Une petite protégée... | Ambre

Ambre était plongée dans les paperasses, s’en était presque habituel à présent. Elle n’était plus tellement au fait de la situation politique et son mari était parti elle ne savait où… Cela dit, ça lui faisait quelques vacances, car leurs disputes lui pesaient beaucoup. Ange avait disparu en allant chercher son demi-frère, et Ambre était de plus en plus inquiète. Que lui était-il arrivé ? Etait-elle toujours vivante ? Avait-elle réussi à retrouver son frère ? Ce dernier était-il comme elle l’avait espéré ou bien n’était-il pas une personne fréquentable ? Ambre commençait à regretter de l’avoir ainsi envoyé seule. Ange était brave, mais peut-être l’était-elle un peu trop. N’avait-elle pas pris de risques inconsidérés ? Parallèlement à son angoisse familiale, Ambre devait gérer le gros déficit de la fortune, que son mari avait creusé sans vergogne. Jamais la fortune des Soltariel ne s’était portée aussi mal ! Ambre se retrouvait seule, complètement livrée à elle-même pour résoudre ces problèmes financiers. Que faire ? Renvoyer du personnel ? Vendre des meubles ? Elle avait déjà tout essayé, le trou se creusait de jour en jour sans qu’elle ne parvienne à savoir pourquoi. Les comptes avaient été laissé à l’abandon pendant trop longtemps, l’argent partait plus vite qu’il n’entrait. Elle sourit tristement et reposa sa plume, avant de s’étirer. Elle aurait voulu repartir sur les routes et abandonner le manoir une bonne fois pour toute, oublier ses responsabilités pour pouvoir vivre en compagnie de Falcor et de Kaïla, ainsi que de son cheval à la robe dorée. Oui, c’était ça, la vraie vie : une vie purement égoïste dans laquelle on ne cherchait que son propre bonheur, et non celui des autres. Ambre n’aimait pas ses responsabilités, mais elle refusait d’abandonner son peuple aux mains de son mari. Et pourtant, d’un certain côté, elle le comprenait. Lui faisait passer son désir égoïste bien avant le bonheur de ses gens. Il profitait de la vie sans réfléchir aux conséquences. Mais qu’elle casse-pied insolent, tout de même ! On frappa à la porte du bureau, et une servante entra, l’air contrariée.

- Madame, une petite fille vient d’arrivée au manoir, elle est couverte de sang et affirme avoir été enlevée par des bandits. Apparemment c’est une elfe, mais nous n’avons pas eu le cœur à la mettre dehors. Que devons-nous faire ?

Ambre sentit son cœur se serrer. Pauvre enfant… Elle avait dû vivre l’enfer, en ces temps déjà bien difficile. La maîtresse de maison se leva gracieusement, vêtue d’un pantalon noir, d’une tunique bleu-roi et d’une paire de chausses noires, ses cheveux blonds gracieusement relevés sur sa tête, à la guerrière. Elle n’avait plus le temps de jouer les dames si elle n’en avait pas envie, son rôle au manoir consistait à remplacer l’homme de maison après tout. Elle suivit la servante, qui la conduisait dans la chambre de l’intendant. Là, dans les bras de l’intendante, une adolescente aux oreilles pointues pleuraient toutes les larmes de son corps, la robe déchirée et en sang… Elle releva la tête à son entrée et Ambre posa son regard bleu sur elle. Elle était si jeune… L’adolescente s’inclina devant elle, bredouillant un salut qui serra le cœur de la duchesse. L’intendante prit alors la parole, expliquant qu’elle l’avait trouvé alors qu’elle était pourchassée… Les bandits avaient massacré toute sa famille. C’était malheureusement monnaie courante en ces temps, mais pourquoi une enfant devait-elle payer le prix de cette haine qui parcourait le monde sans pitié ? Ambre était bien naïve, pas un seul instant elle ne réalisa que la petite demoiselle jouait une comédie sans limite et impitoyable. La duchesse s’approcha de l’enfant et s’agenouilla devant elle pour essuyer les larmes qui coulaient sur son beau visage.

- Pleure si ça peut te soulager, ma petite. L’intendante va s’occuper de toi et veiller sur toi comme sa propre fille, tu pourras rester ici aussi longtemps que tu le voudras.

Ambre leva son regard vers l’intendante.

- Prenez soin d’elle et donnez lui de l’occupation lorsqu’elle ira mieux, assez pour qu’elle n’ait pas à penser à son passé. Un esprit occupé est un esprit qui n’a pas le temps de plonger dans les ténèbres de la douleur.

Ambre adressa un sourire à la petite fille, puis un léger clin d’œil. Elle se redressa, sachant très bien que l’intendante se chargerait de tout, de lui trouver un lit et des vêtements, de la soigner, de lui trouver un travail où elle saurait se rendre utile…