Le deal à ne pas rater :
TCL C74 Series 55C743 – TV 55” 4K QLED 144 Hz Google TV (Via ODR ...
499 €
Voir le deal

 

 Tanäel, fille du crépuscule

Aller en bas 
3 participants
AuteurMessage
Tanäel
Elfe
Tanäel


Nombre de messages : 11
Âge : 26
Date d'inscription : 07/03/2018

Personnage
:.: MANUSCRIT :.:
Âge : 428 ans
Taille
: 1m78
Niveau Magique : Apprenti.
Tanäel, fille du crépuscule  Empty
MessageSujet: Tanäel, fille du crépuscule    Tanäel, fille du crépuscule  I_icon_minitimeMer 7 Mar 2018 - 14:43

Nom/Prénom : Tanäel
Âge/Date de naissance : 428 ans
Sexe : Féminin
Race : Anëdhel
Faction : Noss
Particularité: Une surdité aux voix de Kyrïa
Alignement : Chaotique neutre
Métier : Vagabonde
Classe d'arme : Magie


Équipements :

Son sac n’accueillait que peu de possessions; elle préférait garder seulement ce qui lui serait nécessaire : un poignard d’os de facture grossière, une tunique en cuir rêche de daim tanné de sa propre main, quelques herbes, tiges, racines, des fruits, des champignons, un quartier de viande salée, un rouleau en fil d’écorce.

Apparence :

  • Taille : 1m78
  • Couleur des yeux : Bleu clair

Son visage aux proportions harmonieuses attirait l’œil sur un portrait aux contrastes étonnants, à la beauté étrange, fascinante, sans permettre pourtant d’identifier la source de cette curiosité; un nez fin et court, des pommettes aux rondeurs douces, des lèvres minces qui esquissaient une moue accueillante, langoureuse, et pourtant lointaine, détachée. Son expression charmante suscitait le plaisir à être contemplée, mais dégageait aussi une douleur muette, figée, un chagrin qui semblait s’y être imprégné, qui se cachait derrière ce masque tendre.

Ses yeux voilés se peignaient d’un bleu clair, absent, qui apparaissait aussi mystérieux que froid; ils semblaient à la fois songeurs et distraits, tournés vers un horizon visible à eux seuls, captivé par un spectacle onirique. Si une flamme en illuminait autrefois la fougue, l’ardeur s’était éteinte depuis des lustres, le temps ayant étouffé les braises pour ne laisser que des cendres ternes, dépouillées de toute chaleur.

Sa chevelure prenait la rousseur du coquelicot fané, d’une brillance sombre et défraîchie, rappelant les dernières lueurs du crépuscule; ils s’étalaient sur sa nuque, pour se répandre sur ses épaules et cascader jusqu’au le milieu de son dos.

Son corps menu épousait la finesse et se mouvait avec aisance, chaque pas déposé avec délicatesse, une démarche gracieuse; et pourtant, en l’apercevant de loin, sa forme semblait illusoire et frêle, incertaine, une silhouette à l’allure d’un spectre. Sa peau se craquait par endroit de fines lézardes, traces héritées d’une lutte perpétuelle pour sa survie. Elle s’habillait simplement, se refusant à l’extravagance. Ses oreilles pointues se perçaient de petits anneaux au métal doré, souvenir d’une époque oubliée.

Personnalité :

Elle était une âme libre, son esprit en constante ébullition, qui cherchait à comprendre ce qui l’entourait, qui voulait s’ouvrir au monde des inconnus, qui tolérait mal l’immuabilité des coutumes, l’acquiescement naïf aux traditions. Sa fougue n’avait d’égal que sa volonté, ce désir ardent de tout connaître, de pouvoir examiner toutes les facettes d’un même problème, d’aller jusqu’au fond de sa pensée. Elle voulait satisfaire cette insatiable curiosité pour ce qu’elle ne pouvait s’expliquer, pour ce qui lui était étranger. Par-dessus tout, elle voulait se consacrer à l’étude de la nature, y joindre son existence, englober d’un même regard érudit la création.

Mais le destin est ce flot déchaîné qui vous emporte sans demander votre avis.

Étrangère aux mélodies de Kyrïa, elle ne put assouvir ses ambitions, et son esprit juvénile craqua sous le marteau des atrocités que la vie déchaîna sur elle, beaucoup trop jeune encore pour être abandonnée à la solitude, sans une main ferme et bienveillante pour la guider.

Les années ont fini par éroder le socle de sa raison, fissurer son esprit, ne laissant qu’une poignée de fragments tentant au mieux de s’amalgamer, mais qui résulte en une déformation malsaine de ses idées, une pensée en désordre constant.

Capacités magiques :

Certaines choses peuvent rester cachées même à l’œil le plus vigilant. Tôt dans sa jeunesse, elle fut initiée aux différentes facettes théoriques de la magie, un sujet qui piqua sa curiosité sans néanmoins recevoir toute son attention, sans non plus que son esprit ne montre de prédisposition à la perception des flux d’arcane.

Tout changea suite au massacre de son clan et le début de sa longue solitude.

Son esprit sembla s’ouvrir sur une nouvelle perspective qui lui avait auparavant échappé, ses sens s’aiguisèrent autant au discernement des réalités du monde physique que celles de l’intangible, un univers de désordre qui devint son obsession. Elle voulut ordonner ce chaos, contrôler et canaliser le flot de cette énergie primordiale, ouvrir sa conscience vers d’autres réalités, modeler l’éther dans le moule de sa pensée, maîtriser l’indescriptible, ce qui existe sans véritablement exister; une fascination pour tout ce qui touchait au monde de l’incompréhensible, mais aussi pour le ressenti, pour la douleur, la langueur, la souffrance; la faiblesse de l’esprit qui façonne ses propres tourments.

En dépit de la conscience du danger, son exploration se fit toujours plus méthodique, plus poussée, plus perçante. Elle voulait, elle devait comprendre. Pourtant, et malgré une certaine prudence, en parvenant à influer sur l’essence des pensées, de l’abstraction, ce fut aussi son propre esprit qui se déforma; cet usage inconsidéré d’un art qu’elle ne comprenait pas laissa ses marques sur sa psyché, qui maintenant se conformait à ce même embrouillement, menaçant parfois de s’égarer indéfiniment. Mais elle continuait, toujours. Elle n’avait pas d’autre choix.

Histoire :

Les forêts se peignaient de sang et les feuilles mourraient lorsque s’ouvrirent ses yeux.

Seule, aucun bruit.

La mère mourut quelques heures plus tard; Kyrïa, dans toute sa froide bonté, allumait une flamme et soufflait sur une autre. Un échange qui répandit des larmes amères contre celles plus chaudes du bonheur d’une nouvelle naissance. Toujours, son nom resterait sur le bout de sa langue, voisine de son esprit, mais désormais trop éloigné pour être entendu. L’enfant du clan. Ils la nommèrent Tanäel : fille du crépuscule. L’aube qui succédait aux dernières lueurs étouffées d’une vie touchant sa fin.

Les premières années furent paisibles. Les yeux de l’enfant ne peuvent que constater la clarté éblouissante de leur nouvelle existence, et ne sont pas encore à même de discerner toutes les nuances de l’éclairage. Les images défilaient, dénuées de jugements; ce qui était, devait être. Le clan modelait la pensée selon les traditions invétérées, sans chercher à découvrir ce qui n’y était pas, ni à en dévoiler les tons plus obscurs. Ces années furent les plus paisibles, mais aussi les plus floues, comme une brume qui, sans recouvrir tout le paysage, empêchait les contours moins définis de véritablement se matérialiser. Comprendre la profondeur dérobée d’une pensée ne servait à rien, il fallait cristalliser les enseignements jusque dans leur figement, répéter ce qui était éternellement répété : suivre la tradition, toujours. La nature se métamorphosait, pourrissait et se renouvelait sans cesse, mais le clan était cette force inéluctable, qui traversait le flot de la vie sans jamais troubler sa surface, sans jamais y faire de clapotis.

L’enfance se constituait autour de l’initiation aux diverses facettes de la vie. Comment pêcher le prochain repas, comment retrouver son chemin, comment traquer le cerf, comment distinguer ce qui repait de ce qui empoisonne, autant dans la nourriture physique que celle de l’esprit. Il ne fallait jamais garder ce qui était superflu, se détacher au plus possible des objets et des vérités nouvelles, ne jamais alourdir ses possessions ou ses idées, garder surtout ce qui était nécessaire au clan; puisque le clan n’était qu’une extension de son environnement, comme l’individu n’était qu’une extension du clan; l’équilibre précaire devait se préserver, perpétuer la nature dans son désordre harmonieux, sans quoi l’univers s’effondrerait sur lui-même. Celui qui possédait le moins, sans entraves entre lui-même et la réalité, était celui qui s’y ancrait le plus, qui vivait pleinement les aléas du destin sans jamais vraiment les comprendre. Suivre la tradition, surtout, sans s’interroger sur sa validité.

Mais son esprit voulait autre chose. L’ardeur juvénile devait être canalisée; pourtant son chemin préalablement désigné, imposé sans être choisi, ne pouvait que l’égarer vers des accomplissements insuffisants, qui n’amenaient aucun apaisement, qui jamais ne parvenait à constituer son entièreté, à satisfaire ses pulsions de concrétisation, comme si, à demi dans cette réalité, l’autre pied ne parvenait jamais à trouver son aplomb, toujours chancelant.

Seule, avec cette constante impression d’étrangeté envers l’extérieur, envers elle-même.

Bien sûr, la liberté du clan n’était jamais garantie. Le droit d’exister se méritait. La biche qui s’essouffle et succombe entre les crocs de ses prédateurs le méritait; le loup trop lent qui meurt d’un estomac vide le méritait; le cycle continuait, c’était ainsi. Rien n’était assuré. Le clan combattait pour sa subsistance, mais combattait aussi pour ne pas succomber à ses ennemis. Des affrontements perpétuels qui affirmaient et confirmaient continuellement ce désir d’exister. Parfois frère ou sœur mourrait, et alors le clan mouillait ses joues de sa peine. Mais le temps suivait son cours, le cycle continuait, la chaleur grasse succédait à l’humidité froide, et les maux d’autrefois s’oubliaient. C’était ainsi.

Elle se passionnait de la nature. Elle voulait déchiffrer les phénomènes étrangers, éclairer ce qui restait obscurci, s’expliquer l’extérieur, sa place, son rôle, elle voulait nommer l’inconnue, et apprendre les noms qu’elle ignorait. Mais son existence ne lui appartenait pas, ses doigts glissaient contre cette destinée fabriquée qu’elle n’avait jamais choisi, dont elle ne voulait pas. Mais elle était fille du clan, elle appartenait au clan. C’était ainsi.

Elle voulait étudier la nature, la comprendre, y joindre son existence, fusionner avec. Elle ne voulait pas de ce rôle attribué sans avoir été choisi. Pas de chasse, pas de pêche, pas de cueillette, pas de guerre, pas de mort, pas d’ignorance douce et naïve; elle voulait poser plus de questions, recevoir moins de réponses, se défaire du temps figé, des traditions répétées sans être comprises. Mais elle appartenait au clan. C’était ainsi.

Seule.

Elle était seule. Elle le savait sans pouvoir se l’expliquer. Elle avait cherché à comprendre, mais toujours ces mêmes grimaces conciliantes, ces mêmes regards détournés. Tout le monde le savait, personne ne comprenait, personne ne pouvait l’expliquer. Elle était seule. Pourquoi?

Elle voulait connaître la nature. C’était son obsession. Elle irait, elle parlementerait, elle demanderait, elle réclamerait, elle exigerait. Mais ce n’était pas assez, jamais assez; des esclaves du destin, qui devaient se plier sous les exigences du clan, pour le servir, pour lui obéir.

« Tu ignores les voix de la nature. Tu n’entends pas les chants éternels, les mélodies des plantes, des arbres, des feuilles, les ramifications de la nature et ses dialectes musicaux. Le cadeau de Kyrïa te fut refusé, la Symphonie t’est inconnue, c’est ainsi. Alors comment devenir druidesse? Non, ce n’est pas ton rôle. »

Elle l’appréciait, ce vieil homme, mais en cet instant elle le trouvait laid, elle le détestait, elle voulait sauter sur lui, l’étrangler, lui mordre le visage, lui percer les yeux. Elle se contenta d’un sourire maladroit, d’une grimace. Cette injustice la déchirait; elle en avait contre sa mère, contre son clan, contre ses amis, contre Kyrïa, contre cette vie incessante, contre tout le monde, contre le monde lui-même, mais surtout contre elle-même. Pourquoi elle?

Les faibles lueurs ne pouvaient percer les feuillages touffus de la canopée. Elle resta sous la pluie de ses échecs et de son désespoir, et pleura seule.

La vie continua, comme elle l’avait toujours fait; elle aussi, continua, comme toujours, à errer, sans but, cette impression grandissante d’étrangeté envers les autres, envers elle-même, à se réveiller les nuits, à observer son reflet au fond du gouffre, à contempler cette absurdité, à constater le socle de son univers s’effriter, à perdre la couleur de ses yeux. Non, elle voulait autre chose, elle devait l’avoir, elle n’avait pas d’autre choix.

Elle se sauva.

Elle courut, elle marcha, elle chercha. Des réponses, elle voulait apprendre, elle voulait connaître. Son obsession. Elle devait savoir, elle devait donner un sens à ce qui l’entourait, donner un sens à ce bruit, à ce silence. Expliquer le silence qui l’habitait, le vide qui l’empêchait d’entendre, sa solitude. Mais elle ne trouva rien, la forêt restait coite, taciturne à ses appels, personne pour lui prendre la main, pour la guider; seulement sa solitude, et elle-même.

Toujours seule.

Vers où se tourner, lorsque tous les chemins se croisent et se jettent devant la même impasse, devant ce même refus, ce même silence perpétuel?

Elle rentra.

Elle n’aurait jamais dû partir, il était trop tard. La liberté devait s’affirmer. Les plus faibles périssaient. Le cycle continuait. C’était ainsi.

La forêt se peignait de sang. Massacrée. Les feuilles continuaient à mourir. Des corps souillés, défigurés, méconnaissables, des bouches ouvertes qui proféraient leurs hurlements silencieux. La tribu. Des entrailles qui puaient à l’air, avec des charognards aux mandibules saillantes qui se goinfraient d’un repas nauséeux. La tribu, massacrée. La chance, ou le malheur?

Elle n’aurait jamais dû partir.

La douleur brûla ses joues pendant de longs moments. La clarté s’étouffa, les ombres ondulèrent, les sanglots se bercèrent de fatigue; le cycle continuait, le ventre grondait, et même les larmes les plus chaudes finissent par refroidir et s’assécher.

Mais elle n’était plus seule.

La forêt te rejoignait enfin. Tes oreilles s’éveillaient. Kyrïa chuchotait. Tu n’étais plus seule.

Arracher des racines, cueillir des fruits pourris, se nourrir de terre, tout pour combler ce creux qui ne pouvait être comblé, cet abysse qui menaçait de l’avaler. Ramasser des branches. Faire un feu. Se cacher. Survivre. Oublier.

Je l’entends, tordue, artificielle, créée de toute pièce. Une machine factice de l’esprit. Et pourtant la musique des mots résonne entre mes deux oreilles.

Kyrïa s’ouvre enfin à moi.


La tribu massacrée, la tribu qui ne reviendrait jamais. Elle voulut se donner la mort. À maintes reprises, la lame froide de son poignard caressa la peau de ses veines; souvent des gouttes douloureuses tombèrent contre la terre; elle le voulait, elle le souhaitait, elle en rêvait. Mais à chaque fois, le courage s’effritait, une partie d’elle, infime sans doute, s’accrochait, souffrait.

Tu n’avais pas la force. Tu n’étais qu’une enfant égarée.

Pourquoi continuer? Qu’est-ce qui la retenait? Elle aurait dû mourir. Elle avait tout perdu, sa famille, son destin, toutes ses aspirations, ses amies, elle-même, son clan. Elle avait perdu le clan. Son univers, le noyau de sa vie, cette force qu’elle avait cru éternelle, ces traditions implacables, plus rien, il ne restait plus rien. Il ne restait qu’elle.

Qui es-tu?

Elle devait oublier la douleur. Elle n’était plus rien.

Non. Je suis cette douleur.

La douleur était la seule chose qui la reliait avec ses souvenirs, avec l’enfant du passé, avec cette ancienne existence fugace. C’était la première pierre, le socle qui constituerait son nouvel être, une frêle statue au chagrin cristallisé, aux fissures multiples.

Mais tu n’étais plus seule.

Non, elle l’entendait désormais. Tous ces jours où elle déambulait sous les branches, où sa peau baignait dans la clarté tombant des interstices entre les feuillages, elle l’entendait, la mélodie des paroles se manifestait dans son esprit. Non, elle n’était plus seule. La solitude ne lui appartenait plus. La solitude était le souvenir de cette autre fille, cette fille qui s’était sauvée, cette fille qui était morte, comme ces feuilles éphémères qui virevoltaient vers leur disparition. Elle n’avait conservé que la douleur.

Ton esprit s’ouvrait enfin.

Oui, toutes ces attaches s’étaient rompues, les innombrables fils d’une existence qui avait garroté sa pensée se déliaient, elle était différente; ses perceptions s’aiguisaient, ses idées s’arrosaient d’une nouvelle vigueur, s’abreuvaient de tous ces secrets; un terroir fertile qui s’alimentait de nouvelles questions, de réponses esquissées. Tout paraissait plus grand, plus incertain, plus mystérieux, plus dangereux, plus étrange. Son esprit s’affamait de toutes ces connaissances qui lui avaient échappé, engloutissait et digérait toute cette matière inexplorée, toutes ces subtilités inexpliquées.

Je devais comprendre.

Oui, elle n’avait pas d’autre choix, c’était sa raison d’exister, comprendre ce qui l’entourait, se comprendre elle-même, comprendre cet esprit si familier, si étranger.

Je dois partir, me défaire, m’isoler pour mieux voir, me concentrer sur ce qui m’apparait, sur ce qui m’appartient, tourner les yeux vers l’intérieur, ne plus jamais dépendre des autres, de l’extrinsèque, ne plus jamais me nourrir de vérités prémâchées.

Elle devait ordonner le désordre qui l’entourait. Son esprit ne pouvait plus se contenter des ombres projetées sur le mur, de ce qui était rapporté, de ce qui était répété, de ce qui n’était jamais compris. Elle devait plonger dans le lac de l’inconnue, s’abreuver de son essence, contempler le centre, son noyau, boire dans ce qui découlait de son étrangeté.

Qui es-tu?

Elle respirait, son cœur battait, ses muscles se crispaient. Le cycle continuait, les feuilles mourraient, l’écorce pourrissait, les charognes se décomposaient. Elle traversait ce flot sans jamais se métamorphoser, toujours ce corps intemporel, imperméable à l’écume du changement; seules les pièces de son esprit bougeaient sans cesse, le roc se fissurait, éclatait, se solidifiait sous une nouvelle forme. Le monde extérieur suivait toujours cette même trajectoire, ce cercle constant, à chaque fois différent, tout en gardant pourtant cette même essence, cette même substance primaire. L’intérieur, au contraire, semblait en constant bouillottement, les bulles fusaient, rien n’était pareil, l’eau fluctuait, l’éther se concentrait à l’infini, disparaissait dans son aspect évanescent. Elle comprit qu’en se concentrant, en réfléchissant, en s’abandonnant, son esprit pouvait rejoindre ce flot, couler avec lui, influer sur son cours, canaliser sa quintessence.

Mais jamais trop longtemps. L’esprit est malléable, fragile, susceptible de s’égarer, de se noyer dans ce qu’il ne maîtrise pas, ce qu’il ne comprend pas.

Elle devait avancer avec prudence, prendre son temps, se méfier, s’aventurer à tâtons dans l’obscurité de ces inconnues, palper chaque pierre en prenant garde de ne jamais glisser, de ne jamais se perdre.

Peux-tu y arriver? Peux-tu ordonner le désordre?


La lumière succédait toujours à l’obscurité, pourtant tout ce qu’elle observait finissait par disparaître; la vie naissait pour mieux mourir, la réalité se construisait pour mieux se détruire. Y avait-il seulement un sens? S’était-elle posé les mauvaises questions? Son regard se perdait parfois dans la nuit, à observer cette infinité de points lumineux qu’elle ne pourrait jamais atteindre, qu’elle ne pourrait jamais comprendre. Peut-être que tout n’était qu’une fiction, que rien n’avait de but, de sens, que tout n’était qu’un chaos élaboré, que la création retrouvait son sens uniquement dans son propre désordre, que tout était observé sans jamais être perçu? Que le sens était invisible, puisqu’il n’avait jamais existé?

Qui es-tu?

La réalité filait entre ses doigts, les souvenirs s’éloignaient, les années défilaient, les mémoires se désagrégeaient sous le passage du temps, la linéarité perdait bientôt sa direction, les cris se faisaient plus silencieux, les larmes plus sèches, la lumière plus sombre. Avait-elle existé auparavant, dans une autre vie, sous d’autres traits? Les couleurs se faisaient plus ternes, les saveurs plus fades, le présent perdait sa rigidité, se déformait, les fils du futur se tordaient dans tous les sens, se mêlaient avec ceux du passé.

Suis-je seulement l’observatrice de ma réalité?


Qu’est-ce qui lui appartenait, qu’est-ce qui n’était qu’une projection du réel? Les images bougeaient, son esprit cherchait à ordonner l’architecture de ses perceptions, sans jamais la consulter. sans sa volonté; tout se déroulait devant elle, trop loin, sans qu’elle ne puisse jamais y toucher; elle ne pouvait qu’observer, son jugement n’avait aucune importance, elle-même n’était qu’une pierre insignifiante. Les choses continueraient comme elle l’avait toujours fait, ce qui était, continuerait à être, ce qui serait, serait.

Je m’égare, le tisserand de ma pensée s’entremêle dans son œuvre.


Les journées s’étiraient, les moments s’étendaient, sa conscience s’étiolait, les images perdaient leur consistance; elle voulait comprendre, saisir les différentes facettes d’une même figure, poursuivre cette éternelle quête de savoir; mais tout semblait dénué de l’empressement d’autre fois, de la même importance, une flamme s’étouffant, somnambulique, sans cette ancienne vivacité pour en oxygéner les braises.

L’impression constante que mon esprit s’échappe, que ma tête ne m’appartient plus, que ces idées ne sont pas les miennes, que j’habite la conscience d’une étrangère, que je me promène dans une enceinte aux murs invisibles à moi-même.

Parfois des pans du passé surgissaient devant ses yeux, et elle observait, et elle se questionnait, et elle contemplait cette autre personne, cette jeune fille pétulante, pleine de vivacité, cette fille qu’elle avait peut-être connue, avec qui elle avait peut-être parlé, peut-être échangé quelques plaisanteries. Avait-elle vraiment existé?

Es-tu réveillée?

Qu’est-ce qui tenait du vrai, qu’est-ce qui tenait du rêve? Son pas oscillait entre les deux réalités, à départir les créations artificielles des vérités de la nature; cette impression constante de chuter à l’intérieur de son propre esprit, à s’éloigner de plus en plus de ce qui constitue son fondement, le socle qui soutenait l’emprise de sa raison, le noyau de sa conscience; tout semblait se voiler, plus rien n’avait d’importance. Elle fermait les yeux.

La poigne des années se refermait doucement contre ta gorge, les doigts du temps se crispaient, ta respiration se faisait irrégulière, tu suffoquais, ton esprit s’éreintait sur la dérive grandissante de ta pensée.

Jusqu’au fameux jour.

Ses pieds nus s’enfonçaient dans l’humidité de la terre, lorsque le soleil disparut, remplacé par un orbe opaque qui avala toute lumière, qui estompa les contours du monde. Le cycle se rompait. Le désordre apparaissait dans tout son éclat.

La nature s’éveillait de sa torpeur, Kyrïa soufflait sur sa création, la forêt s’abreuvait de cette énergie, se revitalisait, s’en imprégnait jusque dans les plus petites choses, les plantes, les feuilles, les tiges; les sols se métamorphosaient, des racines se ramifiaient à l’infini, des veines d’écorce qui émergeaient, s’étalaient, plongeaient. Des créatures nouvelles, plus étranges, faisaient leur apparition, surgissant d’un autre monde.

Le temps se confondait, disparaissait.

Elle-même se sentait revigorer d’une étrange vivacité qu’elle ne pouvait pas s’expliquer, qui lui rappelait des temps anciens, si éloignés à présent qu’ils semblaient n’avoir jamais existé; et pourtant, Kyrïa lui rappelait ces souvenirs effacés, oubliés, la véritable raison de son être.

Rappelle-toi.

Elle comprenait enfin. Une vie de mensonges, de fausses vérités, de réalité construite; les portes du destin se refermaient – l’avaient-elles toujours été? – plus rien n’avait d’importance, tout se confondait, l’ordre n’avait jamais existé, une fiction élaborée, construite de toute pièce.

Elle se rappelait.

Après des décennies d’engourdissement, la vigueur enflammait à présent ses muscles, elle reprenait son souffle, se défaisait de l’asphyxie de ses idées; le flot s’engouffrait à nouveau dans son être, les remous troublaient la stagnation de son esprit. Elle ne chancelait plus sur un chemin incertain. Elle avait trouvé.

Relève-toi. Existe. Tu es le centre de ton monde, le noyau confus autour duquel gravite tout ce désordre. Il n’est pas trop tard, tu es l’élue de Kyrïa. La nature t’appartient.

Noss Nyr'Arranël:


Dernière édition par Tanäel le Ven 9 Mar 2018 - 4:54, édité 4 fois
Revenir en haut Aller en bas
Krish Al'Serat
Ancien
Ancien
Krish Al'Serat


Nombre de messages : 1580
Âge : 33
Date d'inscription : 27/03/2015

Personnage
:.: MANUSCRIT :.:
Âge : 1 008 ans
Taille
: 1m82
Niveau Magique : Avatar
Tanäel, fille du crépuscule  Empty
MessageSujet: Re: Tanäel, fille du crépuscule    Tanäel, fille du crépuscule  I_icon_minitimeMer 7 Mar 2018 - 18:02

très jolie fiche !
J'espère que tu seras vite validée :)

*se sauve avant d'être attrapée par un admin*
Revenir en haut Aller en bas
Lœthwil
Ancien
Ancien
Lœthwil


Nombre de messages : 761
Âge : 27
Date d'inscription : 20/10/2015

Personnage
:.: MANUSCRIT :.:
Âge :  966 ans
Taille
: 2m08
Niveau Magique : Archimage.
Tanäel, fille du crépuscule  Empty
MessageSujet: Re: Tanäel, fille du crépuscule    Tanäel, fille du crépuscule  I_icon_minitimeJeu 8 Mar 2018 - 1:13


Bon, je te l'ai déjà dit je pense, mais c'est une super fiche que tu nous a pondu là, et pour le coup, pour ce qui est de la fiche en elle-même je n'ai rien à redire. Par contre, petit détail ( parce que je suis connu pour être tatillon ) quand tu décris ton clan. Les dates de la fondation des premières Cités sont loin d'être reculées au point d'être floues à la mémoire des elfes. Du coup si l'apparition de ton clan se fait à posteriori, pas de raisons que ses origines soient perdu dans les légendes ( enfin, en dehors du fait que le clan se soit fait massacrer du moins ).
Si le but par contre est de créer une opposition entre des légendes immémoriales et une explication plus vraisemblable qui soient totalement contradictoires ( les Pan'Mera sont forts à ce jeu-là, eux mêmes ne savent plus exactement laquelle de leurs histoires d'origines est la vraie xD ) libre à toi Wink

Du coup j'attends juste ta remarque par rapport à ça, et je peux walider :proud:
Revenir en haut Aller en bas
Tanäel
Elfe
Tanäel


Nombre de messages : 11
Âge : 26
Date d'inscription : 07/03/2018

Personnage
:.: MANUSCRIT :.:
Âge : 428 ans
Taille
: 1m78
Niveau Magique : Apprenti.
Tanäel, fille du crépuscule  Empty
MessageSujet: Re: Tanäel, fille du crépuscule    Tanäel, fille du crépuscule  I_icon_minitimeVen 9 Mar 2018 - 2:41

Modifications apportées :)

J’ai précisé concernant les origines de la Noss, qui ne sont pas étrangères dans la mémoire de la cité de Solith, mais qui ont subi une certaine déformation fictionnelle avec le temps pour les membres du clan.

J’ai aussi ajouté un peu de clarté pour les capacités magiques.
Revenir en haut Aller en bas
Lœthwil
Ancien
Ancien
Lœthwil


Nombre de messages : 761
Âge : 27
Date d'inscription : 20/10/2015

Personnage
:.: MANUSCRIT :.:
Âge :  966 ans
Taille
: 2m08
Niveau Magique : Archimage.
Tanäel, fille du crépuscule  Empty
MessageSujet: Re: Tanäel, fille du crépuscule    Tanäel, fille du crépuscule  I_icon_minitimeVen 9 Mar 2018 - 9:45


Tanäel, fille du crépuscule  Tampon13
Et voilà deux longues oreilles de plus pour renforcer les troupes woohoo !


Code:
[Métier] : Vagabonde

[Sexe] : Féminin

[Classe d'arme] : Magie

[Alignement] : Chaotique Neutre

Foire au RP ~ Pour tout ce qui est recherche de compagnons RP. En bref, que du bonheur !
Journal de bord ~ Pour archiver tes liens de RP qui content l'histoire de ton personnage {Vivement conseillé}.
Et enfin, si tu as des question, n'hésite surtout pas à demander l'aide d'un parrain, ou à tout simplement poser tes questions dans la partie créée à cet effet.
Revenir en haut Aller en bas
Contenu sponsorisé





Tanäel, fille du crépuscule  Empty
MessageSujet: Re: Tanäel, fille du crépuscule    Tanäel, fille du crépuscule  I_icon_minitime

Revenir en haut Aller en bas
 
Tanäel, fille du crépuscule
Revenir en haut 
Page 1 sur 1
 Sujets similaires
-
» Crépuscule
» Crépuscule
» ...Le Crépuscule... [Mage]
» Un crépuscule nostalgique [PV]
» Aube et crépuscule

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
Miradelphia :: Où tout commence :: Registre :: Tabularium :: Limbes :: Elfes-
Sauter vers: