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 Ultima ratio regum

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Francesco di Castigliani
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MessageSujet: Ultima ratio regum   Ultima ratio regum I_icon_minitimeMar 6 Mar 2018 - 12:28



8e ennéade de Barkios, an X du XIe cycle.


Il n'avait guère fallu beaucoup de temps pour que l'archipel de Nelen se profile à l'horizon. Sans relâche, la marine royale avait vogué tout d'abord le long des côtes scylléennes et mervaloises jusqu'à rejoindre les îles. Une dizaine de rafiots comprenant quelques caravelles et caraques apparurent ainsi au petit matin à la vue des habitants de Port-Cinglant. Le reste de la flotte, composée de bâtiments moins rapides, arriveraient probablement par la suite. L'idée étant encore de ne point simuler l'invasion pour ne pas affoler la populace. Redonné fraîchement au Roi depuis peu, Nelen s'était coltiné nombre de vautours depuis ces dernières années. Récemment, les langecins y avaient effectué une piètre conquête couronnée de succès mais terminée la queue entre les jambes. La rébellion avait pris fin avec la mort soudaine de son duc et de sa duchesse au bellicisme certain. L'ancien amiral langecin devenu injustement Baron de l'archipel, Enrico di Montecale, s'en était revenu supplier le pardon royal afin de le grâcier. Le sort réservé pour cet illustre marin ne lui était guère parvenu jusqu'à ses oreilles. On disait que l'homme avait disparu en mer après un duel à mort contre le comte de Missède en personne. Toujours est-il que Nelen était repassé sous le giron des Phiraam.

Port-Cinglant arborait dès lors l'étendard aux Lys. Tout était rentré dans les rangs. Une seule ombre guettait au tableau : Le risque de la perdre à nouveau.

Nous accosterons pour la nuit.

Est-ce la dire que nous repartirons dès demain ?

Absolument Léandro, répondit le vice-amiral. Que tous les capitaines soient prêts à appareiller dès l'aube, nous aurons de quoi faire durant les prochaines ennéades.

La chasse aux pirates ?

Plus où moins.

Léandro esquissa un léger sourire.

Vous ne vous contenterez pas de surveiller les côtes, n'est-ce pas ? Ni même de faire seulement acte de présence.

D'ici, nous isolerons Ydril en privant Altiom sans-terres de ses soutiens étrangers. S'il reprend l'envie au petit roi de Naelis d'envoyer de nouveaux renforts, nous les coulerons au fond de l'Olienne.

Vous déclareriez la guerre à Naelis ?

La guerre est déjà déclarée, Léandro.


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Francesco di Castigliani
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MessageSujet: Re: Ultima ratio regum   Ultima ratio regum I_icon_minitimeMar 6 Mar 2018 - 21:47



Comment ce satané archipel avait pu attiser tant de fantasmes ? Francesco passait le plus clair de ses journées à se le demander. Des années de luttes et de conquêtes pour ça ? Des îles à la végétation luxuriante aussi inhospitalières que peuplées par des races diverses et variées... Sérieusement, il y avait de quoi s'injurier contre le Roy. Mais cela, il se garda bien de le faire. Il n'était pas là pour réfléchir, seulement pour agir. Pour cette raison, les navires de l'amirauté royale n'avaient guère chômés. Sillonnant les îles et les alentours de l'archipel, ils ratissèrent suffisamment les lieux pour prévenir d'une quelconque arrivée de bâtiments étrangers. Francesco fit installer plusieurs avants-postes le long des côtes. S'il était peu probable que l'opération n'aboutisse à de grands succès imminents, ces sentinelles eurent au moins le mérite d'exister afin de recenser les navires s'approchant des côtes. On les dénombra, puis on tâcha d'établir les similitudes selon leurs provenances avant de pouvoir connaître avec le plus d'exactitudes possible le trafic général en séparant le bon grain de l'ivraie.

Lutter contre les scélérats d'estrévent et de Naelis ne différait point de celle entreprise contre la piraterie mécane. Ses longues années à oeuvrer contre ce dernier fléau portait donc ses fruits. Il ne se battrait pas de manière conventionnelle, mais adopterait le style et la prestance de ces filous de l'Olienne. A voir maintenant si cela paierait dans les prochains mois. Francesco avait encore nombre d'idées à appliquer.

Pour la guerre, tout était bon, rappelait-il sans cesse à ses hommes. Quitte à en oublier certaines lois dictées entre les marins. Heureusement pour eux, ce n'était guère des marins qu'ils affronteraient mais de la vulgaire racaille s'étant mise en tête d'impacter le Royaume. Pourtant, Francesco ne les prenait pas pour des bleus, ni même pour des êtres dénués de stratégie. A trop les dénigrer, on finirait par cesser de s'en méfier jusqu'à se la prendre une fois le dos tourné. Voilà quelles avaient été les erreurs commises par ses prédécesseurs. On ne les y reprendrait plus !

D'un point de vue organisationnel, deux équipages avaient rejoint Port-Cinglant afin d'aider le nouveau gouverneur à assurer non seulement la protection du port, mais aussi à contrôler les flux incessants de marchands et de visiteurs en tout genre. Chaque jour donnait son lot d'informations croustillantes quant aux menées estréventines et ydrilotes. Et ce jusqu'à apprendre la pire des nouvelles... Celle de l'échec cuisant des soltaar lors du blocus d'Ydril. Lorsque la nouvelle lui parvint, la chaise sur laquelle son fessier reposait avait volé dans sa cabine pour finir en mille morceaux.

A quoi bon mener la guerre ici si on la perdait à l'endroit même qu'on était censé préserver ? Par tous les dieux, quelques connaissances y avaient sûrement laissé la peau. Une fournaise, avait-on dit. Une véritable fournaise ! Bon sang, quel incapable avait dirigé un tel désastre ?! La duchesse de Soltariel en personne paraissait-il. Nulles chaînes n'avaient été mises afin de palier au problème des brûlots... Erreur.

Ce n'était pas à Port-Cinglant qu'on les affublerait de la sorte. Qu'ils viennent donc ! Qu'ils viennent sombrer à leur tour devant le Lys ! Jusqu'à sa mort, ce dernier flotterait sur les remparts du castel. Peu importe la populace présente, on la materait à coup de piques et de flèches sans se soucier de leurs revendications. Les hommes du Roi étaient là pour maintenir l'ordre, non pas pour faire de l'humanitaire.

Quant à lui, il passa le plus clair de son temps à se mouvoir d'île en île sans jamais s'attarder plus de quelques jours au même endroit. Toujours en mouvement, il en profita pour renommer officiellement le fort militaire d'Achid Kamil, Fort-Arsinoé. D'autre part, il glana les informations bonnes à prendre des sentinelles et s'évertua à les classer pour y établir ses fameux rapprochements. A force de fouiner, Francesco finit par apprendre que des forces extérieures s'affairaient à ébouillanter les humeurs du petit peuple. Dès lors, on en profita pour que des marins du Roi se délestent de leurs emblèmes pour se fondre dans la masse. A n'en pas douter, on terminerait pas apprendre d'autres rumeurs toutes aussi intéressantes.

D'autre part, on commença à dresser les potences sur la place publique. Bientôt, l'endroit se parerait d'écarlate.

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MessageSujet: Re: Ultima ratio regum   Ultima ratio regum I_icon_minitimeJeu 8 Mar 2018 - 18:57



Début première ennéade de Vérimios, an X du XIe cycle


Est-ce que tout est prêt Massimo ?

Oui, père.

Durant un bref instant, Francesco eut le sentiment de voir son fils pour la dernière fois. Lui que l'on surnommait « el furioso » sembla prendre l'aspect d'un grand-père cassant sa pipe. Ses fils étaient tout ce qu'il avait. L'un des quatre se battait en Ydril et n'avait guère donné de nouvelles depuis l'échec du blocus. De son épouse, il n'avait reçu nulle missive attestant de sa mort où de sa vie. L'espoir qu'il ait fait partie des survivants était dès lors la dernière chose qui le retenait de sombrer dans une véritable furie.

Ne vous inquiétez pas pour moi, je saurai me débrouiller.

Je n'en doute pas un seul instant. Te souviens-tu de tout ce que nous avons dit ?

Oui... soupira Massimo. Il est temps, ne pensez-vous pas ?

Certes, certes... reprit son père en tentant de reprendre un tant soit peu d'aplomb.

Que dirons vos hommes s'il vous voit ainsi ? N'est-ce donc pas la chose la plus naturelle qui soit de rejoindre l'entre de la Voilée ?

Il est généralement plus naturel que les pères n'enterrent point leurs fils, mais tu survivras, je le sais.

Il eut envie de le serrer dans ses bras pour lui dire qu'il l'aimait, mais se contenta de lui tendre la main. La poignée fut virile au point que son fils manqua de lui arracher le bras. Sans nul doute, ce dernier n'aurait guère été contre une accolade affectueuse. Au lieu de ça, les deux hommes reprirent leur place respective et s'éloignèrent petit à petit. Son second fils, Fernando, qui avait assisté à la séparation, vint le rejoindre pour saluer lui aussi son frère.

Il sait ce qu'il fait, père.

C'est bien ce qui m'inquiète.

Ce n'est plus votre fils, mais un capitaine de la flotte royale désormais.

Il lui jeta un regard songeur. Comment réussir à oublier leur filiation au nom d'une couronne ? Sa loyauté était sans reproche, mais pas assez pour oublier son propre sang.

Allons chasser, cela vous fera le plus grand bien.

Sans doute Fernando, sans doute...

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MessageSujet: Re: Ultima ratio regum   Ultima ratio regum I_icon_minitimeVen 9 Mar 2018 - 11:00



<<< Port-Cinglant, nous voilà !

Il n’était guère aisé d’y voir quoique ce soit dans ce fumoir, si ce n’est un épais brouillard qui sortait de la bouche des officiers de la couronne. L’endroit était apprécié pour sa tranquilité et la qualité du service. Bien loin des tavernes crasseuses, rassemblant les pires lascars, le droit d’entrer était stricte. Sans compter qu’il n’était réservé qu’aux hommes du Roi. On attendait ainsi la nuit tombée pour venir converser et s’échanger quelques commérages. Sur des banquettes confortables, dans un coin de la salle, deux seconds crapotaient à leurs pipes et laissaient s’échapper de beaux nuages aux formes fantastiques.

-Un homme est mort hier, murmura le premier.

-Des hommes meurent tous les jours, Fabrizio, répondit l’autre.

-Ce n’est pas n’importe qui, rassure-toi.

-Qui donc alors, crache le morceau !

-Un mouchard du gouverneur.

-Comment est-ce arrivé ?

-C’est là que ça devient intéressant, écoute bien. Des hommes du gouverneur guettaient au port et l’un d’entre eux aurait reconnu le duc de Soltariel. Après avoir prévenu ses compères, il se serait mis en tête de le filer pour tâcher de savoir où le bon duc comptait aller.

-Etait-ce vraiment le seigneur di Celini ?

-L’homme l’aurait juré sur tous les dieux, sa mère, son père et les autres couillons du Royaume.

-Mais alors… Le duc a été retrouvé ? L’ont-ils arrêté ?

Fabrizio sourit à pleine dent tout en tirant de nouveau sur sa pipe.

-C’est là que notre homme est mort justement, égorgé où limogé dans une sombre ruelle. Le corps laissé derrière une charrette pour le dissimuler.

-Fichtre ! Le duc aurait tué un homme de la couronne ?

-Hélas, on ne peut l’assurer. Mais ce qui étonne, c’est le mode opératoire. Le même que pour les autres sentinelles tuées ces derniers jours.

-Toujours ces foutus rebelles… Mais alors, le duc aurait été aidé où pis encore, complice de ces bandits ?! Bondiou, si seulement on pouvait en avoir la preuve, on aurait accompli la moitié du boulot, Fabrizio !

-Pourquoi crois-tu que les limiers soient en train de ratisser le port en ce moment-même ?

-Les habitants se méfient d’eux, les rebelles savent les flairer à cent lieues…

-Je ne parle pas de ceux-là, bon ami.

-Oh je vois… le vice-amiral est au courant de tout ça ?

-Que crois-tu, la nouvelle est déjà partie sur le continent !
HRP:
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MessageSujet: Re: Ultima ratio regum   Ultima ratio regum I_icon_minitimeVen 23 Mar 2018 - 13:22


Première ennéade de Verimios, premier mois d'été,
Le septième jour...


Au large de Port-Cinglant mouillaient les vaisseaux du roi. Depuis la grève, on distinguait fort nettement leurs voiles blanches battant au quatre vents, avec les emblèmes de Scylla et de la Couronne, comme un message adressé à toute la population de la bourgade côtière : cette île, un temps confisquée par Langehack, voyait le retour de son propriétaire légitime, le pays de Pharem, terre de roi.

Dans le grand chambardement qu'était la restauration des biens de la couronne, Nelen faisait depuis quelque temps figure d'oubliée. Sa reprise en mains avait été retardée par la lente agonie du Régent et la disparition de son Chancelier ; mais la couronne avait semblait-il retrouvé un sursaut de gouvernance. Le roi avait quitté Merval pour Scylla, disait-on ; et tandis que le Sénéchal du Royaume guerroyait dans le Médian, la couronne surveillait jalousement ses intérêts dans le sud. Nelen, évidemment, avait suivi le mouvement. De là, l'île avait été investie par le nouveau maître de la Marine Royale, Francesco di Castigliani, qui y voyait la tête de pont idéale pour surveiller les menées de l'orgueilleux petit royaume de Naelis.

Pourtant, Nelen restait Nelen. Perdu en pleine mer olienne, à la fois loin du monde et en plein milieu, l'archipel était un univers à part, où coexistaient sans cohabiter la population bourgeoise de Port-Cinglant et les tribus indigènes de la jungle. On vous y promettait une existence laborieuse, où même les privilégiés les plus opportunistes devaient se contenter d'un confort rudimentaire. C'était pourtant une terre bénie des dieux pour les natifs ; mais du point de vue d'un continental, c'était un bagne infernal.

On comprenait donc que, loin des regards continentaux, l'île n'ait pas été la préoccupation première d'une administration royale débordée et en pleine renaissance. L'archipel scylléen avait pourtant été, dès le début de la guerre civile, le théâtre d'une violente échauffourée entre la garnison loyaliste scylléenne et la flotte langecine. Romero Abriga s'en souvenait comme si c'était hier ; capturé par les Langecins, il avait passé de longs mois dans une geôle avant que sa famille ne verse sa rançon, et gardait de sa détention une santé fragile.
Aujourd'hui, il revenait sur les lieux de son calvaire.

Son navire, l'Estourbilleur, était amarré à la digue sur-laquelle allaient et venaient des porteurs chargés de lourds paquets sous le cuisant soleil d'été olyen. Dernier arrivé de cette armada royale venue, suite aux événements d'Ydril, réinvestir Nelen en vue de prévenir une seconde vague d'envahisseurs de Naelis, le vaisseau apportait dans ses bagages un clerc que la Chancellerie avait bombardé Prévôt de Port-Cinglant.

Pour Romero Abriga, le souvenir cuisant de la défaite était toujours amer. Pourtant, la roue avait tourné : Scylla reprenait ses droits sur Nelen et les vainqueurs d'hier avaient abandonné leur bien mal acquis. Aux yeux de Romero, tout cela était un gigantesque gâchis. Et il ne tenait aucun orgueil d'avoir été promu capitaine de l'Estourbilleur ; on avait prétexté qu'il connaissait l'île et que cela faisait de lui le candidat idéal. Connerie.

Il savait bien que tout ça, c'était du flan. C'était une punition. On le punissait d'avoir survécu à la prise de Nelen trois ans plus tôt en le renvoyant sur cette île de malheur, où il aurait préféré ne jamais revenir, afin de s'assurer qu'au bout du compte, il finisse enfin par y mourir, loin des siens, loin de son pays natal.

Les locaux observaient d'un air curieux et circonspect les hommes d'équipage déchargeant provisions et équipements, allant du port au fortin. Ils auraient bientôt un nouveau sujet de conversation. Le nouveau Prévôt, qui avait fait la traversée avec Romero, ne manquait pas de susciter sa curiosité à défaut de sa sympathie. Ce type, un certain Sansum, avait été désigné d'un commun accord entre le Grand Chancelier et le bailli de Scylla, entériné par un vote au Concile de la Questure à Pharembourg. Il représentait pour ainsi dire le comte de Scylla sur Nelen sans pour autant disposer de l'autorité du gouverneur, et disposait à ce titre d'attributions judiciaires. A première vue, il semblait être le candidat idéal. Sansum était de toute évidence un homme instruit, réfléchi et aguerri pour ce genre de travail. Mais, quoique peu bavard, Sansum n'avait pas fait secret de son manque d'enthousiasme ; Romero avait ainsi deviné que son affectation sur Nelen devait, pour lui également, être une sorte de punition. Quelque rival politique bien placé à la Chancellerie avait dû trouver le moyen de l'éloigner des affaires en l'expédiant sur Nelen. Sansum avait d'ailleurs confirmé les soupçons de Romero à l'occasion d'une discussion lors de la traversée, entre deux pauses dégueulis par-delà le bastingage.

« Je ferai ce qui devra être fait, avait dit Sansum en s'essuyant la bouche d'un revers de manche. La mer sépare cette île du comté de Scylla ; il faut bien, alors, que la justice scylléenne s'y montre deux fois plus ferme, faute de quoi on a tôt fait de se croire hors de sa portée.
- Vous n'êtes pas ici de votre plein gré, pourtant.
- Qu'en savez-vous ?
- Parce que vous ne m'avez pas l'air d'être fou ou suicidaire, Messire.
- Ceci ne vous regarde en rien, Abriga. Mais vous avez raison : je suis ici parce qu'on y a vu l'opportunité de se débarrasser de moi.
- Qui, on ?
- Quelqu'un de haut placé, qui prétend parler et décider au nom du roi. Mais voyez-vous, Messire Abriga, je sais qui est mon ennemi et qui ne l'est pas. Ce n'est pas à Sa Majesté que je dois de me trouver isolé sur cette île. Je suis un loyal serviteur de la couronne et je fais ce que je dois faire. J'y vois comme une... une sorte de mise à l'épreuve de ma loyauté. Je n'ai pas l'intention de moisir ici pour le restant de mon existence ; un jour, le roi sera en âge de savoir qui sont ses agents les plus habiles et les plus fiables. Ce jour-là, croyez-moi, de sa propre initiative il me rappellera.
- Cela risque de prendre un moment
, avait observé Romero.
- Soit. Cela me laissera le temps de mettre au pas les indigènes et de transformer ce terrain infect en quelque chose de civilisé. Après tout, il y a pire que les barbares de Nelen : il y a les Nordiens. Les Cinq nous en préservent, nous n'en verrons pas beaucoup à Port-Cinglant. »
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Faeron Savarius
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MessageSujet: Re: Ultima ratio regum   Ultima ratio regum I_icon_minitimeMer 11 Avr 2018 - 2:44



Dernier jour de la première ennéade de Verimios
Mer Olyenne, au large d'Ys


Il commençait à faire nuit sur l’archipel de Nelen lorsque la flotte qui croisait jusqu’à présent au grand large d’Ys mit toutes voiles dehors pour prendre la route de l’ouest-sud-ouest. Elle ne représentait pas l’intégralité des moyens Oliens que le grand patron avait, mais elle serait largement suffisante pour palier et même surpasser la flotte pirate dont les services avaient été finalement demandés ailleurs.

Plusieurs cibles et une stratégie complexe avait été déclinée par le grand amiral de la flotte, un homme qui avait passé sa vie sur les mers pour le compte des compagnies Savarius, et plus précisément pour la Compagnie Maritime Savarius, la plus importante des nombreuses compagnies maritimes possédées par le riche armateur de Thaar. Aujourd’hui sa mission était de porter assistance à une rébellion Nelenite en cours. Apparemment ce qui servait de piètre initiation à une flotte royale péninsulaire avait débarqué à Nelen pour mettre à pied le baron, ce qui avait été la dernière goutte d'une insurrection des natifs estreventins et des nombreux mécontents occidentaux pour lesquels la péninsule et ses attaches paraissaient bien lointains.  

Lui n’était pas un politicien, encore moins un marchand. Il avait depuis douze ans la responsabilité de la flotte de défense de la Compagnie Maritime Savarius. Une flotte construite avec patience, de navires dont l’utilité commerciale restait relative, car taillés pour la vitesse et le combat maritime bien plus que pour la capacité d’emport, ces navires faisaient, lorsqu’ils n’étaient pas en escadres, des courriers maritimes express pour le compte de la Compagnie.

L’amiral en était à sa sixième campagne militaire maritime. Il avait participé au déverrouillage d’Ys, à l’assaut nocturne de l’Aurore et au raid de Magsque. Il s’était déjà battu en pleine mer Olienne contre deux flottes en batailles rangées. Sans nul doute était-il à l’heure actuelle un des commandants les plus rodés que Thaar pouvait offrir. Et il avait une loyauté totale envers son patron et icône. Car le respect qu’il portait à Faeron Savarius dépassait la simple admiration. Il appréciait que ce dernier soit un fin connaisseur des affaires maritimes. Il aurait pu être un financier sans âme comme un autre, ou un prince marchand cherchant à faire transiter efficacement ses denrées sur l’eau. Mais Faeron développait depuis des années une vision intégrée d’un empire maritime dont il avait donné une partie des clefs à l’amiral.

Les escadres se scindèrent à l’approche de la passe des Sérénades, au nord de Deux Bosses. Chacune savait ce qu’elle avait à faire. Au petit matin, si des navires occidentaux croisaient encore dans les parages, ils n’auraient qu’à bien se tenir… L’amiral ne regrettait pas le sort de l’amiral de la flotte des Lignes Oliennes, son alter égo dans cette autre compagnie de Faeron. Ce dernier avait hérité de la protection du port de Thaar et de manière générale du delta de l’Oliya. On pouvait imaginer plus amusant…


§§§§§§§§§§


Dernier jour de la première ennéade de Verimios
Baie des Trente Cinglants, Ile de Nelen, Archipel de Nelen



Il faisait nuit ; mais c’était une de ces nuits de l’Olyenne ruisselantes d’étoiles. La mer, toute éclaboussée de ces milliers d’étincelles, semblait faire rouler des escarbilles et emmêler des rubans de flammèches.

Silencieux comme des spectres, les vaisseaux de haut bord glissaient rapidement dans la baie toute entière maîtrisée avec leurs principales voiles dehors. Ils paraissent gigantesques dans la pénombre, avec leurs nobles mâtures, leurs coques dominantes, toute cette toile déployée qui contrastaient avec le ciel formant de larges tâches sans étoile d’une ombre inquiétante.

Ces bâtiments avaient une allure énigmatique et perfide qui n’avait rien de pacifique ; les feux qui permettaient à l’équipage d’assurer la manœuvre étaient masqués, et, aux trois rangs de sabords, qui perçaient les flancs puissants, les rames restaient loin des vagues car l’équipage était sur le pont, prêt à intervenir en cas d’alerte. On n'aurait pas besoin de ramer ce soir. La bataille maritime serait pour plus tard, si au lendemain ou plus tard des navires péninsulaires se décidaient à investir les eaux de la baie pour renforcer ou désenclaver leurs futurs camarades défaits. Les marins de la Compagnie Maritime Savarius aux uniformes chamarrés du plus pur style oriental, disciplinés et courageux, étaient des soldats bien plus que des employés. Et ils en faisaient aujourd’hui la parfaite démonstration.

Il y avait donc là en effet dix navires de guerre, prêts à faire la conquête des obstacles qui se mettraient en travers de leur chemin. L’escadre en charge de prêter main forte à Port-Cinglant et à ses rebelles s’avançait sur une seule ligne, poussée par une brise régulière, et les navires étaient assez proches les uns des autres pour ne pas se perdre de vue, même dans la demi-obscurité.

À bord du vaisseau amiral, plus haut que les autres et qui amassait plus d’ombre autour de lui, deux jeunes officiers étaient accoudés au bastingage. Ils causaient à voix basse tandis qu’autour d’eux les manœuvres s’accomplissaient presque en silence. Le battement de la toile, quand la brise se calmait, le léger sifflement des cordages, le craquement de la carène étaient les seuls bruits qui se mêlaient au murmure continu de l’eau, déchirée par la proue. Seul bruit artificiel qui perçait parfois le silence : une poulie jetait un grincement qui semblait donner l’impression qu’on poussait un petit cri.

On arriva finalement à mi-chemin de l’immense baie, l’île ayant une forme de croissant. Et quelques lumières apparaissaient et qui semblaient proches ; rousses et troubles à côté du scintillement bleu des étoiles, elles sont disposées irrégulièrement à des hauteurs différentes. Cela donnait l’impression d’un incendie sur le départ.

Sur le château le capitaine s’écarta du gouvernail pour se rapprocher du bastingage tribord. Posant ses mains à mi-distance et se plaçant à côté de l’amiral de la Flotte.


— Port-Cinglant ! dit l’officier à son l’Amiral.

— En sommes-nous encore loin ?

— À une lieue peut-être et j’ai le sentiment que les évènements là-bas commencent... Nos  alliés sur place ont le sens de l’horaire. Et le jeune capitaine ajoute en riant tout bas : à mon avis ils dorment sur leurs deux oreilles, ces bons péninsulaires, là-haut, sur le fort d’Ydrilia presque tous ont déjà soufflé leur chandelle ; c’est pourtant là, je pense pouvoir l’assurer, leur dernière nuit avec quiétude ; nous aurons pris le port demain et la ville sera aux mains des rebelles. Avec notre ceinture et leur placement sur terre, le combat va pouvoir commencer.

— Connaissez-vous le plan d’attaque, monsieur Tsiliers ?

— Parfaitement, mon amiral ; mouiller à quelque distance de Port Cinglant afin d’éviter la possibilité de s’embrocher sur une chaine barrant l’accès au port, empêcher les navires péninsulaires de quitter le port, débarquer de bon matin et surprendre la place. Il est probable qu’ils tenteront de s’enfuir par le nord. Ah ! nous virons !

— Changement de plan mon cher capitaine. Qu’on se rapproche de l’entrée du port,
dit l’amiral. Tous les bâtiments, en effet, accompliront la même manœuvre. Faites avertir par signaux nos amis sur terre que nous sommes là afin qu’ils puissent démarrer la grande insurrection. Que les balistes préparent leurs carreaux. Que l’on porte sur le pont la moitié des réserves. Nous infligerons un déluge de feu sur le port dès ce soir afin de brûler les navires restant encore ici au mouillage. Si des navires péninsulaires croisent au large, je souhaite les attirer ici dans les plus brefs délais afin que nos escadres au large puisse les intercepter.

- Mais cela donnera l’occasion à l’ennemi se trouvant dans la place d’Ydrilia de s’enfuir mon amiral. Sous le couvert de la nuit, si un navire mouille sur la côte nord, il parviendra peut-être à partir.


- Peut-être. Mais je préfère laisser une maigre chance à quelques rats de s’enfuir plutôt que de laisser traîner l’opération. Je n’aime pas l’idée de laisser les rebelles seuls trop longtemps sans aide terrestre, et je préfère que l’on donne l’assaut de la place dès cette nuit. D’autant que les six escadres croisent entre Achid Kamil et la pointe des Palmiers. Si un ou plusieurs navires s’enfuient, il y a toutes les chances que l’une des escadres intercepte ces navires. Faites débarquer les troupes du tempête d’Ys et de l’éclair d’écume dès qu’ils seront à proximité du rivage. Nous ouvrirons le feu à ce moment pour couvrir leur avancée. Cela sera la panique à terre. L'escadre de patrouille dans la baie couvrira une approche de renfort par le sud.


Ainsi fut fait et les navires reprirent reprennent leur première direction, côtoyant de plus près encore le rivage. Les lumières de Port-Cinglant s’approchent à tribord, et deviennent de plus en plus clair. La ville semble ne plus respecter le couvre-feu. Des attroupements semblent se former dans la ville et des patrouilles semblaient faire opposition aux renégats et tenter de renvoyer la populace dans ses pénates. Cela jusque sur les quais. L’amiral rangea sa lunette.

C’est Port-Cinglant que guettaient ces formidables rôdeurs qu’était l’escadre Thaari. L’amiral était satisfait. La nuit n’était qu’au deux-tiers écoulée et ils étaient passés inaperçus, aucun navire ennemi mouillant ne soupçonnait leur présence, aucun n’avait donné l’alarme…

Bientôt des chaloupes se détachèrent des deux navires qui disposaient des deux cents hommes taillés pour le combat qui devaient entrer dans la ville. Un signal provint d’une des maisons de la ville à l'est. La traîtrise était prête… Le lieu était propice au débarquement. Ces îles paradisiaques disposaient de plages douces et sablonneuses.

En les murs effectivement les hommes de la ville issu de l’immigration estreventine, accompagnés de nombreux marins péninsulaires aux envies de libertés s’étaient rebellés. La pression immense qui s’était dégagée des maîtres occidentaux avec la construction potences, l’arrivée de troupes de marins visiblement décidées à passer les contestataires par le fil de l’épée ou l’éperon de la lance, et l’arrivée d’un nouveau Prévôt ne semblait pas donner matière à espérer plus de flexibilité.

La nuit avait été déjà le théâtre de deux affrontements. On savait bien qu’au matin les choses iraient en pire pour les insurgés. Deux maisons brûlaient, par accident ou par combat, on ne savait pas trop. Les femmes et les enfants humains s’étaient réfugiés au petit temple de bois exotique construit à flanc de coteau. Les femmes et les enfants de races plus païennes, pour la plupart des estreventins étaient réfugiés dans le comptoir de commerce général, une grande bâtisse jouant aussi le rôle d’entrepôt, à proximité de la porte de la cité et qui était propriété d’un des riches négociants en lien avec l’orient.

Le principal chef de file sur les barricades de l’insurrection à Port Cinglant était un semi-elfe, semi-drow du nom de Talid et qui, s’il était un local depuis un an environ, répondait aux ordres directs de Wingthres Thilelen, qui était l’envoyée spéciale de Faeron Savarius sur l’île. L’homme s’était battu comme un lion toute la nuit, et pour cause son entraînement n’était pas celui du manœuvre dont la couverture lui avait incombé depuis plus d’un an. Lui, comme certains autres, encadraient les insurgés de conseils et d’un savoir-faire d’ordres tout à fait militaire.


Pour l’instant le quart est de la ville tenait. Et pour cause il s’agissait du quartier pauvre, habité principalement par des affranchis vivant de petites rémunérations diverses et de tâches ingrates. Dans le reste de la bourgade portuaire des sympathisants attendaient leur heure, mais le quartier étant trop répartis entre pro et anti, ne se lançaient pas encore sans retour possible dans la mêlée.

On vint chercher le semi-drow. Il monta dans l’étage d’une des maisons qui donnait sur le port. Les flammes du brasier des deux maisons en train de se consumer éclairait faiblement le port. Mais ce n’était pas là l’intéressant. On l’informa qu’une lueur s’était allumée sur l’eau, rapide et fugace, à l’heure convenue. Cette heure était déjà dépassée ? Le semi-drow était étonné… Ce que le temps passait vite sous la concentration des combats… Il ouvrit une lanterne devant sa fenêtre, et fit le code préétabli. L’immensité sombre de la mer resta sans réponse pendant une minute. Puis une petite lueur à peine visible se fit voir et répondit trois fois. Il fallait maintenant agir vite.

Il se rendit jusqu’à la porte est de la ville avec un petit groupe d’une dizaine de compagnons. La porte était tenue par un petit peloton de gardes. Le sergent était censé être un vendu. Quelques souverains et des promesses avaient changé de mains et d’oreilles la veille. Si les deux groupes se firent face et s’envoyèrent quelques invectives au début, le sergent finit par accepter de lever le camp et se replia avec ses hommes vers la ville, comme convenu. La porte était à eux.

On l’ouvrit prestement tandis que des cris montaient au loin.

Tandis qu’un grouillement montait de la mer, comme dans un mauvais rêve une série de torches s’allumèrent, bien visibles, à quelques encablures du port. Ces dizaines de torches s’enflammant révélèrent que des navires stationnaient à présent devant le port. Quelques dizaines de seconde de plus et par jets de quatre flèches par navires, des arcs de flammes commencèrent à percer l’air vers le port. A une cadence frénétique d’une flèche par scorpion toutes les vingt secondes environ, et à coup de quatre scorpions sur chacun des dix navires, ce fut bientôt plus de cent flèches géantes enflammées qui toutes les minutes quittaient les navires orientaux tenant l’entrée du port et qui inondèrent le fortin et le port. Ceci pendant de longues minutes.

Devant la porte de la ville les soldats débarqués par chaloupe s’étaient mis en marche au travers de la forêt pour arriver dans les cinq minutes à la porte. Ils étaient guidés par un local qui connaissait les lieux.


— Serrez les rangs ! cria le capitaine Yilyark, chef des Pygargues, le nom de l’escouade envoyé sur Nelen par l’organisation des Oiseaux de Nuit. Et que l’avant-garde avance avec précaution en passant la porte. Nous nous diviserons par cohortes de dix une fois dans la ville.

— Que redoutez-vous ?
demanda un homme, la zone semble absolument déserte.

— Soyons prudents. Peut-être le fort d’Ydrilia a-t-il vu l’approche des navires et des renforts descendent-ils des coteaux. Restons en formation.

Des compagnies d’oiseaux courroucés de leur réveil furent les seuls ennemis que le groupe eut à mettre en déroute et qui cédèrent la place en protestant par d’affreuses clameurs. Le port quant à lui semblait sombrer sous les coups de butoir de l’armada aux jets enflammés. Si des navires péninsulaires étaient encore à quai, ils devaient commencer à servir de brasiers de nouvel an… La vue vers le port était coupé pour ces hommes, mais ils imaginaient facilement la scène.

Dans la ville des clameurs montaient. Les insurgés prenaient l’avantage sans aucun doute grâce à la stupeur qu’avait dû provoquer l’appui inattendu d’une flotte inconnue. Les troupes entrèrent dans la ville sans effort, accueillies par les insurgés puis par un homme disposant de la médaille des oiseaux de nuit, un espion de longue date sans aucun doute et qui assura la cohérence d'action avec le commandant des Oiseaux de Nuit.

La remontée dans la ville se fit avec violence. Les troupes résistaient pour certaines, fuyaient pour d’autres, mais l’on arrête difficilement une foule prête à la violence appuyée par de véritables spécialistes du métier des armes.

Alors que la nuit touchait à sa fin, ce fut un Port-Cinglant dans un état assez pitoyable, mais délivré des péninsulaires, qui pu prendre le temps de respirer un air de liberté, malgré le délabrement causé par l’incendie du port par l’armada.

On fit le tour des monuments effondrés, des jardins sans clôtures ; puis, les sentinelles postées, le signal de la réussite de l’entreprise donné à l’escadre, on rompit les rangs et l’on dormit quelques heures grâce à l’accueil de la population libérée. La ville n’était pas facilement conquise et l’on avait pas voulu que la troupe s’installe trop largement. Le plus grand nombre s’était installé dans une grande salle ouverte d’un bâtiment qui avait dû être la prévôté, la salle était la moins délabrée de l’édifice ; le commandant et le second s’étendirent là aussi, sur leurs manteaux, pour prendre quelques heures de repos.

— Avez-vous sommeil, chef ? demanda bientôt le second.

— Sommeil ! Si tôt après le combat, et sur cette terre que je brûle de voir et que la nuit me dérobe ? Non, j’attends l’aurore avec impatience.

— Alors, si vous ne voulez pas dormir, permettez-moi de vous poser une question.

— Faites, frère, je serai heureux d’y répondre.

— Que pensez-vous que l’amiral pensera de notre pause dans l’assaut ? Ne devions-nous pas monter directement au fort d’Ydrilia pour presser notre avantage ?

— C’est là une question délicate,
répondit le commandant, en souriant, mais j’y répondrai franchement. L’amiral m’a donné ordre de ne nous mettre en marche que si nous avions fini la ville et le port moins de trois heures après notre débarquement. Nous avons conscience que cela laisse à l’ennemi le temps de quitter le fort avant qu’on leur tombe dessus. Mais je pense que l’amiral n’en a que faire. Ses ordres sont d’aider la rébellion, mais je ne pense pas qu’il souhaite prendre trop de risque. Il est plus à l’aise sur les mers que sur les terres. Moi qui, sous ses ordres depuis tant de mois, l’ai vu accomplir des prodiges, je le reconnais bien là ; toutes ces lenteurs terrestres après tant de rapidité maritime, ce refus de monter au fort d’Ydrilia quand nous avons tous les avantages, c’est son style.

— Je comprends, moi, je pense. Comme vous le dites, les desseins du chef, et je crois deviner comment il cherche par la paille à faire rompre ce pur acier.

— Qu’est-ce donc ?

— La reddition chef !

— Que dites-vous là frère ?
s’écria le capitaine en se rapprochant de son second, et parlez plus bas.

— Vous verrez,
continua le second en baissant la voix ; l’amiral a à mon sens l’idée d’envoyer le drapeau blanc demain. A mon avis, il ne veut pas d’une victoire partagée, il préférera que la rébellion affiche victoire seule.

— Peut-être…


Ils s’arrangèrent pour dormir et le silence se rétablit.

Le lendemain, au petit jour, la troupe mit le siège au fort d’Ydrilia, accompagné de l’essentiel des hommes insurgés de l’île, armés à présent jusqu’aux dents. On avait effectivement reçu des instructions de l’amiral dans le sens qu’avait penché le second.

Une fois le siège placé, le commandant rappela à la troupe mais également aux insurgés le plan : on lèverait le drapeau blanc jusqu’à midi. Un message serait envoyé par jet de flèche dans le fort en ces termes :


« Péninsulaires du fort d'Ydrilia! Nelen s’est affranchie de votre emprise. Nous vous donnons jusqu’à midi pour faire votre reddition sans condition. Le cas échéant vous serez rendus à vos maitres sains et saufs. Sans réponse à midi, nous brûlerons le fort comme nous avons brûlé le port et la prévoté, faisant disparaître par le feu les traces de votre tyrannie.

Le Conseil Libre de Nelen »
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Francesco di Castigliani
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MessageSujet: Re: Ultima ratio regum   Ultima ratio regum I_icon_minitimeMar 17 Avr 2018 - 12:50



HRP:





Massimo n'avait fait qu'obéir aux ordres de son paternel. Quand bien même l'idée de la mort ne lui sembla jamais aussi proche, il garda espoir. Après tout, n'était-ce pas la chose la plus prévisible qui venait d'arriver ?Ils n'avaient eu de cesse, depuis leur arrivée, de voir à quel point Port-Cinglant était devenu un berceau insurrectionnel s’apparentant à une marionnette guidée par des étrangers. Ses recherches incessantes en fouinant dans tous les coins de la cité avaient eu des résultats mitigés. Non pas parce que les hommes du Roi n'avaient pas eu assez de flair, mais bien parce que la population avait été savamment muselé au point que l'on s'était demandé si cette révolution n'irait pas se transformer, si-tôt passée, en véritable dictature. Paradoxalement, il était amusant d'entendre qu'on les accusait justement de despotisme. Alors dans ces cas, il y en a toujours un qui sent plus fort que l'autre sans que l'un des deux n'admettent enfin s'être noyé dans la merde en premier.

C'est cette ambiance qui avait régné depuis la nuitée où de beaux rafiots s'en étaient venus dans la baie, parfaitement alignés. Quelques secondes seulement avait suffit pour découvrir que ces navires n'étaient pas ceux commandés par son père. Au même moment, le port se retourna littéralement contre eux. Quid des femmes, des enfants et des vieillards ? Ceux-là avaient été mis en sûreté pour sûr. Le reste, c'était ces hommes aux races diverses, qui avait pris pelles, fourches et pioches pour les chasser de leur coin de paradis (accompagnés eux aussi par une belle brochette de gaillards à la discipline visiblement de fer). Si les hommes du Roi, dont il faisait lui-même partie, auraient pu mater la révolte au coût de nombreuses pertes, ils suivirent tout de même le plan de son père. La très grande majorité s'en alla à la forteresse qui surplombait au loin la cité. De là, elle semblait imprenable. Faite de roche et de bois, elle était à flanc de falaise et ne présentait qu'un seul versant à assiéger. En prévision de ce jour, puisqu'on l'avait flairé depuis longtemps, des provisions y avaient été mise pour tenir cent hommes en état pendant un bon mois. Bien sûr, ils auraient à se rationner, quitte à bouffer les chevaux et les ânes. Mais l'idée était là. Quant à d'éventuelles torches où de flèches enflammées... Et bien, ce n'était pas une forteresse pour faire jolie. Cette simple dénomination aurait probablement bientôt fait comprendre qu'il leur faudrait bien plus que du feu pour en venir à bout.


Massimo n'était pas là-bas. Non, on lui avait donné d'autres ordres, dont celui de se terrer dans une cachette prévue pour l'occasion. Si lui et ses quelques hommes avaient dû se serrer comme des sardines pendant de longues heures, ils s'étaient relayés toute la journée suivante pour tâcher d'observer le port. Lorsque la pénombre gagna enfin les lieux, ce fut à son tour de se faufiler dans ce trou de souri qui servait de mirador afin d'analyser la situation. La moitié de la cité était en feu. Quelques badauds s'étaient risqués à ressortir dans les rues, mais les rebelles faisaient leur loi en se faisant passer pour des libérateurs. Il sourit nerveusement. Au loin, du côté de la forteresse, les rebelles et les soldats étrangers avaient établi le siège et s'évertuaient à lancer tous les projectiles qui leur passaient sous la main. Heureusement que les péninsulaires avaient l'expérience des sièges ! Dans la baie, maintenant, les beaux navires qui se mirent presque à briller dans la nuit à tel point ils étaient parfaits, firent des manœuvres pour imposer leur style. Il n'y avait pas à tortiller du fion, les estréventins savaient eux aussi manier la barre.

Puis, une petite embarcation de pêcheur fit son apparition à la nuit tombée. Ce ne fut tout d'abord qu'un petit point noir à l'horizon. Malgré les intimidations lancées par les beaux navires étrangers, la galiote ne cessa sa course et continua de faire voile sur le premier bâtiment. A cause de la nuit, il ne sut dire combien d'hommes se trouvaient sur le pont. La seule chose qu'il vit fut des flammes commençant à apparaître, puis un impact sourd et violent. Peu déstabilisé par le choc, le navire ennemi sembla rester solidement sur les flots.

Puis, le petit incendie se mit à grandir... Massimo vit les hommes tenter d'y verser de l'eau pour l'éteindre. La galiote, ancrée dans le navire, n'en démordit pas. Plus on y versait d'eau, plus l'incendie prenait de l’ampleur.

– Le feu Pharetan, Soupira-t-il. C'est le signal !

Les flammes atteignirent l'autre bord. Les étrangers sautèrent dans l'eau comme des misérables. Bien peu, sûrement, y laissèrent leur vie contrairement au navire flambant neuf qui se mit à brûler comme un feu de joie. Non, le but n'avait pas été de tuer. Massimo voyait simplement le dernier avertissement lancé par le Royaume des Hommes. Dès lors que l'on possédait le feu pharétan, le surnombre n'y changerait rien. Les cartes seraient enfin rebattues. Pour l'heure néanmoins, il restait encore des choses à faire. Comme sortir de leur terrier et profiter de la diversion de l'incendie afin de s'en aller ouvrir les portes nord. Ils eurent des sentinelles à éliminer pour se faire. Certains de ses hommes y laissèrent leur vie. Lui-même reçut un coup de lame sur son bras, qui se mit aussitôt à saigner.

Qu'importe, les portes s'ouvrirent.

Au loin, des ombres sortirent de la lisière. Armées de piques et d'épées, il ne sut les dénombrer à tel point l'ombre se mit à grandir de plus en plus. De son équipage resté à Port-Cinglant, ils n'étaient plus qu'une petite dizaine. Les autres étaient soit morts, soit retranchés dans la forteresse. C'était là le moment tant attendu ! Il crut d'ailleurs en la victoire finale lorsqu'il vit le visage de Fernando sortir du lot.

– Mon frère !

Quelque chose de pointu le percuta en plein centre du dos. Le choc le fit trébucher. S'il ne sentit rien pendant quelques secondes, une forte douleur vint peu à peu lui faire comprendre qu'une flèche venait de la transpercer de part en part. Dans les instants qui suivirent, des frissons s'emparèrent de lui. Toutes ses forces venaient de le quitter en un claquement de doigt. Même les bras de son frère ne suffirent pas à l'apaiser.

– Tiens bon, c'est bientôt fini ! Souffla Fernando. Père sera bientôt là, comme nous te l'avions promis.

– Je ne veux pas mourir sur terre... pas ici, pas dans ce lisier puant.

– Alors accroche-toi, Port-Cinglant le paiera, je t'en fais le serment !

L'un des hommes de son frère le mit son épaule et reparti aussitôt à la lisière de la jungle. La tête tournée vers la cité qui rétrécissait au fur et à mesure de leur progression, il eut la joie de voir les hommes du Roi reprendre leur possession. Il ne lui restait plus qu'à rester suffisamment longtemps en vie pour voir arriver l'armada royale accompagnée de tous ses alliés.
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MessageSujet: Re: Ultima ratio regum   Ultima ratio regum I_icon_minitimeVen 20 Avr 2018 - 1:26




« Brûler le fort ? 'sont finis à la pisse ces mecs, c'est pas possib' », avait commenté Sire Montvaseux en lisant la dépêche envoyée par les assiégeants par-dessus l'épaule du prévôt. Et il avait enchaîné d'un grand rire gras et long.

Sansum ne partageait pas la même allégresse. Il avait enragé toute la nuit et tout le jour, contemplant, impuissant derrière les murs de la forteresse, l'oeuvre estréventine. Il maudissait la bêtise et la naïveté du peuple ; ces gens savaient-ils seulement pourquoi ils se rebellaient ? Tout ce qu'elle possédait, Nelen le devait aux colons scylléens. Avant leur arrivée, les peuplades indigènes vivaient à poil au milieu des moustiques ; Scylla leur avait apporté son savoir-faire, ses infrastructures. Elle avait fait de cette île sauvage un terreau propice à la civilisation, bien avant l'arrivée des premiers pionniers de l'Est.

Mais le peuple a la mémoire courte. Et le peuple s'en fiche. Sansum n'était pas surpris ; jeune, il avait connu de multiples insurrections diantraises. Il ne savait que trop bien comment cela se passait : l'esprit collectif de révolte ne naissait pas tout seul ; il devait toujours son émergence aux manœuvres d'un petit groupe d'agitateurs, semant la zizanie dans un but bien précis. La plus fameuse d'entre elles avait tout de même causé la mort du roi Trystan, avant d'être matée par Aetius d'Ivrey.

En considération de tout cela, l'apparition de navires étrangers et de guerriers entraînés aux côtés des insurgés ne faisait que confirmer l'explication la plus logique à tout ce charivari : ce n'était pas une insurrection. C'était une invasion. Tout avait été savamment orchestré de l'extérieur.

Pendant la première nuit, le plan de l'ennemi parut parfait. L'assaut dévasta le port et une bonne partie de la ville dans un déferlement de violence. Une accalmie tomba entre la fin de la nuit et le petit jour, mais l'air restait lourd ; le vent chariait sur les rives, et jusqu'au fort, la chaleur de l'été sur l'Olienne, avec un soupçon de menace latente.

A midi, comme les assiégeants l'avaient annoncé dans leur missive, le ton sévit. Les Royants n'avaient pas répondu à leur ultimatum. Les premiers projectiles arrivèrent ; des cailloux ou des flammèches, allez savoir ; sans doute cherchait-on à intimider les occupants du fort, mais le fort resta debout, inébranlable.

Vint la deuxième nuit, et le vent tourna.

Contemplant depuis une meurtrière l'horizon bleuté d'une nuit estivale sans nuage, Sansum vit s'allumer l'étincelle de l'espoir. Une lueur rouge-orangée émanait de la baie ; la rangée menaçante de navires estréventins manoeuvrait avec un empressement qui confinait à la panique. Et Sansum comprit.

Le feu de Pharet.

C'était donc cela que le Chancelier avait emmené dans ses fontes en quittant Merval. Une arme indéniablement efficace, mais dangereuse ; et Sansum s'inquiéta de ce qu'avaient pu réclamer - et obtenir - les hauts dignitaires de Merval en échange. Pour la première fois, il sourit. Quel qu'ait été le prix à payer, le symbole, en cet instant, était fort. Ce feu qui brûlait au-dessus de l'eau, c'était le bûcher des ennemis du royaume.



*



Le feu. Le feu avait brûlé toute une nuit, tout le jour, et brûlait encore, à tel point que Saint-Colombin ne parvenait plus à imaginer le monde sans cette odeur de souffre et cette fournaise qui le faisait suer à grosses gouttes. Port-Cinglant était une torche ; mais tout n'avait pas encore cramé. L'ouest avait moins morflé. Une chance pour lui, la bicoque où il s'était terré avec les siens pendant la nuit avait échappé au barbecue.

La deuxième nuit venue, ça remuait de nouveau dans le port. L'incendie dans la baie avait provoqué un instant de flottement ; et puis ça avait mis le feu aux poudres. Les échauffourées reprenaient. Des meurtrières du fort pleuvaient des salves de flèches destinées aux assiégeants ; ceux-ci restaient à bonne distance, mais, désorientés par ce regain de violence, l'ennemi perdit la maîtrise. Saint-Colombin et ses hommes se faufilèrent dans les rues dévastées, gagnant le quartier nord ; plus d'un insurgé armé d'une faux ou d'un rouleau à tarte tenta de les arrêter, mais leur acier et leur cuir cloûté eurent raison de ces piètres adversaires. Dans la confusion générale, et profitant que le gros des forces estréventines s'agglutinait aux abords du fort, Saint-Colombin et les siens atteignirent sans trop d'encombre la porte nord ; celle-ci, naturellement, était gardée. On y livra bataille une dizaine de minutes. Les Estréventins, sentant le coup tordu, opposèrent une solide résistance. L'un d'eux manqua de trancher propre et net la tête de Saint-Colombin, qui ne dut son salut qu'à une parade miraculeuse. Ils échangèrent quelques passes, avant que Saint-Colombin ne réduise au silence son adversaire à l'aide d'une feinte bien sentie. Sitôt qu'ils eurent suffisamment poussé leur avantage, il ordonna qu'on ouvre les portes. Alors les choses sérieuses commencèrent.

La porte grande ouverte vomit son flot d'hommes armées. Venus du nord de l'île, ils avaient répété la stratégie gagnante qui avait vu Langehack prendre pied sur Port Cinglant quelques années plus tôt, surprenant la petite cité portuaire en traversant depuis la jungle. Les vieilles recettes étaient toujours les meilleures, et ils étaient sur le point d'en apporter la preuve.

« Au nom de Néera, je vous botte le cul ! » hurla Saint-Colombin en enfonçant le talon de sa botte sur le crâne d'un malheureux insurgé étendu au sol, tandis qu'autour de lui les Royants investissaient le port.
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MessageSujet: Re: Ultima ratio regum   Ultima ratio regum I_icon_minitimeMar 24 Avr 2018 - 15:32



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Deuxième jour de la deuxième ennéade de Vérimios, an X, XIe cycle

C'est une cité portuaire en proie aux flammes que l'on vit en entrant dans la baie. Des vaisseaux de l'amirauté royale et de leurs alliés débarquèrent deux jours après le début de l'insurrection. Ce retard volontaire n'était point dû à une mer trop agitée où des vents peu propices à lever les voiles. Nenni, le vice-amiral s'était seulement contenter d'une reprise par voie terrestre pour ne pas tomber dans une embuscade. En guise de cerise sur le gâteau, il n'aurait plus manqué qu'on les leurre par dessus le leur. En marin avisé, connaissant la perfidie des pirates mecans depuis de nombreuses années, tout dans ce cas de figure avait présagé qu'on souhaite les enfler d'une bien piteuse manière.

Au lieu de ça, son aîné resté cloitré dans la cité, avait eu la difficile tâche d'ouvrir les portes nord aux renforts partis de Fort-Arsinoé, jusqu'à Havre-sûr, avant de traverser Nelen en reprenant la voie laissée par les langecins quelques années auparavant. De toute évidence, le plan avait fonctionné et Port-Cinglant accusait désormais les affres de l'insurrection tuée dans l'oeuf.

– Nous allons pouvoir rebâtir une nouvelle cité, jugea l'un de ses seconds.

– C'est certain.

Les quais étant détruits pour la grande majorité, ils débarquèrent en barque jusqu'à la plage. Il y eut un beau comité d'accueil à leur arrivée. Le gouverneur et les sbires du chancelier l'attendaient. Son fils Fernando, quant à lui, se trouvait entouré de ses marins et d'autres soldats royaux, où même langecins. Point de Massimo à l'horizon. Ses craintes décuplèrent. Mais ce n'est qu'en approchant de son second fils qu'il se mit à imaginer le pis.

– Où est Massimo ?

Fernando grimaça.

– Entre la vie et la mort, père... Les soigneurs tentent tout ce qu'ils peuvent.

Une hargne folle prit bientôt le dessus. Avant même d'ordonner qu'on le mène à son chevet, Francesco vint à la rencontre du prévôt royal.

– Sans vouloir me mêler de vos affaires, je crois que nous avons une bien belle et bonne opportunité de réduire à néant celles et ceux qui ont osé défier l'autorité royale, lança-t-il, sec. Pendons les ! Quitte à faire baisser drastiquement la population présente. Nous ne saurions reconstruire sur des fondations faites de merde et de lâcheté.

Il n'eut pas besoin d'argumenter plus que nécessaire pour que les hommes se mettent à l'oeuvre. Dans l'instant même, les potences installées autrefois en guise d'avertissement, se mirent en marche plus que de raison. De nombreuses nuques se brisèrent ce jour-là. Mais bien entendu, le vice-amiral et le prévôt mandèrent qu'on leur amène les principaux frondeurs afin qu'on les questionne. Une grande majorité resta fidèle à leur « juste » cause. Ils préférèrent se faire pendre plutôt que de parler. Mais parmi les gaillards emportés par voie maritime, l'un d'entre eux céda sous la torture et la promesse d'une vie saine et sauve. De cette manière, les soupçons finirent par se révéler exacte et l'on apprit, presque sans surprise, qu'un dénommé Faeron Savarius, était derrière tout ce remue-ménage. Armateur pour le compte de Thaar, l'homme avait si bien parlé que l'on ne manqua pas d'apprendre que le thaari semblait être ambigu quant à ses véritables motivations. La question qui resta en suspens fut alors de se demander si le conseil des Princes Marchands étaient derrière tout ça où si cette vermine avait agit seule. Dans l'un comme dans l'autre, l'estrévent avait franchi une limite qui accuserait probablement le point de non retour dès lors que l'information parviendrait aux Grands du Royaume.

Francesco n'en resta pas là. Puisqu'à une autre question posée concernant le passage éclair de l'ancien duc de Soltariel, un misérable insurgé leur révéla qu'un homme répondait peut-être à sa description. Sans aucune certitude, ni même aucune mauvaise volonté pour sauver sa peau, il ne fit que raconter qu'un péninsulaire s'en était venu dans la ville et avait bénéficié de l'aide des insurgés pour quitter l'archipel. Ce n'était clairement pas une preuve concrète, car le pendu en sursis se serait sûrement rétracté le lendemain, mais Francesco garda l'information dans un coin de sa tête afin de la faire concorder avec toutes celles qui étaient venues à lui petit à petit.

Pendant ce temps-là, les nuques continuèrent à se briser sur la Grand-Place du port. On fit empiler les cadavres les uns sur les autres avant de les brûler à la nuit tombée. Ces couillus avaient perdu. La justice royale s'était abattue sur leurs poires. Pour sûr qu'on les affublerait de sanguinaires. Mais lorsqu'on osait défier l'autorité royale, il fallait de toute évidence s'attendre à des représailles violents et sans possibilité de pardon. Celui qui les avait emmené là n'en aurait probablement rien à fichtre de leur sort. Ils seraient deux dans ce cas !

– Qu'on m'amène à mon fils ! Ordonna-t-il, une fois toutes les sentences tombées. Rendez compte au Chancelier que nous n'avons rien gagné en ce jour, mais que nous nous sommes seulement évité de perdre une cité trop longtemps oubliée.

Il était grand temps que le père reprenne le pas sur l'officier de la couronne.
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