Le temps des comptes [Mæriniòs]

Kÿrianos, Deuxième ennéade de Verimios, An XIX, Cycle XI

Trois coups.


Suivi d’un silence.


Cela sembla prendre une éternité avant qu’un semblant d’humain ne vienne finalement ouvrir la grande porte de bois. Ce dernier eut un air apeuré alors qu’il se trouva devant trois figures de rouge vêtue. Trois masques inébranlables qui fixaient silencieusement la créature qui les invitait à entrer. Sans attendre, l’une qui avait une chaîne enroulée à son bras entra, suivi de près par deux autres. Si la première avait un masque des plus sobres, les deux autres prêtres de Kiel abhorrait des masques ornés de pierre précieuse en tout genre, alors que le rubis de leurs prunelles regardaient l’esclave comme leurs prochaines proies.


« Alu inbau dosst veldruk, tiu. Xuat morfeth udossa kyorl. »
Va chercher ton maître, insecte. Ne nous fais pas attendre.


Gronda la voix rauque à travers son masque sortie de pierre précieuse. Sans attendre l’esclave s’inclina avant de se précipiter dans le couloir à la recherche du drow en question. On aurait presque dit que ce dernier tentait de fuir son pire cauchemar. Son teint fable, sa respiration saccadée ne laissait rien au hasard. Les figures qui lui faisaient face était définitivement le pire qu’il avait pu imaginer. Assez révélateur lorsque l’on savait qui était son maître…


« Lor a lil' jor z'haan.  Lu'oh verve xun dos talinth uk shlu'ta re’sistt udossa »
Regarde le rat courir. Combien de temps crois-tu qu’il puisse nous résister?


« Naut verve z'lonzic tlu ssran ol»
Pas assez longtemps pour en valoir la peine.


La première créature masquée, interdite, ne répondit rien, se contentant de fixer de son regard blanchâtre l’humain qui courait dans le couloir. Sa main droite se crispa un moment, alors que ses yeux se fermèrent pendant une seconde, écoutant la voix de sa maîtresse. Une réaction qui ne dura qu’une minuscule seconde avant que les prunelles vides ne s’ouvrent à nouveau.


« Ol anika' selg'tarn.  Ud'phuul ghil whol folbol mzild kleel taga ukta. »
Cela n’a pas d’importance. Nous sommes ici pour quelque chose de beaucoup plus important que lui.


Les deux autres prêtres haussèrent les épaules, comme ennuyé par la réaction de leur supérieur.


« Xun dos llaar talinth uk wynthye? »
Croyez-vous réellement qu’il a réussi?


« Usstan kestal whol ukta.  Udossta jabbress anika' saph houj. »
Je l’espère pour lui. Notre maîtresse n’apprécie guère l’échec.


Les deux prêtres eurent un sourire carnassier derrière leurs masques. Cela faisait un moment que le prêtre de Kiran travaillait sur son projet et il était maintenant temps de voir ce qu’il avait réussi à concevoir. La maîtresse des souffrances avait un but défini – celui de corrompre un bout de la péninsule. Tellement de façon de répandre le mal… Tellement de façons de répandre la souffrance, tellement de façons de les faire hurler. L’Obok Yatharil pouvait sentir l’excitation gronder en elle. Le prochain voyage sera définitivement intéressant.

C’était dangereux d’attirer l’attention de l’avatar de Kiel. Très dangereux. Peu finissait réellement avec leur flamme ou toutes les parties de leurs corps. Mais pourtant, le grand-prêtre de Kiran la prenait volontiers, fier de présenter ses créations à l’avatar de Kiel. Il fallait dire que cela pouvait définitivement vous donner un certain prestige si vous réussissiez, peut-être pas aux yeux du triumvirat, mais définitivement aux regards des yeux. Gul’Uss écouta attentivement ce que l’ilythiiri lui racontait, ses prunelles vides fixant ce dernier qui lui décrivait, montrait ses découvertes. Si les masques qui recouvraient ses visages ne laissaient transparaître aucune émotion, les deux adeptes derrière elle, avaient peine à se tenir tranquille. Les membres bougeant sans cesse, sautillant presque de joie lorsqu’ils virent la douleur qui ornait les visages inertes des victimes. Kha’linas quant à elle, resta totalement inerte, se contentant d’observer de ses prunelles vides. Elle laissa volontairement un silence s’installer lorsque Mæriniòs termina sa présentation, avant de finalement briser l’ambiance inconfortable qu’elle avait créée.


« Udos won`t inbal thalack vantua. »
Nous n’aurons pas d’engin de siège.


Elle prit rapidement la fiole avant de la porter devant son masque, les prunelles vides observant le liquide incolore qui glissait contre le verre. Un sourire carnassier s’agrandit derrière le métal glacial.


« Tesso uns'aa vel'bolen s'ck ? lueth vel'bol phu' lil' ilindith pholor lil' rivvilse lueth lil' arlathil? »
Dis-moi quels sont ses maladies? Et surtout, quels sont les effets sur les humains et la flore?


Après tout, ce n’était pas une seule chose qu’elle avait pour mission de détruire, mais tout ce qui avait dans la zone. Corrompre la terre, la détruire, faire qu’elle soit inhabitable… et faire payer tout ceux qui oseraient s’en approcher.


« Byr klez? »
Autre chose?


Sa réponse fut rapidement répondue lorsqu’une de cette créature hideuse ouvrit une énorme porte de métal. Le spectacle qui s’offrit à l’Obok Yatharil fut franchement, incroyable. Ces acolytes ne purent s’empêcher d’avoir un rire cruel en voyant les humains qui s’étaient arraché leurs propres membres.


« Mayoe udos zhal'la sila fol vial xuil lil' cress.  Ori'gato nind pholor lil' suul d'lil niar'haanin belbau natha brorn ulu lil' darthirii. »
Peut-être devrions-nous amener quelques fioles de la toile. Les laissés sur le bord de l’Oliya pour donner une surprise aux elfes…


C’était en soit, une bonne idée, et cela permettrait au groupe de se rendre à leur destination finale sans avoir à se soucier de leur mortel ennemi. L’Obok Yatharil ne répondit rien, se contentant de fixer le prêtre de Kiran, attendant que ce dernier ne confirme qu’il était déjà à l’œuvre, ou qu’au moins il s’arrangerait pour rendre ce projet viable.


« Natha yentil de' elghinyrr animals xuil lil' cress lueth ud'phuul bwael ulu alu.»
Quelques animaux crevés avec la toile dessus, et allez, on est en bonne posture.


Kha’linas se retira du groupe, faisant un pas vers les restants des humains, observant leurs blessures, leurs souffrances. Cela étendrait définitivement leurs marges et pourrait corrompre une large portion de la péninsule rapidement.


De villages et de villes entiers, je déchirerai la chair
Laisse-là gagner leur haine encore et pour toujours
Ils souffriront
Oui, ils souffriront
Et ils hurleront
Des milliers de cris
Encore et pour l’éternité…


« Ol zhah draeval ulu xun nindol tresk'ri ulu ilta zigh.  Nindol orn tlu lil' rift tu'fyr dro lueth elghinn.  Lil' tsyde divide tu'fyr ssuu'hha lueth nind phalar.  Nind orn cling ulu dro xuil lil' natha trala b'luth'ol.  Lueth udos orn nym'uer lil' zuch ul'nusst de' nind chath wun jiv'undus.  Elghinn  orn naut tlu natha sut zil lil' lil' hee manna orn tlu kyorlin whol nind. »
Il est temps de remodeler ce monde à son image. Cela sera la rupture entre la vie et la mort, le mince fossé entre le souffle et leur tombe. Ils s’accrocheront à leur pathétique vie avec le fil le plus fin. Et nous entendrons les gémissent constants des souffles tourmentés. Ils apprendront que la mort n’est pas une libération, que les mannes errantes les attendent.

Kha'linas se retourna vers le Grand-Prêtre avant de continuer;


« Nindol orn tlu natha verve z'hind.  Inbau kr'athin.  Udos orn sevir wun natha mzil de' draeval.  Morfeth zhaunus nindel rilbol zhah kr'athin ulu alu lueth wun sol'dorn a lil' xuz de' huthin sishaa. »
Cela sera un long voyage. Sois prêt. Nous partirons dans quelques ennéades. Assure-toi que tout est prêt à partir et à Sol’dorn à la fin du mois.


Sans attendre l’Obok Yatharil tourna les talons pour sortir du laboratoire, avant de s’arrêter net et reprendre la parole;


« Usstan kestal ulu kyorl dos xuil udossa.  Xuat ori'gato uns'aa harl, Mæriniòs. »
J’espère te voir avec nous. Ne me déçois pas, Mæriniòs.


Une menace? Non, qu’un cruel rappel de ce qui pourrait lui arriver si ce dernier décidait d’abandonner la quête que le visage hurlant leur avait donné. Kha’linas savait pertinemment qu’elle n’avait pas besoin de le convaincre. Il viendrait. Il viendrait voir son invention à l’œuvre. Il voulait voir la dévastation, la douleur et sentir la délicieuse odeur de la mort. Après tout, Mæriniòs était dévoué à leur cause. Du moins, l’espérait-elle pour sa flamme.