Juste un instant d'ephemère..( Papy )

Le matin avait été horreur...Le jour s'était levé sur la mort, c'était une aura étrange et étouffante qui l'entourait, elle devait respirer. Respirer...

Alors, elle avait rejoint Incanus, elle avait ouvert la porte de la liberté, pour elle et lui...Et ensemble, ils marchaient côte à côte sur les chemins de la dangereuse foret d'Ardamir. C'était a cet endroit qu'elle avait assistée a la naissance de Vermiceau, cet endroit précis où le dragon avait fait d'elle son double, son reflet...Un léger sourire nostalgique aux lèvres, elle regardait la petite clairière, a peine ombrée par les arbres environnants...L'air était vif et froid, doucement, elle resserra les pans de sa cape autour de ses épaules. Elle n'était pas vêtue comme on aurait coutume de la voir, non, la soeur du Prince régent se promenait dans un pantalon de cuir et une chemise large...Pourquoi ? Tout simplement parce que les écailles d'Incanus étaient tellement dures qu'il était presque impossible de le monter sans voir ces effets irrémédiablement détruit. Aussi avait elle fait faire ce pantalon, plus résistant, plus solide...Cela dit, elle n'était pas juchée sur le front de Vermiceau non, elle marchait a ses côtés, une main sur lui...Il ne disait rien, adaptait son rythme au sien...Il n'était que cette barrière invisible et tellement présente, ce réconfort tant demandé...Une présence bienfaitrice au creux de ses cauchemars...Les yeux sur le sol, Astéride avançait presque a l'aveuglette, elle avait quitté la clairière, son esprit se perdant dans les méandres de ses pensées...Et toutes portaient un visage...Veldrin...Qui aurait cru qu'elle aimerait aussi fort ? Personne...C'était comme une autre partie d'elle et pourtant, totalement différente...C'était quelque chose d'ancré profondément en elle, c'était quelque chose qui faisait peur a beaucoup, mais elle...Elle l'acceptait comme ça...Etrange ? Oui, certainement...

Elle soupira et Incanus lui jeta un coup d'oeil tendre et presque paternel...

-Je sais ce que tu pense...

souffla-t-elle avec un léger sourire...Il était son soutient éternel...

Finalement, ils s'arrêtèrent au centre d'une clairière bien plus grande que celle qui avait vu la naissance de Vermiceau...Le dragon de terre se coucha lentement, laissa son amie grimper sur son museau...Elle s'allongea sur le ventre, les bras étendu de chaque cotés d'elle, ces yeux se fermèrent et la danse des âmes commença...

Un pressentiment l'avertit...Quelque chose de palpable qu'Incanus ressentit a son tour...Souplement, elle glissa le long du museau du dragon et, sans qu'elle le lui dise, celui ci, s'enfonça dans les bois, invisible a l'oeil...Astéride tourna les yeux vers l'entrée de la clairière et...haussa un sourcil en voyant apparaitre devant elle une silhouette...Etrange.

Une forêt enfin, c’était la première fois que Ambro en voyais une vraie, toutes celles qu’il avait contemplées se trouvait dans un vieux livre, jamais il ne s’était imaginer voir autant d’arbre, une ambiance si oppressante, les quelques secondes qu’il venait de passer dans ce lieu lui fit haïr les forêts pour tout la vie, il s’en fit la promesse. Bon sang comment les elfes aimaient vivre ainsi, ne pas voir les étoiles, ni le ciel, vivre dans la pénombre, fichtre les forêts n’étaient pas accueillante. Ambro venait de se faire une idée globale des forêts, et il préférait de loin les montagnes ou les plaines, là où le soleil pouvait passer.
Mais ce n’est pas une petite forêt de pacotille qui allait lui miner le morale, bien au contraire, sa joie de vivre, devenue presque légendaire chez les nains continuait de l’animer. Toujours accompagné de sa charrette, de son vieil âne, de ses livres et de sa souris, Ambro s’engagea maintenant dans une petite clairière battue par des vents froids, sa cape légère ainsi que sa robe brune ne le protégeais pas beaucoup, mais cela non plus ne l’empêchais pas chantonner une vieille chanson dans une langue pratiquement perdue, et inconnue de la plus part des habitants de Miradelphia.

- Ohórem, wlo waz omqi...
Zimt by tli Wiztirm Horjz
to kiip tli Iaztirm hamjz
tli wezizt of ivirytlemg Naear
Tlat hij you to hiavi
wlat you hovij?

Netlramjer, Griy Netlramjer
Ol Péhirem Ivir you wehh mot nehh
om tli griim feihjz of tlez iartl
Your trep femezlij em bhaqkmizz
hemkz wihh aqquztonij, brokim nemj
Tli Fhani of Amor hift tlez Worhj
A beg heglt, jezappiarij.

Les paroles de cette chanson, Ambro les avaient appris dans un vieux grimoire d’origine inconnue, il avait mis près de 35 ans à traduire ce foutue grimoire, passant de nombreuses nuits blanche, mais têtue comme il est, il avait réussis, cette chanson raconte l’aventure d’un jeune seigneur, tombé amoureux d’une paysanne qui vivait dans un lointain continent. Elle amusait beaucoup Ambro, surtout l’air de la chanson, au début elle était calme, mais le second paragraphe s’emballait, devant très rythmé et dure à chanter. Le vieux sage avait pris pour habitude de la chanter en marmonnant, pour que juste ceux aux alentours puisse l’entendre, mais seulement dans un murmure porté dans les vents. Ambro se promis un jour de trouver l’origine de cette langue, et il espérait le trouver dans la grande bibliothèque de Diantra, car ses recherches n’avaient rien donné a Kirgan.
Ah, la capitale des nains, sa nouvelle patrie, le roi avait de lui un de ces conseillers, Ambro avait réussi à le convaincre en lui résistant des centaines de pages de différents livres de tête. Mais il avait envie de bouger, de visiter le monde, il avait passé 130 ans enfermé dans une tour, il voulait voyager maintenant, et avec l’accord de Garmin, il avait entrepris de visiter la patrie de sa mère, le Royaume de Diantra allait bientôt accueillir Ambro le demi-nain.

La charrette venait maintenant de s’arrêter, le ventre du vieil homme faisait de nouveau des siennes, il avait faim, de plus Sweep, sa petite souris blanche était agitée, on aurait dit qu’elle avait peur, sans doute une petite bestiole qui était cachée dans les broussailles.
Ambro sortit un morceau de fromage, un bout de lard, et une bière naine, un vrai festin pour lui.

- Ah bon sang, j’avais faim, allez Ambro, un peu de nourriture et tu reprendras ton chemin
Fichtre et fouchtre Sweep, va tu te calmer, y’a rien dans ces broussailles, laisse moi donc tranquille, et viens manger ton fromage.

Une souris !? Diantre ! Incanus recula lentement, aussi doucement qu'une ombre. La terre était son domaine, il en était le roi. Et malgré sa taille imposante, il se fondait parfaitement dans le paysage. Bien évidement, il y avait cette foutue souris ! Enfin, avec un peu de chance...Il avertit son amie.

Astéride fronça légèrement les sourcils, mais ne dit rien, il ne restait plus qu'a détourner l'attention du..Encore une fois, un sourcil se leva..Pépé ? Enfin, un très vieux monsieur, mais il différait dans son apparence des autres humains. La jeune Duchesse pencha légèrement la tête sur le côté...La curiosité la taraudait, la curiosité et aussi ce besoin de se changer les idées qui devenait de plus en plus présent...

Finalement, elle s'avança d'une démarche dansante, tranquille, au devant du chariot sur lequel trônait l'étrange personnage...Celui ci marmonna des paroles qu'elle ne comprit pas tout de suite. De même elle l'aurait certainement prit pour un fou parlant tout seul, mais Incanus l'avait prévenu de la présence de la souris domestique...

-Mmmh...Bonjour ! Puis je vous aider ?

Lança-t-elle avec une pointe de joie parfaitement imitée. De joie, elle ne ressentait pas vraiment depuis la mort de la reine, mais ce n'était pas une raison pour le laisser percevoir par le premier venu ! Ce papy méritait un sourire, si petit soit il.

Tranquillement debout non loin du chariot, Astéride regardait l'étrange bonhomme de ces prunelles noires où dormait encore un reste d'éclats vert. Sur ces lèvres, un sourire.

Fichtre et fouchtre, on ne peut pas être tranquille, même dans une forêt ? Bon sang, le déjeuner est une chose sacré dans la vie d’un homme, surtout dans celui d’un nain, il est anormal que l’on vienne.

- Fichtre Sweep, vas-tu cesser de faire du bruit, laisse donc la bêbête qui se trouve dans les buissons, et viens là.

Ambro n’aimait pas quand sa petite souris émettait des couinements, cette dernière était une souris très jalouse, elle n’aimait pas sentir une présence animalière près de son maître, elle avait réussis à accepter le vieil âne, mais il avait voulus du temps, et surtout de la patience.
Le demi-nain leva ses yeux pour voir où était Sweep, c’est là qu’il aperçut une jeune femme, et bien et bien, quelle étrange rencontre, que pouvait faire une adolescente dans une forêt si lugubre, et surtout seul, n’avait elle donc pas peur des mauvaises rencontres ?
A priori non, puisque la jeune femme se dirigea vers la charrette du vieil homme, sa démarche était même sûr, dansante, décontractée, bon sang mais qui était elle ? Puis la jeune femme le salua, mais ses paroles étaient froides, sans convictions. Ambo pris un air plus ou moins serieux, sans réel réussite, car le demi-nain était de nature chambreur et non méchante.

- Et bien, douce demoiselle, en voilà des manières de s'adresser à un vieil homme. Vous savez rien ne vous oblige à me saluer, surtout sur cet aire là !

Puis Ambro ce mit à rire, toujours de son rire chaleureux, bon sang n’importe quelle situation le faisait sourire, l’amusait, même cette jeune enfant qui à première vu aurait préféré que le demi-nain se trouve loin d’ici.
Mais à la surprise d’Ambro, l’adolescente lui lâcha un sourire. Il plongea son regard bleu dans celui sombre de la l’enfant.

- Ah, voilà qui est mieux, et qui est plus agréable. Un sourire sur un si beau visage, que demander de plus ? Ma chère enfant, vous venez de réchauffer le cœur d’un vieil homme complètement frigorifié par ce foutue temps.

Le vieux sage s’arrêta à la prononciation d’un mot.

- Fichtre et fouchtre, veuillez m’excusez noble dame pour ma grossièreté, je ne suis qu’un vieil homme qui ne connait pas encore les bonnes manières.
Je vais maintenant répondre à votre question, oui en effet vous pouvez m’aider, je cherche la route de Diantra, et je dois bien vous dire que je n’ai pas l’habitude des forêts.
Et vous ma jeune enfant, est ce que je peux vous aider ?

Ambro lui adressa son plus beau sourire, certes il manquait certaines dents, mais son sourire restait malgré tout chaleureux et accueillant.

A la réponse du vieux monsieur, Astéride rentra la tête dans les épaules, un reflexe étrange...Mais elle avait vraiment eu l'impression que son grand père venait de gentiment la rabrouée...Evidement que son visage ne devait pas refléter la joie. La Reine était morte, Veldrin était loin, si loin...Cependant, ce charmant vieux monsieur eut l'intelligence de faire naitre un sourire que ses lèvres pleines. Un sourire impulsif, presque inconscient. Astéride aimait bien cette manière qu'il avait de s'exprimer, cette bonhommie qu'il affichait, comme un homme ayant assez vécu et s'avouant satisfait de sa vie.

-Un sourire n'est qu'un sourire, mais si le mien a lh'eure de vous réchauffer vous m'en voyez ravie. Excusez mon air plutôt désagréable, je vous pris, il n'est que la conséquence de sombre pensées.

Répondit elle doucement, d'une voix mélodieuse et aérienne, ses lèvres accentuèrent leur sourire. Décidement, ce personnage était bien interessant ! Il respirait la confiance, la bonhommie...Un esprit folatre...Peut être se trompait elle, mais c'est ainsi qu'elle le percu...

Dans les brousailles, Incanus regardait avec une peur grandissante l'avancée de la petite souris...Il se tassa le plus possible sur lui même alors que le rongeur furetait d'un air rageur aux alentours...

Astéride s'arracha aux pensée de son dragon, ce n'était pas le moment de paniquer pour une petite souris ! Même vindicative !

Le papy la ramena au présent en s'excusant de sa grossièreté, excuse auquelle elle répondit par un léger rire.

-Ne vous excusez pas surtout, j'en entend de bien plus graveleux autour de moi parfois. Vous cherchez la route de Diantra ? Vous y etes, continuez plus en avant en longeant le chemin principal, et si vous bifurquez sur un petit sentier presque invisible sur votre droite, a...mmh...Environ un kilomètre, vous arriverez tout près du château.

indiqua-t-elle avec un large sourire dévoilant une rangée de dents blanches comme des perles.

-Je n'ai pas besoin d'aide, mais je vous remercie de votre sollicitude. Je suis...Astéride d'Erac, soeur du Prince régent de Diantra. Qui donc notre ville aura l'honneur d'accueillir ?

Ambro continua d’observer la jeune fille qui se trouvait devant lui, bon sang comment un être si pure, si magnifique pouvait émettre tant de tristesse, et surtout qu’est ce qu’elle faisait seul dans une forêt ?

- Mon enfant, mon enfant, comment quelqu’un de ton âge peut avoir de sombres pensées, le monde est si vaste, si beau, si intéressant. Que peut bien être les soucis d’une jeune fille ? Les garçons ? Les robes ?

Ambro se mit à rigoler de tout son être, mais il s’arrêta très vite en voyant pour la première fois le regard de son interlocutrice. Il était d’une tristesse extrême, il n’avait jamais vu cela, même dans le regard des dirigeants préoccupés par la guerre, que pouvait donc bien garder cette enfant au fond d’elle.

- Noble demoiselle, je peux maintenant voir que ce n’est ce genre de problème qui vous habitent, fichtre et fouchtre que je peux être idiot.

Le vieux sage sauta légèrement de son chariot, avec souplesse et rapidité, plus comme un jeune homme d’une vingtaine année que comme un homme de son âge. Puis avec légèreté il se déplaça vers l’adolescente tout en s’appuyant bien entendu sur sa vieille canne.
Une fois devant l’enfant, il lui posa sa main douce sur la joue. Entre temps la jeune fille venait de se présenter, il s’agissait d’Astéride, la petite sœur de Trystan, un des dirigeants humains présent au conseil de son roi Garmin. La main du demi-nain caressa la joue et s’arrêta sur l’épaule de la duchesse.

- Oh, une noble. Dois-je vous appeler votre altesse ?

Tout en parlant, Ambro s’inclina légèrement et salua Astéride d’une magnifique référence. Mais ce geste était plus fait pour se moquer gentiment qu’autre chose.

- Vous voulez savoir qui je suis ? Je me nomme juste Ambro, un vieil homme qui parcourt ces terres, je ne suis personne. Mais si vous voulez en savoir plus sur moi, vous devez me parlez de vos problème jeune enfant, j’en suis sur cela vous ferra du bien. N’ayez crainte d’un vieil homme.
Allez venez vous assoir, soit sur le sol ou sur ma charrette, cela n’a pas d’importance, mes fesses sont anesthésié par le voyage, je ne sens plus rien.

De nouveau Ambro se remit à rire, toujours de son rire chaleureux.

-De sombres pensées que vous avez tôt fait de chasser, sire.

répliqua Astéride avec ce sourire qui faisait naitre un rayon de soleil sur son visage. Ce papy était d'une perspicacité étonnante, la force de la sagesse certainement. Il ne la connaissait pas et pourtant, il soulignait avec aisance les troubles qui dormaient dans son regard. Ash' se prit a l'apprécier soudainement, comme ça, juste par son attitude débonnaire, calme et réfléchit. Peut être se trompait elle bien sur, on ne pouvait être sur en matière de jugement mais voilà, c'était ce qu'elle ressentait vis à vis de son interlocuteur.

Elle fut surprise de le voir sauter de son chariot comme si le poids des ans l'avait quitté. Etrange vieux monsieur que celui ci, oui, très étrange ! Elle haussa un léger sourcil, marquant par là son étonnement et le laisse approcher en toute quiétude. Son geste suivant l'étonna encore bien plus, mais elle ne déroba pas, c'était un geste tendre par bien des côtés, comme celui que donnerait un grand père sur la joue de sa petite fille.

-Altesse ? Grands dieux non ! Astéride suffira amplement !

fit elle avec un rire cristallin tandis que son compagnon l'amusait d'une courbette théatrale ! Décidement, ce gentil papy devenait de plus en plus attachant ! Il se présenta...Ambro, simple voyageur, mais il y avait quelque chose dans ses yeux qui démentait ces dires. Cela dit, elle n'insista pas, chacun avait le droit de garder ses secrets enfouis...

-Je ne voudrais pas vous ennuyer avec mes récits, ils ne sont guère joyeux en ces temps de troubles. Il arrive que l'insoucience de la jeunesse s'évapore devant l'horreur du monde, mais je n'en perdrais pas le sourire pour autant !

répondit elle en justifiant ces dires d'un large sourire...

-Mais si vous le désirez, nous pouvons aller nous abriter a l'ombre de ce grand chêne.

ajouta-t-elle en désignant la clairière qu'elle venait de quitter au centre duquel trônait un magnifique chêne centenaire...

- Oh douce Astéride, vos paroles sont celles d’une adulte et non d’une jeune adolescente qui devrait pourtant profiter de la vie, fichtre et fouchtre qu’est ce qui à bien pu vous arriver noble demoiselle ? Qu’entendez-vous par les horreurs du monde ?

Ambro plongea son regard bleu dans celui de Astéride, puis il lui lâcha à son tour son plus beau sourire, il lui manquait certaines dents, mais il était rare de voir un sourire si chaleureux.

- M’ennuyer, vous avez peur de m’ennuyer, jeune enfant, vous ne me connaissez pas encore, cela ce voit, rien ne peut m’ennuyer, au contraire je m’intéresse à tout. Allez, allez jeune enfant venez soutenir le bras d’un vieil homme, mes membres commence à fatiguer …

Le vieil homme émetta un léger son aigue, suivis très rapidement pas un bruitage de lèvre assez comique.

Soudain la Sweep, la petite souris qui était maintenant à quelques centimètres du buisson, abandonna sa quête d’exploration pour rejoindre la barbe accueillante de son maître et amis.

- Oui, oui ma vieille amis, viens me voir. Regarde la jeune enfant si belle, elle se nomme Astéride, tu ne lui feras pas de mal, n’est ce pas ?

Par on ne sait qu’elle miracle la souris blanche émit à sont tour un son, on aurait dit qu’elle avait compris Ambro, qu’elle savait communiquer avec lui.
Elle avait quitté la barbe de l’ancien pour se diriger vers la robe d’Astéride, mais elle ne grimpa pas, elle attendit près du pied de la jeune enfant, puis elle émit de nouveau un petit son.

- Astéride, je vous présente Sweep, ma souris blanche, ma seul véritable amis. Elle vient de me demander si elle pouvait monter vous saluer ?

De nouveau Ambro se remit à rire, surtout en imaginant la tête qu’allait faire Astéride.
Puis la jeune enfant lui proposa d’aller s’assoir près d’un chêne, d’un chêne centenaire.

- Mais avec plaisir mon enfant, vous allez enfin me dire ce qui ne va pas. Allons y princesse.

Puis il ajouta pour lui-même, mais de façon tout à fait audible, car il avait pris l’habitude de se parler seul.

- Fichtre et fouchtre, un chêne de plus de cents ans, je suis plus vieux que lui, fichtre et refichtre cela ne me rajeunis pas.

Astéride garda son sourire, peut être fut il un peu ébranlé par les paroles du sage...C'était vrai, parfois, elle avait besoin de parler, de confier ses larmes au secret, ces tourments aussi...Incanus était un ami, un confident par bien des côtés et il savait lui apporter ce soutien qu'elle quémandait. Mais en cette heure, il respirait surtout de soulagement en voyant la petite souris fouineuse s'éloignée de sa cachette...Astéride ne pu s'empecher de rire quand à la façon qu'eut Ambro d'appeller sa petite souris. Surprise, elle haussa un sourcil, curieuse de voir l'animal se glisser dans la longue barbe du papy. Souriante, elle regarda le museau de la souris frémir et vit dans les petites billes qui lui servaient d'yeux une lueur d'intelligence. Ils avaient une relation très forte, il suffisait de les voir ensemble, de voir l'animal comprendre ce que lui disait le vieux sage...

Puis, l'animal quitta le refuge offert par l'imposante barbe blanche, trottina jusqu'a ses bottines et...s'arrêta. Astéride leva les yeux sur Ambro, absolument charmée par la petite souris a l'air si malicieux.

-Sweep ? Elle est...absolument...Adorable !

fit elle tout en s'accroupissant sur le sol, son pantalon crissa sur ses cuisses et, doucement, avec des gestes délicats, elle tendit la main devant l'animal.

-Mais bien sur qu'elle peut venir ! Comment voulez vous que je résiste a ce petit museaux frétillant !

Elle leva la tête subitement en entendant Ambro parler de son âge...Plus agé que le chêne ? Alors, elle rit doucement.

-Cela confirme mon impression. Vous etes un vieux sage, sans vouloir vous vexer bien sur.

Ambro suivit la jeune enfant, enfin plus si jeune que cela, il était surpris de la différence entre ses livres et la réalité. L’adolescente qui se tenait devant lui, était sans doute tout juste âgée de dix neuf ans, un peu moins ou un peu plus, et elle était seul dans une forêt que l’on pouvais qualifier de dangereuse, habillé d’un pantalon d’homme errant comme une âme perdue, alors que dans les nombreux livres qu’il avait lu, on parlait de jeune femme noble, toujours bien habillée, de longue robe, passant leur journée à faire de la couture, ou à subir la cour de leur prétendant. Il avait toujours crus ces livres, ce n’était pourtant pas des contes, mais bien des livres d’histoire, mais les mœurs ont du évoluer, Ambro était fasciné par l’évolution rapide du genre humaine, il se promit d’étudier tout cela en détail.

Mais pour le moment, il voulait connaître les secrets de cette enfant, de la petite sœur de Trystan. Il avait rencontré ce dernier il y’a quelques semaines lors du conseil des Rois, il l’avait trouvé très sympathique, et mourrait d’envie de le revoir, et de lui demander la permission d’étudier la grande bibliothèque de Diantra.

Il remarque que Astéride avait entendu ses murmures, fichtre, il avait oublié de parler dans sa tête, sa solitude lui avait faire prendre de mauvaise habitude. Puis il l’entendit mentionner le terme « vieux sage ». Et il se remit à rire.

- Hum, un sage, tu trouves que j’ai l’un des sages, mon enfant, que ferais un sage dans une forêt ? Un sage passe son temps enfermé dans une bibliothèque, moi j’aime me promener, profiter de la vie. Ah et la vieillesse, qu’est ce que la vieillesse ? Si tu regardes ce chêne qui doit avoir mon âge, c'est-à-dire environ cent cinquante ans, il est jeune pour sa race, mais moi tu me trouves si vieux que cela ?

Il rigola de nouveau, puis il prit une bouffé de sa pipe. Et il s’assit à côté de la sœur du prince.

- Bien, bien mon enfant, raconte moi tes petits soucis, je ne suis qu’un vieil homme qui a vécus trop longtemps seul. Ensuite je te raconterais mon histoire.
Et ne t’inquiète pas, je ne mords, et puis, je n’ai plus assez de temps pour le faire …

Astéride accompagna le rire du papy du sien, l'un lourd et rocailleux, l'autre plus léger et cristallin.

-Enfermé dans une bibliothèque ? Non, par moi, un sage, c'est quelqu'un qui a vécu, qui a vu et qui a sentit. Donc oui, vous etes un vieux sage a mes yeux trop jeune.

Répliqua-t-elle en souriant un brin moqueuse et légère. Cela lui faisait du bien de rire, de laisser parler la frivolité, tout était si noir autour d'eux, rire était quelque chose de précieux dans ces temps trop sombre.

-Si vieux ? Non pas vraiment, il y a comme une étincelle de jouvence dans vos yeux.

« Ash'...Tu sais où elle est la souris ? J'ose pas bouger une corne et je commence a avoir des crampes »
« Elle est retournée vers son maitre, ne t'inquiètes pas...Tu peux t'étendre tranquillement mais en faisant attention tout de même... »
« Ouf...Merci, je n'en pouvais plus ! »

Puis, Astéride reporta son attention sur le vieillard. Il avait semblé intriguer par sa mise et elle pouvait le comprendre. D'ordinaire, elle n'était pas vêtue de cette manière mais grimper sur Incanus en robe était un coup a s'ouvrir la peau des cuisses alors elle faisait fi des convenances pour vêtir un pantalon lorsqu'elle allait se promener avec lui.

Assise en tailleur, elle laissa un peu de place au vieillard pour qu'il puisse prendre ces aises et resta un instant silencieuse face a ses mots...

-Mon histoire ? Oh, vous savez, elle est banale, comme tout ce qui se passe a la cour...

Et puis tout a coup :

-J'ai regardé la douleur et la mort en face...Et cette image me hante encore...Je n'arrive pas a oublier.

Non, elle n'arrivait pas a effacer le visage si serein, taché de sang de la reine...Morte de douleur, assassinée de souffrance et...

-Et je me sens seule face a cela...

ajouta-t-elle en resserant ses bras autour d'elle, comme si elle avait froid soudain. Oui, l'idée de la mort, de la souffrance qu'elle engendrait ne cesser de la torturer. Elle verrait son frère mourir, elle verrait Lilianna mourir et tout ces visages aimant qui succomberaient au temps alors qu'elle le défierait...Supporterait elle tant de douleur ? Incanus l'entourait de sa douceur mais ce n'était pas suffisant...En vérité, elle se sentait terriblement abandonnée face a ces propres tourments.

Bon sang elle était si jeune, si fragile, comment pouvait-elle être aussi triste, aussi troublée ? Ce n'étais pas normal, elle avait du vivre des moments effroyables, elle était sans doute plus forte que ce qu'elle en avait l'air.
Le couple improbable, était maintenant assis à l'abri d'un chêne centenaire, le vielle homme veillait sur la jeune enfant, tel un grand-père sur sa petite fille.

- Astéride, mon enfant, bien que nous ne connaissons pas encore, tu peux me parler, je connais ton frère, certes depuis peu mais je peux dorénavant le compter comme un amis, bien que j'en ai pas beaucoup.

Le vieux sage se remit de nouveau à rire, sa joie de vivre était là, même dans des moments tristes, il ne pouvait s'en empêcher, c'était comme cela.

- Fichtre et fouchtre, ce discours mielleux ne me ressemble pas, on dirais un vieux grand-père. Nom d'un chien je suis tout jeune, j'ai encore la vie devant moi, n'est ce pas ?

Cette fois ci, ce ne fut pas un rire qui accompagna les paroles du demi-nain mais un large sourire, dévoilant toute ses dents.

- Raconte moi tes soucis jeune princesse si tu le souhaite. Si tu ne le désire pas, et bien, et bien, comment dire, nous parlerons d'autre chose, tu me raconteras quelques histoires sur ton Royaume, il me manque quelques données.

Puis la jeune enfant eut un moment d'absence, comme si elle parlait à une autre personne, comme si elle s'adressait à lui par télépathie ou grâce à un autre système magique. Ce moment fut bref mais n'échappa a Ambro. Mais le demi-nain laissa passer, il n'avait aucune intention de se mêler des problèmes d'Astéride si celle ci ne le souhaitais pas. Mais lorsqu'elle chercha une quelconque chaleur à l'aide de ces bras, Ambro ne put s'empêcher de se remettre à parler. Comme par magie, il redevint serieux, laissant sa folie de côté et laissant apparaître sa véritable sagesse.

- Que caches-tu au plus profond de toi Princesse, tu n'es pas une enfant comme les autres, tu as trop de soucis pour un enfant de ton âge, d'ailleurs je l'ignore. Je t'en prie parle moi, je suis sur de pouvoir d'aider, tu as du t'en douter, je ne suis pas un simple voyageur …

Il laissa sa phrase en suspend, laissant planer le silence, plongea son regard bleu emplit de sagesse de celui de la jeune enfant. Le sage Ambro attendait une réponse ...

-Mon frère est un homme d'exception...

Sourit elle doucement. Oui, elle adorait son frère...Leur sang n'était pas le même pour moitié, mais il ressemblait tellement a Charles parfois que la jeune femme avait l'impression de le revoir a travers lui...

-Il sera un grand roi...Je l'espère...Moi qui ne lui cause que tracas et soucis.

Elle ne savait pas pourquoi les vannes s'ouvraient avec cet étrange vieillard, elle ne savait pas pourquoi ces mots franchirent ses lèvres, ils dormaient depuis si longtemps dans son coeur....Veldrin lui manquait...C'était une blessure ouverte et suintante...Et était elle prête a cela ? Elle ne le savait pas vraiment.

-Tout à fait, vous êtes fringuant et guilleret ! Qui tenterait donc de dire le contraire ?

Mais son rire sonnait faux, lui qui émerveillait tellement son père autrefois....

-Vous savez, mon père m'appelait "Sa petite étoile" "Son petit soleil"...Mais a quoi cela sert il si je n'ai personne a éclairer ?

Astéride inspira lentement, exhala un souffle fatigué, si fatigué, alors qu'elle savait qu'une énergie sans limite coulait dans ses veines. Incanus souffla un soupir rêveur sur son âme, doux réconfort que celui là...Elle l'aimait comme un frère, comme cette seconde moitié d'elle même..Son âme soeur avait dit Hélios...Mais ce n'était pas assez...

-J'ai 17 ans et j'ai l'impression de tout savoir de la vie....C'est impossible, je voudrais chanter et danser, être futile et frivole mais...Ce n'est pas possible.