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 Sidra Shi'Bavatae Micedra [En cours]

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Alanya de Saint-Aimé
Sidra Shi'bavatae Micedra
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MessageSujet: Sidra Shi'Bavatae Micedra [En cours]   Sidra Shi'Bavatae Micedra [En cours] I_icon_minitimeJeu 28 Jan 2016 - 21:48

Sidra Shi'Bavatae Micedra [En cours] 1459023656-petittest


Âge: 340 années, un mois de favrius.
Race: Drow
Faction: Ithri-Vaan, née au Puy.
Alignement: Chaotique mauvais

Métier: Sidra ne verse pas dans les métiers reconnus et légaux. Elle n'a d'ailleurs jamais pensé un jour faire partie de ceux qui respectent les règles. Aussi pourrait-on parler de "domaine d'action". Elle gère d'une main de maître une grande part du marché parallèle:  antiquités, armes non légales, drogues et autres contrats de peu de foi, rien n'échappe à ce qui pourrait lui rapporter. Une sorte de Princesse-Marchande sans la légitimité.
De plus, forte de son influence, elle s'illustre une fois de plus dans des talents de négociatrice en ayant obtenu une vitrine non négligeable grâce à la "Rose et au Lys", endroit de détente privilégié de la jeunesse dorée Thaarii, qui, par extension fournissent le commerce illégal.

Particularité: Sidra est une drow d'une beauté que certains trouveront bonifiée et d'autres bafouée par ses multiples cicatrices qui ornent son corps, offrande à ses dieux qu'elles a appris à vénérer. Mais le plus étrange reste ce masque noir qu'elle porte toujours -ou presque - lorsqu'elle est au dehors. Un sacrifice auquel elle s'est soumise pour son géniteur, afin d'expier la honte de ne pas avoir suivit le chemin militaire pourtant tout tracé. De beaucoup y trouveront maintenant un interêt divin envers la déesse de la luxure et de l'envie, gardienne toute-puissante de ses activités. Toujours est-il qu'elle ne s'en sépare que dans l'intimité de sa maison, ce sanctuaire bien gardé que peu ont eu la chance de connaitre.

Classe d'armes: Avec un géniteur dans l'armée, sa voie aurait pu être déjà bien définie. Elle a d'ailleurs suivi un entraînement minutieux sous son oeil aiguisé. Peut-être était-ce un mal pour un bien. Si elle affectionne particulièrement la courbure particulière du cimeterre, l'arme qu'elle manie le mieux c'est le stylet, contre les autres ou elle-même.

Posséssions: La belle n'a que deux réelles posséssions terriennes dans la belle ville de Thaar. Ses activités l'amène à beaucoup se déplacer à travers la grande citée de l'Est, et d'un certain côté, la rue pourrait être sienne. Une chance sur trois que les voleurs et autres travailleurs mal avisés Thaari soient sous ses ordres, même indirectement.
Son établissement principal qui lui sert à camoufler ses exactions se nomme la "Rose et le Lys". Bien connu par les jeunes de la ville, on y trouve des salles de jeux, des fumoirs, un comptoir acceuillant et quelqes extras féminins de grande qualité. C'est une belle villa qui s'anime peu avant que le soleil ne commence à se coucher et qui reste eveillé jusqu'au petit matin. Il n'est d'ailleurs admis qu'à une certaine élite sociale, contrastant avec l'univers verreux qu'elle a l'habitude de fréquenter.
Si un tel établissement n'est qu'une vitrine, sa demeure principale se trouve "Chez Maman". Autrement connue sous le nom de Cours des Miracles, cet endroit sale et redouté en fait un cocon parfait pour ses affaires toujours florissantes dans une si grande ville. Elle y vit la plupart du temps, préférant les toux grasses des lépreux à l'agonie que les rires pincés de quelques nobliaux en quête de folie.

Physique: Sidra n'entre pas particulièrement dans les critères de beauté entendu par tous. Si elle n'est pas laide, elle ne possède pas pour autant la grâce féminine. De grande taille, son corps est svelte et musclé de part ses entraînements militaires. Sa poitrine n'est pas particulièrement opulente comme pourrait l'apprécier certains hommes et son visage n'arbore pas des lignes particulièrement douces.
Ses cheveux sont immaculés - héritage de son pays, contrastant avec son teint grisâtre reconnu dans sa culture. Ses yeux restent couleur de l'andrinople, aiguisés et à l'affût de toute chose: un regard persant. La Puysarde a toujours été élevée à la lumière des Dieux aussi prend-t-elle le temps chaque jour de tracer de multiples symboles sur son corps et son visage, soulignant la bestialité de son être.
Mais le vrai spectacle n'est visible que lorsqu'elle se retrouve nue. De ses pieds couleur cendre à son cou, aucune zone ne semble épargnée par la rigueur de ses scarifications, mutilations volontaires en offrande pour ceux qu'elle vénère. C'est peut-être là toute la monstruosité de la femme qui porte en elle un démon bien plus sauvage que son apparence laisse à penser.

Caractère:
En effet, si son côté élancé ressort parfaitement dans son allure, c'est aussi profondément ancré dans sa personnalité. Si peu féminine et marquée soit son apparence, il ne faut pas s'y méprendre : elle est féroce. Une prédatrice à l’œil vif et aux crocs acérés.
Et comme les prédateurs, elle aime la chasse. Ce moment délectable où la proie vous fuit, où vous pouvez sentir l'adrénaline guider ses pas jusqu'à ce que se referme sur elle le piège tendu. L'on peut dire que le défi, la volonté d'asservir et la delectation de la peur sont ce qu'elle affectionne le plus. Si des Estrévent elle a adopté us et coutumes, elle n'en reste pas moins une Drow du Puy. Ni bonté ni grandeur d'âme ne se trouve en elle et la pitié n'est pas l'une de ses qualités.
Et de cela nait l'intransigeance. Cette même volonté d'aboutir à la perfection. Une perfection qu'elle impose aux autres mais aussi à elle-même.
Pour autant, c'est une âme torturée. Elevée dans un cadre strict de religion et de guerre, c'est à force de privation et de souffrance que son esprit à assimilé l'un avec l'autre. Non seulement elle se delecte de la souffrance d'autrui -qu'elle offre volontier à Uriz- mais elle reste aussi fine lame envers elle-même. La mutilation n'est pas une fin en soi, et si ce n'est pour expier ses fautes au regard divin, c'est aussi une forme de plaisir qu'elle pratique avec assiduité.
Peut-être peut-elle être caractérisée plus profondément encore. Blessée, meurtrie dans son âme, elle n'a que faire des préoccupations des hommes, des nains, des elfes ou même des Drows. Elle n'aspire qu'à la reconnaissance divine et les choses matérielles ne sont pour elle qu'une distraction. Un instant d'excitation tout au plus avant qu'elle ne se lasse complètement de ces choses que l'on peut toucher. La vie n'a qu'une importance mineure à ses yeux, aussi n'éprouve-t-elle aucun réelle sentiment durable: la pitié, l'amour, la haine... Tout cela pourrait lui être totalement étranger.
Et c'est là toute la clef de sa réussite dans l'univers sombre Thaari. Elle y avance, ombre parmi les ombres, soeur de la nuit et amie intime de tout ce qui vous déplaît...


Dernière édition par Sidra Shi'bavatae Micedra le Mar 19 Déc 2017 - 0:11, édité 13 fois
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MessageSujet: Re: Sidra Shi'Bavatae Micedra [En cours]   Sidra Shi'Bavatae Micedra [En cours] I_icon_minitimeLun 14 Mar 2016 - 0:44

Sidra Shi'Bavatae Micedra [En cours] 1454017226-histoire


Il y a près de 340 ans, au Puy d'Elda, à l'extrême Est du monde de Miradelphia, tel que nous en avons conscience en ce jour.

" Ka uss tangi Ustaan inbal natha dalhar, Ustaan orn'la saph ulu tlu dossta ichl. Ol orn tlu l'dalhar d'Uriz iu'Natha ".
(Si un jour j'ai un enfant, j'aimerais qu'il soit de toi. Ce sera un enfant d'Uriz et de Natha).
La voix était rauque. A l'époque, Zaknafhein tout jeune capitaine, nourrissait son existence de rêve héroïque où son bras fort pourfendrait maintes corps de maintes ennemis. Plus encore, ces rêves la belle Micedra les entendait presque à chaque fois qu'il lui rendait visite. C'était une fille de Natha Okhras'Gaath, une jeune pretresse à l'air froid et aux grands yeux.
Le capitaine la fixait sans gêne, sans pudeur. Il dévorait chaque parcelle de son corps, espérant un jour qu'il lui appartienne enfin. Il n'est pas dans l'habitude drow d'attendre une chose posée là, si près de soi que l'on sent cet entêtant parfum sulfureux dont s'enduisent les enfants de Natha. Il la désirait et elle ne bronchait pas.
" Ele xun dos doer ghil 'sohna? "
(Pourquoi es-tu revenu?)
Elle avait parlé avec des lames de rasoirs dans la gorge. Ses yeux andrinople fixait le grand guerrier comme s'il ne s'agissait que d'un enfant. Des hommes elle en avait vu, et des femmes aussi. Mais celui-là était de loin celui qui lui causait le plus de tort. Il passait souvent la voir, trop peut être aux yeux des instances supérieures de son ordre.
" Usstaninbal malar "
(Je me suis battu)
" Lu'? Vel'bol xun dos ssinssrin nindel morfeth ulu uns'aa? "
(Et? Que veux-tu que cela me fasse?)
" Usstan malla Uriz Iu'nin Ustaan ssinssrin ulu natha dalhar "
(J'ai honoré Uriz et maintenant je veux un enfant)

Zaknafhein s'était plusieurs fois illustré par sa force et sa détermination, ainsi que son habilité à mener des combats. Des enfants, ils devaient en avoir beaucoup de ses différents raids et des soirées au creux de quelques drows trop clémentes - ou de quelques esclaves peu incline à dire non. Mais cette fois-ci, il ne voulait pas de ça. Il voulait un vrai enfant, un fils qu'il ferait élever pour devenir guerrier. Il voulait que son sang glorieux coule dans un être tout aussi glorieux que lui. Mais surtout, il voulait le faire aux yeux de ces dieux qu'il vénérait.
Et à l'aube de la seconde énnéade du mois de favrius, il eut une fille. Micedra l'avait enfanté sans plus de difficulté, bien que ce don béni était son premier. Sa déesse avait toujours été clémente avec elle et sa fertilité nouvelle avait su attiser quelques jalouseries de la part de ses consœurs. Elle décida de la nommer Sidra. Elle avait à cet époque l'innocence d'un poupin. Mais à la différence des autres bébés, elle ne pleurait que rarement. Sa parole fut tardive mais son esprit était dès son plus jeune âge déjà bien affûté.
Ainsi, Sidra vécu quelques années heureuses, presque muette ou du moins était-ce ce que pensait les quelques prêtresses et sœurs de sa mère. Pourquoi le manque de parole ne pouvait-il être un choix? Elle préférait observer plutôt que de parler, regardant toute chose qui pouvait la sortir de son ordinaire mutisme. Des offices aux Dieux en passant par la reproduction et l’éducation militaire, ses premières expériences furent dans un silence de mort. Parfois osait-elle un mot. Une indication sommaire de ses besoins. Bien sûr elle n'était pas la bienvenue. Bien sûr maintes fois on avait attenté à sa vie. Elle était jugée faible, certainement trop hâtivement, par ces semblables qui n'avaient rien d'extraordinaire pour elle. Elle les voyait marcher toujours de la même façon, se conduire de manière logique... Nulle impulsivité, pas même un soupçon de diversité.
Les premières années de Sidra furent heureuses. Elle était heureuse de sa différence.

Une différence qu'elle cultiva jusqu'à ses quarante années. Au fond d'elle, elle l'avait toujours su. Et elle s'amusait de voir ces gens qui se méprenaient. Elle s'amusait de la stupidité du monde qui l'entourait, de sa futilité même. La Puysarde grandissait en observant les petits secrets de sa communauté, épiant parfois contre son gré. Elle avait vu tant de choses en si peu de temps... Peut-être était-ce - non, surement même - cela qui la rendait plus forte, plus attentive et à la fois si détachée du monde dans lequel elle arpentait.
Mais si cette forme de frustration se nourrissait d'elle un peu plus chaque jour, elle trouvait dans les offices le calme. Une paix obtenue par la suprématie d'un esprit sur tous les autres. Sidra les voyait, offrant des tripes, leurs corps, des amulettes... Ils priaient pour des raisons somme toute trop terriennes pour elle. Pourquoi vouloir agrémenter sa vie de victoire, d'enfants ou de toute autre chose alors que la forme charnelle est indubitablement vouée à mourir...
Cette même mort qu'elle avait pu observer, à la faveur d'une visite à sa mère. Il s'agissait d'une sœur, rongée par une maladie terrible qu'elle n'aurait su nommer. Que personne n'aurait su nommer. Elle toussait, se tendait, criait, délirait. Et dans ce chaos de douleur et de tristesse, elle avait vu la beauté. La mort serait-elle une délivrance ? Et si les Dieux avaient instauré la vie comme un test, un passage qu'il faut réussir. On ne tient à la vie que par les choses matérielles, les préoccupations qui nous poussent à toujours s'accrocher un peu plus au filet d'air que l'on expulse. Et si la mort n'était pas une fin, mais une délivrance vers une forme beaucoup plus éthérée, beaucoup moins tangible ? La jeune drow se frottait pour la première fois à des interrogations muettes qui ne trouvèrent aucune réponse dans ses observations de la vie quotidienne. Pour la première fois, elle ignorait.

Alors elle commença à parler. En réalité, ce ne fut pas une chose difficile. Toute sa jeunesse elle ne s'était contentée que de petites indications vocales, préférant le silence à l'inutilité de la parole. Parce que Sidra s'était promis, à la longue, de ne parler que lorsqu'il serait utile de le faire. De tous les bruits, c'était le silence qu'elle affectionnait le plus, ce même silence qui la suivrait bien après la fin de son mutisme. Une partie fut incrédule lorsqu'elle commença à user de la parole. Les autres attachèrent plus de valeurs à ce qu'elle prononçait car jamais elle n'accorda une parole inutile. Jamais elle n'usa de politesse. Jamais elle ne s'intéressa à autre chose que ces interrogations qui tournaient jour et nuit dans son esprit.
" Ele dro ka udos el "
(Pourquoi vivre si nous devons mourir ?)
Sidra servait les Dieux, dès qu’elle le pouvait. Elle aidait durant les offices, soignait du mieux qu'elle le pouvait les malades et les maudits, cherchant toujours au plus profond d'elle-même la réponse à cette question. Elle remuait son âme et formait une boule dans son ventre. Toutes ces choses qu'elle entreprenait lui parassaient toujours plus futile. Elle vivait simplement et passait autant de temps que possible auprès des sœurs d'Uriz. Ne les avait-elle jamais réellement quittées au fond. A cette époque-là, elle était aussi belle qu'une fleur au milieu de la terre brulée du Puy. A l'image de ses consœurs, elle servait assidûment sa déesse protectrice qui lui offrait le toit et la beauté, la fraicheur de la jeunesse aussi.
Et pour une fois depuis le commencement de sa vie, son silence plaisait.
Pas de la satisfaction de la part de ceux qu'elle côtoyait tous les jours non. Plutôt le genre de plaisir d'un homme à laquelle une femme ne peut s'opposer. Elle ne disait jamais rien. Ni un râle, ni une larme. Rien, car au fond, c'était bien là tout ce qu'elle ressentait. Le vide après l'appréhension fugace, vite balayé par le concret. Le contact d'une peau contre la sienne l'excitait un instant, puis elle s'en lassait. Toujours la même saveur, toujours la même odeur... Il n'y avait rien de divin là-dedans, pas plus que dans la vie. Alors apparût à ses yeux un premier élément de réponse. Les vivants ne rendaient pas un véritable hommage aux Dieux. Ils étaient beaucoup plus égoïstes qu'ils voulaient bien le faire croire, mais ça, elle le savait déjà. Après tout, elle ne pouvait pas leur reprocher leur normalité, de même qu'ils ne pourraient toucher à sa différence. Aussi s'attachaient-ils beaucoup trop au matériel, à en oublier l'Après.
Mais qu'y avait-il après ?
Malgré son aversion grandissante pour les pratiques affligeantes des autres, elle continua à servir ceux qu'elle chérissait, en plus de toutes les choses que sa naissance imposait. Elle ne les idolâtrait pas pour autant. A ses yeux de jeune fille, les Dieux n'étaient pas parfaits et c'était cela qui les rendaient divin. Uniques. Elle affectionnait d'autant plus ces travers que ses semblables semblaient ne même pas voir, ou simplement ils les ignoraient. Mais ce n'est pas à travers la généralité que l'on détermine une personne - ou un dieu. Sidra le savait, c'était ces infimes détails qui séparaient les individus les uns les autres et d'autant plus les Sacrés.

" Ol zhah er'griff xuil dosst solen , Uriz, nindel Usstan ssinssrin ulu kyorl l'tresk'ri. Tlu Evagnaen  ilhar xuil vel'uss xuat kyorl. Ssinjin ilhar ori'gato uns'aa kyorl whol mina. Ori'gato uns'aa tlu veirs lu', a dosst zet alu tarthe "
(Ce n'est qu'à travers vos yeux, Uriz, que je souhaite voir le monde. Soyez indulgente Mère avec ceux qui ne voient pas. Douce Mère, laissez-moi voir pour eux. Laissez-moi approcher de votre sein et à vos côtés, m’élever)
Cette prière, elle la répétait sans cesse. Agenouillée dans sa chambre qu'elle partageait avec d'autres enfants, les mots sortaient avec tant de rapidité que l'on aurait pu croire à un flot constant. Une douce mélodie que certaines accusaient à voix basse, pensant stupidement que la litanie camouflerait assez leurs paroles amères. Pouvoir s'exprimer était une chance dont beaucoup abusait, au grand désespoir de la belle. Les Dieux avaient rendu sacré la parole, et les vivants avaient fait du silence une chose plus divine encore. C'est à cette époque qu'elle reçue les premiers châtiments. La privation de nourriture et de sommeil tut un temps ses revendications de jeunesse, mais jamais elle n'oublia. Elle répétait ses incantations dès qu'elle se trouvait seule, communiant avec les seuls êtres qui pouvaient encore la comprendre. La différence se muait doucement en autre chose.

Ce n'est qu'à l'aube de son centenaire que sa vie bascula définitivement. Zaknafhein avait été déployé à Yutar, s'illustrant parmi les guerriers comme une main sûre et un bras fort. C'était un capitaine respecté qui jamais n'avait ployé devant l'ennemi, quand bien même les coups et les souffrances. Il avait atteint une élite sociale en faisant de sa maîtrise militaire un atout non négligeable. Il avait baisé beaucoup de femmes : des elfes, des Zhurtannes et des drows. Mais de toutes ses progénitures, il y en avait une qu'il ne s'était pas résolu à oublier.
"Phraktos inbal morfel ilta saph natha j'nesst whol natha bwael sanrr".
(Les Dieux l'ont fait femme pour une bonne raison)
Il y croyait dur comme fer. Il avait offert à Uriz et Natha sa passion et sa fougue ce soir-là. Il avait offert à ces Dieux qu'il vénérait une partie de lui, ce qui faisait de Zaknafhein un homme. Alors toujours il pensait à elle. Cet enfant qu'il avait dû abandonner trop vite aux griffes de la société du Puy pour partir faire son devoir. Mais il n'était pas parti le cœur lourd ce soir-là.
"Ustaan inbal ulu belbau l'fift d'vlos"
(Je dois payer le prix du sang)
Car un enfant des Dieux n'est pas donné sans contrepartie et les Celestes avaient choisi pour lui. Il devrait se battre cent années durant avec la même hargne, offrant le sang de ceux qui s'opposaient à sa volonté à la terre qui le boirait comme un nourrisson boit le lait de sa mère. Il serait l'épée d'Uriz et la violence de Natha. Et jamais il ne se détourna de son but. Durant un siècle il croisa le fer avec ardeur, tuant tous ceux qui devaient l'être. Il n'hésitait pas et ses coups portaient presque toujours ce qui lui valut à la fois la jalousie de certains mais surtout le respect de la plupart.
S'il ne donnait pas les offices durant les périodes calmes, il y assistait toujours. La foi était son guide même à travers les nébuleux ténèbres de la guerre. Jamais il n'osa aller à l'encontre des Divins. Il lisait dans le ciel les présages et priait chaque jour. Mais ce n'est pas pour sa vie ou la réussite de son ost qu'il s'agenouillait. Non, sa prière était mue d'une autre volonté, quelque chose de plus profond encore. Il priait pour sa fille bien aimée. Il la voulait nimbée de lumière divine, digne enfant des Dieux. Il leur intimait de lui donner la force de la trouver pour l'éduquer à leur image. Il ne voulait pas décevoir, pas même ces mécènes de l'Au-Delà.
Alors quand ses cent années de pénitence furent finies, lorsqu'il fût autorisé à rentrer au Puy, ce n'est pas la chaleur du foyer qu'il chercha. A peine avait-il fini son voyage qu'il se rendait dans le temple de la déesse. Bien sûr il ne retrouverait pas sa fille parmi les tentatrices prêtresses de Natha, il ne l'avait vu qu'à peine âgée de quelques jours. Il ne connaissait même pas le nom que Micedra lui avait offert – et au fond, cela lui importait peu.
"Micedra vel'klar ph'dos ?"
(Micedra, où es-tu ?)
Il se déplaçait rapidement, scandant le prénom de celle qui avait mis au monde son bien le précieux, le seul pour lequel il aurait tué sans une hésitation une personne de son peuple. Il déboulait de salle en salle jusqu'à finalement la trouver en prière. Elle ne répondit pas, mais il la reconnaissait. Elle était telle qu'il l'avait laissé un siècle auparavant. Belle à en faire pâlir toutes les femmes et si froide, presque inexpressive. Et elle ne daigna même pas tourner la tête ni même lever les yeux. On ne devait déranger une sœur de Natha dans son oeuvre. Ces lieux étaient sacrés et le culte prévalait sur toute autre chose. Il n'osa plus parler. Le silence s'installa plusieurs minutes – jusqu'à ce qu'elle se relève enfin.
"Vel'bol xun dos ssinssrin ?"
(Que veux-tu ?)
"L' dalthar"
(L'enfant)
Micedra se mit à rire. Un rire presque sardonique qui résonnait contre les murs creusés à même la roche volcanique. Ses yeux se plantèrent dans les siens.
"Il zhah naut syahal Zaknafhein. Vel'uss talinth dos il zhah ?"
(Elle n'est pas normal Zaknafhein. Qui penses-tu qu'elle soit ?)
"Il zhat l'dalhar d'l'Phraktos"
(C'est l'enfant des Dieux)
Alors la belle prêtresse se mit à rire plus fort encore. Elle était lassée de cet homme. N'avait-elle pas assez assouvie ses pulsions ? La Déesse n'avait-elle pas reçu assez d'hommage de sa part pour lui infliger pareil fardeau. Peut-être qu'au fond la différence de sa fille s'expliquait par la folie de son père.
"Xuat xa'huuli l'Phraktos! Il zhah ushdui taga dos. Natha duanda mayoe"
(N'insulte pas les Dieux ! C'est une erreur tout au plus. Elle est aussi folle que toi)
"Suust j'nesst. Ol zhah dos vel'uss xa'huuli l'Phraktos. Tesso uns'aa vel'klar zhah il lu'joros uns'aa ulu nelgethaun dosst duanda".
(Silence femme. C'est toi qui insulte les Dieux. Dis-moi où elle se trouve puis demande moi pardon pour ton erreur.)
Peut-être l'histoire aurait-elle été différente si la mère n'avait pas craché sur Zaknafhein. Cela l'aurait été, indubitablement. Il n'aurait pas souillé sa lame et le sol du temple du sang de la pauvresse, qui par sa banalité avait succombé. Du moins était-ce là l'explication la plus rationnelle que Sidra su trouver en grandissant. Ce même jour son père l'avait rencontré. Un homme dont elle apprécia les efforts quand bien même il n'était pas comme elle. Au moins faisait-il semblant de la comprendre. Il ne l'empêcha pas de vivre entre ses occupations d’enfant et le temple. Sa foi lui interdisait de détourner une pieuse personne de son devoir et peut-être que s'il n'avait été aussi bon guerrier aurait-il choisi la même voie. Elle aimait à le croire autant que lui.
Pour autant, c'était la première fois qu'une personne s'intéressait à elle, à sa vie dans l'éternelle différence, en marge de la société où même le temple ne l'acceptait qu'à contre cœur. Un paria de ce monde dans lequel elle déambulait sans repère jusqu'à ce jour. Il lui rendait visite presque quotidiennement, partageait ses prières et ses doutes. Elle n'avait pas besoin de parler avec le capitaine car il préférait le silence. Elle qui n'avait jamais connu que la marginalité se retrouvait accompagnée d'un géniteur qui devint un père puis un ami.
Ce fut un long processus car aucun des deux ne se détournaient de sa conduite au profit de l'autre. Et c'était certainement là ce qu'elle chérissait le plus -en dehors des silences. Les quelques paroles qu'ils échangeaient n'avaient d'autre but que d'exprimer leur être profond sans pour autant vouloir modifier l'autre à son image. Ils étaient tous les deux tels que les Dieux les avaient faits, sans plus et sans moins. Au moins étaient-ils libres d'être quand ils étaient tous les deux. Être simplement, une chose qui quelques années auparavant semblait tellement abstraite pour la jeune drow.
En sa présence elle souriait souvent. Un petit détail qui avait toute son importance car si elle avait pu vivre heureuse parfois, jamais – ou très rarement – on avait vu naître sur sa face cendrée cette esquisse physique du bonheur. Cette chose insouciante qui marque le cœur, aussi léger et beau qu'un papillon. Et ce sourire fugace, parfois juste une ombre déposée au coin de ses lèvres se mua en une confiance et un respect mutuel.
Il leur fallut presque trois années entières pour s'appréhender l'un et l'autre. Ils s'échangeaient quelques œillades bienveillantes et des paroles réconfortantes lorsque le temps était à l'orage. Sidra se sentait pour la première fois aimée. Un amour pur, sincère et délicat d'un géniteur pour son enfant, d'un père pour sa fille. Il veillait sur elle et ses besoins, s'assurant chaque jour qu'elle ne manqua de rien dans le temple. Zaknafhein continuait à être assidu aux offices et priait chaque jour les Dieux. Il se devait de les honorer jusqu'à ce que son dernier souffle soit rendu.
La jeune Eldéenne observait souvent son père, agenouillé devant les icônes. Elle l'avait tout de suite remarqué, cette foi, cette dévotion qu'il m'était à la tâche. Alors elle se mit à jalouser les Dieux secrètement. Après tout, n'était-elle pas elle aussi différente ? Pourquoi son géniteur ne pouvait lui offrir le même amour alors même qu'elle se tenait là, chair à la place de la pierre ? C'était un drôle de sentiment qu'elle vivait. A la fois tiraillée par l'amour et la haine sans savoir à qui s'abandonner tout à fait. Et longtemps elle enferma ce sentiment étrange dans un boite, tapie au fond d'elle-même, comme une de ces choses précieuses qui, certainement, ne serait jamais dîtes. A jamais enfouit dans ce petit corps cendré.
Si les deux personnages ne s'étaient presque retrouvés que dans l'enceinte du temple, peu à peu ils entreprirent quelques petites sorties à travers les étages du Puy comme lorsque Sidra était enfant. Et comme à cet âge-là, elle préférait observer que parler. Elle regardait les gens de sa race s'affairer à diverses tâches: les forgerons frappant le fer, les cuisiniers à faire la bouillie des offices. Bref, elle voyait la vie telle qu'elle était. Son regard était acerbe et à chaque métier son jugement aiguisé. Elle ne pouvait comprendre ces personnes et pensait-elle qu'ils ne la comprendraient jamais tout à fait. Là était son fardeau et bien que son père – et ami – la soutenait, lui non plus ne la comprenait pas. Elle était au-dessus de toute ces choses si tangibles. Les Dieux n'aimait la matière que pour s'amuser un temps. Et si la vie n'était pas ça ? Et si elle était aussi éthérée que les Créateurs du Monde ? N'était-ce pas là la prière qu'on adressait aux divins chaque soir, priant pour qu'ils nous acceptent dans leur monde si lointain l'heure venue ? Les autres lui semblaient d'une stupidité certaine. C'était pourtant logique et eux s'entêtaient à vivre leur vie matérielle plus qu'à instruire leur esprit pour la suivante. Ces sorties ne la lassaient pourtant pas. La jeune Eldéenne étudiait les mœurs de chacun jusqu'à en connaitre le plus infime rouage, jusqu'à en comprendre la plus petite mécanique. Elle nourrissait son âme pour la vie auprès des Dieux.

De toute les choses que Sidra semblait abhorrer – car elle n'aimait ni ne détestait tout à fait – la pire qu'il fût était la routine. Elle se devait de nourrir sa partie éthérée et la répétition n'était pas la chose qui facilitait le plus la tâche. Elle aimait innover, trouver toujours plus à voir, poser ses yeux sur un objet puis s'en désintéresser la seconde d'après. Et ce jour-là, presque trois années et demi après le retour de Zaknafhein, elle se décida à prendre les devants. Elle ne l'attendait pas au temple -ou aux alentours. Elle était partie tôt, à peine après les offices du petit jour dans la plus grande discrétion. Il avait mentionné une fois l'endroit où il vivait. C'était une caserne à l'étage au-dessus du sien, là où il avait toujours vécu. C'était là-bas qu'il avait appris son art et lui avait-il dit que malgré ses victoires et sa gloire acquise il avait toujours refusé à s'enfoncer dans la Faille pour des quartiers plus riches.
C'est alors qu'elle entendit le tintement si particulier pour la première fois. Il résonnait partout à l'étage, comme une promesse. A la fois grinçant et aigu, il était mêlé à quelques phrases et jurons qui la firent glousser. Au temple et dans les étages où elle avait l'habitude de se promener, elle n'entendait que peu ce langage franc et peu avenant. Sur son chemin on l'observait comme on regarde une étrangère en territoire ennemi. Elle portait les vêtements des jeunes apprentis ce qui avait tôt fait d'attirer la curiosité et les rumeurs.
Que ferait une enfant parmi ces hommes ? Etait-elle tout à fait folle ou seulement mandatée par la Grande Prêtresse ? Peut-être ne cherchait-elle ici quelque chose. Il n'était jamais bon d'avoir à dos un culte, quand bien même il n'était que le représentant d'un Dieu. Les guerriers étaient de ceux dont la croyance guidait leurs pas, aussi comprenait-elle l'inquiétude de ces derniers.
Elle déambulait en silence, ne prenant pas même le temps de répondre aux interrogations de certains sur les raisons de sa venue. La belle laissait traîner ses yeux de jeune femme sur les corps musclés aux muscles bandés des militaires, observant chaque sillon que faisait la sueur sur leur peau noirâtre. Les cris gutturaux la ravissaient. Il se dégageait de cette endroit, de ces combats une certaine primitivité qui lui plaisait. Il y avait dans les passes d'armes quelque chose de beaucoup moins matériel, de beaucoup moins réelle comme les Dieux agitaient ces pauvres poupées à leur guise. Comme si ces hommes n'avaient pour destiné que de ravir leur forme éthérée. Une chose qu’elle avait su entrevoir déjà lors de ses leçons avec les autres jeunes gens, mais avec l’amère sensation de ne jamais en être venu tout à fait à bout.
Elle ne le comprenait pas tout à fait. En fait, pour la première fois de sa vie, elle n'arrivait pas à saisir l'essence même d'une chose, subitement aveugle et renvoyé à cette médiocre banalité.
« Ele ph'dos ghil ? »
(Que fais-tu là ?)
« Ustaan doerrus whol dos. Ilharn, vel'bol xun dos satiir vel'drav dos ph'malarin ?»
(Je suis venue pour vous. Père, que ressentez-vous quand vous combattez ?)
« Treemma. Vhaid. Hasstn. Lu'folbol nindel Usstan h'ros bihurr. »
(La peur. La fierté. La colère. Et quelque chose que je ne pourrais te décrire)
« T'yin, screa ulu uns'aa. »
(Alors apprenez-moi)
Et il lui promit. Elle qui avait toujours appris à servir les Dieux, elle allait dès le lendemain servir une autre cause – même si elle en avait déjà appris lors de ses primes entraînements - , celle du sang. Elle voulait ressentir tout ce que son père lui avait décrit. Elle voulait comprendre surtout car n'y avait-il rien de plus immatériel que ce que pouvait ressentir un mortel ? Ces choses qu'il ne contrôlait pas et qu'il appelait sentiment. Elle voulait apprendre, sentir. Peut-être que ressentir était un privilège divin. Peut-être, pensait-elle, que cela venait des Dieux eux-mêmes, qui dans leur bonté accordaient aux Hommes la chance d'approcher leur sublime perfection.
Toute la journée elle la passa à observer les muscles se tendre sous la rigueur des exercices. Elle les repérait un à un, sculptant mentalement le guerrier parfait, aux muscles ni trop gros ni trop fins, au corps svelte et vif mais tout de même assez puissant pour porter des coups aux dommages conséquents. Elle regardait les mouvements de leurs pieds qui semblaient à la fois si légers et aériens et pourtant tant ancrés dans le sol qu'il était impossible de les en déloger. Cette journée-là, elle ne parla pas. Pas un mot, comme obnubilée par sa nouvelle découverte – qui n’en était pas vraiment une. Même son père ne la tira pas de son mutisme. Elle était dans un autre univers, où son corps bien que présent ne tenait plus son âme, tournée bien malgré elle vers quelque chose de plus grand.
C'est à l'aube qu'elle monta l'étage. Bien avant même les premiers offices aux Dieux. Ils ne lui en voudraient pas de ne pas être présente, elle qui les adulait en toute heure de la journée. Elle n'avait pas besoin de quelques cérémonies pompeuses pour rendre hommages aux Grands. C'était d'ailleurs la première fois qu'elle ne serait pas présente et peut-être la Grande-Prêtresse du temple de Natha s'en rendrait-elle compte. Que ferait-elle le cas échéant ? Sidra ne s'en souciait guère à cet instant. Peut-être ne s'était-elle jamais réellement souciée de quoi que ce soit. Cependant, alors que tous dormaient plus ou moins, elle retrouva son père. Il était presque entièrement nu et son corps était zébré de blessures toute plus ou moins fraîches. Des stigmates de la guerre qu'il camouflait par d'étranges symboles. Son corps en était recouvert. Des lignes, des cercles, des points. Tant de symbolisme tribal qu'elle ne sut comprendre à ce moment-là. Que faisait-il agenouillé au milieu de la cour, psalmodiant quelques incantations inaudibles. Sidra ne s'était pas encore manifestée. Elle était là, dans son dos marqué par les évènements et la peinture, à observer celui qui lui avait donné la vie.
Son père, son ami.
"Ichl medosek whol l'Phraktos"
(Il est trop tôt pour les Dieux)
Surprise, elle n'esquissa pas un mouvement. Lui parlait-il à elle, ou était-ce là une de ses incantations à mi-voix ? Elle préférait ne pas le déranger et ainsi, faire ce qu'elle savait le mieux attendre en regardant. Les muscles de Zaknafhein étaient lâches et rien n'indiquait une quelconque nervosité, ni même un changement de position de sa part. Il était à genoux et il le resterait.
"Ustaan zhaun dos phuul ghil, Sidra"
(Je sais que tu es là Sidra)
Alors elle s'avança. Pas un pas inquiet mais respectueux, comme si elle avançait en terre sacrée. Il ne s'était toujours pas retourné et le calme relatif du début de journée donnait à l'ensemble un air solennel.
"Ustaan kat ssinssrin ulu ruulk'na dos"
(Je ne voulais pas vous déranger)
"Ol zhah medosek ulu screa malarin."
(Il est tôt pour apprendre à se battre)
Il se releva et tourna son visage vers la jeune femme qui, malgré tous les efforts que lui insufflait la raison, resta bouche bée devant les dessins qui parcouraient même le faciès de son père. Et pourtant, il l'ignora totalement.
"Usstan zhahus ortelanthin Phraktos"
(Je priais les Dieux.)
Sidra hocha la tête. Elle savait son père pieu mais elle ne comprenait pas ce que tous ces signes tracés sur sa peau voulaient dire. Elle ignorait et cela l'agaçait. Pourtant elle ne se résolut pas non plus à lui demander. Cela n'était pas correcte et bien que la curiosité la démangeait, elle se retenait. Le silence s'installa quelques secondes. Les formes ne dessinaient aucun mot qu'elle sut reconnaitre, ni même aucune chose qu'elle avait déjà pu voir auparavant. Des courbes et des lignes à n'en plus finir, sculptant le corps, soulignant les muscles, tranchant la chair et transcendant l'esprit.
Elle n'apprit que plus tard l'importance de ces symboles. Sidra les apprit parfaitement. Chaque cercle et chaque trait faisait une référence bien précise à un Dieu, aussi s'appliquait-elle à ne pas dénaturer le message. Zaknafhein lui avait enseigné l'art de rendre hommage, plongeant inlassablement son doigt dans la mélasse dorée et l'appliquant avec frénésie, au son de ses incantations dans une langue qu'elle ne comprenait pas. Il lui avait traduit une fois mais elle ne se souvenait plus. Durant près de quatre-vingts années – et même plus tard – elle respectait ce rituel. Les Dieux offraient à ceux qui leur rendaient hommage une place toute particulière. Et même si Sidra se savait déjà singulière, elle continuait à choyer ceux qui l'avait faite. Enfant d'Uriz et de Natha, fille des Divins.
Et durant ces mêmes quatre-vingts années, elle apprit de nouveau à se battre. Chaque matin elle se levait avant les offices matinaux, partant pour la caserne où vivait son géniteur. Chaque matin, elle partageait avec lui la communion divine et l'élévation de l'esprit. Nus dans la cour, il s'adonnait au même rituel, traçant avec précision. Puis quand le Puy se levait, alors ils commençaient.
Les premières années furent de loin les plus terribles. Il serait mal aisé de raconter ici toutes les horreurs que la belle et si différente Sidra et pourtant... Pourtant, ce furent tant de choses vécues qui la changèrent à jamais. Qui s'emparèrent pour toujours de ce qui la rattachait encore à son peuple, qui la rattachait encore à ces êtres vivants qu'elle avait si souvent observé.
"Dos inbal ulu screa vel'bol l'jiv'undus zhah"
(Tu dois apprendre ce qu'est la douleur)
Et c'est ainsi qu'avant même de tenir une arme, elle apprit à recevoir les coups. Zaknafhein était serein lorsqu'il l'entraînait. C'était une enfant des Dieux et bientôt, la douleur serait un lointain souvenir. Débarrassée des sentiments mortels, la jeune drow pourrait s'élever parmi les Immortels qu'ils vénéraient tant. Alors, toujours voguant sur le flot lisse de la certitude, il frappait. Il arrivait parfois qu'elle évite les coups, qu'elle réussisse à faire sortir son instinct. C'était d'ailleurs comme cela qu'elle apprit à esquiver, à savoir quand battre en retraite, bouger avec la précision et l'agilité féline. Dix années à subir les privations et les punitions. La moindre erreur était lourdement sanctionnée et il n'y avait ni pitié ni haine dans le cœur du géniteur. Les pleurs et les cris n'avaient pas raison de sa volonté.
De son côté, Sidra voyait le paradis au milieu de l'enfer. Si les blessures la torturaient, elle n'en restait pas moins forte, trouvant du réconfort dans la perte progressive de sensibilité. Elle n'observait plus ce qui l'entourait car cela lui paraissait trop futile à présent. Comment pouvait-on vivre ainsi soumis à la douleur, la peine... l'Amour ? Elle aimait son père et même si de nombreuses fois elle le décevait, elle revenait le lendemain matin, traçant toujours au rythme des incantations ces symboles qui la protégeaient. Ils la protégeaient du Mal, de sa propre mortalité. Les Dieux ne saignaient pas eux, alors pourquoi l'avaient-ils faite de chair et d'os ? Pourquoi avaient-ils voulu qu'elle soit si différente et pourtant si commune ? Peut-être perdit elle un peu la foi à ce moment de sa vie où rien n'avait plus d'importance qu'elle. Pour une fois elle se considéra réellement. Rien n'avait plus d'importance que son propre corps, que sa propre vie. Perdue et apeurée, elle avait pris conscience qu'avant toute chose, elle était. Son père s'acharnait sur son corps tandis qu'elle ressentait pour la première fois sa peau, ses muscles, sa chair, son sang, ses os. Et pour la première fois encore, elle comprenait enfin qu'elle était réellement importante. Pourquoi sinon devrait-elle s'entrainer d'avantage que les autres ? Pourquoi, si ce n'était pas le cas, les autres la regardait si étrangement ? Pourquoi avait-elle été élevée dans la lumière des Divins si ce n'était pas elle-même un lien particulier avec l'au-delà ? Enfin, libérée des contraintes physiques, elle comprenait.
La dixième année sonna comme la fin d'un prémice d'apprentissage. Sidra, bien que marquée à jamais par quelques estafilades, était à présent capable d'appréhender les mouvements de son adversaire mieux que si elle n’avait suivi que les préceptes de base. Elle savait quand bouger, quand fuir et quand subir. La rigueur de Zaknafhein avait eu raison de sa conscience de la douleur, aussi semblait-elle plus encline que quiconque à la supporter. La peine n'avait pas quitté son corps car, après tout, elle restait prisonnière de son enveloppe mortelle mais elle avait appris à la canaliser, à la réduire. Elle avait grandi dans sa conscience de soi, et savait quand il fallait cesser de lutter et quand le coup n'était pas assez grave pour abdiquer. Alors fut-elle assez prête pour recommencer à manier les armes. D'abord en bois puis en acier émoussée, elle apprenait de son père –oubliant ce qu’on lui avait enseigné- chaque mouvement, recevant toujours les coups lorsqu'elle commettait une faute, remerciant toujours les Dieux de l'avoir fait si différente. La jeune Eldéenne ne perdait plus de temps à regarder autour d'elle, se concentrant uniquement sur ce que son géniteur pouvait lui apporter. Elle pouvait dessiner mentalement chacun de ses muscles se tendant sous la rudesse des exercices, son expression invariablement sereine lorsqu'il se devait de la punir... A ses côtés, elle se sentait à la frontière de l'immatériel, cet endroit si particulier qu'elle avait chéri durant son enfance. Il se battait tous les jours pour que Sidra prenne pleine conscience de ce qu'elle était: Enfant des Dieux.
Elle valait mieux que tous les mortels, y compris son géniteur. Elle était une Déesse enfermée dans un corps matériel mais ayant gardée toute la majesté de son âme. Et Zaknafhein travailla à l'élever au-dessus des autres durant quatre-vingts années. Si les premiers temps son enveloppe manquait de muscles et son bras de sureté, elle maîtrisait à présent presque toute les formes de combats au corps à corps comme lui avait voulu lui enseigner. Elle avait toujours eu une préférence pour les cimeterres avec leur belles lames courbes. Elle voyait à présent dans l'éclat de l'acier ce que son père lui avait un jour expliqué: elle voyait la peur, la fierté, la colère mais aussi quelque chose de bien plus profond qui, à la faveur d'une note métallique, l'amenait à abandonner toute réflexion. Au début, elle pensait qu'une force lui dictait que faire. Son instinct n'émanait pas totalement d'elle, mais aussi d'une chose que l'on ne pouvait toucher, comme une poupée de chiffons que l'on manipule. Une marionnette tenue par des fils que l'on ne pouvait ni voir ni sentir. Puis, à force de temps et d'entraînement, elle cultiva sa différence et cette chose enfouie au fond d'elle qu'elle avait nourrit plus d'un siècle durant.
Elle était sûre à présent. Sûre de ne pas être les autres. Sûre de n'obéir qu'à elle-même, qu'à la force de son âme qui de loin surpassait les capacités de son corps frêle. Lentement elle tombait vers l'Abysse, cette enclave où rien n'a plus de valeur, où rien n'a plus d'importance. Elle sombrait doucement emportant avec elle les derniers fragments qui la rattachait à ce qui pouvait vivre, à ce qui était tangible. Elle était enfant des Dieux, progéniture enfermée malgré elle dans une enveloppe de chair. C'était un parcours initiatique, une épreuve à passer pour enfin quitter le monde tangible. Et elle, Sidra, fille des Dieux devrait se montrer d'autant plus digne que les autres.

L'histoire, encore une fois, aurait pu prendre une toute autre tournure à cet instant. Il était plus tôt encore qu'à l'accoutumé. Sidra ne trouvait plus le sommeil et même ses prières ne réussissait pas à satisfaire son esprit. Les Dieux avaient besoin de plus. Besoin du son d'une lame contre une autre, besoin des dessins d'ocre sur sa peau nue. Mais tout cela, le temple ne pouvait lui offrir. Quelques sœurs n'avaient cessée d'être affairées et lorsqu'elle croisait la jeune Eldéenne, c'était pour mieux l'ignorer. La différence avait toujours effrayé les autres et maintenant qu'elle revenait de ses entraînements ruisselants de sueur et barbouillée de symboles qu'elles ne comprenaient pas, les bons gens du Puy se tenaient loin d'elle. Mais Sidra s'en moquait. Elles priaient sans savoir s'adresser aux Dieux. Elles étaient affligeantes de banalité. Un ordinaire que la jeune drow s'était mis de plus en plus à abhorrer.
Le soleil n'était pas prêt à se lever lorsqu'elle monta l'étage. Les murs du Puy lui paraissaient chaque jour un peu plus familier et malgré tout, elle n'arrivait pas à en saisir tout à fait toute les nuances. Ils lui ressemblaient en somme: une apparente normalité mais tant de choses que personne ne verrait jamais. Comme si les aspirités étaient bien trop complexe pour l'oeil. Comme si, de toute les choses remarquables, on ne retenait de ce mur que sa couleur et sa forme. Sidra aurait pu sourire. Après tout, c'était exactement ce qu'elle ressentait, elle, enfermée dans ce corps alors même que son esprit surpassait de loin tous les mortels qu'elle avait pu croiser jusqu'à présent. Le monde, à cette heure, semblait endormi. Comme si tout autour d'elle s'était mis en veille. Bien sûr, ils ne voyaient pas le soleil ainsi enterrés et pourtant, elle aurait pu deviner le cycle solaire aussi bien que n'importe quel habitant de la surface. Elle l'avait vu une fois, le soleil et à l'inverse de ses congénères, elle avait été nullement émue par le spectacle. Si certains prêtaient une interprétation divine aux astres, elle n'y croyait pas. C'était des choses bien trop réelles pour être du domaine divin. Non, les Dieux, ce n'était pas ça. Ce n'était pas une boule brulante dans le ciel azur car un Dieu n'aurait jamais accepté de se faire voiler par un nuage aventureux. Il était stupide de penser que des êtres aussi supérieurs se montreraient ainsi spoliés.
Tout le monde à la caserne semblait endormi. La jeune drow s'avançait dans les ténèbres à la faveur d'une flamme vacillante, projetant autour d'elle des ombres qui auraient pu l'inquiéter. Au lieu de ça, il se dégageait d'elle une aura si particulière qu'elle semblait tout à coup spectrale. Elle s'agenouilla dans la cour. Son géniteur ne tarderait pas à la rejoindre. Préparant la pâte d'ocre dans un premier temps, elle entreprit ensuite de se déshabiller. Elle n'avait jamais appris la gêne et se dévoiler ainsi ne lui posait aucun problème. Elle savait ce que les hommes faisaient aux femmes mais elle s'en fichait. Elle n'était pas comme les autres, et même si cela devait arriver, son corps – la douleur – n'aurait aucune espèce d'importance. Elle priait, psalmodiant des mots dans une langue qu'elle ne comprenait toujours pas. Elle priait et cela avait de l'importance. Lorsque les mots franchissaient ses lèvres, ils étaient libres et invisibles mais tellement puissants. Ils étaient pour les Dieux. Il n'y avait rien dans le monde matériel qui avait de l'importance, si ce n'était cet instant suspendu dans l'infini. Ces mots à peine chuchoté et qu'elle aurait cru hurlé à son oreille. Une évidence comme une autre en somme.
Le temps passait alors qu'elle continuait à se purger de ce corps, espérant trouver la grâce de ses véritables parents. Elle espérait, en faisant cela, s'offrir leur pardon et, un jour – lorsque le moment serait venu – les retrouver, déesse parmi les Dieux. Elle serait à sa place. Sidra ne serait plus différente mais telle qu'elle est réellement: d'essence divine. Mais le temps continuait de filer tant et si bien que lorsqu'elle eut fini de tracer sur son corps lignes et courbes, qu'elle eut fini ses incantations, son père n'était toujours pas arrivé. En presque un siècle, il n'avait jamais failli; pas une fois il avait été absent ou même en retard à l'un de leur rendez-vous. C'était une chose bien trop importante. Hâtivement – peut-être un peu trop -, elle se rhabilla, s'avançant vers la chambre de Zaknafhein. Elle y avait mis les pieds un bon paquet de fois. C'était là-bas qu'elle recevait les corrections qu'elle méritait après ses séances. Pour autant, elle n'avait jamais vu la pièce, somme toute modeste, comme un lieu pénible et douloureux. De toute façon, il s'agissait d'un mal nécessaire. Délivrée de la douleur, son âme s'approcherait plus encore de celle des Divins. Un petit pas vers l'Avenir.
Qui aurait pu prédire que lorsque la porte s'ouvrit, la belle Sidra vit son père dans le bras d'une autre femme ? Qui aurait pu prévoir que la rage, longtemps contenue, jaillit à en déformer ses traits encore peu abimé ? Zaknafhein Micedra ne valait pas mieux que les autres. Il s'attachait aux choses matérielles, il aimait. L'idée même lui était insupportable. Elle aurait voulu tout faire. Elle aurait voulu fuir, vomir, oublier, supplier. Mais la drow ne fut capable que du silence et de l'immobilité absolue. Comme si le temps venait de se rompre une fois encore. Elle le voyait tel qu'il était réellement. Nu dans une congénère qui tentait de le repousser, visiblement surprise de l'intrusion intempestive de sa fille, lui non plus était incapable de bouger. Les yeux rivés sur l'autre, le temps s'égraina. Combien de temps restèrent-ils comme ça ? Impossible à dire.
"Sidra, qualla... xo'al ulu kampi'un..."
(Sidra, s'il te plait... Essaye de comprendre...)
Comprendre, elle en était incapable. Lentement, alors même que chaque mouvement semblait une épreuve, elle saisit le cimeterre de son père. Il était tôt, au dehors le soleil ne s'était certainement pas encore levé. Chacune de ses respirations étaient un calvaire, comme si elle brulait de l'intérieur. Chaque muscle la tiraillait à l'extrême, comme si tout allait se rompre l'instant d'après. La lame brisa l'air une première fois et s'enfonça dans la chair de sa partenaire sans effort. Le sang se mit à couler lentement en petit ploc sur le sol. Zaknafhein n'avait toujours pas bougé, une larme roulant sur sa joue.
" Usstan zuch zhaunau... Usstan zuch zhaunau nindel ka Usstan inbal ulu rei, dos orn tlu l'sanrr"
(J'ai toujours su... J'ai toujours su que si un jour je devais tomber, tu en serais la cause)
"Nau..."
(Non)
"Vedaust Sidra, dalharil d'l'Phraktos..."
(Adieux Sidra, fille des Dieux)
L'arme perturba une nouvelle fois le calme de l'air. Le corps s'écroula tandis que le sang continuait sa course sur le sol et le long de la lame affutée. Pourtant la belle resta parfaitement impassible. Comme si tout cela n'était qu'un rêve. Comme si elle n'avait pas compris la gravité de la chose. Et pourtant elle en avait saisi toute l'ampleur. Elle savait qu'elle devrait sortir. Partir du Puy pour ne pas y retourner. Ce genre de choses arrivait tous les jours mais là, ce n'était pas la même chose. Elle venait de perdre son géniteur, son père, son ami...  Et pourtant, elle ne réussit pas à bouger. Sidra contemplait ces corps nus tâchés d'andrinople. Le carmin et la nudité qui paradoxalement habillaient bien mieux que n'importe quel tissu.
Alors, dans un geste incompréhensible elle se mis elle aussi le corps dans son plus simple appareil. Comme si cela était normal. Alors, elle fut prise d'une envie comme nulle autre. Pour la première fois elle ressentait quelque chose de différent au fond d'elle. Quelque chose de nouveau, qu'elle ne connaissait pas. Pour la première fois, elle connaissait l'attirance, l'envie, l'amour. Pour la première fois, elle connut le contact d'une peau contre la sienne. Zaknafhein avait fait d'elle une femme avant qu'elle ne quitte pour de bon l'endroit qui l'avait vu grandir. Elle quittait le temple et toute ces gens si ordinaires. Où allait-elle ?

Les premiers jours se passèrent dans la même morosité. Elle parcourait les mètres sans s'en apercevoir réellement, avalant la distance vers un lieu qu'elle ne connaissait pas encore. Elle ne voyait personne, ou du moins le peu qui pouvait rencontrer sa route ne l'intéressait guère. La pauvre Sidra était aveugle, sa seule pensée la guidant vers un monde plus céleste. Elle qui n'avait jusqu'alors jamais fait face au monde de dehors s'y voyait projetée. Seule, le sang séché sur sa lame. Elle avait même oublié la notion de faim et de soif. Elle dormait peu, si bien que ses grands yeux carmins ouverts semblaient secs. Sa bouche n'avait pas prononcé un mot. Elle marchait et c'était tout ce qui semblait l'importer. Son mutisme cachait en vérité la torture d’esprit. Inlassablement, seconde après seconde, elle revoyait la même chose. Elle voyait la Mort. Alors l'air se faisait rare dans ses poumons. Elle suffoquait à chaque pas. Ses poumons vidés, elle ne savait même pas ce qu'elle cherchait exactement. A l'intérieur, tout était aussi vide que les terres qu'elle traversait.
Les nuits glaciales lui faisaient oublier le soleil cuisant de la journée. Elle oubliait qu'avant d'avoir froid, elle avait eu horriblement chaud. Elle oubliait qu'avant l'engourdissement du repos, ses jambes la faisaient souffrir. Et, à la faveur d'un rayon opalescent, elle se mettait à genoux dans ce sol poussiéreux qui n'avait pas vu la pluie depuis fort longtemps. Elle regardait le ciel nocturne et alors, elle se mettait à prier. Des demandes muettes et pourtant si assourdissantes. Alors, les besoins de son entité matérielle se faisaient pressants. Elle devait boire à en vider un lac. Elle avait si faim qu'elle aurait pu manger le Monde. Et au fond, pensa-t-elle, c'était là la preuve qu'elle n'était pas comme les autres. Les Autres, ceux qu’elle refusait de voir. Eux, si mesurés, si normaux, si mortels. Quand sa respiration devenait trop douloureuse et la faim trop violente, elle finissait toujours par s'endormir. Un repos mouvementé où les cauchemars avaient la part belle. Elle revoyait Zaknafhein. Elle revoyait l'éclat rougit de la lame et déjà le matin caressait son visage comme un shaman effleure un mourant.
L'aube du septième jour depuis son départ.
Son souffle était filant. Les lèvres gercées par le manque d'eau et le ventre tordu par l'asthénie, Sidra titubait plus qu'elle ne marchait à présent. Le temps filait, égale à lui-même et pourtant tout lui semblait plus long, plus lent. Ses jambes étaient lourdes et elle prenait un temps fou pour avancer. La peinture sur son corps s'écaillait par la chaleur puis coulait sur sa peau sale au gré de sa sueur. Des grosses gouttes cavalaient sur son corps chétif. C'est alors que ses yeux asséchés virent de nouveau. Le sel de son corps rendait le clignement de paupières pénible, mais elle s'y plia volontiers. Et à son excrétion se mêla vite les dernières gouttes d'eau douloureuses de son corps affaibli. Elle ne rêvait pas. Il était là, elle le voyait. Sa nudité ne la choquait plus tant elle avait étudié les traits sculptés de ses muscles qui se contractaient à chacun de ses mouvements. Ils étaient beaux, puissants et pourtant si gracieux. Les courbes n'étaient pas anguleuses et l'ensemble était simplement parfait. Elle s'approcha aussi vite que son petit corps endolori lui permettait. Ses yeux se posaient sur les courbes dessinées sur son corps d'albâtre. Tantôt des lignes, tantôt des cercles, elle y voyait le panthéon et les héros, les guerres gagnées par le sang et les batailles glorieuses. Elle y voyait la vie mais surtout la mort. La mort, ce don des Dieux aux hommes si pitoyables. Les divins avaient offert aux êtres matériels la possibilité de s'élever au-dessus, d'abandonner leur essence tangible pour un monde incorporel où ils pourraient servir avec dévotion. Où, un jour peut-être, ils seraient leurs égaux. L'Eldéenne esquissa un maigre sourire lorsqu'enfin, elle allait poser sa main sur ce corps occupé à une tâche si prenante qu'il ne l'avait encore entendu arriver. Cela se produisait souvent, lorsqu'il était en train de rendre hommage aux Puissants.
Mais sous ses doigts, l'image s'effaça, laissant à la place la poussière brulante des Terres Stériles.
Zaknafhein était mort.
Sidra sombra.


Dernière édition par Sidra Shi'bavatae Micedra le Mar 19 Déc 2017 - 1:02, édité 5 fois
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MessageSujet: Re: Sidra Shi'Bavatae Micedra [En cours]   Sidra Shi'Bavatae Micedra [En cours] I_icon_minitimeDim 20 Mar 2016 - 1:04


"Il zhah guuan phor !"
(Elle se réveille)
Ce fut la première phrase qu'elle entendait depuis qu'elle avait vu son père. Les yeux encore embués et les oreilles sifflantes, elle n'aurait su dire avec exactitude s'il s'agissait là d'une voix de femme ou d'homme. Un liquide frais parcourait le coin de ses lèvres. Au dessus, à mesure qu'elle retrouvait la vue,; elle ne voyait que le ciel immaculé. Un bleu si clair et si profond à la fois qu'aucun nuage n'osait perturber. Elle avait terriblement chaud. Toute eau semblait avoir quittée son corps. Incapable de bouger pour le moment, elle chercha la voix. Celle qui l'avait sortie de sa torpeur. Elle était là, près d'elle. La gourde de peau se vidait lentement à ses lèvres, les gouttes insidieuses allant même se perdre à son cou comme un million de diamants liquides. C'était une femme qui la tenait. Ses cheveux – qu'elle devina blancs – était soigneusement rangés sous du tissus rouge. La peau sombre des gens de son pays la rassura quelque peu. Elle avait déjà entendu parler de Zurthanniens révoltés qui parcouraient le désert. Elle l'avait entendu, oui, dans son ancienne vie.
"Ph'dos jugare ? Xun dos ar uns'aa ?"
(Est-ce que ça va ? Vous m'entendez ?)
Mais Sidra n'avait pas la force de répondre. Ses lèvres, bien qu'humides, demeuraient sèches comme la poussière des Terres Stériles. Quelle folie lui avait prit de quitter la Faille ? De quitter la seule chose qu'elle connaissait alors. Elle qui avait toujours cru tout connaitre. Elle que les Dieux avait choisi parmi tout les autres. Son regard se braqua sur celui de sa Sauveuse. Elle était encore engourdie mais elle réussit à hocher la tête péniblement. Elle aurait donné cher pour retrouver le confort du temple. Pour donner les offices avec ses soeurs, pour vivre en marge mais vivre tout de même. Sa Sauveuse n'attendrait certainement qu'elle se relève pour lever le camp. Après tout, elle ne la connaissait pas. Elle qui, voilée de rouge, avait arrêté de verser le liquide cristallin. Le soleil se faisait moins brûlant sur la peau de la jeune Eldéenne. Elle se sentait si faible... Elle avait envie – non, elle avait besoin de dormir. De fermer les yeux et d'oublier un temps le monde autour. Oublier qu'elle avait fuit. Oublier les yeux révulsés de Zaknafhein, oublier son enseignement. Oublier sa mère, ses devoirs. Tout oublier et s'en remettre aux Dieux. Pouvoir, ne serait-ce qu'un instant frôler de son doigt frêle ceux qui l'avaient envoyé sur terre et à qui elle devait tout. La drow devait faire ses preuves et se montrer digne de son sang, digne d'un jour s'afficher au côté du panthéon céleste.
Et, sans qu'elle n'eut à réfléchir d'avantage, ses yeux se fermèrent une nouvelle fois. Un sommeil mérité mais néanmoins agité. A son réveil, retrouverait-elle la femme qui lui avait donné de l'eau alors qu'elle mourrait de soif ? Non, elle serait certainement à nouveau seule, perdue dans ce désert brulant, n'ayant d'autre but que d'avancer vers un endroit qu'elle ne connaissait pas. Quelle folie d'avoir quitté le temple ! Ses rêves furent mouvementés, troublés par le visage supplicieux de son géniteur. Puis elle voyait le sang, ce liquide carmin qui doucement, avec la grâce d'une danseuse venait s'écraser en un filet délicat sur le sol froid de la chambre. Et, au fond d'elle, elle ne ressentait rien. Ce vide qui la comblait depuis les premières heures de sa vie lui paraissait à présent malhonnête, dérangeant, horrible et humiliant. Zaknafhein s'écroulait une fois encore sur le sol et son coeur ne battait pas plus qu'à l'habitude. Sidra se sentait monstrueuse alors que le ploc du liquide vital qui tombait de la lame rougissait encore un peu plus le planché. Et puis elle se réveilla. Elle suait mais, au dehors, il faisait froid. Elle émergeait lentement tandis que peu à peu, elle commença à distinguer des voix. L'obscurité elle-même était troublée par une lumière douce et chaude, crépitant joyeusement au gré des conversations qu'elle ne distinguait pas toutes.
La tête de la jeunette tourna un peu. Son corps pourtant avoir retrouvé sa force. Ses doigts se refermèrent sous la poussière de la terre invariablement sèche tandis qu'elle se ramassait sur elle-même pour se relever. Elle distinguait à présent une dizaine de voix. Mais certains langages lui échappaient encore. Elle s'approcha à pas feutré vers le feu qui brûlait. Les langues enflammées dessinaient des enchevêtrements complexes d'une beauté somme toute sauvage, avant de mourir inexorablement dans l'air frais. Tout autour se tenaient des hommes et des femmes. Elle ne sut jamais combien elle en dénombra exactement cette nuit là. Une quinzaine, certainement plus. Des chants et des danses s'élevaient avec grace et volupté sous la voûte étoilée. Elle ne reconnaissait pas ces musiques mais pourtant, l'atmosphère à la fois poétique et ancrée dans la réalité lui rappela la condition qu'était celle des vivants. Son coeur se mit à battre dans ses tempes tandis que ses yeux se posaient arbitrairement sur ce cercle animé. Des femmes et des hommes se mouvaient dans une chorégraphie inconstante, les corps se frôlant, les mains se touchant sans jamais réellement sentir l'autre. Les pieds de ces baladins caressaient le sol avec une frénésie douce, soulevant la poussière qui couvrait d'un voile léger le lueur du brasier. Derrière eux se tenaient les tentes de toiles, et ceux qui ne dansaient pas étaient assis sur des tapis épais. Il y avait deux joueurs de Zurna qui faisaient flotter de leur flûte une mélodie enivrante, puissante et presque mystique. A leur côté se trouvaient d'autres joueurs qu'elle ne sut totalement définir. Mais l'aubade continuait à faire battre son coeur en rythme tandis qu'elle décrochait peu à peu des obligations matérielles.
Alors elle comprenait ces danseurs qui bougeaient sans penser, au son de la musique. Et sans rendre tout à fait compte, elle avait fermé ses paupières et se laissait divaguer un bref instant. Elle pensa aux Dieux et leur adressa une prière muette. Depuis combien de temps n'avait-elle pas fait ses offices ? Et là, alors qu'elle se trouvait au milieu d'une troupe qu'elle ne connaissait pas, elle se sentait proche d'Eux.
"Ol zhah natha bwael isto"
(C'est une belle nuit)
Sidra reconnu la voix mais s'empressa de revenir dans le monde matériel qu'elle abhorrait tant. Face à elle se tenait sa Sauveuse. Elle apprit plus tard qu'en réalité elle se nommait Myste, qu'elle venait de la Faille tout comme elle. Cette troupe c'était en réalité sa caravanne. Myste la convia dans le cercle et malgré le mutisme relatif de l'Eldéenne, elle souriait avec enthousiasme et lui présenta à voix basse chacune des personnes installées autour du feu. Sidra ne porta pas une grande considération à ce que sa Sauveuse au regard charbonneux lui racontait. A vrai dire, cela l'intéressait peu. Elle préférait observer le ballet envoûtant où même la poussière du désert semblait avoir son rôle dans la beauté de la scène.
"On a faim s'il vous plait !"
La voix était lointaine. A vrai dire, elle venait d'au-delà des tentes, là où le feu n'arrivait pas à chasser la noirceur de la nuit. Elle se redressa curieuse. Si elle ne connaissait pas cette langue étrange, elle avait su discerner dans la voix une plainte où la peur et la douleur se mêlaient allègrement. Et elle s'y connaissait en douleur. Un maigre sourire s'étira sur ses lèvres obscurcit par une ombre fugace. Zaknafhein avait fait son oeuvre et à présent, elle n'était plus soumise aux mêmes contraintes que ces êtres de chair et de sang. Elle était la fille des Dieux, dernier vestige d'une union sacré qui s'était produite près de deux centenaires plus tôt. La même union qu'elle avait reproduite avec le corps encore chauffé par le sang de son géniteur. Par son sang sur ce corps inerte. Elle le savait, elle avait accomplit là son devoir. Demain elle rendrait hommage à sa manière. Pour la première fois depuis son départ de la ville du Puy, elle se sentait bien.
"Zu'tour mina phor !"
(Faites les taire !)
Le visage de Myste avait mué de l'allégresse à la colère. Le sérieux de ses traits rappela un temps celui qu'usait son père lors de ses leçons. Elle eut un léger frisson au souvenir de ces instants douloureux qui lui paraissaient déjà si loin. Dans une vie antérieur. A présent, elle était libre de mener sa vie matérielle de la façon qu'elle trouvait la plus juste. Sa mère, Micedra, lui avait enseigné l'amour des Divins, tandis que son géniteur s'était occupé de la rigueur du culte. Elle était prête pour sûr et pourtant elle hésitait encore. Quelle était la bonne voie ? Alors elle se replongeait dans ces jeunes années. Le mutisme, le rejet et ses observations... Non, elle n'était pas une personne comme les autres, elle était enfant des Dieux. Elle avait toujours su ce qu'était la bonne direction. Elle avait toujours montré une entière dévotion à la cause qui était sienne et lorsque le jour de son dernier jugement arriverait, elle pourrait sans honte affronter ses vrais parents la tête haute. Le matériel n'avait aucune valeur à ses yeux, sinon de lui ouvrir des portes encore closes: celles de l'immatérielles. Celles que tout homme voudrait un jour toucher. Celles dont elle était issue.
Pendant qu'elle réfléchissait, elle ne s'était pas apperçue que les danseurs avaient cessés et que le monde autour d'elle s'affairait un peu plus. La musique ne s'était pourtant pas tûe. Myste n'avait pas bronché. Elle était stoïque à côté de Sidra, observant avec une lueur de satisfaction la scène. La petite avait mille et une questions qui se bouscoulaient dans sa tête sans qu'elle n'eut jamais osé les prononcer. Etait-ce de toute façon nécéssaire? Rien ne l'était. La parole n'est utile qu'à bon escient. Une leçon qu'elle avait longtemps tenue. Elle ne parlait jamais inutilement. C'était une perte de temps et ça la rattachait toujours un peu plus aux considérations somme toute mortelles.
"Vel'bol's dosst kaas?"
(Quel est ton nom ?)
Elle la regarda. Le masque noir dessiné sur son visage l'intriguait et elle ne pouvait détacher ses yeux de cet océan obscur. Elle avait quelques ridules et sa voix rauque et puissante trahissait un âge certain. Ses cheveux lilial étaient sagement nattés. Tout à coup, la jeune paraissait d'autant plus frêle. Ses mains se tordèrent un peu sous la pression de sa question. Elle devait parler.
"Sidra"
La vieille sauveuse esquissa un sourire. Pas de ceux que l'on aime voir cependant. De ceux qui flottent malencontreusement sur des bouches malsaines. Les sens de la drow étaient en éveil et son regard accru scrutait les tensions de ses muscles. Elle l'avait déjà fait avec son père. Elle avait appris à reconnaître les signes d'une attaque imminente. Alors elle garda son calme, assise sans broncher auprès de cette femme qui lui avait offert la vie alors que le désert avait presque eut totalement raison d'elle, de son corps. Sans elle, elle n'aurait jamais pu s'illustrer autant qu'elle aurait aimé pour se présenter face à Ceux qui comptent. Le temps était suspendu dans cette conversation ni tout à fait belliqueuse ni tout à fait amicale. La jaugeait-elle ? Certainement. Elle faisait de même après tout. Myste n'était pas la personne la plus impressionnante du campement et pourtant elle arborait sous son apparence svelte, un corps tout aussi athlétique que celui de Sidra. Ses muscles étaient soigneusement dessinés et elle ne doutait pas de sa vivacité malgré son âge. Zaknafhein lui avait appris à ne pas sous estimer l'adversaire.
"Vel'bol xunus dos xun wun nindol k'lar ?"
(Que faisais-tu dans un endroit pareil ?)
Elle réfléchit.
"Ustaan xuat zhaun"
(Je ne sais pas)
Et elle ne mentait pas. Elle avait quitté la Faille en marchant vers un endroit qu'elle ne connaissait pas. Elle ne savait même pas où elle se trouvait en ce jour. Qu'aurait-elle pu répondre d'autre ? Parler était une notion bien inutile dont elle se serait bien passée. Son interlocutrice eut un rire franc qui fracassa l'air comme l'éclair dans un orage d'été. Même les instruments ne semblaient pas à même de couvrir son hilarité. Mais de quoi riait-elle ? D'elle certainement, de sa réponse – qui ne manquait pas de franchise – hasardeuse en de pareilles circonstances. Mais la jeune Eldéenne ne broncha pas. Elle aussi savait devenir aussi impassible qu'une statue de marbre. Elle ne ressentait rien, sinon l'air devenir plus pesant entre les deux femmes.
"Xun dos zhaun er'griff vel'klar udos ph' ?"
(Sais-tu seulement où tu te trouve en ce moment ?)
Elle secoua la tête et alors toute hilarité quitta Myste. La vieille saisissait enfin la véracité des propos que lui fournissait Sidra. Alors elle eut un geste. Sa main se leva avec grâce pour se poser délicatement sur son épaule. Elle portait un sourire bienveillant qui tranchait avec le soudain sérieux qu'elle avait fait preuve plus tôt. A vrai dire, l'enfant des Dieux était perdu dans ce fleuve d'émotions qu'elle ne pouvait saisir. N'avait-elle jamais ressentit la même chose ? Elle n'aurait su le dire. Au fond, cela ne l'intéressait que peu.
La femme rompu le lien physique qui les séparait autant qu'il les rapprochait. Un vague sourire flottait sur ses lèvres que le temps avait rendu sages. Elle se saisit d'une bouteille et la proposa de manière désintéréssé à la jeunette qui ne savait encore trop quoi penser de la situation. Elle était perdu dans un envie de fuir et une curiosité maladive qui l'avait toujours poussée plus loin, qui l'avait fait observer le monde qui l'entourait plutôt que perdre son temps en jacasseries inutiles des gens normaux. Elle ne l'était pas, alors à quoi bon essayer de se fondre dans cette masse informe et irrespectueuse ? Pourtant, en cet instant, elle revoyait en Myste une part de son géniteur. Comme si cette vieille eldéenne portait en elle un secret millénaire que nul n'avait été prêt à entendre avant elle. Que nul n'avait réellement voulu savoir après tout.
« D'anthe Sidra, ka dos llaar xuat zhaun vel'klar dos alu, vel'bol xun dos xun mufo ? »
(Chère Sidra, si tu ne sais pas même où tu vas, que comptes-tu faire demain ?)
La question aurait pu paraitre banale, et au fond, elle aurait du s'y attendre. Elle refusa poliment la flasque. Elle ne savait pas ce qu'elle comptait faire dans l'heure alors au lendemain... Si. Elle prirait très certainement. Il ne lui restait plus que ça après tout. La seule chose en laquelle elle pourrait toujours se rattacher, ses croyances profondes loin des profanes, loin du cadavre de Zaknafhein et de Micedra. Loin du temple et de ses obligations ridicules que tous suivaient plus par habitude que réelle foi. Loin du monde qu'elle avait toujours connu. Cette partie d'elle qui était morte avec son géniteur. Mais il lui restait les Dieux, ses paires, ses héros maudits qui avaient fait d'elle une mortelle. Quelle était sa voie ? Pourquoi lui faisaient-ils subir les mille et un tourment de l'éphémère alors même que son esprit tendait à s'élever au dessus du monde matériel. Non, elle n'aspirait à rien, ni pour maintenant ni pour jamais. Pas dans ce corps, pas dans cet univers qui n'était pas le sien.
La vieille femme la regardait avec détachement. Elle laissait le silence s'instaurer comme un ami. Ses yeux masqués de noir semblaient emplit d'une vérité profonde, tandis que Sidra se déchirait afin de trouver en elle une réponse. Elle ne la trouverait certainement jamais. Alors elle comprit. Oui, il était clair à présent de ce qu'il se passerait demain, et le jour suivant encore. Du moins tant que sa question ne serait pas totalement répondu.
« Dorn flohlu dos »
(Je vous suivrais)
Elle parut un instant surprise. Peut-être n'était-ce pas là ce qu'elle voulait entendre. En vérité, elle s'en moquait bien de savoir si c'est ce qu'elle attendait ou non. L'Eldéenne faute de savoir avoir choisit une voie. Peut-être la bonne, peut-être pas mais au moins elle ne resterait pas sur place, rongée par des démons qui auraient un jour raison d'elle et de ses superstitions, qui auraient grignoté jusqu'à la dernière parcelle de son être. Elle était l'enfant des Dieux et elle ne devait pas l'oublier, jamais. La stupéfaction laissa place à un sourire mystérieux dont elle ne réussi pas à déchiffrer.
« Inbal dos folbol terini'nestg whol uns'aa  »
(As-tu quelque chose d'intéréssant pour moi ?)
Elle la fixa, prise de court par la requête. Non, elle n'avait rien. Elle n'avait d'ailleurs jamais rien eu, sinon sa foi et son silence, ainsi que son habilité d'esprit. Alors qu'elle ne répondit pas, la marâtre reposa la même question, son intonnation quoique ferme n'était pas violente ou énervée. Non, elle gardait son calme et sa patience, vertues du temps, long apprentissage de la vie.
« Usstan inbal naubol »
(Je n'ai rien)
« Naut tangis'natha mildrin equidai  »
(Pas même un quelconque talent ?)
« Usstan zhahus rosin wun natha yath, vel'klar Usstan maunar natha yentil d'ussta dro. Usstan zhaun l'Phraktos jhal naubol mzild  »
(Je suis née dans un temple où j'ai passée la plupart de ma vie. Je connais les Dieux, mais rien de plus)
Sa sauveuse eut un petit rire. Lentement le brouhaha cessait et les gens revenaient auprès de l'âtre crépitant. Le calme avait repris le dessus comme si jamais rien ne s'était produit. La musique invita à nouveau à la danse et quelques bavardages reprirent tandis que la douce chaleur répendait ses bienfait. Pourtant personne s'installa près des deux femmes. Elle observait la scène avec attention. Elle ne savait toujours pas si elle se devait de fuir ou rester là, à regarder un monde qu'elle n'avait jamais pu appréhender avant ce jour. Il était vrai qu'en dehors de ses observations, elle n'avait rien. Elle avait appris à ne pas répondre à la banalité morbide des gens de sa race mais plutôt à s'élever à un état de conscience si poussé que nul mortel ne pourrait jamais la comprendre tout à fait. Même Zaknafhein n'avait pas su le faire. Un frisson parcoura son échine. Il y avait des choses qu'elle savait, ça oui. Sidra pouvait aisément résister à la souffrance et aux affres de la mortalité, fléau de ces gens qui n'était pour elle que des fourmis grouillantes. Elle savait analyser les forces d'un adversaire et très peu d'armes avaient un maniement qui lui était étranger; oui, elle savait des choses mais avait-elle vraiment envie de les offrir ? Le devait-elle seulement ?
La vieille n'était pas dupe. Pour sûr, le regard qu'elle lui jettait montrait une bien meilleure compréhension qu'elle n'aurait cru. Un esprit aiguisé était une arme autrement plus dangereuse que l'acier ou même que la parole qu'ils chérissaient tant. Et malgré sa vivacité, elle resta muette se saisissant d'un drôle d'instrument. Elle y inséra un mélange qu'elle n'aurait su identifier tandis que le fond de se bocal à deux tubes baignait dans un liquide clair. Elle attrapa un objet qu'elle ne connaissait pas non plus et se mit à faire des étincelles. Aucun foyer ne s'alluma et pourtant l'eau se mit à bouillir tandis que Myste aspirait lentement des bouffées de vapeur. Quel drôle d'ustensile...
"Usstan acratura nindol caravan whol l'draeval p'los lael drasven. Natha myrxle mayoe jhal l'yorn ol zhah naut natha ap'za xor natha crealo wynthe. Usstan ssrig'luin foluss xuileb jala abbil wun ol, vel'uss shlu'ta tesso uns'aa vel'bol ussta prollussk ssrig'luin lu'ka nind ph'llaar weafl whol uns'aa. "
(Je dirige cette caravanne marchande depuis huit années. Un miracle peut-être mais le pouvoir n'est pas dû au hasard ni même aux chances de succès. J'ai besoin de quelqu'un qui n'ait aucun ami ici et qui saura ce que mes gars ont besoins et s'ils sont réellement utiles pour moi)
Elle tendit à nouveau la bouteille. Cette fois-ci l'invitation se faisait plus pressante et il aurait été fort mal avisé de refuser. De toute façon, Sidra n'avait d'autre choix que d'accepter. Elle ne savait même pas si elle pourrait sortir de ce désert sans l'aide de sa Sauveuse. Une gorgée coula le long de son gosier. Le liquide était sirupeux et si fort qu'une fois sa lampée avalée, elle semblait brûler de l'intérieur, la faisant tousser bien malgré elle.
"Xun dos screa ulu malar"
(As-tu appris à te batte ?)

Et c'est parfois par des rencontres aussi fortuites que celle-ci que l'on devient ce que l'on est. Qui aurait pensé que la jeune Sidra, celle qui avait refusé de parler dans sa prime jeunesse, se retrouverait au lendemain de son sauvetage in extremis parmi une carvanne marchande d'esclaves, quelque part dans le désert Zuthan? Elle qui n'avait jamais vu rien d'autre que la cité d'Elda se retrouvait un peu par hasard dans un monde qui lui était totalement étranger. Elle ne saisissait pas grand chose de l'agitation qui se trouvait autour d'elle, ni même ce que l'on attendait vraiment de sa part. Mais elle comprenait une chose néanmoins: ces gens, quoique d'une banalité ennuyante à ses yeux, s'approchaient un peu plus de son idéal. Toute la matiné elle s'était affairée en silence à ses observations. La caravanne était composé d'une vingtaine de personne tout au plus. Parmi eux la grande majorité se trouvait être des personnes de sa race. Quoi que distante, elle était animée d'une étrange curiosité pour les non ilythriiri - ceux qui n'étaient pas Drow. Elle n'avait jamais vu de pareils gens qui ne parlaient pas ou à peine sa langue. Leur idiome lui paraissait barbare et leurs intonations bien trop appuyées pour être tout à fait vraies. Des menteurs, des fourbes serpents pensait-elle. Elle s'en méfiait et préférait ne leur accorder aucune attention; après tout n'était-ce pas les mêmes genres d'hommes et de femmes qui se trouvaient suppliants dans les cages ?
La première fois qu'elle vu ces corps entassés dans les chariots tirés par des boeufs, elle ne savait trop quoi en penser. Elle n'avait jamais connu de personnes enfermées contre leur gré bien qu'elle en connaissait l'existence. Les gens du Puy était plutôt friand de ces prises - ces vermines comme ils se plaisaient à les nommer. Devant elle, elle ne percevait qu'un enchevêtrement mal habile de corps malingre. Ils parlaient peu, sinon pour se plaindre à leurs geôliers dans la même langue qu'elle ne saisissait pas. Mais la vie était ainsi et la jeune Eldéenne ne partageait aucune compassion pour ces êtres qui étaient de toute manière voués à mourir un jour. Ici ou là-bas, maintenant ou demain.. Qu'est-ce que cela changeait au fond ?
Les jours suivant lui furent utiles pour apprendre le rôle de chacun. Ils transportaient alors une vingtaine d'esclaves – deux étaient morts la journée d'épuisement ou de malnutrition -, des pertes acceptables selon Myste qui tenait chaque fin de journée un journal de compte. Elle lui avait d'ailleurs assurée que son travail, s'il lui paraissait convenable, serait récompensé: deux pièces par semaine. Un maigre butin mais Sidra n'avait jamais eu besoin d'argent. Elle ne savait pas même à quoi lui servirait ces deux pièces mais cela lui importait peu. Elle se contentait de faire ce qu'elle avait toujours fait le mieux. Elle observait avec minutie les attitudes de chacuns et peu à peu, elle en comprenait les caractères et affinités. La troupe comprenait près de vingt-cing personne, dont la plupart était des mâles. Une dizaine d'entre-eux portaient des armes et des fouets, chargés de la sécurité du convoi. Les autres étaient afférés à des tâches diverses: monter le camp le soir venu, la nourriture, le soin des bêtes... Une organisation que menait d'une main de maitre sa sauveuse.
D'aucun ne la craignait plus que ces gens là. Malgré son flegme et sa patience, elle avait cette autorité naturelle qui faisait d'elle une créature redoutable. Elle l'avait dépeché pour trouver quelques informations mais elle n'avait rien à lui rapporter. Personne ne semblait oser se plaindre et malgré le labeur, elle les trouvait plutôt heureux de leur sort. Leur solde n'était pas grande et fluctuait d'une livraison à l'autre mais ils étaient certes mieux lottis que leur précieux chargement. Un chargement qu'ils menaient jusqu'à une ville lointaine qu'ils appelaient Sol'Dorn.
Oh, elle en avait déjà entendu parler. La cité Doeben, construite par l'ost de sa race. C'était Zaknafhein qui l'avait instruite à ce sujet. Il y était allé, une fois ou deux. Une cité magnifique, loin des galeries souterraines d'Elda disait-il. Elle était tantôt baignée de soleil et innondée de chaleur puis, au gré de la nuit, devenait à l'image du désert aussi froide que les montagnes enneigées. Il lui racontait comment elle était gérée, comment il était facile de commercer avec ces gens qui – sans avoir reniés tout à fait leur patrie mère – s'étaient détournés de son sein protecteur. Au moins était-il pieu. Sidra aussi l'était et chaque naissance de jour voyait le même spectacle. Elle psalmodiait à l'écart du campement et des esclaves qui ne semblaient de toute façon pas comprendre sa langue. Son corps frêle et marqué de cicatrice à nu, elle offrait tout ce qu'elle était. Elle se délestait des besoins mortels pour, une fois dans l'ailette, s'adonner de toute son âme à ce qu'elle était vraiment. Elle offrait aux Dieux un instant fugace, elle voulait s'absoudre des erreurs qu'elle allait comettre et de celles déjà commises. Un petit couteau et un mélange d'ocre et d'eau trônait près d'elle. Le premier était son vieil ami et son plus grand ennemi. La lame chatoyante dans l'aurore caressait sa peau toujours plus profondément. Ses pieds, ses jambes, son ventre, son torse, ses bras, son cou. Elle s'évertuait à toujours trouver des endroits intactes, vierge de toute trace et de toute douleur. Parfois cela lui faisait mal. Elle qui avait appris à ne pas offrir à ceux qui étaient corruptibles des sentiments qui la ratacheraient à eux et pourtant. Pourtant parfois, tant la chair était à vif, tant le sel de sa transpiration sur la plaie fraîche était douloureuse, elle versait une larme dans un silence respectueux. Prenez, qu'elle disait. Prenez ce fardeau d'humanité que vous m'avez infligé ! Oui, à ces moments là, elle les détestait ses parents indignes qui avait refusé de lui offrir leur monde. Qui l'avait mis à l'épreuve dans un autre univers où elle n'avait définitivement pas sa place. Alors, afin de sentir la chaleur réconfortante de son foyer, elle prenait l'ocre et le mélangeait à l'eau. De la pâte qui naissait dans le bol, elle en prélevait assez avec son doigt, commençant à tracer avec précision des cercles et des traits, des points et des lignes. Elle psalmodiait dans les balbutiemment de la vie, alors que l'aube éveillait peu à peu les gens de la caravanne.
Pourtant jamais on ne lui posa de question. Elle avait plusieurs fois apperçu Myste la regardant dans le lointain matin. Elle regardait sans un mot alors que la jeune Eldéenne ne voyait plus le monde qui l'entourait. Elle refusait de le voir. Et si le mystère de ces dessins restait entier, la curiosité ne fut pas assez forte pour prendre le pas sur ce qu'elle croyait être du respect – ou de la crainte peut-être.
Ce n'est qu'au bout d'un mois entier qu'ils bifurquèrent vers la cité des berges de l'Oliya. La vieille avait passé de nombreuses tractations dans quelques petits villages, elle avait ajouté sept hommes à sa cargaison. Les charrues étaient si pleines que les cages semblaient bien trop petites pour leur contenu et même les boeufs tractaient avec peine leur lourd chargement. Plus on s'approchait de la grande ville, plus la langue se faisait étrange. Ceux de sa race parlaient entre eux dans sa langue maternelle bien que quelques particularités, de la région certainement, lui rendait la compréhension parfois ardue. Qu'ils lui semblaient étranges tout ces gens. Loin du confort de son temple et de la réconfortante proximité d'Elda, Sidra se trouvait bien démunie face au monde qui se dévoilait petit à petit devant elle.
La cité chaude, enclave du Puy dans les terres occidentales, était telle qu'on l'avait décrite. La caravane arrivait par les berges du fleuve si bien qu'ils ne tardèrent pas à appercevoir le port. Quelques navires y étaient amarés mais ce n'était pas là le véritable moument. Elle resta un moment muette devant l'agitation des hommes qui gueulaient grassement. Certains d'entre-eux étaient assis sur une caisse, pariant pour on-ne-sait-trop quel jeu. Alors, dans un souvenir amère, elle esquissa un sourire. Finalement les gens ne changeaient jamais et malgré l'éloignement avec ce qu'elle avait toujours connu, elle se sentait un peu chez elle. Les rues sentaient la pisse, chauffée par le soleil cuisant d'une belle journée de printemps. Pas même la brise parvenait à diminuer le calvaire des mortels. Ils traversèrent le quartier des Doeb, des habitations faites des moyens du bord à l'hygiène douteuse qui, malgré la chaleur baignaient dans une bouillasse peu engageante. A l'époque, la population de sa race restait largement dominante, bien qu'on voyait de ça de là quelques curieux à la peau claire s'installer. Des hommes stupides ou courageux, elle n'aurait su le dire.
Le quatrième Ost tenait la ville grâce au fort qui prenait place au centre de la cité. Une bâtisse impressionnante pour la petite qui n'avait jamais rien vu que ses galeries et les tentes du désert. On y voyait patrouiller avec la ferveur militaire qu'elle connaissait si bien les soldats qui n'accordèrent pas même un regard pour leur chargement. C'était une enclave qui malgré sa ressemblance avec sa soeur du Puy avait soif d'indépendance. La zone était pacifiée et rien n'engageait à ce qu'elle redevienne une terre de conflit. Des échoppes s'étaient installées et peu à peu le monde affluait vers l'une des capitales dormantes de l'ouest de l'Ithri-Vaan. C'était d'ailleurs dans ce quartier qu'ils se rendaient. Myste avait fait disposer son personnel non utile. Ils pourraient dépenser leurs salaires comme bon leur semblait. Ils resteraient dans la ville un peu moins d'une énnéade, lui avait-on confié. Le temps, certainement, de vendre la marchandise et de se préparer à une nouvelle expédition dans le désert Zurthan.
Ils marchaient à travers les petites rues d'une ville en efervescence et malgré le relatif encombrement de ces dernières, Sidra se plaisait à contempler le monde. Les pierres des petites batisses lui rappelait les siens – quoi qu'elle avait toujours vécu dans un temple. Mais ce qui raviva la flamme de ses souvenirs était beaucoup plus sombre et intime. Sol'Dorn restait une cité militaire et les passages de la garde était nombreux, si bien qu'au carrefour entre une placette et la grand'rue, la familiarité et le malaise s'emparèrent de la jeune Eldéenne. Elle repensa à Zaknafhein, à ce matin là où elle était venue beaucoup trop tôt à la caserne. Oui, elle se souvenait encore des moindres détails. Les Dieux l'avaient mené ce jour là à s'émanciper du joug de son géniteur qui ne pourrait jamais comprendre le fardeau de sa naissance. Ils avaient ensorcellé sa main et son arme et empoisonné son esprit; non. Ils l'avaient éveillé. Si après tout ce n'était pas une perte - la Mort ? Et si, par leur grande mansuétude, les Divins avaient offert à la douce Sidra l'opportunité de s'élever plus proche d'eux encore ? Une renaissance.
Alors que les tractations se finissaient, la marchandise largement vendue – tantôt à quelques négoces venus des contrées occidentales, tantôt à quelques familles aisées – Myste s'intéressa de nouveau à Sidra. La vieille était une femme mystérieuse mais dont l'aura forçait le respect. Elle aurait fait baisser les yeux à la moitié de la garnison de la ville si cela avait été nécéssaire. Son masque noir cachait à merveille ses émotions et malgré ses quelques sourires on devinait au fond d'elle un mépris intense pour la plupart des choses qui l'entourait. La plupart, car malgré sa candeur maladroite, la jeune éldéenne semblait épargnée du jugement acerbe de la dame. Elle ressemblait parfois à son géniteur et d'ailleurs la similitude l'eu troublé plus d'une fois. Elle avait pour elle un étrange sentiment d'affection, si tant est qu'elle puisse ressentir ce genre de choses. Et si cette conscience la réconfortait alors que tout autour d'elle était naissant, elle ne pouvait la tolérer – et pire encore, elle l'exécrait.
"Nindel k'lar gow saph natha shu"
(Cette cité pue la merde)
Une phrase d'une éloquence particulière et d'une profondeur sans égale. L'Eldéenne resta muette devant tant d'atticisme, si bien que seul le rire tonitruant et quelques peu forcé de sa Sauveuse eut raison du silence. La place du marché se vidait après les enchères et bientôt, il ne restait qu'une petite poignée de curieux ou de visiteurs, venus ici pour la singularité du lieu plus que pour sa beauté.
"Usstan alu ulu l'yath. Xun dos ssinssrin ulu doer xuil uns'aa ? "
(Je vais au temple. Veux-tu venir avec moi ?)
Cette fois-ci le mutisme était celui de la surprise. Bien entendu elle acquiessa mais l'interrogation l'avait laissé coi. Après tout, les deux femmes n'avaient jamais réellement entretenu de conversations intimes, si bien qu'il lui paraissait alors improbable la minute précédente d'entendre – ou même de proposer – une telle proposition. Il n'y avait rien de plus sacré aux yeux de Sidra. Peut-être savait-elle ? Non, il était impossible. Micedra et Zaknafhein avait tout deux gardés le secret jusqu'à leur mort et la jeune Eldéenne à la chevelure immaculée n'avait jamais eu à le dire à qui que ce soit. Elle avala une bouffée d'air chaud comme si son corps en manquait. La Sauveuse fronça les sourcils. Non, elle n'imaginait pas le trouble qu'elle venait de créer.
"Xunus dos talinth nindel Usstan xuat rin'ov ortelanth ? Nindel Usstan denied ussta Phraktos... dosst Phraktos ? "
(Croyais-tu que je ne priais jamais ? Que j'avais renié mes Dieux... Tes Dieux ?)
Il n'y avait pas d'amertume dans sa voix. La question était sincère. Alors elle se rappela. Elle se souvint du visage de la doyenne qui, chaque matin regardait ses offices, ses scarifications et ses peintures. Elle n'avait jamais soulevé le moindre problème à ce sujet, ni même jamais abordé le propos en sa présence. Alors, était-il possible qu'elle ne l'avait pas fait parce qu'elle savait une partie de la vérité ? Sidra était interloquée. Comment pouvait-on vivre chaque seconde, de chaque minute, de chaque heure de chaque jour avec une personne et en savoir si peu ? Certes, elle n'était pas loquace, mais ses années de silence lui avait permis d'en apprendre bien plus sur les Mortels qu'elle n'aurait voulu en connaitre. Et aujourd'hui, elle était aussi clairvoyante qu'une aveugle dans un endroit inconnu. Elle n'avait rien vu.
"Usstan kat z'reninth naubol "
(Je n'ai jamais rien cru)
La jeune drow s'arrêta un bref instant pour regarder son interlocutrice. Ce n'était définitivement pas une femme banale.
" Taudl jhal dosst erg'les zhahus ves brornin. D'heen, Dorn alu xuil dos "
(Pardonnez-moi, votre question était très surprenante. Bien sûr, j'irais avec vous)
"Al, doer pholor "
(Très bien, allons-y)
Elle lui adressa un sourire. Pas un de ceux qui exprime la joie, non, celui là était bien plus mystique et elle n'en saisit pas totalement le sens. Surement était-ce une forme de reconnaissance, ou de curiosité. Peut-être même les deux. Ce qu'elle appris ce jour-là faisait plus sens que le reste, après tout. Qu'importe qu'il s'agissait alors de bonheur ou de dégoût. Elle croyait et cela valait bien tout les sourires du monde. Elle partageait au moins une chose avec cette femme qui l'avait sauvé de la chaleur cuisante du désert et qui, contre toute probabilité lui avait offert une place dans sa caravanne, un métier qu'elle pourrait exercer à sa droite, dans l'ombre. Oui, cette Myste était réellement une personne pour qui elle était redevable et la Fille des Dieux se devait, tout comme ses parents, de payer ses dettes.
Aussi apprit-elle à la faveur d'un office et, plus tard, dans l'auberge où elles s'étaient installées, qu'elle avait fait de son petit commerce l'un des plus florissant de la région. Plus encore, sa caravanne comptait parmi les plus grandes qui balayaient le désert entre Sol'Dorn et Elda. Elle qui avait grandit dans les sphères marchandes de la cité Puysarde avait rapidement su sortir du lot alors que tous se gaussaient d'elle. Ce qu'elle avait battit, elle l'avait fait grâce à la sueur de son front et à de lourd sacrifice. Jamais elle n'avait pu aspirer à s'installer quelque part durablement et, par extension, jamais elle n'avait pu donner la vie. C'était là, disait-elle, une des choses qu'elle regrettait le plus. A présent, elle était une négoce fort inffluente et son petit commerce faisait vivre quelques uns des habitants de la cité Doeben. Mais elle aspirait à plus encore. Qui aurait pu lui en vouloir ? Cette femme avait une intelligence peu commune et sa conversation n'était jamais indigne d'interêts. Même si Sidra n'y participait que peu, préférant l'écouter que discutailler sur sa vie, elle se nourrissait des aventures de cette mortelle qui, pour une fois, méritait son attention. Elle était bien loin de tout ceux qu'elle avait pu cotôyer dans sa prime jeunesse. Bien loin de ces stupides personnes s'acharnant à reproduire chaque jour les mêmes erreurs, s'ancrant un peu plus dans un monde qui n'était qu'un leurre. Mais ils l'apprendraient que trop tard et ils accordaient si peu de considération à la jeune Eldéenne qu'elle ne voulait pas leur offrir l'opportunité de s'absoudre avant de rejoindre les Divins.
Ce n'était pas cequ'elle ressentait pour Myste. Elle sentait – non, elle savait – qu'elle était de celles qui pourraient comprendre. Après tout, elle lui avait avoué avoir sacrifié son visage pour les Dieux, faute de pouvoir les honnorer chaque jour. C'était une personne pieuse qui avait certes le sens du devoir mais qui n'oubliait pas l'essentiel: la vie n'est qu'un bref passage dans un univers tangible. C'était une solution qu'elle avait pris, elle le savait, à contre-coeur. Elle-même ne pouvait s'imaginer devoir renoncer à ses ablussions quotidienne. La vie matérielle était bien trop tentante, même pour l'enfant des Dieux. C'était d'ailleurs un parcours iniatique, une épreuve à passer; si elle avait été trop facile, si les choses n'attiraient pas autant le résultat aurait certainement été faussé. Non, il fallait que les choses soient compliquées et douloureuses. Que les choix faits fassent ressortir le meilleur comme le pire. A cette pensée était toujours accrochéle visage de son père. Elle serrait alors la mâchoire. Il l'avait trahit. Il avait mentit à la fille des Dieux. Celle qu'on avait ordonnée de mettre au monde, celle qui avait causé sa mort. Oh, parfois elle s'en voulait, c'était certain. Il lui avait tant appris, tant offert... Mais tout ce qu'il avait un jour donné, il l'avait repris le lendemain. Aujourd'hui elle ne ressentait plus rien d'immuable pour lui. Elle se souvenait simplement, du moins l'avait-elle décidé. Ses vrais Parents lui donneraient la force de s'affranchir de ces futilités.
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Sidra Shi'bavatae Micedra
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MessageSujet: Re: Sidra Shi'Bavatae Micedra [En cours]   Sidra Shi'Bavatae Micedra [En cours] I_icon_minitimeSam 26 Mar 2016 - 15:51


Et Sidra se laissa mener. Alors qu'hier encore elle ne savait pas où aller, aujourd'hui elle pouvait jouir d'un emploi et d'une vie où personne ne semblait la juger. Un masque de fumée certainement, mais elle ne se sentait pas épiée ni même moquée. Elle était libre de ses choix et personne ne l'obligeait à quoique ce soit. Chaque matin, avant l'aube, elle continuait ses prières qu'elle ne comprenait pas – une langue bien plus ancienne que celle qu'ils parlaient présentement. Son corps mutilé laissait apparaître de plus en plus d'estafilades où le sang s'échappait un peu. Autour, et même dessus quelques fois, se répétaient les mêmes symboles mystiques. Tantôt des lignes, tantôt des cercles, chacun représentant avec respect une divinité. La jeune Eldéenne se comportait comme elle avait toujours fait: parlant peu, elle observait chacun des quidam qui accompagnait sa Sauveuse et elle-même. Elle décelait la moindre contrariété, elle apprenait leur excécrable platitude. Qu'ils soient d'ici ou du Puy, les mortels étaient attachés à des choses sans valeur, se préoccupant plus de broutilles que de ce qui leurs serviraient réellement. Ils nourissaient le corps avant d'alimenter l'esprit.
Chaque fois que la caravane chargée d'esclaves revenait en ville, elle voyait la vraie facette des gens qu'elle cotoyait. Alors qu'elle et Myste préféraient une fois les ventes faites, partir dans la quiétude du temple, beaucoup allait dépenser leur salaire en fille de joie. Ils allaient boire et jouer, perdre encore un bout d'eux-même pour quelques souverains. Parfois même pour y perdre plus que gagner. Par moment, elle arrivait à trouver tout cela triste. Au fond n'avait-il aucune croyance ? Non, ils étaient juste perdus dans un univers bien trop tentant. Ils n'avaient pas force de l'enfant des Dieux pour résister aux attraits fort charmants de la vie. Mais la mort leur apporterait bien plus, s'ils daignaient se préparer à ce jour. Au final, elle découvrait avec la même pitié qu'ils avaient – pour la plupart – une crainte profonde et immuable de la fin inéluctable. Ils étaient terrifiés par cet inconnu dans lequel tous plongerait un jour. Non, pour ça, elle ne pouvait leur en vouloir. On lui avait offert à la naissance un savoir particulier. Si elle connaissait les attraits du deuil, les autres en ignorait tout. Elle ne les blâmerait pas.
Et plus les jours filaient, plus elles se parlaient. Les conversations restaient restreintes mais Sidra ne pouvait s'empêcher de l'écouter. Sa sauveuse, par certains aspects, lui rappelait sa propre existance et cela la troublait. Si elle savait. L'Eldéenne voulait l'aider à se détacher des préoccupations matérielles, alors, quand le moment était opportun, elle lui adressait une phrase, parfois deux. Ce n'était pas grand chose mais pour Sidra c'était suffisant pour dire ce qui valait vraiment la peine d'être énnoncé. La caravanne avait repris la route depuis un moment déjà et elle essayait au mieux de remplir sa mission. Parfois, elle n'arrivait pas à comprendre l'idiome étrange de ces gens qui la regardait d'un oeil méfiant. Elle n'avait, en réalité, qu'un investissement réduit dans la vie de la troupe et pourtant il lui semblait si grand, si honorifique...
"Dorn screa ulu dos"
(Je vais t'apprendre)
Myste ne s'engageait jamais à la légère et pourtant, plus le temps s'écoulait et plus elle lui semblait faite de petites faiblesses en sa présence. Bien sûr, elle ne s'en gaussait pas, elle était simplement intriguée. Chaque matin elle partageait ses ablutions, ses rites et ses coutumes avec sa Sauveuse. Elle l'avait découverte bien plus pieuse qu'elle n'aurait jamais imaginé et lui offrir une chance de la rejoindre dans l'Au-Delà était une consolation. Elle se consolait de ne pas pouvoir lui avouer sa parenté divine et tout ce qu'elle savait. Que ce monde n'était qu'un passage, une épreuve pour qu'Ils jugent qui se montrait assez digne pour les rejoindre. Que les attaches mortelles n'avaient aucune importance et que la procréation n'était pas la chose la plus importante, que ce qu'ils laissaient n'avaient aucune saveur une fois la mort venue. Elle aurait voulu lui dire, en eldéen comme en langue commune. Au fond, elle avait un peu d'espoir encore pour ceux qui la côtoyaient. Quel étrange sentiment que celui là.
Elle apprit autant que possible durant trois années. Elles sillonnaient le désert, revenant toute les mi-années à Sol'Dorn pour vendre leur butin. Sidra était une élève appliquée mais l'empreinte de son pays ne semblait pas prête à laisser place à une autre. Elle parlait avec un accent fort et tranché, vague souvenir du temple de sa naissance. La langue commune – du moins était-ce comme cela qu'ils l'appelait – était barbare, la langue des races de mauvais sang et pourtant, Myste lui avait soutenu qu'il était important qu'elle la connaisse. Elle lui faisait confiance et pourtant elle ne se séparait pas de son inflexion qui rendait la moindre de ses phrases difficile à comprendre. C'était peut-être là un bien. Elle comprenait de mieux en mieux le monde qui se dégageait et si quelques lacunes subsistaient, ce n'était que pour mieux lui rappeler son essence: elle était la fille des Dieux. Ceux qui n'étaient pas de sa race était des créatures pour la plupart impies qui ne reconnaissaient pas la valeur de ses Parents. Elle avait essayé une fois de parler à l'un d'entre eux. Un homme de belle carrure que le voyage avait épuisé. Et rien de productif n'en fut déduis. Non, ces hommes là étaient plus des bêtes que des mortels. Leur âme n'était pas de celles qu'il fallait sauver, ou même qui un jour paviendrait au royaume céleste.
Elle ne sut jamais si la chance avait miraculeusement sourit à la vieille Eldéenne ou si sa rencontre avec elle-même avait porté ses fruits aux yeux de ses Pères. Peut-être l'un et l'autre, après tout ils n'étaient pas antinomiques. Les affaires de la caravanne se portaient bien mais l'été était brulant cette année là. La maladie se propageait dans la cargaison. La fièvre faisait délirer ces hommes et ces femmes. De grosses gouttes de sueur coulaient, vidant leur corps fébrile de son eau et de son sel. Puis, après quelques jours d'hyperthermie, d'immondes pustules apparaissaient : la chair se nécrosait à vu d'oeil. Ce n'était pas beau et les cadavres en sursit puaient la mort. La malemort frappait si vite qu'en quelques jours ils étaient obligés de bruler le corps du pauvre malade. On sépara dans un premier temps les gens, espérant ainsi qu'il ne s'agissait que d'un affre mrobide restreint mais peu à peu, les gens contractaient la fièvre et il était trop tard. C'est ce qu'il arriva à sa Sauveuse. Avant même qu'elle n'ai eu le temps de la remercier, la vieille s'était éteinte dans un amas de peau bouffée par la menace noire. Une mort qui la libérait enfin des contraintes mortelles, elle le méritait tant... Oui, ce soir là, elle ne dormit pas, préférant faire quelques prières, dessinant sur le cadavre les mêmes dessins que sur sa peau. Elle avait rejoint le monde immatériel et veillait auprès de ses Parents sur la vie de Sidra.
C'est peut-être là une partie de la raison qui poussa la belle à reprendre la tête de la caravanne. Les autres, s'ils ne la craignaient pas tout à fait voyaient en elle une meneuse. Elle avait su, quand tout le monde n'osait approcher des malades, reprendre les choses en main. Seulement quatre personnes de l'équipe – dont Myste – avaient finalement trouvé la mort. Ils avaient pour elle une forme de reconnaissance mais elle s'en moquait. La belle Eldéenne au orps zebré de stigmates avançait là où le vent la portait. Si elle devait vivre dans ce monde, elle en observerait les usages cependant elle n'oubliait pas ce qui comptait réellement : l'après. Quelle délivrance sa Sauveuse avait dû ressentir. Elle était dans un univers nouveau où plus rien de tout cela n'avait d'importance. Ni la peur, ni la douleur, ni la fatigue n'entrait au royaume des Dieux. Il n'y avait que la valeur de l'âme et la dévotion de l'esprit.
Alors, quand la lame faisait couler son sang sur le sol sec du désert, elle demandait pardon. Pardon pour ces jours d'ignorance et de détachement. Elle se lavait de ses attachements matériels, eux qui avaient si peu de sens à ses yeux – et aux yeux des Immortels. Parfois, lorsque la plaie lui était un peu plus douloureuse que les autres, elle interprétait cela comme si elle avait été trop loin. Alors, petit à petit, elle apprit à se réguler tant dans ses tâches de mortelle que dans celles réservées à ses Dieux. Un compromis qui la torturait souvent, mais qui, au final, lui semblait bien plus équilibré qu'il n'y paraissait.
Reprendre les affaire de la vieille drow ne fut pas une mince affaire. C'était une femme ordonnée et de confiance pour la plupart, qui ne voyait pas son entichement pour Sidra – qu'ils appelèrent ironiquement la Muette – d'un bon oeil. Elle ne parlait que lorsque cela était utile, le comprenait-il vraiment ? Certainement pas. Ils la regardaient avec dédain, se gaussant de sa crédulité ou de son accoutrement. Cela ne la touchait pas. Elle avait durant des années observée ces individus malhabiles. Elle savait qu'au fond, elle valait beaucoup mieux qu'eux.
"Avez-vous choisi un nom ?"
Un nom ? Voilà encore une chose étrange que lui imposait ce monde d'impies. Elle n'avait jamais réfléchit à cela et son froncement de sourcil n'eut pour effet que d'agacer l'acheteur. La jeune Sidra ne pouvait se permettre de compromettre une vente. Alors elle se mit à réfléchir. Le temps s'était suspendu. En avait-elle réellement besoin ? Bien sûr que non. Il n'y avait d'autre besoin que ceux de l'esprit. Cela faisait tristement partie des choses que les Mortels avaient créé pour combler le vide. Elle n'avait aucun vide à combler, d'ailleurs se serait-elle peut-être mieux portée si elle n'avait pas à se plier à toute les exigences de ces gens qu'elle détestait. Cependant, qu'était une poignée d'années face à l'eternité ? Alors, elle respirait, acceptant de sacrifier encore un peu plus ses principes.
"Sidra Shi'Bavatae Micedra"
Elle y avait longuement pensé, peut-être un peu trop avant de le prononcer à haute voix. Il y avait de quoi. Voulait-elle à jamais porter le fardeau de sa naissance ? Et bien oui. Elle avait choisit le nom de sa défunte mère, un souvenir amère pour se rappeler qu'en ce monde, même les gens les plus proches de soi peuvent être aveugles. Ce n'était qu'une catin, elle le savait et pourtant elle n'arrivait pas à s'enlever de la tête que ça aurait pu être différent. Et si Zaknafhein Shi'Bavatae n'avait pas, ce jour là, pourfendu la garce ? Et si elle ne lui avait pas répondu avec une telle insolence ? Elle l'avait élevé et protégé malgré tout, malgré son manque d'amour et sa conviction personnelle. Au moins, si elle n'avait pas été une mère aimante, elle avait été une mère tout de même. La vie au temple avait la rudesse des jours sombres sur les Monts, mais parfois sans qu'on ne s'y attende vraiment, elle prenait l'apparence d'une fleur délicate qui ne demandait qu'un peu d'eau pour s'épanouir à la faveur d'un rayon de soleil.
Et elle porta le nom avec la même ardeur que ce qu'il semblait lui faire éprouver. N'était-ce pas compliqué de porter à la fois le nom d'un père que l'on avait tué et celui d'une mère qui ne l'avait jamais réellement aimé ? Au moins, pensait-elle, elle se souvenait. Elle se rappelait chaque jour le chemin qu'elle avait un jour parcouru et celui qui la séparait encore de sa tâche finale. Elle se fichait des sacrifices et des pertes, des plaintes et même de la douleur. Lorsqu'elle fermerait ses yeux à jamais, elle mériterait sa place parmi les siens, parmi les Dieux qui l'avaient enfanté un soir à la faveur de Zaknafhein et Micedra. Non, elle n'oubliait pas. Elle se souvenait à la perfection de ces gens qu'elle avait un jour observé alors qu'elle ne parlait pas. Une folle, disaient-ils. Une enfant qu'on avait oublié de tuer à la naissance. Des gens qui ne méritaient pas sa considération mais auprès desquels elle avait appris. Chaque individu qu'elle avait pu un jour croiser avait apporté son lot de connaissances. Des plus petites informations aux plus sérieuses, elle pouvait à présent jauger une personne en quelques minutes. Nulle besoin de conversations lassantes, ou de bienséance fatigante. Il n'y avait dans Sidra qu'un amoncellement de petits savoirs et d'observations aiguisées sur ce qu'était la vie et son sens.
L'on eu pu relater les huit années qui suivirent, mais cela n'aurait eu qu'un fâcheux sentiment d'éternel recommencement. Elle parcourait toujours le désert, cherchant quelques esclaves bons marchés. Elle traitait aussi avec les petits villages perdus, leur offrant quelques services – certes cher payés – mais qui leur était indispensable. Cela la rendait influente et beaucoup craignait son courroux. Si elle décidait de ne plus passer, c'était une petite mort pour chacun des habitants de ces contrées désertiques. Cela ne lui posait cependant aucun soucis. Elle menait la barque d'une main de fer. Elle connaissait les mortels et leurs vices, leurs déboires. Avantage certain sur ces êtres ramollis par la ferveur des choses tangibles. Mais elle priait autant qu'elle pouvait. Plus elle côtoyait ces gens simples, plus leur avenir plus ou moins proche lui semblait compromis. Beaucoup ne pourraient prétendre aux Royaume de l'Esprit. Quand leur corps cessera de vivre, ils ne seront plus rien, damnés dans un abysse noir et sans fin. Peut-être ressentait-elle une forme de pitié pour ces gens là, ces désabusés qui, leur dernière heure venue, ne pourraient s'élever parmi les Divins.
Alors elle prenait toute la mesure de son savoir. S'ils savaient, agiraient-ils de la même manière ? Elle en doutait. Toute personne voulait atteindre un jour le royaume Céleste, quel qu'en fut le prix. Et elle, elle savait. Elle savait comment l'abnégation et la foi pouvait élever l'esprit au dessus des préoccupations matérielles, au dessus de ce monde tangible sans saveur. La vraie raison de vivre commençait à la mort. Le dernier souffle était la délivrance et enfin, le jeu s'arrêtait.
Huit années. Un temps considérablement court dans la vie d'un eldéen. Une fraction de seconde, un battement de cils, une expiration. Qui aurait pu croire que cela aurait suffit ? Bien sûr, elle n'enlevait pas le mérite de Myste. C'était en grande partie son œuvre, elle n'avait, au final, que repris le flambeau. Mais elle était plutôt fière. Fière d'avoir réussit à s'insérer malgré elle dans un monde qu'elle haïssait pour ce qu'il était. Fière d'avoir pu réaliser quelque chose qui marchait. Au bout de huit ans, et grande du succès florissant de ses affaires, elle s'installa à Sol'Dorn pour gérer son commerce. Elle possédait assez de fond pour s'offrir non loin de la place où était vendues les marchandises, une petite échoppe qu'elle transforma en bureau.
Elle y gérait d'une main de maître ses deux caravanes et ses recettes, les ventes et les payes des employés. Qui aurait pu croire que la petite Muette du temple d'Isten allait devenir un jour une femme de commerce intelligente, réussissant à obtenir une vie confortable là où la concurrence émergeait tout les jours pour mieux saboter ses efforts. Les Dieux la remerciaient certainement. Non, ils l'incitaient à poursuivre dans sa lancée, à continuer à briller au milieu d'une foule de personnes déterminées. Seules les plus assidues et les plus pieuses pouvaient être touchées par la grâce des Divins. Et, petit à petit, Sol'Dorn devint un de ses terrains de jeu. Bien sûr, le succès ne fut pas immédiat et la tâche parut maintes fois ardue – peut-être même assez pour que la Sidra veuille en finir avec ces histoires et rentrer là où tout avait commencé. Elle dû faire face à quelques imprévus, à des mutineries et des contrats foireux. Mais n'était-ce pas là le lot de tout les commerçants ? Jamais elle n'aurait cru un jour avoir la force nécessaire à venir à bout de ces problèmes qui non content d’apparaître, se multipliaient devant ses yeux.
Alors, comme une solution à tout, elle se rendait aux temples. Là était le sérieux avantage de la cité Doeben. Dans le silence et les quantiques qu'elle connaissait par cœur, elle tentait de trouver des solutions à chacun de ces maux qui la hantaient. Il y avait pour l'Eldéenne, trois sortes de jugement : tout d'abord venait celui des autres. Un jugement de peu de qualité, biaisé par les vices qui sommeillaient dans les uns et les autres. Peut-être était-ce là la raison de son manque de confiance et de son mutisme quasi permanent ; ils ne méritaient aucunes attention, ces êtres routiniers qui ne semblaient accorder d'importance qu'à leur existence matérielle. Pauvres âmes. Venait ensuite son propre jugement. Lui seul prévalait aux millions d'autres car il n'avait pas cet attachement somme toute mortel aux choses. Sidra avait aboli tout lien avec une quelconque existence physique, préférant concevoir la vie comme on lui avait toujours inculqué. Enfin, apparaissait le jugement de valeur, le seul à qui quiconque pouvait se fier sans crainte. Il prenait beaucoup de noms, beaucoup de formes mais n'était issus que d'une seule essence... Et qu'importe les croyances profondes, qu'importe les vices et l'éducation reçue, Ils étaient toujours là, à offrir à celui qui le voulait vraiment un conseil avisé et une repos mérité. Les Dieux étaient de tous les plus sages et les plus clairvoyants. Ils offraient l'immortalité à qui le méritait. En dehors de toute foi, les Divins étaient bons. C'est ainsi que les parents de la petite trouvèrent une solution à chacun des problèmes en son temps. Tantôt par la diplomatie, tantôt par la force, parfois par la ruse, elle réussissait à s'illustrer peu à peu comme une femme de poigne que quelque uns craignaient mais que tous semblaient respecter.

Près de vingt années s'écoulèrent prospère dans la ville aux portes du désert. Sidra avait vieilli – certains diront mûrit mais la vérité était là. Sa peau de jeune femme s'était transformé en celle d'une femme assurée, et quelques ridules venaient compléter avec finesse son aura imposante. Loin d'elle était l'image de la petite fille apeurée qui avait quitté le Puy. Elle avait beaucoup appris, et très vite. Elle avait su, par force ou peut-être par nécessité, ses convictions et sa vie de mortelle. Bien sûr, aucune de ses actions n'étaient vouées qu'à sa simple existence matérielle, elle y veillait scrupuleusement. Elle avait fait des choix et s'était retrouvée jetée dans un bain bouillant duquel elle avait su ressortir sans trop de dommage. La Muette était enfouie en elle tandis que s'imposait dans la ville Doeben Sidra Shi'Bavatae Micedra, grande marchande du désert. Un nom qui n'était par pour lui desservir. La grande cité des portes orientales de l'Ithri-Vaan était alors sous le joug du quatrième ost. Peut-être par respect, peut-être par souvenir dans cette culture méritocratique, on se rappelait souvent des mérites du très prometteur Zaknafhein. Bien sûr, elle n'y voyait là que la complaisance de quelques hommes d'armes qui se voyaient débarrassés d'un concurrent – il en était ainsi dans la culture Eldéenne – mais au moins cela lui assurait-il une certaine notoriété auprès des instances importante de la ville toujours en expansion.
Elle paraissait toujours aussi étrange avec ses nombreuses cicatrices, son masque et ses dessins qui tapissaient son corps pourtant pas si désagréable, bien que quelconque. Rares étaient les nouveaux qui se rendaient à elle sans une sérieuse raison ou sans avoir à passer de marché. Elle était de celle qui impressionne mais qui dérange, que l'on craignait plus par principe ou par méprise que pour ce qu'elle avait pu faire. Beaucoup de bruit circulaient autour de sa personne. Tantôt sorcière nécromancienne, tantôt mangeuse de bébé, elle se voyait affublée bien malgré de quelques histoires sordides dont elle se fichait éperdument. Plus encore, elle en était presque reconnaissante : au moins ne venait-on pas la troubler inutilement. Parfois une rumeur bien placée avait plus d'effet que n'importe qu'elle action.
C'était un matin frais, comme il en faisait rarement sur Sol'Dorn. Une journée qui s'annonçait belle dans un hiver un peu tumultueux. Les affaires n'étaient jamais les meilleures durant cette saison, les gens préféraient de loin la chaleur d'un foyer aux plaisirs simples qu'ils accourraient retrouver l'été venu. Sa petite échoppe était bien silencieuse, simplement troublé par le bruit d'une plume sur le papier. Elle n'avait jamais appris à écrire mais seulement à lire, pas même au temple. Et si Myste avait su lui inculquer la langue commune, elle ne l'usait qu'avec ceux qui n'étaient pas de sa race. Aussi avait-elle pour toutes ces raisons engagée une jeune femme – une eldéenne – qui avait été instruite ici, à Sol'Dorn. Elle avait à peine plus d'un siècle et son père comptait parmi les soldats de la ville. Une employée comme les autres, chargée de la rédaction de ses contrats et de l'entretien de son livre de comptes. Bien sûr, Sidra ne laissait rien au hasard et ces journées étaient particulièrement longues. Elle s'acharnait à vérifier chaque ligne avec minutie, veillant à ce que la jeunette ne profite pas du manque de son manque d'instruction. Pour cela, elle la payait grassement - bien plus qu'elle n'aurait dû, c'était certain. Mais cela assurait au moins un peu le dévouement de la jeune puysarde.
La cloche de la porte tinta et si elle ne leva pas la tête, c'était parce qu'elle était happée par sa ligne de compte. Les affaires marchaient bien, mais l'hiver ralentissait la vente des produits. Son commerce, quoi que privilégié dans la ville, restait néanmoins sujet aux mêmes affres que les autres et cela l'énervait. Le silence pesait dans la petite pièce aux vitres sales tandis que ses yeux parcouraient frénétiquement le vélin. Le visiteur se racla la gorge mais elle n'y prêta pas plus d'attention. Elle se devait de réussir dans sa tâche de gestionnaire, c'était là son épreuve. La fille des Dieux devait s'illustrer pour, au jour de sa mort, ouvrir les portes de l'immatériel.
« M'dam' excusera d'mon intrusion, mais j'ai une nouvelle qui pourrait l’intéresser ».
Elle reconnaissait la voix mais ne s'en formalisa pas. Sa jeune assistante, elle, lui offrit un pâle sourire de réconfort devant l'impassibilité de sa patronne. Elle était ainsi – s'il en avait été autrement, aurait-elle plus de crédibilité aujourd'hui ? Elle en doutait. Parfois, il faut abandonner sa coquille protectrice pour affronter le monde, et c'est ce qu'elle faisait. L'homme la pressa un peu d'avantage si bien que sa lecture fut nettement plus lente qu'à l'accoutumé. Mieux valait ne pas déranger Sidra dans ces moments là, à moins de vouloir le regretter plus tard. Ses mains ornées de symboles déposèrent avec délicatesse la feuille, qu'elle laissa à la jeunette le soin de ranger. Elle ne s'attarda pas plus d'une seconde sur son interlocuteur, l'invitant d'un geste muet à la suivre jusqu'à son bureau. L'Eldéenne ne parlait jamais inutilement. Les mots avaient une puissance qu'il fallait manier avec prudence, plutôt que les jeter grossièrement comme le faisait les mortels. Pourtant, ils avaient la même nature que les Divins dans leur royaume céleste. Ils étaient là sans qu'on ne puisse les voir, cadeau invisible et précieux qu'elle s'acharnait à adorer au moins tout autant que ses parents. Elle s'assit derrière un bureau en bois massif et croisa les mains, prête à écouter la jactance de l'homme qu'elle avait embauché un jour.
« Mon cousin est Thaarie m'dam'. Y s'appelle Benoit et il travaille comme commis. C'pas glorieux mais ça fait d'l'argent qui dit ! »
Ses doigts graciles vinrent masser ses tempes. La journée était définitivement trop longue à son goût. Ce soir, elle irait trouver quelques soldats prêt à se défouler avec elle, dans un combat singulier. Zaknafhein lui avait enseigné l'art militaire pour qu'elle puisse mieux s'élever et aujourd'hui, elle comprenait d'autant mieux le sens de son apprentissage. Au moins elle pourrait retrouver un peu ses Dieux quand le soleil déclinerait.
« Et Benoit y travaille dans un établiss'ment chicos m'dame ! Y m'a envoyé un' lett'e l'autr' jour, me parler d'sa femme et d'ses enfants voyez l'genre... Y m'a dit qui savait pas c'qu'il allait d'venir vu qu'son gagne pain allait fermer »
Elle le regarda un instant dans le mutisme pesant de la salle dans laquelle ils étaient assis.
« Es-tu venu pour me suggèrer un nouveau cuisinier ? »
Son accent prononcé mêlé à la langueur de sa voix donnait à chacune ses phrases un rythme particulier. Au final, elle ne souhaitait plus corriger ce défaut linguistique. Cela lui rapellait d'où elle venait. L'homme en face se décomposa un peu. Il ne savait pas s'il avait dit juste ou s'il avait délibérément insulter la marchande.
«  Euuuh oui, 'fin non m'dame ! Mais vous cherchiez à étendr' vos activités n'est-ce pas ? C'est pt't'être le moment, surtout qu'la maison est plutôt côté dans la ville. J'sais bien que vous ferez pas ça pour moi mais c'était ma mission d'vous trouver d'la nouveauté. Si vous vous installiez là bas m'dame vos affaires... »
Elle leva la main et l'homme se tût aussi tôt, quand bien même il n'avait pas fini sa phrase. Aussi simple était-il, la Shi'Bavatae ne pouvait que lui concéder son génie dans l'histoire. Bien sûr qu'elle voulait s'étendre et briller aux yeux des Divins. Si elle réussissait à prouver sa valeur, alors elle aurait accomplie son destin. Son enveloppe charnelle lui aurait été utile pour une fois. Elle se leva de son siège, fixant avec la même impassibilité son jeune interlocuteur qui, même s'il tentait de la cacher, tremblait de tout son corps. Était-elle si terrifiante ?
« Tu iras avec ma protégée. Vous serez ma délégation. ».

Et c'est ainsi que l'hiver de la huit cent quatre-vingt huitième année du dixième cycle, l'Eldéenne acquit son pied à terre dans la ville occidentale, que l'on surnommait avec délicatesse : la principauté aux milles visages. L'établissement se trouvait dans le nord de la ville, non loin du quartier marchand. Un emplacement idéal qui n'avait su être exploité correctement, ce qui expliquait la vente plutôt avantageuse de la maisonnée. La bâtisse manquait cruellement d'entretien et Sidra jura tant qu'elle pu en voyant pareil gâchis. Elle ne savait même pas si, une fois remise en état, elle pourrait en tirer quelque chose. Un pari risqué qu'elle avait prit tête baissée. Son père l'aurait largement admonesté pour une aussi stupide décision.  Zaknafhein n'était pas de ceux qui échouait et il avait – tant bien que mal – essayé d'inculquer les mêmes valeurs à sa progéniture. Après tout, la fille des Dieux ne pouvait se permettre d'échouer en quelconque situation, dans un combat comme dans un investissement immobilier.
Elle pestait tandis que ses yeux inquisiteurs se posaient sur la peinture de façade, autrefois blanche, qui s'écaillait pour laisser mortier et boiseries à nus. Le bois était mité en plusieurs endroits et il lui faudrait certainement changé tout le plancher qui subissait les aléas des passages. L'intérieur de la bâtisse à deux étages sentait fort mauvais et l'état des murs était à la mesure de celui de la façade. Le mobilier était vieux et branlant, les rideaux et voiles tâchés de on-ne-sait-trop quoi. La poussière avait prit place durablement et l'on entendait à la faveur d'un silence, les bruits des rats qui se baladaient dans leur royaume endormi. Les vitres étaient sales – pour celles qui n'étaient pas encore brisées – obstruant avec efficacité le soleil qui brillait pourtant à Thaar. L'escalier semblait être l'une des seules choses qui trouva grâce aux yeux de l'Eldéenne. La balustrade de bois était finement ciselé et les marches prenaient place au centre de la vaste entrée. La villa semblait construite autour de cet imposant édifice en son sein. A l'étage, des chambres à la literie douteuse et à la décoration vétuste prenaient place, achevant le peu d'espoir de la belle. La fille des Dieux n'en revenait pas : tant de beauté ainsi abandonnée. Oh bien sûr elle aurait pu mille fois laisser tomber et, à son tour, se débarrasser de ce bien acquit un peu trop vite. Pourtant, Sidra n'en fit rien. La villa était vaste, emplie de vide et de misère mais elle y voyait quelque chose. Ce n'était qu'un bien, cependant ce néant la consolait. Pire encore, la bâtisse était à son image. Un corps qui dissimulait un potentiel incroyable. Ni la peinture écaillée ni l'odeur de moisissure n'eut raison de sa détermination. La grande ville de l'Ithri-Vaan lui ouvrait les bras. Rien n'était dû au hasard, aussi ses Parents l'avaient-Ils sûrement envoyée là pour une bonne raison. Elle qui avait juré de vouer sa vie matérielle à bonifier son âme, elle se rendait aujourd'hui compte que pour un jour prétendre au royaume céleste, il lui faudrait rétablir la beauté autour d'elle. Non, pas la rétablir, mais la dévoiler à tous. Les mortels étaient des aveugles à qui il fallait rendre la vue et si elle ne le faisait pas, qui pourrait un jour accomplir cette tâche ? Un sourire s'étira sur son visage grisâtre tandis que ses doigts caressèrent le métal d'une tête de lit.
"  Dos phuul l'orthagyrrh "
(Tu es la rédemption)
Et durant trois années – aussi longues fussent-elles – elle passa ses économies et son temps au rétablissement de la maisonnée. La peinture fut refaite, laissant l'impressionnante blancheur des murs éblouir le badaud, les boiseries furent changées. Les fenêtres et le mobilier furent achetés entièrement, laissant les vieilleries bruler dans le dernier Bûcher.  L'Eldéenne profita de ces années dans l'ouest pour y développer son commerce d'esclaves. Peu à peu, elle obtint un nom, un renommée certaine qu'elle n'eut le mérite d'avoir que par la sueur de son front car les journées étaient longues dans la ville aux mille visages, mais les nuits n'étaient que trop brèves. Elle s'offrit un misérable taudit dans un quartier sombre de la faste cité. Personne – sinon la racaille – ne mettait les pieds dans cet endroit humide qu'était Chez Maman. L'appelation pouvait paraître ironique, bien sûr, mais rapidement Sidra n'en rit plus. Il n'y avait dans cette bouillasse infâme que misère et déploration. Ceux qui y vivaient nageaient dans leur pisse et leur merde, l'odeur nauséabonde faisant même fuir les infirmes capables de se déplacer. La fille des Divins y avaient appris une chose: lorsqu'on s'y trouvait, ce n'était jamais faute du hasard. Chaque fois qu'elle s'avançait dans ce dédalle de boue limoneuse, elle ne savait ce qui l'attendait au bout du chemin et cela lui plaisait. Les gens qui habitait cette partie de la grande Thaar n'était souvent attaché à aucun bien, ni à aucune personne: elles étaient la quintescence de la Vie. Loin des prérogatives du monde du dehors, ces petits traînes-misère trouvaient le réconfort en toute chose, vivotant de leur maigre pitence, de travaux fort peu recommendable. Si la plupart avaient l'air affable, tous restaient enveloppe charnelle au fond de laquelle se tapissait une âme qui serait alors libre de s'élever parmi les Dieux. Elle aimait les observer chaque jour, se démenant pour un lendemain incertain, respirant chaque bouffée comme si ce serait la dernière. Ils vous auraient tout pris s'ils avaient pu, et pourtant elle savait que deux jours plus tard, il ne leur resterait de nouveau plus rien. Ils étaient un cercle vicieux d'âmes pures, des rebus qui ne pourraient jamais se fondre dans la masse à leur propre dépend. Bien sûr, si l'âme était vertueuse, elle n'en restait pas moins coincée et apeurée dans un corps qu'ils ne comprenaient pas. Ô combien elle aurait voulu leur apprendre. Mais certains n'en n'étaient simplement pas capables, si bien qu'un jour malheureux ils s'éteignaient de la main de la Drow.
Mais Sidra était miséricordieuse et s'ils priaient des Dieux païens, elle ne leur en tenait point rigueur. Elle était la fille des vrais Divins, elle savait leur existence de naissance contrairement aux gens qui peuplaient la région Thaarie. Ils avaient été élevés et avaient grandit dans un monde où le mensonge faisait foi. Alors, à la faveur d'un orage, elle offrait gîte et couvert aux plus démunis de tout ceux qui vivaient Chez Maman: les enfants. Ces marmots abandonnés, oubliés de tous. Certains n'avaient pas plus de quatre ans. Profitant de la chaleur de la petite chaume, elle leur contait les histoires des Dieux de son enfance. Elle inculquait de nouvelles valeurs à ces petits perdus, leur offrant par la grâce de ses Pères la vraie foi. Elle, fille des Dieux, devenait prêcheuse. Certains revenaient de plus en plus régulièrement, amenant avec eux des copains de rue pour entendre autour d'un bouillon ses prêches. Et peu à peu, elle se forgea une autre identité auprès des habitants du quartier: elle était devenue une personne importante et respectable. Certains adultes se laissèrent tenter, puis d'autres encore. Et malgré la fin des travaux dans sa maison de jeu, elle poursuivit ses efforts, vivant toujours dans cette maison au bois imbibé par la boue et à la rudesse qui convenait bien mieux à la Drow. Le confort simple la rapprochait toujours un peu plus des cieux. Et tout les matins, à l'aube, elle psalmodiait les incantations apprises par Zaknafhein, se babouillant avec rigueur le corps. Après des ans loin de ses croyances et ses rites, elle renouait enfin avec son essence même: son esprit prenait le pas sur son enveloppe charnelle.
Ainsi naquit après dix ans dans la cité de l'Ouest, son organisation. Elle rassemblait quelques malfrats aux talents divers. Des âmes qui furent d'abord convaincus de son sang divin et qui aujourd'hui menait des hommes de tout horizons. Le marché noir, le vol, le recèle, une compagnie d'assassins... Ses talents se diversifiaient à la même allure que la Rose et le Lys gagnait en réputation. Bientôt elle fut aussi incontournable que les boutiques des très riches Princes-Marchands. La jeunesse dorée se pressait à sa porte, s'enivrant, baisant et jouant sans compter. La Drow était puissante, respectée tant par la noblesse du coin que la racaille et son activité de traite d'esclaves lui permettaient de vivre confortablement. Riche, elle l'était pour sûr. Mais cela ne l'intéressait pas plus que le pouvoir. C'était là deux choses qui ne l’intéressait pas. Bien sûr, elle prenait plaisir dans ses activités diverses mais tout cela n'avait aucun intérêt pour elle : elle attendait patiemment. Bientôt elle rejoindrait les siens et son existence quoique mouvementée ne serait qu'un lointain souvenir. Les Dieux n'avaient que faire de ces choses là.
Soixante-sept ans plus tard, elle se trouvait à la tête d'un organisation rodée et influente dans la région. Sans faire de vagues, elle poursuivait son chemin vers la rédemption Divine.
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MessageSujet: Re: Sidra Shi'Bavatae Micedra [En cours]   Sidra Shi'Bavatae Micedra [En cours] I_icon_minitimeMar 23 Aoû 2016 - 20:07

Sidra Shi'Bavatae Micedra [En cours] 1471982780-chrono


[Afin d'épargner une lecture rigoureuse à ceux se baladant sur ces quelques lignes, je vous offre ici une chronologie condensée des évènements importants qui ont façonné la vie de Sidra. De plus, je tiens à rappeler que le point de vue de mon récit est biaisé par ses pensées théologiques et donc n'est pas à prendre comptant. Voici ci-dessous l'essentiel à connaître sur sa vie. Gardez cependant à l'esprit qu'il s'agit d'un abrégé et que certains éléments sont bien mieux explicités et ou justifiée dans la partie histoire.]

Sidra Shi'Bavatae Micedra naquit lors de l'an 668 du Xème cycle, d'une mère, Micedra sœur d'Isten – vivant dans un temple de la ville souterraine non loin de la Faille – et d'un père, Zaknafhein, capitaine d'un des ost Eldéen partit pour le front avant sa venue au monde.
Les quarante premières années de sa vie furent plutôt calmes. Elle vécue auprès des autres jeune gens de son âge et de sa mère, entre les étages et le temple de Natha. Seulement la petite ne parlait pas. Elle contemplait jour après jour le vaste monde qui l'entourait silencieuse. Son originalité eut tôt fait de créer une scission avec les autres personnes, qu'elles soient du temple ou étrangères. Considérée – à tord – comme un fardeau, tous hésitèrent à se débarrasser de celle qui aurait pu transmettre du mauvais sang dans la cité d'Elda.
Mais, contre toute attente, elle finit par se plier à la conformité et parla rapidement avec aisance. La jeune Sidra avait maintes fois entendu et observée les mots, si bien que l'exercice fut acquis plus vite qu'aucun n'aurait cru possible. C'était une petite fille intelligente qui ne perdait pas de temps en babillages, se contentant d'offrir sa parole quand cela était réellement utile. Elle n'avait pas la même perception de nécessité que ses semblables - ou du moins la sienne fut bien plus poussée. Aussi, emplie de questions, elle trouva refuge dans la foi qu'on lui inculqua - entre autres choses. Dévote, elle aidait lors des offices et priait chaque jour. La petite trouvait dans le panthéon un sage réconfort que ne pouvait lui offrir ses paires.
La vie poursuivit son cours jusqu'à ses cent-deux années, car cette année là, sa vie pris un tournant inattendu : revenu avec sa garnison après un siècle de combat, Zaknafhein n'avait point oublié son enfant laissé à sa mère. Le soldat auréolé de gloire était aussi pieux de son engeance, allant jusqu'à se convaincre qu'elle était le fille de la Déesse Natha et du Dieu Uriz. Folie ou pas, son retour fut tâché par le sang de Micedra qui avait mis au monde sa petite ; cela bien sûr ne fût jamais prouvé par quiconque.
Pas même chagrinée de la perte de sa génitrice – car il s'agissait là plus de cela que d'une mère -, Sidra resta tout de même entre son apprentissage et le temple où elle avait trouvé sa place. Et Zaknafhein s'approcha d'elle. Il lui rendait visite chaque jour, priant avec elle. Ils ne partageaient que de rares conversations, préférant le mutisme rassurant et pleins de vérité aux palabres amer. Il fallut près de trois années pour qu'ils s’apprivoisent l'un l'autre, créant un lien fort d'un sentiment indescriptible. Sidra avait alors cent-cinq printemps.
C'est durant cette même année que bravant tout leurs codes, la jeune femme voulu retrouver son père un beau matin dans la caserne où il séjournait depuis son retour du front. C'est alors qu'elle le retrouva à se plier à un drôle de rituel, dans une langue qui lui était étrangère : des rites pour les Dieux qu'il pratiquait tout les jours. S'enduisant le corps de nombreux symboles, il chantait une étrange quantique. Les Dieux étaient ce qui l'unissait le plus à son enfant et l'Eldéenne, fascinée par sa dévotion lui demanda d'approfondir ses connaissances concernant son art.
Et au lendemain, elle commença son rigoureux entraînement. Bien qu'elle eut déjà reçu l'enseignement militaire auprès de ses pairs, il n'en était pas beaucoup plus satisfait. Durant les six années qui suivirent, Zaknafhein lui enseigna le corps et ses limites. Il lui appris la douleur et chaque jour devenait plus difficilement supportable que le précédent mais Sidra – persuadée à son tour d'être issue des divins par son père – ne démordit pas. Il lui apprenait les os – et la douleur ressentit lorsqu'on les brisait, les tendons, les muscles et leur fonctionnement ; tout ce que le soldat avait pu savoir, il lui avait confié. Si bien qu'à cent seize ans, la Belle était devenue bien plus résistante à la douleur qu'elle ne s'en serait cru capable.
Les soixante quatorze années qui suivirent furent plus douces. Elle compléta son apprentissage au maniement des armes et devint athlétique. Si Zaknafhein lui prodigua des conseils et son expertise sur le combat et ses instruments, Sidra se passionna rapidement pour les cimeterres plus que pour les lances, épées et autres rapières qu'on lui avait un jour fait tenir en main. Le corps se sculptant petit à petit au gré des exercices, elle n'en n'oubliait pas ses ablutions quotidiennes, se badigeonnant d'étranges signes qu'elle apprenait à connaître. Par ailleurs, elle n'en oubliait pas non plus ses engagements auprès des sœurs d'Isten et assurait autant qu'elle le pouvait les tâches qu'on lui confiait.
Un matin de sa cent quatre-vingt dixième année, son père ne fut pas au rendez-vous. Inquiète, elle se glissa jusque dans les alcôves qui abritaient les chambrettes des soldats du Puy. Tous dormaient. Jamais elle n'aurait pensé que Zaknafhein se trouvait là avec une autre femme, et pourtant. Folle de rage et de tristesse – sans en comprendre réellement la raison – elle massacra à la fois l'amante imprudente et celui qui lui avait tout donné et tant appris. Celui qui avait fait d'elle « la fille des Dieux ». Se rendant compte de son geste et le cœur brisé, elle s'enfuit du Puy par la Faille alors que l'aube se levait à peine.
Partie sans demander son reste – de peur d'être jugée coupable – elle affronta le désert d'Elda les mains vides. Son entraînement lui permit de tenir la faim et la soif loin d'elle quelques temps mais c'était là une torture bien plus profonde qu'elle n'avait jamais vécue. Abattue par sa stupidité, elle sombra une semaine après son départ en plein milieu du désert aride.
Par chance, une caravane la tira in extremis de ce mauvais pas, lui offrant l'eau salvatrice et le repas qu'elle avait tant imaginé durant ces jours de disette. C'est ainsi qu'elle rencontra par la force des choses la vieille Eldéenne prénommée Myste. Elle était en charge de la petite troupe et parcourait le désert à la recherche de biens à offrir sur les marchés de l'ouest. L'ancienne avait quelque chose d'impérieux qui tenait en respect ses hommes mais qui intriguait la jeune Sidra. N'ayant nulle ambition et nul endroit où aller, elle décida de suivre la chef charismatique. Elle qui n'était jamais sortie de la ville souterraine se retrouvait à présent à traverser le désert et à pousser les portes de la ville Doeben, Sol'Dorn.
Myste la pris sous son ailes durant trois années. Elle lui inculqua les rudiments du commerce et la nécessité de l'effort. Elle aussi était pieuse, et si Sidra ne s'en souciait que peu, la vieille regardait l'Eldéenne avec tendresse. Non seulement patronne et amie, Myste lui fournit aussi la base de la langue commune car jamais Sidra n'avait parlé autrement que son idiome maternel. Une langue quelle jugea barbare mais qu'elle se plia à intégrer : Sol'Dorn était leur point de chute et même si la ville semblait cosmopolite, elle attirait de plus en plus d'Ouestrien qui ne comprenait le drow.
Et elle servit la caravane jusqu'à ses deux cents ans. L'été était particulièrement chaud cette année là et, comme à leur habitude ils sillonnaient le désert. Cependant, un étrange maux se propagea au travers des esclaves Zurthans et eut raison de quatre travailleurs dont la très respectée Myste. La tragédie toucha de plein fouet l'ensemble des négoces. Prenant le temps de réflexion, la jeune Sidra finit par récupérer l'héritage de sa vieille sauveuse. Au moins n'avait-elle point tout perdu. La plupart de l'équipe la suivit tandis que les vindicatifs s'écartèrent d'eux-même une fois leur solde versée à la ville Doeben.
Les huit années suivantes, Sidra s'évertua à poursuivre les efforts de son mentor disparu. Les contrats furent renégociés, les ventes difficiles mais le labeur et la rigueur qu'elle mettait dans son installation eut raison des quelques difficultés rencontrées : la prospérité s'installa peu à peu jusqu'à ce qu'elle puisse s'installer définitivement à Sol'Dorn, dans un petit bureau qui ne payait pas de mine. C'est de là qu'elle put gérer son activité et investir dans une nouvelle caravane ; les affaires marchaient bien.
Si bien que presque dix années après la mort de Myste, elle se décida au gré d'une rencontre fortuite d'étendre ses négoces à la capitale du monde Ouest : la belle Thaar. Elle s'offrit un beau domaine, un bien rare qui tombait en ruines. Cet établissement avait été laissé à l'abandon par la communauté de la ville qui ne dormait jamais mais l'Eldéenne y voyait une opportunité. C'était un jour de la huit cent quatre-vingt huitième année du dixième cycle.
La rénovation du bâtiment prit trois années complètes et la plupart des finances des caravanes. Aussi s'occupa-t-elle de se dégoter un taudis où vivre le temps des travaux. Elle échoua dans les bas-fonds, dans une chaume branlante où la boue menaçait les fondations : chez Maman n'était pas recommandable et pourtant étrangement, elle s'y plut. Parmi la raclure, elle trouvait un foyer réconfortant. Elle était chez elle et peu à peu, elle offrit un peu de son bien-être à ceux qui n'en n'avait point.Les plus démunis frappaient à sa porte - qu'elle ouvrait sans rien demander en retour. Et si certains venaient simplement chercher du réconfort, d'autres tombèrent peu à peu sous son charme et ses contes venus d'un pays lointain. Et comme elle avait fini par croire son père, ils la suivirent sans qu'elle n'eut rien à faire. C'est ainsi que débuta son organisation. Si les premiers temps elle ne profitait que des rentes du vols, elle se fit une place dans le marché parallèle jusqu'à en contrôler sa majorité : vols, recels, tueurs à gages... Si elle ne s'occupait que des affaires les plus importantes, ses équipes lui étaient fidèles et veillaient pour elle sur son empire grandissant dans la capitale.
Parallèlement, la Rose et le Lys ouvrit ses portes et s'imposa, lui aussi, comme un incontournable de la cité pour la jeunesse doré. L'alcool, les tables de jeux et les soirées – sans compter la charmante compagnie – attiraient chaque jour un peu plus et elle dirigeait un véritable établissement de loisir. Choisissant avec intelligence sa clientèle, elle fidélisa au cours des ans les curieux bourgeois et la riche noblesse de la région. Et vingt années plus tard, elle prospérait...


Dernière édition par Sidra Shi'bavatae Micedra le Lun 18 Déc 2017 - 4:24, édité 2 fois
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MessageSujet: Re: Sidra Shi'Bavatae Micedra [En cours]   Sidra Shi'Bavatae Micedra [En cours] I_icon_minitimeMer 31 Aoû 2016 - 19:24

Globalement terminée, je ferais le reste sur mon journal (l'organisation de son activité, description de "La Rose et le Lys" et les remerciements).
J'aurais la fin à reformuler aussi, mais cela peut attendre.

Bref, à partir de maintenant, le contenu ne bougera pas.

Waiting for a validation,
Good Luck.

<3
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MessageSujet: Re: Sidra Shi'Bavatae Micedra [En cours]   Sidra Shi'Bavatae Micedra [En cours] I_icon_minitimeMer 14 Sep 2016 - 18:30

up de l'amour I love you
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MessageSujet: Re: Sidra Shi'Bavatae Micedra [En cours]   Sidra Shi'Bavatae Micedra [En cours] I_icon_minitimeJeu 15 Sep 2016 - 19:59

damned..... hmmm....

Attend je vais chercher May, a deux on devrait arriver à tout lire avant la fin de l'année @___@

(on essaie de faire au plus vite mais ça va peut être prendre un petit bout de temps x) )
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MessageSujet: Re: Sidra Shi'Bavatae Micedra [En cours]   Sidra Shi'Bavatae Micedra [En cours] I_icon_minitimeVen 16 Sep 2016 - 20:41

Pas de soucis, c'est juste pour être sûre que c'était pas passé à la trappe :p
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MessageSujet: Re: Sidra Shi'Bavatae Micedra [En cours]   Sidra Shi'Bavatae Micedra [En cours] I_icon_minitimeJeu 20 Oct 2016 - 19:41

Ma mie, pour t'annoncer que c'est moi qui ai repris ta fiche, et que je vais te soumettre les points de correction sous peu :)
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MessageSujet: Re: Sidra Shi'Bavatae Micedra [En cours]   Sidra Shi'Bavatae Micedra [En cours] I_icon_minitimeMer 26 Oct 2016 - 16:21

Keur sur ta joue <3
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MessageSujet: Re: Sidra Shi'Bavatae Micedra [En cours]   Sidra Shi'Bavatae Micedra [En cours] I_icon_minitimeMar 15 Nov 2016 - 10:41

Du coup,

Pour reprendre sur un support plus formel, en retour sur nos échanges en privé ainsi que les suites de mes lectures.
Bien que nous nous soyons questionnées et toi-même expliquée sur le sujet, je préférai que sa vision biaisée et très personnelle du divin soit amoindrie. J'entends bien que cela fasse partie de la constitution même du personnage, mais c'est beaucoup trop poussé au regard de son développement, c'est à dire que dans le moule du Puy et aussi sensibilisée qu'elle a pu l'être à la religion (puisque ayant grandit au plus près de serviteurs des dieux), il n'est que peu probable qu'elle ai étendu cette conscience particulière. Que cela soit des choses latentes, pourquoi pas, et qu'elles s'éveillent lorsqu'elle découvre d'autres cultures en s'éloignant en IV et caetera, c'est mieux. Et puisqu'il s'agit de ressentis et non de faits, je t'inviterai même à les identifier clairement au cœur de la rédaction (par exemple par des italiques?), quelque chose qui renseignerait le lecteur sur la valeur à accorder à ses propos. C'est que, si tu expliques bien ton visu, je ne voudrais pas que cela soit assimilé comme paroles d'évangiles par d'autres. Je ne te demande pas là de tout remettre en question, mais d'adoucir cette psyché qui ne peut avoir essence dans ce milieu si structuré.

Pour reprendre sur des annotations de ton MP

Citation :
Sa déesse avait toujours été clémente avec elle et sa fertilité avait su attiser quelques jalouseries de la part de ses consœurs.[...]
Alors, oui je l'entendais comme cela en fait. Pas du genre mère pondeuse mais plus comme "ayant déjà eu la chance de porter la vie". Cela dit, au vu de tes commentaires, tu penses qu'il serait pas plus judicieux de changer Isten en Natha pour le coup ? Enfin vu comment tu me l'exposes, c'est vrai que je trouve cela plus logique !

> Pourquoi pas, ce choix t'appartient. Juste que les cultes sont très différents.

Citation :
Par ailleurs, dans la lignée de la correction du dessus, ne serait-il pas plus judicieux de dire qu'elle a été élevé au sein du Culte ? (Et donc pas seulement par sa mère mais aussi par les autres soeurs et la HP ?)

> Justement elle ne peut pas l'être, élevée au côté d'eux au plus près mais la prêtrise étant une voie à part entière, on ne peut pas considérer qu'elle ai été éduquée comme un membre du sanctuaire. Que sa mère l'ai initié éventuellement, mais cela ne fera pas d'elle une prêtresse puisque c'est bien le jeune adulte qui décide de son chemin. (d'ailleurs la prêtrise est plutôt une voie tardive, le choix se faisant lorsque l'on atteint la 100aine d'années). De fait si elle intègre le temple, c'est bien après.

Citation :
Concernant les apprentissages des armes, je n'ai pas vu de BG y faisant référence au moment de ma fiche - et je dois dire que du coup si son père ne peut plus lui enseigner le maniement des armes (de manière approfondie ou lui apprendre les bases hein) ça fout un peu toute mon histoire en l'air. Du coup, comment on pourrait faire pour que cela passe ?

> Pour autant, les classes sont factuelles tel quel, son père pourrait avoir envie de jauger personnellement son apprentissage et de le parfaire à son goût, mais ne peut pas lui avoir tout appris.

En ce qui concerne son départ du Puy pour l'Ithri'Vaan, la caravane est peut-être une chouille trop importante au regard du contexte (bien que les valeurs numéraires soient en fait plutôt cohérentes), vu que l'IV est autonome en esclaves, mais c'est plus pour t'en informer qu'autre chose.

- Les Drows ne choisissent pas leur noms et surtout portent par hérédité celui de leur mère.

Des infos complémentaires et surtout concises devraient sortir bientôt sur le sujet Ithri'Vaan (ainsi qu'Eldéen en fait), je te les communiquerai quand elles seront officialisée surtout concernant la fin de la fiche et son rapport au pouvoir en place. Et le Voile alors, oukilé le voile ? :p Il manque encore des données contextuelles d'importances (notamment les affaires du Puy et l'historique ainsi que le déclin du IV Ost) mais pour ces infos là je t'invite à attendre que nous ayons sorti les BG relatifs (qui vont arriver sous peu!), et de toute façon, je te rencarderai.
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Alanya de Saint-Aimé
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MessageSujet: Re: Sidra Shi'Bavatae Micedra [En cours]   Sidra Shi'Bavatae Micedra [En cours] I_icon_minitimeLun 13 Fév 2017 - 15:02

Wait, pourquoi ma fiche est dans "abandonnées" ?
Je n'ai jamais été relancée dessus avant que cette dernière soit déplacée, de plus les modifications sont en cours. C'est un gros un chantier, je pense que vous pouvez comprendre.

Je demande donc gentiment à ce que ma fiche soit, de facto, remise dans les fiches en cours afin que je puisse la modifier librement et vous stipuler lorsque celle-ci sera finie ou abandonnée. :3 I love you
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Yenaël
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MessageSujet: Re: Sidra Shi'Bavatae Micedra [En cours]   Sidra Shi'Bavatae Micedra [En cours] I_icon_minitimeVen 28 Juil 2017 - 15:16


Yop Ala ! :mrgreen:

Suite à ta demande, la fiche de Sidra est de retour dans le présentoir !
J'espère qu'on aura l'honneur de te valider très rapidement !

Bonne continuation Sidra Shi'Bavatae Micedra [En cours] 629873
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Alanya de Saint-Aimé
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MessageSujet: Re: Sidra Shi'Bavatae Micedra [En cours]   Sidra Shi'Bavatae Micedra [En cours] I_icon_minitimeVen 28 Juil 2017 - 17:01

Merci I love you
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Dryae
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MessageSujet: Re: Sidra Shi'Bavatae Micedra [En cours]   Sidra Shi'Bavatae Micedra [En cours] I_icon_minitimeSam 7 Oct 2017 - 12:45

Dès que t'es de retour je remet ta fiche dans le présentoir (vu que tu reviens ''en force'') - mais c'est pour y voir plus clair dans le présentoir, des bisous
Drydry l'espadrille

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MessageSujet: Re: Sidra Shi'Bavatae Micedra [En cours]   Sidra Shi'Bavatae Micedra [En cours] I_icon_minitimeLun 18 Déc 2017 - 4:30

BONSOIR A TOUS !
Comme convenu avec Estiam, pour faciliter le travail de correction, cela se fera message par message. Et sentant ariver les 3 ans sans validation de ce DC, je me suis mis un coup de pieds aux fesses !

Donc voici donc aujourd'hui la première correction, du début de l'histoire à "Sidra sombra".

Les corrections apportées portent sur :
- Isten transformée en Natha
- Correction des passages où il était mention d'une vie au temple pour des "allers-retours et une implication dans la vie religieuse fréquente".
- Nuancement quant à l'éducation reçue : elle a eu la même que tous les autres drows du Puy, mais ne s'intéresse guère à autre chose que les Dieux. Puis plus tard, Zaknafhein n'apprend pas le maniement des armes à Sidra, il reprend simplement son éducation militaire avec une voie plus celeste.
-Correction des fautes d'orthographes étonnement peu nombreuses pour le nombre de mots x)
-Modification du début du résumé.

Je laisse donc à appréciation des admins avant de continuer plus en avant.
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MessageSujet: Re: Sidra Shi'Bavatae Micedra [En cours]   Sidra Shi'Bavatae Micedra [En cours] I_icon_minitime

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