Prise au piège des bandits (PV Lirulin) (TERMINE)

Calla se réveilla de bonne heure, se lava et quitta la petite chambre de l'auberge avant le lever du soleil. Elle passa au comptoir et sonna pour appeler l'aubergiste et payer sa chambre. Celui-ci, furieux de devoir se réveiller si tôt lui fit payer un prix plus élevé mais qu'importe, elle avait dérobé une jolie boussole d'argent la soirée précédante. Une fois revendue elle lui raporterait une somme confortable.

Calla rejoignit les écuries, s'occupa rapidement de son cheval, le sella et se hâta de quitter la Dross avant que le propriétaire de la boussole ne fasse son apparition. Elle récupéra son épée courte aux portes de la ville et fit prendre le trot à sa monture en direction de la forêt. Le soleil commençait à se lever, donnant une teinte dorée à la végétation.

Calla vérifiait les pièges des chasseurs de la région, peu motivée à chasser elle-même. quand elle entendit une petite voix enfantine

"Au secours, aidez-moi ! "

La jeune femme ignora les cris et poursuivit son chemin, mais les appels continuèrent sans que quelqu'un n'approche.
Avec un soupir, elle se résigna à aller lui porter secours. Elle suivit donc la petite voix qui l'appelait et se retrouva face à une petite fille, la cheville prise dans un piège.

" je vais t'aider petite attends ! "

Soudain Tamorayn se stoppa net, aux aguets. Pensant que c'était un sanglier elle attendit patiemment mais elle n'entendit rien.

" Allez Tam' qu'est-ce qu'il y a? "

Elle serra les mollets mais l'étalon hennit et recula. Elle essaya encore avec plus d'insistance mais il se cabra violemment.

" Aidez-moi s'il vout plaît ! "

Mettant ces désobéissances sur le compte du caractère têtu de son cheval, Calla mit pied à terre et se diriga vers la petite blessée. Alors qu'elle allait examiner sa cheville, une flèche siffla à son oreille, et en voyant l'enfant se relever d'un bond et courir derrière les buissons elle comprit que tout cela était un piège.

Elle courut vers Tamorayn mais deux bandits lui barraient la route. Elle se retourna mais deux autres bandits l'avaient déjà encerclée. Elle cria aussitôt un ordre à sa monture et celle ci disparut dans la végétation. Calla savait très bien qu'un cheval sans cavalier attirait toujours l'attention de quelqu'un, elle espérait seulement qu'il ne serait pas trop tard....
Les bandits avancèrent de quelques pas et s'arrêtèrent lorsqu'elle sortir son épée du fourreau.

" Tu as quelque chose qui m'appartient petite garce"

[HRP]Désolé, mes posts ne sont pas si longs, d'habitude. C'est le récit de deux jours. Les autres seront plus courts.
En espérant que ça te plaira...[/HRP]


Quelques jours après sa rencontre avec Etheldred, Lirulin avait décidé de mettre en applications les indications de l'herboriste.

Un coup d'oeil à la fenêtre en se levant et elle savait que la journée était idéale : petite brise, temps clair, et quelques nuages qui assuraient que la chaleur ne serait pas insoutenable.
Après s'être préparée, elle était descendue, saccoches à l'épaule, pour s'occuper de Ventfoudre. Le petit cheval ne demandait qu'à sortir. Lirulin était d'accord avec lui : la ville commençait à lui peser.

Aussitôt dit, aussitôt fait ; les deux amis se retrouvèrent un peu plus tard à s'éloigner des hautes murailles de la capitale. La cavalière attendit d'être un peu enfoncée dans la plaine d'Atral pour monter à cheval.
La piste s'étalait devant eux, claire, faite de terre et d'herbes couchées. Moelleuse à souhait.

Cette première journée de liberté, en direction de la forêt d'Aduram, se déroula lentement, suivant le petit galop de Ventfoudre. Lirulin lui laissa choisir son rythme, et il enchaîna de lui-même les temps de galop et ceux de pas ou de trot, pendant lesquels la cavalière courait à son côté.
Heureux d'être ensemble, ils semblaient rire à chaque faux-pas de l'autre, partageant cette complicité chère au coeur de Lirulin.

L'immense forêt d'Aduram apparut en fin de journée. Elle ressemblait à une tache vert foncé perdue dans un océan jaune-vert. Puis la tache s'étira, jusqu'à envahir l'horizon.

Ventfoudre trouva un ruisseau traversant les arbres pour aller se perdre dans la plaine. Ils y passèrent la nuit.
Couchée dans l'herbe, Lirulin regardait les étoiles et écoutait la nuit. L'auberge n'avait pas cela. Le vent du soir jouait dans les branches des arbres et les grillons chantaient.

~~~~~~~~~~~~

Lirulin se réveilla tôt le lendemain. Le ruisseau, plein d'entrain, joyeux, heureux d'aller toujours plus avant, semblait doué d'une vie propre dans la douce lumière du matin. Et Lirulin aimait le penser. Elle trouvait merveilleuse l'idée de communiquer avec les arbres, le vent et l'eau des rivières. Entendre un appel au secours lancé à des miles de là. Ecouter les conversations des arbres entre eux. Mais la jeune femme n'était pas une elfe ; le ruisseau ne lui murmurait rien.

En revanche, il l'appelait. Vient ! Vient ! disait-il, et elle se hâta de lui obéir. La poussière du voyage partit bien vite. Elle remit les mêmes vêtements que la veille - pantalons foncés, chemise cintrée et bottes en cuir. Elle noua ses cheveux en demi-queue.
Elle s'occupa ensuite de son cheval. Bientôt, ils furent près pour une nouvelle journée de voyage.

Au contraire de la précédente, celle-ci ne se passa pas au galop. Lirulin marchait à côté de Ventfoudre, et elle cherchait les plantes que lui avait conseillée Etheldred. Après tout, ils étaient venus pour ça.
Sols frais et humides ; camomille ; lisière de la forêt ; valériane. Elle cherchait lentement des yeux, s'accroupissant parfois pour vérifier un doute.

Sa recherche fut interrompue par un galop soudain. Ventfoudre releva vivement la tête ; il écoutait. Lirulin aussi.
Ils découvrirent brusquement un cheval sans cavalier. Bai brun, l'étalon était nerveux et inquiet. Il se dirigeait de la forêt vers la plaine. Il passa au trot en les voyant. La jeune femme le laissa venir, puisqu'il venait dans leur direction, et lui barra la route avant qu'il ne s'éloigne. Avec des gestes lents, elle parvint à ne pas l'effaroucher, et se saisit finalement des rênes.

Alors, mon ami, où est ton cavalier ? lui demanda-t-elle. Calme-toi, va. On va le retrouver. Ca va aller.
Tu viens, Vent' ? C'est par là.

Elle monta à cheval et continua à mener leur nouvelle recrue par le bout des rênes.
Regard fixé sur le sol, elle tentait de ne pas perdre la piste des yeux. Heureusement que l'étalon avait galopé tambour battant, les traces étaient facile à suivre. Il était d'ailleurs plus calme à présent. Tant mieux, l'observation en était facilitée.

Le sifflement d'une lame glissant hors du fourreau lui fit dresser la tête. Où ? Où ? A gauche. Les traces disaient gauche. D'un geste du poignet, elle refit passer les rênes de l'étalon par dessus sa tête. Elle se saisit de celles de Ventfoudre. Une main sur les rênes, l'autre sur la garde de la Reitschwert. Trot souple sur le tapis de feuilles. Une femme l'épée en main. Quatre hommes.

"Tu as quelque chose qui m'appartient, petite garce."

Je suis désolé mais je ne vois qu'une femme, la garce m'est invisible. Où est cet animal étrange, dites-moi ?

[HRP]: non c'est super ^^ [/HRP]

Une voix attira soudain l'attention des bandits. Calla ne tourna pas la tête pour ne pas perdre des yeux ses ennemis mais elle vit du coup de l'oeil une jeune femme sur un cheval gris, et Tamorayn qui grattait le sol du sabot.

"Merci d'être venue !"

Les bandits dévisagèrent l'inconnue quelques secondes puis l'un d'eux s'écria :

"Te mêles pas de ça toi"

Leur chef semblait au contraire ravi de la voir, apparemment il ne considérait pas les deux jeunes femmes comme une menace mais il avait tort. Calla venait de passer avec succès les tests physiques pour entrer dans l'armée humaine et la jeune femme qui était venue lui porter secours n'avait pas l'air d'une débutante, loin de là. Comme l'inconnue ne paraissait pas disposée à bouger ni inquiétée par les bandits, ils décidèrent de se séparer. Deux guerriers contre une femme ? de la rigolade ! Le chef s'exclama même :

" Je crois qu'on va bien s'amuser avec ces deux-là ce soir..."

Les autres bandits ricanèrent. Ils avaient l'air de trouver cela amusant de violer une femme, ces porcs. Des souvenirs lointains remontèrent aussitôt à la surface mais elle les chassa immédiatement et se jeta sur l'un de ses adversaires avec une étonnante rapidité. Il para son coup mais il semblait surpris, de toute évidence cela n'allait pas être aussi simple qu'ils avaient prévu.

Elle recula de quelques pas avant que l'autre bandit ne vienne aider son acolyte et tourna autour d'eux, cherchant une ouverture et espérant que l'inconnue l'aiderait car elle n'était pas sûre de pouvoir tenir tête à quatre bandits dans un endroit aussi étroit.

" Rends moi la boussole et tout se passera bien "

Calla ne répondit même pas elle savait que ces hommes n'avaient aucune parole. Voyant une ouverture elle se précipita et si sa lame fut une nouvelle fois bloquée, elle entaille légèrement la joue du bandit.

" Vous m'excuserez mais je préfère la garder ! "

" Tant pis pour toi alors"

Il bondit dans sa direction mais Calla bloqua sa lame. Il était plus lent qu'elle mais plus fort aussi. Elle les avait elle aussi sous-estimé.

Lirulin sourit. Malgré l'affrontement qui se profilait, elle était contente que la jeune femme la remercie. Ca faisait toujours plaisir, et cela lui donnait un regain d'assurance.

Néanmoins, les bandits semèrent le doute dans son esprit. Elle hésita quand un des quatre bandits réclama une boussole. La femme encerclée refusa de rendre l'objet.

La cavalière aurait préféré une autre réponse. Un « Je n’ai pas de boussole » ou « Je ne vous ai rien pris » lui aurait mieux convenu. Maintenant... allait-elle affronter des hommes pour une voleuse ? Peut-être étaient-ils dans leur bon droit...

Elle balaya du regard le tableau qu'elle avait sous les yeux. Les quatre hommes n'étaient visiblement pas recommendable. Ils portaient tous des vêtements sombres ; leurs mains jouaient avec leurs armes avec habileté, preuve d'une certaine habitude ; leur regards, posés sur elles deux, étaient mauvais.
La jeune inconnue était une grande femme aux longs cheveux noirs. Elle a un cheval, réalisa Lirulin. L'étalon lui appartenait. Que deviendrait-il si elle se faisait tuer ?

A quatre contre deux, voire quatre contre un si elle se désistait, le combat était très inégal. Elle n'était pas lâche ; laisser quelqu'un mourir pour un doute était impensable. Avec des efforts, elle pouvait ne pas les tuer. De toute façon, elle ne les aurait pas tué si elle avait pu l'éviter, et le fait que la jeune femme ne soit pas totalement innocente de faisait que renforcer ce sentiment.

Elle avait presque pris sa décision. Ce qui fit qu'elle pressa les flancs de Ventfoudre, ce fut la phrase du chef des bandits.

" Je crois qu'on va bien s'amuser avec ces deux-là ce soir..."

Une remarque qui la révolta tellement que, toutes ses hésitations envolées, elle dégaina. La Reitschwert sortit de son fourreau presque sans bruit. C'était une lame polie à l'usage.

Alors que l'autre cavalière se fendait, Ventfoudre s'élança sous la pression des jambes de sa cavalière. Il se plaça naturellement à gauche du bandit le plus proche. Il connaissait.
L'homme brandit son épée courte. Lirulin se pencha en avant et transperça le bras du bandit. La lame buta contre l'os. Il lâcha son arme dans un hurlement. Bien : il ne toucherait pas son cheval.

Elle fit volte face après quelques foulées. Le second fut moins facile. Peut-être avait-il l'habitude d'affronter des adversaires montés, sans doute l'effet de surprise du premier assaut avait-il disparu.
Il se baissa pour éviter la lame et visa les jambes. De pression de talons, elle décala les hanches de sa monture. Une vive brulure éclata dans sa jambe. Elle l'avait manqué.

Elle tourna et s'arrêta quelques mètres plus loin.
N'ayant plus pour elle la surprise, elle prit une autre tactique. Elle se laissa venir. Elle n'était rien qu'une femme, elle n'avait pas tuer son compagnon ; que pouvait-elle lui faire ? Sous ses jambes, elle sentit tous les muscles de Ventfoudre se contracter.

Eh ! s'écria-t-elle. Le cheval repartit. Il méritait son nom, Ventfoudre. L'épée fendit l'air. Le bandit tomba à genoux, les deux mains sur le visage.

Elle avala sa salive et regarda autour d'elle. La jeune femme ?

Le bandit restait bouche bée, stupéfait de voir son propre sang couler. Passé les premiers instans de surprise, il s'essuyait la joue du dos de la main et regarda Calla d'un air qui se voulait féroce mais la jeune femme ne se laissa pas troubler. Elle soutint son regard tout en surveillant son deuxième adversaire.

Puis les deux bandits échangèrent un regard, et l'un sembla faire un signe. Calla se prépara aussitôt à une attaque surprise, et en effet quelques centièmes de secondes plus tard ils se jettèrent sur elle mais elle esquiva une nouvelle fois. Sachant qu'elle ne tiendrait pas longtemps dans un espace aussi réduit, Calla décida qu'il valait mieux rejoindre le sentier où le terrain serait plus dégagé.

Elle attaqua le bandit le plus proche et avant que son acolyte ne puisse l'aider elle avait déjà disparut, pour réapparaître un peu plus loin, les défiant du regard. Ses deux adversaires ne se firent pas prier et se lancèrent à sa poursuite mais chaque fois qu'ils portaient un coup elle se retirait et attaquait par surprise d'une autre direction. Ses attaques éclairs obligeaient ses assaillants à suivre le mouvement, et peu à peu ils durent se mettre à courir pour la suivre. Progressivement ils atteignirent le sentier, où la végétation était moins dense.

"Maintenant tu ne vas plus pouvoir t'enfuir"

ricana le bandit.

Calla fit mine d'être dépitée mais en réalité elle était soulagée d'être dans un espace dégagé. Tout à coup, elle entendit un hurlement qui heureusement ne venait pas d'une femme. Elle espérait que l'inconnue qui était venu lui porter secours n'était pas blessée, mais pour l'instant il lui fallait surtout s'occuper de sauver sa propre peau.

Les deux bandits paraissaient aussi déstabilisés mais ils se reprirent vite. Le combat continua, plus féroce que tout à l'heure car les trois adversaires étaient impatients d'en finir. Après quelques minutes et voyant qu'elle ne pouvait pas avoir le dessus contre les deux hommes ensembles, Calla décida qu'il valait mieux les affronter séparément et pour cela il existait une méthode infaillible : la fuite.

La jeune femme para un dernier coup d'épée et s'enfuit à toutes jambes, sachant que deux personnes ne couraient jamais à la même vitesse et que l'un des deux hommes la rattraperait forcément en premier. En effet, après une dizaine de mètres, elle sentit qu'on arrivait à sa hauteur et se retourna avec une rapidité étonnante, elle frappa l'homme à la gorge. CElui-ci ne s'attendait pas du tout à cela et s'écroula mort avant d'avoir pu comprendre ce qui lui arrivait.

Le deuxième, voyant que ce n'était qu'une ruse supplémentaire, se montra plus méfiant et ralentit avant d'arriver à sa hauteur et se mit en position de défense. Calla attaqua la première, et le combat reprit. Les deux adversaires étaient à bout de souffle mais l'adrénaline leur permettrait de tenir la cadence encore quelques minutes. Enfin, Calla remarqua une ouverture et attaqua aussitôt. Le bandit tenta de parer mais la jeune femme bloqua l'épée avec son poing, bien protégé par le gantelet. Du sang coula sur les deux lames car le coup porté par le bandit avait légèrement entaillé le gantelet, désormais inutile. L'homme resta quelques secondes sur ses jambes, les yeux écarquillés avant de s'écrouler.

Satisfaite, Calla essuya sa lame avec précaution et la rangea dans son fourreau avant de retourner rejoindre l'inconnue et les deux bandits. Lorsqu'elle arriva, elle vit que les deux hommes étaient blessés mais toujours en vie. La jeune femme, elle, était fièrement assise sur son cheval.

"Je m'appelle Calla, Calla Belacqua. Je vous remercie d'être venue me sauver. Comment vous remercier ? "

Tamorayn s'approcha de son amie, et Calla lui caressa longtemps les naseaux.

"J'aurais du t'écouter..."

Lirulin fut soulagée de voir revenir la jeune femme. Visiblement, elle n'était pas blessée. A un contre deux, la cavalière avait craint qu'elle ne s'en sorte pas.

"Je m'appelle Calla, Calla Belacqua. Je vous remercie d'être venue me sauver. Comment vous remercier ?"

Le nom de Calla Belacqua n'était pas inconnu à Lirulin. Certaine de le connaître, elle n'arrivait pas à le remettre dans son contexte. Où l'avait-elle entendu ?

Pour se donner le temps de réfléchir, elle rengaina et démonta. Sa jambe la portait. Elle se pencha pour regarder la blessure. Superficielle, la plaie était plus cuissante qu'autre chose. Elle saignait à pleine.

Lirulin passa la main et le regard sur Ventfoudre. Il n'était pas blessé. Elle porta plus précisement son regard sur ses pieds. Aucune égratigure.

Merci, mon ami. Tu ne choisis pas de te blesser, je sais... mais merci.

Elle entoura son encolure et le serra fort contre elle, tout à son soulagement. Ventfoudre souffla fort, semblant dire à sa cavalière qu'elle s'inquiétait pour pas grand chose. Malgré toutes les fois où ils avaient combattu ensemble, elle ne pouvait s'empêcher de se faire du soucis.
Lorsqu'elle le lâcha, sa chemise claire était parcemée de poils gris.

Elle se tourna vivement vers Calla. Il lui semblait... Oui, voir la jeune femme et son cheval côte à côte avait fait remonter le souvenir. Calla Belacqua. Le nom était encore frai dans sa tête, et pour cause : elle n'avait jamais entendu ce nom ; elle l'avait lu, il y a deux jours.
A l'instant où elle voulait prendre la parole, une autre voix cria.

Elle les a tués ! Elle les a tués, la catin !

Ah oui... les bandits blessés... Elle les avait oublié, ceux-là ! Main Transpercée, les yeux exorbités, pointaient un doigt accusateur sur Calla. Main sur les Yeux s'accrochait comme il le pouvait à son compagnon. Leurs paroles furent comme une douche froide pour Lirulin.

C'est vrai ? Vous les avez tués ?

Elle sentait sa poitrine se gonfler sous l'indignation.

Vous les avez volés et vous les tuez ?
Si vous voulez me remercier de vous avoir sauver la vie, vous me devez au moins à la vérité. Qu'est-ce que cette histoire de boussole ? L'avez-vous réelement volée ? Je vous croyais cavalière, pas voleuse.

L'inconnue semblait blessée à la jambe, rien de bien grave mais elle se souciait plus du sort de son cheval que du sien. Elle semblait pensive et allait prendre la parole lorsque les bandits réalisèrent avec effroi que leur deux acolytes étaient très probablement morts, car leur devise était de ne jamais renoncer. Même s'ils leur manquait un membre, ils se battraient jusqu'à la mort.
Que de fierté pour de si petits bonhommes.

Calla leur jetta un regard froid, eux qui ne respectaient rien ni personne s'inquiétaient soudain pour leurs compagnons ? Elle renifla avec mépris, sachant qu'en fin de compte ils seraient heureux de devoir partager leur butin entre moins de monde. Ayant été une voleuse pendant presque huit ans, elle connaissait parfaitement leurs habitudes.

Cependant l'inconnue semblait choquée d'entendre une chose pareille. Sa voix étaient remplie d'indignation et elle ne semblait pas vraiment croire les paroles des deux hommes. Elle lui demanda aussitôt des explications sur un ton calme mais autoritaire.

Calla se rendit compte que l'inconnue savait qu'elle était une cavalière, elle en déduit que la jeune femme était elle aussi engagée dans l'armée sinon comment aurait-elle put savoir ? Le souvenir de l'armée lui rappela sa promesse de mener une vie honnête mais encore une fois la tentation avait été trop forte.


"Oui je leur ai volé une boussole, mais voler un voleur n'est pas un crime"

répondit Calla en citant inconsciemment son ancien maître.


Ses doigts se refermèrent sur les rênes de Tamorayn, l'inconnue ne semblait pas satisfaite de sa réponse. Elle avait la désagréable sensation de se faire juger et cela la mettait mal à l'aise.

La jeune femme semblait attendre une réponse plus complète de Calla mais cette dernière demeura silencieuse et se contenta de gratter Tamorayn entre les deux oreilles.

"Oui, je leur ai volé une boussole, mais voler un voleur n'est pas un crime."

Les raisonnements de ce genre n'étaient pas inconnus à Lirulin.
« Tuer un mercenaire n'est pas un crime » ; voler un voleur ; assassiner un assassin...
Si Lirulin n'avait jamais été voleuse, elle s'était faite pendant un temps mercenaire.
Pour elle, ces justifications menaient à ceux qui considéraient les mercenaires comme un morçeau de métal. Ils se vendaient ? On les achetait. Et on en changeait quand ils étaient tordus.

Cela la dégoûtait à présent. Alors comme ça, tous les crimes étaient permis, tant qu'ils touchent un criminel ? Mais il n'existait personne qui soit exempte de la moindre petite faute.

Si une autre personne lui avait fait cette réponse, elle serait partie sur l'instant. Ce n'était pourtant pas le cas avec Calla.
Elle n'aimait pas sa réponse, mais elle ne regrettait quand même pas d'être venue à son secours. La différence était le cheval. Un homme sans coeur ne pouvait aimer son cheval autant que Calla semblait aimer le sien.
Voir les deux amis ensemble balayaient tout le reste. Ils partageaient. Ca lui suffisait.

Il semblait à Lirulin que Calla la guettait. Qu'elle attendait de voir sa réaction. Allait-elle oui ou non accpeter cette réponse ?

Et bien non.

Plutôt que de faire un sermon qui n'aurait servi qu'à la rendre ridicule, Lirulin posa une question.

Si je peux vous demander quelque chose... Comment s'appelle votre cheval ?

J'aimerai bien quitter cet endroit, si ça ne vous ennuie pas, ajouta-t-elle. Il y a un ruisseau un peu plus loin. Pour... soigner cette blessure.

Mieux valait le faire tout de suite. Inutile d'attendre qu'elle s'infecte alors qu'elle n'était pas grave.

A son grand soulagement, la jeune femme n'insista pas même si la désapprobation se lisait dans son regard. A la place, elle lui demanda autre chose de tout à fait inattendu :

"Comment s'appelle votre cheval ? "

"Oh... Tamorayn ! ça fait déjà huit ans qu'on voyage ensembles"
répondit-elle avec fierté.

L'inconnue hocha la tête et fit remarquer en regardant sa blessure qu'il faudrait peut être aller la nettoyer avant qu'elle ne s'infecte.

"Excellente idée !"

Calla monta en selle et ôta son gantelet. La plaie avait arrêté de saigner mais il était préférable de la nettoyer le plus vite possible, il était fréquent que les lames soient empoisonnées ou simplement mal nettoyée et pouvait provoquer une gangrène.

Frissonant à cette idée, Calla et la jeune femme se mirent en route vers le ruisseau, abandonnant les bandits à leur sort. Mieux valait ne pas trop s'attarder ici au cas où ils appelaient des renforts. Les deux jeunes femmes chevauchèrent en silence quelques minutes, puis Calla demanda :

"Au fait, quel est votre nom ? et celui de votre cheval ?"

Elle avait envie de poser encore beaucoup d'autres questions mais elle ne voulait pas paraître trop curieuse. En plus ça ne la regardait pas du tout.

Après quelques minutes, les deux cavalières atteignirent le petit ruisseau. Calla laissa Tamorayn se désaltérer, rempli sa gourde et nettoya soigneusement sa plaie et le gantelet. Celui-ci ne semblait pas réparable, elle devrait s'en acheter un nouveau. Elle prit un morceau de tissu propre qu'elle gardait en réserve et se fit un bandage en espérant que ça suffirait.

Après cela elle enleva la selle et la bride de son cheval et le laissa se reposer tranquillement, sachant qu'il ne s'éloignerait pas.

Lirulin rigola.

Tu entends ça, mon ami ? Ils sont plus vieux que nous !
Tu es chanceux, Tamorayn, dit Lirulin à l'Akhal Téké, tu as un nom chantant.

Elle monta en selle après ces paroles. Elle remarqua alors que Calla, elle aussi, était blessée. Le gantelet avait caché la blessure ; et ce même gantelet qui lui avait sans doute sauvé la main.

Elles se mirent en route en silence.

En revenant vers le ruisseau, Lirulin observa mieux le paysage. A l'allée, elle était occupée par les traces de Tamorayn et n'avait pas fait attention à son environnement.

Elle découvrait maintenant une forêt pleine de vie. Les oiseaux s'appelaient et se répondaient de toutes parts. Elle en reconnaissait certains à l'oreille, d'autres lui étaient inconnus. Les pas des chevaux étaient amortis par la terre tendre et les feuilles mortes.
Faiblement, on entendait le doux frottement des pas d'animaux sur le sol. Ils étaient invisibles aux yeux de la cavalière.

La voix de Calla lui parvint de tout près, alors qu'elle était perdue dans les bruits de la forêt.

"Au fait, quel est votre nom ? et celui de votre cheval ?"

Elle revint au présent et se tourna vers l'autre cavalière.

Je suis Lirulin Auciri. Quand à mon cheval, ma fois... Elle se pencha sur l'encolure et le Barbe tourna sa tête fine vers elle. Ils se retardèrent dans les yeux.
Je ne sais pas comment il s'appelle lui-même, mais je l'appelle Ventfoudre.

Elle se releva et sourit à Calla.

Nous nous connaissons depuis deux ans. C'est bien moins que vous ! Vous avez dû vous rencontrer tôt pour voyager ensemble depuis huit ans.

Parvenue au ruisseau, Lirulin désella et débrida Ventfoudre. Il se hâta de rejoindre Tamoyayn dans l'eau.
Elle nettoya ensuite la plaie de sa jambe. Pour la soigner, elle sortit un baume de ses fontes, en appliqua une couche généreuse et banda le tout.

Vous en avez besoin ? proposa-t-elle à Calla.

Tamorayn broutait avec enthousiasme même s'il avait déjà eu une bonne ration le matin. Encore un vieux réflexe de leurs jeunes années, où chaque jour allait être un nouveau défi pour trouver de quoi manger et un abri pour dormir. Lui et Ventfoudre semblait s'apprécier.


"Je suis ravie de faire votre connaissance !"

Calla se sentait de bonne humeur tout à coup, quel changement après la compagnie des habitants de la Dross ! Elle pouvait enfin se reposer et discuter tranquillement sans devoir être constamment sur ses gardes, même si inconsciemment elle était toujours prête à se défendre : ses mains ne s'éloignaient jamais de plus de quelques centimètres de ses dagues elfiques.


"Seulement deux ans ? j'aurais dit plus vous vous entendez très bien ! J'ai rencontré Tam' quand je travaillais encore dans un élevage."

Elle fit une pause, se remémorant cette période lointaine. Comme ses rêves étaient différents à l'époque ! Tellement de choses avaient changé depuis ! L'idée d'une guerre imminente faisait rire les gens mais aujourd'hui elle les faisait frémir d'horreur et leur pire cauchemar était de voir leur famille tuée, leur village rasé, ou leur fortune envolée.

" Je le connais depuis qu'il est né, et quand il a eu deux ans, nous sommes parti explorer le monde... "

Elle n'ajouta rien de plus sur les huit années qui s'étaient écoulées depuis, et termina :

"Et finalement j'ai pensé qu'il fallait faire quelque chose en voyant à quel point ce monde est menacé par la guerre qui approche. C'est pour ça que je me suis engagée dans l'armée, j'espère pouvoir changer quelque chose."

Calla terminait son bandage, quand Lirulin lui tendit une petite boîte de baume. Surprise, elle ne comprit tout d'abord pas ce qu'elle contenait, puis la prit en souriant.

"Merci beaucoup"

Elle appliqua la substance sur sa blessure avec précaution et refit le bandage. Le baume avait une odeur assez agréable, et d'après l'odeur il était peut être fait à base de plantes.

Les cavalières et leurs chevaux étaient dans une petite clairière, l'herbe était haute et le ciel sans nuages. Il faisait plutôt doux pour le mois. Calla s'allongea dans l'herbe et ferma les yeux. C'était quelque chose qu'elle faisait très souvent depuis qu'elle était petite. Quoi de plus reposant que de paresser au soleil en écoutant la nature ?

Tiens, d'ailleurs tout semblait étrangement silencieux tout à coup. Les animaux avaient disparu et pourtant elle avait vu quelques chevreuils brouter tout à l'heure. Les oiseaux aussi s'étaient tu. Etrange...

Calla se redressa et scruta les alentours. Rien. Tout était calme.

"J'ai un mauvais pressentiment" dit-elle simplement à Lirulin. " Pas vous ?"

"Je suis ravie de faire votre connaissance !"

Moi aussi, répondit Lirulin. C’est un vrai plaisir.

Et c’était vrai. Qu’il était reposant de partager un tel moment ! Des compagnons intéressants : voilà ce que la cavalière souhaitait depuis longtemps. Elle en avait eu pendant certaines missions, mais ils n’avaient jamais vraiment formé une compagnie, voir une famille.
Involontairement, le pouce de sa main droite se mit à caresser ses deux doigts amputés. Annulaire et auriculaire. C’était ce qu’on pouvait appeler une mission qui laisse des traces.

"Seulement deux ans ? j'aurais dit plus vous vous entendez très bien ! J'ai rencontré Tam' quand je travaillais encore dans un élevage."

Lirulin rit.

Nous nous entendons très bien. Il a cinq ans, et nous nous connaissons et nous voyageons ensemble depuis deux ans. En deux ans de va-et-vient, on apprend à se connaître !

Elle écouta avec attention le court résumé de leur vie commune. Ces deux amis avaient vécu des choses atypiques, aucun doute. La façon dont Calla résumait huit ans de leur vie fit naître une lueur d’amusement dans les yeux de Lirulin.

Elle répondit sincèrement.

C’est bien d’aboutir à l’armée par conviction. Ca rend l’engagement plus fort que ceux qui y arrivent par héritage. Vous connaissez d’autres cavaliers dans l’armée ?

Mais Calla répondit à sa question par une autre question.

"J'ai un mauvais pressentiment. Pas vous ?"

Lirulin était en train de nettoyer la Reitschwert dans l’herbe. Il n’était pas bon pour une lame de rester sale et pleine de sang.
A la remarque de Calla, elle releva la tête pour écouter. En effet, les animaux s’étaient tus. Le seul son audible était celui du vent dans les arbres, et encore. Il semblait plus faible que quelques minutes auparavant. Comme si la nature retenait son souffle en attendant… en attendant quoi ?

Si, moi aussi.

Elle rangea vite sa lame et se saisit des affaires de Ventfoudre.

Cette boussole avait donc tant de valeur ? Lirulin ne voyait pas autre chose qui pouvait pousser les brigands à renouveller une attaque.
Puis elle se traita d’imbécile. Une boussole ne valait pas grand chose ! Si les bandits réattaquaient, c’était moins une affaire d’argent que d’amour propre.

Si ceux sont les bandits qui reviennent, ils seront en force et ne nous feront pas de cadeau. Mieux vaut être prêt.
Vent’ ?

Le petit cheval était lui aussi inquiet. Il avait senti la tension de son amie et s’était arrêté de boire. Ses fines oreilles, en mouvement, captaient le moindre bruit autour d’eux. Il cherchait la raison de cette alarme.

Avec l’habileté qu’apporte l’habitude, Lirulin sella et brida son cheval. Elle sangla les saccoches et se tint à côté de lui, à l’écoute elle aussi, pour déterminer s’il valait mieux fuir ou rester.

Une branche cassa non loin d'eux.

Calla scrutait les alentours sans rien apercevoir d'anormal, mais la végétation était beaucoup trop dense pour voir à travers. Elle rangea ses affaires dans la sacoche accrochée à la selle et rangea ses armes dans leur fourreau.

Puis elle appela Tamorayn et l'harnacha rapidement. L'étalon était nerveux, impatient de se battre.

"Du calme" murmura la jeune femme en le grattant entre les oreilles. "Tu vas avoir besoin de toutes tes forces si ça tourne mal"

Le cheval se calma un peu mais il continua de gratter le sol avec impatience.

Calla examina la clairière : elle était ovale, environ 20 mètres de diamètre, 30 pour la partie la plus large. Dans tous les cas, si elles étaient encerclées, les archers n'auraient aucun mal à les atteindre de face et par derrière. Elles avaient en réalité une bonne chance de s'en sortir, car les bandits n'étaient certainement pas assez nombreux pour encercler la clairière.

C'était vrai qu'il y avait beaucoup de bandits en général, mais ils étaient tous très divisés, car chacun essayait de se faire une place au sommet. Les plus grands clans devaient à peine réunir 50 bandits dans leurs rangs et Calla savait que le chef n'était pas aussi puissant.
Seulement, avec la végétation il était impossible de savoir où étaient les bandits à moins d'être à quelques mètres d'eux. S'ils avaient des archers parmi leurs rangs, les chevaux risquaient d'être blessés ou tués et c'était un risque que Calla refusait de courir.

Contrairement à d'autres cavaliers elle était très attachée à son cheval et elle savait qu'elle ne supporterait pas de le voir mourir ou même blessé par sa faute.
Pour l'instant, elles devaient attendre qu'ils se montrent. Calla se hissa sur la selle, espérant que les bandits feraient l'erreur de charger tous ensembles, pour qu'elle sache quels endroits n'étaient pas gardés.

Tout à coup, une branche craqua. Calla sortit son épée courte et examina l'endroit d'où venait le bruit. Rien. Sans doute un bandit maladroit. Elle serra les mollets, et Tamorayn prit le petit trot. Elle décrivait des cercles pour être sûre de ne pas se faire surprendre.
Quelque chose bougea dans l'herbe, et Calla eut la vie sauve grâce aux réflexes de sa monture qui fit un écart et évita la flèche. Ainsi ils étaient venus contre le vent pour empêcher les chevaux de les sentir ? Pas mal. En regardant attentivement le sol, elle vit deux hommes allongés dans l'herbe à quelques mètres, arbalète à la main. Leurs vêtements se confondaient avec la végétation, ce qui expliquait qu'elle ne les avait pas vus tout de suite.

"Il y en a deux là ! "cria-t-elle à Lirulin.

Surpris, les hommes se redressèrent et remirent une flèche sur leurs arbalètes. Calla lança son cheval au galop, et avant que les armes ne soient chargées, sauta et atterrit face à eux. Tamorayn continua sa course et s'arrêta en lieu sûr. les flèches sifflèrent et s'arrêtèrent contre la tunique de la jeune femme. Elle ne craignait pas les flèches; elle portait une légère armure en dessous, seul son visage n'était pas protégé.

L'inconvénient des arbalètes était qu'il fallait toujours un certain temps pour charger l'arme avec une flèche. Un archer habile qui utilisait un arc était nettement plus rapide et donc plus dangereux, même si la puissance de l'arc était moindre par rapport à celle de l'arbalète. Le temps que les deux archers rechargent leur arbalètes, ils étaient déjà morts égorgés. Calla essuya le sang qui souillait ses dagues elfiques, siffla Tam' et remonta en selle.

"Moins deux !" lança-t-elle joyeusement.

Soudain elle vit la végétation bouger, les bandits chargeaient, visiblement furieux d'avoir perdu deux de leur compagnons.

Une flèche jaillit de l’herbe et manqua de peu Calla.

Lirulin bondit en selle. Son cœur battait à tout rompre dans sa poitrine et ses mains se firent moites. Sa prise sur la Reitschwert était encore moins bonne que d’habidude. Elle changea de main.
Ambidextre, elle fit passer l’épée de la main droite à sa main gauche.

Son cœur se ralentit pas pour autant. Elle était tendue. L’évidence lui sauta aux yeux : elle avait horreur d’être ici. Au milieu d’une clairière pour soutenir une attaque. Tout trop vert, trop touffu. Les fougères en lisière masquaient les bois. Pris au piège. Impossible de s’avoir d’où les bandits arriveraient.
Avec elle, Ventfoudre s’excitait. Il piétinait, anticipant la charge. Où ? Où ? C’était précisement la question.

« Alouette, tu te calmes ! » s’ordonna-t-elle. Elle souffla un bon coup. Réfléchir.

"Il y en a deux là !" cria Calla.

Ils venaient contre le vent. Le vent venait de l’ouest, apporté par la mer. Ils venaient de l’est. Atral était sud. C’était bon pour elles.

Combattre ou fuir ? Ca dépendait du nombre. Ils ne les sous-estimeraient pas, à présent.

"Moins deux !" entendit-elle.

Lirulin fixait déjà le bord est de la forêt.
Les bandits jaillirent des bois. A pied. Leurs chevaux étaient restés en arrière pour être plus discrets. Alouette sourit. Ce n’était pas aujourd’hui qu’ils les auraient.
Ils couraient pliés en deux. Leurs tenues se confondaient avec la végétation. Difficile d’évaluer leur nombre. Une dizaine, peut-être un peu moins. Minimum trois contre un.

Elle tourna la tête pour voir Calla. Une flèche siffla à son oreille. Une seconde. Un archer. Troisième flèche.

La décision était prise.

Vers le sud ! cria-t-elle. Au galop, vers le sud !

Ventfoudre se détourna de la bataille à contrecœur. Il prit le galop pour distancer les bandits. Les hommes se refermaient en vague derrière lui, incapable de le saisir. Un brigand plus rapide que les autres se dressa pour leur barrer la route. Ecart de Vent’. Homme écorgé. Sang sur la lame.
Il sauta par dessus le ruisseau. D’abord acceuillant, celui-ci était maintenant barrière contre les poursuivants.
Calla et Tamorayn ?

Reste en arrière, murmura-t-elle. Derrière eux. Toujours derrière eux.

La victoire de Calla fut de courte durée. Les bandits chargèrent tous en même temps, et ceux qui restaient en arrière étaient les archers et leur redoutables arbalètes. Une pluie de flèches arriva dans sa direction mais la rapidité de son cheval lui permit de les éviter. Elle eut de la chance, cependant, car en se retournant elle vit qu'une flèche s'était plantées près de sa nuque. Cinq centimètres plus haut et ce n'était pas l'armure qu'elle transpercerait.

Soudain, les bandits s'arrêtèrent. POurquoi ne continuaient-ils pas de charger ? Calla en comprit rapidement la raison : ils se contentaient de réduire l'espace, laissant aux archers le soin de les massacrer. Furieuse, la jeune femme rangea son épée : il ne restait plus que la fuite comme solution, et il fallait se hâter avant qu'elles ne soient encerclées.

Elle entendit Lirulin lui crier de se diriger vers le sud. Ventfoudre était un grand galop et passa aisément entre les lignes ennemis. Il méritait vraiment son nom. Tout à coup, Tamorayn fit un bond qui faillit désarçonner sa cavalière. du sang arriva sur son visage...

"Tam !" hurla-t-elle.

Le cheval donna quelques ruades avant de partir au grand galop, totalement hors de contrôle. Calla ne voyait pas grand chose, tout allait très vite et ses larmes brouillaient sa vision. Le sang semblait venir de l'encolure mais elle n'en était pas sûre. Elle passa sa main sur le cheval qui devint toute poisseuse de sang mais pas de flèche, heureusement. Elle entendait des cris et le sifflement des flèches mais comme dans un rêve.

Tamorayn sauta par dessus la rivière sans aucune élégance, il était comme fou. Calla n'essaya pas de l'arrêter, elle savait que la meilleure chose à faire était de rester en selle et d'attendre qu'il soit plus calme pour reprendre le contrôle. Le terrain commençait à être accidenté, ils se rapprochaient de la forêt. Ils passèrent à toute vitesse devant une forme grise (Ventfoudre ?) et plusieurs forme vert sombre.

La jeune femme comprit qu'ils étaient dans la forêt,Tamorayn n'allait pas tarder à devoir ralentir. En effet, quelques mètres plus loin, il dut ralentir. Sa cavalière en profita pour se redresser et lui demander de ralentir et le cheval obéit. Dès qu'il fut au petit trot, elle sauta à terre et examina la blessure : elle saignait, mais modérément. La flèche avait fait une méchante entaille à Tam' mais rien de plus grave heureusement.

Elle entendit des sabots et vit Lirulin, inquiète, et Ventfoudre.

"On va bien ! "

Elle se dépêcha de prendre tout le tissu qu'il lui restait et le noua tant bien que mal autour de l'encolure du cheval agité. Il couvrait bien la blessure, heureusement. Elle caressa tendrement la tête de l'étalon qui n'avait pas l'air de lui en vouloir.

Déjà, les cris des bandits et le bruit de sabots se rapprochaient. A contre coeur, Calla remonta en selle.

"Il faut partir, et vite !"

Ventfoudre était en avance sur Tamorayn. Lirulin galopait retournée pour suivre Calla des yeux. Elle brisait les flèches qui s'approchaient trop près. Elle vit parfaitement le trait gris qui toucha Tamorayn à l'encolure.
Elle jura entre ses dents et, quand l'étalon franchit comme un fou le barrage humain, elle lança Ventfoudre à sa poursuite.

Les bandits furent rapidement distancés par les chevaux. Les deux cavalières filèrent à travers les bois. Les branches se succèdaient. Lirulin était penchée sur l'encolure de Ventfoudre pour ne pas être désarçonnée. Elle sentait les muscles du petit cheval qui travaillaient sous ses jambes.
Maintenant, il se tenait la tête haute. Ses oreilles étaient dressées vers l'avant. Tous ses efforts tendaient à rattraper Tamorayn. Les poursuivants semblaient avoir disparus pour lui.

Ils parvinrent à leur hauteur peu après que l'Akhal-Téké se fut arrêté. Lirulin sentait l'inquiétude lui tordre le ventre.
Et si Tamorayn était gravement blessé ? S'ils étaient obligés d'affronter les bandits ?
Mais non.

"On va bien !"

Elle souffla de soulagement.

Le bruit d'une galopade leur parvenait de derrière. Les bandits avaient cherché leurs chevaux.
Calla se remit en selle. Lirulin attendit quelques instants qu'ils se soient éloignés avant de repartir elle aussi. Elle voulait évaluer la distance de leurs poursuivants. On les entendait. De plus en plus nettement. Le plus rapide arriva. Ventfoudre repartit.

Galoper en pleine forêt n'était pas facile. Lirulin se fiait entièrement à son cheval. Elle évitait les branches basses, regardait Calla et Tamorayn devant et le cavalier derrière.

Un trou surgit soudain. Surpris, Ventfoudre pila des quatres fers et Lirulin s'enfonça sur ses étriers. Il ne voyait pas le fond. Il hésitait, tournait devant le trou.
Aussi soudainement qu'il s'était arrêté, il sauta. Trop court. Ses antérieurs arrivèrent dans le fossé et il tomba en avant.

Vent' !

Il se releva sans mal, un peu sonné. Il ne boitait pas. Il continua au galop quelques foulées puis se retourna vers sa cavalière.
A terre, Lirulin essayait de se dégager les yeux de la terre qu'elle avait reçue. Elle soufflait et crachait.

Le bandit tomba sur eux à ce moment-là. Lui aussi effrayé, son cheval avait refusé de sauter et l'homme avait été éjecté de sa selle. Il atterrit à quelques mètres de la cavalière.

Lirulin tira son épée qu'elle avait rengainé dans la cavalcade. Les fers s'entrechoquèrent. Les deux combattants tournaient l'un autour de l'autre. Le jeune homme était un bon escrimeur.
Du coin de l'oeil, elle vit les autres poursuivants apparaître. Elle n'était pas sûr de pouvoir mettre fin au combat avant qu'ils arrivent.

Dans un cri inarticulé, le jeune homme disparut de sa vue. Elle stoppa net. Où... ?
Dans le trou.
Elle s'approcha pour le découvrir étalé dans la boue au fond du fossé. Elle sourit, amusée. Il lui renvoya un regard haineux qui contrastait avec la jeunesse de ses traits.

Lirulin partit sur le champ. Elle remonta en selle. Ils ne voyaient plus Calla et Tamorayn, alors ils continuèrent dans la direction où ils les avaient vus quelques minutes auparavant.

Le matin même, songea Lirulin, elle était à Atral. Elle n'avait pas fait beaucoup de chemin. Peut-être que Tamorayn et Calla y étaient déjà.

Calla était penchée sur l'encolure de Tamorayn, en partie pour éviter les branches basses mais aussi pour surveiller sa blessure. Ils avançaient au petit galop, ne pouvant guère aller plus vite à cause des arbres. Le terrain était très accidenté, l'Akhal-Téké trébucha plusieurs fois et faillit même tomber dans un immense trou.

Ils progressaient de plus en plus lentement. Bientôt, le cheval fut obligé de prendre le petit trot. Calla sauta à terre et courut devant Tam' pour ne pas l'obliger à fournir plus d'efforts que nécessaire. Ils continuèrent leur pénible marche pendant encore plusieurs minutes. Le bruit de leur poursuivants s'estompaient peu à peu, jusqu'au moment où ils n'entendirent plus que leurs propres respirations et bruits de pas.

Calla s'arrêta pour être vraiment sûre. Oui, il n'y avait que le silence et personne aux alentours. Une seconde, personne ?

"Lirulin ? Vent' ?"

La jeune femme devint tout à coup très pâle, et ses jambes se dérobèrent sous elle. Elle se retint à la selle pour ne pas tomber. C'était bien la première fois qu'elle se sentait envahir par la honte et la culpabilité. Comment avait-elle pu ne pas s'apercevoir de leur absence ?

"Lirulin ! "

Personne ne répondit. Tenant toujours son cheval par les rênes, Calla fit demi-tour et refit le chemin en sens inverse. Les branches cassées attestaient de son passage et lui permettaient de ne pas se tromper. Quelques minutes angoissantes s'écoulèrent. Lirulin était-elle toujours en vie ? pourquoi ne les avait-elle pas suivis ?

Une branche craqua, au loin. Hésitante, Calla attendit : est-ce que c'était son amie ou un bandit ?

"Lirulin c'est toi ?"

Pas de réponse. Elle ordonna à Tam de rester où il était. Le coeur battant, Calla s'approcha, épée en main. La silhouette était trop grande pour appartenir à une femme, par précaution elle décida de se cacher. Elle avait bien fait de se méfier car le bandit, surpris de ne plus entendre de bruit, sortit des ombres de la végétation. Furieuse, la jeune femme surgit de sa cachette et lui planta son épée dans le dos.

Calla siffla Tam et tout deux reprirent leur route. Celui-ci se raidit tout à coup. Il semblait être intrigué par quelque chose qui se trouvait à leur gauche, derrière un épais buisson. Les doigts de la jeune cavalière se refermèrent sur son épée.

"Qui est là ?"

Contre toute attente, une voix de femme répondit.

"Calla ?"

Ils s'étaient perdus.

Lirulin marchait et trottinait devant Ventfoudre. Ils n'avaient pas la place de se tenir de front. En passant, le cheval arrachait quelques pousses et les mâchonnait.

Ils avaient pu suivre assez facilement les traces de Tamorayn. Elles étaient bien visibles sur ce sol où l'herbe poussait difficilement. Cela voulait dire que les bandits les suivraient eux aussi sans peine. C'était déjà plus dommage.

Lirulin avait hésité à un moment donné. Les branches étaient cassées dans deux directions différentes : soit une ruse de Calla, soit un autre animal que le cheval. Peut-être un cerf.
Les deux pistes étaient presque parallèles. Lirulin avait choisi au hasard, songeant que, de toute façon, ils finiraient bien par sortir de la forêt.

Toute trace d'animaux avait disparu un peu plus loin. Les bandits se rapprochant sans cesse, il était imprudent de revenir sur ses pas. La cavalière avait voulu couper pour retrouver l'autre piste.
Et elle ne l'avait pas retrouvé.

« Bien sûr, riait-elle dans sa tête, tout le monde n'a pas une boussole ! Voilà quelque chose qu'il faudra se procurer en arrivant à Diantra. »

Il était encore plus difficile de progresser à présent. Fougères, buissons, branches.
Elle se figea quand elle entendit faiblement.

"Lirulin, c'est toi ?"

Elle sourit. Elle n’était pas si loin, finalement. Un sifflement la fit accélérer.

« Pourvu que les bandits ne les retrouvent pas avant nous… Pourvu que les bandits ne les retrouvent pas avant nous… » se répétait-elle à chaque pas.

Ventfoudre se figea derrière elle. Elle prit la garde en main et scruta les alentours en faisant le moins de bruit possible.

"Qui est là ?"

Calla ? s’exclama-t-elle.

Ventfoudre s’était déjà élancé. Se faufilant à travers la végétation, il retrouva la piste. Il hennit joyeusement en voyant Tamorayn. « Nous vous avons retrouvés ! » semblait-il dire.
Lirulin suivit. Ses cheveux blonds centrés avaient receuilli feuilles mortes et terre. Sur son visage sale s’alluma un sourire amusé devant l’air inquiet de Calla.

Chacun son tour.

Elle désigna l’épée dans la main de la cavalière.

Ne te donne pas la peine de la sortir. Utiliser une arme contre un supérieur est fortement déconseillé.

Après cette petite aventure, il serait bien de continuer sur notre lancée, je crois, ajouta-t-elle.

Elle repartit en trottinant sur les traces de Tamorayn. Ventfoudre allait joyeusement au petit trot à ses côtés. Il était heureux d’avoir retrouver leur amis.
Les bandits, qui s'étaient rapprochés un moment donné, se faisaient plus discrets. Ils devaient eux aussi avoir du mal à progresser. La pensée qu'ils s'étaient perdus plut fort à Lirulin.

La forêt s’éclairisait un peu plus loin, signe d’un espace plus dégagé. L’idée de sentir le vent sur son visage poussa Lirulin en avant.
Quand ils sortirent des bois, l'immense plaine s'étalait devant eux. Les herbes ondulaient sous le vent. La vision était entre la mer de verdure et les poils d'un animal incroyablement grand.

Lirulin prit la tête de Ventfoudre dans ses mains.

Une dernière chevauchée pour aujourd'hui. En espérant qu'ils ne nous tirerons pas comme des lapins...

Elle monta en selle.

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Les buissons bougèrent et Calla dégaina son épée par précaution. Ventfoudre sortit de la végétation en hennissant, et Tamorayn s'empressa de répondre. La jeune cavalière sourit, soulagée. Lirulin apparut à son tour, les cheveux en bataille mais l'air amusé.

Calla ne devait pas non plus avoir bonne mine avec ses yeux rougis par les larmes, les cheveux en bataille avec la folle course de Tamorayn et le sang sur sa figure. Mais bon ils étaient tous vivants c'était une bonne nouvelle !

Ne te donne pas la peine de la sortir. Utiliser une arme contre un supérieur est fortement déconseillé.

Après cette petite aventure, il serait bien de continuer sur notre lancée, je crois

Comment ça ? Lirulin était sa supérieure ? Calla se sentit stupide tout à coup, elle aurait au moins du consulter la liste officielle pour connaître ses supérieurs, surtout qu'elle était retournée là-bas car on lui avait demandé de devenir caporal.

C'est à ce moment qu'elle remarqua la petite insigne de capitaine sur l'épaule de Lirulin. Aïe. Elle s'empressa de remettre son épée dans le fourreau, espérant que ses brillantes actions du jour ne la ferait pas sortir de l'armée plus tôt que prévu.

Oui allons-y.

Les deux cavalières repartirent. Bientôt, la végétation se fit moins dense et du vent bienvenu souffla sur leur fronts légèrement en sueur. Les arbres se firent de plus en plus espacés, de plus en plus distants et bientôt la petite troupe arriva dans l'immense plaine d'Atral.

Une dernière chevauchée pour aujourd'hui. En espérant qu'ils ne nous tirerons pas comme des lapins...

Calla acquiesça et avant de remonter en selle, vérifia la blessure de Tamorayn. Heureusement, elle avait arrêté de saigner. Soulagée, la jeune femme lui donna une dernière caresse avant de monter en selle.

Les deux cavalières s'éloignèrent au galop. Mêmes fatiguées, Ventfoudre et Tam' voulaient faire la course.

Certainement pas, dit Calla en le retenant. Tu dois t'économiser !

Après quelques minutes, elle jeta un coup d'oeil derrière elle : personne ne les suivaient. Enfin ! Elles étaient tranquilles pour de bon cette fois mais ces bandits étaient tenaces ! Et il valait mieux pour elle d'éviter la Dross pour un certain temps !



(HRP : tu veux qu'on continue le sujet ou on finit comme ça ? /HRP)