient avoir dans leurs dos. Alors qu’il se retournait, déjà le groupe qui leur faisait face chargeait sabre poing bien décidé à se débarrasser de cet élan de résistance. L’homme au chapeau ancra ses pieds dans le sol avant que la densité de l’air change subitement, pendant que ses adversaires continuaient leur progression, lui tombant sur le poil dans une poignée de secondes. Un puissant courant d’air vint à se lever pour s’enchevêtrer sur le corps du pirate avant de s’enrouler autour de ses bras, arrivant jusqu'à ses mains avec vélocité ne demandant qu’à poursuivre sa course. Les mains jointes sur la garde de son sabre, le magicien tendit ses bras en avant pour relâcher une puissante bourrasque qui vint à stopper la progression de ses adversaires avant de les soulever de terres allant s’écraser lourdement sur le sol-ou sur un objet solide se trouvant sur leurs routes-quelques petits mètres plus loin. Emportant dans sa puissance une demi-douzaine de gaillards, nos amis n’étaient pas pour autant tirer d’affaires, car il restait encore quelques types debout. Cependant ces derniers hésitaient un peu devant la démonstration de puissance de l’aéromancien, n’allaient-ils pas subir les foudres (sans jeux de mots) de celui que l’on nommait parfois le sorcier des océans ? Quoiqu’il en soit trois hommes plus braves ou plus stupides que leurs camarades s’élancèrent de nouveau pour croiser les sabres de notre tandem, qui parèrent avant de faire s’entrechoquer les lames. Son sabre dans une main et son poignard dans l’autre, Vincente parait les attaques de ses deux assaillants, jetant un coup d’œil à sa comparse il reporta son attention sur son environnement, évitant de relâcher son attention trop longtemps sur les assauts de ses deux malandrins. L’arrière cour malheureusement était bordée d’un mur qui la parcourait tout du long entrecoupé seulement d’une ouverture au fond afin de s’en échapper dans le cas présent.

Le mur Est était bordé d’un fatras qui pourrait être le billet de sortie, mais alors que cette possibilité était noté par le pirate ce dernier esquiva à la dernière minute une lame qui était sur le point de lui entaillé le nez. Parant un coup de sabre, il en profita pour agripper le bras de l’un de ses adversaires et le retourner avant de le pousser son sur compagnon-non sans lui avoir gratifié un sympathique coup de poignard dans le dos-avant de s’adresser à la rouquine qu’il avait perdu du coin de l’œil " Suis-moi ". Courant sur sa gauche tout en rangeant son attirail dans la foulée, il sauta sur le tas comme il le pouvait avant d’agripper le mur et de le gravir avec souplesse. A cheval, sur la corniche il tendit sa main à la pirate qui s’en saisit pour être hissée sans effort, alors que les deux sautèrent en bas pour aller se perdre dans la foule des chaudes nuits mécanes.

Se faufilant entre les passants d’abord en courant puis peu à peu ralentissant le pas pour se fondre dans la masse, le pirate souriait, plus vraiment habitué à prendre la poudre d’escampette pour ce genre de désagrément, il constatait que ce petit jeu du gendarme et du voleur-ou dans le cas présent, des fripouilles et des canailles- avait quelque chose d’amusant, de légèrement enfantin. Sur que ce combat et l’issue de ce dernier n’aurait pas forcément, elle, était enfantine mais voila que qu’ils s’étaient fait la malle et qu’il fallait penser à la suite. Se laissant porter par le flux des passants, Manolesti réajusta ses vêtements et souleva un instant son chapeau afin de passer une main dans ses cheveux. Souriant à la pirate quant à sa réplique, le tandem marcha sans se pressé, jetant parfois un coup d’œil derrière son épaule afin de voir s’il n’était pas suivi. Pendant que Vincente suivait le guide sans doute le plus sexy de Meca, qui l’emmenait dans les quartiers torrides de la ville, l’homme réfléchissait à la situation.

Mercucio, l’attaque, le bon Tuco, cette chasse au trésor se voyait déjà gratinée de quelques embuches avant même son début à proprement parlé. Kassandra et Revalo avait raison, il semblait bien que ce trésor ai été maudit et que cette aventure soit riche en rebondissements. Si l’on brossait déjà un rapide tableau, on voyait qu’en plus de nos deux héros, une équipe concurrente leur faisait face, Mercucio et ses hommes. Ce jeune freluquet avait dû les suivre à la sortie de la taverne et accompagné de quelques drôles, il s’était mis en tête de récupérer la carte et maintenant il détenait un guide. Il n’arriverait sans doute pas grand-chose à Tuco, ils allaient en avoir besoin pour qu’il les mène au trésor, mais les explications du farfelu pouvait s’avérer aussi claires que sibyllines. La carte serait donc un meilleur élément pour débuter la partie pour Manolesti et la rouquine. Sortant des ses réflexions, il put voir qu’il était arrivé lorsque l’aquamancienne, s’arrêta devant une porte coquette d’un bordel intimiste. En guise de réponse aux rassurements de la jeune femme, le pirate l’enserra par la taille, sa main descendant sur la hanche de la mécane " Me voilà alors rassuré, ma chère. " susurra-il avec une œillade à l’adresse de sa mutine comparse avant que les deux n’entrent tel un couple voulant une chambre afin de besogner tranquille.

Longeant quelques corridors avant d’entrer dans une petite pièce mal éclairé seulement réhaussé par une petite lucarne à la verrerie opaque et une bougie posait sur une petite table au centre de la pièce. S’allongeant sur le lit, Vincente profita un instant de cette instant de repos, les deux mains posées sous sa tête, jetant un coup d’œil à Kassandra " Peut-être pourrions-nous en discuter avec quelques victuailles, j’avoue que cette petite escapade m'a donné faim. Cette gargote a de quoi nous sustenter ? " Un repas et une sieste crapuleuse, en voila une bonne idée. Se relevant en laissant la rouquine jouait les intendantes-quoique ne laissant pas trainer la carte sous des yeux indiscrets-, il tira de son veston, la carte tant convoité et l’étira sur la petite table à la lueur de la source de lumière. Le haut de la carte décrivait la côté nord de Meca de façon assez grossière alors qu’une croix situé à plusieurs centimètres du présumé rivage, indiquait sans doute l’emplacement du magot. L’encre qui décrivait le reste de la route était différente, le parcours avait été il tracé par le second de Hérïus ou par la griffe d'autres aventuriers qui avaient vu passé la carte entre leurs mains. Le plan était assez minimaliste dans sa conception mais l’on retrouvait divers symbole dessinaient près du tracé devant donné une indication ou un avertissement aux téméraires qui chercheraient à s’emparer du trésor.

Ainsi en partant de la piste qui indiquait Meca, on pouvait voir un liseré barrant la route faisant penser au lit d'une rivière, d'un ruisseau, d'un fleuve ? Un autre symbole, représentait une tête d’homme aux traits difformes puis un grand arbre. Le symbole le plus proche de la croix était une caverne surmontée d’une tête de mort. Tous ses symboles était ma foi bien étranges et le les griffonnages qui faisait office de légendes offraient un peu plus de mystères à une énigme déjà bien nébuleuse.

" Marche vers le nord jusqu’à atteindre la couronne de la tumultueuse. Continue jusqu’à atteindre la rivière et enjambe là pour entrer dans le royaume des quatre mains. Là tache de marcher sans bruit et fais attention à Cygor et son armée. Remonte avec prudence jusqu’au vénérable qui t’éclairera sur le monde et prend garde aux dangers tapis dans les branches. Continue ton périple toujours en direction de la croix mais n’approche pas de la caverne-crâne et peu après le trésor sera là. "

Bon je vous l’accorde le style laissé à désirer, mais comme je vous l’ai déjà expliqué, si le mécan n’est pas très bon poète il cherche cependant à faire des efforts. A moins que ce ne soit la fièvre du pauvre diable où l’un de ses aventuriers-troubadours qui se soient amuser à marquer ses conneries. Quoiqu’il en soit, on avait notre point de départ et…On toqua à la porte et Vincente laissa la carte se racornir sur elle-même pour finir dans veste. On vit une servante gironde devant l’entrebâillement de la porte tenant un plateau de nourriture et un cruchon de vin qui déposa le tout sur la petite table se faisant remercier d’un sourire, d’une pièce et d’une tape sur les fesses – de la part duquel de nos deux protagonistes, ça l’histoire ne le dis pas-avant que les deux pirates ne s’attablent. Un instant réticent à manger et boire, ne sachant pas si la belle ne comptait pas l’arnaquer, le droguer et filer avec la carte, l’homme au chapeau changea bien vite d’avis devant une Kassandra bâfrant voracement la pitance à grand renfort de vin. Prenant une légère collation en compagnie de sa nouvelle associée, Manolesti s’en alla choir sur le lit, chapeau sur la tête lançant à la cantonade : " Il vaudrait mieux dormir, demain sera une grosse journée, buenas noches serñoita. " Sans donner explication sur la route du lendemain où s’enquérir de où la rouquine aller pioncer, Vincente rêva au trésor et l’étrange texte qui l’accompagnait. Au petit matin, la vipère noire était frais et dispo, souriant à l’idée de devenir encore un peu plus riche que la veille et restant optimiste malgré les difficultés et les dangers qui semblaient les guetter.

Quittant l’établissement ensemble, le vicomte marchait en direction du port :

" Je me rends à mon embarcation, afin d’y attraper deux de mes hommes et un peu de matériel. Je pense que le plus logique serait que tu partes de ton côté effectuer le petit recrutement dont on avait discuté hier et que toi, tes hommes et ton matériel me rejoigniez devant la moisson rouge, le nom de mon bâtiment. De là nous partirons vers le nord en direction, il vaudrait mieux nous hâter, maintenant que nous avons des rivaux dans cette histoire, la concurrence risque d’être féroce. "

Alors qu’il arrivait à bord de son navire, il put constater un attroupement autour d’un homme et lorsqu’il demanda à ses compagnons de route de bien vouloir s’écarter dans un langage des plus fleuries, il put constater que l’homme assit avec le visage tuméfié n’était autre que Revalo :

" Je suis désolé, petit. C’est ma faute si Mercucio vous ait tombé dessus hier soir. Après votre départ, il est revenu avec quelques gars de son équipe et il m’a forcé la main comme tu peux le voir pour que je lui indique où est-ce que je vous avez envoyé. J’étais venu te prévenir mais je ne t’ai pas trouvé et tes hommes m’ont généreusement offert l’hospitalité le temps que je puisse te prévenir.

- C’est pas grave, Mercucio a réussi a récupérer Tuco mais je pense que cette petite bande ne nous causera rapidement plus de soucis. " S’adressant à son équipage. " Julio, Marcus, allez chercher du matériel d’expédition, vous allez être assigné à une mission très spéciale. Bash, tient le fort en mon absence. "

Alors que les préparatifs se déroulaient sans encombre, le vieillard essayant de ne pas trop démontrer la douleur qu’exprimaient les hématomes présent sur son visage, s’avança vers un Manolesti, adossé au bastingage, attendant patiemment que tout soit enfin près pour pouvoir entamer le chemin qui le séparait de son futur butin. Le vieil homme d’abord hésitant, plongea son regard dans le lointain tout en parlant à son homologue :

" Tu sais, je sais que je ne mérite pas la faveur que je vais te demander, surtout après ce qui s’est passé hier soir, cependant j’aimerais que tu me rende un petit service. Emmènes-moi avec toi dans l’expédition, j’ai passé des années à organiser et chercher cette carte et le trésor. " Détournant son regard de l'horizon, il fixa Vincente qui continuait à mirer vers les quais, guettant l’arrivée de la rouquine. " Je connais bien la légende...Je pourrais t’aider. "

- Je ne sais pas, j’ai l’impression que cette histoire ne va m’apporter que des emmerdes et je n’suis pas sur qu’une de plus ne me soit favorable.

- Fais ça pour un vieil homme, exhausse son dernier vœux.

Jetant finalement un regard perçant à Revalo, la vipère noire se dit qu’il allait perdre en réputation à force de ramasser tous les vieux, les gonzesses et autres paumés qui jalonnait sa route.

" Bon, très bien le vieux, tu peux venir, mais je ne garantirais pas ta survie. " A ce moment là, Kassandra et quelques balourds qu’elle avait réussi à dégotter, montèrent à bord et une fois que Manolesti et fait signe de les laisser passer, l’équipe expéditionnaire tint un rapide meeting. " Nous allons chercher un objet dans la jungle, un objet que l’on dit être de grande valeur. Le texte dit qu’il faut atteindre la couronne de la tumultueuse, il doit s’agir de la chaine de monts et de montagnes que l’on trouve à l’intérieur des terres. C’est là-bas que nous nous rendons. "