[Voile][Surface] Où rôde la mort

Mort, souffrance, apaisement, sérénité…
Une atmosphère des plus paradoxales,
Qui vous apporte une confusion mentale.
Qui cherche le repos pourrait être tenté…

Comme de blanches colombes qui s’envolent,
Les êtres éteints quittent leur tombe de terre molle,
Pour surgir du néant l’espace d’un instant,
Et notre monde tombe aux tréfonds du temps.

Le temps, oui, comme s’il avait été suspendu…
La lutte infernale des astres dans les cieux,
Emplissant de ténèbres ces terres perdues :
Cause ou conséquence de la chute des Dieux ?

Tyra attire à elle,
Les esprits à tire d’aile,
Les morts et les vivants,
Rien n’est plus comme avant…

Mieux vaut rester éloigné…
La toile d’araignée,
Qui est invisible,
Parait si tangible…

Même si ce phénomène reste rare,
Il suffit de le voir une fois pour savoir
Que le monde se déchire de toutes parts,
Pourtant, rien n’est fini, il faut garder espoir.

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A peine deux jours après sa sortie du marais, Larme pourpre avait assisté à un phénomène étrange dans les cieux : l’éclipse. L’enfant ne connaissait pas la peur de l’inconnu, seulement un sentiment d’excitation particulière, un stress, comme lorsqu’on attend de découvrir une surprise. Finalement, en dehors de provoquer la nuit, le phénomène ne fit que perdurer et Larme pourpre de constater cet état de fait puis finalement de s’en désintéresser, l’incluant dans son nouvel environnement sans trop se poser de questions. A quoi bon de toute façon ? A présent il faisait comme nuit, et les animaux, pour la plupart, agissaient comme tel. Pour Larme pourpre, cela ne changeait absolument rien. Sa vision dans la pénombre était plutôt bonne et la vie nocturne sur les abords des Terres stériles semblait bien plus foisonnante que le jour.

Même si le temps semblait arrêté, il continuait en réalité son court, comme le signalaient les blessures en lente réparation de l’assassin. La marche aux frontières du marais et des Terres stériles avait été longue d’au moins huit jours. Étrangement, plus Larme pourpre avançait en direction du Puy qui apparaissait d’abord vaguement puis de plus en plus nettement au loin, plus une atmosphère indescriptible empreignait les lieux. Tout semblait, disons, « anormal », bien qu’il eut déjà été difficile de définir ce qu’était la normalité, c’était du moins différent de tout ce que Larme pourpre avait pu connaître. Des reflets sombres, d’autres vaguement lumineux, contrastant avec l’obscurité ambiante, projetaient des mirages très éphémères. Certaines de ces images cependant n’étaient pas feintes, comme cette sorte de pilier d’obsidienne de hauteur indéterminée, comme s’il soutenait la voute céleste, qu’on pouvait apercevoir au loin… Cette forme avait un fort pouvoir d’attraction à la fois visuel et physique. Pourtant, tous les sens imaginables interdisaient de s’en approcher. Larme pourpre savait écouter ses intuitions et continuait sa route tout en tâchant de rester le plus loin possible de cette chose… ou plutôt de ces choses, car à mesure que l’assassin se rapprocha du Pyu, d’autres apparurent dans son champ de vision, avant de finalement se faire moins nombreuses puis disparaître de l’horizon.

Larme pourpre n’avait encore rencontré personne depuis sa séparation avec Shaé. Mais le monde, bien que vaste, était petit, comme on dit, et cela ne saurait tarder.

Larme pourpre se fondait parfaitement dans ce décor désolé. L’odeur était une part importante du camouflage. Après les essences de pin dans la forêt, l’involontaire boue soufrée du marais, puis l’odeur de terre poussiéreuse des terres stériles, à présent c’était une odeur légère de cendre humide mélangée à l’essence faible mais légèrement fumée tirée de l’écorce d’un arbuste abondant sur ces terres mais dont Larme pourpre ne connaissait pas le nom.

Après plusieurs jours… pardon : plusieurs interminables heures d’une nuit sans fin, Larme pourpre se trouvait maintenant très proche de sa destination. Mais la méfiance régnait. Larme pourpre n’était pas encore assez près du Pyu pour pouvoir apercevoir une activité, mais il fallait se douter qu’il y en avait dans les environs. Une odeur très caractéristique de putréfaction provenant de derrière une butte attira son attention. L’odeur était légèrement différente d’une carcasse entamée… Prudemment, l’assassin s’en approcha tout en vérifiant les alentours. Étrange… Il y avait bien là un cadavre assez récent, oublié dans une touffe de buissons. Ses oreilles étaient pointues, ses cheveux clairs… assurément un Drow. Que faisait-il là, mort au milieu de nulle-part mais si près du Pyu ? Il était certain que si personne ne l’avait encore trouvé, ça ne devrait pas tarder. A moins que les Drow aient pour coutume d’abandonner leurs camarades décédés de la sorte ?

Un bruissement suspect non loin tira Larme pourpre de ses réflexions. Rebroussant chemin à pas de loup, l’assassin s’éloigna de la scène macabre pour observer si quelque chose allait surgir. Peu importe l’endroit, un cadavre finissait par être dévoré par quelque chose. Même si ce n’était que des rats ou des corbeaux, ça pouvait toujours être dangereux…

[pnj : Krevan Godra, drow, masculin, 132 ans, neutre, assassin des Lames Dansantes]

Un drow essoufflé jaillit des buissons, d’horrible malédictions aux lèvres. Un connaisseur des tenues en vigueur au Puy l’aurait immédiatement reconnu comme faisant partie de la Doktha, ce corps d’assassins et d’espions tant redouté. Mais ce jour là, au beau milieu des terres stériles, le chasseur était devenu gibier, car les assassins se traquaient entre eux.

Toujours est-il que le drow jeta un regard furieux au cadavre, et, sortant son long cimeterre, fixa attentivement le buisson ou s’était retranché l’humain. Une erreur de la part d’un assassin aussi entraîné car un petit claquement retentit derrière lui et un fin carreau d’arbalète se planta entre ses omoplates. Or, pas un grand carreau de guerre, non, un simple petit carreau noir en apparence guère dangereux.

En apparence…

L’horreur se fit sur les traits du drow lorsque le poison se répandit dans ses veines. Une mousse rougeâtre apparut sur ses lèvres et il s’effondra au sol ou après quelques convulsions il rendit son dernier soupir. Lorsque le calme fut revenu, un autre drow, une petite arbalète à la main, se releva du buisson où il s’était embusqué et s’avança lentement.

Oulah oulah, ca devient bien compliqué tout ça… donc si je résume nous avons trois drows dont deux morts ? Euh, mais tu veux bien m’expliquer comment on en est arrivé là ?

Revenons donc quelques semaines en arrière. Peu après le départ des osts pour Fort Ellyrion, deux membres de la Doktha avaient violé la fille de l’un des mages du C’nros. Interdiction avait été faite au père outragé de tuer les deux agresseurs, en l’absence des seigneurs du Puy les ordres étaient clairs : éviter les duels et autres joyeusetés habituelles.

Furieux, le mage avait donc fait appel aux services des lames Dansantes pour accomplir sa vengeance, demandant à ce que les deux violeurs disparaissent purement et simplement. Haven Do’orst avait donc confié cette mission à Kre’van Godra, un des membres de sa guilde ayant l’habitude de travailler en territoire drow. Et la mission venait d’être accomplie…

Vous comprenez mieux ? Les deux cibles étaient parties en patrouille ensemble, mais s’étaient séparés quelques heures pour élargir leur surveillance. Larme Pourpre était tombé sur le premier de deux victimes de Kre’van, au moment ou la seconde victime revenait chercher son compagnon. L’assassin des Lames avait assisté à la scène et profité de la distraction du membre de la Doktha pour en finir avec ce contrat.

Voilà, ca va maintenant ? Nous avons donc Kre’van et Larme Pourpre de vivants, et deux drows morts. Vous remarquerez qu’ils n’ont jamais été nommé mais bon… pour ce que ca peut leur servir maintenant de toute façon. Ayant rechargé son arbalète, mais sans la pointer dans la direction des buissons où se tenait Larme, montrant ainsi qu’il n’avait pas l’intention de continuer le jeu de massacre, Kre’van s’avança et ordonna d’une voix sèche (en langue humaine) :

Sors de là mon gars.

… un piège !

Et voilà, accorder un instant un peu de confiance à un assassin inconnu et voilà ce que vous récolterez !

Débarquer ainsi en surgissant hors des fourrés pour se retrouver presque immédiatement encerclé par trois individus à cheval, c’était à coup sûr un scénario des moins espérés, mais pourtant des plus prévisibles...

Il y avait sur la gauche, du côté de Larme pourpre, un drow dont le visage était marqué d’une large cicatrice sur la joue et qui était armé d’un sabre apparemment bien affuté. En face il y en avait un autre avec une arbalète à la main, et sur la droite, un troisième avec sorte de lance. Leur attitude agressive ne laissait aucune place à l’hésitation. Larme pourpre ne pouvait pas parler, son seul choix était de défendre sa vie en combattant. Les regrets, s’il devait y en avoir, seraient pour plus tard…

Avant même que le compagnon d’infortune de Larme pourpre n’ai terminé sa phrase, l’enfant avait plongé sur le côté, entraînant par cette action un reflexe sur l’individu qui les pointait de son arme de jet. Le carreau fusa en frôlant sa cible sans toutefois la toucher. C’était encore une règle d’assassin : toujours surprendre son adversaire, jamais l’inverse.

Certes Larme pourpre avait une capacité de réflexion somme toute réduite, mais c’était un avantage dans ce genre de situation où se poser des questions stratégiques était le meilleur moyen de se laisser surprendre par les évènements et donc d’y laisser sa vie. Au contraire, le cerveau de Larme pourpre analysait l’instant présent et agissait en conséquence. Ce n’était pas indéfectible, mais seul un stratège ou du moins quelqu’un possédant une analyse logique naturelle pouvait prévoir les actions de l’enfant.

On pourrait croire qu’être à cheval, c'est-à-dire assis à plus d’1m50 du sol, offre un avantage certain sur ses adversaires. Ceci peut s’avérer vrai dans certaines conditions. Toutefois, dans la plupart des cas, il y a au contraire deux importants points faibles. Les jambes d’une part, bien rarement aussi protégées que le reste du corps, offrent non seulement de nombreuses ouvertures mais se trouvent de surcroit à la hauteur des coups. Ensuite, évidemment, le cheval lui-même. Une entaille bien placée et le cavalier s’effondre, entraîné par sa monture…

C’est pourquoi, lorsque Larme pourpre termina sa roulade et se retrouva en position accroupie à moins d’un mètre de la patte avant du cheval du balafré, (celui-ci levant déjà son arme pour frapper), sa première action fut de trancher l’articulation du genou de l’animal avec le poignard courbe que sa main gauche dégaina tendis que l’autre protégeait sa tête. La douleur encore présente dans l’épaule de l’assassin empêcha la blessure d’être fatale à l’animal mais suffisamment grave pour lui faire perdre ses appuis lorsque le balafré abattit son arme tout en tirant de l’autre main sur les reines pour que la bête, qui avançait se tourne légèrement (que ce soit voulu ou non). Bondissant en arrière, l’assassin observa son adversaire frapper dans le vide alors que son cheval s’affaissait sur le côté et l’entraînait dans sa chute. Mais le balafré était agile et il plongea pour éviter le choc.

Les deux autres ennemis étaient aux prises avec son « camarade » qui avait forcé leur attention sur lui. Autant profiter du moment pour s’occuper du troisième.

L’enfant envoya un dard qui ricocha sur l’épaulière du balafré qui commençait à se relever. Larme pourpre courut et bondit en prenant appuis sur le corps du cheval gémissant. Un impressionnant saut vrillé lui permis, tout en s’éloignant des autres combattants, de lancer deux autres projectiles sur son adversaire. Celui-ci effectua à se moment là un large mouvement de sabre en direction de sa cible volante sans l’atteindre. Les protections légères de l’individu eurent raison des projectiles en lui évitant des blessures profondes. Profitant de l’action, le balafré bondit sur Larme pourpre juste au moment de son atterrissage, le sabre prêt à frapper. Une parade habile lui évita la mort mais n’empêcha pas le Drow de l’envoyer à terre et de prendre l’ascendance, relevant son arme à nouveau. Mauvaise stratégie de corps à corps : le poignard de Larme saillait déjà dans son flanc. Peut-être que le balafré en avait connu d’autres ? Il resserra sa prise sur sa lame alors qu’un jet de sang suivit le retrait de larme de son abdomen. Lare pourpre s’échappa par une roulade qui lui permit à nouveau de se remettre sur pied tandis que le Drow, finalement, devait s’aider de son arme plantée dans le sol pour se redresser, tandis que son autre main bouchait sans grand succès sa blessure sanguinolente : le combat n’était pas terminé pour lui. Il allait régler son compte à cet avorton et il pourrait compter sur ses compagnons si jamais sa blessure était plus grave qu’il ne le pensait, ce qui était effectivement le cas.

Ses compagnons, qu’en était-il ? Larme pourpre fit un saut de côté. Quelque chose de volumineux venait de voler dans sa direction et de se ficher un mètre derrière. C’était la lance du troisième individu. Un peu de plus et c’était la mort ! Le Drow avait dû apercevoir le combat de son camarade et tenter de profiter de l’occasion, ou d’un moment d’inattention de son adversaire pour s’en débarrasser, et il avait faillit réussir… Heureusement pour son camarade blessé sinon il aurait été de l’histoire ancienne après l’action que Larme pourpre s’apprêtait à effectuer.

Mais comment s’en sortait l’autre assassin avec deux assaillants à combattre ? Peut-être avait-il été vaincu ?... Non ce n’était pas le cas ! Il…


[HS : Désolé je prolonge un peu l’action histoire de…]

[pnj : Krevan Godra, drow, masculin, 132 ans, neutre, assassin des Lames Dansantes]

Le réflexe de Larme permit aux deux assassins de gagner un avantage, ou plutôt d’éviter d’en subir un de plus, lorsque le drow armé d’une arbalète tira en réaction au mouvement de l’humain. Réflexe assez classique certes, mais néanmoins ce fut un tir stupide qui lui ôtait l’avantage de la distance. Sans s’attarder sur sa bonne fortune, Krevan dégaina un fin stylet de sa manche et le lança dans la gorge du cheval le plus près de lui. Hennissant de douleur, l’animal rua puis s’effondra, entrainant avec lui son cavalier.

L’autre drow rechargeait fébrilement son arbalète mais du talonner sa monture pour s’éloigner lorsque l’assassin fondit sur lui. Bien lui en prit, car l’épée courte que l’assassin venait de dégainer lui traça une profonde estafilade sur les côtes, blessure non mortelle mais fortement handicapante et qui lui fit lâcher son arbalète alors qu‘il venait de la réarmer. D’un regard, Krevan vit le premier cavalier se relever et jeter sa lance en direction de Larme Pourpre, heureusement sans le toucher.

Le gaillard n’eut pas le temps de chercher une autre arme de jet que le membre des lames fut sur lui, épée et dagues brandies. Dégainant un cimeterre, le drow fit face à son frère de race, et les deux combattants échangèrent leurs premiers coups. Bien que formé par les meilleurs maîtres d’armes de la citadelle des âmes, Krevan trouva face à lui un duelliste de son niveau. Probablement le chef de l’unité de la Doktha dont il avait exécuté deux membres par contrat, le drow maniait son cimeterre d’une main sure, ne laissant guère d’opportunité d’attaques.

Un bruit de sabot dans son dos alerta Krevan, qui pivota sur lui-même et jeta sa dague en plein torse du troisième drow alors que celui-ci, épée au poing, s’apprêtait à revenir à la charge. La précision du tir ne laissa aucune chance au cavalier qui regarda pendant plusieurs secondes la poignée de la dague profondément plantée dans sa poitrine avant de s’effondrer au sol, une profonde lueur d’incrédulité dans le regard.

Mais ce faisant, Krevan avait sacrifié l’une de ces deux armes, et ne pouvait plus compter que sur son épée courte, qui ne lui procurait pas autant d’allonges qu’à son adversaire. Les assauts du cimeterre se firent d’ailleurs plus violents, comme si le natif du Puy sentait qu’il tenait une opportunité. Une règle fort importante dans l’art des duels : une fois que vous tenez l’avantage, ne le lâchez surtout plus.

De fait, les assassins de la Guilde, s’ils étaient tous des bretteurs accomplis, comptaient peu sur les épées pour accomplir leur tâches. Le combat à l’épée suppose un duel face à face et risquant de trainer en longueur, c’est-à-dire tout le contraire de leur travail habituel. Pour autant, et s’il cédait du terrain, Krevan n’avait pas laissé la moindre faille dans sa défense que son adversaire aurait pu exploiter. Et tandis que Larme Pourpre continuait à combattre de son côté, Krevan reculait peu à peu, tentant de se rapprocher de l’endroit ou gisait le cadavre du premier cheval… et une arbalète armée.