Sous les branches de l'Espoir | Calemirhel & Lómion

 « Calemirhel ? »

La surprise d’Elhina ne t’étonnes pas alors que tu t’approches du sanctuaire. En effet c’est d’ordinaire le matin que tu passe ton temps au pied de l’Estel, que tu pries, médites et que tu réponds aux questions de tes frères et sœurs ou que tu dispenses tes conseils. Toutefois les circonstances étaient loin d’être ordinaires. Ça faisait cinq jours qu’ils étaient partis. Cinq jours que tu ne pensais qu’à ça et à la discussion que tu avais eu avec Aegden et Artiön avant qu’ils ne rejoignent la place Tyral pour leur discours de départ. Tu hésites encore à célébrer ton anniversaire, certes, un cycle, c’est important mais tu sais que tu ne pourrais pas fêter quoi que ce soit en sachant que cent cinquante frères et sœurs ont quitté la Prime Œuvre. En réalité à l’heure qu’il est ils sont probablement encore dans les frontières d’Anaëh mais tu sais qu’ils en sortiront bientôt. Aujourd’hui tu dois te décider avant qu’il ne soit trop tard alors tu es retourné dans le sanctuaire principale de la capitale pour y prier et écouter la Symphonie dans l’espoir de trouver la force de prendre la bonne décision. Même si au fond de toi tu sais déjà ce qu’il te faut faire.

« Je ne resterais sûrement pas longtemps. » La guide te regardes étrangement.
« Ça va ? » Tu réponds par un simple haussement d’épaule. « Si je peux faire quelque chose... »
« Non, il n’y a que moi qui peut. » Qui aurait dû, tu devrais te corriger mais à quoi bon ? « Ça ira mieux dans une heure ou deux. Est-ce que tu peux dire à ceux qui voudraient me trouver que je souhaite ne pas être dérangé ? »

Elhina hoche la tête et semble vouloir ajouter quelque chose mais tu pénètres déjà dans le sanctuaire en direction de l’Estel et lorsque tu arrives en face tu es surprise d’y voir le doyen de l’académie. Surprise et contente.

« Lómion, c’est un plaisir de te revoir ici. » Dis-tu d’une voix douce alors qeue tu fais quelques pas supplémentaires pour t’approcher quand il se relève. « Je peux peut-être t'aider à trouver les réponses que tu cherches. »

Tu hoches la tête, il n’a pas tort et tu le sais bien. Le savoir est probablement l’un des avantages de l’âge et bien peu peuvent se targuer d’avoir accumulé tant d’années que le doyen lui-même.

« Parfois la réflexion est plus importante que la réponse, qu’on la trouve ou non. » Tu baisses le son de ta voix pour se coller sur le volume de la sienne et tu poses une main sur son épaule, que tu veux rassurante, réconfortante, pendant quelques instants avant de la retirer. « Saches que je suis là si jamais le temps seul ne suffit pas.  »

Sa question te fait sourire. Non pas qu’elle soit ridicule, loin de là, mais si on te la pose rarement, la réponse reste toujours la même. « Les deux. Je viens toujours pour trouver des réponses, bien que j’en trouve moins que je ne le voudrais et en venant ici je cherche toujours des fidèles à conseiller… bien que j’en trouve moins que ne le voudrais. »

Tu te mets de profil pour embrasser le sanctuaire du regard, tes prunelles vagabondant entre les branches et les arbres, ne s’arrêtant que le temps d’un battement de cœur sur les animaux et les elfes, qu’il s’agisse de prêtres ou de laïcs, qui évoluent entre lesdits arbres avant que ton regard ne retourne sur le doyen.

« Parfois la seule fidèle que je cherche à conseiller en venant ici c’est moi. Mais sans doute n’es-tu pas venu ici pour m’écouter divaguer ; je dois dire que tu tombes bien, Lómion, j’avais prévu de t’écrire il y a… pas loin de deux ennéades maintenant, mais mes devoirs ne m’en ont pas laissé le temps et puis après il y a eu le départ du roi pour Naélis et j’ai été davantage submergé. Mais me voilà, plusieurs nuits blanches plus tard, un peu plus libre. »

Un peu plus mais pas tant que ça au final, encore une fois : pas autant que tu ne le voudrais. Mais ça il faudra bien t’y faire, tant qu’Artiön ne sera pas rentré, ça va perdurer.

« Je voulais t’écrire pour te demander deux choses. En réalité la première demande, que tu vas sûrement trouver ridicule, est plus adressée à l’Académie qu’à toi mais vu que tu en es le doyen… » en réalité tu en as un peu honte et tu baisses légèrement la tête pour rendre ton regard fuyant moins facilement visible. « Au fil des ans j’ai… disons que je ne maîtrise plus aussi bien la magie qu’autrefois et mes bases théoriques ne sont plus ce qu’elles étaient. Je n’ai pas envie de me reposer seulement sur mon expérience de la pratique pour éviter un accident, est-ce que tu connaitrais un professeur qui accepterait une nouvelle élève ? Ça ne presse pas mais j’aimerais pouvoir combler mes lacunes le plus vite possible. Toutefois ma seconde demande reste prioritaire et, justement, la voici : peux-tu m’aider à retrouver l’Arc de Kÿria ? Tu es le meilleur mysticiste du monde et j’ai peur qu’y arriver ne prenne des siècles sans toi alors que nous n'avons peut-être pas plusieurs siècles devant nous. »

« Pourquoi est-ce que je veux le retrouver… c’est la grande question n’est-ce pas? »

Tu te l’es longuement posée, cette question et plus d’une fois tu t’es demandé si ça en valait la peine, si I Emël n’avait pas demandé à sa Gardienne de le faire disparaître pour une raison qui lui était propre et qui étais-tu pour décider d’aller contre l’interdit de la Mère ? Tout au plus sa Main, sa Servante. Une servante peut-elle aller contre la volonté de la personne qu’elle sert ? Tu aurais tendance à dire oui. Tu aurais tendance à dire oui, à dire que c’est d’ailleurs cette liberté qui rend votre société si… agréable, si vivante. Mais Kÿria ne fait pas partie intégrante de votre société, si elle la regarde de loin, intervenant parfois pour le bien de l’ordre naturel, peux-tu aller contre sa volonté ? Si tu aurais tendance à dire, là encore, que oui, l’idée te met mal à l’aise. En effet aller contre une divinité était, ta créatrice qui plus est, celle à qui tu as dédié ta longue vie, contre l’ordre naturel. Mais n’était-ce pas pour ce genre de cas qu’I Mîngely força Elenwë a vous offrir un Souffle : vous permettre d’aller contre l’ordre naturel ?

« J’espère qu’il nous aidera à nous unir. J’espère que les clans et les citadins mettent leurs différents de côté. C’est sûrement naïf, j’en conviens, mais si Artiön est partis avec plus d’une centaine de pauvres Souffles en dehors de la Prime Œuvre c’est justement pour la protéger. Si je désapprouve la méthode employée, force est de constater que le but reste louable et je viens prier chaque jour au pied de l’Estel pour qu’Hiril Lothren leur permette de rentrer sains et saufs. Bien sûr je ne prétends pas avoir une quelconque influence sur les décisions prises par Kÿria, personne ne peux se targuer d’en avoir une, mais avec un peu de chance elle m’écoutera. En partant, il m’a assuré que l’Anaëh était gardé avec plus de zèle que jamais. Ça n’a pas empêché les drows d’arriver jusqu’à Alëandir… »

Ta gorge se serre en y repensant, à tout ce qui a été perdu. Tout ce que tu as perdu.

« Je suis certaine que tu te souviens bien mieux de Caranthir que moi, un souffle perdu parmi tant d'autres... ça n’a pas non plus empêché les arïn d’arriver jusqu’à Alëandir. Lómion, je veux retrouver l’Arc de Kÿria pour unifier les anedhels. Pour que les clans et les cités puissent protéger la Prime Œuvre ensemble, et pas séparément comme ce fut le cas récemment, lorsque le besoin s’en fait sentir mais plus que tout : je veux à tout prix éviter qu’une nouvelle partie de l’Anaëh finisse comme le Linoïn. »

Tu profites du temps de silence pour fermer les yeux, tes oreilles frémissent en entendant la Symphonie. Ce que tu aimerais, à l’instar des druides, pouvoir communiquer avec elle, pouvoir la comprendre davantage, pouvoir en être plus proche. Mais ta contemplation ne dure pas bien longtemps, peut-être moins que tu l’aurais aimé, car si tes yeux restent fermés, tu peux entendre les mots du doyen recouvrir le chant de la Prime Œuvre et tu pousses un soupir las.

« Vous avez peut-être raison... je me suis souvent demandé pourquoi la Gardienne d’I Emël a décidé de disparaître avec l’Arc. Je crains qu’il s’agisse-là d’une directive d’I Mîngely et si cette dernière a souhaité que son arme ne soit plus utilisée par ses enfants, peut-être est-ce parce que, justement, aucun d’entre nous n’est capable de l’employer à bon escient. Peut-être que personne n’en est digne. C’est une idée aussi déstabilisante que triste, n’est-ce pas ? »

Tes paupières se lèvent pendant que tu tournes légèrement la tête et tes yeux verts se posent sur l’Estel. Ta main libre vient empêcher une larme de rouler sur ta joue et les tatouages indiquant ton appartenance au clergé de Kÿria.

« En supposant que nous arrivons à la retrouver, que faire de l’Arc ? Voilà une question que je me suis posé tant de fois. » Tu as même eu une discussion à ce sujet avec Elhina quelques jours auparavant. Une fois de plus. « Certains voudraient le confier au Poing de Kÿria, ce qui serait le plus… logique mais je ne veux pas légitimer leur vision des préceptes d’I Emël en leur donnant son arme. Quant à moi je ne sais pas si j’aurais la force de l’utiliser. »

Si l’Arc est puissant, le danger pour le tireur l’est tout autant et tu ne doutes pas que beaucoup sont morts en croyant que Kÿria leur accorderait sa bénédiction avant de se rendre compte de l’erreur qu’ils ont fait. Tu imagines sans mal que la surprise fut bien plus forte que la douleur pour ceux-là. Tu te demandes si la Mère était bel et bien d’accord avec la cible mais que devant la certitude de l’archer qui employait son arc, devant l’audace, l’orgueil, la vanité de penser d’être sur la même longueur d’onde qu’une divinité, I Mîngely décida finalement de les punir et ce via leur erreur. Tu pousses un nouveau soupire avant de reprendre.

« Si jamais nous le retrouvons, peut-être que la meilleure chose à faire serait de ne pas s’en servir. »

Dire ça t’arraches un sourire, ça peut paraître contre-intuitif et pourtant, plus tu y réfléchis et plus tu penses que ça serait la meilleure chose à faire.

« Après tout les symboles sont parfois plus puissants qu’une arme, même une arme d’origine divine. Et puis si la personne que nous jugeons digne de s’en servir le fait et qu’I Mîngely n’est pas d’accord alors ça réduirait à néant tous nos efforts pour unifier noss et citadins. Mais ça c’est, encore une fois, en supposant que nous le retrouvons. Cela dit, si Hiril Lothren ne le veut pas, tout comme la réflexion est parfois plus précieuse que la réponse à laquelle elle mène, je pense que le voyage est parfois plus précieux que la destination. »

Tu ne peux qu’hocher la tête aux paroles du Doyen. Pourquoi I Mîngely n’a toujours pas choisi de Gardien ? Tu n’en sais rien et tu ne veux pas te poser la question, tu as trop peur de la raison et tu crains que l’expédition d’Artiön n’aide en rien. Tu espères seulement qu’elle ne montrera pas à I Emël que ses enseignements ne sont plus aussi importants qu’ils ne l’étaient. Cependant c’est bien de ta faute qu’ils sont partis, tu n’as pas réussi à les en empêcher et pour ça voilà peut-être ta punition : le silence de Kÿria.

« Ne sera-t-il pas trop tard lorsque nous en aurons vraiment besoin ? »

Tu ne sais pas et l’incertitude te terrifie. Et si c’était l’inverse ? Et si c’était justement ça qu’attendait I Emël pour vous envoyer un signe : que l’un de ses enfants se lance à la poursuite de l’Arc ? Toutefois la suite des paroles de Lómion t’arrêtent net dans ta réflexion. Un frisson remonte le long de ta colonne vertébrale. Tu aimerais pouvoir dire le contraire. Tu aimerais pouvoir le lui dire mais tu ne peux pas. D’autant plus que les raisons de ton désir ne sont pas si pures ou valeureuses que tu le voudrais. Ce n’est donc pas étonnant qu’I Mîngely ne vous aide pas : tes motivations sont teintées de peur. De la peur de revoir le passé se répéter. Qui plus est, ne serait-ce pas d’une arrogance rédhibitoire d’accepter l’aide de l’archimage sous les conditions qu’il a présenté ? Et en suivant ton raisonnement à propos de l’Arc et des archers qui l’ont manié, n’est-ce pas l’arrogance d’être convaincu de se trouver dans les bonnes grâces de Kÿria qui vous mènerait à votre perte ? Parfois ne rien faire est la meilleure solution, si détestable qu’elle puisse être.

« Merci beaucoup mais je crains que ce ne soit pas nécessaire. Tu as raison, I Mîngely nous montrera la voie vers son Arc lorsqu’elle l’estimera nécessaire, lorsqu’elle nous en jugera digne. Pas avant. En attendant il nous faudra faire confiance à Artiön et les courageux soldats de l’armée royales et des milices pour protéger la Prime Œuvre. Sans compter que l’Anaëh a montré qu’elle est capable de se défendre seule. »

Bien que les conséquences d’une telle autodéfense hantent encore le Linoïn et c’est bien ce que tu voudrais éviter : que ça se reproduise.

« Encore merci, Lómion, pour la discussion. »

Ta main se serre autour de celle du doyen avant de la lâcher pour lui permettre de s’éloigner et c’est comme s’il t’avait ramené sur le droit chemin. En attrapant ta main il t’a sortis de tes réflexion hasardeuses sur les volonté d’I Emël dans lesquels tu évites d’ordinaire de te perdre car tu sais qu’il s’agit-là d’une perte de temps. Tu le sais pertinemment mais ça n’empêche que tu tombes de temps à autres dans le piège et encore plus lorsque tu réfléchis à l’Arc de Kÿria.

« Pas plus que quiconque. » Tes lèvres forment l’ébauche d’un sourire teinté de tristesse. « L’Aran et ses soldats sont partis par amour pour la Prime Œuvre.. Comme tu as repris l’œuvre de tes prédécesseurs, de ton mentor. Des choses dont je suis incapable. J’ai la chance de pouvoir me dédier uniquement et pleinement à nos frères et sœurs, à l’Anaëh. C’est ma façon de rendre une partie de ce qu’Alëandir, entre autres, m’a donné. »

C’est en quelques sortes ton devoir mais ça serait réducteur de dire que ce n’est qu’un devoir. C’est ce à quoi tu as dédié ta vie et tu ne l’aurais pas fait si tu n’aimais pas profondément faire tout ça. Tu hoches la tête lorsqu’il reprend la parole, le changement de sujet est bienvenu alors tu sautes sur l’occasion. En effet, même si tu en as un peu honte, ta maîtrise de la théorie n’est plus ce qu’elle était.

« C’est exact, je me suis rendu compte qu’à force de ne plus l’enseigner, j’ai un peu perdu la théorie de vue et, si je ne m’abuse, au vu de ton champ d’expertise, je pense que tu serais on ne peut plus en mesure de m’aider. Cela dit, j’imagine que tu es très occupé mais j’ai peur que mes responsabilités ne me permettent pas de suivre le cursus commun aussi assidument que d’autres… bien que j’ose espérer ne pas avoir tant perdu que ça. »

L’idée n’était en soit pas mauvaise mais elle ne t’allais pas vraiment.

« Je n’ai pas besoin de leçons théoriques médicales mais bien thaumaturgiques. Je peux refermer des plaies ou réparer des os mais je perds beaucoup trop d’énergie dans le processus et gaspiller l’énergie qu’I Emël met à notre disposition m’est… désagréable. »

Ta poigne se raffermit sur ton sceptre alors que tu sens ton médaillon sur ta poitrine avec davantage d’acuité pendant que tu utilises ces deux objets qui forment ton focalisateur. Tes lèvres s’animent pour prononcer une prière muette, demandant à la Mère qu’elle te prête la force d’accomplir sa volonté. Tes tatouages faciaux verts s’illuminent d’une douce lueur vert clair et la couleur d’émeraude de tes iris envahissent le reste de tes yeux, faisant disparaître leur blancheur sans autre forme de procès. Puis tu t’arrêtes-là, tu dissipes lentement l’énergie que tu as réussi à accumuler et progressivement ces effets secondaires disparaissent. Tu t’autorises un seul claquement de langue pour transmettre l’étendue de ta frustration.

« Un vitaliste pourrait m’aider mais comme pourrait le faire un pyromancien ou un adepte de Tari mais un mysticiste serait d’autant plus apte à résorber mes lacunes… et peut-être que le meilleur de Miradelphia serait d’autant plus apte. »

Tu en doutes un peu, après tout tu ne comptes pas aller suffisamment loin pour que seul Lómion puisse te sauver. Cependant tu espères secrètement qu’à travers l’enseignement qu’il pourrait t’apporter, tu pourras l’aider à dissiper la peine que tu as pu apercevoir en le découvrant au pied de l’Estel. Après tout tu sais très bien que les émotions peuvent être un moteur particulièrement efficace et si tu peux aider quiconque à tourner des pensées et sentiments négatifs vers un but productif alors tu pourras te dire que tu auras accomplis ton devoir. Avant de poursuivre tu te racles la gorge.
« Je dois admettre que si j’ai mis si longtemps à me résoudre à régler ce problème de maîtrise c’est aussi parce que ça captive les enfants... » tu sais que ça peut paraître stupide, et en soit ça l’est, mais tu ne peux pas y résister. « Je suppose également que le soucis vient de mauvaises habitudes. De mauvaises habitudes que j’ai prises durant mon temps à accompagner l’armée royale, comme tu le sais sans doute, parfois on a pas le temps de former un sort comme on le voudrait et pour sauver des vies j’ai pris des raccourcis. »

Tu pousses un long soupir.

« Si jamais j’arrive à retrouver mon niveau théorique d’antan, j’enseignerais avec plaisir à l’Académie bien que je ne puisse pas promettre des leçons régulières et puis, je n’en ait jamais donné à des adultes. »

Ou de jeunes adultes, ce qui pouvait être très différent, certes, mais sans doute bien loin d’enfants.

Tu es tentée de répondre au doyen que, tout Ëala de la magie qu’il est, Elenmár, ce ne sont pas ses flux et même si tu aimerais beaucoup discuter du sujet avec Lómion du sujet, et de la nature de la magie en général, ça devra attendre une autre fois.

« Inutile d’être si modeste après tout c’est un fait, jusqu’à preuve du contraire, jusqu’à ce qu’un mysticiste plus talentueux que toi fasse son apparition, tu es le meilleur de Miradelphia. » En réalité peut-être qu’il en existe un autre, de mysticiste, meilleur, mais vu qu’il n’évolue pas dans la Prime Œuvre, ou du moins que tu ne le connais pas, attribuer ce titre à Lómion te semble juste. « Si tu as un concurrent il n’a qu’à se montrer. »

Un sourire passe sur tes lèvres en imaginant la compétition qui les départageraient et pendant un instant tu te demandes en quoi pourraient bien consister ces épreuves mais tu arrêtes bien vite parce que tu sais que tout ce que tu pourrais imaginer serait sûrement faux.

« Merci. »

Ton sourire s’agrandit aux dernières paroles du doyen, c’est toujours agréable à entendre, surtout lorsque c’est pensé. Et même si tu aurais tendance à davantage privilégier le culte dont tu as la responsabilité pour apprendre ou enseigner, tu dois admettre qu’échanger avec l’Académie, et pourquoi pas entamer une collaboration plus étroite entre les mages du clergé et les universitaires. Tes oreilles se dressent en entendant quelqu’un approcher, un peu timidement, derrière toi. Ou du moins sur le côté. Tu te rends d’ailleurs compte que vous êtes restés au pied de l’Estel et que vous avez peut-être empêché quelqu’un qui voulait s’installer sous ses branches pour y rester seul un instant de le faire. C’est Elhina qui s’approche, un air un peu gêné sur ses traits.

« Assairon. » Elle hocha la tête pour compléter ces salutation sommaires. « Je suis désolée d’interrompre votre conversation mais vous allez être en retard, Manëmá. »

Tu fermes les yeux en soupirant, te sentant stupide de ne pas avoir fait attention au temps, temps que tu n’as pas vu passer. Tu te tournes ensuite vers le doyen.

« Je te présente mes excuses, Lómion, mais je dois t’abandonner, je t’écrirais ce soir. Ou quand j’aurais un moment. »