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 De la grandeur serramiroise.

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Aymeric de Brochant
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Aymeric de Brochant


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MessageSujet: De la grandeur serramiroise.   De la grandeur serramiroise. I_icon_minitimeMer 31 Aoû 2016 - 18:56

2ème jour de la 3ème énéade de Karfias, 9ème année du 11ème cycle.

Le tournoi s'était achevé, et pourtant, les maîtres-queux conservaient leur activité frénétique. Toutefois, ce n'était pas dans les cuisines du palais séraphin que s'affairaient les marmitons, mais dans celles de Castel-Tolbioc. En effet, bien que la plupart des invités s'en soient allés, Aymeric avait retenu quelques jours supplémentaires ses vassaux. Si la raison avait été tue, d'aucuns soupçonnaient quelque déclaration flamboyante. En effet, le tournoi s'était circonscrit au policé, quand la Péninsule demeurait fort instable. Le marquis n'avait pipé mot du Roy, des ligards, des suderons. On commençait à connaître le sens théâtral d'Aymeric ; qu'il rassemble ses féaux, après le départ des étrangers, augurait assurément quelque révélation.

Ainsi, sous les hautes voutes gothiques de la citadelle serramiroise, s'étaient rassemblés les seigneurs du pays. Issus de la haute noblesse locale, jusqu'au plus petit lignage venu du fin fond des marches, chaque vassal du marquis avait ici sa place. Si certains sièges demeuraient vacants, la plupart avaient répondu à l'appel : les tables étaient garnies d'hommes aux épais manteaux et aux baudriers rutilants.

Un tel rassemblement de sang bleu - quand bien même la prudhommerie serramiroise n'était plus à prouver - ne manquait pas d'échauder les esprits de certains. Se trouvaient là pêle-mêle des voisins aux passifs parfois violents, et aux opinions souvent divergentes. Ainsi, les discussions ne tardèrent pas à enfler, avant même que le marquis n'eut pris la parole.

Le sujet de l'algarade portait, une fois n'est pas coutume, sur les pillards venus du Landnostre. C'était un débat de choix en Serramire : il permettait, un instant, aux seigneurs frontaliers d'en montrer aux grandes maisons de l'intérieur. Usuellement méprisé par le reste de la noblesse péninsulaire, le péril wandrais constituait le pinacle honorifique des Trente. C'était leur geste, leur chanson à eux ; le raid estival d'une tribu sigole était leur bataille d'Alonna, leur invasion noirelfique. Ainsi, causait-on non pas puysard, mais wandrais.

« Là, vous les repousserez à nouveau ; que peuvent ces sauvages sur le champ de bataille, face à nos destriers ? éludait distraitement Geoffrey de Clairséan.
- Facile à dire pour vous autres, lui répondit Gebhard Väringen, le seigneur d'Haanhardt. On dit que les sigols ont formé une seule horde, et qu'ils ont mis le siège devant le fort velterien.
- Bah! Qu'ils s'y brisent les dents! c'est autant de voleurs qui épargneront nos pâturages, asséna Silas Altirède, avec une pointe d'accent scylléen.
- Et que feront nous, quand les sigols se seront emparés du fort ? Pensez vous qu'ils s'en retourneront sagement chez eux ? Mes terres ne sont qu'à quelques heures de là, morbleu! s'inquiéta Brecca d'Estenhausen.
- Je connais bien les sigols, nous les avons souvent chassé, à Haanhardt. Rassurez vous, Brecca : une fois victorieux, ils se disperseront, mieux encore, se disputerons le butin.
- Là, bons sires, quand ces gueux sauront différencier une charrette d'un trébuchet, il nous faudra nous inquiéter. Une tour, si petite fut-elle, les tient en respect.
- Vos fiefs sont confortablement installé non loin d'ici, Clairséan, et pourtant pérorez comme si chaque jour vous affrontiez les wandrais aux frontières.
- Sont-ce des provocations, Brecca ?
- Vous êtes une provocation à vous seul, rodomont!»

Il manqua de peu que la discussion ne tourne à la foire d'empoigne, si le marquis n'était intervenu : « La paix! Que penserait le reste du Royaume, si après avoir repoussé les puysards, ils nous voyaient trembler pour des wandrais ?
- Messire, le reste du Royaume ne sait distinguer l'hortelin du sigol. Que nous importe l'avis des poudrés du Langecin, quant aux razzias venues du Landnostre ?
- Ces ladres ignorent tout de la rudesse des marches, messire. Voyez Velteroc : non content de fomenter sa rébellion, l'infâme s'en est allé s'acoquiner avec les Sicambres. Il commerce avec ceux là-même qui chaque été maraudent dans nos fermages!
- Si fait, bon amis. Je vous ai rassemblé pour vous entretenir de cela : j'entends m'assurer personnellement de la sureté des marches, comme le fit Anselme avant moi. »

L'annonce fit sensation parmi les Trente. Depuis l'exil de Bastylle, la frontière n'avait gère préoccupé les marquis ; avant son accession au trône, elle n'avait jamais passionné les ducs. Qu'Aymeric déclare vouloir s'occuper de la chose demeurait surprenant en soi ; qu'il se réclame d'Anselme était inouï. On connaissait assez bien la rancœur qui avait animé les relations entre ces deux hommes, allant jusqu'à l'emprisonnement de Brochant, il y a des années de cela. Par la suite, Aymeric s'était attaché à chasser du Nord tout membre de cette maison, envoyant Jérôme de Clairssac purger les marches de la famille d'Anselme. Plus d'un s'était alors demandé si la vengeance du marquis s’édenterait à l'ensemble des Trente. Force était de constater qu'Aymeric n'avait tenu rigueur de leurs errances pétitionnaires, et une rumeur d'approbation émana des rangs du fond, à l'évocation du précédent seigneur.

« Bastylle, fut-il mon rival, ne démérita jamais dans la lutte contre les wandrais. J'entends poursuivre son travail : à partir d'aujourd'hui, la sureté des marches ne sera plus l'affaire de chaque seigneur, mais de tout Serramire. » L'approbation, mêlée à de la surprise, s'amplifia. En lieu et place d'une foule bruyante et querelleuse, les Trente s'étaient mutés en auditeurs intéressés, attentifs aux propositions de leur suzerain. « Serramire pourvoira à l'achèvement des tours d'alarmes aux frontières, similaires à celles dressées par Anselme. Qui plus est, le ban s'organisera désormais semblablement à l'ordonnance de Bastylle, pour former une troupe aguerrie dédiée à la défense des marches. »

Si Aymeric s'était appliqué à revendiquer le patronage de l'ancien marquis, c'est que l'homme, tristement chassé du trône à coup d'intrigue, rayonnait encore d'une certaine aura parmi les seigneurs frontaliers. Sur ses fiefs, il avait montré l'exemple à suivre contre les pillards, et pour cela, les Trente, autrefois, avaient pétitionné en sa faveur auprès du Roy. Aujourd'hui encore, nombreux aux frontières regardaient avec nostalgie les années passées sous le blason à l'auroch, et le nom des Bastylle avait suffit à mettre les hommes dans des dispositions favorables. Il ne restait au marquis qu'une seule étape pour transformer le consensus latent en une adhésion générale : « Pareille troupe ne saurait être guidée par un homme ignorant tout des marches. Aussi, c'est à l'un d'entre vous que j'entends en remettre le commandement, si tant est qu'il fut un brave pour le désirer. » Il n'en fallait guère plus pour qu'une vingtaine de mains ne se lèvent, et c'est avec un sourire satisfait qu'Aymeric se félicita d'avoir si bien mené son affaire.

« Ce n'est pas tout. » L'injonction ramena l'assemblée au calme. En vérité, Aymeric aurait pu tout aussi bien dire "ce n'est que le début", tant les Trente n'occupaient qu'une part minoritaire dans ses décisions. C'était pourtant une étape obligatoire : ces seigneurs avaient été une épine dans son pied bien trop longtemps. Au travers d'eux, c'était la fragilité toute entière de Serramire, livrée à elle-même depuis la déchéance de la maison Séraphin, qui transparaissait. Aymeric ambitionnait de mettre un terme à cette fragilité : après s'être occupé des Trente, il se tourna vers ses grands vassaux.

« La frontière seule ne saurait nous préoccuper, entama-t-il, alors que le Royaume tout entier semble en proie au trouble. La félonie s'est emparée du médian, et le Soltaar détient plus qu'il ne protège le Roy.
- L'engeance d'un bâtard! entendit-on jurer dans le fond.
- Face à cela, reprit le marquis sans s'occuper de l'injure, la prudence nous commande d'escompter un nouvel affrontement. Notre voisin, le marquis Godfroy, a d'ors et déjà rejeté la régence soltaarie, et entend soutenir les droits d'Alcyne de Hautval à la couronne. Je gage qu'avec les prochains mois, il ne nous faille nous résoudre à la guerre. »

Un murmure inquiet parcourut l'assemblée. Si les seigneurs serramirois demeuraient des hommes aguerris, peu d'entre eux n'étaient d'avides bellicistes. Les raids venus du Landnostre mettaient chaque été à l'épreuve les armées du marquisat ; les puysards, quant à eux, avaient été un défi colossal. La guerre civile, l'invasion ethernienne, les rébellions dans les baronnies, tout ces conflits avaient ponctué la dernière décennie, non sans laisser des marques. Après avoir passé deux énéades à célébrer la victoire et la paix retrouvée, les seigneurs accueillirent l'assertion non sans inquiétude.

« Dame Alanya, seigneur Jérôme. » Chacun tourna alors la tête, à s'en rompre le cou, pour mieux observer les deux vassaux, au premier rang. « Les armées des baronnies ont toujours été craintes. Faites qu'elles le soient à nouveau, voila mon commandement. » À sa droite, Aymeric entendit son frère pousser un soupir soulagé. Longtemps les deux hommes avaient hésité quant aux troupes baronniales. Le marquis désirait profiter de leur affaiblissement pour qu'elles fussent rebâties selon l'ordonnance serramiroise ; Evrard, quant à lui, craignait qu'un pareil ordre ne remette le feu aux poudres de la rébellion. Aymeric avait ainsi fini par se rétracter, et laisser la bride lâche à ses nouveaux vassaux - pour un temps.

À l'évidence, ce n'était par bonté de cœur qu'il s'était résolu à temporiser ainsi. Comme tout bon serramirois, le marquis nourrissait le désir de mettre au pas les baronnies. On gardait encore le souvenir, à Serramire, de la baronne Pearla siégeant chez le duc, et de la légion en garnison aux frontières avec l'Adurie. Quant à l'Oesgardie, les largesses accordées par le duc Lyon au baron Siegfried semblaient, malgré les siècles, au mieux un excès de générosité, au pire, une trahison. Peu désireux de voir poindre à nouveau les drapeaux rebelles dans les marches, Aymeric avait prit son mal en patience, et décidé qu'il ne planterai pas encore celui de Serramire sur les châteaux baronniaux.

Cette réserve se comprenait d'autant plus, que les armées serramiroises elles-même, depuis bientôt dix ans, étaient revenues dans les mains des feudataires. Si Anselme avait tenté - et partiellement réussi - de réformer les troupes, il n'avait pu achever la chose, chassé du pays par la cour. Aymeric entendait bien poursuivre le travail de son prédécesseur, et le terminer. Après s'être acquis le soutient des Trente, et s'être assuré que les baronnies resteraient en dehors de cela, le marquis s'attaqua aux derniers seigneurs, ceux de l'intérieur. Si certains, comme Clairséan, avaient un poids négligeable, d'autres, en revanche, pouvaient mettre des bâtons dans les roues d'Aymeric. Fort heureusement, le marquis jouissait d'une alliance avec Versmilia, l'époux de sa vieille sœur. Roland, entretenu des projets d'Aymeric quelques jours plus tôt, avait fini par accepter la chose, moyennant compensation. Seule la position de Lourmel, dont la maison, ces dernières années, alignait les désastres, restait encore inconnue.

« Le ban serramirois, commença Aymeric, est meurtri. Nombre de nos chevaliers ont trouvé le trépas durant la dernière guerre, et résident aujourd'hui aux côtés de Tari, tombés devant Amblère ou Nebelheim. Soyez assurés, bon seigneurs, de mon attachement à la chevalerie du Nord : après ce tournoi, la péninsule toute entière peut nous la jalouser. Oncques mais! Vingt tournois ne peuvent remplacer ce que des années ont produit de bons chevaliers. Le temps, doux sires, joue contre nous. Aussi, le ban serramirois s'organisera désormais également selon l'ordonnance. »

Un murmure parcourut à nouveau l'assemblée. Ce murmure avait un nom, que le marquis s'était bien gardé de prononcer, mais qui trottait dans chacune des têtes ici présentes. Ce n'était rien de moins que la résurrection des fameuses Légions serramiroises, celles qu'on nommait les Légions noires. L'armée des ducs séraphins, qui avait assuré leur domination sur le Nord pendant des siècles, de la conquête de celui-ci, jusqu'à la déchéance de la dynastie, semblait donc reprendre du service. Jetant un œil à l'encontre de Roland de Versmilia, Aymeric eut le plaisir de voir celui-ci acquiescer lentement. Se levant de sa cathèdre, le marquis adressa alors une ultime harangue aux hommes : « Chaque jour, à dater d'aujourd'hui, nous verra croître en force, et lorsque la conflagration s'emparera du Royaume, nous triompherons! »

« Nous rendrons à Serramire sa grandeur! »


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Maélyne de Lourmel
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MessageSujet: Re: De la grandeur serramiroise.   De la grandeur serramiroise. I_icon_minitimeDim 18 Sep 2016 - 20:50


Voilà donc comment le Marquis remerciait ceux qui l’avaient suivi les yeux fermés malgré ses nombreuses erreurs qui lui auraient sans doute coûté sa tête s’il n’avait pas eu ses fidèles alliés. Le nord venait d’être sauvé par une coalition de plusieurs territoires, de plusieurs vassaux, qu’ils soient grands ou petits et non uniquement par le marquis et celui-ci, au lieu de proposer de continuer ainsi, s’octroi à grand mots enrobés de miel la totalité des chevaliers du marquisat. L’ordonnance pour assurer les marches du Pays et contrer une éventuelle future menace, vaste blague qui dissimulait-là plutôt une assurance à ce qu’il ne finisse pas comme ses prédécesseurs ; bannis ou morts.

Chacun avait contribué, payant en nombreuses vies au vu de ses erreurs tactiques qu’il pourra justifier comme bon lui semble, cela en reste un fait. Attaquer Amblère seul plutôt que d’y poser le siège, coûtant ainsi la vie de plus de deux mille chevaliers Serramirois, attaquant pour s’assurer une gloire au lieu d’une victoire. Pourtant, personne ne semblait lui en tenir rigueur comme si l’alcool qui avait coulé à flot durant ses deux ennéades de festivités leurs avaient arrachés tout souvenir de cette précédente guerre qui a pourtant duré longtemps.

Maélyne resta longuement silencieuse, écoutant le débat, suivant les commentaires des uns et des autres. Mais le Marquis avait abattu ses cartes et ce grippeminaud avait su coucher ses as dès le premier tour.  A grandes phrases sur la sécurité du territoire, tout en accablant l’absence de participation des vassaux de l’intérieur, jouant sur la culpabilité des hommes manquants dorénavant à l’appel suite à cette guerre.

Aymeric venait d’ériger un mur entouré de barbelés que personne ne voulait franchir de peur de passer pour le couard de service qui n’en avait que faire de la sécurité de son pays.

Le marquisat a longuement été divisé, des marquis et marquises se sont succédé sans arriver à le souder. Il a fallu qu’une menace externe vienne  s’emparer de plusieurs villes pour que la noblesse Serramiroise se décide enfin à nommer un Marquis. Ce n'était donc pas pour que celui-ci se permette par la suite d’usurper l'un de leurs droits fondamentals et durement acquis suite à la chute des Seraphins.

Voilà donc, comment le Marquis remerciait ses vassaux.

Et c’est un air dépité qui s’afficha sur le visage de Maélyne lorsque tous, acceptèrent sans sourcier de monnayer les hommes qui leurs avaient prêté serments, les offrants tel du bétail au Marquis qui une fois de plus, obtint ce qu’il souhaitait.

Au vu des nombreuses têtes qui se tournèrent dans sa direction il semblerait que les hommes attendaient une réponse de la Dame.

« Outremont contribue à la défense des Marches du Pays et j’en connais le prix. Il n’est pas rare que Lourmel apporte également son aide à la défense de l’ouest lorsque la nécessité le demande et nous avons répondu à vos différents appels lors des guerres précédentes. » Elle fit une pause. « Je comprends votre envie de rendre à Serramire sa grandeur d’antan là où d’autres ont échoués. Vous avez déjà réussi à nous réunir et à faire cesser les querelles qui nous détruisaient de l’intérieur. Pour autant, est-ce nécessaire de nous priver d’un de nos droits qu’est celui de protéger nos terres et de diriger ces hommes qui nous ont prêté serment ?  Nous vous avons suivi à la reconquête d’Oësgard et d’Alonna, nous vous avons également suivit face aux noirauds. Pourquoi douter ainsi de notre loyauté ? Nous savons tous que l’ordonnance répond directement à l’appel du Marquis et non à celui-ci des seigneurs que nous sommes. N’avez-vous aucune confiance en nous, votre Excellence ? »

Spoiler:
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Jérôme de Clairssac
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MessageSujet: Re: De la grandeur serramiroise.   De la grandeur serramiroise. I_icon_minitimeMer 21 Sep 2016 - 12:20


Jérôme était beaucoup plus joyeux ces derniers temps, il avait enfin retrouvé sa jovialité d'avant tous les problèmes qu'il avait rencontré. Il l'était d'autant plus qu'il était fiancé avec Aline de Montévlin, la dame ayant accepté sa demande en mariage. Il avait du mal à redescendre sur terre, bien que son départ pour Oësgard soit imminent. Il serait d'ailleurs déjà partit si le marquis n'avait pas demandé à ses vassaux de rester encore un peu. Beaucoup de monde se demandait la raison de cette demande, certains avançant la prise de position d'Aymeric concernant la couronne. En effet, celui-ci n'avait pas été prolixe sur ses positions et pas mal de questions se posaient. Jérôme avait déjà eu du mal avec Gaston pour Odélian, à se demander s'il ne devait pas se débrouiller tout seul.

La réunion ayant débuté, avec beaucoup de beau monde, Jérôme resta en retrait, conscient qu'il avait des amis mais aussi des ennemis. Devenu régent d'Oësgard et Sénéchal des armées du marquisat alors qu'il avait déjà la main mise sur plusieurs forts des trente, allant de Froissart à Montévlin, et tout cela après une conquête, cela avait amené quelques griefs à son encontre. Après avoir laissé les discussions monter, Aymeric reprit la main, amenant le silence en prenant enfin la parole. Contre toute attente, il parla des Wandres, à la surprise de Jérôme. Puis au fur et à mesure du déroulement, le baron commença à comprendre ou le marquis voulait en venir. Il mena très intelligemment sa barque alors qu'il jouait à cet instant un coup de poker astucieux mais dangereux. Jérôme regardait attentivement Aymeric, prenant la leçon de politique en se demandant si ça en serait une ou s'il y aurait une déconvenue. Si lui même n'avait été que seigneur de Froissart, nul doute qu'il aurait assez mal prit cette demande, voyant son pouvoir légitime réduit mais en tant que baron d'Etherna, il se souvenait de ses griefs avec le conseil qu'il avait d'ailleurs dissout et aussi avec les seigneurs dont il était tributaire pour avoir une armée digne de ce nom. Heureusement, les victoires se succédant, il n'avait pas eu énormément de problèmes pour garder la cohésion et empêcher les troupes de rentrer chez elle après une trop grande mobilisation, encore moins avec ses largesses. Jérôme fut surpris de voir la manière dont il amena cela et sa façon de ramener la compétition entre les trente au sein de la conversation, profitant de leurs divisions en les appâtant avec le titre de chef.

Pire encore, il en arriva à étendre l'armée d'ordonnance au marquisat, poussait il trop sa chance. Encore une fois, il amena cette conversation sur un sujet tendu que tout le monde attendait, sans doute pour adoucir ceux qui voudraient s'opposer à ses envies. Les récents évènements et les tensions entre Sainte-Berthilde et le sud, parlant même d'une future guerre quasi impossible à éviter. Jérôme se mit à prier pour que cela n'arrive pas même s'il se doutait que quelque chose devrait forcément se passer. Il espérait que ce ne soit pas une guerre ouverte

"Votre altesse, Oësgard aura bien du mal à se relever après tout ce qu'elle a subit, mais nous ferons tout notre possible pour que la baronnie se redresse rapidement, du moins pour son armée"

Il était facile de le dire mais le faire serait une autre pair de manche. Jérôme espérait que le marquis n'avait pas oublié l'état dans lequel se trouvait Oësgard, les guerres civiles successives et la dernière guerre contre les sombres ayant décimé la noblesse, tout comme les champs. Aymeric continua, haranguant les troupes, enrobant ses idées de douceurs et de beaux mots guerriers que tout noble du nord saurait apprécier. Toutefois, une fois qu'il eut terminé, une vois s'éleva, une femme et pas n'importe laquelle. Maélyne de Lourmel, la dame du fief du même nom et pas le plus petit territoire. Il était compréhensible qu'elle se dresse vu tout ce qu'elle avait à perdre. Cela amena un soucis à Jérôme, qui d'un coté comprenait Maélyne et qu'il aurait bien voulu la soutenir, encore plus vu qu'elle devait épouser son frère, qu'elle avait beaucoup souffert et qu'il l'appréciait énormément. Mais d'un autre, il comprenait fort bien Aymeric aussi, son plan était bon pour relever rapidement le marquisat après les pertes qu'il avait subis à Amblère et avec toutes les largesses qu'il avait lui avait faites, il aurait été bien ingrat de le lâcher. en tant que stratège, il comprenait également tout ce que ce genre d'armée pouvait apporter et il était d'ailleurs en train de réfléchir concernant celle d'Oësgard à un plan similaire, encore plus avec les lourdes pertes de la chevalerie et de la haute noblesse au sein de la baronnie. Il fallait qu'il intervienne et tente de désamorcer tout cela rapidement

"L'idée du marquis va permettre de reformer rapidement l'armée et vu la situation qui est en train de voir le jour, ce ne serait pas un mal. De même qu'un commandement unique permettra une meilleure harmonie pour la commander. Je ne pense pas, du moins j'espère que les intentions du marquis ne sont pas de dévaloriser ses vassaux."
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MessageSujet: Re: De la grandeur serramiroise.   De la grandeur serramiroise. I_icon_minitimeMer 21 Sep 2016 - 22:49


Le tournoi s'était achevé dans la capitale. Les troubadours et autres jongleurs de rue avaient retrouvés leurs pénates et leurs vies certainement bien moins ennuyantes que la sienne. Les quelques privilégiés alonnais ayant accompagné leur baronne s'en étaient allés à leurs occupations. Un calice à la main, Alanya se délectait du spectacle : aglutinés dans la grande salle se massait tout le beau monde Serramirois. Des seigneurs des Trente aux vassaux de l'intérieur, presque aucun n'avait manqué ce qui était -à demi-mot- annoncé comme « les nouvelles réformes du bon Marquis ». Pas même elle.
La baronne sirotait son vin dont la saveur âpre ne ravissait même plus ses papilles que l'ivresse avait dors et déjà engourdi. Il ne soulageait pas même son âme. Les larges voûtes de Castel-Tolbioc résonnaient d'une bien étrange façon. On ne l'accosta que peu, et seulement pour la saluer poliment – c'était là une sorte de curiosité qu'assouvissait les quelques dames et seigneurs assez courageux pour l'approcher. Pourtant elle ne fût pas dépaysée des réunions qui se tenaient en Alonnan : tous semblaient se targuer de quelque chose, et si la raison n'était point des Puysards la chose s'en approchait . Les braves faisaient mine de rien tandis que les dames jouaient ardemment du mouchoir : l'été menait avec lui la menace des Wandres.
Silencieuse la baronne ne se privait pas de ricaner une ou deux fois en tendant l'oreille vers les discussions les plus proches. Ces nobles seigneurs du Nord s'inquiétaient tantôt pour leurs champs, tantôt pour leur nom. Comprenez, il n'était pas bon de ne point vaincre ces peuplades primales. Ils se battaient donc avec hardiesse, boutant tant qu'ils le pouvaient ces envahisseurs malheureux. Et, non content d'avoir accomplis le seul travail qui leur incombait, ils bombaient leurs torses orgueilleux.

« Voilà que j'en ai pourfendu dix la dernière énnéade »
« Et moi, bientôt trois centaines depuis le début de l'été et je ne m'en plains pas »
« Pour sûr, tu l'as déjà tant crié que ta voix s'en trouve enrouée »

Et cela ne semblait cesser. Ces petites gens se trouvaient quelques soucis, brandissant moult armes imaginaires et ce plaignant cent fois. Qu'imaginaient-ils ces nobliaux en charge de la sûreté des Marches ? Ils étaient certes le premier rempart mais s'ils venaient à tomber, les Trente ne seraient certainement le dernier. S'il était une chose qu'elle savait, c'est que personne n'était irremplaçable. Pas même elle. Les yeux hagards, elle connaissait assez son suzerain pour savoir qu'il ne laisserai pas une telle ignominie se produire.
Aymeric – qu'elle avait sciemment ignoré depuis son arrivée – mit d'ailleurs fin à la cacophonie qui emplissait les lieux non sans mal. Tous ne se turent pas, quelques bavards ragoteurs subsistaient malgré les appels du Marquis, et elle prenait plaisir à les écouter.

« Depuis son retour de sa mauvaise fièvre, je le trouve plus émacié n'est-il pas ? »
« L'on raconte que Mahaut l'ennuie »
« Il faut dire que son attachement est étrange pour tout le monde. La pauvre marquise n'est point la plus belle ni la plus intelligente »
« Brochant aurait mieux fait de marier ma fille, au moins aurait-il entendu nos soucis ».

Ces choses là étaient à peine murmurées à quelques sièges derrière elle. Et à mesure qu'ils parlaient, la coupe de la Belle se vidait, si bien que voyant la fin de son breuvage arriver, elle se réfreina un peu. L'intonation chevaleresque du Marquis – car elle n'écoutait pas grand chose de ces flatteries – et l'agitation qui grandissait dans l'assemblée, ils seraient ici encore un bon moment. Les commérages continuaient et enflaient même, mais leur redondance leur avait coûté la saveur aux yeux de la baronne. Elle se détournait de ces idioties qui lui plaisait pour leur grotesque, et n'eut d'autre choix que de porter attention à l'enflammé discours du Corbeau. Et le moment arriva où il l’apostropha, Jérôme et elle. Le baron se tenait sagement assis à ses côtés, paraissant étrangement heureux. Il en fallait au moins un sur les deux. Si bien qu'aux mots du Marquis, elle ne trouva qu'un sourire hypocrite à lui rétorquer. Elle n'avait pas eu le loisir de lui répondre sur le champ – quand bien même l'aurait-elle voulu. Le seigneur de Brochant était un homme avisé, et qu'elle respectait pour cela. Il déplaçait ses pions avec intelligence et pragmatisme et elle savait d'expérience n'était qu'une sombre mascarade.
De tous, il était certainement le plus honnête car toujours, - du plus loin qu'elle se souvenait-, il avait été fidèle à ses promesses. Mais pouvait-on tromper sur quelque chose que l'on ne disait pas ou seulement à demi-mot ? Car il était ainsi : jamais il ne disait tout. Peut-être était-ce par conviction, peut-être par pudeur mais alors que le jeu s'installait, il en défiait les règles. Et ce soir ne dérogeait pas à la règle.

« Les légions ».

La chose était murmurée comme un fantôme. Le passé depuis longtemps enfoui venait de refaire surface avec violence : le monstre était réveillé. Ce qu'elle en savait n'était guère plus que quelques parchemins que lui avait fait lire son précepteur. Ô glorieuse Serramire, te rendra-t-on ton apanage Céleste ? Elle ricana. Voilà que le Bon Marquis se prenait pour un Séraphin. Quelle tristesse, quelle désolation. Elle dégomma la fin de sa coupe d'une traite. Ainsi donc, après avoir passé la pommade il espérait se préparer à la guerre. Lentement, il avait pris contrôle d'un jeu qui la fascinait, la séduisait autant qu'elle le terrifiait.  
Son discours se termina glorieusement et les applaudissements ne tardèrent pas à pleuvoir. Si la majorité acclamait Aymeric, Alanya ne loupa ceux qui n'en firent rien. Stoïques en ce début de repas, ils n'étaient certes pas en majorité mais la baronne attendait de voir lequel serait le plus courageux. Se faisant resservir une coupe, elle se délectait de ce qui allait bientôt se produire.
Une femme blonde qu'elle ne connaissait pas parla fort, coupant les quelques félicitations que se lançaient ceux qui ne savaient réfléchir. Elle avait un joli minois qui lui valut quelques railleries parmi quelques plaisantins de l'assemblée. Mais au moins, parla-t-elle assez justement. Les yeux gris de la baronne ne se détachait pas du spectacle et si elle gardait le silence, elle donnait son approbation à cette courageuse qui se dressait au milieu de tous. C'était la première qui méritait l'intérêt depuis le début de la soirée. Mais avant que le suzerain ait eu à répondre, le noble Jérôme rétorqua une réplique sans violence mais à la naïveté sans égal.
Et elle ne put retenir un rire puissant qui résonna contre les pierres de la salle.

« N'est-il point de meilleure manière que d'assurer ses frontières ? Allons, Jérôme, vous avez bien raison ! Notre bon suzerain ne saurait rendre une aussi courageuse décision pour de la mauvaise politique ».
La moquerie n'était même pas voilée. Elle estimait le seigneur de Clairssac pour de nombreuses qualité, mais il n'était pas un esprit à qui convenait les choses de la politique. Ses mirettes se figèrent sur le marquis. Elle le dévisageait sans pudeur – les vapeurs du vin aidant certainement à l'effronterie.
« Voilà de sages décisions pour vous, votre Excellence. D'autres n'en auraient pas pris d'aussi bonnes. L'Alonnan vous fournira hommes et machines car Serramire est grande ». Elle lui offrit un esquit sourire. Il avait obtenu son allégeance bon gré mal gré, et même si elle l'estimait, il n'en restait pas moins une personne dont elle se méfiait comme de la peste. « Mais permettez moi cette question : quelle guerre allez-vous mener ? ».
Elle sirota l'alcool brun dans le fond de son godet.
« Vous demandez des hommes, des armes. Vous targuez la gloire qui fut mais il n'y a pas de gloire sans glorieuses actions ; sans nul doute vous avez réussi à nous unir sous une même bannière – la votre. Votre nom perdurera. Vous êtes l'homme qui a vaincu le peuple Noir. La renommée vous est déjà acquise ici et même au delà de l'atral, j'en suis sûre. Alors mon seigneur, qu'est-ce qui ferait de Serramire une terre plus glorieuse encore ? ».
Elle ne prêtait pas attention à l'assemblée. Elle s'en foutait éperdument.
« Odélian vous résiste encore – n'en déplaise à son Honneur ici présent- mais viendra le jour où elle ploiera et vous le savez autant que moi. Comptez-vous, après avoir nourrit du sang de nos valeureux soldats les champs d'Oësgard, réunir des troupes qui n'ont pour seul désir que de défendre leur foyer et partir le verser ailleurs? ».
Elle se tourna vers la Dame qui s'était adressé à lui précédement.
« J'entends ce que vous dit cette noble Dame, votre Excellence. J'entends ses craintes et ses doutes mais vous, les entendez-vous ? ». Et elle se tût.
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Aline de Clairssac
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MessageSujet: Re: De la grandeur serramiroise.   De la grandeur serramiroise. I_icon_minitimeMer 28 Sep 2016 - 14:36

Une fois n'est pas coutume, le marquis de Serramire avait demandé à ses vassaux présents au tournoi de rester quelques jours de plus dans la cité. Et, bien entendu, Jared Froissart de Montévlin avait répondu à l'appel du marquis. Cela lui avait laissé le temps de discuter avec plusieurs nobles des Trente qu'il n'avait que peu l'occasion de rencontrer, de prendre des nouvelles des différentes frontières et de parler avec ceux qu'ils connaissaient le mieux des Monts d'Or. Et de ce qu'il pouvait conclure des différentes informations qu'il croisait, il allait encore avoir du travail en rentrant à Montévlin. Et pas des moindres...

Assis sur une chaise des plus simples dans le fond de la salle, Jared n'écoutait que peu les discussions plus ou moins vantardes des autres seigneurs. Ses pensées passaient d'un problème à l'autre en passant par toutes les solutions possibles lorsque l'heureux problème du futur mariage de sa soeur ne venait pas laisser un rayon de soleil éclaircir un peu tout cela. Il resta ainsi un bon moment, ne relevant la tête que pour saluer de nouveaux arrivants, jusqu'à ce qu'Aymeric de Brochant ne prenne la parole afin de mettre un terme à un début de dispute. Jared fit alors disparaître ses pensées pour s'occuper du moment présent et écouter le marquis dire ce qu'il avait à leur annoncer. Et comme bien d'autres, il en fut des plus surpris, au point qu'il ne put empêcher ses sourcils de se relever pendant plusieurs secondes : il voulait dorénavant s'occuper personnellement des frontières ? Et surtout établir le système d'ordonnance aux armées des Trente ? Cela ne sentait pas bon... Le marquis avait quelque chose en tête qui n'allait certainement pas lui plaire, d'autant plus qu'il commençait à parler de guerre. Jared le laissa continuer à parler, n'exprimant son désaccord que par le biais de son visage. Lorsque le grand homme fit comprendre que parmi tous les Trente l'un d'entre eux dirigera le tout, le montagnard fut de ceux qui ne levèrent pas la main pour se proposer à la noble tache que voilà. Refoulant un soupir naissant, il tourna les yeux vers son confrère habitant plus à l'est : les Monts d'Or risquaient de ne pas accepter si facilement de laisser leurs troupes à des personnes qui ne connaissaient absolument rien aux montagnes, même si elles étaient habituées aux confrontations avec les habitants des Wandres. Même si de bien jolis mots étaient employés.

Bien rapidement le marquis passa à bien plus important qu'une masse de petits seigneurs, notamment aux barons. A partir de ce moment, et Jared applaudit intérieurement le talent d'orateur d'Aymeric pour la série de coups qu'il assénait, ceux de la petite noblesse n'avaient plus rien à dire. Chacun à sa place et il était désormais temps aux grands de décider de l'avenir de Serramire. Et si Jared fut mauvaisement surpris par les dires de Jérôme, ce qui le refroidit quelque peu quant à un quelconque élan de non-acceptation ou de questions, les dires des deux dames firent du bien à son esprit. Prenant son menton dans sa main, Jared écouta, réservant ses mots pour le moment où une intervention de sa part aurait toute sa logique.
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MessageSujet: Re: De la grandeur serramiroise.   De la grandeur serramiroise. I_icon_minitimeJeu 6 Oct 2016 - 13:39

Avisant ses vassaux inquiets et défiants - fort heureusement, ils se trouvaient en minorité - Aymeric ne put réprimer un soupir. Devait-il pour autant blâmer ces élans d'indépendantisme ? Quel vassal ne cherchait-il pas à s'émanciper de l'étreinte pesante de son suzerain ? Et inversement, quel seigneur n’œuvrait pour maîtriser plus encore ses tumultueux hommes lignes ? Telles étaient les allées et venues de la noblesse péninsulaire ; le marquis lui même en connaissait quelque chose, car depuis dix ans, le couronne n'avait eut de cesse de resserrer la bride sur Serramire. Finalement, peut-être était-ce par une ironique corolaire qu'il pressurait désormais ses vassaux pour mieux échapper à l'étreinte royale.

Un autre, plus buté, eut tempêté contre la défiance de ces vassaux inquiets : Comment ? Ces ladres doutaient de leur marquis ? Félonie que tout cela. Aymeric, en revanche, ne pouvait se résoudre à fustiger ses hommes. Lui-même était attaché à la tradition féodale, que son pragmatisme naturel ne pouvait totalement chasser. Par dépit, son esprit avait relégué cette chose au même rang que la chevalerie ; une coutume certes attachante, mais désuète. Il lui était d'autant plus difficile de blâmer ses plus fervents féaux, que ceux-ci, esseulés et privés de moyen, poussaient là leur chant du cygne.

En effet, cela faisait près d'un mois que la chevalerie, et avec elle le vieux ban serramirois, avait été mis en bière, sous les murs d'Amblère. La folle charge contre les armées puysardes n'était pas étrangère au sang bleu qui s'était vu répandu à gros bouillon. On avait couru droit vers la gloire, en dépit de l'art militaire, et récolté une cuisante défaite. L'avouerait-il seulement ? Aymeric, ce jour-là, avait consenti à ce que l'assaut ait lieu pour inculquer une leçon à ses vassaux. On avait fustigé sa patience, érigée en immobilisme ; on avait décrit son alliance avec les Falkenberg comme une couardise. En faisant donner la charge par ses bouillonnants feudataires, le marquis avait attendu - pire, espéré ? - la défaite, gageant que celle-ci mènerait les vassaux à se fier un peu plus à son commandement.

Seule l'ampleur du désastre avait échappé à Aymeric, quand, à la différence des troupes d'ordonnances, se repliant rapidement et en bon ordre dès les premiers signes de déroute, la chevalerie, elle, s'était obstinée sous les murailles ambléroises. Ce jour là, le marquis, lui aussi moult blessé, s'en était pâmé, près de devenir fol. Aujourd'hui, pourtant, cette hécatombe ne lui ouvrait-elle pas un boulevard ? Car du ban féodal que Lourmel, ou d'autres, réclamaient, il ne restait mie. On aurait beau exalter la chevalerie serramiroise comme un étendard, celle-ci avait été grièvement blessé. Jérôme n'avait pas manqué de souligner la chose - peut-être était-il, en dépit de sa réputation, l'homme le plus pragmatique ici ? C'était là tout l'avantage du marquis, qui, sortant victorieux de sa dernière guerre, avait également vu ses troupes les moins fiables expurgées manu militari de l'armée. D'aucuns l'avaient déjà compris, et s'étaient rangé derrière son avis ; quant aux autres, il lui faudrait rassurer leurs inquiétudes certes, mais aussi les mettre devant le fait accompli.

Levant un instant le bras pour intimer le silence à l'assemblée, Aymeric prit la parole : « Là, oui, je vous ai entendu, entama-t-il. La guerre ne s'est que trop repue de nos gens pour que je la désire à nouveau. Non que je renonce à mes prétentions légitimes sur Odelian, mais, dame, n'êtes vous pas lasse du tumulte ? Las, d'aucun ne le sont guère, et je gage que la conflagration nous gagnera à nouveau. La cour du Soltaar est pétrie d'intrigues, quant aux grands feudataires, ils ont le cœur à la sédition » Les diverses entrevues effectuées ces dernières semaines avaient raffermi son jugement sur l'état de déliquescence du Royaume. « Les mois passés nous ont vu sortir victorieux, mais moult affaiblis ; je ne souhaite point rester à la merci des voisins que nous avons défendu. Jouissons de l'année hiémale pour regagner notre force, tel est mon désir. »

Et quel saint désir! Ses marquis de voisins, aux ambitions manifestes et aux positions troubles, n'avaient pas manqué, eux d'économiser leurs forces. Quand le drow avait paru, les deux grands seigneurs riverains s'était contenter d'envoyer des régiments médiocres - ils ne se privaient cependant guère d'arguer leur part dans la défense de la Péninsule. Si l'entrée dans une année hivernale rassurait grandement Aymeric - le général hiver n'était-il pas le meilleur commandant serramirois ? - elle ne pouvait cependant lui faire oublier les menées de ses compères ; l'un ayant lorgné sur ses baronnies, l'autre sur rien de moins que la couronne. Assurément, on aurait pas fini d'entendre parler de ceux là, et si Aymeric se plaisait de paraître aux yeux du monde comme une bête blessées, il préférait naturellement que cela se restreigne aux apparences.

Seul un fol n'eut partagé le constat du marquis ; l'approbation fut unanime. L'impératif repos ne pouvait pour autant être la seule consigne, et d'aucuns, comme la dame de Lourmel, récusaient que ce temps fut mis à profit pour transformer l'ost. À ceux-là, les explications logistiques ne suffiraient guère ; il n'était question de l'armement des futures troupes, mais de leur nature même. En sourdine, c'était un reproche latent, celui supposant qu'Aymeric désarmait ses vassaux. Peut-être était-ce in fine le désir du marquis, pour autant, ce dernier ne se berçait guère d'illusion. Merwyn n'avait-il pas justement perdu son fief avec la trahison de ses troupes ? L'homme avait remis l'armée dans les mains de roturiers qui ne lui étaient lié autrement que par la solde. Lorsque le vent avait tourné, les Kastelord, les Héréon, ces mêmes qui s'étaient taillés par la suite de coquets fiefs ici et là, avaient promptement tourné leur veste pour s'incliner devant le Roy. Si d'aucuns pensaient qu'Aymeric commettrait la même erreur, et confierait ses épées à quelque spadassin payé en pièces d'or, plutôt qu'à ses féaux liés par l'hommage, ils se trompaient lourdement.

« Dame Maélyne, il n'est guère besoin d'expliquer la supériorité de l'ordonnance sur la levée : elle fut la raison du succès des ducs séraphins, et notre tendon d'Achille devant Amblère. Le baron Jérôme en a suffisamment dit, et je me félicite d'en avoir fait mon sénéchal. Cependant, le doute est légitime, car quel mauvais suzerain n'a jamais souhaité priver ses bons vassaux de leurs lames-liges ? Sachez donc cela, bons sires : ma confiance en vous tous n'a jamais été aussi grande, et c'est pour cela que je compte sur chacun d'entre vous pour commander à cette nouvelle armée. Je n'entends substituer une bande de croquants aux preux que vous êtes ; ce ne seront point des capitaines serramirois qui mèneront l'ost, mais bien des gens de Lourmel, de Versmilia, et du septentrion tout entier. »

C'est sous les applaudissements que le marquis leva ainsi la séance.

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