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 Leçon de magie

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Suri
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Suri


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MessageSujet: Leçon de magie   Leçon de magie I_icon_minitimeMer 6 Avr 2016 - 19:25

« Foutredieu, Suri ! » s’exclama Briareus, dont la patience n’avait jamais été la première des vertus. L’invective brisa la concentration de la jeune apprentie ; le Pouvoir lui échappa sans qu’elle ne parvînt à le retenir. Elle ouvrit les yeux juste à temps pour voir un rictus douloureux barrer le visage du vieux mage qui lâcha un juron : « Ah ! La garce ! » La Taledhelle se sentit rougir jusqu’à la racine des cheveux et bredouilla des excuses pour beaucoup inaudibles tandis qu’elle restaurait son charme. Presque instantanément, les sourcils de Briareus se détendirent. « Foutredieu, répéta-t-il non sans soulagement. C’est toujours pareil avec toi. On te demande quelque chose de simple et tu restes plantée là, comme une cruche, à attendre que la solution te tombe dans le bec. » Il tendit son bras dans sa direction, la longue estafilade qui barrait sa peau du coude au poignet bien en évidence. « Tu veux que je me vide de mon sang ou tu vas commencer à te bouger les miches avant ça ? »


La pauvre Suri ne savait plus où se mettre alors que les remontrances qu’on lui adressait lui piquaient les joues ; toute habituée qu’elle était tant du langage que des manières de son maître, ses accusations étaient pour le coup bien injustes : sa migraine naissante, elle ne lui était pas tombée dans le bec, loin s’en fallait. C’était même tout le contraire et il se montrait bien ingrat après tout le mal qu’elle s’était donné pour lui : elle avait pris garde à ce qu’il ne sentît aucune douleur tandis qu’elle s’appliquait méticuleusement à soigner sa blessure. C’était qu’elle était propre et nette, tellement qu’en s’y prenant assez bien, elle pouvait espérer l’effacer tout à fait, sans qu’il en restât par la suite la moindre trace. Elle n’en dit rien, pourtant, car elle savait qu’il s’en moquait comme d’une gigue, de récolter une énième cicatrice. Elle se contenta d’une nouvelle excuse, un peu plus contrite maintenant qu’il ne criait plus, avant de reprendre là où elle s’était arrêtée.


« Par les Cinq, mais qu’elle est sotte ! souffla le vieux mage avec humeur. Tu es née avec des mains, non ? Alors, sers-t’en. » Et le bougre d’agrémenter son ordre d’une vilaine tape sur le haut de son crâne ; il y mit plus de force qu’il ne l’avait sans doute voulu et la pauvrette laissa échapper une plainte étouffée, s’écartant autant qu’elle le pouvait. Elle sentit bien vite un liquide poisseux coller ses cheveux et n’eut pas même besoin d’y porter les doigts pour deviner de quoi il en retournait. J’ai peut-être sous-estimé le saignement, effectivement. Elle réprima l’envie qui la taraudait de s’occuper du désastre capillaire qui couvait sur le sommet de son chef : elle avait plus urgent à parer. Elle savait très bien ce que lui reprochait le Thaari, il n’en était pas à son coup d’essai. Avec lui, c’était toujours la même chose. Si je ne me trémousse pas comme une demeurée, il n’est pas satisfait. Elle avait beau lui expliquer qu’à Alëandir, on lui avait rabâché une décennie durant que c’était là justement ce qu’il ne fallait pas faire, il ne voulait rien en entendre.


« Si vous cessiez seulement de gigoter, répondit-elle avec lenteur, nous en aurions déjà fini. La blessure est nette et peu profonde et nous avons tout le temps du monde, je ne vois pas pourquoi j’apposerais les mains. Maître Linderel nous disait toujours que…


— Ah ! » lâcha-t-il et c’était un « ah » si lourd de mépris qu’il aurait pu lui décrocher la mâchoire. « La voilà qui recommence. Combien de fois t’ai-je répété tout le cas que je faisais des élucubrations de ta foutue Académie et des guignols qu’on y trouve ? »


Cette fois, la Taledhelle s’empourpra tout à fait ; qu’il la rabaissât, elle, c’était une chose, mais qu’il insultât l’une des institutions les plus anciennes, réputées et respectées de son peuple, c’en était une toute autre. « Maître Linderel nous disait toujours, répéta-t-elle avec un regard qui s’assombrissait plus vite qu’un ciel d’hiver lorsque la nuit tombait, que le mouvement donne une illusion de facilité.


Et qu’est-ce qu’il en sait, ton foutu Linderel, hein ? » Son agacement avait définitivement cédé sa place au mépris et il secouait dédaigneusement son bras blessé pour marquer ses propos ; Suri goûta l’espace d’une seconde l’idée de rompre une nouvelle fois le charme qui lui permettait d’ignorer la douleur. Elle n’en fit rien, pourtant, de peur qu’il la rossât pour de vrai — il en était définitivement capable. « Il doit passer ses journées le cul vissé sur une chaise au sommet d’une tour perdue dans votre connerie de forêt. Qu’est-ce qu’il en sait, de ce qu’est la magie, hum ? C’est pas en faisant voler des plumes d’aigle par-dessus son bureau toute la journée qu’on devient un sorcier. » Maître Linderel est définitivement plus que ça, songea-t-elle avec férocité. Il étudie le Pouvoir depuis des siècles, il conseille le Protecteur d’Anaëh. Il ne ferait qu’une bouchée de… Elle ne termina pas sa pensée, pas plus qu’elle ne l’exprima à haute voix. Elle n’avait déjà que trop laissé parler sa colère, qu’elle savait plus que chez quiconque bien mauvaise conseillère ; l’espace d’une seconde, elle crut d’ailleurs sentir son dos la picoter.


« Les mages d’Alëandir dédient leur vie à la compréhension de l’Art.


Justement, Suri. » Le visage de Briareus se barrait du rictus satisfait de celui qui voit son contradicteur soudainement lui donner raison. « Ils sont des théoriciens, pas des magiciens. Ils étudient, ils mesurent, ils quantifient, mais la magie, ça n’est pas ça. La magie, ça se manie avec le cœur, ça s’épouse, ça se vit foutredieu. » Il secoua la tête, calmé tout à fait. « Y’a mille raisons valables qui justifient qu’on reste pas planté les bras ballants quand on soigne une plaie, mais tu sais quoi ? La meilleure d’entre elles, c’est que c’est foutrement chiant de le faire comme ça et que la vie est trop courte pour ces conneries d’elfes ; même pour vous, sauf que vous êtes trop perchés pour seulement vous en rendre compte. »


C’est plus compliqué que ça, voulut-elle répliquer, mais là encore elle ne pipa pas mot, préférant le silence à l’insolence. Elle aurait pu lui ressortir ses cours mille fois appris : en réalité, ils se résumaient des plus simplement. Les mortels, parce que le temps leur était compté, pratiquaient la magie avec le résultat immédiat en tête. Ils ne s’embarrassaient pas de savoir s’ils faisaient correctement les choses, tant qu’ils les faisaient seulement. Pour cette raison, ils progressaient vite, mais accumulaient tant et si bien les mauvaises habitudes que plus vite encore ne progressaient plus du tout. Quand cela arrivait, pourtant, ils accusaient leur grand âge et le temps qui passait. Les Taledhels, au contraire, n’appelaient pas la manipulation du Pouvoir « l’Art » pour rien. Ils voyaient dans chaque charme une œuvre qu’il convenait de peaufiner ; alors, oui, il fallait bien plus d’efforts à un elfe pour parvenir au même résultat qu’un homme, mais dès que la chose était faite, il ne lui en fallait pas beaucoup plus pour en obtenir un bien meilleur.


« J’imagine que ce n’est pas ta faute, commenta doctement le vieux mage en posant ses doigts sur sa blessure. Ils t’ont tellement rebattu les oreilles… heureusement, je ne perds pas espoir de te libérer l’esprit de leurs conneries. » Il commença à caresser sa barbe avec sa main libre, ce qui ne manqua pas d’arracher un fin sourire à Suri — sourire qu’elle prit bien garde de dissimuler du mieux qu’elle put, baissant le front dans un faux signe de pénitence. Quand il manipulait le Pouvoir, Briareus touchait systématiquement sa barbe. C’était un réflexe dont il n’avait pas même conscience, inscrit dans sa chair à force d’années de pratique des Arcanes. Maintenant, Suri savait qu’il lui suffirait de se faufiler une nuit dans sa chambre et de la lui couper, sa barbe, pour lui entamer sérieusement son potentiel magique. Voilà bien un problème que Maître Linderel n’aura jamais.


Le sorcier marmonna quelques mots et la plaie se referma en quelques instants ; force était de le constater, il avait beau être un mortel, il ne manquait pas de talent, tout engoncé qu’il pouvait être dans ses défauts. Pourtant, la jeune elfe ne put s’empêcher de remarquer, non sans mauvaiseté : « C’est dommage, il reste une cicatrice. »



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MessageSujet: Re: Leçon de magie   Leçon de magie I_icon_minitimeJeu 7 Avr 2016 - 6:38

« De toutes les façons, en vrai je suis plus vieux que toi », affirma Job, que la discussion précédente agacée et qui cherchait d’un coup à asséner un — bien étrange, pour le coup — argument d’autorité pour s’en extirper. La Taledhelle haussa si hautement son sourcil qu’il manqua de peu toucher la racine de ses cheveux. Elle tourna la tête vers son interlocuteur, le jaugeant de son regard carmin avec une insistance qui le fit frissonner ; c’était quand lorsqu’elle vous fixait avec ces yeux-là, Suri ressemblait par trop d’aspects à un noirelfe hésitant sur la sauce avec laquelle il allait vous manger. Quel âge il a, déjà ? se demanda-t-elle pensivement. Vingt années, pas plus. Je ne me rappelle plus même avoir un jour eu cet âge-là. Parfois, elle avait l’impression qu’elle était sortie du ventre de Mère telle quelle. La souvenance de Numaliel lui serra le cœur, mais elle chassa bien vite ses mauvaises pensées pour en revenir à l’énigme du temps présent. « La suite devrait être intéressante, susurra-t-elle avec bonhomie.


Quoi ? » Il soutint son regard du mieux qu’il pût. « C’est toi qui me disais la dernière fois que t’avais pas encore cent ans. » Comme elle ne voyait toujours pas où il voulait en venir, Suri pencha sa tête légèrement de côté. « Eh béh. Pour savoir son âge d’elfe, suffit de prendre son nombre d’années et de faire dix fois ça, qu’on dit. Ça fait que des siècles, j’en ai presque deux, donc deux fois plus que toi, la jeunette. » Surprise par l’étrangeté du propos, l’elfe le regarda quelques secondes avec un air ahuri… avant d’éclater de rire ; elle n’avait jamais entendu plus farfelues théories. « C’est pas moi qui le dit, c’est comme ça, c’est tout. » Il était, en vérité, passablement vexé.


« Si l’on inverse ton raisonnement, quel âge mortel ça me fait, hum ? » lui demanda-t-elle avec malice.


Il haussa simplement les épaules : « Est-ce que j’ai dit, moi, qu’on pouvait l’inverser ?


Je ne vois pas, moi, pourquoi on ne pourrait pas, asséna la guérisseuse. Est-ce que j’ai une tête, vraiment, d’une enfant de dix ans ? »


Il sembla réfléchir intensément, puis son visage s’illumina. « Pas dix, alors, mais cinq. Cinq pour un, ça t’en donne… presque vingt… » Elle secoua le chef, amusée de le voir ainsi se démener pour réduire faussement le fossé des années qui les séparait. La chose était sans doute importante pour le jouvenceau, elle pouvait aisément se le figurer. Eût-elle été mortelle, elle aurait pu être sa grand-mère. Ou peut-être même la mère de sa grand-mère. Seulement, mortelle, elle ne l’était point et de loin, on lui donnait facilement l’âge de Job, voire un peu moins — bien entendu, quand on s’approchait, on remarquait ses oreilles effilées et ses yeux de noirauds et son visage lisse comme la fesse d’un bébé.


« Mon âge t’impressionne tant que ça ? le taquina-t-elle assez pour voir ses joues rosir.


Du tout, se défendit-il. C’était juste pour dire, c’est tout. » Il hésita. « C’est quand même étrange, votre manie de pas vieillir. » Il hésita encore. « Ça fait quoi, de vivre cent années ? »


Le pli des lippes de la Taledhelle retomba lentement, alors que la discussion prenait un tournant qu’elle n’avait su anticiper. Est-ce qu’il m’envie ? Elle aurait sans doute, à sa place, crevé de jalousie. « Rien de particulier, jura-t-elle. Une journée reste une journée, qu’on en vive une ou cent.


Mouais. » Il n’était pas convaincu, ça se voyait à son front plissé et son regard un peu torve. « La vérité, c’est que je boufferai les pissenlits par la racine que tu m’auras depuis longtemps oublié. » Il était amer, soudain ; les yeux de Suri s’agrandirent, eux, sous le coup de la surprise et elle voulut répliquer qu’il ne pouvait rien en savoir. « Laisse, souffla-t-il. Je vais m’en retourner, je crois. Il faut que je rentre au moulin.


Attends ! » protesta-t-elle en lui saisissant le bras. Il regarda tour à tour son poignet et ses yeux sanguins avant d’esquisser un pauvre sourire. Il est mignon, quand il sourit, songea furtivement la jeune apprentie, qui se sentit rougir à son tour. De fait, Job n’était pas le plus vilain des hommes. « Je ne voulais pas… » Quoi ? Elle n’avait aucune idée de ce qu’elle avait bien pu faire, en réalité. « Peut-être bien que tu es plus âgé que moi, au fond. »


Ce fut son tour de la regarder avec des yeux surpris et il partit sur un petit rire, peut-être un peu gêné par ses réactions passées. « Peut-être bien, oui. Y’a qu’Arcam qui sait. » Il marqua une pause et ils restèrent plantés là, elle à lui tenir le poignet, lui à la regarder. « Je suis désolé, je n’aurais pas dû te parler comme ça. » Et d’ajouter, avec un peu plus de légèreté dans la voix : « Au fond, ce n’est pas ta faute si tu es née du mauvais côté de la lisière de la forêt.


C’est important pour toi, comprit-elle tout à fait. Que j’aie cinq fois ton compte d’ans, ça te dérange vraiment.


Peut-être bien que oui, concéda-t-il. Ça rend les choses plus compliquées. » Elle n’avait pas besoin de lui demander à quelles choses ils pouvaient bien penser. Elle savait. Le benêt croit qu’il m’aime, se souvint-elle. Il voudrait sans doute qu’on se marie, que je porte et élève ses enfants, qu’on reprenne le moulin de ses parents et… Et elle-même n’avait aucune envie de ces choses-là. Pas après le Drame, pas alors que le temps lui manquait déjà ; et puis, elle le connaissait à peine, au fond. Ils se côtoyaient depuis, quoi, trois mois ? Bien sûr, c’était plus que suffisant pour un mortel qui voyait sa propre fin arriver à grands pas. Il dut sentir son malaise, parce qu’il finit par lui ébouriffer les cheveux de sa main libre. « Allez, fait pas cette vilaine tête. Ça rend les choses plus intéressantes, aussi.


Ce n’est pas ça, » protesta-t-elle ; il en profita pour se libérer. « Compliqué ou pas, je dois me concentrer sur mon apprentissage, de toute façon. Maître Zandar ne me laisse guère le temps pour me reposer. »


Job opina du chef, avec quelque chose tapi au creux de ses prunelles que Suri ne sut pas identifier. Peut-être de la malice, ou l’envie de relever le défi. Toujours était-il que sur ces dernières paroles, ils se séparèrent pour la journée et l’elfe repartit avec sous le bras la miche de pain qu’elle était venue chercher.



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