Tyra: la pénitence est une bénédiction. [libre]

Un jour enfin, Tyra revint de son escapade aventurière comme si de rien n’était. Son retour suscita la colère de tous cela va sans dire, prêtres et responsables de l’orphelinat. Comment lui faire comprendre toute l’inquiétude qu’ils ont eue, toute la folie qui lui a prise, toutes les prières qu’ils ont du faire… Comment la punir à la mesure de sa faute ? La rejeter des ordres et/ou la renvoyer de l’orphelinat n’étaient pas des options et n’auraient aucun impact de toute manière. Il fallait la punir oui, mais la punir trop sévèrement pourrait bien se retourner contre la bonne intention. On discuta un moment puis on finit par trouver la solution. Tyra serait obligée de participer à la vie communautaire plus que tout autre. Elle devrait aider et assister à toutes les cérémonies, toutes les prières, à la préparation des repas et autres tâches ménagères, à la prise en charge des pèlerins etc… Elle serait toujours sous la tutelle d’un prêtre ou de quelqu’un du personnel à longueur de temps jusqu’au soir où elle serait reconduite dans la chambre commune aux filles de l’orphelinat.

Tyra accueillit la sentence sans sourciller. Le prêtre qui haussait la voix en lui rabâchant ses fautes et tous les ennuis qu’elle avait causés ne sut plus quel ton prendre en remarquant son manque d’expression constant, bien que cela ne change pas de son habitude.

« Tu comprends au moins ce que je te dis ? Hein ? Tu te rends compte des ennuis que tu as causés ? On dirait que cela ne te fais rien, que tu t’en fiches… Comment espères-tu devenir prêtresse de Tari si tu ne ressens aucune compassion ? »

Soudain l’expression de Tyra changea à cette remarque, ses yeux se plissèrent un peu et les coins de sa bouche s’étirèrent sensiblement, plus d’un côté que de l’autre d’ailleurs. Elle répondit au prêtre :

« Tout cela n’est qu’égoïsme, ce qui ne veut pas dire que je ne ressens aucune compassion. Je mets tout cela dans une balance et le résultat m’indique ce qui m’apporte le plus. N’allez pas croire que mes émotions ou celles des autres n’entrent pas en compte. C’est pourquoi j’ai accepté les conséquences de mes actes dès le départ, je n’ai pas à redouter ni à regretter après coup, j’accepte mon châtiment tel qu’il est et j’en suis heureuse, qu’il en soit ainsi.

« Qu’il en soit ainsi ? C’est tout ce que trouve à dire ? Tu n’as même pas la moindre excuse à fournir pour ton égoïsme ? Qu’est-ce qui a tant pesé dans ta soi-disant balance pour justifier un comportement aussi stupide ? »

« La compréhension, la libération, l’acceptation et l’expiation de mon passé et de moi-même, afin de voir différemment l’avenir et le présent. Cela vous semble une excuse suffisante ? »

« Cela me semble un peu trop irréaliste comme excuse. Pourquoi ne pas avoir demandé une quelconque autorisation, une escorte etc, hein ? Inutile à ton goût ? Une quête trop secrète et trop personnelle pour en parler à quiconque ? Tu n’as donc assez confiance en aucun d’entre nous ? Même pas ton ami Kaëlian ? Je ne parle pas de la petite Lorélia qui a aussi pris ta défense… Est-ce vrai que tu as traversé le fleuve à pied ?... … Bon… As-tu au moins trouvé les réponses que tu cherchais là où tu penses que personne d’autre n’aurait pu t’aider à les obtenir ?

« Oui, je les ai trouvées. »

« Hum… Alors je ne sais plus quoi te dire de plus. Je ne veux pas croire que porter le nom de la déesse ne t’ai pas déjà apporté l’humilité. Tant que tu promets de te consacrer pleinement à tes tâches dès à présent, espérons que le temps t’apprenne les voies de la patience et de la ferveur. »

Ainsi Tyra suivit les ordres journaliers afin d'aider la communauté dans toutes les tâches possibles et immaginable. Les journées furent longues et éprouvantes au début, mais elle ne bronchait jamais. Au début quelques apprentis et quelques jeunes orphelins béliqueux se moquèrent, mais cela ne la toucha pas et d'ailleurs ils eurent vite fait de se taire en comprenant à quel point sa position peu envieuse était en réalité tout le contraire. Tyra apprit beaucoup, aussi bien des choses divers et variées de la vie courante, allant jusqu'à apprendre à cuisiner (bien que la cuisine elfique soit quelque peu limitée sauf dans la preparation de certains fruits et autres graines afin d'en extraire toutes les parties no commestibles voire dangereuses), que des connaissances sur les rituels et la magie divine peu enseignée en temps normal à de simples apprentis. Appliquée, sérieuse, elle finit par etre bien connue et appréciéee par la communautée, au point que plus personne ne se posait la question de savoir si son aide pour faire la lessive, laver les sols ou préparer des objets de rituels pour un exorcisme résultait d'une punition au départ.

Tyra resta donc longtemps dans cette position de service.Cela dura plusieurs mois et personne ne lui avait donné de durée pour sa peine. Le soir elle retrouvait la petite Lorélia dans l'orphelinat dont la grande soeur trop occupée lui manquait beaucoup. Alors elles mageaient, discutaient, méditaient meme (car Lorélia la copiait avant de dormir) puis dormaient ensemble. Le lendemain la routine continuait. De temps en temps elle croisait Kaëlian qui avait lui aussi subit le courroux des pretres et s'était vu contraint de méditation forcée pendant trois jours, d'écrire un rapport sur les rituels d'exorcisme puis de devenir l'assistant personnel d'un pretre durant un mois. Par contre elle ne revit pas la grande pretresse, qui devait etre occupée ailleurs.

Et puis, un jour durant lequel Tyra nettoyait un couloir de pierre sans se priver d'utiliser sa magie de l'eau et de la glace (un bon moyen d'entrainement), quelqu'un qui n'avait pas fait attention glissa et manqua de tomber. C'est ainsi que Tyra rencontra...