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 Le parrain serramirois

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Aymeric de Brochant
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MessageSujet: Le parrain serramirois   Le parrain serramirois I_icon_minitimeSam 25 Mar 2017 - 15:33

2ème jour de la 6ème énéade de Barkios, 9ème année du 11ème cycle.

Un long serpent s'engouffrait inexorablement dans la cité d'Oesgard. Depuis le matin, cette étrangeté, aux entrailles de blé, à la peau de bois, et aux écailles bardées de l'acier noir des troupes serramiroises, avait achevé les dernières lieues qui la séparaient de la capitale baronniale. Voila près d'une énéade que le convoi avait quitté Serramire, chargé de victuailles à destination de la marche orientale ; après un voyage laborieux, il était enfin arrivé à destination.

Si la procession avait occasionné un grand émoi dans les campagnes, la cité elle-même n'était pas épargnée. C'est qu'on avait annoncé la venue de cette extraordinaire caravane serramiroise depuis trois énéades déjà, et avec elle, l'ordre avait été donné aux vassaux de se rassembler dans la citadelle oesgardienne. Ainsi, les jours précédents avaient vu d'autres cortèges passer les portes de la cité, et la populace flairait naturellement l'évènement - non sans méfiance, elle qui n'avait que trop été habituée à la conflagration.

S'ils les ignoraient encore, les motifs du débarquement serramirois devaient cependant apaiser les oesgardiens. C'était la raison pour laquelle Roland de Versmilia avait accepté de mener le formidable convoi jusqu'au cœur de cette marche farouche dont il n'avait que de mauvais souvenir. Deux énéades plus tôt, le marquis l'avait convoqué, lui remettant la lieutenance-générale d'Oesgardie en son nom, ainsi qu'une série de tâches à accomplir dans la marche. C'est qu'on ne pouvait décemment délaisser cette terre, désormais que le baron en avait remis la régence à son suzerain. En mandant un de ses hommes les plus capable, Aymeric n'entendait pas seulement faire montre de présence, mais bel et bien œuvrer à la restauration de l'Oesgardie.

Le seigneur de Versmilia, du reste, n'était pas venu seul. On lui avait ainsi adjoint une pléthore de capistons, routiers et autres hommes de guerre, afin de présider à la réforme des armées. Une troupe populeuse gardait également le convoi, bien trop susceptible d'attirer les pillards dans cette terre en proie à la famine. En outre, Aymeric avait veillé que plusieurs de ses clercs partent à la suite de Versmilia, pour veiller à la bonne tenue des comptes oesgardiens, depuis trop longtemps laisser en proie à la gabegie. On entendait reprendre la besogne de Clairssac là où ce dernier l'avait laissé, et ne pas trainer à l'ouvrage.

Ainsi, c'est dès l'après-midi que furent rassemblés les vassaux dans la citadelle d'Oesgard, et sous le grand hall, Roland les instruit des volontés de leur baron quant à la succession à Clairssac, et, non sans émoi parmi l'assemblée, proclama la régence serramiroise. C'était probablement la pilule la plus amère à avaler, car pour les plus farouches oesgardiens, elle rappelait leur dernière défaite, et la mise sous tutelle de leur seigneur. Roland, cependant, ne laissa guère le temps aux hommes de se laisser aller à la grogne, dévoilant une longue liste de mesures voulues par le marquis.

Le premier acte du nouveau régent consisterait ainsi à la répartition de l'aide nourricière serramiroise. Aux portes de la famine, c'était là une aubaine pour les oesgardiens, dont l'hiver s'annonçait bien chiche. Chacun pourrait ainsi apprécier les avantages d'avoir un maître aux greniers aussi bien pourvus que l'étaient ceux de Serramire - les plus riches de la Péninsule. La légion organiserait la distribution des vivres dans les bourgs et les châteaux, et l'on veillerait à ce que chaque foyer reçoive ses boisseaux de grain, ses livres de farine, et ses miches de pain.

Quand d'aucuns s'étonnèrent d'un tel soucis du détail, objectant qu'il leur serait plus aisé d'organiser la distribution des vivres depuis leurs propres greniers, Roland ne put réprimer un rictus. S'il était venu tant en force, c'était justement pour éviter que l'aide serramiroise ne soit cooptée par la noblesse locale, qui ne manquerait d'en tirer profit. S'il ne pouvait éviter les seigneurs de prélever par la suite leur part sur le dos de la gueusaille, Roland entendait bien faire en sorte que celle-ci soit dépouillée par ses maîtres autochtones, quand l'étranger avait été si généreux. La rumeur décrivait les campagnes oesgardiennes en proie à la disette ; que les vilains quittaient chaque jour leur masure pour les bois, afin d'y braconner, ou d'y trouver quelque racine. Aux yeux de ces manants, le pain serramirois vaudrait assurément plus que l'or.

La générosité du parrain occidental ne venait cependant pas sans contrepartie ; en l'échange de la distribution des vivres, la nouvelle régence escomptait sur une docilité certaine de la noblesse locale quant aux travaux de réformes. Durant plusieurs jours, on tiendrait la cour à Oesgard, afin d'y décider des prochaines directives voulues par le marquis, mais aussi afin d'y recevoir les doléances. Certains vassaux avaient été quelque peu bruyant à ce sujet : il semblait que l'aide opportune de Serramire les eût motivés à demander un petit coup de pouce.

Le reste de la journée fut cependant pleinement consacré à la logistique de la distribution. Tour à tour, les seigneurs furent appelés pour énoncer l'état respectif de leurs fiefs, et le recensement de leurs serfs. L'exercice allait certainement donner une migraine infernale au bon Roland ; par chance, ce dernier bénéficiait de l'aide de Mare-Sel, qui, s'il en tira largement son parti, en octroyant une part copieuse de l'aide serramiroise pour l'hasseroyale, était en mesure, par ses comptes minutieux, de séparer le bon grain de l'ivraie, quand les vassaux furent tentés de tirer eux-aussi leur épingle du jeu. À mesure que l'après-midi avançait, c'était ainsi d’innombrables escouades serramiroises, suivies d'autant de charrettes, qui s'échappaient de la cité pour gagner les bourgades environnantes.

3ème jour de la 6ème énéade de Barkios, 9ème année du 11ème cycle.

La deuxième journée fut dédiée aux doléances, du commun dans la matinée, puis de la noblesse dans l'après-midi. Une ombre se présentait toutefois au tableau : effet, si les gueux se pressèrent en masse pour exposer leurs griefs, certains, parmi le sang bleu, avaient manqué à l'appel. On s'en était aperçu la veille, lors des répartitions des vivres ; ce matin là, Roland décida d'aborder le sujet frontalement.

On était ainsi sans nouvelle de plusieurs seigneurs : Flourens, le bâtard de Kahark, Hildouin Zollern, seigneur de Haurse-Porc, et Alix, la dame d'Amblère. Il aurait été bien malaisé pour Roland de savoir quoi faire, aussi décida-t-il de placer sous séquestre ces trois fiefs, le temps d'en informer le régent et le baron. On enverrait des capitaines serramirois s'assurer des garnisons locales, jusqu'à ce que de la maison mère parvienne une décisions quant à la remise des fiefs à d'autres seigneurs.

La chose ayant été éludée, chacun put alors venir et présenter ses doléances. Si la guerre semblait avoir assagi ces hommes, qui depuis l'invasion noirelfique s'étaient gardé de se chercher querelle entre eux, elle avait en cependant enhardi d'autres. En de multiple occasions, les noms de hanse de brigands revinrent. Dans les bois d'Aatenach, on disait que rôdait la bande de l'Aisin, autrefois un porte-glaive du Sanglier Amblérois, aujourd'hui fait pleinement brigand. Les échevins de Dormmel (qui formaient en fin de compte une véritable fratrie, tous fils de feu Firiel de Courreau), évoquèrent quant à eux non sans peur le retour de leur benjamin, un traitre de frère au doux nom de Léogvild, et qu'on surnommait l'Errant. L'homme avait été aperçu rôdant dans l'Andelwald en compagnie de sa bande d'affreux jojos, et l'on redoutait qu'il tentât de s'emparer de la ville de leur père. Si autrefois Fenricks, leur ainé à tous, avait porté les armes, les cadets de la famille semblaient aujourd'hui bien en peine, le premier d'entre eux disparu. C'est que ni Godrick, Osvald, Erdegard ou Jollring n'avait appris l'art de la guerre, destinés qu'ils avaient été par leur père au commerce ou à la prêtrise.

L'affaire des hanses de bandits constituait cependant un morceau trop important au sein des directives du marquis pour qu'on l'expédiât ainsi à la hâte, et comme on approchait de l'heure du manger, Roland mit fin à l'assemblée, assurant qu'il avait le problème bien à cœur, et était venu à cet effet en compagnie d'hommes rompus aux armes, qu'il leur présenterai demain, au moment d'aborder la question de l'Ost.

4ème jour de la 6ème énéade de Barkios, 9ème année du 11ème cycle.

Restaurer l'ordre dans la baronnie constituait en effet un travail colossal, et ô combien primordial ; il fut l'objet du troisième jour à la cour d'Oesgard. Fort heureusement, la régence de Clairssac avait pris à bras le corps ce chantier, et l'homme avait laissé derrière lui des d'importants progrès. Jérôme avait allié la lutte contre les brigands avec la restauration de l'Ost, sous l'alternative simple mais claire du drapeau ou de la corde. En effet, les guerres successives menées en Oesgardie en avait fait le terreau rêvé pour la pillerie, et on dénombrait de populeuses coteries de mercenaires qui s'étaient faites maraudeuses une fois la paix venue.

Or, à mesure que l'hiver se rapprochait, et que les conflits s'étaient tus, l'étau se resserrait autour de ces coquins ; Le Maréchal en avait recensé nombre de hanse, et approché plus d'unes. C'est que les compagnies mises au service du pouvoir local n'était pas une chose inconnue, en Oesgardie. Goar le Hutin avait compté ainsi plusieurs bandes de croquants parmi ses chiens de guerre, et lors de son retour au pays, Odoacre Heinster s'était entouré de sa cohorte toute droite rentrée d'Estrévent, les Compaings de la Piquerie. Si les bélîtres au service du Sanglier d'Amblère avaient pris le maquis, la compagnie d'Odoacre, quant à elle, après un service dans la cachematte-de-l'Isle à Hasseroi, était finalement devenue les premières compagnies de l'armée réformée d'Oesgard, et la garde d'honneur des barons. Ses chefs, les anciens lieutenants du baudoinide, en avaient été grassement récompensés : Bertrand von Simmel en avait été fait capitaine, quand au zurthan Drocques de Sybe, et à Svade Bredon, les deux hommes s'étaient vu confier la tâche de former deux compagnies supplémentaires sur le modèle de leur troupe d'origine.

La cavalerie n'était pas en reste. Terre rétive aux mœurs chevaleresques venues du Médian, Oesgard, dans les années qui avait suivi la chute du baron Baudoin, avait cependant joui d'un regain de vigueur féodale. Ce retour en force n'avait cependant guère duré, quand la noblesse locale, qui s'était enhardie avec l’ascension au pouvoir de Goar, avait vu son essor s'arrêter brutalement lors de la désastreuse campagne estréventine menée par ce dernier. Mais là où la chevalerie locale, qui avait aspiré à fleurir sous le règne du Hutin, périclita, d'autres profitèrent du vide laissé. C'était déjà la cas, des années auparavant, de la compagnie stygienne, que l'on nommait aussi compagnie noire, ou encore celle des orphelins. Venus avec le régent Egmont, le comptable royal, ces cadets de famille d'Ancenis, d'Olysséa et de Hautval avaient prospéré grâce aux guerres successives, louant leurs services au plus offrant. De même, la compagnie bleue, que l'on connaissait plus encore sous le nom des Longiers, avaient profité du retour opportun de leur chef, Hildouin Zollern, au bercail pour s'installer dans le pays.

Les premiers travaux de Jérôme avaient ainsi été d'amadouer ces compagnies, les intégrant comme troupes à part entière des armées oesgardiennes. Cependant, si les hommes avaient gouté des casernes chaudes, et de la solde fixe, tandis que la campagne locale se refroidissait et s’appauvrissait, ils n'en avait perdu pour autant leurs mœurs de bélîtres, et les doléances de la veille, surtout celle des petites gens, avaient fait état des excentricités de la nouvelle armée. À cela, Roland répondit bellement par l'octroi de nouveaux capitaines, venus de Serramire et rompus à l'exercice de la réforme, aux compagnies récemment créées.

Le restant de la journée fut ainsi passé en attribution des divers bataillons à leurs nouveaux capitaines. Si l'on reconfirmait des oesgardiens, tels que les lieutenant du baudoinide ou les fils Zollern, plusieurs des troupes, qu'elles fussent d'anciennes compagnies de mercenaires, ou de la soldatesque neuve, furent reprise en main par des hommes de guerre serramirois. C'est que ceux-ci ne manquaient pas à l'appel, tant il est vrai que Serramire produit, plus que toute autre ressource, d'ineffables gens d'épée. Cadets de famille, vétérans des légions, ou encore gentilshommes ayant gagné le septentrion en quête de gloire, ce n'était pas les officiers qui manquaient au marquisat. Les seigneurs oesgardiens découvrirent cet après-midi là les hommes qui se chargeraient de la bonne tenue de l'ost. Et quels parangons! Abélard de Vauremas, chevalier ancenois à la solde du marquis ; les seigneurs des Muires et de Brillur, Lothaire-Ferdinand, qu'on nommait par commodité "le Rouge", eu égard à sa chevelure, et Umbold Asplund. Ou encore, les inénarrables cadets de Brenheim, Egmont, Ewald et Odon, aux frasques aussi singulières que ne l'étaient leurs moustaches respectives.

L'octroi des compagnies jouit ainsi d'un temps fort étendu, si bien que la journée toucha à sa fin plus tôt que prévu.

5ème jour de la 6ème énéade de Barkios, 9ème année du 11ème cycle.

La séance reprit de fait le lendemain, quand on décida des prochaines tâches qu'aurait à effectuer l'ost, désormais pourvu de chefs coulés dans l'airain même. On s’emploierait ainsi à parachever la réforme de la troupe en l'envoyant s'exercer contre la canaille qu'elle avait fréquenté auparavant, et chaque seigneur fut appeler à signaler les bande de croquant qui hantait leurs fiefs. Revenant à la charge, les Courreau se firent les plus vindicatifs ; le premier contingent fut naturellement envoyé direction l'Andelwald. À cela, Hiéronyme Savognard (le vieux tant que le jeune) objecta qu'un deuxième bataillon ne serait de trop, tant il est vrai que les brigands cis dans le bois ne se contentaient de rôder vers Dormmel, mais montaient également trop souvent vers Andelheim. Le seigneur d'Aatenach, Conrad de Lonsville, frère de feu Jehan le Borgnat, trépassé bravement en défendant Amblère contre les puysards, ne manqua pas non plus de demander un renfort contre les hommes de l'Aisin qui maraudaient dans ses terres.

Roland se mordit bientôt les doigts d'avoir ainsi demandé à chacun d'énumérer ses maux, car rapidement, chaque seigneur rivalisait d'argument pour qu'on détachât plus de troupes à son fief ; mais c'était là un mal pour un bien, et le seigneur de Versmilia eu redouté qu'à l'inverse, les féodaux ne se braquent à l'idée de capitaines étrangers dans leurs pénates. Cependant, la situation du pays était lamentable, et l'occasion fit le larron : on demandait tant et plus de renforts qu'Oesgard ne pouvait en allouer.

Toutefois, les ennemis de l'intérieur ne constituaient pas l'entièreté du menu, et avisant les gens de Krahof et d'Hasseroi, le lieutenant-général ordonna que l'on dépêche plusieurs compagnies aux frontières Nord de la baronnie ; il fallait se prémunir des velléités sauvageonnes. De même, mandant les fils Zollern, Roland chargea ceux-ci de regagner Haurse-Porc, afin d'en reprendre le contrôle, et, si les Cinq voulaient qu'il fut encore en vie, de retrouver leur paternel aujourd'hui bien silencieux.

On informa alors le lieutenant-général qu'un avait aperçu, moult énéade auparavant, une ambassade venue droit de l'elferie, et quels étaient ses désirs quant aux habitants de l'Anaeh. Un éclat de rire général fit aussitôt écho à la proposition, et l'on ajourna la séance.

6ème jour de la 6ème énéade de Barkios, 9ème année du 11ème cycle.

La cinquième journée à la cour fut ainsi dédiée aux corvées hivernales : si la gueusaille serait désormais repue, il n'était pas question de la laisser inactive, durant les quelques mois où les champs demeuraient en jachère.

Ainsi, la dernière décision de la régence fut d'ordonner que les travaux de corvées soient dédiés aux réparations des ponts et chaussées. La guerre avait laissé les routes à l'abandon, et la plupart n'avaient vu passer de marchands depuis fort longtemps. La procession de Serramire à Oesgard avait été rendue périlleuse par ce défaut ; quant à certains lieux dans le fief, ils demeuraient coupés du reste du monde par des rivières indomptées.

La priorité fut ainsi donnée à la route de l'Hasseroyale, menant à la trouée serramiroise, entre les Hortles et les Monts d'Or. Quant aux ponts, trois furent nommés : celui de Vosvenargues, qui avait été jeté à bas par le seigneur de Haurse-Porc, Hildouin Zollern, lors de la rébellion Falkenberg, le bac sur la Gylève, qui ne pouvait décemment assurer la liaison avec Andelheim, et qu'il fallait remplacer par un pont maçonné ; enfin, Peyrepont, l'un des rares passages sur la Vâmme, et que l'on avait fait s'écrouler après la perte de Haurse-Porc l'an passé. Enfin, c'était le désir du marquis pour une reprise des échanges avec la nanie qui fut formulé ; il avait ainsi ordonné qu'on affrète plusieurs barges à destination de Lante, ce qui était encore la route la plus sûre pour gagner les territoires septentrionaux.

Certains châteaux requéraient également que l'on se dévoue à l'entretient. Si toutes les forteresses n'avaient souffert de la guerre, et parmi elles, la plus forte d'entre toutes, Oesgard, d'autres avaient payé un lourd tribu aux conflits successifs. Dans l'Andelois, il incomberait aux étherniens de rebâtir leurs défenses : c'était la troisième directive du marquis. La cité d'Amblère tout particulièrement, demeuraient meurtrie des batailles menées en son sein, par Norman le Terrible, puis lors des incursions noirelfiques. Sa citadelle, sur la rive Est de la Vâmme, avait grandement pâti de l'assaut des puysards. La ville, sur la berge Ouest, avait vu une partie de sa courtine sapée lors de la reconquête, et le bourg avait souffert des incendies successifs. La populace ne l'avait regagné que partiellement, d'autres préférant tenter leurs chances ailleurs en Oesgardie, on en Péninsule.

Le marquis, en réponse à cela, avait ainsi décrété une levée des impôts sur la ville, et ce pour deux années consécutives. On enverrait un ensemble de clercs là-bas afin de relever l'état des bâtisses, et leurs occupations : pour celles qui demeuraient inoccupées, on accordait leur octroi à tout homme libre volontaire, pour peu qu'il s'engage à y vivre, et à reconstruire l'endroit. Les droits de péage aux portes seraient en outre suspendus pour un an, et on accorderait aux corporations regagnant la ville une voix auprès de l'officier de séquestre. C'était là une aubaine pour les bourgeois, et lorsqu'il prononça la décision, Roland de Versmlia put voir les yeux de Mare-Sel briller.

C'est sur ces entrefaites que le lieutenant-général leva enfin la séance, enjoignant aux seigneurs locaux de prendre une dernière collation avant de regagner leurs pénates respectives. La coterie enfin dispersée, Roland put jouir d'un lendemain calme : il se reposa au septième jour de toute son œuvre qu'il avait fait.

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MessageSujet: Re: Le parrain serramirois   Le parrain serramirois I_icon_minitimeJeu 25 Mai 2017 - 15:34

9ème jour de la 1ère énéade de Verimios, 9ème année du 11ème cycle.

Prises le mois précédent, les décisions du régent, appliquées par Roland de Versmilia, portèrent leurs fruits. Peu de temps après l'arrivée du lieutenant général d'Oesgardie, et l'envoi de compagnies à travers le pays pour y faire régner l'ordre, les missives et rapports en tout genre commencèrent à retrouver le chemin de la citadelle d'Oesgard. Trop longtemps laissée à l'abandon, la baronnie avait reprit le chemin vers la rectitude qui constituait véritablement son épine dorsale.

Les premières nouvelles, hélas, ne comptèrent pas au rang des meilleures, quand le jeune Lothaire Zollern rapporta d'Haurse-Porc la mort de son père. Parti des années plus tôt dans l'Hasseroyale pour servir le Baudoinide, le fils du Long avait été séparé de son géniteur par la guerre de l'usurpation de Goar. Cette rupture avait été continuée par la remontée du Maréchal Jérôme depuis Alonna, quand à la faveur d'une insurrection, on avait occis le sire de Horse-Porc.

Revenu de Serramire, où il avait assisté à la Seimaunios, Roland de Versmilia rapporta avec lui les dernières directives du baron et de son régent. Lothaire hérita du fief de son père, et avec elle la charge de gardien de Peyrepont, dont on avait déjà entreprit la reconstruction.

L'heure étant aux disparitions, ont appris également du Nord que le seigneur de Krahof, Hagen de Mizar, avait entrepris une battue dans les Wandres. Suivant les traces du zélé Jehan de Lonsville, l'homme s'était lancé dans une chasse au nigromancien hortelin, et quand la compagnie menée par Lothaire-Ferdinand le Rouge gagna Krahof, elle trouva la forteresse vide de son maître. Le seigneur des Muîres ne s'en offusqua guère ; quelques jours après avoir pris ses quartiers au nom du baron dans l'immense château, on put déjà voir les troupiers du Rouge s'activer dans la campagne.

C'est que l'homme, dont les fiefs serramirois bordaient les Malboscs, connaissait lui aussi le wandrais. Prenant exemple sur l'entreprise menée jadis par Anselme de Bastylle, et couronnée de succès, Lothaire-Ferdinand s'employa à dresser le long de la frontière septentrionale plusieurs feux d'alarme. Les Hortelins jouissaient d'une sinistre réputations ; plus casaniers que leurs cousins sigols, ils n'en étaient pas moins ensauvagés jusqu'à la moelle. Le renforcement de la frontière aurait en outre l'heur d'informer du retour du jeune Mizar, ou à défaut, de son trépas.

7ème jour de la 3ème énéade de Verimios, 9ème année du 11ème cycle.

Cependant, c'était d'autres bois qu'hantaient d'autres croquants. Tandis que les neiges enchâssaient un peu plus le pays, la canaille se montrait, elle, de plus en plus entreprenante, en proie à cette férocité qu'ont les bêtes aux abois. C'était là qu'elle demeurait dangereuse, mais c'était là également qu'elle commettait des erreurs. Cela, les cadets de Brenheim, eux même aux loisirs un peu brigands sur les bords, le savaient fort bien, et mirent ce savoir à profit lors de la capture de l'ineffable Léogvild de Courreau, le frère renégat des échevins de Dormmel, qui troublait les nuits des siens depuis fort longtemps.

Le ravitaillement emporté de Serramire n'avait en effet manqué d'allécher la canaille, qui à l'abord de l'hiver, faisait ses réserves. Se cantonnant usuellement au braconnage et à la pillerie, elle entreprit alors de rançonner encore plus les petites gens. Cette avidité fut leur trépas, quand les affreux jojos de Léogvild furent pris dans une embuscade, appâtés par un gros convois de provision. Les cadets de Brenheim, s'acoquinant avec la populace, avaient fait courir le bruit des énéades durant de l'arrivée de ce ravitaillement ; cependant, la rumeur de leur coup d'éclat résonna plus fort encore après.

Elle rayonna principalement grâce au sort fait à l'Errant, que les trois hommes supplicièrent sur la roue, avant de l'écorcher vif. Quand Roland apprit, quelques jours plus tard, par une missive lapidaire des trois frères, que le croquant avait gagné promptement la demeure aqueuse de Tari, le lent et douloureux trépas de Léogvild faisait alors déjà les gorge chaude des tavernes oesgardiennes.

Un pareil fait d'armes, contre une des plus grosses hanses de bandits du pays, ne manqua pas faire des émules. Aux prisonniers, d'anciens mercenaires, ont proposa un simple marché, le service ou la corde, que beaucoup acceptèrent, et les cadets de Brenheim, qui avaient mené pêle-mêle dans l'embuscade soldats d'Oesgard, épées d'emprunt et milices, se virent bientôt agglomérer ce petit monde, y incorporant leurs nouvelles prises, pour former les nouvelles compagnies du baron.

6ème jour de la 5ème énéade de Verimios, 9ème année du 11ème cycle.

Recevant ainsi nombre de rapports encourageants, Roland s'employa à veiller à la reprise du commerce en Oesgardie. Dès lors que le brigandage périclitait, il semblait opportun de remettre sur les routes maquignons et margoulins en tout genre. Si les grands travaux de chaussées furent interrompus par l'hiver, les corvées s'appliquèrent à rebâtir les fortins abîmés par le tumulte. Et qu'à cela ne tienne! Si la neige entravait les chemins, on irait par les fleuves. En effet, depuis le mois précédent, Roland s'assurait que les chantiers d'Oesgard ne traînent pas à la besogne. L'arrivée d'artisans venus du Sud de la Péninsule apporta une aide certaines aux nordiens, et bientôt, les premières galères fluviales pourraient quitter les cales sèches pour naviguer sur la Vâmme.

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MessageSujet: Re: Le parrain serramirois   Le parrain serramirois I_icon_minitimeJeu 25 Mai 2017 - 17:05

8ème jour de la 6ème énéade de Verimios, 9ème année du 11ème cycle.

L'hiver progressant, c'est une saison de geste chevaleresque dont profita l'Oesgardie. Ébaudis par l'exemple des cadets de Brenheim, le pays tout entier sortit de sa torpeur face à la canaille. Dans les villages, on s'enhardissait à la venue de pillards ; les gueux s'embusquaient sur le chaume de leurs masures, trouant les opportuns de moult dondaines s'ils lorgnaient un peu trop sur les poulardes. Lorsque les croquants avaient établi leurs quartiers avec pignons sur rue, et les Cinq savent qu'après les années d'indigences qu'avait connu l'Oesgardie, c'était là chose commune, alors la roture dardait fourches en tout genre pour bouter l'occupant hors des patelins.

Cependant, si la canaille détalait par endroit, il s'en trouvait d'autres où elle s'accrocha à ses domaines comme une moule au rocher. Dans l'Überwald redouté, une hanse avait ainsi trouvé refuge dans un village de charbonnier, et aux bêtes du bois s'ajoutèrent ainsi le danger des hommes. C'est ainsi sous les futaies épaisses de la forêt mauvaise que se joua la geste d'Abélard l'Ancenois, de la maison de Vauremas. Cet hiver là, l'homme prouva une fois de plus que la galanterie des hommes de la baronnie à la Chouette n'est pas vain mot.

Épris de fait d'armes, l'homme quitta la citadelle d'Oesgard entouré de cinq preux, et autant d'écuyers ; c'était là sa coterie, venue avec lui dans le septentrion, des pâtures d'Aspremont, des rives de Berdes, ou encore, car c'était des hommes pieux, et ils n'auraient dédaigné pour rien au monde le service de la DameDieu, des hautes voûtes de Primepreste pour l'un d'entre eux, le frater Olivier. Quand ils regagnèrent la cité du baron, c'était à la tête d'une troupe populeuse et aguerrie, où la gueusaille mêlait le bon sang.

Les hommes avaient ainsi passé moult énéades dans les entrailles de l'Überwald, à ferrailler aux côtés des forestiers pour en chasser tout gredin, si bien que lorsqu'ils en quittèrent les frondaisons, chacun pouvait énoncer dix fait d'armes à lui tout seul. La coterie née de cette grandiose geste ne manqua pas d'attirer l’œil de la roture, qui la compara déjà aux Leumbeurjacks d'antan.

5ème jour de la 7ème énéade de Verimios, 9ème année du 11ème cycle.

Dans le Nord, c'était une autre bande qui menait la vie dure aux bourgeois d'Aatenach. Les croquants de l'Aisin, ancien routier au service du Huttin Goar, avaient alors pris leurs quartiers dans les bois bordant le bourg. Umbold Asplund, le seigneur de Brillur, avait été chargé de mettre fin à leurs exactions ; pourtant, l'homme, qui ne brillait pas par le courage, craignait de croiser le fer avec pareil croquant. Au prétexte de son honneur, qui n'aurait su souffrir d'adversaires si avilis, Umbold repoussait le combat.

Cependant le froid mordait, et le ventre des brigands, reclus dans les bois d'Aatenach, grondait ; face à la rapine grandissante, les gueux avaient rapatrié derrière les murs seigneuriaux ce qu'ils n'avaient cachés dans des recoins connus d'eux seuls. Chaque jour qui voyait une sortie des gredins s'assortissait d'un butin si maigre, que les hommes eurent bientôt la chaire sur les os, et les routiers de l'Aisin furent bientôt rebaptisés Décharnés.

C'est alors que le seigneur de Brillur, qui, s'il n'excellait aux armes, se trouvait être un belluaire assermenté, mit à l'emploi son goût pour les bêtes. « Il n'est de chien qui ne puisse être dompté, et ceux-là ne sont pas différents de mes bouviers », aurait alors déclaré celui qui entretenait au pays des cohortes entières de lévriers et d'angolas. Faisant dresser non loin des bois plusieurs tables pourvues de mets, Umbold Asplund entreprit alors de nourrir la canaille, chaque jour, à heure fixe.

On veilla ainsi après l'estomac des décharnés pendant une énéade entière, afin qu'ils prennent goût au confort que pouvait offrir la générosité d'un tel seigneur. Cependant, quand le dernier jour toucha à sa fin, on ne déposa guère plus qu'un vélin sur la table à offrande. Aux croquants, on offrait cent autres festins, si tant est qu'ils rejoignent le service du baron ; cependant, l'offre se restreignait aux cent premiers, car aux autres, c'était la pendaison par les tripes que l'on promettait. Les hommes avaient indument profité de la générosité du baron, et il n'était que justice que celui-ci récupérât son investissement : en service, ou pour les derniers, en nature.

L'annonce ne souleva guère d'enthousiasme chez les croquants ; cependant, à mesure que les jours défilèrent, et que le froid et la faim mordaient à nouveau, les premières défections ne tardèrent à se produire. Deux énéades plus tard, les cent premiers repentis avaient passé les portes d'Aatenach. Aux nouveaux venus, on fit ainsi révéler l'emplacement de la cachette de l'Aisin, et peu de temps après, les hommes du baron taillèrent en pièce le dernier carré de gredins.

7ème jour de la 8ème énéade de Verimios, 9ème année du 11ème cycle.

Cependant, les chantiers en Oesgard continuaient, et à la fin du premier mois de l'hiver, c'est un premier navire qui goûta aux eaux glacées de la Vâmme. Il n'y avait, en vérité, plus singulier vaisseau : actionné par deux rangs de rameurs, il n'aurait su naviguer ailleurs que dans le lit généreux et renflé de la Vâmme, et se serait assurément ensablé sur l'Ambrie. Son pont haut perché le plaçait hors de l'atteinte des naufrageurs, que l'on savait sévissant sur les berges du fleuve, le long du trajet jusqu'à la Nanie. Pourtant, sa plus grande singularité provenait de sa proue ferrée, toute droit sortie des forges d'Oesgard. C'est grâce à ce bord acéré que l'esquif entendait percer à travers les eaux gelées du septentrion, même durant l'hiver.

La première expédition vit ainsi partir à son bord l'argentier Adèlphes, qui, revenu du Soltaar depuis des énéades entières, avait veillé à l'organisation du voyage. Le Vît-de-fer, car tel était son nom, gagnerait les pénates des nains pour y écouler des biens venus de Péninsule toute entière, et tacherait de renouer avec les petits pères de Lante les liens qui rapprochaient autrefois Diantra de Kirgan.

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Aymeric de Brochant
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MessageSujet: Re: Le parrain serramirois   Le parrain serramirois I_icon_minitimeMar 6 Juin 2017 - 21:17

3ème jour de la 1ère énéade de Karfias, 10ème année du 11ème cycle.

On était au beau milieu de l'hiver, et pourtant, l'atmosphère s'apprêtait à chauffer. Aux aurores, sous une neige battante, on ouvrit le fameux cercueil du Roy Trystan, celui qui contenait les inénarrables bâtons à feu du baron Baudoin. Ou du moins, ce qu'il en restait. C'est que les années n'avaient pas été clémentes envers ces armes infernales ; on se les était disputées, d'aucunes avaient disparu, tandis que la magie de certaines s'était essoufflée. Ainsi, des vingt-cinq bâtons existant à l'origine, il ne restait aujourd'hui plus que seize, rassemblés dans le cénotaphe de Sa Cécité.

Quand il avait ordonné de faire à nouveau l'usage des badines, Aymeric n'avait manqué d'éprouver un pincement au cœur : n'avait-il lui-même gagné par les armes une de ces terribles armes ? La jeunesse, alors, lui avait commandé, dans son emportement, de détruire l'extraordinaire objet, et il l'avait lancé dans les profondeurs de la Vâmme, dont elle n'était plus sortie - mais on raconte qu'à cette endroit remonte parfois d'épais remous, assortis de poissons morts. Avec les années et la sagesse qu'elles apportaient, le marquis s'était résolu de destiner les bâtons restant à d'autres buts bien plus utiles que de nourrir - et tuer par la même occasion - la faune fluviale.

Ainsi, aux débuts de l'an, deux hommes avaient gagné l'Oesgardie ; nuls autres que des sorciers du marquis. Le premier, un estréventin, se nommait Psammetikos, et on lui donnait aisément du Psammétique le thaari. Être secret, comme tout ceux de son art, il avait servi les ducs depuis des éons, au temps où ceux-ci entretenaient une cabale populeuse à leur solde ; quand Aymeric s'était rendu maître de Serramire, il n'avait manqué de gagner le service de celui-ci. Ainsi, c'est sous la houlette stricte, presque doctrinale, du thaari Psammétique, que la cabale serramiroise avait renaquit, quelques années plus tôt. Si la coterie n'égalait son ancêtre du temps des Séraphins, elles rassemblait cependant plusieurs praticiens chevronnés de l'Art.

Anaxagore, bien qu'il fut cantonné au rang d'assistant du sorcier, comptait au rang de ceux-ci. Venu de la lointaine Ésion, le symposiarque Anaxagoras avait en effet été débauché par son confrère un an plus tôt. Sa position d'assistant était un cache-sexe à son ambition : il était en effet certain de succéder au Thaari lorsque celui-ci casserait sa pipe. Or, avec la tâche qui leur avait été confié, cela pourrait arriver d'une minute à l'autre.

En effet, si les oesgardiens ne s'y entendaient guère en magie, la seule chose qui put bien les détrôner en ignorance n'était autre qu'une horde de prêtre d'Othar. Il n'y avait guère plus méprisable pour un pratiquant de l'Art que de voir un illuminé en toge se targuer d'y connaître quelque chose en la matière. Pire encore : ces barbares surenchérissaient, assommant de mise en garde les deux sorciers. Voire un maréchal-ferrant conseiller un orfèvre n'eut pas été moins drôle ; sauf qu'il n'y avait guère matière à rire quand l'enjeu pouvait vous péter à la gueule.

On écarta bientôt les curetons des badines infernales, qui seraient alors étudiées par les deux magistères. Les deux hommes avaient pour tâche de s'assurer que la magie des armes ne s'épuise plus, et qu'elle fut stabilisée ; on ne désirait pas reproduire les mêmes incendies de granges, comme ceux ayant suivi la découverte des armes par les Falkenberg. Le première exemplaire, une fois qu'on serait assuré de son bon état, serait envoyé à Serramire ; quand au reste, dès qu'il serait opérationnel, les magiciens s’emploieraient à former les hommes à leur usage, aussi tragique qu'il leur fut de voir pareil jouet dans les mains de ces béotiens.

5ème jour de la 3ème énéade de Karfias, 10ème année du 11ème cycle.

Cependant, l'hiver sévissait. Lorsqu'il fut temps de mettre à flot la deuxième galère fluviale, d'un genre nouveau dont le Vît-de-fer avait été l'ambassadeur, c'est le froid qui vint s'en mêler. Si les gelées ne manquèrent d'égayer la gueusaille, qui plusieurs jours durant s'en vinrent baguenauder sur les berges de la Vâmme, elles bloquèrent dans son œuf même le Rodomontesque, deuxième fleuron de la future flotte baronniale. En effet, si l'on avait pourvu de la galée d'une lame en guise de rostre, destiné à briser la glace, on n'avait pas prévu que celle-ci s’emparerait des chaînes qui assurait l'emprise d'Oesgard sur la Vâmme.

Dès lors, un curieux ballet d'ouvrier, armés de pioches et de torches s’affairèrent à libérer les lourds maillons des flots gelés ; la tâche ardue, néanmoins, ne manqua de signer la perte de plusieurs d'entre eux. On en voyait ainsi, de temps à autre, emportés par un coup de pioche trop violent, s'élancer sur la glace pour finir dans l'eau, d'où ils n'émergeaient, plus tard, qu'étaient devenus glaçons eux-même. Si l’attraction attira d'abord, du haut des ponts d'Oesgard, les badauds, on se résolut tout de même à préserver les braves d'une mort si misérable, si bien que quelques jours plus tard, les ladres se passaient une corde autour de la taille, afin d'être retenu avant un grand plongeon.

Durant la troisième semaine de cette nouvelle année, on finit ainsi d'extirper la longue chaine, qui fût ôtée pour l'occasion. C'est que le commerce, en ces temps frigides, ne florissait guère sur la Vâmme, pour qui ne pouvait franchir les obstacles glacés. Lorsqu'à la fonte, les galées circuleraient à nouveau, on remonterait le dispositif ; d'ici là, le fleuve ne serait accessible qu'aux vaisseaux suffisamment massifs (ou bien dotés d'un rostre à lame) pour faire éclater la glace sous leur passage ; le Rodomontesque, finalement, pu émerger de l'Oesgardie qui l'avait vu s'immerger, gagnant le lointain Estévent avec à son bord l'ineffable Étienne Mare-Sel.

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MessageSujet: Re: Le parrain serramirois   Le parrain serramirois I_icon_minitimeVen 1 Déc 2017 - 15:22

3ème jour de la 5ème énéade de Karfias, 10ème année du 11ème cycle.

"Pauvres mais rassasiés!",  n'avait cessé de se répéter l'ineffable Étienne Mare-Sel. Ç'avait été son mantra tout le long du retour, ce serait son apothéose une fois revenu au bercail. "Riches d'enseignements", murmurait quant à lui inlassablement Adèlphe le Scylléen, tandis que le Vît-de-fer descendait paisiblement l'Olyia pour regagner l'Oesgardie. Tout deux s'enorgueillissaient d'avoir fait contre mauvaise fortune bon cœur. Aucun des deux, se retrouvant sur la Biir Mark, ne sut duper l'autre.

« Les merveilles thaaries ne sont pas toujours celles que l'on croit », avança l'un. « La beauté de la nanie réside dans ses secrets, je gage », rétorqua l'autre. Ils se toisaient comme deux amants timides à qui la pudeur commande d'attendre que l'autre se dénude pour en faire de même (ou bien d'attendre qu'on éteigne la lumière). Finalement, dans un soupir partagé, tout deux abattirent leurs cartes, quand on déchargea chaque navires l'un à côté de l'autre (et en plein jour).

Il avait espéré les cales du Rodomontesque drapées de soieries d'estrévent, remplies de barils d'épices exotiques, au lieu de quoi en sortit-on des tonneaux à n'en plus finir de farine. Du Vit-de-fer, lui s'était figuré les planches croulantes sous les pierreries et les livres de l'acier violet nain ; on en extirpa des fromages et du grain. Les deux argentiers se regardaient désormais avec la moue tristement déçue - quoique secrètement soulagés - des amants désertés de leurs illusions.

Mais les illusions des marchands - et des amants, au passage - on n'en avait que faire en Oesgardie, de même que des soieries ou des gemmes. Les ventres criaient famine ; le lot de consolation rapporté par les deux marchands fut perçu comme une manne inespérée. Menés auprès de Roland de Versmilia, le légat du marquis, Étienne et Adelphe furent copieusement ovationnés : non sans ironie, on les célébra comme les bienfaiteurs nourriciers d'Oesgard.

C'est que le pays, après les mois rudes de l'hiver, n'aspirait qu'à une chose : des assiettes pleines. La guerre était passée, la pestilence, la mort (littéralement) et enfin la famine, ce qui comptabilisait bel et bien un total des quatre canassons infernaux au complet. Depuis la bataille d'Amblère, on avait œuvré copieusement pour pallier à ces plaies béantes, si bien qu'aujourd'hui, seule la disette demeurait.

Adonc, tandis que les nouvelles troupes, auxquelles on avait épargné le rassemblement en Serramire, entreprirent de veiller au rationnement de cette manne, on ordonna aux deux héros nourriciers de mener à bien de nouvelles expéditions sur l'Olyia.

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