[tribunes] Comment le Cerf rencontra le Roi

Le Grand Tournoi de Diantra ! La ville entière bruissait de soies et d'ors. Le matin, le vent de mer, passant sur les verges de la plaine, portait par brassées, l'odeur des pêchers et des citronniers mais, vers la fin de la journée, une petite brise tombait sur la cité, rafraichissante comme un sorbet, ponctuée de senteurs toniques, de résine et de cèdre. Mais le jeune Eskevar ne jetait pas un regard sur la jadis riante et fastueuse cité. Il avait revêtu sans entrain son bliaud de soie or, par-dessous un pourpoint de velours noir brodé d'or au cerf héldirois, s'était rasé de près et avait posé sur ses épaules un long manteau à damier noir et or, qui laissait entrevoir une écharpe de tartan au couleur de son clan, le sash, qu'il portait sur l'épaule fixée par une broche sertie d'or et de gemmes.

Mais bien qu'il brilla par son aspect, il était sombre et triste dans la joie générale. Cette atmosphère de fêtes lui pesait. Et plus que tout, l'obligation d'assister au tournoi que le roi de Diantra, Trystan d'Erac, offrait à ses sujets, et qui se déroulerait dans quelques instants, dans la prairie en contrebas. Dès que la nouvelle était parvenue dans le val, Eskevar s'était mit en route avec quelques uns de ses plus braves chevaliers et vassaux. Il aurait du concourir au titre en personne, mais l'imprudence et la témérité, ainsi que son fol orgueil, l'avait poussé à participé à une joute improvisée avec un chevalier errant, lui-même en route pour participer au tournoi. Outre que le combat avait été formidable et que son adversaire c'était révélé un épéiste de grand talent, il s'était blessé à la jambe et au bas en chutant de cheval et avait dut déclarer forfait en arrivant dans la capitale... Le Protecteur du Val avait bien tenté d'inscrire l'un de ses hommes à sa place, comme la règle le lui permettait, mais voilà qu'un mal étrange semblait s'être éprit des participants. Plusieurs déjà avaient déclaré forfait, dont son remplaçant Raymond des Baux. Non, décidément, il ne faisait pas bon respirer l'air de Diantra pour lui et les siens... Près de la ville en fête dont la rumeur joyeuse montait jusqu'à lui, Eskevar remâchait comme une herbe amère cette source de honte et de douleur : Hautval ne serait pas représenté, ni plus qu'Ydril, Scylla ou Oësgard.

Lorsqu'il arriva dans la grande prairie, les tribunes étaient déjà pleines. L'éclat des tissus d'or, sous le soleil, blessait les yeux et l'odeur des fleurs tressées en guirlandes alourdissait l'air. Le bruit de la foule était tel que plusieurs des cavaliers déjà groupés derrière les barrières avaient de la peine à tenir leurs chevaux. Eskevar remarqua, parce qu'il se tenait un peu en retrait et montait un cheval de mauvais aloi, un chevalier portant un heaume aquilin et une épaisse fourrure sur le dos. Il reconnu avec plaisir le chevalier au Kerkand, Aetius, qu'il avait affronté en route pour Diantra, et lui souhaita intérieurement toute la chance possible. Maintenant que ni lui ni ses vassaux ne pouvaient plus concourir, il avait fait d'Aetius d'Ivrey son favori dans le tournoi. Il arriva ensuite dans la tribune du Roi.

La silhouette de Sa Majesté se détachait, encore plus magnifique sur le fond de draps pourpre et de tapis de soie dont la tribune était ornée. La reine Lilianna quand à elle, rayonnait, visiblement heureuse, épanouie, dans cette atmosphère de beauté et de fête. Menue et fine, sa robe de soies polychromes tissée de grands oiseaux éclatants mettait en valeur sa blondeur. Il s'avança et vint baiser la main du roi.

_ C'est un honneur pour Helderion que de pouvoir rencontrer votre Majesté, Sire.

Trystan avait su dés le début des festivités qu'il ne serait pas tranquille pour assister au tournoi. Il se demandait si c'était parce qu'il était aveugle qu'on pensait pouvoir venir lui parler et l'empêcher de suivre une joute à laquelle il ne voyait rien ou si c'était simplement parce qu'il était roi, accessible aux nobles dans la tribune et donc une véritable aubaine pour ceux qui ne voulaient pas attendre des jours et des jours une entrevue royale. Notons tout de même qu'il laissait rarement poireauter ses vassaux et mettait tout en œuvre pour les recevoir dans les plus brefs délais.

Bref, c'était un véritable ballet de nobles plus ou moins importants qui se déroulait sous le nez du roi et voilà que quand un partait, un autre reprenait sa place.

Cette fois, ce fut un jeune noble de Hautval, un vassal direct du Duché d'Erac. Heureusement que Lilianna, elle, n'était pas aveugle, puisqu'elle susurrait à l'oreille de son époux les noms de ceux qui avançaient ou signalait leur présence quand elle ne la connaissait pas, évitant ainsi à Trystan une fin prématurée par crise cardiaque. Le jeune homme s'empara de la main du roi et la baisa en signe de déférence, avant de prendre la parole.

Helderion... Eskevar, jeune chevalier ayant la vingtaine, terres en Hautval. Il avait prit part à la guerre civile, du côté du roi, mais était encore jeune et faisait parfois quelques maladresses dans sa façon de gérer son armée ou ses terres. A 20 ans, c'était chose normale, mais il allait devoir apprendre vite.

- "Messire... Eskevar, c'est bien cela? C'est toujours un plaisir que d'avoir à faire avec un vassal aussi fidèle que vous. Vos actions lors de la guerre civile m'ont été rapportées."

Il n'ajouta pas ce qu'il en pensait vraiment, c'était toujours mieux de laisser les gens faire leurs propres déductions.

- "Est-ce là un simple salut ou bien désiriez-vous me parler d'un quelconque sujet?"

A la question du Roi, Eskevar, qui gardait la tête baissé en signe de déférence, répondit par un hochement de tête et un sourire plein de reconnaissance. Alors qu'il venait présenter ses respects à Sa Majesté, celle-ci lui offrait la grâce d'échanger quelques mots. A première vue, le roi ne paraissait pas aussi accueillant qu'il se le fût imaginé. Malgré leur cécité, les yeux du roi semblaient vouloir sonder la moindre parcelle de pensée du chevalier, ce qui avait pour don de mettre profondément mal à l'aise le jeune garçon. A dire vrai, il ne savait trop quelle idée se faire de cet infirme, ce monarque, à la fois tant aimé et tant décrié par ses sujets. Il était né sous le règne du roi Ultuant et le Royaume avait connu une certaine prospérité jusqu'à sa disparition. Ce roi-ci, n'avait apporté qu'une guerre civile, à laquelle Eskevar avait d'abord hésité avant de s'engager du coté du Roi, lorsque les rebelles s'étaient emparés de Hautval en y plaçant le jeune Audoin d'Olyssea. Et une famine, qui dévastait à présent les régions les plus touchées par la guerre, sans parler de l'état de faiblesse des Marches du Nord : Oësgard et Alonna n'étaient plus que des ruines. Le Royaume n'avait jamais été aussi vulnérable. Tout cela allait à l'encontre de la croyance héldiroise, selon laquelle la prospérité matérielle accompagnait le règne des monarques vertueux. Ajoutez à tout cela qu'Eskevar faisait parti de l'ancienne noblesse d'épée, fière de ses privilèges, celle-là même qui avait si mal vécue les réformes du Roi et l'ont pouvait facilement comprendre que l'estime pour son roi balançait dans le cœur du jeune chevalier, qui n'attendait du reste, qu'un signe pour être rassuré.

J'espère qu'elles ont été du goût de Votre Majesté, répondit Eskevar lorsque Trystan évoqua ses actions durant la guerre civile. C'était la première fois que le roi ou l'un de ses représentants évoquait ces actions pendant la guerre. Depuis la fin des hostilités et les adieux du Sénéchal de Sephren, à Diantra, il n'avait plus eu signe de vie du pouvoir royal. Eskevar avait bien envoyé une lettre au Roi, durant la guerre, pour l'informer de la prise de Hautval et du sort des rebelles, mais celle-ci était restée lettre morte... Du reste, la phrase n'était pas pour le mettre d'avantage à l'aise, si le Roi venait d'évoquer sa connaissance de ses actions, il n'évoquait ni satisfaction particulière, ni mécontentement. Pourtant, Eskevar ne voyait aucun blâme que l'on pourrait faire rejaillir sur son blason. Il avait fait cette guerre en conservant son honneur intact, contrairement à d'autres.

Oui Sire. Je viens très humblement demander à Sa Majesté, au nom de mes vassaux et de ceux de feu le baron Charles de Hautval, de nommer un successeur ou un héritier à la tête de la baronnie.

Il n'y avait toujours pas de baron à la tête de la baronnie, et de fait, et ce depuis des siècles, l’histoire de Hautval se caractérisait par de nombreuses minorités, périodes au cours desquelles, les barons étaient captifs, absents ou empêchés, voire vacance du pouvoir qui impliquaient la mise en place de régences, parfois collectives, pendant lesquelles le pouvoir était exercé par des Régents ou Protecteurs du Val. Ainsi, après la chevauchée en direction de Diantra et le retour à Hautval, les vassaux de la baronnie, dont les seigneuries de Caruw et Helderion, avaient communément décidés de nommer Eskevar à la charge de Protecteur du Val. Cette charge lui permettait d'exercer les pouvoirs du baron, mais il lui manquait l'aval du Roi, qui n'était guère plus aimé en ce fief, et cette solution n'était qu'une réponse temporaire au problème, une réponse qui ne pourrait durer éternellement. Déjà on le pressait de prendre le pouvoir, de force, car il était après Charles le seigneur le plus puissant de la baronnie et nombreux étaient ceux qui le soutenait à ce poste. Les éventuels prétendants, plus faibles préférant garder le silence devant la puissance nouvelle de la maison d'Helderion. Mais Eskevar savait qu'une telle manière de faire ne serait pas du goût du Roi, dont il recherchait l'appui et la légitimité.

Comme vous le savez, Votre Majesté, le dernier baron a disparu sans laisser de traces et nous ne lui connaissons point d'héritier. Ni en ses terres, ni dans le reste du Royaume.

C'était le premier sujet que voulait aborder Eskevar. Viendrait ensuite le sort des prisonniers rebelles et la bénédiction du Roi pour emmener ses troupes en Oësgard.

Trystan sourit alors que le jeune homme demandait si ce qu'il avait entrepris en Hautval était du goût de son suzerain. Pas une réelle question, le roi aurait pu éviter d'y répondre, mais il jugea plus juste de commenter :

- "Et bien, dans la mesure où vous vous êtes battu en restant fidèle à votre roi, je suis satisfait en effet."

Et il n'en ajouta pas davantage. Le fait était que le jeune homme avait bouté Audoin d'Olyssea loin des terres de Hautval. Et maintenant ces terres riches et prolifiques se retrouvaient sans dirigeant. Et, bien évidemment, ce fut le sujet qui amenait le jeune Eskevar. Tous ces nobles étaient tellement prévisibles... Tous ne venaient que pour cela : des terres, des renseignements, du pouvoir. Certains le dissimulaient derrière l'inquiétude pour le pauvre peuple, mais Trystan n'était pas dupe, il était le même : il aimait le pouvoir.

- "Hélas, Charles de Hautval a en effet disparu sans laisser de consignes ni d'héritiers, ce qui est fort dommage... Dites-moi messire, vous adressez vous au roi ou à votre duc?"

Un sourire malicieux retroussa les lèvres du roi, lui conférant un visage plus sympathique, plus jeune et bien moins austère et monolithique. Essayait-il de destabiliser son jeune compagnon? Non, pas vraiment, mais de voir un peu ce qu'il avait dans le ventre pour son jeune âge. Ce qui était amusant, c'était que tous ceux qui venaient le voir étaient exactement ceux qu'il voulait voir, comme s'ils avaient conscience d'être les plus aptes à occuper le poste dont ils venaient parler. Trop grande confiance en soi ou clairvoyance? A moins que ce ne soit un culot monstre... Mais Trystan aimait cela, cela lui permettait d'évaluer un peu ceux à qui il avait à faire.

- "Il me semble avoir entendu dire que vous portiez le glorieux titre de hum... Protecteur du Val? Un titre bien ronflant pour un homme aussi jeune... Vous en sentez-vous digne?"

Eskevar vit le Roi se redresser légèrement et détailler longuement son interlocuteur, un sourire aux lèvres. Premier signe de chaleur de cet homme envers le chevalier. La réponse du jeune héldirois avait plus été une réponse du tac au tac qu'autre chose : une formule protocolaire à un commentaire agréable que le Roi lui avait fait l'honneur de faire. Non, ce n'était pas vraiment une question, mais le roi prit tout de même le soin de la commenter.

- "Et bien, dans la mesure où vous vous êtes battu en restant fidèle à votre roi, je suis satisfait en effet."

Le jeune chevalier sentit sa peau se hérisser à ses mots. Morbleu, le contraire en eu été étonnant ! Mais le commentaire était tout sauf généreux. Sobre si ce n'est moins, et Froid, à l'image de l'attitude du pouvoir royal envers Eskevar depuis la guerre des barons. Cette froideur et cette condescendance avait de quoi révolter le jeune chevalier, si impétueux et si hautain à la fois, tout plein d'ardeur et de bravade et prêt à affronter le monde par arrogance. L'accueil de la soeur du Roy, à Erac, avait été glacial, pour ne pas dire insultant envers le jeune vassal. Sa lettre au Roy, lui annonçant la prise de Hautval - la première victoire de la guerre civile pour les loyalistes - était rester lettre morte, de même que toutes les initiatives entreprises par lui en faveur du retour à l'ordre royal. Et Eskevar avait ouï des rumeurs de mécontentement sur ses décisions à la Cour. N'était-ce pas lui qui avait combattu les rebelles quand tous, ou presque, désertaient le Roy ? N'était-ce pas lui encore qui c'était infiltrer dans un château remplit d'ennemis afin de s'en emparer sans coup férir ? Lui, toujours, qui avait supporter le plus gros de la bataille de Diantra à la Porte Nord, un carnage sans nom ? Il était reparti de Diantra en y laissant mille cinq cent hommes et n'avait reçut depuis aucuns signes en provenance du Roi. Il avait alors ronger son frein et bouder le tournoi, sous le coup de ce qui ressemblait en tout point à une disgrâce royale. Disgrâce dont il ne comprenait pourtant pas l'origine et qui avait éveiller des sentiments bien amers en lui. Le chevalier acquiesça d’un hochement de tête, conscient que tous les regards, de la reine, des conseillers et des autres nobles présents autour, étaient concentrés sur le roi et le jeune chevalier.

Le roi laissa passer quelques secondes avant de reprendre :

- "Hélas, Charles de Hautval a en effet disparu sans laisser de consignes ni d'héritiers, ce qui est fort dommage... Dites-moi messire, vous adressez vous au roi ou à votre duc?"

De sa position, toujours agenouillé, Eskevar vit un sourire malicieux retrousser les lèvres du roi, lui conférant un visage plus sympathique, plus jeune et bien moins austère et monolithique songea le jeune seigneur. Mais ce sourire accompagnait une question pour le moins étonnante. S'adressait-il au roi ou à son duc ? Était-ce une question piège ? Cherchait-on se moquer de lui ? Ou peut-être voulait-on le tester, voir s'il avait de l'esprit ? Eskevar répondit par une autre question, tout aussi malicieuse et dont la portée n'était pas à sous-estimer, eu égard aux derniers évènements.

_ L'un et l'autre ne sont-ils pas indissociables, chez la lignée Fïiram, Sire ?

Et toc. Il était curieux de voir ce que le roi allait lui répondre ! Le fait que le duc d'Erac, son suzerain en plus de son roi, dirigea le royaume, n'avait pas d'incidence direct sur la gestion de ses affaires d'après lui. Si le duc lui devait assistance et protection, le roi était tenu aux mêmes devoirs, envers lui, comme envers Hautval. On passait tout simplement d'une échelle à l'autre, voilà tout. Et cette situation avait pour double avantage qu'elle simplifiait largement les questions de juridiction royale et ducale... qui ne faisaient qu'une. Il y avait bien sûr la sœur du roi, qui gérait le domaine en l'absence de son frère... encore que "gérer" fût un bien grand mot. La dame restait dans son domaine à fricoter avec un chevalier du dernier acabit, un rustre errant, disait-on et délaissait complètement le contrôle de ses vassaux. Mais son frère avait le dernier mot sur tout.

- "Il me semble avoir entendu dire que vous portiez le glorieux titre de hum... Protecteur du Val? Un titre bien ronflant pour un homme aussi jeune... Vous en sentez-vous digne?"

"RONFLANT" ?! Eskevar sursauta en entendant les paroles du roi, choqué qu'un tel symbole de l'histoire hautvaloise soit traité avec autant de trivialité. Par le Saint Pinard de Hautval, si l'on avait voulu offenser un hautvalois, on ne s'y serait pas mieux prit ! Par chance, Eskevar n'était pas hautvalois, mais héldirois. Alors bon...

_ De plus jeunes l'ont portés avant moi, Majesté, et sans jamais lui apporter d'opprobres. N'ai-je pas rétablie la paix du Roi dans la baronnie... ?

Le roi se permit un petit sourire à la réponse roublarde du jeune homme. Il savait que son manque d'enthousiasme pouvait paraître de l'indifférence voire même du mépris, mais il était ainsi et il n'allait pas changer pour préserver l'orgueil mal placé de ses nobles. Qu'ils fassent avec le caractère de leur roi et voilà tout, ce n'était pas à lui de plier! Mais se montrer si froid avec de jeunes gens plein de fougue avait de quoi les hérisser, il en convenait et en jouait également volontiers.

- "Certes, mais c'est votre duc qui vous nommera baron, quand le roi ne fait que proposer..."

Un petit sourire entendu ourla ses lèvres. Proposer... Il avait bien insister sur ce mot. Oh oui, il proposait des vassaux à ses Seigneurs... Les imposait plutôt. Difficile de refuser, n'est-ce pas? On ne refusait pas grand chose à son roi, cela serait très mal vu, sauf s'il désignait un imbécile fini, mais là c'était une autre histoire. Quoiqu'il en soit, effectivement, il pouvait nommer ses vassaux comme bon lui semblait, puisque le roi était d'accord.

Il piqua au vif la susceptibilité du jeune homme en faisant fi du titre de Protecteur du Val. Oh oui, c'était un bien beau titre que voilà, mais cela ne restait qu'un titre et ne faisait pas la valeur d'un homme. Seuls ses actes comptaient. Il sentit l'offusquation de son jeune vis à vis et leva une main en signe d'apaisement. Il était aveugle mais ce genre de réactions ne lui échappait pas, pas plus que le ton de sa voix, qui semblait protester devant ses paroles bien sévères.

- "Si fait, vous avez effectivement rétabli la paix avec rapidité et intelligence. Je voulais simplement exprimer l'idée qu'un titre ne faisait pas un homme, aussi glorieux soit-il... Et que si le peuple vous a proclamé Protecteur du Val, votre Suzerain, lui, n'a pas encore donné son aval. Seuls vos actes comptent Seigneur Helderion."

Et pour le moment, le jeune homme ne disposait que de ce fait d'armes pour prétendre à ce titre laissé vacant par Charles. Trystan regrettait son vieil ami, mais il n'était pas objectif : à ses yeux, personne ne saurait remplacer Charles. Pourtant, il le fallait, alors pourquoi ne pas laisser sa chance à la jeune génération qui brûlait de faire ses preuves?

- "J'ai assez mis vos nerfs à l'épreuve. Vous êtes jeunes, et jeunesse ne rime pas toujours avec inexpérience comme vieillesse ne rime pas avec sagesse. Puisque les Hautvalois semblent vous avoir accepté et que vous avez fait preuve de votre ingéniosité et de votre loyauté au combat, je fais de vous le nouveau baron de Hautval. Dirigez avec intelligence, courage et clairvoyance Seigneur Helderion."

Il marqua une pause, avant d'ajouter :

- "Cette annonce sera officielle à la fin du tournoi. En attendant, je vous prie de rester discret. Profitez donc des joutes, le poids des responsabilités liés à la gestion d'une baronnie vous rattrapera bien assez vite."

C'était la fin de l'entretien. Le tournoi continuait et le roi avait bien l'intention d'en profiter.

[Fin pour moi, libre à toi d'ajouter quelque chose ou de laisser tel quel ]