L'appel du large [Rico]

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MessageSujet: L'appel du large [Rico]   L'appel du large [Rico] I_icon_minitimeMar 12 Mai 2015 - 2:05

Cela faisait maintenant quelques jours que Smeralda était sur les routes. Au début, l'excitation du voyage l'avait agitée, et c'était pleine de détermination et d'espoir qu'elle était partie. Le cœur léger et la tête emplie de projets, elle marchait de bonne grâce. Elle avait le pas sûr, et elle avançait plutôt rapidement. Quand il fallut manger pour la première fois, elle grignota un quignon de pain qu'elle avait pris avec elle, but quelque gorgée de sa gourde et repartit aussi sec. Lorsqu'elle arriverait enfin là où elle rendait, elle espérait pouvoir rencontrer son père. Cela faisait beaucoup trop de temps qu'elle en rêvait, et elle avait décidé de prendre les choses en main. Après tout, n'était-ce pas mieux que d'attendre encore et toujours, avec le vain espoir de voir un jour Enrico passer le pas de la porte de sa taverne ? Très certainement. Puis vint ensuite le deuxième jour, puis le troisième. Elle avait du dormir dehors, à même le sol, parce qu'elle n'avait pas voulu gaspiller ses pièces pour une chambre. Et les journées avaient beau être douces, les nuits étaient plutôt fraîches. Si cela n'entama en rien sa volonté, son moral en prit un coup. Peut-être que le monde n'était pas comme elle se l'imaginait, et peut-être que son trajet n'allait pas être aussi paisible qu'elle l'avait d'abord pensé. Après quelques jours, elle rencontra finalement d'autres personnes sur la route. Et alors, elle se demanda comment réagir. Devait-elle faire comme s'ils n'existaient pas ? Ou au contraire, devait-elle leur adresser la parole, pour peut-être se joindre à eux ? Elle savait que les routes n'étaient pas très sûres, et que seule, elle aurait certainement quelques ennuis. Mais elle n'avait pas envie de voyager avec des gens qu'elle ne connaissait absolument pas, et qui pouvaient lui causer ces fameux ennuis. Et puis, si elle avait bien calculé, il ne lui restait qu'un jour ou deux avant d'arriver à bon port, alors à quoi bon essayer de se trouver de la compagnie ?

Finalement, elle trouva Béranthe. Une petite bourgade entourait l'enceinte du château. Le château où, lui avait-on dit, vivait son père. Etait-ce vrai ? Etait-il là bas, entre ses murs ? Pourrait-elle enfin le voir ? Sans s'en rendre compte, elle s'était arrêtée. Son cœur s'était accéléré, dans sa poitrine, et un frisson avait parcouru son échine. Mais elle secoua la tête pour chasser la gêne passagère, serra les poing, et reprit sa route. Bientôt, elle arriva aux abords de la ville, et elle fut plongée dans son agitation. Des gens se pressaient dans les rues, des enfants riaient et se bousculaient, des marchands essayaient de ramener de la clientèle. Cela lui rappelait un peu les rues de Velmone, le port et l'odeur salée de la mer en moins. Elle déambula un moment dans le rues, et s'arrêta même pour acheter une miche de pain et remplir sa gourde. Elle avait dérobé discrètement un bout de viande séché qui traînait sur une étale, et elle s'était installée non loin des portes du château pour déguster sa collation. Elle retardait sans cesse l'inévitable instant où elle irait se présenter pour demander à voir Enrico. Et si on le lui refusait ? Si on ne voulait pas la croire ? Que ferait-elle ? Ou pire encore : si lui ne voulait pas la voir ? Elle n'avait pas voulu y penser avant, mais là, littéralement au pied du mur, toutes ces interrogations ne pouvaient que se presser dans son esprit. Elle eut du mal à finir son sommaire repas, les bouchées passant de plus en plus difficilement dans son pharynx. Sa gorge se resserrait sous l'effet du stress. Peu à peu, ses mains devinrent moite, et son cœur frappa ses côtes d'une façon démentielle lorsqu'elle se présenta enfin aux portes. Le sang battait à ses tempes, et le garde du répéter au moins deux fois sa question avant qu'elle ne l'entende.

- Je voudrais voir Enrico di Montecale. On m'a dit qu'il..., commença-t-elle.
- Va falloir attendre les doléances de d'main. Aujourd'hui, c'pas possible d'entrer, désolé ma p'tite demoiselle.
- Attendez ! C'est urgent. Je... Je ne voudrais pas être impolie, mais je dois le voir aujourd'hui.
- Mmmm, c't'urgent pour de vrai ? Nan parce que si...
- Allez, fait pas ton lourd, Odo, j'vais chercher l'intendant, le coupa un autre garde. T'vois bien qu'elle est pas bien, la pauvrette !

Smeralda devait être blanche comme un linge. Déjà qu'elle n'était pas très halée à la base, l'angoisse de l'attente devait la faire ressembler à s'y méprendre à un cadavre. Celui qui s'était adressé à elle en premier essaya d'en savoir un peu plus sur la raison de sa venue, mais elle ne put pas lui répondre. Sa gorge était trop nouée, et elle n'attendait qu'une chose. Que l'autre ramène le fameux intendant pour qu'on la fasse enfin entrer. Avant qu'elle ne prenne les jambes à son cou.
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MessageSujet: Re: L'appel du large [Rico]   L'appel du large [Rico] I_icon_minitimeSam 23 Mai 2015 - 15:23

Le milieu de la journée apportait avec lui la faim et le soleil haut dans le ciel. En plein printemps, avec la nature qui bourgeonnait, la guerre semblait s’éloigner et une nouvelle année commencer. A Béranthe, de nombreux étals de marché vendaient de la nourriture, alors que midi faisait gronder les ventres. Au château en revanche, une table avait été montée, et les Montecale avaient, semble-t-il, déjà bien mangé. A ce dîner, toute la famille était présente et discutait de vive voix. Raúl débattait avec Albano de la meilleure façon de manger une huître, tandis que les femmes de Pisard et d’Albano s’amusaient entre elles de cet objet de discorde pour le moins saugrenu. Les enfants de Piezarre, en l’absence de leur père, se montraient parfois turbulents, bien que rappelés à l’ordre par la voix tonitruante d’Hernán, le patriarche. Enfin, en tête de table, Enrico mangeait calmement en écoutant à moitié les conversations entre les différents membres de sa famille. Son repas, plutôt frugal, était composé de raisins, d’une miche de pain et d’une pomme. S’il mangeait peu, évidemment, c’était pour manger plus le soir. Et il ne se priverait pas le moment venu d’arroser le tout d’une de ses meilleurs vins.

Après avoir terminé sa pomme, il s’aperçut que tout le monde avait également fini, et qu’ils le regardaient tous. Raúl arqua un sourcil.

« Tu ne manges pas ? D’habitude tu prends plus que ça. »

« Non, pas aujourd’hui Albano. Mais je compte me rattraper ce soir. Pour l’heure, je dois parler à père d’une affaire importante. »


L’amiral toucha distraitement un endroit de sa poitrine, celui où reposait, caché sous sa chemise, le médaillon offert par le Maître Marchand nain. Hernán vit le mouvement, et acquiesça d’un hochement de tête. Tous deux se levèrent de table et, en silence, sortirent de la salle. Les autres membres du clan Montecale se regardèrent. D’habitude, il n’y avait aucun secret entre eux… Mais après tout, ils étaient déjà partis. Peu à peu, les discussions reprirent, cette fois moins étranges que cette joute verbale huîtrière. Toutefois, les sujets restaient banals…
Soudain, la porte s’ouvrit, laissant passer la silhouette de l’intendant. C’était un homme fin et sec, âgé de la quarantaine mais en faisant bien dix de plus. Chauve et glabre, il avait presque un visage de rapace avec son nez aquilin et ses yeux perçants. Il s’adressa à la famille qu’il servait :

« Messires, une jeune demoiselle souhaite voir le seigneur di Montecale. Elle prétend que c’est urgent. Dois-je la faire entrer ? »

Albano regarda Raúl, et inversement. Leur frère étant parti, que fallait-il répondre ? La curiosité sembla animer les deux lascars, qui se jetèrent mutuellement une œillade malicieuse. Ils n’étaient pas frères pour rien…

« Faites-la rentrer, Gilderoy. Qu’elle vienne ici. Nous attendrons le retour du seigneur en sa compagnie ! »

L’intendant acquiesça, puis partit dans les couloirs chercher la demoiselle en question. Lorsqu’il revint, accompagné de la fille en question, les yeux des deux frères s’écarquillèrent, alors qu’ils semblaient apercevoir une femme d’outre-tombe…





L’amiral à la jambe de bois était encore en vive discussion avec son père alors qu’ils revenaient dans la salle où ils avaient laissé la famille entière. Pendant quelques minutes, ils avaient discuté du meilleur site pour la construction de ces navires, sans pour autant se mettre d’accord.

« A l’ouest de Béranthe, père. Ça aiderait à développer la seigneurie, et ça donnerait du travail à bon nombre de gens par ici. Et il est plus facile de ramener des experts d’Ydril ici qu’à Langehack ! »

« Faux, mon fils ! Langehack a déjà des installations, et c’est un argument ridicule que tu me sors là. Plus facile de ramener des experts ici… C’est n’importe quoi. Réfléchis, bougre d’âne ! Que ce soit ici ou à Langehack, ce sera quand même difficile, et pire encore si tu veux Siméon d’Anoszia ! Déjà, où trouveras-tu l’argent pour ça ? »


« Oh, ne t’en fais pas pour l’argent. »


L’estropié poussa la porte de la salle commune.

« Messire Olfar ne… »

Il s’arrêta en pleine phrase, la gorge nouée. Il faillit s’étrangler avec ses propres mots lorsqu’il posa son regard sur la nouvelle silhouette présente dans la salle. Devant lui se tenait une jeune fille. Une très jeune fille. Elle avait de longs cheveux de jais, aussi sombres que ses yeux. Et ce visage… cette bouche… Les globes d’Enrico faillirent sortir de leurs orbites.

« Mère… »

Oui. On aurait vraiment dit le sosie de Letizia Montecale, la défunte matriarche du clan, emportée il y avait de cela douze ans par une maladie inconnue. Face à lui, son fantôme. En plus jeune, certes, mais le visage ! Ce visage était tellement ressemblant, il ne pouvait pas y avoir d’erreur ! C’était elle, revenue d’entre les morts pour hanter la famille à jamais !
Soudain, on entendit Hernán murmurer :

« Tizia… »

Avant de s’effondrer lourdement sur le sol, dans les pommes. Alarmé par le bruit, Albano et Raúl se levèrent pour voir comment se portait leur père, alors qu’Enrico restait les yeux rivés sur le sosie de sa mère. Ses mains tremblaient, et il attrapa la poignée de la porte par laquelle il était entré. Une idée saugrenue lui traversa soudain l’esprit, une pensée fort probable, mais irréelle. Ça ne pouvait pas être ça, non. Ça ne pouvait pas ! Ce n’était pas possible !
Et pourtant, elle allait sûrement le lui dire. Oh oui, elle allait sûrement lui prouver qu’elle n’était pas un fantôme, mais qu’elle était bien cette « idée saugrenue » qui l’avait assailli.
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MessageSujet: Re: L'appel du large [Rico]   L'appel du large [Rico] I_icon_minitimeSam 6 Juin 2015 - 16:32

Ce fut un soulagement pour elle lorsqu'on lui ouvrit les portes. Elle n'avait absolument pas pensé à ce qu'il serait arrivé si on lui avait refusé l'entrée. Elle aurait sans aucun doute été désemparée, mais au delà de ça, elle n'avait pas réfléchit à ce qu'elle aurait bien pu faire. Mais peu importait, elle était entrée, et on lui avait dit qu'elle verrait Enrico. Et une fois ce soulagement passé, l'angoisse la saisit de nouveau. S'il ne la reconnaissait pas ? S'il niait sa paternité ? S'il la renvoyait comme une malpropre d'où elle venait ? Son cœur battit de nouveau la chamade, et ses mains étaient devenues moites. Elle n'en pouvait plus d'attendre là, entourée de gens qu'elle ne connaissait pas, et qui étaient, elle le voyait bien, plus haut placés qu'elle. Ce n'était certes pas difficile, puisqu'elle n'était qu'une enfant de tavernière, mais elle était tout de même mal à l'aise. On lui avait proposé un siège, mais elle avait décliné poliment. Elle était bien trop nerveuse pour s'asseoir, elle préférait encore rester debout. Smeralda essayait de contenir tant bien que mal sa nervosité, mais de temps à autre, ses mains se joignaient et ses disjoignaient aussitôt, ses doigts tapotaient sur sa cuisse, ou sa jambe se pliait puis se tendait. Heureusement, son calvaire prit bientôt fin. Deux hommes étaient entrés dans la pièce, et lorsqu'elle le vit, elle ne put douter un seul instant que son sang coulait dans ses veines. Il avait certains des traits qu'elle pouvait voir dans un miroir, et il avait les cheveux de cette couleur si noire qu'on aurait pu la comparer au jais. Elle n'eut pas le temps d'ouvrir la bouche qu'il le fit. Qu'ils le firent tout deux, d'ailleurs. Et quand elle voulu s'avancer pour les saluer le plus poliment du monde, l'homme le plus âgé s'écroula sans plus de manières.

Une main vint se porter à sa bouche, et ses yeux s'écarquillèrent, rivé sur le pauvre homme inconscient. Ses iris passèrent du père au fils, et elle resta là, plantée au milieu de la pièce, pendant un petit moment, se demandant ce qu'elle devait faire. Celui qu'elle était venue trouvé semblait plus troublé par sa présence que par ce qu'il venait de se passer. Et comme on s'était déjà précipiter au sol pour aider le vieil homme, elle fit un pas en direction d'Enrico. Si sa main avait quitté sa bouche, un son eu tout de même du mal à sortir :

- Je... Je suis désolée.

Voilà tout ce qui sortit de sa bouche. Quand elle réalisa ce qu'elle venait de dire, elle se sentit complètement idiote. Désolée, elle était désolée. N'y avait-il pas mieux à dire que cela ? Si, très certainement. Mais elle n'avait pas compris la réaction des deux hommes, et elle ne savait absolument comment y faire face. On la regardait encore avec stupéfaction, et quand elle se rendit compte du poids des regards, elle sentit ses joues s'empourprer. Elle fut prise d'un intérêt soudain pour le plancher, et elle resta ainsi un instant, comme prostrée. Puis elle se racla la gorge, peut-être pour se donner du courage, ou tout simplement parce qu'elle n'osait même plus avaler sa salive, et dit d'une toute petite voix, sans même regarder celui à qui elle s'adressait :

- Je pense que, hum, pourrait-on parler, quelque part ?

Elle ne savait pas si Enrico l'avait entendu, mais elle l'espérait tellement. Elle n'avait aucune envie de répéter. A ce moment, elle se dit que s'il lui refusait cet entretient, elle prendrait certainement ses jambes à son cou. Sme était de plus en plus mal à l'aise, et bientôt, elle le savait, ce serait trop pour elle. Pourtant, elle était plutôt du genre à être sûre d'elle, d'ordinaire. Mais là, elle se laissait envahir par toutes ses émotions, elle n'avait plus aucun contrôle sur ce qu'elle ressentait. Elle avait bien essayé, de se contenir, mais elle n'avait pas réussi. Alors, sagement, elle attendit une quelconque réponse. Et le silence sembla durer une éternité.
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MessageSujet: Re: L'appel du large [Rico]   L'appel du large [Rico] I_icon_minitimeLun 15 Juin 2015 - 10:33


Enrico regarda la jeune fille qui paraissait choquée par la chute d’Hernán. Lui n’avait qu’à peine remarqué sa déchéance, et encore moins la course de ses frères pour venir en aide au patriarche. Son attention était toute concentrée sur cette mystérieuse étrangère, au visage pourtant si familier. C’était hallucinant ! Comme si sa propre mère revenait le hanter ! Était-ce la Damedieu qui lui jouait un tour ? Ou Tyra ? Son esprit rationnel penchait bien évidemment pour la première hypothèse, bien que sa piété n’empêche pas la seconde d’être vraisemblable. Tant d’interrogations et si peu de réponses… Il fallait qu’il lui demande à elle. Alors que ses frangins s’occupaient de leur père, l’homme à la jambe de bois ouvrit la porte calmement, accédant à la requête de la fille. Ils parleraient, oh que oui, ils parleraient. Il y avait un certain nombre de choses qu’il devait savoir.

Il referma le battant derrière lui, une fois que la jouvencelle l’eut dépassée pour se retrouver dans le couloir, en sa compagnie. Une fois dehors, il reprit peu à peu contact avec la réalité. Face à un moment de silence gêné, il commença à marcher en rond, toujours le regard posé sur la jeune demoiselle. Puis, s’appuyant sur le chambranle de la porte, il poussa un soupir pour évacuer la pression, et lui dit d’une voix neutre :

« Il y a plusieurs choses que j’aimerais tout d’abord connaître. Qui est ta mère ? Quand es-tu née ? Que réclames-tu, et enfin… Quel est ton nom ? »


Plus il parlait, plus il réalisait que, outre le côté pragmatique avec lequel il prenait la situation, une infime joie commençait à percer son chemin à travers son cœur. Il s’en était toujours un peu douté, même s’il avait préféré ne pas s’en soucier. En vérité, il avait plus que tout souhaité être père un jour. Bien qu’une union officielle eut été meilleure en termes de légitimité. En face de lui se tenait peut-être sa seule fille. Quel âge devait-elle avoir… Elle avait l’air un peu trop vieille pour qu’il l’ait eue, car il ne se souvenait que trop bien de la première femme qu’il avait séduite. Olivia, cette jeune et pétillante serveuse. La chambre était petite, mal rangée. Il y avait une forte odeur de renfermé et de bois pourri. Mais elle l’avait aimé le temps d’une soirée, et avait fait de lui un homme. C’était il y a quinze ans et pourtant, il s’en souvenait comme…
Quinze ans !

En y réfléchissant plus, et en observant tout autant, il était possible qu’elle ait cet âge. Enrico lui en aurait donné un de plus, mais il n’était pas impossible qu’elle soit aussi jeune. A mesure qu’il y réfléchissait, cela prenait même tout son sens. Il commençait à entrevoir la possibilité… non, l’assurance qu’il était bel et bien père. Ce n’était pas possible autrement ! La bougresse était le portrait craché de Letizia, avait l’âge qu’il fallait, et venait le trouver lui ! Elle avait sûrement dû en parler avec Olivia… Et il n’y avait pas que l’assurance de l’amiral qui grandissait, mais son propre orgueil. Il se surprenait à se féliciter pour la beauté de l’enfant qu’il avait, si cela s’avérait, conçu avec la serveuse de Velmone.
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MessageSujet: Re: L'appel du large [Rico]   L'appel du large [Rico] I_icon_minitimeSam 20 Juin 2015 - 16:20


Quand elle se retrouva enfin seule avec lui, elle ne sut que faire, ni que dire. Elle avait demandé à parler, mais rien ne lui venait. Elle ne savait pas exactement ce qu'elle voulait exprimer, et si elle l'avait su, elle n'aurait su comment. Le silence s'installe de nouveau, et elle put suivre Enrico des yeux lorsqu'il commença à arpenter le couloir de long en large. Elle pouvait sentir sans peine la nervosité qui émanait de lui, et cela la rendit plus mal à l'aise encore. Avait-elle bien fait de venir le trouver ? N'avait-elle pas fait une erreur, en venant se présenter à lui ? Il était évidemment bien trop tard pour se poser ce genre de questions, mais elle ne pouvait s'en empêcher. Finalement, on mit un terme à toutes ses interrogations, puisqu'on lui posa multitude de questions. Enfin, quatre. Ce n'était en réalité pas énorme, mais elles avaient été enchaînées si vite qu'elle resta un instant dubitative. Dans le ton de sa voix, rien n'avait pu lui laisser entendre qu'il était content, ou au contraire, agacé par son apparition soudaine. Alors, consciencieusement, elle décida de répondre à ses questions une par une. Debout, au milieu du couloir, elle n'osait toujours pas le regarder dans les yeux, et ses iris fixaient un point au loin.

 - Olivia. Olivia Muliera, répondit-elle d'une petite voix.

Elle d'ordinaire si pleine d'assurance, et si expansive, n'arrivait aujourd'hui pas à aligner deux mots sans hésiter. Alors, la jeune fille prit une grande inspiration, et chassa aussitôt l'air de ses poumons. Lorsqu'elle parla à nouveau, sa voix était plus calme, plus posée, et elle semblait moins nerveuse.

 - Je suis née en barkios de l'an neuf cent quatre-vingt treize du dixième cycle, et je m'appelle Smeralda.

Il restait une question, elle le savait bien. Mais il était assez compliqué d'y répondre du tac au tac. Si les trois premières réponses n'avaient été que des informations des plus banales, cette dernière se devait au moins d'être un minimum réfléchie. Que réclamait-elle ? Elle n'en savait trop rien. Elle avait voulu venir parce qu'elle avait toujours voulu connaître son père, mais au delà de ça, elle ne voyait pas bien. Mais comme le silence commençait à redevenir gênant, elle ouvrit la bouche à nouveau.

 - Je ne suis pas là pour quémander quoique ce soit. Je suis ici parce que j'ai toujours voulu connaître mon père. Je crois que je t'ai imaginé beaucoup de fois, et finalement, tu n'es comme aucune de mes représentations. Je... hésita-t-elle un instant, avant de reprendre. J'ai entendu dire que tu étais marin ? Que tu naviguais beaucoup ?

Voilà ce qui l'intéressait réellement. Elle rêvait de partir en mer, de partir à l'aventure, loin de la terre ferme. Elle avait espéré tant de fois qu'Enrico revienne pour l'emmener au large, dans des contrées lointaines et inexplorées. Parce qu'elle était curieuse, et parce qu'elle avait envie de connaître son géniteur. Parce qu'elle ne voulait pas être une vulgaire bâtarde, qu'on aurait abandonné à la naissance, comme un fardeau. Elle aspirait à beaucoup mieux. Elle voulait être quelqu'un de complet, et de respectable. Elle voulait découvrir des endroits, elle voulait découvrir le monde. Et la seule personne qui ait jamais représenté cet idéal était celui qui se tenait devant elle. Allait-elle être déçue ?
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MessageSujet: Re: L'appel du large [Rico]   L'appel du large [Rico] I_icon_minitimeMer 1 Juil 2015 - 10:51

La jeune enfant avait l’air toute penaude, fixant un point au loin, rendant encore plus mal à l’aise Enrico. Ce n’était pas vraiment l’effet qu’il souhaitait produire sur sa propre descendance, bien qu’il ne connaisse rien de cette dernière et qu’il doutait encore de son existence il y avait de cela quelques minutes. Il la regarda encore une fois. Par les tétons de Néera, il avait beau espérer y voir autre chose à chaque fois qu’il posait ses yeux dessus, mais c’était bel et bien la réincarnation de sa mère ! Rien de mieux pour persuader l’amiral que cette fille était bel et bien la sienne. Une Montecale. Ca crevait les yeux, si fort que le crâne lui-même en était perforé. Impossible de réfuter la parenté, et encore plus quand elle lui révéla le nom de sa mère. Olivia ! C’était bien elle ! Il avait deviné un peu auparavant, mais l’apprendre de la bouche de la jeunette était encore plus déroutant. Il dut se tenir au chambranle de la porte, sentant tout à coup que sa jambe de bois ne le soutenait plus aussi sûrement.

Née à Velmone, en Bàrkios, neuf cent nonante-trois… Ca semblait correct. Et elle s’appelait Smeralda. L’Emeraude en patois ydrilote. Sûrement était-elle très précieuse pour sa mère. En y pensant, un soupçon de culpabilité envahit l’estropié. Alors c’était ça la fameuse close en bas du contrat ? Le tarif à payer pour ses erreurs de jeunesse ? Il n’en prenait pas encore pleinement conscience, et pour l’instant, tout ce qu’il voyait, c’était cette jeune femme à la beauté inestimable, et qui se revendiquait comme étant de son sang. Elle assura qu’elle ne venait rien quémander, et qu’elle n’était venue que pour le voir. Enrico y croyait peu, mais dut avouer que cette révélation le soulagea et lui fit chaud au cœur. Et apparemment, il n’était comme aucune des resprésentations qu’elle s’était faite de lui. Qu’est-ce que cela voulait dire ? Était-elle déçue ? Outrée ? L’imaginait-elle sans cette vilaine jambe, ou bien peut-être plus riche, plus puissant ? Tout à coup, cela avait encore plus d’intérêt pour lui. Il se rendit compte qu’il aurait préféré être roi, ou le plus riche des marchands d’Estrévent. Impressionner, certes. Et lire de l’admiration dans ses yeux. Là, en revanche, il ne savait pas quoi tirer des deux profondes prunelles de Smeralda.

« Je… Oui, je suis marin. Je suis même l’amiral de Langehack ! Et je prétends à la fonction d’amiral du Roy. Je suis également l’ancien gouverneur d’Azalie, et à présent seigneur de la ville dans laquelle tu te trouves. Et… Hum… »


Se grattant la barbe, le fier suderon chercha quelque chose à dire. C’était bien la première fois que, face à une femme, les mots lui manquaient. Cette situation aurait bien pu le faire rire, s’il ne s’agissait pas de lui-même. Il soupira un instant, agrippant la poignée de la porte. Il l’entrouvrit, avant de se tourner vers Smeralda et de lui dire un peu plus bas :

« Tu souhaites peut-être manger quelque chose ? Nous pouvons, hrm, parler de tout ceci à table. »

Et en ouvrant la porte, il vit dès lors que la salle les attendait. Toute la famille était là, les yeux rivés sur l’ouverture. Le père était revenu à lui, et respirait un peu bruyamment. Ses frères, assis l’un à côté de l’autre et accompagnés de leurs femmes pour les deux s’étant mariés. Même les enfants étaient présents, un air interrogateur sur leurs petits visages de bambins. Prenant son courage à deux mains, il fit héler un serviteur pour s’occuper de sa fille. Une fois la gêne passée, peut-être pourraient-ils s’entretenir plus facilement…
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MessageSujet: Re: L'appel du large [Rico]   L'appel du large [Rico] I_icon_minitimeDim 26 Juil 2015 - 16:33


Marin. Il était bien marin. Un léger sourire était apparu sur ses lèvres. On ne lui avait donc pas menti ! Et cela la réjouissait au plus haut point. Il lui balança quelques autres titres, mais elle n'avait aucune idée de ce que cela signifiait. Amiral de Langehack ? Qu'était Langehack ? Elle n'en avait pas la moindre idée. Mais cela avait l'air assez bien pour qu'Enrico le cite. Avant qu'elle ne puisse lui répondre, ou lui poser d'autres questions, il l'invita à sa table, pour manger quelque chose. A cet instant, son ventre gargouilla. L'évocation d'une éventuelle collation avait fait venir l'eau à sa bouche, et avait réveillé sa faim, jusqu'alors relayée à un rang très secondaire. Avant qu'il n'ouvre la porte, elle répondit doucement :

 - Oui, pourquoi pas, ça pourrait être bien.

Au cas où il n'avait pas entendu son estomac gronder, il savait maintenant que cela ne la dérangeait aucunement de passer à table. Quand il ouvrit à nouveau le battant, ils se retrouvèrent face à une dizaine de paires d'yeux tous plus curieux les uns que les autres, braqués sur eux. Elle n'eut pas le temps d'ouvrir la bouche, que son géniteur l'avait confié à un serviteur qui passait par là. Les regards qu'elle sentait peser de plus en plus sur elle la faisait sentir comme une étrangère. Elle avait clairement l'impression de ne pas être à sa place ici. On la dévisageait sans retenue, et la gêne qui avait commencé à disparaître revenait bien rapidement.

Rapidement, on l'installa autour de la table, et on la servit plus que nécessaire. Elle n'était pas habituée à de copieux repas, et si d'ordinaire elle mangeait tout à fait correctement, comparé aux enfants des rues, cela n'égalait en rien la quantité qu'on venait de lui mettre sous le nez. Déstabilisée, elle fronça un instant les sourcils. Qu'avait-elle bien pu faire pour mériter cela ? Et surtout, que devait-elle faire, là, tout de suite ? Elle regarda rapidement autour d'elle, se disant qu'elle allait les imiter. Seulement, elle croisa le regard de Hernán, et elle fut un instant happée par ses iris. Elle savait pertinemment qu'il voyait en elle quelqu'un d'autre, cette fameuse Tizia. La mère d'Enrico, si elle avait bien compris. Au moins n'y aurait-il aucun doute sur sa légitimité. Le sang qui coulait dans ses veines était bel et bien le leur. Sagement assise, elle attendait qu'on lui adresse la parole. Trop peu sûre d'elle, elle préférait rester en retrait, et ne prendre aucune initiative.

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MessageSujet: Re: L'appel du large [Rico]   L'appel du large [Rico] I_icon_minitimeVen 31 Juil 2015 - 13:25

Elle se faisait tellement discrète. Peut-être était-elle aussi intimidée que lui en fin de compte. Lui-même était encore parfois très intimidé par son père, et il le connaissait depuis bien plus longtemps. Bien qu’ave Hernán, ce soit plutôt spécial. Figure d’autorité et d’intransigeance, il n’en allait pas vraiment de même pour Enrico. Il l’espérait, en tout cas. Il ne souhaitait pas ressembler à ce vieillard aigri, encore moins pour son enfant. Lorsqu’ils pénétrèrent dans la pièce, ils s’installèrent à la table, au milieu du cercle familial. Un mélange de tension silencieuse et de curiosité tacite traversait toute la salle, alors que la jeune Smeralda ne semblait pas toucher à sa nourriture. Cela confirmait la gêne qu’elle pouvait éprouvée, et ça ne s’arrangerait sûrement pas avec Hernán qui la fixait depuis tout à l’heure.

L’amiral de Langehack croisa les mains en mettant ses coudes sur la table. Presque immédiatement, toute l’attention se reporta sur lui. Agacé, il se décida tout de même à briser la lourde chape de plomb qui venait de retomber sur l’assemblée.

« A tous… Je vous présente Smeralda. Elle… J’ai rencontré sa mère à Velmone, et je l’ai aimée le temps d’un soir. »


Hernán frappa du poing sur la table, et se leva en bougonnant. La réaction fut tellement spontanée qu’elle arracha un petit hoquet de frayeur aux attablés. Le vieil homme amer prit la direction de la sortie d’un pas rapide. La porte claqua derrière lui, et tout redevint calme. Enrico, qui était inquiet de la réaction de son père, préféra dès lors continuer afin de ne pas terroriser sa fille, ou qui qu’elle puisse être.

« Ne fais pas attention à lui. C’est Hernán, mon père. Et voici mes frères ; Albano et Raúl. L’épouse d’Albano et celle de Piezarre, qui n’est pas ici ; Caterina et Amelia… Et voici les enfants d’Alabno, Benito et Letizia. »


Répéter le nom de sa mère lui était étrange. Surtout en présence d’une jeune enfant qui lui ressemblait comme deux gouttes d’eau. En plus jeune, certes, mais on ne pouvait nier qu’il s’agissait de son portrait craché. Ce serait se condamner à une cécité de mauvaise foi.

« L’a-t-elle dit de sa propre bouche ? Ou bien a-t-elle vu d’autres hommes après moi ? »

Raúl s’éclaircit la voix, attirant le regard d’Enrico.

« Rico, t’es aveugle ou quoi ? On dirait mère revenue du royaume de Tyra ! »

« La ferme, Raúl. »

Le ton était froid et étrangement glacial. Le frère se rassit sans broncher, comprenant que c’était à présent une discussion plutôt importante entre un père et sa fille. L’homme à la jambe de bois se lissa la moustache. C’était une situation délicate, et tout le monde semblait s’accorder sur le sujet, puisque le reste de la famille s’était rangé du côté spectateur, même avec l’intervention inutile de Raúl. Il inspira, puis regarda profondément dans les yeux troublants de Smeralda.

« En venant ici… tu t’attendais bien à quelque chose, non ? Dis-moi. »

En somme, peut-être qu’elle ne réclamait aucun héritage comme elle l’avait laissé sous-entendre… Mais alors qu’était-elle donc venue faire ici ? Rencontrer son père éclopé, certes, mais après ? Pour Enrico, il devait y avoir autre chose…
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MessageSujet: Re: L'appel du large [Rico]   L'appel du large [Rico] I_icon_minitimeDim 2 Aoû 2015 - 16:16


Enfin, ou troua le silence. Enfin, les regards la quittèrent pour se poser sur celui qui avait pris la parole. Etrangement, elle se sentait soulagée d'un poids. Ses épaules se redressèrent légèrement, et elle releva la tête. Quand Enrico déclara avoir aimé sa mère le temps d'un soir, le cœur de Smeralda se serra légèrement. Elle savait pertinemment que, lorsque sa mère avait appris sa grossesse, elle avait espéré chaque jours et chaque nuit revoir celui qu'elle savait être le père. Parce qu'elle n'avait aucun doute, et parce qu'elle n'était pas ce genre de femme. Parce qu'elle ne donnait pas son corps sans avoir au préalable donné un peu de son cœur. Et si elle avait du savoir qu'elle ne reverrait probablement jamais cet homme, inconsciemment, elle avait du l'espérer. La jeune fille savait aujourd'hui à quel point elle avait eu tord d'espérer, puisqu'elle n'avait finalement été qu'une parmi tant d'autres, à n'en pas douter. Mais peu importait, cela ne la concernait pas. Elle n'avait pas le droit de lui en vouloir pour ça, du moins le pensait-elle. Visiblement, Hernán avait le droit, lui. Lorsque son poing frappa la table, elle ne put s'empêcher de sursauter. Et quand la porte claqua, un semblant de peur passa dans ses yeux. Etait-ce de sa faute, s'il était dans cet état ? Etait-elle la raison de sa colère ?

Elle n'eut pas le temps de se pencher plus en avant sur la question, puisqu'on lui présenta ceux qui étaient assis autour de la table. Que de la famille, apparemment. Sa famille ? Elle ne les reconnaissait pas comme tel, et pourtant, elle avait de leur sang. Pourrait-elle un jour les considérer comme étant des membres de sa famille ? Pourrait-elle un jour s'intégrer au sein de cette dernière ? Elle n'en savait rien, elle ne savait même pas si elle en avait envie. Ils étaient tellement différents, il fallait dire. Et puis elle était venue ici pour rencontrer son géniteur, pas pour se trouver de nouveaux oncles et de nouveaux cousins. Elle en avait déjà bien assez comme ça. La question qui suivit ensuite lui fit serrer les dents. Pour la première fois, elle regarda Enrico droit dans les yeux, sans gêne, et sans aucune envie de détourner le regard. Elle était clairement agacée par ses propos. On parla avant elle, mais cela ne l'empêcha pas de répondre, d'un ton plus sec qu'elle ne l'aurait voulu :

 - Ma mère n'est pas une catin. Tu es mon père, c'est certain.

Sûrement le savait-il déjà, mais il voulait en avoir la certitude. A vrai dire, elle ne pouvait imaginer ce qu'il pouvait éprouver là, tout de suite, maintenant. Seulement, elle savait ce qu'elle éprouvait. Un mélange de fierté, de joie, et de doutes. Elle était fière de savoir son père plutôt bien loti, elle était heureuse d'avoir enfin pu le rencontrer, et elle avait des doutes quant à sa présence ici. N'était-elle pas de trop ? Enfin, peu importait. Tout ce qui importait maintenant, aux yeux d'Enrico, était de savoir pourquoi elle était là. Et ce qu'elle pouvait bien vouloir. Elle aurait pu lui dire qu'elle avait juste voulu le rencontrer, juste voulu savoir qu'elle avait un père, un vrai. Non pas que Viggo n'ait pas été un père pour elle, au contraire. Il l'avait élevée, tant bien que mal, et lui avait inculqué les valeurs de la vie. Tout ce qu'elle savait, elle le lui devait en partie. Mais jamais il n'avait pu réellement remplacer son géniteur. Le manque s'était installé, petit à petit, jusqu'à ce qu'il devienne insoutenable et qu'elle décide de le combler. Ce qu'elle voulait, c'était un père. Sauf qu'elle savait ne pouvoir répondre cela. D'abord parce qu'il n'était peut-être pas en mesure de la satisfaire, et ensuite parce que ce n'était absolument pas ce qu'il attendait comme réponse. Elle savait qu'il demandait ce qu'elle voulait matériellement. Alors, elle sut ce qu'elle allait répondre.

 - En venant ici, je voulais te rencontrer. Je voulais avoir qui tu étais. Tu as toujours été un mystère pour moi. Un mystère, et à la fois un rêve, reprit-elle d'une voix plus douce. Tu m'as que tu étais marin. Ma mère me l'a souvent dit aussi. Cela sonnait plutôt péjoratif dans sa bouche, mais pour moi, c'était la plus belle chose qui puisse être. Et, depuis que je le sais, depuis qu'on me l'a dit, je n'ai jamais arrêté d'y penser. Je... Mon rêve ce serait...

Comment allait-elle bien pouvoir dire cela ? Elle se devait de donner, là maintenant, ses envies, ses rêves les plus anciens, et les plus chers, devant tant d'inconnus ? S'ils avaient été seuls, elle n'aurait certainement eu aucun mal à le formuler, parce qu'elle savait pouvoir face à un rire moqueur, ou à un refus net. Mais face à plusieurs, elle n'était pas certaine de faire le poids. Elle avait cette petite boule au fond de la gorge, cette légère angoisse quant à leurs réactions. Elle était écoutée de toutes parts, elle le savait. Elle était le centre de l'attention, et cela lui déplaisait. Inspirant profondément, elle décida de faire abstraction. Elle devait se concentrer sur Enrico. Après tout, elle était venue pour lui, et rien que pour lui.

 - Mon rêve serait de partir en mer, avec toi. D'aller au delà de l'horizon, et de voir le monde, comme je ne l'ai jamais vu.
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MessageSujet: Re: L'appel du large [Rico]   L'appel du large [Rico] I_icon_minitimeJeu 6 Aoû 2015 - 20:48

La réponse de Smeralda avait été anticipée par Enrico. A l’instar de son agacement, qui était compréhensible. Il ne savait pas vraiment si Olivia était une fille facile, mais il se souvenait très bien de la nuit qu’il avait passé avec. Les gars l’avaient saoulé pour lui donner du courage, et l’avaient presque envoyé vers elle comme on jetterait une pierre par-dessus un mur. Une tradition dans les équipages suderons ; le plus jeune des matelots, dès son premier voyage en mer, devait débusquer la fleur rare et se lier à elle. Une pratique qui l’avait mené à séduire la belle serveuse, alors que l’alcool l’enhardissait et qu’elle se laissait tout doucement tenter par une aventure éphémère. Jeune, ivre, inexpérimenté… Le cadre n’avait pas été extrêmement romantique. Malgré cela, la mémoire était encore vivace, et il s’en souvenait comme si c’était hier. Un cap de sa vie, certes. Et un cap important.

A mesure que sa fille parlait de son ressenti, l’amiral commençait à être mal à l’aise. La jeune enfant semblait animée de sentiments bien nobles pour un père absent, et ce qu’elle attendait de lui donnait un peu le vertige à Enrico. Les mots avaient ce pouvoir étrange, lorsqu’ils sortaient de la bouche de certaines personnes. Smeralda le faisait se sentir coupable. Minable. Pire encore, il avait l’impression d’avoir raté quelque chose d’important, et de ne pouvoir retourner en arrière pour arranger cela. C’était frustrant, et pouvait entamer le moral et la résolution du plus fier combattant. Les remords coulaient la plupart du temps sur Enrico comme la pluie sur les voiles d’un navire. Mais ici, maintenant, il n’avait qu’une seule envie, lui demander pardon. Faire preuve de pitié et de tristesse pour autrui était rare chez cet homme plein d’amertume enfouie sous une couche de fierté. Seule la famille avait cet effet sur lui. Et Smeralda venait justement d’y rentrer par la grande porte…

La dernière phrase l’avait scié. Cloué sur place. Il la regardait avec cette expression à la fois troublée et avec les yeux embués par l’émotion. Notre intrépide baroudeur lâcherait-il une larme ? Un homme qui n’en avait même pas versé lorsque sa jambe lui avait été odieusement arrachée ? Les autres membres de la famille, attablés, avaient écouté ces révélations, mais n’avaient pas vraiment réagi, plus tournés vers la réaction d’Enrico. Que répondre à cela ? Qu’est-ce qu’il allait lui dire ? Sentir tous ces regards posés sur lui l’aiguillèrent et le dérangèrent. Il inspira profondément, afin de se reprendre un peu, puis demanda à tous d’une voix grave, mais trahissant un soupçon d’émotion retenue :

« Albano, prends tout le monde et allez dans vos appartements. J’aimerais être seule avec ma fille. »


Le mot était sorti facilement, et pourtant, il trouvait sa prononciation bizarre pour sa bouche et les sonorités étranges lorsqu’elles résonnaient dans ses oreilles. La situation était surréaliste pour le pragmatique amiral de Langehack. Comme une vision onirique, une illusion du passé. Un fantôme qui reviendrait le hanter. Une fois tout le monde dehors, sans réellement faire d’histoire, et sans en avoir trop le choix, Enrico se gratta le front machinalement. Il était avachi sur sa chaise et essayait de se remettre de tout ce que sa jeune enfant venait de dire. Il soupira un instant, puis s’appuya sur ses deux accoudoirs.

« Je… Je ne savais pas. Je n’étais même pas au courant de ton existence. Ce n’est pas une nouvelle qui se digère en riant un bon coup, et je suis désolé si je t’ai mise un peu mal à l’aise avec mes silences et mes réflexions… »


Il cherchait de moins en moins ses mots. Pourtant, il arrivait au moment qu’il avait le plus appréhendé, et qu’il détesterait à coup sûr, au moins autant qu’elle.

« Mais je ne peux pas t’emmener sur un bateau. Tu comprends ? Je suis amiral, j’ai des responsabilités… je suis également seigneur, et je ne peux faire ce que je veux. En ce moment… C’est impossible. »


Comme pour éviter de voir son visage se remplir de tristesse, il rattrapa vite sa dernière phrase en se levant un peu de sa chaise.

« Mais ! Mais… Si tu souhaites naviguer, je connais du monde dans le milieu. Va à Boniverdi, voir Felipo Sacrizi. C’est un ancien capitaine de la marine, mais il s’est retiré à présent. Il a gagné une fortune aux jeux, et possède quelques bateaux qu’il loue à des personnes qu’il connait. Va le voir de ma part, et prends l’une de ses embarcations. S’il demande à ce que tu payes, dis-le de me contacter pour que je m’arrange avec lui sur une somme. Je… Je pense que je te dois bien ça… »


Il était un peu fiévreux. Refuser cette simple et unique faveur à sa propre fille l’avait mis dans tous ses états. Il espérait seulement ne pas l’avoir blessée…

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MessageSujet: Re: L'appel du large [Rico]   L'appel du large [Rico] I_icon_minitimeDim 9 Aoû 2015 - 22:14

Lorsqu'elle se retrouva de nouveau seule avec son père, lorsqu'ils ne furent plus le centre de l'attention, elle put enfin recommencer à respirer normalement. Elle se rendit alors compte qu'elle avait retenu son souffle jusqu'à ce qu'il parle. Et lorsqu'il avait dit qu'il voulait être seul avec sa fille, elle avait failli ne pas se reconnaître. Parce qu'elle n'avait pas l'habitude d'être la fille de quelqu'un. Même son père adoptif ne l'avait jamais appelé ainsi. Elle était la fille bâtarde de sa mère, de celle qu'il avait décidé d'épouser, mais en aucun cas elle avait été la sienne. Alors, aujourd'hui, lorsqu'elle entendait dire qu'elle était la fille de cet homme, cela sonnait étrange. Mais d'une bonne façon, puisqu'elle avait chaud au cœur. Elle n'était plus cette bâtarde à qui il manquait un parent. Elle avait retrouvé son père, même si pour cela, elle avait quitté sa mère. Seulement dans ce monde, un père avait beaucoup plus d'importance qu'une mère. Si elle n'oubliait pas d'où elle venait, et si elle comptait y retourner un jour, avant qu'il ne soit trop tard, elle était heureuse d'être partie. Parc que, jusqu'à maintenant, elle avait trouvé ce qu'elle cherchait. Une fois seule avec lui, elle dut faire face à des excuses auxquelles elle ne s'attendait absolument pas. Pourquoi s'excusait-il ? Après tout, c'était elle qui était venue le déranger ici, elle qui était venue le trouver et bousculer sa vie. Lui n'était pas responsable de grand chose, si ce n'était de ses frasques d'antan. Mais aujourd'hui, elle était la seule et unique cause de cette gêne et de ces silence, alors il n'avait pas à s'excuser. Elle voulu le lui dire, mais il enchaîna aussitôt sur le fait qu'il ne pouvait l'emmener sur un bateau.

Parce qu'il avait des responsabilités. Et parce que finalement, il n'était pas vraiment marin. Il était amiral et seigneur. Sme avait toujours pensé que ces gens là, ces gens qui avaient le pouvoir et qui prenaient des décisions, pouvaient faire ce que bon leur semblait. Apparemment, ce n'était pas le cas. Mais le pire, le pire de tout, c'est qu'il essaya tout de même de lui faire plaisir, et de la faire monter sur un bateau. Plus il parlait, plus le visage de la jeune fille se refermait. Il ne comprenait pas. Il ne comprenait pas qu'elle ne voulait pas de cela, qu'elle ne voulait pas absolument monter sur un bateau, qu'elle ne voulait pas de son argent. Etait-ce concevable d'ailleurs ? Etait-ce réaliste ? N'aurait-elle pas du demander de quoi vivre paisiblement pour le reste de ses jours, sous peine d'un scandale, et retourner auprès de sa mère ? Peut-être. Peut-être qu'elle aurait du. Parce qu'elle venait apparemment de demander l'impossible. Alors ce fut d'une petite, toute petite voix qu'elle répondit :

- Excuse moi, c'était idiot de te demander ça, je le savais. Je savais bien que tu refuserais certainement et...

Sa gorge se noua violemment, et lorsqu'elle essaya de continuer, des larmes vinrent embuer son regard. Elle cligna violemment des yeux pour les chasser, inspira profondément pour déloger la boule d'émotions au creux de son estomac, et reprit, d'une voix mal assurée :

- Ce n'est pas tant la navigation, ni ton argent qui m'intéressent. Je crois que dans tout ça, ce que je voulais vraiment, c'était partager quelque chose avec mon père, tu sais, comme n'importe quel autre enfant, et... Je me rends compte que tu es très occupé, et que je ne peux pas débarquer ici, en te demandant d'être ta fille, et d'exiger que tu me donnes du temps. Je suis désolée, je n'aurais pas du venir.

Elle avait espérer ne pas bégayer ses derniers mots, et ça n'avait pas été le cas. Dans la foulée, elle s'était levée, et avait esquissé un pas vers la sortie. Elle n'avait plus qu'une envie, c'était fuir cet endroit. Parce que si elle restait plus longtemps, elle avait peur de voir d'autres de ses espoirs et de ses rêves s'écrouler. Ce qu'elle ne voulait surtout pas.
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MessageSujet: Re: L'appel du large [Rico]   L'appel du large [Rico] I_icon_minitimeMer 19 Aoû 2015 - 18:35

Bien évidemment, sa réponse ne plut pas à sa fille, il le vit au premier coup d’œil. Des larmes perlèrent dans les yeux de la jeune Smeralda, et son visage était empreint d’émotions violentes et tristes. Le chagrin qu’elle pouvait éprouver en cet instant donnait des frissons à Enrico. Tout ce qu’il avait voulu éviter finit tout de même par arriver ; il avait fait pleurer sa fille. Quelque peu désemparé, il écouta ce qu’elle voulait lui dire après qu’il eut refusé sa demande. Elle bégayait ses paroles, et dans sa gorge se ressentait toute la tension qu’elle accumulait en elle. C’était déchirant de l’entendre parler ainsi. Mais pire encore furent les mots. Ils tranchaient l’air comme une rapière, criant de vérités et de réalités. Non, il ne pouvait pas s’occuper d’elle. Oui, elle ne pouvait exiger qu’il lui donne du temps.

Il pouvait toujours la reconnaître, mais là encore, son père interviendrait sans nul doute. Pas bon pour la réputation, pas bon pour un futur mariage… Il trouverait toutes sortes d’arguments valides pour éviter qu’il ne le fasse. Enrico savait que son père avait raison, mais malgré tout, il en avait envie. Il voulait qu’elle soit légitime. Peut-être était-ce son plaidoyer qui l’avait convaincu ? A moins que ce ne soit sa terrible ressemblance avec Letizia, sa mère ? Peu importe, il était face à son propre enfant, à qui il ne pouvait qu’accorder quelques instants et quelques piécettes. La vie était injuste, et ça il le savait depuis longtemps. Mais ici, cette phrase ne lui avait jamais semblé aussi vraie et aussi douloureuse. Ironiquement, il avait cherché à devenir noble, à devenir un puissant, et c’était à présent qu’il le regrettait, serré des sangles de cette même noblesse qui lui demandait d’éviter tout scandale. Ha ha.

Le fier amiral se sentait tout à coup bien petit et bien bête. La jeune enfant se leva, et fit mine de sortir. Le sang du marin ne fit qu’un tour, et il se leva bien vite, tendant sa main devant lui.

« Non ! Attends… »

Elle s’immobilisa un instant, la main sur la clinche de la porte. Il se dépêcha de la rejoindre, faisant résonner sa jambe de bois sur le sol de pierre. Il voulut placer cette même main tendue sur l’épaule de Smeralda, mais n’osa la toucher.

« Je suis désolé de tout ceci, et… tu m’as ému. Je ne peux pas être ton père, et je ne peux naviguer avec toi… »

Il s’appuya contre le mur, baissant la tête.

« Mais par Néera, je t’en supplie, ne dis pas que c’est ta faute. C’est la mienne. Et si tu me pardonnes un jour, alors mon cœur en sera soulagé. »

Il releva la tête, mais resta appuyé contre le mur. Avec un soupir, il déclara finalement :

« Tu ne veux peut-être pas de mon argent, mais ici, je t’en conjure, prends au moins quelque chose. Je ne peux pas te laisser vagabonder comme ça sans le sou ! Je te donnerai aussi un fleuret, ça devrait te correspondre… »

Il n’aurait peut-être pas le temps de lui apprendre à s’en servir, mais il connaissait le danger des routes, surtout depuis que la guerre avait mobilisé la plupart des hommes. Savoir sa fille en sécurité le rendrait sûrement moins tracassé. Il montra sa jambe de bois.

« Je t’apprendrai seulement les bases pour les prochains jours, pour que tu ne finisses pas comme moi. Qu’en penses-tu ? »

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MessageSujet: Re: L'appel du large [Rico]   L'appel du large [Rico] I_icon_minitimeMer 19 Aoû 2015 - 22:05


Elle s'apprêtait à franchir la porte lorsqu'il la retint. Un instant, elle regagna ce stupide espoir, celui qu'il change d'avis pour finalement lui accorder du temps, mais ses paroles le brisèrent définitivement. L'enterrèrent bien profondément, de sorte à ce qu'il ne ressorte jamais. Et quand il finit par se blâmer... Smeralda ne sut que dire. Bien sûr qu'il était coupable ! Bien sûr que tout ceci était arrivé à cause de lui ! Puisque sans lui, elle n'existerait pas. Sans lui, elle n'aurait jamais vu le jour. Mais c'était de sa propre faute si elle avait espéré. C'était elle qui s'était construit une vie, qui s'était construit des rêves. Elle qui avait été assez innocente et naïve pour pense que tout était bon dans ce monde, et qu'elle ne pourrait jamais plus être malheureuse si elle quittait la taverne qui l'avait vue grandir. Elle l'écouta finir, avant d'ouvrir la bouche pour répondre :

 - Pour quoi voudrais-tu que je te pardonne ? Pour quoi penses-tu devoir demander pardon ? Pour m'avoir donné la vie ? Pour m'avoir fait rêver ? Pour m'avoir donné envie de voyager ? Je t'en prie, ne sois pas ridicule. Oui tu m'as laissée derrière, et oui tu as été absent. Mais tu ne connaissais pas mon existence jusqu'à aujourd'hui. Je ne peux rien te pardonner, parce qu'il n'y a rien à pardonner.  

Lorsqu'elle prononça ces mots, elle ne sut si elle les pensait vraiment. Elle ne sut s'ils étaient sincères, ou s'ils étaient seulement sensés. Mais peu importait. Elle se devait de le dire, parce qu'elle ne voulait pas détruire une partie de l'homme qu'il était, parce qu'elle ne voulait pas entrer dans sa vie pour tout briser avant de repartir. Non, elle n'en avait pas envie. Au contraire. Enrico lui était réellement sympathique, et il se comportait certainement de la meilleure manière qu'il puisse. Alors elle se devait de faire de même. Rapidement, elle réfléchie à sa proposition par rapport à l'argent, et par rapport au fleuret. Il était vrai que les routes étaient dangereuses. Et que les autres attisaient sa méfiance plus que jamais. Pouvait-elle réellement refuser son offre ? Après tout, elle avait demandé de son temps, et il le lui en proposait. Peu mais tout de même.

 - Très bien, si tu veux que je prenne quelque chose, je le prendrai. Seulement, je ne suis pas là pour quémander, je voulais que tu le saches. Maintenant, je serais ravie d'accepter ce que tu me proposes, et ce sera avec plaisir que j'apprendrai les bases avec toi !

On pouvait sans peine déceler un semblant de joie dans sa voix. A vrai dire, elle était ravie qu'il lui propose de lui enseigner quelque chose. Et de lui donner quelque chose. Non pas quelque qu'elle avait demandé, mais quelque chose qu'il avait voulu qu'elle ait. Un léger sourire vint se poser sur ses lèvres, et elle continua sur sa lancée :

 - Pour les prochains jours, ça veut dire que je reste ici encore un peu ? Ou que je dois trouver quelque part où rester durant ces prochains jours ? Et, sinon, ta jambe de bois... je pense que je l'aime bien !

Juste après avoir dit ce qui lui passait par la tête, elle se mordit la lèvre. Avait-elle bien fait de pas tenir sa langue ? Ne venait-elle pas de dire une énorme bêtise ? Maintenant que c'était dit, elle ne pouvait de toutes façons plus le ravaler, mais elle n'avait aucune envie de briser à nouveau l'ambiance qui avait regagné une certaine légèreté. Voulant effacer ce qu'elle avait peut-être dit de mal, elle enchaîna, tant bien que mal :

 - En tout cas, je vois que tu fais des efforts pour moi, et j'en suis vraiment très honorée. Tu... tu m'as accordé du temps, tu as accordé un certain crédit à mes propos, tu as accepté de me voir, et je dois dire que cela me fait énormément plaisir. Je ne sais pas si beaucoup d'autres l'auraient fait. Et, peut-être que tu ne peux pas exaucer tous mes souhaits, mais au moins t'ai-je rencontré.

Il était vrai que si elle avait été déçue, si elle s'était un instant laissée emporter par des sentiments bien trop forts, elle était aussi extrêmement contente d'avoir pu mettre un visage, et une voix, sur le personnage qu'était son père. Et de cela, elle lui serait toujours reconnaissante.
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MessageSujet: Re: L'appel du large [Rico]   L'appel du large [Rico] I_icon_minitimeMar 25 Aoû 2015 - 11:32

Un sourire vint finalement orner les lèvres d’Enrico lorsqu’elle accepta d’être formée par son père. Elle avait su trouver les mots pour qu’il ne se sente plus aussi coupable qu’avant, et ils pouvaient dès à présent passer un peu de temps ensemble. Cette perspective remit du baume au cœur de l’estropié, et il se ressaisit. Se dirigeant vers le fond de la salle, il s’approcha d’un râtelier auquel pendaient différentes lames. Il se saisit d’un premier fleuret, puis en regarda le fer. Insatisfait, il se saisit d’un autre, qu’il soumit au même test. Il acquiesça silencieusement, puis le présenta à Smeralda.

« Voici une très bonne arme pour commencer ton entraînement. Suis-moi, et écoute-moi bien, car ce que je te dirai pourra te sauver la vie, jeune fille ! »


Ils se dirigèrent dans la salle d’armes, là où l’entraînement pourrait commencer. Il n’était pas maître d’armes, mais il était un fin duelliste. Peut-être aurait-il même le temps de lui apprendre ses bottes et astuces. Une fois le couloir passé, deux battants menaient à l’intérieur d’une grande salle rectangulaire, avec quelques petites fenêtres pour donner de la lumière, ainsi que des torches lorsque la luminosité n’était pas suffisante. Dès qu’il le pouvait, Enrico venait s’y entraîner, afin de conserver son niveau. Il se mit en face de Smeralda, prenant position. Il n’avait pas la même garde que les autres, adaptée à son handicap. Aussi, la première leçon porterait sans nul doute sur la tenue.

« Premièrement, Smeralda, il faudra que tu apprennes à te tenir comme une escrimeuse. La tenue est sûrement la chose la plus importante, car sans elle, tu n’as pas d’assise correcte, et face à ton ennemi, tes chances s’amoindrissent. »


Il dégaina sa colichemarde, puis s’approcha de Smeralda afin de lui montrer la position à adopter.

« Allez, commençons par le commencement. »




Le père et sa fille s’entraînèrent durant quelques jours, le temps nécessaire à la jeune femme pour maîtriser l’art délicat des armes, sinon ses bases. Elle était sur la bonne voie, avait une garde correcte, et connaissait son arme par-cœur. Elle s’était montrée extrêmement appliquée durant ce laps de temps passé avec son père. Peut-être était-ce plus motivant de pouvoir passer du temps avec lui ? Ou bien de lui montrer ce qu’elle savait faire ? La reconnaissance paternelle était toujours recherchée des enfants. L’orgueil paternel, quant à lui, risquait de prendre pied dans la tête d’Enrico, trop fier de voir sa fille apprendre quelque chose si vite. Le soir, elle se reposait dans la Grande Salle, en dînant avec les autres membres de la famille. Elle apprit à connaître chacun de ses oncles, sauf Piezarre toujours à Nelen. Son cousin était gêné en sa présence, mais sa cousine Letizia n’arrêtait pas de tourner autour en écarquillant les yeux. Sûrement venait-elle de trouver un modèle sur lequel se calquer.

Ce vieil aigri d’Hernán, quant à lui, se fit rare aux dîners. Il avait tonné une fois dans les appartements d’Enrico, lui disant ce qu’il pensait de cette bâtarde et de la honte familiale qui pouvait en découler. L’amiral souhaitait de tout cœur qu’elle n’en ait rien entendu. Ce fut la plus grande dispute entre lui et son père depuis des années, et elle avait fini sur une gifle monumentale dont Enrico sentait toujours la douleur dans sa joue. Il ne pouvait répliquer, non. Pas face à son père. Impossible. Hernán faisait partie de ces gens intimidants au naturel, mais plus encore, c’était le respect qui avait forcé Enrico à retenir sa main. Il avait préféré laisser couler. Car lorsque le vieux ronchon était en présence de Smeralda, il perdait tous ses moyens, et s’enfonçait dans un mutisme morbide. Il n’y avait sûrement pas que cette histoire de bâtard qui le taraudait à propos de la gamine…

Pourtant, le temps passa, et les jours commençaient à décliner, lentement. On appelait à présent Enrico à Diantra, où le duc avait besoin de lui. Paré à répondre à l’appel, il s’était cependant penché vers sa fille.

« Smeralda, je dois m’en aller de Béranthe. Cela signe sûrement l’arrêt de ton entraînement, même si tu as encore beaucoup de choses à apprendre. Le duc d’Anoszia requiert ma présence, et je ne peux m’attarder en ces lieux. J’ai loué un poney pour toi, et j’y ai mis quelques affaires qui te seront peut-être utile, ainsi que ton fleuret et une petite bourse. Voyage vers où tu veux mais… si un jour tu souhaites revenir, sache que je serais ravi de t’accueillir en ma maison, où qu’elle se trouve. »

Il eut un sourire bienveillant, quoiqu’un peu triste. Il avait fini par s’attacher à cette jeune fille pétillante de vie. Et à présent, il devait lui faire ses adieux, qu’il n’espérait pas définitifs…
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MessageSujet: Re: L'appel du large [Rico]   L'appel du large [Rico] I_icon_minitimeJeu 10 Sep 2015 - 13:48


Assidûment, elle suivit les cours que son père voulait bien lui donner. Elle appliqua chaque conseil à la lettre, et si elle n'avait jamais vraiment été portée sur les armes, elle n'en fit pas pour autant tout un drame. L'important était qu'elle passe du temps avec lui, qu'elle lui prouve combien il pouvait être fier de l'avoir comme fille. Officieusement, bien entendu. Accaparée par son entraînement, elle en oublie presque que ce dernier aura une fin. Une fin qui approche plus rapidement qu'elle ne l'aurait voulu. Lorsqu'il la congédia, son cœur se serra légèrement. Elle avait presque fini par se sentir bien, là, avec Enrico, et les membres de sa famille. Elle ne se sentait pas forcément à sa place, elle était loin de les considérer comme sa propre famille, mais elle n'était plus si mal à l'aise. Alors, dans un geste totalement inattendu, spontané, elle le serra contre lui, un bref instant. Sur le moment, elle n'avait eu aucune hésitation, parce que son étreinte venait du cœur, et parce qu'elle n'avait pas pour habitude de réfléchir énormément avant d'agir. Son instinct était assez fiable, et elle se reposait sur lui sans aucune hésitation. Mais l'étreinte ne dura pas longtemps, puisqu'elle la brisa rapidement, pour pouvoir le regarder dans les yeux.

 - Ne t'inquiète pas pour mon entraînement. Je suis consciente que tu as d'autres priorités, et d'autres devoirs. Tu m'as déjà donné bien plus que je ne l'espérais.

Elle sentait le reproche involontaire dans son ton, elle sentait qu'involontairement, et égoïstement, elle lui en voulait de ne pas être sa priorité. De ne l'avoir pas été durant toutes ces années. Mais cela était injuste, parce qu'il n'avait jamais eu vent de son existence, et parce qu'elle n'avait été, finalement, qu'une erreur de jeunesse. Et surtout, elle n'avait aucune envie de lui reprocher quoique ce fut en cet instant. Alors rapidement, elle essaya de se rattraper, en espérant qu'il ne s'attarderait pas trop sur ses premiers propos :

 - Mais, ce que je voulais réellement te dire... Je te remercie. Pour tout ce que tu as pu faire pour moi ces derniers jours. Pour le temps et l'attention que tu m'as accordé. Et pour ce poney et ces affaires que tu veux me voir emporter. Juste, merci.

Un sourire s'était petit à petit dessiné sur ses lèvres. Elle lui était reconnaissante, oui. Parce qu'il avait été celui qu'elle n'aurait jamais pensé avoir pour géniteur. Parce qu'il ne l'avait pas repoussé, malgré les protestations de son père, et parce qu'il lui avait donné du temps. Du temps rien que pour eux. Chose qu'elle espérait seulement, tout en s'attendant à se voir rejetée, à se voir reniée. Mais il ne l'avait pas fait, et mieux encore, il l'invitait à croiser sa route de nouveau, si elle en avait le besoin, ou l'envie. Il l'acceptait officieusement dans sa vie, et cela l'emplissait de joie bien plus qu'elle ne pourrait jamais le montrer. Un soupir franchit ses lèvres lorsqu'ils durent se séparer pour de bon. Elle avait vécu ces derniers jours intensément, sans penser au lendemain. Et aujourd'hui, non seulement elle devait quitter son père, mais elle devait trouver une destination. Cela serait sans aucun doute la chose la plus dure à faire, parce qu'elle avait toujours vu la rencontre avec son géniteur comme le but ultime de sa vie, comme le rêve inatteignable. Alors maintenant qu'elle l'avait fait, maintenant qu'elle l'avait vu, que lui restait-il ? Qu'allait-elle bien pouvoir faire ? Une chose était certaine, elle ne retournerait pas à Velmone. Pas encore. Parce que si elle n'avait aucune idée de ce qu'elle allait bien pouvoir faire, elle savait avec certitude qu'elle avait encore beaucoup à faire. Ne restait plus qu'à trouver quoi.  
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