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 Retour sans garantie [L'Renor Krysto]

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Shyn'tae Vaen're
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MessageSujet: Retour sans garantie [L'Renor Krysto]   Retour sans garantie [L'Renor Krysto] I_icon_minitimeJeu 26 Déc 2019 - 21:05



9ieme jour de la 2ieme ennéade de Barkios

C'était un des beaux bâtiments des profondeurs. Il grimpait le long des parois de la caverne, défiant la gravité et la logique. Enchevêtrement de pics, d'arcs et de pierre noire impossible, l'oeil de la magicienne s'y étaient souvent perdu avec grand plaisir durant les années de sa formation ici...

- Hey, tu attends quoi toi?" une tape sur l'épaule sortit Shyn'tae de sa contemplation des motifs que tissaient les forces naturelles dans l'architecture que tant de générations avaient patiemment mis au point. Clignant des yeux, la sombre réalisa qu'elle s'était mise à rêvasser. Combien de temps cela avait-il duré? Assez longtemps pour qu'on la trouve suspecte en tout cas. La magicienne jeta un regard muet à l'homme d'arme qui l'avait alpaguée, avant de répondre d'une voix douce.

- Il est beau n'est ce pas? Il contient l'histoire de nos ancêtres. Notre passé, mais aussi notre présent, et porte déjà la marque de notre futur, pour qui sait voir.

Le drow arqua un sourcil et préféra s'éloigner, car il savait que ce lieu était peuplé de sombres psychotiques, et que cette noirelfe pieds nus faisait probablement partie du lot. S'il avait survécu aux tâches glorieuses que le Puy lui avait confié jusque là, c'était aussi en sachant lorsqu'il valait mieux ne pas poser de question. La demoiselle au visage abimé le suivit d'un regard indéchiffrable jusqu'à ce qu'il ne s'éloigne définitivement, puis, une fois qu'elle fut certaine qu'il ne la regardait pas, soupirant profondément, le regard posé sur les portes du C'nros.

Courage.

C'était ici qu'on attendait Shyn'tae en premier lieu. C'était ici que se trouvait son unité, ses supérieures, et c'était ici qu'elle aurait à rendre des comptes pour commencer.

Et tout ce qu'elle arrivait à se dire c'était qu'elle n'avait même pas d'uniforme. Son petit pied se souleva et sa pointe fine se posa, un pavé plus loin. A sa cheville, le bracelet rebondit doucement.

Elle s'arrêta.

"T'inquiète, je sais que tu as besoin de lui pour ne pas faire face aux consequences de tes actes." Pourquoi se souvenait-elle aussi bien se souvenir des mots, du ton, du visage de ce morveux? Il n'avait aucune importance. Elle ne le connaissait même pas.

La sombre serra les points, et s'avança, décidée, vers les portes.

Moins d'une heure plus tard et l'étonnement passée, escortée par un arcaniste nécromancien qu'elle connaissait fort bien et qui s'était, et c'était une délicieuse surprise, abstenu de tout commentaire douteux, la sombre entrait enfin dans l'antre de la maitresse du C'nros.

Pieds nus, vêtue fort humblement d'une robe improvisée à partir d'étoffes et de cordes nouées serrés qu'elle n'était pas certaine de savoir défaire seule, elle avait sensiblement changé. Sa chevelure autrefois longue laissa libre le bas de son cou lorsqu'elle salua sa supérieure sans hesitation.  Seule concession à la simplicité, un bracelet d'argent ornait une de ses fines chevilles.

Mais surtout, ce qu'on remarquait en premier, c'était la cicatrice qui balafrait méchamment sa joue gauche, au point de tirer sur ses traits si adorables. En rapport avec l'autre coté si parfait, le contraste était saisissant.  Il fallait aimer les gueules cassées.

- Apprentie Shyn'tae Vaen're au rapport.



Dernière édition par Shyn'tae Vaen're le Ven 24 Jan 2020 - 19:52, édité 2 fois
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MessageSujet: Re: Retour sans garantie [L'Renor Krysto]   Retour sans garantie [L'Renor Krysto] I_icon_minitimeDim 29 Déc 2019 - 17:40

L’air de l’Elda n’avait jamais semblé si bon. Là, la liesse de la victoire avait gagné les couloirs des profondeurs, et le cœur des hommes s’en battait léger comme une plume. Au milieu des hourras et des félicitations – qui se prolongeaient depuis plus d’une énnéade -, vivait la Rose Noire. Plus nuageuse que l’orage, l’on racontait dans les couloirs qu’on ne l’avait pas vu desserré les dents depuis qu’elle avait reçu une drôle de missive. Et plus exécrable que jamais, la Ditrown Da’re faisait preuve de bien moins de patience que d’ordinaire. Tous tentaient vainement d’esquiver sa présence – et pour cause ! -, elle avait déjà envoyé quelques éléments en convalescence. On lui connaissait ces humeurs mauvaises, cependant cette fois-là avait une saveur différente. La haine qui se dégageait de la Petite était profonde et intestine, lancinante et parfaitement terrorisante.

L’ombrageuse créature avait bien de la peine à contrôler ses envies. Quelques fois, dans le silence de son office, elle se saisissait de sa petite poupée qu’elle caressait machinalement. L’être de chiffon salit par le temps et le récent voyage à Sol Dorn l’observait de ses yeux disparus. Elle le savait, elle le sentait. Les os et le sang Dula, oui c’est cela. Puis un rire triste traversait ses lèvres étirées avant que sa main ne s’abatte contre les murs de pierres creusées. Nul étau n’était plus en mesure de contenir sa rage, et le Monstre là, dans sa tête, ne se jetait même plus contre les grilles de sa cage ; elle avançait lentement, les clefs tendues. Les doigts abimés par les coups s’en aller caresser ses paupières puis ses joues, le corps recroquevillé comme une bête. Patience Dula, patience. Sa respiration rauque se taisait enfin, l’esprit plus clair, sa langue taquine caressant ses lippes.

Elle ne l’attendait plus vraiment ce matin-là. Ou peut-être avait-elle toujours été prête depuis qu’elle avait reçu son pli ?
« Il zhah ghil ».
Elle est ici

Le soldat avait frappé sa poitrine avec déférence, et se tenait droit, inquiet. Nul ne savait ce qu’il allait advenir d’elle ; L’Renor non plus. La tuerait-elle ? Probablement. Presque aussitôt, sa dague se planta dans le bois de son bureau. Il ne trembla pas, regardant l’acier vibrer une seconde avant de se figer complètement. Et pour la première fois depuis leur retour, l’on entendit la voix fluette de la Thaumaturge : « Menez-la moi ». Ses mains bandées s’en vinrent quérir une dernière tendresse auprès de la poupée molle alors que déjà s’éclipsait la silhouette du mâle, la laissant seule avec ses pensées. Voilà des mois qu’elle s’en était allée. Des mois de silence qu’aucune pitié ne saurait excuser. La Sombre qui s’en revenait avait trompé sa confiance, elle qui l’avait considéré comme l’enfant qu’elle n’avait jamais eu. Là ! C’était bien la peine de faire montre de compassion. La Terrible se sentait flouée, trahie, blessée.

Et lorsqu’enfin la gracile eldéenne se présenta, son cœur battit plus fort, sourcils froncés. Son accoutrement et sa gueule cassée décuplèrent presque sa haine. Regarde Dula, ce n’est pas moi qui ait fait ça, non ce n’est pas moi . Elle décolla la dague. Ils ont abimé la Petite Chose . Incapable de décoller ses yeux carmins de la jeunette, elle lança le coutela qui frôla la joue de sa subordonnée avant de se planter dans le mur, à l’arrière. Si elle l’avait vraiment souhaité, il n’aurait guère manqué sa cible. La gravité de son regard, ces changements… Pour sûr, elle avait bien plus grandi qu’elle ne l’aurait cru.

« Yu’na l’laur, auflaque ! »
A genoux, chienne !

S’exécutant, la Sanglante bondit jusqu’à se planter dans son dos, saisissant sa tignasse raccourcit sans délicatesse ni considération. La colère déformait ses traits qu’aucun sourire ne vint habiller.
« Usstan kestal dos inbal sanee z’lonzic ulu vrine’winith uns’aa dal elggin dos ditronw nin »
J’espère que tu as des raisons suffisantes pour m’empêcher de te tuer de suite »
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MessageSujet: Re: Retour sans garantie [L'Renor Krysto]   Retour sans garantie [L'Renor Krysto] I_icon_minitimeDim 29 Déc 2019 - 21:58



Alors qu'on la conduisait dans les couloirs de basalt et d'obsidienne chichement éclairés de lueurs aux tons malsains, Shyn'tae avait eu la sensation d'être à nouveau prisonnière. Que les quelques mages qu'ils avaient croisé aient préféré regarder ailleurs n'arrangeait rien et aurait pu la faire regretter sa decision.

Fort heureusement, Shyn'tae n'était pas du genre à regretter facilement. Il fallait dire que le remarquable duo qui l'avait sortie je prison un peu plus tôt avait au moins fait réfléchir, et la sombre avait conclu que L'Renor était la personne que son devoir imposait de voir en premier. C'était même elle qui aurait du venir la visiter quelques heures auparavant. A la place, cela avait été son père. Il l'avait libérée sans autre forme de procès. Maintenant, sa fille savait qu'elle devait payer pour ce favoritisme.

C'était incontestablement courageux. Le problème était qu'il y avait peu de chances que la bienveillante rumeur voit les choses de cette manière. Après tout, n'était ce pas L'Renor qui lui avait offert une promotion canapé?

Pour imaginer quelque chose d'aussi stupide, ces crétins n'avaient jamais du avoir L'Renor Crysto devant eux.

Par contre, Shyn'tae l'avait devant elle maintenant. Il n'y avait pas de raison de regretter? En voyant le regard que la Ditrown Da're lui lança, la determination de la drow vacilla quelque peu.

« A genoux, chienne ! »

Shyn'tae s'exécuta aussitôt, tombant à genoux sans hésitation et sans un mot. Le sol était si froid sous ses genoux dénudés. C'était amusant, murmura intérieurement la petite voix du cynisme qui manifestement avait décidé de remplacer son instinct de survie. Dante avait passé son temps à la qualifier de petit chat, elle devenait une chienne en revenant. Nul doute que petit frère aurait aimé être là. Décidemment, le vocabulaire animalier lui seyait particulièrement bien.

Ce fut la tension soudaine sur sa chevelure de neige interrompit le train de sa pensée, la forçant à pencher douloureusement la tête vers l'arrière jusqu'à ce que leur regard se croise. Ils étaient juste assez long pour qu'elle les saisisse à pleine main.

« J’espère que tu as des raisons suffisantes pour m’empêcher de te tuer de suite »

La sombre ne répondit pas immédiatement. Était-ce de la peur dans ses yeux? Réflechir. Ne pas se déconcentrer. Elle savait ce qu'elle devait.. non elle ne savait pas. Elle était venue jusqu'ici… elle avait survécu jusqu'ici, mais elle ne savait pas quoi dire. Sa cervelle lui sembla soudain vidée, et une lueur de panique naquit au fond de son regard. Avant d'être avalée par autre chose, la résolution de celle qui n'a rien à perdre.

Lorsqu'elle ouvrit la bouche, les mots glissèrent un à un, à leur rythme, gênés par la posture.

Je suis une gamine stupide… je mérite tellement d'être punie… Mais… si vous me tuez… vous donnerez raison à tous ces… ces crétins.. qui se moquent en pensant… que vous aviez tort. Alors que.. vous savez que vous avez raison. Montrez que vous êtes sévère… S'il vous plait… Mais laissez-moi une chance de prouver un jour.. que je ne suis ni une traitresse.. ni une lâche…

- Je suis vraiment désolée… Maitresse… je n'étais pas prête.

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MessageSujet: Re: Retour sans garantie [L'Renor Krysto]   Retour sans garantie [L'Renor Krysto] I_icon_minitimeMar 7 Jan 2020 - 14:20

Elle n’aurait su dire ce qu’elle vit ce jour-là dans les yeux de son élève. La Rose Noire, face à la jeune colombe, semblait bien indécise. Il n’y avait guère de miel dans ses paroles et elle faisait sûrement preuve de plus de résignation que sa maîtresse n’en ferait jamais. Le cœur au bord des lèvres, la haine farouchement accrochée aux tripes, elle participait incrédule à cette scène attendue. L’abnégation à son paroxysme, voilà tout ce dont Shyn’tae se montrait capable ce jourd’hui. Et presque attristée et inquiète comme le serait une mère, elle desserra un instant sa poigne. Que lui était-il arrivé, si loin d’elle ? La délicate Thaumaturge lui paraissait bien différente à présent ; loin de l’intrépidité caractéristique, elle semblait telle une flammèche vacillante prête à s’étendre. Crois-tu que Petite Chose veut mourir ?. Elle se pencha un peu en avant, et observa un instant sa gorge nue et offerte. Elle le sentait affluer. Il était là, sous cette couche diaphane, le liquide carmin. Il battait, l’appelait. Sa langue pourlécha ses lèvres ; oui la docile enfant avait encore peur. Elle n’avait pas encore abandonné, pas tout à fait.

Brusquement elle se redressa, lâchant sa proie en l’envoyant paitre sur le sol chauffé des profondeurs. Le basalte rugueux devait lui rappeler des souvenirs. La Sanguine ne put s’empêcher d’esquisser un sourire sadique en observant le corps fébrile à peine couvert, allongé à ses pieds. C’était là la meilleure place qu’elle pouvait lui attribuer. Féline, elle s’accroupie près de sa chère victime, restant interdite quelques secondes. Il était appréciable de l’entendre s’excuser, pour autant cela ne confirmait que son propos. Ah ! Sûrement la couvait-elle de trop, faisant d’elle une faible idiote, malmenée par tous. Pourtant, ses yeux andrinoples avaient su voir quelque chose, cette lueur. Approchant du millénaire, c’était la première fois que la jeunesse vibrante avait su toucher son cœur. Pour autant la Ditrown Da’re avait connu des mages talentueux – bien plus qu’elle ne le serait jamais. Mais aucun n’était comparable à ce qu’elle voyait dans la Petite Chose. Quel gâchis de te tuer maintenant. Ses doigts graciles vinrent glisser une de ses mèches derrière son oreille. Le geste tendre était parfaitement inhabituel, de même que sa voix douce qui trancha avec le feu qui brûlait dans ses mires :

« C’est ma faute, Petite Chose, j’ai été trop tendre avec toi ». Et sans crier gare, son poing s’abattit avec violence sur son petit visage. « Il n’y a guère de place pour ceux qui échouent ici ». Elle se releva ses jambes, la toisant de toute sa faible hauteur. « Et tu te doutes qu’il y en a encore moins pour ceux qui me déçoivent ». Les lippes crispées dans un sourire acide, elle ne savait trop que faire. Si elle venait à la protéger, une fois encore, cela pourrait bien éveiller de nouveau la gronde. De même, elle était aux yeux de tous une traitresse dont le seul sort louable restait la mort. Et si notre Reine l’apprenait ? Là, oui là, quel spectacle ce serait !. Avec flegme, elle abandonna là le corps de son élève pour tirer du mur la dague envoyée plus tôt ; un geste bref dans sa propre cuisse, et déjà affluait l’épaisse rivière rougeoyante. Shyn’tae ne pouvait plus douter à présent. Son pouce s’enfonça dans sa plaie dans une exquise douleur qui ne manqua guère de la faire frissonner, puis enfonça son doigt salit dans sa bouche. Puisse Kiel te venir en aide, Petite Chose.
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MessageSujet: Re: Retour sans garantie [L'Renor Krysto]   Retour sans garantie [L'Renor Krysto] I_icon_minitimeMer 8 Jan 2020 - 21:40



Non, elle n'avait pas abandonné. Le regard de la drow parlait de beaucoup, mais pas d'abandon alors même que sa supérieur la projetait au sol. Cela fit mal, c'était vrai. Mais une si petite douleur n'était finalement pas grand chose, surtout devant celle que l'échange qu'elle avait eu avec son père avait fait naitre. Surtout devant celle qu'ensuite le regard sans équivoque de la Ditrown Da're avait attisé.

On était mieux en Ithri'vaan. susurra le cynisme. Mais retarder l'inevitable n'était jamais la bonne solution. Le cynisme n'avait rien à répondre à cela.

De fines mains se posèrent aussitôt à plat sur le dallage, et même si la petite chose ne mit pas plus d'un seconde à redresser le visage, un poing s'abattit dessus sans pitié.

Le goût de sang dans la bouche... Le bras gauche de Shyn'tae céda, elle retomba. La ditrown Da're la vit secouer la tête cesse de tourner. Rien de grave pour l'instant.

« Il n’y a guère de place pour ceux qui échouent ici. Et tu te doutes qu’il y en a encore moins pour ceux qui me déçoivent.»

La sombre serra les dents et se releva. Devant elle, la dirigeante du C'nros s'était entaillée. La jeune arcaniste savait ce que cela signifiait, et cela provoqua en elle un frisson. Ce n'était pas la peur. Elle aussi. C'était si injuste. Son cœur battait plus vite. Ce n'était pas la peur. Elle ravala sa salive au goût de sang.

Elle a besoin de mon sang, elle n'accumulera pas de magie avant.

Shyn'tae serra le poing. Elle n'était rien pour eux tous. Malgré tout ca.

Qu'elle vienne le chercher.

Son regard balaya la pièce et ton son contenu avant de revenir à sa supérieur.

A quel moment ai-je échoué? Lorsque j'ai donné aux Osts toute la puissance magique dont ils avaient besoin, à chaque fois qu'ils en avaient besoin alors que tous guettaient avec impatience mon moindre faux pas? Le visage de la sombre s'orna d'un sourire en coin. Pendant une année.

Sa posture s'assouplit, plus féline. "Lorsqu'Uriz lui-même m'a permis de me tenir debout devant lui, et m'a rendu mon bras? Que j'ai accompli le combat qu'il attendait de son avatar?"

Sans quitter la Ditrown Da're de son regard dans lequel brillait la colère et le défi, sur la pointe de ses graciles pieds nus, la sombre fit un pas de coté vers le bureau.

Lorsque j'ai défié la volonté d'un Obok Senger, que je l'ai empêché de saborder notre siège en l'absence de la reine. Ou lorsque des mages plus âgés, plus expérimentés que moi ont tenté de me tuer…

Elle s'arrêta, et sourit. De toute manière, si L'Renor se décidait vraiment à la tuer, ses chances étaient infinitésimales. Dans ces cas là, il valait mieux prendre un peu de plaisir, et lui offrir un peu de distraction.

… J'en ai tué un. Blessée, démunie j'ai traversé le desert. Mais je suis là. J'ai fait des erreurs. J'ai souffert. C'est eux qui ont échoué.


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MessageSujet: Re: Retour sans garantie [L'Renor Krysto]   Retour sans garantie [L'Renor Krysto] I_icon_minitimeLun 13 Jan 2020 - 21:53

C’est bien Petite Chose, je préfère quand elles se défendent. Un rictus terrible marquait la face de sa maîtresse. Là oui, elle savait déjà ce qu’elle allait lui faire. A quoi bon précipiter les choses ? Jamais elle n’avait trouvé la Petite Chose plus bruyante qu’en ce jour ; finalement peut-être voulait-elle vivre ? Non pas. L’on disait que face à la mort, même les plus déterminés ne résistaient pas. Pourtant le jardin de Teiweon serait sûrement plus doux que la vie qui l’attendait, si d’aventure la Ditrown da’re venait à l’épargner. Pourquoi le ferait-elle ? Ce qu’elle ne disait n’avait aucun sens à ses yeux, ne le savait-elle pas ? La connaissait-elle si peu que cela ? Plutôt, ses doigts caressèrent sa plaie. L’odeur de fer lui chatouillait les narines avec délice alors qu’elle ne pouvait trop contraindre l’excitation qui enserrait son cœur. Il lui fallait du sang de Shyn’tae. Juste une seule goutte. Si fait, elle serait sienne. Oh oui Dula, et nous jouerons ensemble avec la Petite Chose. Crois-tu qu’elle sera contente ?

Lentement, elle s’avança vers son élève. Il n’y avait aucune précipitation, pas même une once d’agressivité. Elle allait comme elle irait pour s’installer à nouveau à sa table, boitillant très succinctement. La plaie qu’elle s’était infligée n’était pas très profonde, mais les contractions de son muscle rendaient chaque mouvement irritant. Bientôt ce serait elle qui ressentirait la caresse de sa lame. Par gourmandise, elle la porta à ses lèvres. Sa langue vint caresser l’acier, nettoyant avec minutie chaque parcelle. La Rose Noire se souvenait de son goût si particulier. Elle voulait y gouter à nouveau, sentir sa chair s’ouvrir sous ses doigts experts. Et les tendons se déchirer. Et les muscles s’entailler. Sa respiration s’accéléra à mesure que son imagination la menait dans de sombres pensées. Le Monstre ne s’était point encore endormi, et veillait là dans sa prison mentale. Il ne faudrait qu’un instant, qu’une seule brise pour que ne s’ouvrent les portes de l’enfer.

Envieuse, et pourtant pas encore aveugle, elle se hissa sans mal sur son bureau, s’asseyant à son rebord. Elle ne touchait le sol ainsi. Les yeux andrinoples figés sur sa proie, elle continuait à triturer sa pauvre plaie. La pauvre thaumaturge semblait plus chétive qu’un animal blessé. Engoncé dans ces drôles de frusques, moitié ramassée sur elle-même, elle semblait prête à bondir au moindre signe de la Sanguine. Là, avait-elle oublié à quel point elle aimât jouer ? Un petit rire fendit le silence qui s’était instauré jusque-là. Son sang poisseux venait collait à ses ongles qui ratissaient la zone. Qu’allait-elle bien faire de cette Petite Chose ? Si elle voulait la voir souffrir, elle était bien trop attachée pour la laisser mourir si vite. Elle avait raison en un point après tout : elle ne l’avait pas choisi au hasard. Détachant la petite poupée de chiffon avec ses doigts sales, elle serra doucement le tissu. Que faisons-nous Dula ? La Reine la voudra probablement morte oui, probablement. Et le Monstre se mit à grogner une fois, puis deux. Il avait soif de sang.

« Ne t’avais-je pas interdit de te battre et d’user de magie ? ». La voix fluette était terrifiante dans cette atmosphère pesante, presque carnassière. « N’accuse pas les autres de ta propre médiocrité Shyn’tae Vaen’re ».
« En me désobéissant tu n’as pas fait preuve de bravoure mais de stupidité. Tu as laissé la porte ouverte aux orgueilleux. Tu n’as pas le niveau de mes hommes, tu ne l’as jamais eu. Alors que crois-tu qu’ils ont pensé lorsqu’ils ont finalement pu se rendre compte de ta prétendue force ? ».
Elle ricana, une fois encore. « Vous les jeunes êtes trop empressés si bien qu’une situation vous semble rapidement inextricable ; « Je n’avais pas le choix » « Ce n’est pas de ma faute, j’étais obligé ». Non, Petite Chose… ».
Le Monstre se jeta contre les barrières alors qu’elle glissait précautionneusement jusqu’au sol qu’elle avait quitté quelques instants plus tôt. « Nous avons toujours le choix ». Et dans une œillade illuminée, lui tendit la dague. Quel est ton choix, Petite Chose ?.
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MessageSujet: Re: Retour sans garantie [L'Renor Krysto]   Retour sans garantie [L'Renor Krysto] I_icon_minitimeMar 14 Jan 2020 - 0:11




« Ne t’avais-je pas interdit de te battre et d’user de magie ? »

Il n'y avait pas grand chose à répondre à cela, par contre elle avait beau se concentrer, elle avait du mal à identifier le moment où elle avait laissé croire qu'elle pensait ne pas avoir eu le choix. Non elle avait eu le choix évidemment. Elle aurait pu ne rien faire évidemment. Peut-être faire autrement. Non il ne fallait mieux pas qu'elle se lance dans ce genre de reflexion: Elle finirait dans les nuages assurément, et cela ne pourrait que lui porter préjudice.

Cela ne servait à rien pour elle de répondre à cela. Elle s'était trompée, elle en avait subi les consequences. Elle en subissait encore les consequences. Et il y avait quelque chose en elle qui se nourrissait avec bien trop de plaisir de ces mots qu'elle aurait tant voulu ne pas sentir sonner si juste.

Médiocrité. Stupidité.

Elle aurait pu faire mieux. Elle aurait du faire mieux. Et ce qu'elle avait elle-même dit sonnait faux, un verni pour se convaincre qu'elle n'avait pas été incapable d'être à la hauteur.

L'image de son frère assis face à elle derriere ce foutu cactus en pot s'imprima dans son esprit. Le regard de jeune premier du garde d'ébène n'avait pas besoin de mots pour dire "je le savais."

Ses yeux glissaient sur les formes de sa supérieure hiérarchique. Ils avaient suivi ses moindre mouvements et les siens témoignaient qu'elle avait au moins retenu les leçons qu'on lui avait enseigné. L'Renor était dangereuse, séduisante.  Elle-même… Un sourire timide

Et elle voyait certainement le mélange de doute et de colère qui habitait son élève. Cette colère là était dirigée contre elle-même. Elle avait été folle de refuser d'admettre l'hypothèse la plus simple: Elle pourrait essayer de toutes ses forces de se convaincre que le monde avait tort sur son compte…

Aussi douloureux que cela pouvait être, quelle importance cela avait-il? Quelle importance avait la vérité que Tesso s'ingéniait à fabriquer.

Juste un poignard en plein cœur de plus, comme une épreuve à surmonter.

- Nous avons toujours le choix. Les mots avaient été prononcé de concert avec ceux de son ainée, les yeux de carmins de Shyn'tae posés sur ceux de la rose noire.

Les regrets étaient inutiles, seul comptait la suite. Peut-être n'avait-elle plus rien à donner, mais même cela était sans importance. Il n'y avait qu'une seule manière de le savoir. Son cœur battait fort. Non pas de peur, mais d'excitation. Elle aurait voulu rire, mais aucun son ne serait sorti.

L'Renor avait tendu sa dague. Elle était belle, attirante. La féline demoiselle s'approcha, attirée comme le papillon par la chandelle.

Elle pourrait certainement partir. Peut-être. L'idée était apparue comme une option improbable dans un recoin de l'esprit de la magicienne. Elle pourrait refuser, elle pourrait supplier, elle pourrait… Tant de possibilité, dont les consequences possibles dansaient derrière ses pupilles.

Elle pourrait utiliser cette dague aussi. Elle pourrait fuir définitivement, pour les P'leiks certainement. Elle pourrait tenter de forcer la Ditrown Da're à en finir. Mais ces deux options ne lui viennent pas à l'esprit.

Et elle se souvint d'une époque où elle était une gamine pleine de rêves de gloire dans les bras d'un père plein de fierté. Mais qui pouvait revenir en arrière?

-  Ce que je vous ai demandé à l'époque... je le désire encore. Sa voix douce, timide, légère comme le vent, portait à peine plus loin que les oreilles de son vis à vis.

Elle se pencha. son souffle était rapide, son corps gracieux tout proche au point de sentir la chaleur, au point de sentir l'odeur métallique du sang.

Le risque attisait les flammes en elle. Son instinct lui disait qu'elle faisait une erreur. Elle sentit le froid du metal sous son doigt.

L'épreuve l'attirait tant. Son instinct avait tort. Ses lèvres étaient si proches maintenant.

"Je n'étais pas prête. Mais je veux continuer... Rendez-moi plus forte."

Elle sentit la morsure du métal sous son doigt.

J'ai choisi. C'est mon choix. Il est peut-être mauvais, c'est peut-être le pire, mais personne n'aura décidé à ma place.
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MessageSujet: Re: Retour sans garantie [L'Renor Krysto]   Retour sans garantie [L'Renor Krysto] I_icon_minitimeJeu 16 Jan 2020 - 19:12

Là, si proche de sa protégée, elle pouvait humer les effluves de son corps. Elle ne fuyait pas. Elle n’avait même pas eu l’air d’hésiter ; et peut-être orgueilleusement, elle se trouvait bien fière de cette Petite Chose. Oui, la Sanguine pourrait peut-être encore en tirer quelque chose finalement. Etait-ce la bravoure qui parlait pour Shyn’tae, ou la résignation ? Elle ne le saurait jamais réellement. C’était ce qu’il lui plaisait ; la gamine avait la rage au ventre, l’envie de vivre tout et tout de suite. La fougueuse jeunesse l’habillait de la plus jolie des façons, si bien qu’elle ne pouvait qu’admirer son rayonnement. Là oui, elle ferait un fruit admirable lorsqu’elle aura maturé assez, dont la saveur supplantera celle de toutes les autres plantes qu’elle n’eut jamais connues. Ce jour-là, la Rose Noire pourrait céder sa place avec assurance d’avoir fait les choses correctement. Et plus tôt que plus tard, elle s’attèlerait à faire de cet enfant une progéniture digne d’elle, digne du Puy.

L’odeur de fer lui chatouillait les sens, et invitait pernicieusement la magie à s’accumuler. Enfin. Dans le ploc discret mais régulier, elle porta à ses lèvres la lame. Chargée du sang de la pauvresse, elle se délecta du nectar carmin. N’est-il plus douce caresse que celle-ci Dula ? Kiel, regarde ton enfant. Et l’acier toujours fourré dans la gueule, ses doigts vinrent replacer quelques mèches trop courtes derrière les oreilles alertes de sa disciple. Quoiqu’elle eut fait le meilleur choix, elle n’en était pas moins tirée d’affaire. En vérité, L’Renor avait enfin arrêté sa décision : les Dieux jugeront Shyn’tae, comme ils jugent les pairs. Sous leurs regards bienveillants, elle lutterait pour sa vie. D’étranges sensations – quoique commune – naissaient dans son ventre. Le cœur battant trop vite, trop fort, dans son petit corps ne laissait point de doute sur l’excitation qui l’animait alors. Bientôt Dula, très bientôt….

Elle occultait tout à présent. La pièce dans laquelle elles se trouvaient n’existait plus. Il ne demeurait pour seul objet que cette dague tristement rendue propre, et sa petite poupée de chiffon. Le reste n’était qu’un entrelacement de fines toiles tendues, où perlait çà et là quelques gouttelette pourpre. Elle ferma les yeux. Elle n’avait guère besoin de les ouvrir. La Rose Noire sentait chaque portion de ce corps svelte qui attendait sa sentence. Elle était elle. Et son palpitant qui ne cessait de mener la cadence ; plus l’exhortait plus encore à le faire. Là, maintenant. Sur ces dalles chauffées des Profondeurs de l’Elda. Tout doucement, la frêle Sanguine s’approchait de la cage, dans le noir. Les pieds baignant dans un liquide inquiétant dont on ne devinait que quelques ondulations, elle arriva face à la boite de fer. Son bras se tendit et l’espace d’un court instant, elle hésita sincèrement.
« Ouvre-moi ». La voix n’avait plus rien des sons gutturaux. Non, cette voix, elle la connaissait que trop bien. Sortant des ténèbres, une silhouette se dessina dans la pénombre. Lorsqu’enfin ses doigts ouvrirent la serrure, la Bête lui sourit – une dernière fois.

Les paupières s’ouvrirent d’un coup sur le monde réel. Il ne lui fallut pas plus d’une seconde ou deux pour agir. Elle sentait le lien magique déferler en elle. La Ditrown Da’re prenait le contrôle du corps de la Petite Chose, et rapidement insuffla assez de volonté pour liquéfier d’avantage son fluide vitale. Bientôt ses narines se mirent à couler, puis ses yeux, ses oreilles et tous ses orifices. Les gouttes s’en allaient s’écraser dans une mélodie parfaite sur son corps, ses mains impuissantes et sur la roche. Elle pouvait la tuer si elle le voulait. Ce serait si facile.
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MessageSujet: Re: Retour sans garantie [L'Renor Krysto]   Retour sans garantie [L'Renor Krysto] I_icon_minitimeDim 19 Jan 2020 - 1:49



Une onde qui se déploya dans la trame, comme une onde au travers des motifs, fondations du monde. L'onde s'étendit, se répandit. Elle fut suivie par d'autres, comme il se devait. L'arcaniste n'avait pas détaché ses yeux de la drow qui avait léché le sang sur la lame. Elle sentait la morsure de la coupure sur son doigt bien sûr, mais cela ne serait que le moindre de ses soucis bientôt.

C'était un pari fou et stupide, mais aux yeux de Shyn'tae, c'était le seul qui pouvait avoir un sens. Aller au devant de l'inévitable valait mieux qu'être forcée à l'affronter.

Elle pouvait survivre. Elle était si sûre que L'Renor ne désirait pas sa mort.

Les prunelles sanglantes s'ouvrirent sur leur miroir carmin. L'onde dans la trame devint vague et secoua les motifs, les altéra dramatiquement. Dans la trame, il n'y avait nul direction, nulles distances, Pourtant la sombre savait que c'était les siens. La magicienne frémit, ses muscles un instant crispé alors que la nausée s'empara d'elle, sa volonté par reflexe cabrée pour lutter contre les changements inconcevables et brutaux.

Elle connaissait cette sensation. Tant de fois des mages de vie avaient-ils prêté leur pouvoir à son corps blessé. Il y avait toujours cette sensation de malaise, cette tentation de la résistance. Mais cette fois-ci, il parut clair à la sombre que Na'ri, ou Memeth avaient fait tout deux attention à elle.

Elle ne pouvait que résister. C'était inutile.  Elle devait lutter. Elle était impuissante. La jeune drow vacilla, son visage affichant pendant quelques instants l'expression de surprise d'horreur que la rose noire avait pu admirer chez tant de ses victimes.

La mage de vie sentit la resistance du corps fin et gracieux. Mais fait de chair et de sang comme les autres, elle l'étouffa sans mal malgré la volonté qui la soutenait.

La sensation du sang chaud qui s'écoulait, son petit cœur battant plus fort plus vite pour contrer l'ineluctable, et, malgré tout, cette volonté vaine de refuser la magie qui, tels milles insectes courant sous une peau qu'elle aurait souhaité arracher, pliait son corps à la volonté de la Maitre magicienne.

Shyn'tae souhaita hurler, elle ne dit rien.
Shyn'tae souhaita pleurer, c'est du sang qui coula.

Elle ne désirait peut-être pas sa mort... Mais pourquoi n'aurait-elle pas laissé sa survie entre les mains des dieux.

Les dieux étaient cruels.

La jeune sombre recula d'un pas, nauséeuse, prise de vertiges, titubante, son champ de vision réduit. Etrangement, un tableau tout de nuances de rouges retint son attention. Accroché au mur derriere la Ditrown Da're, dans un brouillard peu à peu grandissant, elle le trouvait bien fade. Son frère, habillé à la manière de Myr'hennis Vekt la regardait en riant, et porta un toast.

Ce n'était pas très bon signe, jugea-t-elle avec un peu trop de lucidité à son goût.

"Je ne..." Elle toussa, le goût ferreux du sang emplit sa bouche. Sa main se posa sur le dossier de la chaise, qu'elle regarda un instant. Son corps hurlait, son esprit se débattait.

Il ne s'était écoulé que quelques secondes. Sans pouvoir se retenir plus longtemps, la rage dans les yeux, elle jeta la chaise sur la magicienne. Ce n'était pas une bonne idée, murmura la voix de la raison. Malheureusement elle était inaudible.
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MessageSujet: Re: Retour sans garantie [L'Renor Krysto]   Retour sans garantie [L'Renor Krysto] I_icon_minitimeMar 21 Jan 2020 - 0:06

Droite, impassible, elle l’observait avec une curiosité morbide. En vérité, ses grandes mires carmines ne parvenaient à se défaire de l’obnubilant spectacle qui mêlait à la fois tous ses sens. L’eau à la bouche, l’excitation au bord des lèvres, elle percevait dans l’écoulement de la gamine les battements frénétiques de son cœur. Chaque pulsion venait propulser hors de son enveloppe le liquide si précieux. Ploc plic ploc, Dula. Ploc, ploc. Ses canines se dévoilèrent alors qu’elle s’interdisait d’approcher ; pas tout de suite du moins. Les doigts invisibles serraient les fils tendus et les secouaient à intervalle régulière, dans une symphonie de tintements macabres. Et si la fascination malsaine pour le sang la perdait un peu, elle n’en demeurait pas moins curieuse. Le peau, le crâne, les os…. Elle voulait caresser l’enfant-prophète, alors qu’à ses yeux s’éveillait enfin la fleur du Mal. Les aillons tâchés de rouge, la peau blême et la souffrance d’une lutte contre soi-même. Elle continuait à se battre le Petite-Chose ; oui elle refusait la mort, une nouvelle fois.

Et peut-être que la Sanglante cessa de la vider lorsqu’elle esquiva de justesse la chaise envoyée avec l’énergie du désespoir. Peut-être cela avait-il eu lieu juste avant. Le meuble alla s’écraser contre le sol tandis que la Petite laissait un peu de repos à sa proie. C’est ainsi qu’elle les aimât le mieux. Il ne faut pas la tuer Dula, non il ne faut pas. Un petit rire sadique venait agrémenter ses discours silencieux. Le sort de Shyn’tae était figé à présent. Ses globes oculaires lui piquaient tant elle oubliait de battre des cils. Farouchement aliénée par le cruor, elle se passa la langue sur ses lèvres envieuses. Les tripes serrées, elle subissait les assauts de nausées avides de cette chair, avides de la repentance. Elle fit un pas en sa direction, puis un autre. La Petite Chose ne bougeait pas, plus vaillante qu’elle ne l’eut cru capable.

Elle s’approcha tant que bientôt, leurs corps s’effleurèrent. Ses mains vinrent cueillir le liquide andrinople qui parsemait sa bouille fatiguée. Puis ses lèvres vinrent embraser la peau froide, à peine chauffée par les sillons funèbres. Le goût de ferraille emplit sa bouche. Sa respiration s’accéléra, les yeux mi-clos alors que ses bras s’en venaient prendre possession de son corps. Là, sous ses doigts violents elle sentait la chair, les muscles, les tendons qui roulaient dans la frénésie de ses attaques. Et puis, quelques secondes plus tard lorsqu’elle fût trop las, elle saisit la gamine pour la tignasse une fois encore et l’entraîna dare-dare à l’extérieur de son office. Elle traversa les longs couloirs sous le regard mi-effrayé mi-étonné de ses subordonnés, jusqu’à arriver dans la cour. Là, elle lâcha sa prise en l’envoyant au sol, près du centre de l’amphithéâtre improvisé.

« Usstan ssinssrin riluss ulu vost nind xund lu’valm uns’aa gaer ! ».
Que tous cessent leurs activités et me rejoignent céans !
La voix tonna et les premiers curieux s’attroupèrent. Le monde ramènerait le monde, elle en était persuadée. La Ditrown Da’re mesura la foule d’un regard suffisant avant de tirer de sa botte une lame en s’approchant de sa protégée mal en point.
« Shyn’tae uriu naut rothrl lu’rath’arghed udossta quarth. Yallt il brkago udossta nelgeth ! »
Shyn'tae a désobéie et a déshonorée notre ordre. Aujourd'hui, elle demande notre pardon.
Une huée ne tarda pas à emplir l’air, alors que déjà quelques insultes fusaient. Il était l’heure pour la jeune eldéenne d’assumer les conséquences de ses actes.
« Udossta Ilharn sila’ve ilta ghil ulu ilta delmah, detholin whol udossa nindel il zhal’la dro. Jhal udos xun naut gotfrer ; udeos neitar gotfrer l’pleik ! »
Notre Père l'a ramené ici à sa maison, choisissant pour nous qu'elle devait vivre. Mais nous n'oublions pas ; nous n'oublions jamais les souffrances !
Elle s’approcha de Petite Chose dans la clameur naissante, délaissant sa tribune pour mieux poursuivre sa diatribe populaire : « Wun alust d’dosst rethors, vel’bol xun dos joros Dalhar ? »
Devant tes frères, que demandes-tu Enfant ?
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MessageSujet: Re: Retour sans garantie [L'Renor Krysto]   Retour sans garantie [L'Renor Krysto] I_icon_minitimeMer 22 Jan 2020 - 21:47



La drow toussa une dernière fois du sang, sa silhouette gracile peinait à se relever sur les dalles du grand amphithéâtre à l'endroit même où la ditrown da're l'avait jetée. Son ainée avait une force surprenante pour sa taille n'avait pu s'empêcher de penser Shyn'tae alors qu'elle la trainait sans la moindre compassion au travers des couloirs.
Malgré les efforts vaillants de la magicienne anémiée pour tenir la distance, malgré son sens de l'équilibre qui résistait même quand son corps l'abandonnait, elle avait échappé plus d'une fois à la chute.

Il fallait dire que la compassion ne paraissait pas à l'ordre du jour. Par contre, l'humiliation si. C'est qu'elle en avait de la chance.

Ce n'était pas grave, elle tiendrait bon. Ils s'en fichaient peut-être, elle leur prouverait quand même.

Du revers de la main, Shyn'tae essuya son visage du liquide carmin qui l'avait maculé. Sa robe en était couverte. Un petit corps si fragile… Sa supérieure haranguait les mages. Et si elle la tuait vraiment aujourd'hui?

La jeune drow n'y croyait pas, une telle conclusion ne pouvait être la sienne. Exécutée publiquement par sa supérieure pour incompétence. "Elle a fait de son mieux." suggéra comme épitaphe la petite voix du cynisme. Finalement ce ne serait pas si mal. Si elle n'arrivait pas à finir aux P'leiks...

Et elle n'avait pas peur de ça…

La voix de la Maitre mage résonnait fort dans la pièce qui se remplissait peu à peu. Shyn'tae s'était relevée. A la force de la volonté, elle fit taire le tremblement qui avait commencé à se propager dans ses mollets. Avec la lucidité qui la caractérisait, la sombre nota que se nourrir avant de venir avait été une sage précaution.

Ses yeux carmins firent le tour de la pièce. On la huait, elle prit note de chaque visage qui lui lançait des insultes. Elle en connaissait plus d'un. C'était étonnant, elle croyait se souvenir avoir rendu des services à au moins l'un d'entre eux. D'autres mages parlaient entre eux, riaient, se délectaient du spectacle. Et il y avait les autres, les désabusés, qui assistaient à la scène par devoir et avec le regard le plus inexpressif qui soit. Elle en reconnut quelques uns aussi.

Elle avait peur de tout autre chose. De ce bouillonnement insatiable logée dans son ventre que chaque mot, chaque regard, chaque rire alimentait sans qu'elle ne puisse rien y faire.

La Ditrown Da're haranguait des imbéciles trop heureux de la laisser penser pour eux. Elle avait dégainé un couteau. C'était ca l'important. elle s'en servirait sans douce, jugea la sombre. L'important, c'était que ce ne soit pas pour le coup de grace. Elle voulait tellement vivre. Elle ferait ce qu'il fallait pour vivre.

La fierté était pour les faibles.

« Wun alust d’dosst rethors, vel’bol xun dos joros Dalhar ? »

Ces mots là étaient pour elle. La magicienne n'hésita pas. Sa voix manqua certes le départ, mais elle se reprit vite, forte, claire, capable de faire taire les rires et les moqueries.

- Je demande de pouvoir un jour mériter votre pardon! Je demande à servir sans reserve le C'nros, à servir l'Eda vengeur, à servir Uriz notre père pour le mériter."

Elle n'avait pas besoin de mentir, et c'était une proposition qu'elle espérait plus difficile à refuser.
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MessageSujet: Re: Retour sans garantie [L'Renor Krysto]   Retour sans garantie [L'Renor Krysto] I_icon_minitimeJeu 23 Jan 2020 - 23:16

Dans un ultime élan de courage, la Petite Chose s’était relevée. Elle était affaiblie, rien de plus qu’une pauvre bête livrée en pâture aux chiens, et pourtant, alors qu’elle lui faisait face, brillait encore la flamme dans ses yeux. Elle n’avait pas abandonné, jamais. Et à chaque souffle suffit sa peine ; elle était forte, bien plus qu’elle ne l’aurait cru. Emplie d’une fierté sourde, la Sanguine n’en pipa mot. Gardant la même bouille indifférente, elle ne pouvait se contenter de cela. Elle était bien trop en colère pour pardonner si promptement. Les mots de sa protégée n’y changèrent guère quelque chose, quoiqu’elle salua le choix de mots simples aux discours grandiloquents. Shyn’tae devait apprendre, là tout de suite, ce qu’il coûtait de briser les apparences. Car si la jeunette avait tenté de convaincre son aînée, ce n’était pas elle qu’elle devrait mater chaque jour durant. En s’offrant à son institution, la petite avait choisi de se plier à sa volonté. Qu’elle soit en réalité ou non ce dont on l’accusait importait peu. Non, ce qui comptait vraiment à présent, c’est qu’ils croient tous que rédemption il y aurait. Puisque quoiqu’en dise l’Hémomancienne, elle se refusait à revivre l’absence de son Elue.

Ses mots soulevèrent une nouvelle huée. La plupart n’était ici que dans l’espoir de voir se rependre le sang. Pas plus enclin à la réflexion que les Humains, ils s’étaient amassés en un tas écœurant. Et si tous semblaient fascinés par le macabre spectacle, une voix intestine leur rappelait que rien n’était immuable ; qu’un jour peut-être, leur chemin les mènerait à la place de l’Eldéenne. Et ce jour-là, ils avaient conscience que la clémence de la Rose Noire serait moindre. Elle dépassait enfin les rumeurs. Dans un geste de sa main libre, elle interpella deux de ses mages. Ils portaient indistinctement les mêmes vêtements, et leur visage caché ne laissait point de doute sur leur fonction : ils étaient parmi les Onze. Cette cabale élitiste, formée sept année plus tôt rassemblait les meilleurs des magiciens de la vie. Aussi, presque toujours taiseux, ils s’avancèrent jusqu’à parvenir à un mètre à peine de la pauvre victime. Sans plus de compassion – car de douteuses certitudes l’en disait dépourvue -, elle fit s’agenouiller le condamné.

« Gaer ! Vrine’winith l’ul’trin ! »
Là ! Que cesse la clameur !
Et tous se turent, ou presque.
« Usstan inbal nym’uerus dosst xukuth harus wun l’jindurn d’rath’argh, jhal udos ph’naut ulu khluryar whol udossta Ilharn. Waer’honglath z’klaen tlu xunor »
J’ai entendu votre cœur blessé devant l’infamie mais nous ne sommes pas enclin à juger pour notre Père ! Justice doit être faite !

Les talons claquèrent en rythme sur le sol, faisant trembler la dalle basaltique. D’aucun ne savait que ce qui attendait la jeunette était certainement pire que la mort. Les yeux andrinoples de la Ditrow Da’re, imperturbable, se posèrent sur l’accusée.

« Shyn’tae Vaen’re, whol l’crimes nindel ph’dossta, dos z’klaen morfeth biu hyrr’ol llame. Yol dos inbal sworn ulu kla’ath l’Vharelggin Elda, yol dos yu’na l’laur p’los uns’aa, Milith ulu dosst rethors l’z’ress d’dosst duranfeh. Gultah Kel udossta ih’ara draa d’dosst atatal. Wun ussta rahi lli mina, lu’naust d’dosst rethors shlu’ta khluryar dos ».

Shyn’tae Vaen’re, pour les crimes qui sont tien, il te faut faire amande honnorable. Puisque tu as juré de servir l’Elda Vengeur en notre sein, puisque tu t’es agenouillée devant moi, prouve à tes frères la force de ta conviction. Offre à Kiel notre protectrice deux de tes côtes. Dans mes mains déposent les, et aucun de tes frères ne pourra plus te juger.

« Maintenez-la éveillée. Qu’elle ressente chaque seconde, car c’est ici sa punition ». Elle déposa devant elle la lame qu’elle avait tiré de ses chausses et vint de placer derrière elle, offrant à son dos un appui bienvenu. Et dans un geste presque maternel, ses deux mains se posèrent sur ses épaules. L’Renor savait ce qu’elle risquait en faisant cela, mais cela lui importait peu. Elle se concentra, assez pour ressentir le fluide de son élève. Elle allait la régénérer en même temps, maîtriser autant que possible l’hémorragie ; et puis elle ferait sa pénitence elle aussi. Incapable de voir la détresse de la Petite Chose, elle devait payer le prix de sa crédulité. Et nous partagerons cela pour toi, Mère.
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MessageSujet: Re: Retour sans garantie [L'Renor Krysto]   Retour sans garantie [L'Renor Krysto] I_icon_minitimeVen 24 Jan 2020 - 18:18



La Ditrown Da're l'avait poussée à s'agenouiller, elle s'était exécutée. Evidemment, les mots ne seraient pas assez. Les mots n'étaient jamais suffisants. Shyn'tae n'était pas entièrement convaincue de ses crimes, mais l'affirmer haut et fort aurait-il été souhaitable? Après ce qui lui était arrivé, sa mémoire des évènements étaient parcellaires, au moins autant que la détermination de L'Renor était forte, au moins autant que le désir de sang de certains de ses compagnons d'arme étaient grande.

La Maitresse des lieux prit la parole.

"Offre à Kiel notre protectrice deux de tes côtes. Dans mes mains dépose les, et aucun de tes frères ne pourra plus te juger."

Les yeux rubis de la jeune magicienne se posèrent avec surprise sur ceux de la cruelle oratrice. Avait-elle bien entendu? Oui, les mots ne pouvaient pas être interprétés autrement. Un instant, une petite voix optimiste mais emplie de doute au fond de son crâne se demanda s'il s'agissait d'une métaphore.

La lame fut déposée devant l'aspirante. Etait-elle d'ailleurs même aspirante? Difficile à dire. Elle déglutit, car la raison affirmait sans aucun doute possible qu'il ne s'agissait pas d'une métaphore. Une métaphore pour quoi d'ailleurs?

Comment même Shyn'tae pouvait-elle réussir ce qu'on lui demandait? Etait-ce la condamnation à mort la plus cruelle qu'elle puisse imaginer? Comment pouvait-elle espérer que son corps la porte jusqu'au bout d'une telle épreuve?

Refuser serait une sentence de mort, et Shyn'tae eut après la panique initiale une idée de comment cela pourrait être rendu possible.

« Maintenez-la éveillée. Qu’elle ressente chaque seconde, car c’est ici sa punition »

Cela ne pouvait marcher que par magie, admit-elle en retenant un rire nerveux. La petite main de la rose noire se posa sur son épaule. Elle même avait pris le couteau et le serrait de toutes ses forces dans sa main droite et l'observait comme fascinée.

Elle ne voulait pas, mais comment refuser? Si les dieux le voulaient, elle vivrait. Ca irait mieux après, elle n'allait pas se laisser arrêter si facilement.

La sombre releva les yeux vers sa congénère, sa voix était étrangement douce et inexpressive.

- Ditrown Da're? Je veux l'offrir aux dieux. Des prêtres pourraient-ils être présents?"

Sans surprise, mais au grand soulagement de Shyn'tae. L'Renor accepta sans faire la moindre remarque: elle aurait haï qu'on confonde cette demande avec de la lâcheté, et une telle chose ne lui paraissait maintenant plus impossible.

Lorsqu'ils arrivèrent finalement, à genoux sur le dallage elle priait, le couteau à la main. Elle s'était déshabillée, la robe déjà maculée de sang était soigneusement pliée un peu plus loin.

Elle était aussi prête qu'elle pourrait jamais l'être.

L'Renor posa ses deux mains sur ses épaules.

Elle sentit la magie affluer. Elle sentit son corps resister, sa volonté se cabrer, comme elle sentit les mages balayer cette resistance, leur pouvoir s'emparer de ses chairs inéluctablement, sans douceur, sans pitié. Elle pouvait se débattre, cela aurait été inutile. Et c'était pour son bien.

La sombre prit une profonde inspiration, se redressa, posa la lame sur la peau de son torse, hésita.

Son bras gauche pendait toujours. Elle ne pourrait compter que sur le droit. Elle n'y connaissait pas grand chose en anatomie, et savait juste au touché où se trouvait ce qu'elle supposait être la dernière de ses côtes.

C'était une façon originale d'apprendre.

Le couteau perça la peau pour la premiere fois La douleur était supportable,  mais la lame refusa de s'enfoncer. Mauvaise technique apparemment, ou mauvaise endroit? Elle n'avait jamais désossé quoi que ce soit.

Alors elle tenta plus bas. Peut-être qu'en attaquant par en dessous elle aurait plus de chance?

***

Elle haletait, son regard vitreux au loin ne voyait rien. Pourquoi faisait-elle ca déjà? Pour vivre. C'était contradictoire. Absurde. Ses pensées s'éparpillaient. Son cœur battait la chamade, elle combattait du mieux qu'elle pouvait les tremblements de son bras. Elle avait tellement de chance de s'être tant entrainée à percevoir. La position de la lame, ses tremblements lui apparaissait intuitivement avec une évidence folle.

Elle tailladait, elle déposait la lame pour toucher, tirer, pousser, le visage serré,

La premiere côte tomba sur le dallage au milieu du sang. Elle supposait que ses os devaient porter la marque des coups de lame maladroits qu'elle avait du infliger au cartilage pour la dégager. Incapable de retenir ses larmes, elle s'était dit que ce serait plus facile pour la deuxième. C'était faux, elle avait commencé par la gauche, le plus facile. Maintenant elle devait faire la droite.

***

Le couteau tomba sur le sol au coté des deux bouts d'os.

C'était terminé. Le temps n'avait plus aucun sens. Rien n'avait plus aucun sens. La sombre souriait, le regard perdu. Nul cri, cela aurait été trop fatiguant. Son corps n'était que douleur indicible, chaque souffle une épreuve. Il suffirait d'arrêter, murmura une voix tentatrice à son oreille.

Mais elle ne pouvait pas.

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MessageSujet: Re: Retour sans garantie [L'Renor Krysto]   Retour sans garantie [L'Renor Krysto] I_icon_minitimeDim 26 Jan 2020 - 22:40

Les mains sur les épaules de la jeune eldéenne s’agrippèrent plus fort, blanchissant les jointures. Ses mâchoires se serrèrent ; les yeux posés sur la foule, elle se concentrait. Là, elle sentait la magie affluer dans un tourbillon constant. Le Monstre agrippait de ses gros doigts la toile d’araignée, faisant tinter les gouttelettes carmines dans une symphonie chaotique. Et il tirait, tirait et tirait sans cesse. Son ventre était douloureux. Sa peau ressentait cette lame froide invisible qui ne perçait pourtant pas sa peau. Elle sentait les doigts tremblant à travers la plaie béante. Et les muscles qui se déchirent. Et les tendons qui lâchent. Chaque inspiration lui brûlait les poumons alors que dans son crâne raisonnaient les rires infanticides de la Bête. Mais ce n’était pas elle qui préoccupait la Rose Noire ; là, sous ses serres ancrées, elle veillait à sa protégée. Cette fille qu’elle n’avait jamais eue. Ses mires ne voyaient rien dans la masse informe qui clamait elle ne savait trop quoi. Plutôt elle sentait – non elle distinguait plus nettement encore – les battements erratiques de son cœur. Elle était là, au milieu de ce courant sanguin ; coagulant tant bien que mal, régénérant autant que possible.

Mais ses capacités n’étaient point infinies. Et la douleur devenait une épreuve. Chaque parcelle de son corps la tiraillait. Elle n’était plus qu’un vaisseau pour son Art. Catalyseur tendu, de grosses gouttes de sueur venaient perler son visage, son cou, son dos. Si sa concentration lui échappait, juste un instant, elles mourraient probablement toutes les deux. Alors elle faisait abstraction ; c’était bien plus facile ainsi. Plus facile que d’entendre le rire gras et les mots qui répétaient : elle paye le prix de tes fautes. Ces phrases tournaient tant qu’elles devenaient plus terribles que la souffrance qui s’éprenait de son corps frêle. Que cela cesse ! Oui, elle aurait tant aimer ne pas avoir à affronter sa culpabilité, à ne pas affronter ces démons tourmenteurs. Elle avait échoué et pourquoi ? Les images de son rêve terrible lui revinrent en mémoire. C’était censé être mon dernier champ de bataille… Mais elle était là, invariablement saine et sauve. Elle avait défié la Mort, défiée sa Mère. Paye le prix de tes fautes. C’était donc cela ? Oui, tout faisait sens ; la Petite Chose avait subi la peine à sa place et aujourd’hui, elle lui offrait sa petite mort. Point de rédemption pour la Sanguine qui ne verrait que l’ombre de ses échecs dans les yeux de son élève.

Tirant la Ditrown Da’re de sa catatonie, le bruit du second os sur la dalle lui fit baisser les yeux. Elle avait réussi. L’odeur de sang enivrait la Maîtresse des lieux, alors qu’elle ne parvenait à voir le visage béat, perdu, blessé de la jeunette. Il lui fallut bien du courage pour parvenir à lâcher les petites épaules, à rassembler ses esprits éparpillés par la volonté de la Mère. Essoufflée, elle n’avait point fini. Pas encore. Elle s’accroupit face à son élève. Elle était sublime, tâché de l’andrinople, les doigts sales, la peau blême. Jamais on n’a vu de si belle Petite Chose, Dula, non jamais. Elle ramassa les côtes abandonnées là. Elles étaient encore chaude. Dans le silence revenu, elle les présenta aux prêtres qui hochèrent la tête d’approbation, avant de les brandir à la foule qui beugla un grand coup. Comme si le tonnerre s’était invité dans l’Elda.

« Shyn’tae Ven’re, ma Fille, tu as aujourd’hui montré à tes frères ta valeur. Nous t’avons entendu. Et à compter de ce jour, jusqu’à ton dernier, jures-tu de servir le C’nros ? »

La petite sembla hésiter. Comment lui en vouloir après l’épreuve traversée ? Ce n’était pas pour elle, non. Shyn’tae avait été brave, jusqu’au bout. Puis, après des secondes égrainées dans l’attente insupportable, incapable de parler, elle hoche la tête. Si elle n’en montra rien, la Ditrown Da’re était soulagée. Gardant les osselets fermement dans sa main poisseuse par le sang, elle reprit :

« Alors soit. Qu’on apporte le tisonnier ! ».

Elle était maintenue consciente par la magie. Pas sûre qu’elle comprenait ce qu’il se passait alors autour d’elle quand, quelques minutes plus tard, on demanda à chauffer le fer qui portait la main aux éclairs. C’est bientôt fini Petite Chose, très bientôt. Puis l’arme brûlante rencontra la peau de son cou. Une odeur de chair grillée emplit l’espace. Marquée, elle devrait à présent assumer le poids de sa promesse. De celle qu’elle venait de faire devant tous bien sûr, mais de celle induite à sa tutrice de ne plus recommencer, jamais.

« Portez-là avec moi au temple. Maintenant ».
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