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 L’œillade de la Dame Dieu | Louis de Saint-Aimé

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Neyrelles de Brochant
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MessageSujet: L’œillade de la Dame Dieu | Louis de Saint-Aimé   L’œillade de la Dame Dieu | Louis de Saint-Aimé I_icon_minitimeLun 30 Déc 2019 - 21:20

Neyrelles

Troisième ennéade de Barkios de l’An 17:XI, dans une modeste chapelle du palais royal en l’honneur de Néera.

Neyrelles, au hasard de ses pérégrinations matinales, avait fini par échouer dans une petite chapelle comme il y en avait des dizaines dans le palais royal. Il s’agissait en réalité plus d’une alcôve étroite munie de deux rangées de bancs et au fond de laquelle trônait un autel en l’honneur de la Dame Dieu. En plus d’une statuette à Son effigie, la duchesse d’Erac avait cru entrapercevoir en rentrant un écrin finement ouvragé qui contenait — Neyrelles aurait en tout cas été prête à le parier — quelques reliques d’un saint Diantrais.

Pendant la petite année qu’elle avait passé à Diantra, la Serramiroise ne pensait pas s’être aventurée dans cette antre là ; elle s’y était engouffré sans hésiter, moins pour répondre à un quelconque instinct de piété que pour profiter du calme qui régnait toujours en pareils lieux. Elle s’était assise au dernier rang, pour ne pas empiéter sur l’espace de prière d’un pentien qui en aurait eu plus besoin qu’elle, puis elle avait pensé. À beaucoup de choses. En prenant son temps pour se perdre dans les dédales un peu encombrés de sa conscience. Il régnait à Diantra, en ces jours qui précédaient le Concile, une ambiance sans commune mesure avec la douce torpeur d’Erac. Neyrelles était moins une intrigante qu’une dolente intellectuelle, mais la rencontre à venir entre les ducs et marquis du Royaume était de ces appels de l’Histoire qu’il ne fallait pas ignorer. Il se nouerait en creux des débats pour désigner le successeur d’Aymeric des destins qui iraient bien au-delà d’un siège à la droite de l’enfant-roi. Elle en était persuadée et elle avait l’impression de se rendre malade d’essayer de deviner lesquels.

Un bruit sourd l’arracha à son introspection et elle darda sur sa droite une mine surprise, découvrant l’imposante stature du marquis de Sainte-Berthilde qui essayait de remettre à sa place le banc contre lequel il venait apparemment de se heurter. « Louis ? » l’appela-t-elle avec une familiarité toute instinctive. Elle se rappela seulement après qu’elle était une duchesse et qu’il était un marquis et qu’ils étaient à Diantra dans la maison du Roi ; il était des convenances auxquelles ils devaient se plier, d’autant qu’elle connaissait à peine l’impressionnant Nordien. « Votre altesse ? se reprit-elle donc en se relevant tout à fait. Vous êtes vous blessé ? »

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MessageSujet: Re: L’œillade de la Dame Dieu | Louis de Saint-Aimé   L’œillade de la Dame Dieu | Louis de Saint-Aimé I_icon_minitimeLun 30 Déc 2019 - 23:08






Éloigné de centaines de lieux des pénates qui étaient siennes, Louis trouva force, au travers les maints entretiens qu’on lui avait réservés, à ne guère déroger de trop de sa routine matinale. Au travers les fenestrations de son fastueux logement, les premiers et timides rayons de l’astre diurne suffisaient à sortir le marquis de sa torpeur. Roulant à qui mieux mieux jusqu’au rebord de sa couche, il s’y assit pour mieux s’étirer de tout son long, les bras hauts perchés dans les airs. Tout silencieux qu’il fût, le cerf aux bois ébouriffés se redressa pour mieux admirer la belle qui ronflait encore, sa pudeur à peine couverte par les draps chaotiques de leur pageot. Un sourire, comme à l’habitude, naquit au coin de ses lèvres lorsqu’il la vit, éclairée de la sorte par les reflets du soleil. Il s’approcha d’icelle, puis pinça du pouce et de l’index un pan des couvertures, de sorte à enrayer son involontaire nudité. S’éloignant de quelques bonnes foulées, Louis, à son habitude, s’enquit d’une toilette non formelle et se revêtit de sorte à quitter au plus preste. Les matines l’attendaient et, avant qu’on en vienne à l’inviter pour le petit déjeuner, il lui fallait vouer ses primes pensées à une toute autre femme.

À peine le pied au dehors de ses appartements, on vint à l’intercepter, comme quoi on l’attendait dans l’un des salons attenants. « Débarrassez-moi le plancher, d’autres affaires m’attendent! » Ronchonna Louis au larbin qui, contre son gré, se dût d’insister. « Il m’en coûte de vous le dire, maintenant que je vous sais si pressé, mais son Altesse est attendue … », rajouta craintivement le pauvre messager aux devants de l’imposant cervidé. « Il me semble avoir fait usage de mots limpides et dénudés de doubles sens : Fi. Chez. Moi. La. Paix! » Et si tôt le matin, lui qu’on appelait le bon, ne rendit guère honneur à ce sobriquet.

Heureusement pour ce pauvre jouvenceau, un autre comique s’élança aux devants du marquis, lui quémandant également de son attention. « Votre Altesse! Deux de vos hommes m’ont demandés de vous … »

« IL SUFFIT! » Gronda si fortement le patriarche des Saint-Aimé, qu’il dût réanimer autant sa femme que les autres résidents des alentours. « Rien en ce monde m’apparaît plus urgent que d’aller rendre mes hommages à la Bienveillante. J’imagine qu’en bon Pentiens que vous êtes, vous n’aurez d’objection à retourner d’où vous venez sans plus m’escagasser. N’est-ce pas ? » Les pesants poings du marquis s’étaient refermés le temps de son avertissement final, le regard à des lieux de ses airs avenants. Une minute leur fût de trop pour décamper séance tenante, esseulant enfin le marquis qui se mit dare-dare en quête du lieu de recueillement le plus près.

Lui-même n’ayant que de très vagues connaissances de l’architecture du Palais Royal, s’était surpris à découvrir une salle toute menue, discrète à souhait, prête à accueillir tout au plus une dizaine de bonnes âmes. Louis s’y engouffra sans autres ambages et offrit son attention aux alentours, détaillant autant le modeste autel que de la statuette. Respectant avec brio le silence qui régnait en maître, il s’approcha d’un d’une des banquettes et, des raquettes qui lui servaient de pieds, s’y cogna bruyamment et douloureusement. Le crissement du bois contre le plancher, s’ajoutant à cela la plainte étouffée du lourdaud marquis, trahit son entrée feutrée. Il s’affaira à la va-vite à replacer le banc comme si rien n’était, puis déporta son attention précipitamment sur Neyrelle, qu’il ne reconnut qu’après quelques secondes.

« Blessé ? Ma foi, vous devriez vous en faire d’avantage pour cette menuiserie. Je n’ai pas les petons d’un bambin de cinq ans. » lança Louis à la plaisanterie, de sorte à désamorcer l’inquiétude qu’il perçut dans le ton de la Duchesse. De surcroît, l’un de ses plus avenants sourire se placarda contre son velu minois, non mécontent de cette fortuite rencontre. « Louée soit ma résilience à garder sauve ma routine du matin : maintenant que je vous vois, aussi radieuse qu’au jour premier où nous avons été présentés, il m’aurait déplut que mon séjour dans la capitale se prive d’une aussi plaisante rencontre. » Et bien que le ton de voix du marquis témoigna de la véracité de ses propos, le bougre beurra très certainement plus é
pais le cœur de ses propos. Ils ne s’étaient, après tout, que rencontrer très brièvement et dans de bien pauvres occasions. Esseulés et cachés du reste des mondanités, ils pouvaient converser comme deux gens normaux et n’avaient à se bâdrer d’autant de formalité. Du moins, si la belle Neyrelle ne l’avait compris, la bonhomie de Louis tâcherait tôt de le lui faire saisir. Il s’approcha d’elle en serpentant au travers la rangée serrée de bancs, puis s’enquit de la main de sa commensale, qu’il vint couvrir sur le bout de ses doigts, d’un très chaste baisé.

« Moi qui me croyait seule âme matinale en ce Royaume … Ou étiez-vous empressée de quitter le confort de votre couche ? » Questionna Louis de manière soucieuse, tout bas, question de respecter le pieux endroit.



Dernière édition par Louis de Saint-Aimé le Jeu 2 Jan 2020 - 20:14, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: L’œillade de la Dame Dieu | Louis de Saint-Aimé   L’œillade de la Dame Dieu | Louis de Saint-Aimé I_icon_minitimeMer 1 Jan 2020 - 13:45

Neyrelles

« Empressée ? répéta Neyrelles en esquissant un fin sourire. C’est une manière de le dire. » La duchesse darda un regard vers l’effigie de la Dame Dieu ; la Déesse, elle, savait de quoi il en retournait. Elle reporta bien vite son attention sur le marquis, puis lui avoua : « Le sommeil, en vérité, n’a eu de cesse de me fuir cette nuit et cela fait plusieurs heures que j’ai renoncé à lui courir après. »

Aux douceurs du jour, Neyrelles avait toujours préféré la froide roideur de la nuit ; on pouvait admirer la lune, pas le soleil et c’était sous la voûte étoilée que la dame d’Erac se sentait toujours le plus inspirée. Il n’était pas rare qu’elle se couchât quelques heures seulement avant l’aube et ne pensait plus se souvenir de la dernière fois qu’elle s’était levée aux aurores. Oiselle solitaire, la duchesse avait besoin de ses longues heures de calme nocturne, durant lesquelles elle pouvait s’adonner à ce qui lui plaisait. Elle lisait, pensait et, parfois, écrivait aussi ; si elle était née homme, elle voulait croire qu’elle serait devenue Mestre et on attendait des Mestres qu’ils couchassent sur des vélins à l’épreuve des années les fruits de leurs recherches. Dans un secret presque coupable, Neyrelles faisait cela et, parfois, signait ses traités avec une fausse identité… avant de les cacher là où personne n’irait jamais les chercher.

D’un geste, elle invita Louis de Saint-Aimé à s’asseoir à ses côtés avant de retrouver la place qui avait été la sienne en prenant bien soin de ne pas froisser les tissus de sa robe. Neyrelles, comme à son habitude, était habillée avec beaucoup de simplicité ; s’étant recueillie sur la tombe de son frère peu de temps après son arrivée, elle avait renoncé au noir et au deuil pour se parer d’atours moins tristes. Elle abortaid ce matin-là des couleurs et des senteurs de lavandes et ses cheveux étaient simplement nattés.

« Je me réjouis moi aussi de ce heureux hasard qui a voulu que nous nous rencontrions à l’abri des tumultes de la Cour, chuchota-t-elle au marquis en se penchant légèrement vers lui. Assurément, nous ne serons pas sans nous revoir plus souvent qu’à notre tour dans les jours à venir, mais au moins ici pouvons-nous parler. » Elle marqua une légère pause avant d’ajouter, presque embarrassée d’avoir ainsi cavalièrement troublée la paix probablement recherchée par Louis : « Après, bien sûr, avoir eu l’opportunité de remercier la Dame Dieu pour cette nouvelle journée qui commence. »

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MessageSujet: Re: L’œillade de la Dame Dieu | Louis de Saint-Aimé   L’œillade de la Dame Dieu | Louis de Saint-Aimé I_icon_minitimeJeu 2 Jan 2020 - 20:12






Il accepta volontiers son informelle invitation, la gratifiant d’un second sourire. Il posa son séant sur le banc voisin, s’y calla à peu près confortablement –en vain, vu sa carrure outrageusement disproportionnelle à l’assise- , puis déporta son regard vers l’autel sacré. Il prêta certes ses yeux à celle qui allait bénir sa journée, mais préserva son attention à celle qui allait l’ensoleiller. Du plus loin qu’il se souvint, ses rencontres avec la Duchesse onques ne lui avaient déplus et même, au contraire, à la mesure de ceux qu’il avait déjà offerts, lui coûtèrent chaque fois nombres de ses sourires les plus satisfaits.  Et après qu’elle eût donné suite au questionnement qu’il souleva tantôt,  il se tût et ne donna suite à concis badinage. Ses deux grandes paluches vinrent se poser sur ses genoux et ses mires ne surent se décrocher de sur l’autel qu’après cinq bonnes minutes, après quoi il épia du coin de l’œil si sa commensale en avait elle aussi terminé. Ses paupières étaient closes et ses bras étaient mariés à son buste, entrecroisés l’un l’autre. Se recueille-t-elle ou s’est-elle assoupie, la comique ? Alors, le cerf détourna son plein regard vers elle, s’adonnant à l’observer plus librement. Le temps ne l’avait guère épargnée : entre ses deux grossesses et les années qui lui étaient rentrées dedans –à voir largesse de ses hanches et de ses joues légèrement arrondies-, Louis se compta fort bien choyé d’avoir prit pour épouse une donzelle qui se riait du temps et des épreuves de l’accouchement. Tout de même, Neyrelle n’en resta guère moins une fleur dont les pétales resplendissaient toujours et dont le bouquet enivrait quiconque osait à le humer. Une fois qu’elle reprit vie, Louis brisa le pieux silence de quelques murmures envers sa voisine, secouant à quelques reprises son séant qui semblait à l’étroit dans cet étau de bois.

« Moult années se sont égrainées depuis que nous nous sommes vus tous deux et, depuis tout ce temps, seules sont parvenues jusqu’aux abords du Berthildois les heureuses nouvelles de vos accouchements.  Or, commençons par cela : comment vont-ils, ces jeunes polissons ? Ils ont de si petites épaules pour une charge aussi conséquente … D’ailleurs, Diantra les accueillent-ils en ce moment ? »


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MessageSujet: Re: L’œillade de la Dame Dieu | Louis de Saint-Aimé   L’œillade de la Dame Dieu | Louis de Saint-Aimé I_icon_minitimeVen 3 Jan 2020 - 8:05

Neyrelles

Ces quelques minutes de calme s’ajoutèrent à plusieurs heures de solitaires quiétudes ; la duchesse, pourtant, s’en saisit avec diligence, moins pour prier que pour penser. Elle se repassaient ses discussions avec Renaud et Arnaud et songeait au Concile à venir, dont le bon Louis serait une pièce maîtresse. La duchesse, si proche de cette impérieuse échéance, ne se sentait pas capable de simplement discuter. Il viendrait un temps où la conversation à venir, à l’image d’un radeau dans l’Eris, dériverait vers les côtes qui l’obsédait en cet automne troublé. Il lui fallait cependant faire montre d’un peu de patience… et de savoir-vivre. « Alaïs, ma prodige aînée, nous a accompagné à Diantra, sourit Neyrelles et dans son regard il brillait tant d’affection pour la petite dame d’Erac. Elle découvre Diantra pour la première fois et mon cœur se gonfle d’amour chaque fois que je l’observe dévorer du regard même le plus insignifiant des détails de la belle demeure de Sa Majesté. Gauderic va bien, lui aussi ; la Dame Dieu a voulu qu’il vive ses premières années sans heurts, mais il est trop jeune encore pour que nous risquions à lui imposer les rigueurs des routes qui lient Erac à Diantra. »

La duchesse ne dit rien des craintes que lui inspirait l’hiver à venir ; il n’était pas rare qu’au plus fort de la froide saison, les nourrissons et très jeunes enfants succombassent à la dureté du monde. S’il survivait, rien ne pourrait plus l’empêcher de galoper gaiement vers un âge vénérable ; mais il demeurait pour quelques mois ce « si » terrible auquel elle cherchait à ne surtout pas penser.

L’ombre de cette tragédie peut-être à venir la ramena à une autre, cruelle et déjà passée, qui avait secoué d’autres terres que les siennes. Elle darda sur son voisin tant de banc que de frontière un regard mesuré, où l’hésitation le disputait à la compassion. « Louis… déclara-t-elle et dans ce simple nom qu’elle usait par trop familièrement il était une excuse presque gênée. Pardonnez-moi d’évoquer si vite pareil sujet, mais j’ai ouï-dire les épreuves qui ont accablé et endeuillé vos belles contrées. » son visage était grave ainsi que le cœur et la raison l’exigeaient. « Je ne doute pas n’être qu’une énième voix pour répéter les mêmes mots, mais je tenais cependant à vous dire que les récits qui sont parvenus jusqu’à notre Cour en Erac m’ont bouleversée ; le courage de vos gens et leur opiniâtreté à rebâtir leurs foyers devraient être une inspiration pour tous. Ils en ont été une pour moi, en tout cas. »

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MessageSujet: Re: L’œillade de la Dame Dieu | Louis de Saint-Aimé   L’œillade de la Dame Dieu | Louis de Saint-Aimé I_icon_minitimeSam 4 Jan 2020 - 4:01






Maintenant que ses hommages étaient rendus, de raisons il n’y avait plus pour dévoyer son regard d’elle. Aussi cherchât-il à se retourner comme il le put vers elle, l’échine tordue comme un torchon. De volonté à lui faire face il ne manquait guère, mais on ne puis dûment affirmer la même chose de sa capacité à y parvenir. Ses genoux étaient comprimés contre la rangée d’assises qui lui faisait front, tandis que ses hanches mettaient à dure épreuve le piétement du banc. C’est qu’il n’y était pour rien : Louis considérait son bagage génétique comme salutaire une fois qu’il tenait un acier en main pour barouder, mais comme une bête malédiction lorsqu’il fallait faire montre de discrétion, voir même d’un peu de décorum! Et ainsi retourné vers elle, il pût enfin admirer les étincelles qui agrémentaient parfaitement les timides passages verdâtres de ses iris. Son discours s’en vît d’autant plus plaisant à odir, lorsqu’il pressentit dans sa voix comme elle aimât répondre à son anodine question. Eux deux partageaient au moins ça en commun : ils tenaient tous deux à cœur leur descendance et cultivaient pour leurs bambins une affection aussi véritable que ceux dont les jeux de la noblesse n’atteignaient. Alourdis de leurs devoirs ainsi que de leurs obligations, il n’était pas chose rare que d’entendre certains sangs bleus ne pas même tenir compte des bambins qui les précédaient, trop préoccupés qu’ils étaient!

Compréhensif, lorsqu’elle souleva les complications que pouvaient engendrer un tel périple au travers le pays, Louis ne put qu’acquiescer naturellement. Elle avait raison : nés dans de froides contrées ne prévenaient guère de maladie et, autant qu’elle le pouvait, il était en son devoir de mettre la bonne fortune de son côté en esquivant les situations qui pouvaient s’envenimer. C’est lorsque sa voisine aborda le sort funeste qu’avait frappé sa patrie, que lui-même emprunta le faciès de Neyrelle, assombri d’une tristesse et d’une amertume qu’on n’aurait crut plausible à un personnage aussi hommasse.  

« Depuis tout ce temps, mon cœur ne s’est allégé de ces maux qu’en partie et, cette confession que vous me témoignez m’est d’un prompt réconfort, sachez le. » La sincérité de ses mots en était palpable. Son immense paluche cherchât à couver la sienne, le temps d’un concis moment, de sorte à la remercier de tant d’empathie. Elle retrouva ensuite le confort de sa cuisse, poursuivant d’un ton de voix tout aussi limpide de reconnaissance. « J’ai tout donné, vraiment. Je me suis accaparé leurs malheurs ainsi que leurs souffrances et ne sût trouver la paix qu’au beau jour où tous avaient un toit où trouver le repos, que ce fût en campement de fortune ou en tombe. » Louis marqua une pause, le temps de chasser de son esprit ces accablantes préoccupations qui lui avaient coûtées le blanchissement de quelques uns de ses poils. « Et vous savez, même une fois la tempête passée, on n’a de cesse de se dire que l’on aurait pu faire mieux. Que ceux qui vivent et meurent pour nous, méritent tous autant que nos plus illustres vassaux l’appui de la couronne qui les gouverne. Sans eux, nous ne serions après tout, que de riches hommes à la tête de terres désertiques et vouées au triste sort de la malemort. » C’était un âpre constat qu’il souleva, mais c’était là tout le propre du cervidé : il avait à cœur le sort de ses gens et c’était bien là la raison première de sa popularité au Berthildois.

« À la fin, personne n’est pauvre de tourments. Quiconque hérite des prérogatives d’un titre, écope des maux qui viennent avec. Et, à des lieux de chez nous, même éloignés de nos obligations, nous sommes venus délibérément nous accabler d’un conséquent labeur : celui du concile des pairs. » Derechef, l’imposant Louis marqua la pause, mais cette fois ce fût d’avantage pour rebondir que pour reprendre l’aplomb de ses pensées. « Diantra n’a pas changée. Enfin, si, elle est revenue comme elle l’était avant que ses libérateurs ne la quitte : truffée jusqu’à la moelle de sangsues pompeuses de richesses et de gloire.» Sur le coup, il est vrai que sur sa lancée, le cerf y était allé un peu fort. Au vrai, il manquait d'objectivité à ce sujet, car le Saint-Aimé était de ceux qui exécrait la corruption comme nul autre. « J’embrasse l’espoir que votre époux s’en soit mêmement aperçu, car le régent prochain aura certainement besoin de tout support pour endiguer une bonne fois pour toute cette opiniâtre tribulation. » Et cette fois, le Saint-Aimé laissa paraître involontairement une pointe d’impatience, voir même d'agacement. Il ne faisait point de doutes qu’icelui avait en l’affaire son idée faite.


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MessageSujet: Re: L’œillade de la Dame Dieu | Louis de Saint-Aimé   L’œillade de la Dame Dieu | Louis de Saint-Aimé I_icon_minitimeSam 4 Jan 2020 - 10:29

Neyrelles

Il était sans doute des choses qu’on pouvait reprocher au Cervidé ; l’Histoire le ferait de la plus cruelle des façons, car c’était là sa manière. Mais, baste ! L’homme savait faire montre d’éloquence. Il était aisé de s’arrêter à sa stature, de craindre ses poings quand le géant les fermait ; pourtant, quand il parlait comme il venait de le faire à la duchesse d’Erac, tous ces détails intimidants s’effaçaient et il ne restait que son visage et il ne restait que ses yeux et ces deux-là ne mentaient pas. Neyrelles, en tout cas, voulait le croire, car la Dame Dieu était sa témoin : s’il lui avait menti, tandis qu’il évoquait le destin de ses gens et la peine qu’il en avait retiré, alors il était le plus dangereux des pairs du Roi. Elle en voulait pour preuve le sort de sa senestre, disparue dans les mains du Marquis : elle la lui avait abandonnée bien volontiers, quand bien même la pudeur lui aurait sans doute commandé de la retirer promptement.

Un cœur ouvert ouvre les cœurs, songea-t-elle en dardant sur le Saint-Aimé un regard acéré. Il prit ensuite Neyrelles de court, tandis que de la tristesse du sort de sa terre, il dérivait — pourtant naturellement — vers l’incertitude qui entourait celui de Diantra et du Roi. Leur moment de grâce était passé, alors elle reprit le contrôle de sa main, non sans esquisser un doux sourire pour dissiper le moindre malentendu, puis elle prit bien soin de l’écouter de ses deux oreilles. Bien vite, il mentionnait Renaud, formulait des vœux et la défiait presque de les lui exaucer. À la manière des femmes, en susurrant à l’oreille de mon seigneur et maître cette sagesse qu’il partage avec moi, devina-t-elle et de cette pensée-là elle ne montra rien. Les longues discussions qu’elle avait eu avec le Duc d’Erac lui revinrent en mémoire et elle se surprit à vouloir en répéter quelques fragments au brave Louis.

Quelque chose la retint ; il était une autre visée qu’elle fomentait dans le secret de son Souffle depuis son arrivée à Diantra. « L’incertitude du concile à venir alourdit nos cœurs à tous, » déclara-t-elle et elle était redevenue égale à elle-même. Son corps et son visage ne disaient rien de plus que les mots qu’elle avait soigneusement choisi et ses prunelles donnaient l’impression, au contraire, de lire tout ce que l’homme qu’elle regardait voulait garder par-devers lui. « C’est une lourde responsabilité qui vous échoie à tous, ajouta-t-elle, car il ne s’agit rien de moins qu’assurer que dans quelques années et après une décade d’errances, notre Royaume retrouve un Roi en âge et capacité de régner. Je dois vous avouer, Louis, que des questions me taraudent moi aussi. » Elle marqua une pause, trahissant une hésitation qu’elle aurait voulu laisser cachée. « M’autorisez-vous à vous soumettre le fruit de mes réflexions ? »

Il était une part d’elle qui espérait qu’il refusât ; il aurait dû, car elle était une femme qui ne connaissait rien aux affaires dont elle se préoccupait. Elle avait lu, certes, tant et plus de mots couchés sur le vélin par autant de Souffles. Elle avait étudié, mais elle n’avait pas vécu. Louis, lui, avait changé le cours d’une guerre et rien de moins et le concile qui s’annonçait serait son deuxième. Elle n’avait rien à lui apprendre.

« Exprimez-vous sans ambages, je vous en prie, » lui répondit-il pourtant et le cœur de Neyrelles se serra.

Elle n’avait plus le choix, alors la duchesse inclina légèrement le front et ce simple mouvement était un remerciement muet. Elle prit le temps de mettre un peu d’ordre dans ses pensée, suppliciant le marquis d’une indolente attente, avant d’égrainer une à une ses idées à la manière d’un Mestre donnant sa leçon. « On m’a conté les péripéties du précédent concile, déclara-t-elle avec une lenteur étudiée. Plus d’une fois et de bien des manières, pour dire vrai, mais de ces récits je pense qu’il n’est qu’une seule leçon à retenir : il n’est rien de plus dangereux qu’un concile incertain. »

» Il est une autre leçon que je ne parviens pas à oublier. Renaud croit que de la bonne entente entre Erac et Diantra dépend la Paix du Roi, lui apprit-elle. L’Histoire, m’est avis, nous enseigne tout autrement que c’est bien le Nord le véritable garant de notre prospérité. Nos voisins qui vivent au Sud de nos belles contrées ont par trop tendance à l’oublier, mais je ne le puis : pour chaque malheur ou presque qui affligea notre péninsule, il est un des leurs que nous pouvons blâmer, » affirma-t-elle. Il était dans son regard assez de conviction et d’assurance pour que Louis sût que, eût-il pour désir de l’interroger plus avant, elle saurait défendre sa cause.

« Ces deux leçons, Louis, m’ont forgé une conviction : le concile de la prochaine ennéade est une occasion comme seule la Dame-Dieu sait les offrir de protéger pour quelques années encore Sa Majesté des machinations Suderones, mais ces gens-là nourrissent leurs complots de nos doutes et de nos interrogations. » Le regard qu’elle darda sur Louis trahissait qu’elle en arrivait enfin à la conclusion de sa diatribe. « Si j’étais duc plutôt que duchesse et qu’il était à la réunion à venir une place pour moi, je sais, Sire, ce que je ferai, avoua-t-elle et un fin sourire vint accompagner ses paroles. J’irais trouver mes pairs avec qui je partage semblable conviction et je discuterais, à cœur ouvert, de la destinée du royaume entre gens de bien, si bien que lorsque le concile s’ouvrirait, il n’y aurait plus de doutes et il n’y aurait plus d’interrogations pour alimenter le moindre complot. » Et la duchesse, oubliant peut-être un peu la place qui était la sienne, se sentit le courage d’ajouter : « Le duc de Serramire, le marquis de Sainte-Berthilde et le duc d’Erac, s’ils faisaient front commun, pourraient assurer au royaume les paisibles années dont il a tant besoin. Tout ce qu’ils doivent faire, selon moi, est de se rencontrer, tous les trois, en amont de ce concile de tous les dangers, pour confronter leurs visions et trouver ensemble notre voie à tous vers le bien commun. »

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MessageSujet: Re: L’œillade de la Dame Dieu | Louis de Saint-Aimé   L’œillade de la Dame Dieu | Louis de Saint-Aimé I_icon_minitimeLun 6 Jan 2020 - 22:45






Jusqu’à présent, leur badinage s’était annoncé comme bien léger, agréable et doux à l’oreille, dénudé de toute la lourdeur qu’incombe la politique. Et il fallut que Louis brouille la quiétude de leur conversation, posant le concile sur la table, jetant à l’eau un hameçon qui eut tôt fait d’être mordu d’une vive croquée par la duchesse. Alors, un épais cumulus de méfiance vint assombrir les traits du marquis, remuant un peu les épaules de sorte à redresser son rachis. Questionné à savoir si elle pouvait librement faire l’étalage de ses pensées les plus enfouies, Louis appréhenda la suite des choses. C’est qu’il espérait qu’elle ne tente rien d’héroïque ou de complétement stupide : il s’en voudrait de trop de la décevoir en la rembarrant sèchement. S’en étant venu à Diantra pour choisir un homme qui enrayerait toute corruption, il ne pouvait décemment point donner son aval à une quelconque escobarderie.

« Exprimez-vous sans ambages, je vous en prie. » cherchât-il à la rassurer, elle qui sembla tout à coup fort bien moins confortable dans ses bottillons. Pourtant, quel que fût la nature des propos à venir, Neyrelle ne connaissait guère assez de son commensal pour savoir qu’il ne saurait s’horripiler outre mesure ? Au vrai, il n’était guère improbable que des ragots à son propos lui furent soufflés, narrant comme l’auguste Saint-Aimé possédait la propension à s’embraser d’un rien. Et ces qu’en dira-t-on n’en étaient que des demies-vérités, car le Cerf possédait des bois bien pompeux et n’hésitait guère à en faire usage plus souvent qu’autrement!

Alors que défilèrent les idées bien structurées de la Duchesse, il naquit, doucettement, l’ombre d’un sourire contre son faciès, chassant peu à peu l’ombre d’inquiétude qui y voletait depuis tantôt. « Madame la Duchesse, vous m’ôtez les mots de la bouche… », se dit-il à lui-même, satisfait en toute chose qu’elle fût à l’unisson avec ce qu’il pensa lui-même. Même que, alors qu’elle explicitait l’inutilité du sud quant à la paix du Royaume, Louis se souvint d’un comique spectacle, une représentation désopilante des capacités du Soltar. Il eût souvenance de cette poignée de rigolos envoyée pour soutenir l’effort de guerre, alors que le Nord avait mobilisé au bas mot pas moins de plusieurs milliers d’hommes afin d’enrayer le joug du Médian. Au moins eurent-ils le mérite de faire s’égosiller une pléiade de reîtres qui ne s’étaient point adonnés à la chose depuis maintes ennéades!

Son sourire était désormais total, ne laissant plus de doute quant à son amusement. Le fait qu’elle s’était montrée aussi prudente, marchant sur des œufs comme si sa vie en avait dépendue : pour sûr que le Saint-Aimé cultivait la même haine pour le sud ! Si seulement elle avait la moindre idée des mots doux dont il était capable envers ces poètes du Sud … Ahh, pauvre Neyrelle ! Louis voulut l’interrompre, la rassurer, lui expliquer qu’ils étaient au même diapason, là toute suite! Mais il fallut qu’elle en rajoute une épaisseur de trop. Le marquis se recula d’un pouce, perdant de la lumière qui rendait son visage si engageant. Il se racla même la gorge, quoi que subtilement, comme si la dernière intervention de la Duchesse lui avait laissé une amertume en bouche qui le rebuta.

« Je crois que nous pouvons désormais tous deux nous considérer comme amis, ne croyez-vous pas ? S’il me faut être totalement vrai avec vous, il me faut vous dire ceci : c’est sans doutances que je vous donne entièrement raison. Le Roi, sa cour et même la péninsule dans son ensemble ne peut compter sur le support de ces Sudistes, dont la nature ne peut s’empêcher de faire d’eux de délétères genses. Et quoi qu’en dise mon épouse qui affectionne par je ne sais quel procédé ces paltoquets à la peau basanée, le Roi aurait tout intérêt à garder ses mires en direction du septentrion qu’au reste du monde. » Son éloquence ne mentait pas quant au dégoût qu’il entretenait envers ceux qui n’étaient pas nés du froid. « En seulement … » dit-il par la suite, retrouvant le calme plat qu’on lui connaissait. « Leurs sièges à la tablée des Pairs n’ont pas été usurpées : leurs voix méritent d’être entendues et je me défend de fomenter une quelconque alliance envers ceux que j’estime les plus méritants. Je ne peux m’en remettre à la duperie et supplanter les raisons même d’une telle réunion. » Il sera le poing, mais ce ne fût pas tant sous l’effet de la colère que de la frustration à s’en tenir à ses plus profondes valeurs. « À la fin, tant que nous savons qu’il ne peut en être autrement qu’un Régent Nordien, les incertitudes ne s’en voient-elles pas chassées par cette évidence ? »


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MessageSujet: Re: L’œillade de la Dame Dieu | Louis de Saint-Aimé   L’œillade de la Dame Dieu | Louis de Saint-Aimé I_icon_minitimeMar 7 Jan 2020 - 22:33

Neyrelles

Un temps, Neyrelles avait cru son argumentaire entendu et, tandis que son interlocuteur de marquis lui assurait sinon son soutien, au moins sa connivence de pensée, elle avait senti le soulagement lui assaillir le cœur et elle avait offert à Louis ses plus belles fossettes. Le Saint-Aimé, pourtant, devait la ramener à la réalité et d’une bien cruelle façon : en lui concédant tout, sauf ce qui comptait vraiment. Pendant plusieurs secondes qui lui firent l’effet d’autant d’heures interminables, elle se vit renoncer. Elle le pouvait : il lui suffisait de s’incliner face à la morale du grand Cerf. Leur conversation, alors, pourrait retrouver des atours plus légers. La dame d’Erac se verrait offrir l’opportunité de s’enquérir du devenir des enfants du marquis, dont elle n’avait soufflé mot jusqu’à présent.

Ainsi qu’elle l’avait avoué quelques instants plus tôt, au concile il n’était aucune place pour elle. C’était Renaud qu’on avait fait mander, jamais elle ; pourtant, depuis qu’il s’était ouvert à elle sur la route qui les avait mené à Diantra, qu’il avait confessé ses doutes et soumis à son jugement ses débuts de réflexions, elle n’avait pu s’en empêcher : elle avait pensé. D’aucuns diraient que ça avait été là la mère de toutes ses erreurs et que Louis lui offrait habilement — et tout à fait innocemment — une porte de sortie. « Je ne pense pas, Louis, qu’il nous faille nous arrêter à la seule question du régent, » lui répondit-elle pourtant et elle avait parlé avec assez de retenue pour qu’il pût comprendre toute la prudence qui l’animait.

Elle avait détourné le regard, moins pour fuir le sien que pour chercher ailleurs les mots dont elle avait besoin ; ils devaient être vrais, car il était bien peu de mensonges éhontés qu’elle était prête à proférer pour parvenir à ses fins ; ils devaient taire ce qu’aucun autre qu’elle n’eût besoin de connaître ; mais surtout, ils devaient convaincre, car autrement ils seraient vains. « Je pense tout au contraire que la question de l’identité du régent n’est qu’un leurre et qu’au delà de l’homme que vos cinq voix désigneront — car ce sera un homme, n’est-ce pas ? demanda-t-elle presque malgré elle en aparté — le péril se cachera dans les détails. » Elle marqua une légère pause, mais il était évident tant dans l’expression concentrée de son visage que dans son port qu’elle avait encore à dire. « Vous le dites vous-même : la Péninsule s’attend à un régent Nordien et je doute que le Duc de Soltariel et le Marquis de Langehack défieront cette croyance. Mais vous l’avez aussi rappelé : ils sont des légitimes pairs du Roi et ils viendront avec des attentes, des prix pour consentir à ce que vous jugez déjà acquis… Et c’est là, je le crains, que réside le vrai danger… » Elle avait dit tout cela en regardant Néera ; pour la conclusion de son laïus, elle fit l’heur au Marquis de le regarder en face et elle s’était à nouveau réfugié derrière son masque. « Savez-vous, Louis, ce que vous n’êtes pas prêt à leur accorder ? lui demanda-t-elle avec gravité. Et si tel est le cas, pouvez-vous m’affirmer que ni mon neveu ni mon époux ne céderont là où vous vous y refuserez ? »

Elle le laissa se débattre avec ces deux questions, ces deux faces d’une même lame qui, s’ils n’y prenaient garde, pourraient s’immiscer entre les plus solides amitiés ; et tandis qu’elle dardait sur le géant son regard acéré, elle tâchait de dompter son cœur qui, une nouvelle fois, battait la chamade.

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MessageSujet: Re: L’œillade de la Dame Dieu | Louis de Saint-Aimé   L’œillade de la Dame Dieu | Louis de Saint-Aimé I_icon_minitimeMer 8 Jan 2020 - 17:41






S’il s’était douté qu’elle prendrait aussi fermement à son hameçon, peut-être, se serait-il abstenu de mettre sa ligne à l’eau. C’est que le débonnaire marquis, en noyant de flotte son godet de vin, s’était déjà montré fort arrangeant dans son refus! Oui, d’une part, Louis trouva du sens dans l’ensemble de son discours, mais ils étaient certaines de ses valeurs les plus fondamentales qu’il ne pouvait trahir. Et, il crut bien que son refus ne manqua guère de lucidité : il s’attendit que sitôt la possibilité d’une triplice Nordienne repoussée du revers de la main, Neyrelle lâcherait le morceau. C’est héritant d’une consternation certaine qu’il dût placarder contre son faciès le premier de ses faux sourires, bien contre son gré. Il voulut bien s’immiscer au travers ses lancées, de sorte à ce que la conversation ne s’envenime de trop, mais la bougresse s’était donné mission d’alléger son cœur de ses préoccupations en poussant le tout jusqu’au bout. Et puis, transpirant la prudence autant dans ses gestes que dans les mots, comment pouvait-il abhorrer son opiniâtreté ? Une fois qu’elle en eût bien terminé, bombardé de deux épineuses questions, Louis prit une pause et tût son sourire au profit d’une mine plus songeuse. L’envie de lui répondre de but en blanc l’avait tenaillé pendant l’ombre d’une seconde, mais après coup, il s’imaginât que Neyrelle puisse être trempé du même alliage que sa femme, une ambitieuse refrénée par sa condition de femme. Or, lui-même emprunta un peu de la même cautèle que la Duchesse, pesant ses mots avant de les énoncer.

« S’il est une chose qui, en mon sens, n’est désormais plus menacé de doutances, c’est que le Régent à lui seul ne peut assurer la pérennité du Royaume. À lui seul, un homme foncièrement bon et talentueux, prompt à s’élever à la gouvernance d’un Royaume entier, ne peut convenir à la tâche et assurer son succès. C’est sa capacité à s’entourer de gens de bien, à capitaliser le talent d’autrui au profit de la Couronne qui primera sur le reste. » Le cerf s’était replacé quelques fois sur son siège, ne trouvant plus guère position qui le satisfaisait.

« Et vous énoncez également un bien âpre constat, le visage véritable de certaines personne ne se révèle que dans le secret, tapis à huis clos lorsque de yeux ne sont posés sur eux. Or, c’est une évidence certaine que Soltariel autant que Langehack ne sauraient venir contredire trois hommes qui entretiennent pour eux la même aversion. » À son tour, le marquis posa un temps entre le restant de sa réponse. Puis reprit, les yeux brillant d’une confiance palpable. « Alors, pour répondre à votre question, je consens à ce que vous demandez : Oui, aidé de mes conseillers les plus fidèles, qu’il soit né du Berthildois, d’Érac ou de Serramire, si on venait à m’affubler du digne titre de Protecteur du Royaume, nous saurions contenir les attentes de ces deux pays en apartés. »

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MessageSujet: Re: L’œillade de la Dame Dieu | Louis de Saint-Aimé   L’œillade de la Dame Dieu | Louis de Saint-Aimé I_icon_minitimeJeu 9 Jan 2020 - 21:09

Neyrelles

Le magnanime Louis gratifia l’intrigante Neyrelles de deux réponses et elle ne savait pas à laquelle se fier. Il était ce que ses mots laissaient entendre de confiance et ce que son corps témoignait d’inconfort.

L’expérience avait appris à la duchesse qu’un haussement d’épaules, un tremblement de main ou un coup de menton mentait moins souvent qu’un laïus savamment maîtrisé ; le marquis, mal à l’aise sur un banc décidément trop petit pour lui, n’avait de cesse de rectifier son assise. Elle pensait pouvoir tirer de ces gestes une vérité : le Saint-Aimé s’agaçait, d’une façon ou d’une autre et pour des raisons qui échappaient encore à la duchesse d’Erac, de la tournure que prenait leur conversation matinale. Le seigneur avait par ailleurs perdu son masque bonhomme et c’était des sourcils bien songeurs qui coiffaient désormais un regard peut-être un peu plus concentré.

Quant aux mots que Louis choisit, ils l’avaient déstabilisée plus sûrement qu’elle ne voudrait bien l’avouer, mais peut-être pas pour les raisons que pouvaient envisager le concerné. En conséquence de quoi et à son grand désarroi, elle ne sut d’abord comment y réagir et, à la précipitation malheureuse, elle préféra un silence de bon aloi, appuyé d’un de ses regards dont elle avait le secret. Veut-il que je plaide sa cause auprès de Renaud et d’Arnaud ? s’interrogeait-elle en cherchant ses réponses dans les yeux brillants du marquis. C’était ce qu’elle pensait déduire de ses dires. Les rencontrer, oui, mais sur un pied d’égalité, jamais ? supputa-t-elle encore. Comme des conseilles seulement, après qu’ils aient fait acte de loyauté en l’élisant comme régent ? Les mots avaient un sens et, mis ensemble, ils dévoilaient une intention ; Neyrelles découvrait celle de Louis, qu’il lui livrait finalement avec superbe honnêteté.

Quelque part et si elle l’avait correctement compris, l’ambition ainsi révélée de Louis — pour peu surprenant qu’elle fût — ne faisait que conforter Neyrelles dans ses propres conclusions. « Sa Majesté vous doit en partie son trône et je suis certaine qu’il ne l’a pas oublié, » finit-elle par répondre avant que son silence fût trop pesant. Elle sourit avec simplicité au Saint-Aimé. « Il est jeune encore, mais on le dit habité par cette Couronne dont il sera toute sa vie le premier servant, ajouta-t-elle et son sourire s’était fait plus triste tandis qu’elle songeait aux épreuves que le bambin d’hier avait dû affronter pour devenir l’adolescent d’hui. Vous avoir pour régent, auréolé du soutien et de la confiance de vos alliés, lui permettrait d’aborder les débuts de son règne dans la plus grande des sérénités. »

Son refus de s’assurer de sa bonne entente avec ces derniers en amont du concile lui laissaient à penser que, pour que ce futur-là se réalisât, il faudrait au marquis affronter quelques épreuves encore. Il devait en avoir conscience lui aussi et elle n’était plus certaine que son refus de s’adonner à quelque duperie était la première de ses motivations pour refuser l’entrevue que Neyrelles avait appelé de ses vœux. Elle aurait bien eu des choses à dire qui aurait pu l’aider à reconsidérer la chose, mais elle craignait par trop les conséquences que ses arguments pourraient amener.

« Puisse la Dame-Dieu vous aider tous les trois à garder les yeux grands ouverts et le cœur vrai, le moment venu, » s’autorisa-t-elle seulement à ajouter. Et, déjà, elle avait l’impression d’en avoir dit trop, ce qui ne l’empêcha pas de compléter : « Savent-ils, vos amis d’Erac et de Serramire, la force de vos intentions ? »

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MessageSujet: Re: L’œillade de la Dame Dieu | Louis de Saint-Aimé   L’œillade de la Dame Dieu | Louis de Saint-Aimé I_icon_minitimeSam 11 Jan 2020 - 3:14






Après avoir fait le legs de ses desseins prochains envers le concile à venir, il se douta que la Duchesse perde au change de ses traits si avenants. Il tenta bien, pendant l’ombre d’un instant, à se convaincre qu’il lui fût indifférent qu’elle digère mal l’information ou pas : ses traits ne pouvant en aucun cas être l’intègre reflet de ses avis. Bien qu’elle n’en démontra rien, ni à lui ni à quiconque, elle restait en son sens une femme très influente, portant à la fois un soulier Éraçon, de même que Serramirois. Pour s’être frotté aux Brochant à plus d’une reprise, le cervidé n’avait doutances qu’un mariage, d’amour ou point, puisse dépareiller les liens de leur fratrie. Pour autant qu’il redouta que la bouchée lui soit restée au travers la gorge, Louis s’en remit à la Damedieu, qu’il questionna pendant une seconde d’un regard dubitatif. Elle lui fredonna de bien jolies paroles, douces à souhait et mielleuses à outrance : un prompt réconfort après tant d’ennéades à préserver le fond de ses intentions. Mais encore une fois, pouvait-elle assumer ce qu’elle disait ? Il crut que oui. Au vrai, c’est sa foi qui lui intimait de la croire : quiconque venait se recueillir de bon matin ne pouvait décemment jacter aussi faussement.

« Les vassaux de son Altesse ont levés les armes dans le but de lui rendre ce qui lui appartenait déjà. Comment pourrions-nous accepter qu’il se considère comme notre débiteur à tous, alors que nous lui avons fait promesse de notre dévouement le plus sincère ? Un mari qui promit fidélité, protection et amour à sa femme devrait-il accepter qu’icelle se sente redevable de ces dites promesses ? » Lancé comme un exercice de conscience plutôt qu’une réelle correction, l’ogre de Saint-Aimé balaya l’air d’un revers de la patte, comme si le débat n’avait pas lieu d’être. Et s’eut été par bien trop lourd comme conversation. Sa panse criait désormais famine et le temps accourait avant que certains gargouillis ne viennent l’assaillir.

« S’ils savent ? J’imagine, ma très chère amie, que vous êtes par bien mieux positionnée que je ne le suis pour le savoir. Les liens d’amitiés ne sauraient prévaloir sur ceux du mariage et du sang, vous en conviendrez. Mais s’il est une chose dont je suis certain, c’est que ni un, ni l’autre, n’entretiennent de doutes quant à la dévotion que je porte envers la Couronne. » Le Cerf saboula son siège une énième fois des hanches, mais ce fût cette fois pour mieux se redresser de toute sa longueur. La messe dite, s’ils avaient à deviser plus longuement, il n’aurait à témoin la Déesse Mère pour le raviser au pieu silence qu’incombe pareil endroit. « Maintenant, libre à vous de bruire la chose autant à votre époux qu’à votre neveux, je ne saurais vous retenir de rien. Considérez cela comme les prémices de votre conclave à huis clos. » Taquin, il lui sourit à l’aide de ce même air avenant qu’elle put constater plus tôt à son arrivée. La paluche dextre tendue vers elle, il l’invitât à emboîter pas au sien, qu’elle désira ou non le suivre plus loin dans les dédales du château. « Personne ne m’a dit que nous étions en Diantra au pays de la faim : seriez-vous encline à partager ma table ? Je ne saurais souffrir plus d’avantage de la fringale : on dit d’elle qu’elle me rend acrimonieux et, il me chagrinerait de vous exposer à un tel supplice. » Son œil se plissa de malices, cherchant à alléger la pesanteur de leurs derniers échanges d'un trait d'humour. Pour autant qu'elle décida, il accepta silencieusement autant son déclin, que son acquiescement s'il en fût de la sorte.


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MessageSujet: Re: L’œillade de la Dame Dieu | Louis de Saint-Aimé   L’œillade de la Dame Dieu | Louis de Saint-Aimé I_icon_minitimeSam 11 Jan 2020 - 11:00

Neyrelles

Mon conclave, Louis ? songea-t-elle en gratifiant le marquis d’un sourire affable. L’avenir nous dira s’il survivra à votre ambition. Elle devait avouer qu’il l’avait surprise en revendiquant avec autant d’assurance ses ambitions et l’avenir seul dirait s’il obtiendrait gain de cause. À revendiquer si franchement la régence, au point d’en faire une condition sine qua none à toute autre discussion, Louis prenait le risque d’effrayer ses alliés naturels ; la suite des événements décideraient si son choix était le bon. L’esprit encore agité par les paroles de son interlocuteur, Neyrelles accepta néanmoins son invitation. Il n’était plus rien qu’elle désirât obtenir du marquis sinon une meilleure compréhension de sa personne et l’ambiance détendue d’un petit déjeuner lui apparaissait comme un bon moyen de commencer. Il ne fut plus question du concile, mais la Brochant eut enfin l’occasion de s’enquérir à son tour des enfants du Berthildois. Ainsi, la boucle était bouclée : leur conversation s’achevait ainsi qu’elle avait commencé, dans une satisfaisante symétrie.

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