Je t'attendais... (Lissesùrë)

Au lendemain de Comme d'habitude

La journée est belle même si elle est quand même fraîche pour la saison. Estoniel parcoure la forêt comme il en a envie, Lareless laissant son animal totem profiter de sa liberté comme il l'entend. Il a tellement donné pour la Symphonie que lui laisser le temps qu'il désire n'est pas difficile pour elle. Tant qu'il lui laisse l'heure du midi pour reprendre forme elfique. Ca la repose… Ca la repose de ces contacts qu'elle a eu, de ce qu'elle a dû faire. Bien au chaud et en sécurité, la druidesse se laisse le temps de repos et de guérison.

Sinon, qu'est ce que le temps quand on vit des siècles? Une valeur sûre ou aléatoire? Qu'est ce que les mots aussi quand le bruissement des feuilles et des branches vous berce en permanence, que les voix végétales des pies bavarde chantent pour vous et vous parlent. Bien sûr, elles ne disent pas des mots, mais à leur façon, elles ont un langage aussi détaillé qu'un elfe. Il suffit de prendre le temps de les écouter.

Lareless ne se sent pas seule, Estoniel est avec elle et sa nature solitaire ne la rend pas particulièrement friande de ce que nous appelons contacts sociaux. Vivre éternellement en ermite parmis l'Anaëh ne la perturberait pas du tout. Les Ornedhels finiraient peut-être à faire quelque chose d'eux-mêmes, les Taledhels finiraient peut-être à arrêter de prendre tout les autres de haut. Quand aux chevaucheurs mythique... Les arbres ne sont souvent pas de son avis à ce sujet. Elle doit se faire rappeler sa nature elfique de temps à autre.

Pourtant, cette fois ci, elle ne veut pas répondre à leur demande… Lareless leur demande du temps, mais dans leur sagesse séculaire les arbres se souviennent. Plus elle attendra, plus ce sera difficile. La druidesse a un sentiment d'échec persistant en bouche. La question tourne toujours en boucle malgré son côté pragmatique.

A t'elle fait le bon choix? A t'elle aidé? A t'elle empiré les choses, Repoussé l'inéluctable? Cela a t'il suffit ou tout ces efforts, ces Souffles perdus, animaux, elfiques et végétaux, ont été inutiles? Les Noss et les elfes de pierres se rapprocheront t'ils ou partiront t'ils en guerre par sa faute? Au moins quand Estoniel est là, les pensées sont plus simples et claires à gérer. En cet instant d'ailleurs, le fauve est sur la piste d'un Fanuë, bête qui est là d'ailleurs, dans la clairière. Il boite, il souffre. C'est un animal vieux et perclus de rhumatismes… Les pies bavarde le leur a dit.

Tapis parmis les fougères, il n'y a qu'une portion de crinière de bronze et deux yeux de mousse visibles, s'approchant inexorablement pour donner la miséricorde à cet animal, qu'un nouveau cycle de Vie puisse commencer. En plus, il a faim, ca fait bien un bon trois jours qu'il n'a pas eu de chasse fructueuse. 

Le soleil surprit l'elfe. Un rayon, un peu cajoleur, lui caressait le visage. A la douce tiédeur, il sourit. Sa mère aussi le réveillait ainsi quand il était plus petit. Maintenant, c'était lui qui…

Sa mère !

D'un bond, il se leva. Il devait aller la chercher au temple de Tyra. Il fit un tour sur lui-même pour repérer ses vêtements dans la pièce. Ce faisant, il perdit rapidement son objectif. Les murs étaient éclaboussés par les couleurs éclatantes du verre coloré.

En posant sa joue contre son épaule, il pouvait y voir là un ours.

Le vent jouant dans les branches apportaient non seulement des ombres mais aussi semblait l'animer. Où courrait cet ours ? Alors il pivota un peu, en cherchant  de la tête le bon angle pour déterminer la destination. Était-ce vers la marre ? Ou vers le papillon ? Au fait, est ce qu'il y avait des oiseaux ?

Lentement, il se tourna sur lui-même tout en changeant d'angle régulièrement. Un sourire vient éclairer son visage, et il resta là un petit moment à regarder les ombres et les couleurs vivre avec le vent et s'éteindre avec le temps.

Enfin, il se prépara et termina par sa coiffure.
D'un geste précis, il se tressa séparément les deux mèches qui encadraient son visage. Puis il les noua ensemble, à l'arrière. Dans les boucles lâches, il y glissa une pique dont, à l'extrémité, pendait un chapelet en bois. Les perles avaient la forme de feuilles. Trouée par la tige, les limbes étaient libres d'évoluer selon les mouvements du porteur. Quand, elles s'entrechoquaient, elles sonnaient doucement.

Le soleil était haut quand il arriva au temple. Sa mère l'attendait.
Elle ne lui fit aucuns reproches, elle savait que c'était inutile. Et il semblait heureux. Alors, elle lui demanda ce qui avait retenu son attention. Il raconta sa rencontre de la nuit et du matin. L'un comme l'autre étaient invraisemblable. Mais elle ne disait rien. Il était capable de voir des choses uniques et surtout de s'émerveiller comme avant. C'était comme ça et ne l'en aimait pas moins. C'était son enfant.

Ils avançaient doucement. Maintenant, la vielle prêtresse s'essoufflait plus facilement. Il ne s'impatientait pas. Sa mère avait accompagné ses premiers pas, l'avait tenu et soutenu. Aujourd'hui, il savait que la marche pouvaient être la dernière. C'était comme ça et ne l'en aimait pas moins. C'était sa mère.

Il profitait. Il prenait le temps. Et s'arrêtait souvent. Ensemble, ils écoutaient longtemps couler l'eau des fontaines.

A la maison, il la coucha, et après avoir déposer un baiser sur le front maternelle, il tira les rideaux.
Récupérant un écritoire portatif, il prit la direction de la forêt. Le temps passait. L'hiver approchait et ses petits allaient être prêts. Il était grand temps.

Le dos contre le tronc d'un arbre tout autant centenaire comme lui, une plume à la main, il écoutait le vent chanter infiniment.

La journée avait été paisible.

Avait il un seul instant attendu ? Du tout. Lissesúrë avait été bien trop occupé.

Occupé à être heureux.
Heureux.
Tout simplement.

Là, le dos contre le tronc d'arbre, il avait pu caresser le vent, plonger dans un bain de lumière, boire les paroles des oiseaux. Et il avait même eu le temps de coucher sur un mince papier quelques mots.
A plusieurs reprises, des vagues de quiétude déferlèrent. Il tenta de les retenir mais c'était bien inutile. Elles revenaient encore et encore.

Il jouait avec sa plume. En fait, pas vraiment. Il se régalait des reflets irisés sur la plume dans les lumières du soir.
Le soir…
Le soir…

Il releva la tête à la recherche de l'astre, mais il ne vit rien. Rien d'autre qu'il était entre chien et loup.

Le ciel, tout comme le bas des nuages étaient teintés de roses et d'ors alors que le reste se drapaient du voile bleu nuit, moucheté d'argent. Petit à petit la Silène se révélait à leurs yeux.

Lentement, le taledhel se releva avec mille précautions. Il se donna l'effet de se déplier comme on dépliait un message à l'insu des autres et dont l'auteur est encore mystérieux.

Mais, prenant de la hauteur, il put remarquer qu'une personne l'observait. Depuis combien de temps ?

Elle, oui elle, car ses douces courbes trahissaient son appartenance au beau sexe. Aux vus de sa posture et de ses vêtements, elle n'était pas de la ville. Même ramassée comme elle l'était, sa silhouette était de celles que l'effort façonne. Et elle avait cet air absolument attentif et patient que seuls les félins savaient prendre avec autant de morgue et de fierté.

C'est alors qu'il croisa le regard de mousse.

Et il prit peur. Il aurait pu être en colère que cette elfe n'ait pas eu la politesse de se présenter à lui. Il aurait pu être content de ne pas être seul et de pouvoir partager.
Il aurait pu. Mais il savait que dans la forêt, il pouvait être considéré comme un étranger, voir pire. D'un geste machinal, il plaqua contre lui les pans de sa large veste comme s'il avait été découvert nu.

"Bien le bonsoir Heri. J'attendais un ami. Je vous prie, n'y voyez nulle offense. Et si ma présence n'est pas souhaitée, je peux m'en retourner."

En guise de salut, il s'inclina légèrement en faisant teinté les perles de bois de sa pique.

Au compliment, il hocha la tête en guise de remerciement. Aucunement, l'idée qu'elle sache déjà son nom ne le gêna contrairement à la courte tenue de la Noss. La noss qui était devant lui avait bien plus de peau découverte que couverte. Peut être qu'elle était à l'aise ainsi, mais lui pas tellement. Le taledhel ne savait pas trop où poser son regard. Il ne pouvait pas fixer ses propres mains ou ses pieds, car cela aurait été trop impoli comme celui de regardait un point au loin. Alors, il fixa le masque d'os. Mais comme il la dominait, c'était plutôt difficile de ne pas voir ce qu'elle ne cachait pas.

"La symphonie ? Oh. Merci à vous et merci à Elle. "

A ces mots, il s'inclina.

"Je sais que votre don est sacré. Mais accepteriez vous… de m'aider ?" Il croisa ses mains et les passa dans ses amples manches. "Je souhaiterai offrir un bâton en bois vivant à ma mère. Ce bâton permettra d'accueillir la lueur de mon père. L'idée est que son amour puisse encore l'accompagner et éclairer sa vie. Plus tard, je souhaiterai, dans la mesure du possible, permettre aux lueurs de ces amants se retrouver. " Le visage s'éclaira d'un sourire doux et légèrement triste. Les longues oreilles s'étaient également légèrement baissées, mais rapidement elles se redressèrent. " Je cherche un arbre qui soit capable d'endurer en son sein une flamme aussi tendre qu'un amour filial. Et si possible un arbre qui soit plutôt..."

Il prit le temps de chercher son mot. Il ne savait pas si les arbres avait des qualités similaires à celles des elfes. Mais il ne trouva pas. Alors dans le doute, il essaya "Gentil ? " C'était ce qui se rapprochait le mieux. Il voulait surtout que l'arbre puisse pouvoir être comme cet amour qui l'a accompagné de nombreuses années. Réconfortant, immense, aidant.

" J'ai déjà fait pousser des jeunes arbres pour cela. Il est hors de question d'amputer un arbre d'une branche, ni même d'ôter un arbre à la forêt. Et si aucun des mes jeunes arbres ne conviens, ils seront rendus à la Mère. Et j'en ferais pousser d'autres."

Puis, il se rendit compte qu'il avait uniquement parlé de lui et de son but.
"Excusez moi, je parle sans vous laisser une seule seconde vous exprimez. Je vous écoute. "

Il pensa son visage sur le côté et ses oreilles se relevèrent en signe d'attention.

Marcher. En voilà, une excellente idée ! Il apprécia l'intention, cela lui permettrait enfin de regarder ailleurs sans paraître déplacer ou impoli. Alors il prit le rythme qu'il avait avec sa mère. C'était une promenade après tout.

Comme l'avait fait remarquer l'ornedhelle, la Mère avait déjà répondu à sa prière. Le léoménis de la nuit dernière était bien plus qu'un ami. Il semblait être aussi un messager de la déesse. Mais il ne répondit rien à ce sujet. Car déjà, elle posait des questions. Quoi de plus normal. Elle comme les autres avant voulait savoir, voulait comprendre.

" Non. Le bâton est fait pour être utile et être utilisé. Ce n'est pas une simple célébration. "

Les oreilles d'albâtre se collèrent sur les tempes de neige. Lareless le força à se retourner, et à la regarder dans les yeux. Ce qu'il fit avec soulagement, pour ne pas tomber sur la gorge.

" Heri Lareless. Que connaissez vous de la magie de la magie ? " Tous voulaient comprendre, tous voulaient savoir. Mais peu le pouvaient véritablement. C'était un fait. Un fait désagréable pour les auditeurs. Un fait qu'on le prenait pour hautain et imbu. Est-ce que lui demandait comment elle faisait pour entendre la Symphonie ? Non. Alors pourquoi autant de curiosité ?

" Pour faire simple, disons que je suis un artiste mage. Je créée des objets que j'infuse de magie. Le matériel qui recevra cette magie doit être vivant lors de la création, puis il le restera. " C'était comme ça. Objet n'était pas le mot le plus approprié, mais c'était le plus simple à appréhender.

La Noss continuait avec ses questions. Elle n'avait pas accepté l'idée de l'aider. Elle ne l'avait pas non plus rejeté. Elle proposait des choses qu'il avait déjà écarté.

" Non je ne souhaite pas travailler avec une branche. Car il faut trouver parmi les arbres une branche qui me convienne. Après il faut que l'arbre accepte de donner la branche. Lui continuera sa vie en terre. Mais la branche ne regrettera t'elle pas un jour ce temps où elle était arbre ? "

Il ne savait pas trop comment le bois vivait cette transition. Tout comme il ne savait pas ce qui avait déclenché la création magie du nœud… Trop de magie, c'était ce qu'on lui avait dit. Oui mais comment les arcs avaient ils réagit ? La magie avait elle était simplement aspirée ? Ou les bois avait il fini par la rejeter ? C'était ces questionnements qu'il avait fini par revoir toute sa pratique.

" C'est ce que je faisais avant. Mais sans demander la permission à l'arbre. " Il marqua à nouveau un silence tout en poursuivant leur déambulation.

" En travaillant un arbre dans son intégralité, l'arbre pourrait rester arbre et pourtant remplir un besoin en tant qu'objet. Autant que possible, je ne souhaite pas faire souffrir cet arbre. Dès son plus jeune âge, je lui donne des guides pour qu'il puisse grandir tout en me permettant de remplir le dessein que je lui souhaite. Mais s'il ne veut pas, je ne l'y obligerai pas. Il trouvera la pleine terre. "

Il l'avait déjà dit. Mais visiblement, c'était une chose qui lui tenait à cœur. Puisque les arbres était des êtres vivants qui pouvait échanger, ressentir et mourir, il se devait de les respecter pleinement.

" Endurer. Oui c'est bien le bon verbe. Je ne peux avec ma magie capturer l'amour de mes parents. Simplement par ce que mon père ne foule plus cette terre et parce que l'Amour, aussi pur qu'il soit n'est pas une magie. L'Amour, c'est juste… l'Amour. Pourtant je souhaite que l'on retrouve les bienfaits avec ce baton. Pour cela, je pourrais demander une illusion. Mais pour un Amour aussi véritable que mes parents ont partagé, je ne puis proposer ce mensonge. Car avec le temps, qu'adviendra t'il ? "

Il agita la tête de gauche à droite. Les feuilles de sa pique cliquetèrent alors.

" Il me reste donc le feu. Mais le bois doit craindre le feu. Et je propose à un arbre, fait de bois, à vivre avec un feu en lui. Aussi doux que je souhaite ce feu, ce pourra être une torture pour cet être. C'est pour cela que le verbe endurer est le plus approprié. "

Il se tue. Il scrutait les ombres dans l'attente de voir son ami, mais celui-ci ne se montrerait pas.

Tandis qu'ils vagabondaient dans cette forêt nullement silencieuse, où les sous bois avait gardé leur odeur avec le froid arrivant, Lissesúrë attendit de nouvelles questions qui ne manqueraient pas de franchir à nouveau les lèvres de Lareless.

Attentive, immobile et aussi silencieuse qu'il est bavard, la druidesse le laisse répondre et expliquer à sa façon ce qu'il a en tête. Deux choses attirent son attention et l'émeuve mine de rien.

Un artiste mage qui ne veut pas faire mal aux arbres… Un sculpteur… Un façonneur… Les prunelles de mousse prennent un air de velours approbateur tandis qu'elle ne parle, qu'elle ne bouge toujours pas. Sous le masque, un sourire attendri éclaire le visage bronzé de la Noss.Lui emboitant le pas, ils recommencent à marcher. Elle, aussi silencieuse qu'Estoniel, n'est qu'oreilles aux confidences de l'elfe blanc. Lareless est très intéressée par ce qu'il dit.

Le ton et les paroles de Lissesùrë, son non verbal. Ca la réconcilie en un instant avec les elfes de pierre. L'espoir bondit en son coeur. Le pas de la druidesse se fait plus léger, plus joueur… Un peu plus et elle se mettrait à bondir autour de lui. Il continue ses explications, manifestement pas gêné par le silence de sa compagne de promenade.

" Endurer. Oui c'est bien le bon verbe. Je ne peux avec ma magie capturer l'amour de mes parents. Simplement par ce que mon père ne foule plus cette terre et parce que l'Amour, aussi pur qu'il soit n'est pas une magie. L'Amour, c'est juste… l'Amour. Pourtant je souhaite que l'on retrouve les bienfaits avec ce baton. Pour cela, je pourrais demander une illusion. Mais pour un Amour aussi véritable que mes parents ont partagé, je ne puis proposer ce mensonge. Car avec le temps, qu'adviendra t'il ? "

Il agite la tête de gauche à droite et, en écho, Less fait la même chose dans un silence désespérant. Les cliquetis de ses breloques lui manquent et manque à Estoniel aussi. Les feuilles de la pique de Lissesùrë  cliquètent alors, remplacant le bruit. Est ce un signe?  

" Il me reste donc le feu. Mais le bois doit craindre le feu. Et je propose à un arbre, fait de bois, à vivre avec un feu en lui. Aussi doux que je souhaite ce feu, ce pourra être une torture pour cet être. C'est pour cela que le verbe endurer est le plus approprié. "

Il se tait, regarde les frondaisons, les ombres de la nuit. Il semble chercher quelqu'un.  

C'est très bien expliqué, ta compassion et ta délicatesse envers l'Oeuvre est tout à ton honneur et je vois pourquoi Kyriä m'a conduite ici… Je suis dédiée au bien être des arbres. Je crois, sans vouloir me vanter, que je suis la personne qu'il te faut… Je comprends ton dilemme, pratiquant le vitalisme la majorité du temps, je pourrais t'aider pour que le fardeau demandé à la sœur qui acceptera de sacrifier sa vie d'arbre, lui soit le moins douloureusement pénible possible. Mais avant toute chose, est ce qu'elles connaissent ta mère et ton père? Et… Qui attends tu ainsi?  

Les dernières lueurs du soleil avait finit par mourir. Chien et Loup avaient fini leurs échanges. Le Mâtin obéissant avait laissé la place à son cousin pour qu'il puisse, contrairement à lui, courir le monde, cette nuit encore.

Le voile aussi sombre qu'une tenue d'un servant de Tari, enserra les deux elfes si semblables et pourtant si différents. Elle. Bien que son allure était sauvage et pourtant elle était si calme. Lui, prenait milles et unes précautions et regardait partout. Il avait parlé. Beaucoup. Et les mots avaient porté.

Elle avait approuvé. Il en était heureux. Très heureux même. Et pourtant, elle a encore des questions. Les oreilles de l'anedhel se plaquèrent contre ses cheveux.

" Par quelles questions voulez vous que je réponde ? " Il s'était retourné vers la noss et posa sur elle ses yeux de glace.

" Celles qui te plaisent. Je n’ai pas pour mandat de diriger . " Lui répondit elle avec un sourire rassurant.

" Hum"
Il noua ses mains dans son dos. Et il réfléchit à ce que Lareless avait dit jusqu'ici. Mais au lieu de vouloir apporter des réponses, c'était des questions qui venaient à ses lèvres.

" Mais avant, pourquoi parlez vous des arbres comme des sœurs ? C'est l'emplois du féminin qui me surprend. " Pour la première fois depuis, il esquissa un très léger sourire qui ne resta pas longtemps.

Un arbre : mot masculin. Fallait il revoir également la nomenclature pour respecter comme il se devait la création de la Mère ?
Il lui semblait avoir entendu dans un passé lointain que certains arbres étaient féminins et d'autre masculin. Sinon pour les autres essences, ils étaient androgynes. Androgynes… Ça l'arranger. Il ne savait pas trop encore pourquoi, il fallait qu'il réfléchisse à la question.

La surprenante Ornedhele avait toute son attention.


Quand elle eut expliqué pourquoi. Il lui fournit également une réponse.

" Non. Elles ne connaissent que ma mère. Elles ont moins de 10 ans." Pour la vie d'un arbre comme d'un elfe, ils étaient encore tout jeune. Mais Lissesúrë avait dû réfléchir à son projet depuis qu'il voyait sa mère accusait le deuil. Mais il savait qu'il y avait des choses à ne pas brusquer : ce n'était que maintenant que sa mère reconnaissait qu'elle se fatiguait un peu plus vite qu'avant. Il n'avait pas voulu imposer une chose qui aurait été refusée avant. Maintenant, elle, comme ses protégées en pot, étaient prêtes.

Pensif, l'elfe écoutait sa compagne de fortune. Le point de vue était peut-être typique, ou atypique. Il ne savait pas. Il s'en moquait. Car il avait là de nouvelles matières à réflexion. Il avait là un nouveau point de vue. C'était rafraichissant.

Une branche, pour lui un peu basse, s'emmêla dans ses cheveux de neige. Immédiatement, Lissesúrë s'arrêta et entreprit patiemment de s'extraire de la branche, sans un mot, ni même une grimace. Ses longs doigts lissaient un à un les fils d'argent pour les détacher. Sa coiffure s'en retrouverait surement légèrement défaite, mais qui sera la pour le voir si ce n'était cette agréable Noss et la Lune.

La lune.
Il leva les yeux pour qu'enfin, il puisse croiser, au détour d'une branche, le regard avec le bel astre. Qu'elle soit pleine ou simple croissant, qu'elle soit blanche ou rousse, auréolée ou pure, il la trouvait toujours belle. Ha, la lune ! Elle était là, comme une perle posée sur un voile noir. Elle était là, si ronde. Ronde et belle comme les courbes d'une dame. Si douce et si lumineuse comme une mère. Et lui souriait comme un enfant.

La vision ne fut que fugace. Des nuages épais comme des édredons vinrent la couvrir. Entre les branches, le vent était étouffé. La cime chantait depuis un moment déjà. Depuis le temps que les nuages arrivaient…

L'elfe des pierres ne s'était pas rendu compte que l'air s'était rafraichi. Et il fut surpris quand il tendit une main d'un voir un minuscule flocon. Si petit que déjà, au creux de sa paume, il n'était plus.

" Qui donc là-haut plume la lune ? " murmura t'il.

Peut être que l'ornedhelle avait encore posé une question. C'était fort probable. Mais là, présentement, il n'en n'avait cure. Il offrit à nouveau son visage de neige au ciel. Il admirait la première danse des flocons. Celle qui tombe et qui jamais ne restera. Mais une de celle, tranquille, vous transporte ailleurs. Vous transporte là haut, parmi les étoiles.

Les mots de Lareless se mirent à danser.

Il avait parlé pour lui.
Elle avait récité pour eux. Eux, elfes des pierres et elfes des noss, pour les flocons, les arbres et les animaux.

Ces mots, dans la froide nuit, les enveloppèrent. Ils étaient simples. Ils étaient doux. Ils étaient une invitation au partage. Ils étaient un socle tout aussi improbable que surprenant. Des mots comme un lien entre elle et lui.

Peut être que jamais plus, il n'y aura de poème entre eux. Peut être que ce lien se renforcera comme une liane. Peut-être. Peut être pas.

Et cela n'avait aucune importance, là, maintenant. Ils se contentaient d'être là, le nez en l'air. Ils regardaient, immobiles, les flocons.

Sur le firmament, ils virevoltaient aussi légers que des papillons dans des rondes et farandoles.

Demain, ils ne seront déjà plus là. Demain, ne restera que le froid. Mais demain, ils seront riches. Les pierres, les branches et les toits seront parés de diamants et porteront des dentelles de givre. Ce ne sera que plus tard, que tout sera étouffé sous l'épais manteau blanc.

Aujourd'hui, juste les blancs flocons pour conclure un accord aussi fragile qu'eux.