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 Au chevet d'un Royaume moribond [Kahina, Cléophas]

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Maciste de Soltariel
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MessageSujet: Au chevet d'un Royaume moribond [Kahina, Cléophas]   Au chevet d'un Royaume moribond [Kahina, Cléophas] I_icon_minitimeDim 30 Aoû 2015 - 17:31

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Kahina d'Ys
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MessageSujet: Re: Au chevet d'un Royaume moribond [Kahina, Cléophas]   Au chevet d'un Royaume moribond [Kahina, Cléophas] I_icon_minitimeDim 30 Aoû 2015 - 21:32

L’avait-il seulement remarqué ? Alors que Maciste accordait à tous et chacun leurs titres respectifs, Kahina ne l’avait pas encore entendu la présenter autrement que comme sa femme ; c’était la rancœur qui parlait, voulait-elle croire, pas son envie inavouée de la déposséder de tout ce qu’elle avait gagné sans son concours. Se voyait-il Gardien du Royaume, espérait-il présider le Conseil de Régence, la voyait-il piégée dans son ombre à lui, qui s’étendait partout où l’on reconnaissait l’autorité de la Cour qu’elle avait su bâtir sans lui ? Par deux fois, il lui avait promis de la considérer toujours comme son égale, mais il n’en demeurait pas moins un homme et un chevalier et un seigneur. Sans doute s’imaginait-il qu’il suffisait de l’écouter, de peser son avis avec toute l’objectivité dont il pouvait se targuer. Le fol ! Il n’aurait pas pu plus lourdement se leurrer. À moins que ce ne fût elle qui, à force de flairer partout et en tout ses ennemis, s'enferrait dans une paranoïa sans fondement. Si seulement elle avait pu se réjouir et sourire, la première fois qu’il avait posé ses yeux hagards sur elle ! Au lieu de quoi, elle lui avait offert des crocs et des serres, l’avait saisi à la gorge et c’était miracle qu'il n'eût pas suffoqué.


« Maciste veut voir le Roi, » lui avait appris Camélia, quelques heures plus tôt. Elle avait senti ses lippes se tordre toutes seules en ce qui avait pu paraître comme un sourire, ce même sourire qu’elle avait offert au Duc quand elle avait entendu le même souhait sortir de sa bouche à lui. Comment la pharétane avait eu vent des projets du maître de céans, Kahina n’en avait aucune idée, et n’en avait finalement cure. Jusqu’alors la cible privilégiée des humeurs de sa maîtresse, l’adolescente avait gagné la paix car, de fait, Kahina lui devait beaucoup : c’était elle qui, croisant la route du petit page, avait couru la prévenir. Sans Camélia, Manso aurait pu bercer son suzerain de tous ses vilains mensonges. Le cours des événements s’en serait retrouvé bouleversé. Penser au Sénéchal la mettait encore en rage, la trahison du sire, qu’elle avait cru fidèle et dévoué, lui retournait encore les entrailles.


Bien entendu, il niait, le ladre, toutes mauvaises intentions ; mais comment le croire quand il avait voulu, par tous les moyens, la tenir éloignée au plus fatidique des moments ? Puis, elle pensait à la colère froide de Camille, quand cette dernière était venue la trouver. L’Aphelloise l’avait sommée de libérer son frère et — pire ! — l’avait menacée des pires représailles si elle ne s’exécutait pas. Oh ! Kahina n’était pas surprise. Elle avait prédit que la diablesse s’enhardirait un jour et irait jusqu’à la défier. Elles étaient trop semblables pour qu’il en allât autrement, mais c’était bien beau de savoir, quand venait le temps de régner, la réalité pouvait se montrer cruelle. Camille fédérait autour d’elle des partisans dont elle ne pouvait se passer, pas alors que le simple fait que Maciste eût seulement ouvert les yeux faisaient tout vaciller autour d’elle. La Princesse des Deux Soleils avait dû céder et il n’était rien qu’elle haït que le regard que lui avait lancé son aînée avant de se retirer.


On disait les guerres des hommes violentes et sanglantes, mais c’était mal connaître les femmes que de croire qu’elles n’étaient pas capables des pires atrocités. Sans doute n’y aurait-il pas de mort, dans cette querelle qui s’annonçait ; mais des destinées brisées, ça ! Camille finirait sa vie prisonnière d’un quelconque couvent, à prier sa Déesse putain chaque instant de soleil que l’Unique ferait.


« J’ai besoin de Maciste, avait-elle avoué à Aléandre deux jours plus tôt. J’ai besoin de cette légitimité dont ils le gavent à l’en faire dégobiller et qu’ils m’ont toujours refusée. » L’enfant avait été surprise par le ton amer de sa tutrice, beaucoup moins par les mots qui avaient suivi : « Mais crois-moi, il découvrira très vite qu’il a besoin de moi plus encore. »


Alors, quand le Duc s’excusa de ne pouvoir saluer son Roi ainsi qu’il le devait, ce fut elle qui répondit : « Sa Majesté te pardonne. » Elle. Pas Cléophas, bien qu’il eût pu en toute légitimité. Pas Bohémond, qui parlait à peine. Elle, la Gardienne du Royaume. Poussant l’audace jusqu’au bout, elle se leva et, d’une main douce, encouragea Bohémond à marcher jusqu’au chevalier. L’attrapant sous les bras, elle le hissa sur les draps et l’enjoignit à tendre une petite main sur laquelle trônait, arrogante bien que trop grande encore, la chevalière de sa lignée.



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Cléophas d'Angleroy
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MessageSujet: Re: Au chevet d'un Royaume moribond [Kahina, Cléophas]   Au chevet d'un Royaume moribond [Kahina, Cléophas] I_icon_minitimeMar 1 Sep 2015 - 14:06


« Cela va beaucoup mieux Serafein ! » disait-il en se couvrant le nez.
« Tu te fiches de moi ? Tu penses vraiment que je vais te croire ? »
« La chair a meilleure mine, mais elle suinte toujours. Je vais devoir la laver encore. »
« Faites-la bouillir s’il le faut et qu’on en finisse. »

Il opina du chef, penaud, ne sachant pas s’il fallait répondre positivement ou non et alla se saisir de l’aiguière, encore fraîche et remplie à ras-bord d’eau de rose et de vinaigre. Puis le rituel recommença. Un page te servit une boisson à la myrrhe, on fit brûler des aromates dans les brûle-encens, sur un drap blanc on étendit ton bras fripé par les flammes et on plaça entre tes dents un nouveau morceau de gaze imbibé de camphre et de romarin. Il ne fallut pas attendre dix minutes pour que ton esprit s’échappe et qu’on versa l’acide breuvage sur la meurtrissure qui te servait de chair. Parfois quelques décharges te tiraient à la réalité de ce qui se passait autour de toi, avant de te laisser repartir dans tes immensités éthériques. Lorsque tu repris conscience enfin, ton bras était nouvellement bandé et la plaie ne suintait plus.

Tu ne pouvais plus supporter ces moments qui t’épuisaient chacun plus que le précédent. Tu t’accrochais au seul espoir de savoir qu’un mage effectuait de sombres rituels pour te délivrer de cette malédiction inventée par tes propres ancêtres, ce feu de Pharet qui ne s’évapore pas et sature jusqu’à les transformer toutes les matières qu’il touche. Tu n’étais pas encore vêtu, aussi ce fut un page du Vestiaire qui vint te délivrer la nouvelle : le Duc te cherchait. L’œuf dur que tu t’apprêtais à croquer t’échappa des mains et vint s’écraser contre le sol dallé de marbre en une explosion de soufre et d’albumine. Maciste…tu n’avais croisé le luron que très brièvement dans les palais de Diantra, en ce temps qu’il fut nommé Amiral de la flotte. Après cela, tu l’avais cru mort jusqu’à ce que son épouse trop dévouée vint t’affirmer qu’il était bien vivant. Combien de litanies avait-on dû offrir en son nom pour qu’il sortît ainsi de sa torpeur ? L’idée te fit songer : peut-être Néera détenait-elle vraiment le secret de la vie…Une fois encore, on ne te laissa pas le temps de t’évader, ton propre chambellan importé du Val en ce semblant de pays te rassasiait les tympans de galères, de guerres, de Langehack, répétant par trop de fois le nom honni d’Anozsia, cette dynastie qui tissait comme l’araigne un réseau venimeux de toiles qu’on aurait vite fait d’arracher. D’un signe de la tête, le page s’en alla chercher de quoi t’habiller pour rencontrer cet homme qui s’était déclaré sans le savoir, protecteur d’un Roi qui ne le connaissait pas, ce Duc à la tête du royaume épuré de sa gangrène, enrichi de ses nobliaux et de ses notables, grouillant de sa plèbe travailleuse et affamée : il fallait le rencontrer, lui l’Amiral de ce fief sorti de l’océan qui se disait ton allié. Comme le page tardait, tu arpentais la loggia à sa recherche lorsque tu le vis revenir, désolé, vers toi portant avec peine un chiton terni par l’usage.

« Nous n’en avons pas d’autre Serafein, les lavandières n’ont pas eu le temps –

Il s’attendait à ce que tu le frappes. Au lieu de cela, tu te contentas de saisir le vêtement, l’examinant sous toutes ses coutures. C’est un habit que tu connaissais bien, il passait dans le Val pour avoir été porté par tous les princes avant que le pays fût annexé. Depuis on l’avait laissé tomber dans l’oubli, relégué au rang des archives et autres vieilleries qu’on ne souhaitait déterrer, mais toi, tu l’avais sorti de l’ombre, étudié de nouveau et fièrement arboré comme aux temps d’autrefois. C’est vrai que le tissu était terne, jauni au niveau des aisselles et du dos, brun au niveau des chevilles. Il y avait sur la loggia quelques brasiers que l’on entretenait –tu n’avais jamais vraiment compris pourquoi- aussi, sans que personne comprît, tu te dirigeas vers l’un d’entre eux et jeta la tunique aux flammes. Tes yeux étaient rivés sur ce ballet mystique de la neige et de l’écarlate, sur le crissement des bûches et l’odeur d’huile chauffée qui empénétrait tes narines. La maigre assistance s’était approchée, contemplant le spectacle sans oser parler, sans comprendre non plus et c’est immobile qu’elle te vit te saisir d’un tison et sortir du feu le vêtement. Il était intact et blanc comme neige. Tu t’en saisis et alors qu’il fumait encore, tu le revêtis par-dessus la tunique de lin qui te servait d’habit de nuit.

« Allez me chercher un pallium. Ce que vous venez de voir, ne le dites à personne. »

Ils acquiescèrent docilement et trottinèrent sans mot dire. Tu le savais pourtant, tôt ou tard, ils finiraient par ouvrir la bouche et la chose se saurait au-delà des murailles invisibles du Val. Sous le pallium pourpre, accroché à ta ceinture, toujours ce petit encensoir de cuivre où quelques grains de benjoin rouge et quelques larmes de labdanum furent déposés. C’est ainsi embaumé que tu entras dans la chambre du Duc.

La pièce empestait l’agonie. Elle était lourde de toutes les poudres, baumes et onguents qui y avaient été concoctés, l’oliban peinant à masquer l’odeur de la mort rampante, s’accrochant aux tissus épais et rigides qui tapissaient les murs et les baldaquins. Tu étais seul encore, sans la duchesse ni Bohémond, profitant de ce moment de répit en tête à tête avec le convalescent. Vous partagiez tous les deux une souffrance similaire, mordante, ténébreuse et impitoyable à la seule différence qu’il s’était réfugié dans les mamelons de physiciens inexpérimentés, ces herboristes de pacotille qui pensaient venir à bout de ton mal à l’aide d’infusions et de barbarie. Ses yeux néanmoins laissaient entrevoir sa lucidité, qu’il reprenait peu à peu ; cet esprit naguère si vif, encombré d’un corps déliquescent te faisait peine à voir, mais une joie fébrile naissait en ton cœur. Avec son retour, Soltariel peut-être recouvrirait de sa force éteinte, écrasant les superbes et menant sur le trône le jeune Bohémond qui s’était retrouvé spolié de tout suite à l’insupportable révolte de quelques orgueilleux. Tu restas un moment assis, en silence, tentant de faire fi de cette intenable atmosphère d’hospice, te concentrant sur le chant des mouettes et des goélands qui te transportèrent aussitôt de l’autre côté de la presqu’île.

« Mon ami, je suis marri de vous voir encore ainsi touché par la maladie mais maintenant que vous êtes sur pieds, ou presque, il nous faut discuter de certaines choses urgentes que

L’irruption de la duchesse t’interrompit. Le front haut, quoiqu’elle ne fut pas grande, elle avança drapée de morgue, Bohémond à son côté. C’était à croire qu’elle avait savamment orchestré son entrée, usant du petit roi comme d’une marionnette à la louange d’une gloriole qu’elle ne s’était pas acquise. Ce petit roi, chétif et perdu dans des draps trop grands pour lui, connaissait-il au moins le visage de cette princesse avec qui tu avais pactisé ? Parmi ce simulacre de conseil, tu étais la seule face dont il avait souvenir lui que tu berçais encore à Diantra et promenais gaiement dans les salles. Un sentiment paternel était né vis-à-vis de ce petit qui te rappelait le tien mais surtout, en voyant ce Bohémond, tu ne pouvais t’empêcher de penser à son demi-frère, ce jeune Adrien à qui tu n’avais pas encore avoué la disparition de sa mère et dont tu étais le légitime gardien…

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MessageSujet: Re: Au chevet d'un Royaume moribond [Kahina, Cléophas]   Au chevet d'un Royaume moribond [Kahina, Cléophas] I_icon_minitimeDim 6 Sep 2015 - 12:11

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MessageSujet: Re: Au chevet d'un Royaume moribond [Kahina, Cléophas]   Au chevet d'un Royaume moribond [Kahina, Cléophas] I_icon_minitimeJeu 15 Oct 2015 - 20:19

S’il savait ce qu’il était advenu du Royaume, il songerait sans doute à se rendormir, pensais-tu. Qu’avais-tu d’autre à lui offrir que ruines, que pillages, que mâts brûlés ; que cadavres entassés, que maladies flottant dans l’air fétide d’une capitale éventrée de tous ses citoyens, de tous ses trésors, de toutes ses glorioles accumulées avec les âges, au fil des rois et des princes qui firent de Diantra ce qu’elle était devenue : cette rombière que la Péninsule entière admirait, parée de cailloux et de tissus multicolores pour cacher l’horreur de ses plaies. Il fallait bien qu’elle tombât un jour. Le Duc soporifé paraissait être bien au fait de la situation du Royaume. Savait-il qu'il n'en restait qu'un morceau, dont il s'était juré garant par la voix de son épouse ? Que derrière les collines et forêts du Nord, le boucher s'apprêtait sans doute à lancer d'autres armées, affamées et fébriles, vers d'autres remparts encore ? Qu'il s'arrogeait comme un malpropre une Couronne qu'il ne possédait que dans ses rêves et les laudats de ses courtisans qui n'avaient pas de scrupule à s'afficher comme des opportunistes et des parvenus ? Savait-il que dans les eaux de l'Olienne croisait le pavillon souillé de Langehack, que les avirons tapaient contre les crânes flottant des hommes du Roi ? Que le palais même et ses dômes noircis, s'était affaissé sur ses propres fondations, ne laissant à l'horizon diantrais que l'image béante d'un monceau de ruines ; cadavre de pierre d'une cité meurtrie ? De part et d'autre de cette langue de terre que les Hommes appelaient "demeure", on s'armait, on s'érigeait des palissades, on s'improvisait tantôt ambassadeur, tantôt conspirateur, tantôt commanditaire d'assassinats tant échoués que fâcheux. Le chroniqueur savait, lui, dans l'immensité de sa science, que ce temps n'était pas sans rappeler une époque reculée où les Hommes vivaient sans trône, ni Loi. Le Roi, unique trait d'union entre tant de peuples qui entretenaient entre eux des inimitiés viscérales, avait été bafoué, insulté, déshonoré. On avait reproché à un chétif enfant les torts les plus absurdes, le faisant passer pour l'instigateur d'une révolte dont il n'avait pas même conscience et dont il avait été une victime parmi tant d'autres. Eux qui avaient séparé une mère de son enfant, ils osaient blâmer ! Eux qui avaient souillé une terre du sang de ses fils, ils osaient insulter ! Eux qui avaient été traîtres jusqu'à trahir les serments qu'ils s'étaient prêtés à eux mêmes, ils osaient juger ! Les Dieux ne t'avaient pas laissé vivre sans raison et par leur grâce et avec l'aide du Duc, peut-être rendrais-tu au Royaume la gloire qu'il avait laissé couler depuis tant d'années. Le Duc était là, l'enfant dans ses bras, attendant une réponse de ta part tandis que le tout se bousculait dans ta tête.

« Le Royaume, ami, n’en est plus un. Les félons ont eu raison de l’ost royal qui avait été réuni à Chrystabel. J’ai vu de mes yeux le massacre de tant de soldats et n’en ai réchappé que par la grâce de Néera. La Reine-Régente, elle, crut bon de fuir vers sa natale patrie avec son petit enfant et une partie du trésor, tandis que je devais la rejoindre après un court passage à Diantra. Comme vous le savez, la capitale réserve son lot de surprises à ceux qui cherchent à la fuir. Le boucher et ses sbires, tout aussi sanguinaires qu’incapables se sont vu pousser des ailes ; ils allaient établir un siège et moi, j’allais organiser la résistance de cette ville éculée après en avoir organisé l’exode. La foudre frappa fort ce soir-là, trop fort. Je me souviens, j’ai été réveillé de ma couche par les cris et la fumée, cette odeur métallique collant à mes muqueuses, je savais que les réserves de feu de Pharet avaient pris feu. Néera a cru bon de me sauver des flammes, non sans séquelles, tandis que le reste des citoyens quittaient Diantra pour rejoindre les terres sauves de votre Duché et de mon fief derniers bastions avec la contrée scylléenne de la Couronne. Vos souffleurs ont soufflé vrai. »

Il abordait un sujet délicat. Celui de cette famille impie et avide qui se raccrochait à tous les râteliers, tentant d’irriguer de son sang une péninsule plus désunie que jamais. Pouvaient-ils vraiment croire, ces ydrilotes, qu’une semence impure pouvait engendrer autre chose que des fruits pourris ; que l’ivraie elle-même pouvait porter du fruit ? Cet Oschide, ce superbe parjure qui se pavanait tel un paon dans une cour de lapins, cet Oschide qui avait trahi tous les serments pour se hisser par l’entrecuisse sur le trône d’un Duché qui ne voulait pas de lui, cet Oschide qui avait saisi les vies de marins du Roi et qui continuait de faire insulte à tout ce que la Couronne possédait de dignité, cet Oschide enfin qui se cachait derrière son patronyme pour s’autoriser les exactions les plus honteuses ; cet Oschide demeurait impuni. Et tu comptais par tous moyens remédier à cette injustice et compléter en ce monde ce qu’il manquait au châtiment divin.

« Il est vrai qu’Oschide est une insulte à votre seule dignité puisque son père n’est nul autre que votre Grand Argentier et qu’il ne semble pas se soucier du fait que son fils a coulé les navires de son Roi. Au contraire, il se repaît de pareilles iniquités comme l’on se divertirait dans une arène et applaudit en secret les faits d’esbroufe de son rejeton. S’il n’en tenait qu’à moi, j’aurais d’ors et déjà répondu à son affront par un coup d’airain cela dit je ne suis pas en mesure d’agir seul tant mes frontières sont peu sûres. Tant qu’il n’y aura pas de trêve signée, et je doute qu’il y en ait jamais une, je me dois de garder mon pays en sécurité et tenir mes rivaux loin de mes pâtures. Nelen est une terre personnelle du Roi, essentielle à nos relations avec le pays de Thaar. Il est donc tout aussi essentiel que nous agissions pour en déloger cette vermine langecine qui s’y croit déjà comme en ses jardins. Ne sommes-nous pas après tout la première puissance de cette péninsule ? N’avons-nous pas armes, navires et or en quantité, assez pour faire couler ceux qui voudraient se hisser contre nous ? Mieux, mon ami, n’avons-nous pas les Dieux derrière nous ? Elle aurait pu sombrer cette Couronne, demeurer oubliée sous les flammes mais ils en ont souhaité autrement. Notre doux Sire aurait pu rester caché dans la lande berthildoise mais la déesse de la Vie a insufflé en moi le désir d’aller le récupérer des bras de sa mère et de le garder de même que son frère m’a été confié. Qu’avons-nous à craindre puisque le Ciel se porte garant de notre victoire ? Le Ciel ainsi que toutes les créatures qui le peuplent… »

Personne ne le savait encore, mais dans les secrets de ton arsenal s’armait une expédition vers les terres orientales. Le mot était venu dans le Val que des bêtes ailées, grandes comme des ailes avec des plumes comme des écailles de serpent passèrent au-dessus de Thaar et dans les terres alentour. On n’osait pas le prononcer, tant cela relevait du rêve dans certains cercles mervalois pourtant il suffisait de jeter un œil aux façades des temples et dans le secret des demeures princières pour voir des âtres brûler d’une flamme perpétuelle, en souvenir de ce temps béni où du Ciel ne tombait pas que de la pluie.

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