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 Perdues - perdues - perdues ! | L'Hirondelle

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Seamus de Roncelieu
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MessageSujet: Perdues - perdues - perdues ! | L'Hirondelle   Perdues - perdues - perdues ! | L'Hirondelle I_icon_minitimeSam 30 Avr 2011 - 19:21

~ Les Fragments de la Nuit - Marche Nocturne ~







L'automne, dans ses plus mordants attraits, étendait son emprise sur la Prime Forêt. Sa paume cruelle s'était posée, faussement caressante, sur les feuillages épanouis ; et ses ongles faits frimas avaient durement griffé troncs et brindilles. Du vert éteint des frondaisons ne demeuraient plus que quelques traces éparses de rouge, souvenirs incendiés d'une poignée de feuilles mortes résistant encore, toujours, à la dernière chute. Hiver bientôt viendrait, et la frange pâle de son manteau ferait taire les ultimes récalcitrants.

Pour l'heure, Barkios tenait Anaëh sous son joug. Et aux grincements et aux froissements d'une flore répugnant encore à s'endormir tout à fait répondaient les cris d'un vent brutal, glacé et tumultueux, qui secouait les cimes et perçait les chairs avec d'autant plus de hargne et de vigueur que le soir tombait.


Ses mains tremblaient.

Si le froid en était pour moitié la cause, l'excitation tenait elle aussi une bonne part dans les frissons qui le parcouraient régulièrement. Il serra son manteau contre lui, secoua la tête pour se défaire des mèches de cheveux qui jugeaient bon de gifler ses joues, et contempla une nouvelle fois la ruine. Il lui avait fallu bien des heures de marche et moults recherches mais, enfin, à moitié renfoncée dans une nature qui avait eu à coeur de reprendre ses droits sur le bâti de pierre, la pauvre masure abandonnée se tenait devant lui.


Ce ne semblait être que l'une de ces vieilles habitations à l'abandon, aux portes béantes et au toit crevé, dont les corbeaux et les vagabonds faisaient parfois leur logis au détour d'une errance. En vérité, ce l'était. Les murs que grimpaient lierre sauvage et chiendent masquaient difficilement la carcasse creuse de ce qui avait du être autrefois une honnête chaumière. Elle tenait encore debout toutefois, malgré quelques pans manquant, éboulés dans les herbes folles, et malgré cet aulne qui semblait avoir décidé d'installer sa demeure en plein coeur de l'ancienne bâtisse, dressant son tronc tordu hors des flaques de chaume et d'ardoise pour mieux tendre ses branches suppliantes vers le ciel.

Mais pour Seamus, ces vieilles pierres représentaient bien plus qu'un simple logis de fortune. Et ce ne fut pas la hâte du repos qui précipita sa foulée, non plus que le soir tombant qui le fit s'avancer sous le chambranle abattu de la vieille demeure.


A l'intérieur, le vent hululait de plus belle. Prisonnier et tourmenté, il frappait les pierres, dérangeait les débris et le tapis de feuilles qui tenait lieu de sol, rampait le long de l'aulne pour regagner, triomphant, l'extérieur où bruissait la forêt. Sans attendre et sans prêter attention aux reliquats d'anciens passages - quelques pots, des breloques brisées, et autres petits objets sans importance - Seamus tomba à genou et balaya à grands gestes l'épaisseur craquelante qui lui masquait la terre. Il tâtonna un temps, concentré. Enfin, sa paume trouva une surface un peu plus lisse, et son doigt trouva l'arête infime d'une trappe à moitié mangée par la terre. Ne pouvant retenir un petit hoquet de satisfaction, l'olysséen, acharné, déblaya longuement puis, après plusieurs tentatives, parvint à arracher le couvercle hors du sol.

Une odeur de terre humide, de poussière et d'air pourri lui monta brutalement au nez. Il cilla par deux fois, avant d'adresser un sourire ravi aux profondeurs qui s'offraient désormais à son regard. Une sorte de petite volée de marches semblait avoir été taillées, entre terre et pierre, pour permettre à un être humain de descendre en leur sein ; il s'y engagea sans hésiter, suivi par le vent insolent.

Bénie soit la vue des dévoyés, aurait dit Erthe l'Ancienne. Le regard du jeune noble, perverti par des années d'apprentissages douteux, fouillait sans grand mal la pénombre. Il y avait nombre de choses intéressantes dans cette petite pièce exiguë, basse de plafond, qui semblait avoir servi de débarras à plus d'une famille. Il vit des petites statuettes brisées, pathétiques, amassées dans un coin. Ici étaient entreposés de nombreux instruments de mesure probablement inutilisables tant leur bois avait été rongé par l'humidité. Là-bas, glissés entre deux tapisseries, des alambics. Leur ventre crevé jonchait de verre le sol terreux.


Mais rien de tout ceci ne l'intéressait vraiment.


Seamus commençait à perdre patience lorsque, au détour de ses recherches, sa paume accrocha la texture lisse et polie d'un coffret de bois. Il en chercha les loquets. Le réceptacle semblait avoir été verrouillé autrefois, mais la rouille mangeait tant le dispositif de sécurité qu'il céda à la première insistance. A l'intérieur, des manuscrits et des vélins, fort nombreux, frissonnèrent quand le regard de Seamus et le vent les touchèrent. Certains étaient percés et reliés, d'autres pas. La plupart présentaient taches, déchirures, et autres accrocs dommageables - mais l'écriture serrée du scribe demeurait lisible en bien des points.


Citation :
Jour quatorzième.


Neuf est le chiffre sacré. Neuf jours pour neuf semaines, et neuf comme les neuf cent quatre-vingt dix-neuf années qui précèdent le passage du Cycle. Sur Neuf est la marque du Divin ; ainsi, Neuf sera le nombre de nos réceptacles.


L'oeil avide de Seamus courut le long d'autres extraits.



Citation :
Jour quatre-vingt-cinquième.


Je peine à faire le décompte de tout ce que nous avons ébauché jusque là, mais il me semble que nous sommes proches du but, cette fois-ci. Améance est de mon avis, bien qu'il ne se contente de le dire que du bout des lèvres. Des résultats probants, nous (...) est plus réceptive encore que nous l'imaginions. Bientôt, il sera temps de passer à la troisième étape de l'expérience.

Je peine, vraiment. Il m'arrive d'avoir peur, mais il nous faut ignorer la peur. Ce que nous nous apprêtons à faire appartient tant au domaine du génie que de l'horreur. Devrais-je m'interroger sur la place de la morale dans tout cela ? Ce ne serait (...)


Citation :
Jour cent-quarante-troisième.


(...) sont pour la plupart partis. A présent nous ne sommes plus qu'une poignée, mais nous irons jusqu'au bout. Parce que nous le devons. Parce qu'à présent nous sommes seuls, seuls avec ce que nous avons engendré.

Améance disait (...) Mais c'est idiot de craindre la damnation. Néera nous a sûrement déjà tous maudits.



Sans s'attarder d'avantage dans sa lecture, Seamus referma le clapet de bois. Dans son échine remonta un long frémissement d'extase. Ca y était. Il les avait trouvés. Il n'y avait plus, désormais, qu'à ramener tout ceci en sécurité pour l'étudier en toute tranquillité.

Mais il ne voulait pas attendre, non ! Il ne pouvait attendre. Tant de secrets, tant de mystères à portée de son esprit que c'en était trop demander que de vouloir retenir sa faim. Riant tout bas comme un dément, il remonta à la surface, referma d'un geste sec la trappe et balaya de nouveau les feuilles mortes pour l'en couvrir ; puis, avisant les restes d'un meuble dans un angle de la masure, il le remit tant bien que mal sur pied et l'improvisa table de travail.

Le manteau, dégrafé d'une main fiévreuse, s'en alla s'échouer au sol. Hors du sac de voyage qui l'accompagnait, l'olysséen tira quelques bougies, rapidement allumées - malgré le vent qui tempêtait de plus belle - puis plantées dans le bois pourri qui lui servait de support. Promptement étalés, les parchemins reçurent de nouveau la caresse amoureuse des prunelles vert tilleul.


Citation :
Jour soixante-cinquième.


Avons commencé de (...) appelle sa mère en pleurant. Cela dure le temps de deux clepsydres renversées, après cela l'enfant se tait. Notons la teinte vitreuse du regard et la commissure bleuissante des lèvres, ainsi que des extrémités - notamment sous les ongles. Lors de la seconde ingestion (...) mutation rapide de la gorge ainsi que de l'appareil buccal dans son entier, au point de...


Plongé dans sa lecture, fasciné par sa découverte, Seamus ne comprit que plus tard que la jalousie du vent menaçait de s'abattre sur son travail. Et cela ne rata pas. D'un souffle violent, la bourrasque bondit sur la table, balaya sans vergogne les parchemins et leur offrit des ailes dont ils ne tardèrent pas à faire usage, voletant en tout sens comme de grands oiseaux de papier. Si quelques uns, peu aventureux, retombèrent bien vite sur le sol dévasté de la masure, le gros du troupeau en revanche s'échappa par un pan béant de mur et s'éparpilla dans la forêt désormais noyée de ténèbres.


- Aaahh, non ! Non ! » s'écria Seamus dans un élan de désespoir et d'effroi, tandis qu'il tentait de rattraper quelques fuyards à la volée.


Peine perdue ! La plupart des voltigeurs s'en étaient allés se perdre dans la flore, et il ne restait guère que l'espoir de longues recherches pour pouvoir mettre la main sur l'ensemble des feuillets manquants.

Gémissant de contrariété, un Seamus en chemise - malgré le vent glacial - et à la chevelure en désordre se précipita hors de la ruine comme une âme en peine, arpentant pour commencer les alentours les plus proches en se tordant les mains d'anxiété.


- Perdues - perdues - perdues ! Quelle calamité ! Maudite soit cette bourrasque et la gorge qui l'a fait naître... Voyons. Par ici, peut-être ? Ou bien plutôt par là ! »
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MessageSujet: Re: Perdues - perdues - perdues ! | L'Hirondelle   Perdues - perdues - perdues ! | L'Hirondelle I_icon_minitimeLun 2 Mai 2011 - 0:23

Le vent. Celle qu'on appelait Moïra de ce côté de l'Olyia l'avait toujours aimé. Il était cet esprit joueur qui, lorsqu'il s'ennuyait, caressait son visage et gonflait ses cheveux. Il était ce soutien qui, où qu'elle allât, suivait toujours ses pas ; à moins que ce ne fut elle qui s'égarait à sa suite. Qu'importait, au fond, ils étaient de vieux compagnons de voyage et cela suffisait. Cela se sentait, quand elle dansait bien entendu, mais aussi quand elle marchait ou quand ses doigts signaient. Aérienne, Moïra l'avait toujours été. Les humains, devant son silence, ne s'étaient ainsi pas trompés quand ils avaient dû la nommer. Elle était, clairement, pareille à l'hirondelle et ce jour là, elle avait déployé ses ailes. Car si le vent était un ami de la première heure, les branches restaient ses compagnes de jeu les plus fidèles. Combien d'escapades, à la faveur de la nuit ? La musicienne ne les comptait plus.

Jadis, elle guettait la plus haute cime, promesse de cette vue unique et merveilleuse qu'était l'Anaëh du dessus. Cette vision enchanteresse qu'était le toit du monde surplombé ; en bas, rien ne surclassait l'épais manteau des dames les feuilles. Là-haut, tout était différent. Comme si, affranchie de ce sol qui toujours la ramenait à lui, elle goûtait à la réelle liberté. Cependant, Moïra ne recherchait rien de tel quand elle s'était élancée avec souplesse à l'assaut du vieux chêne, juste un peu de calme. Sa flûte contre ses lèvres, elle jouait la muette mélodie du vent. Ses doigts virevoltaient sur la surface vernie et usée, comme autant de danseurs frénétiques, s'élançant à corps perdu au rythme d'une musique que d'aucuns jugeraient inaccessible, sinon existante. Mais ceux-là ne savaient pas écouter le vent, ceux-là voyait le maître des tempêtes, le monstre insatiable contre lequel même le chêne pliait. Rugissements et ronronnements se confondaient pour ces oreilles indélicates ; elle savait que le zéphyr était l'enfant de l'ouragan.

Il était là, le jouet du vent, il approchait. Le parchemin se tordait sous l'assaut d'une nouvelle brise et la tête de Moïra s'inclinait légèrement, à moins que ce ne fut l'inverse. Lisait-elle, ou dictait-elle ? La vérité était peut-être ailleurs, peut-être se cachait-elle au creux de ce sourire qui, lentement, étirait ses lèvres. Quand, finalement, le vélin s'affala sur le tapis de feuilles dorés qui tapissaient chaque recoin de la Prime Forêt, l'elfe rendit audible ce qui ne l'était pas. Elle joua la musique des vents et elle était douce et calme, malicieuse aussi. Aussi joueuse que celui qui les portaient, les notes résonnaient sur les arbres qui observaient, impassibles, la scène mirifique.

Comprendrait-il, cet enfant de l'éphémère, quel tour venait-on de lui jouer ? Lèverait-il les yeux au ciel, à la recherche de cette mélodie qui, avec subtilité, se moquait de lui ? Serait-il amusé, excédé, humilié ? Cela, Moïra ne le savait pas, mais du haut de son chêne, elle observait, sereine, cet être étrange. Les humains étaient rares, en Anaëh, mais il n'était guère étonnant de voir les deux mondes se rencontrer parfois. Là était la définition même d'une frontière et Linaëh, en vérité, en bordait une.

Le silence s'était fait, seulement troublé par la flûte enchantée.
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Seamus de Roncelieu
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MessageSujet: Re: Perdues - perdues - perdues ! | L'Hirondelle   Perdues - perdues - perdues ! | L'Hirondelle I_icon_minitimeLun 2 Mai 2011 - 0:55

~ The Ninth Gate OST - Liana ~








Comme fou, il bondit. Ses pieds enjambèrent les racines et les creux traîtres sous le matelas mouvant des feuilles, ses mains battaient, brassaient l'air récalcitrant. Des parchemins ailés il en récupéra bientôt quelques uns, farouchement liés sous son bras ; mais ce n'était pas suffisant, encore, car il les lui fallait tous. Les Cinq savaient quelles dangereuses révélations le trait du scribe avait couché sur le vélin, et quels yeux innocents, non avertis, se poseraient sur ses mots...

De tache d'ombre en flaque de lumière, de taillis en bosquet, de combe en clairière, toujours plus loin, toujours plus avant dans le ventre intemporel de l'Anaëh, il courut, quêta, chercha, saisit, jura. Comme quelque dément, quelque damné poursuivi par une chasse invisible et sans fin, il ne se permit aucun repos. Et bientôt, insensible à son désarroi, la nuit tomba totalement. Tout-puissant, le vent redoubla de vigueur et frappa de ses flancs la grande masse sombre et mouvante des futaies.

Et ce fut ainsi qu'il jaillit en vue de l'Immortelle. L'éclair blanc de la chemise, que griffaient les grands rets noirs, chaotiques, de la chevelure dérangée par la brise nocturne. Avec un Ah ! de triomphe, aussi avide que le fauve pressé d'en finir avec sa proie, il se jeta sur le parchemin qu'agitait encore mollement quelques soubresauts aériens et, farouche, avide, le serra avec le restant de la liasse contre son sein.

Jusqu'ici Seamus n'avait pas prêté plus que cela l'oreille à ce que lui contait la forêt. Pourtant, au-delà du triomphe ivre qui secouait son esprit maintenant que son trésor était récupéré, en sécurité contre sa poitrine tremblante, le son léger de la flûte alerta sa méfiance. Encore à demi courbé, les mains crispées comme des serres et les cheveux en rideau de part et d'autre de sa nuque, l'olysséen haletait, guettait, écoutait. Et, lentement, ses lèvres découvrirent ses dents dans un rictus qui aurait pu passer pour un sourire - mais qui restait cependant bien trop proche de la grimace agressive qu'offrent certaines bêtes à leurs ennemis.

L'oeil, désormais d'un vert intense, fouilla la pénombre. Se perdit dans les pièges de clairs-obscurs qu'offraient les bosquets, les feuilles craquelantes, toute cette symphonie de reliefs que seul un natif de l'Anaëh pouvait décrypter correctement. Joueur, le vent gonflait sa chemise, soufflait à même sa chair qui, encore tiède de sa course, n'allait pas tarder à se souvenir du froid. Il s'emparait de la mélodie de la flûte, le brisait en mille échos tintillant, de sorte que Seamus ne parvenait pas à saisir leur provenance.

Méfiant, sur ses gardes, le jeune homme se tourna d'un côté, puis de l'autre, tressaillant au moindre bruissement, au moindre craquement par dessus la mélodie moqueuse. Rien ni personne n'offrit de visage aux modulations de la musique. Et Seamus, de plus en plus agacé, commença à gronder. Et les ombres à ses pieds, oeuvre d'une nuit pourtant immobile, semblèrent glisser et s'allonger tandis qu'avec lenteur il se redressait, déployant l'échine pour lancer un regard suspicieux aux alentours.


- Qui est là ? La voix rampait comme une ombre de plus, douce et venimeuse. Montrez-vous. »


De concert, les parchemins frémirent de nouveau contre son buste.


- Montrez-vous, reprit-il avec plus de calme, hasardant un autre pas dans l'ombre du vieux chêne. Je ne vous ferai rien. Je... crois que je me suis perdu, pour ainsi dire. »


Ce qui, dans l'absolu, n'était pas loin de la vérité. Tout empressé qu'il était à courir après son bien et à réunir les fragments éparpillés d'une histoire qui n'était pas la sienne, Seamus s'était dangereusement éloigné de la masure - au point qu'il ne savait pas s'il pourrait en retrouver le chemin sans quelques heures d'errance supplémentaires.
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MessageSujet: Re: Perdues - perdues - perdues ! | L'Hirondelle   Perdues - perdues - perdues ! | L'Hirondelle I_icon_minitimeLun 2 Mai 2011 - 1:48

On aurait pu croire qu'il dansait, pauvre petit être perdu, piégé entre les griffes avides d'une partition qui ne se souciait que de son propre achèvement, soumis à une musicienne satisfaisant son amusement. Mais était-il si désemparé ? Moïra savait de quoi était capable son peuple. Elle savait qu'il suffisait d'une étincelle pour qu'un incendie ne dévore tout ce qu'elle pouvait aimer. Elle les aimait, certes, pour ce qu'ils pouvaient être : des faiseurs de merveilles, des bâtisseurs aux ressources incroyables. Elle avait vu Diantra, ces maisons à pertes de vue, cette cathédrale aux arcades vulgaires mais à la prestance si particulière. Mais elle avait aussi vu la misère, rampante, sournoise, armée d'un couteau de fortune et d'une haine dévorante. Tout comme elle avait guetté Alonna, de loin, et admiré la rage de vivre des défenseurs assiégés. Le fils de Néera était inconstant et imprévisible, c'était là que résidait son charme et son danger. Celui la ne dansait pas, il traquait. Il cherchait sa propre, ce petit oisillon qui osait chanter en sa présence.

Peut-être était-il temps de grandir.

Sa musique mua. À l'image de la voix d'un enfant, elle perdit ses accents aigus et joyeux, se teinta de la fatalité d'une vie pas aussi simple qu'il l'avait espéré, devint plus grave aussi. Avec souplesse, elle se détacha du tronc, ses yeux se fermèrent et elle se laissa tomber en arrière. Plus rien ne retenait la jolie Moïra sinon ses jambes et ses cheveux tombaient en cascade, ne s'arrêtant qu'à quelques centimètres de sa rencontre fortuite.

À nouveau, la mélodie se joua du mutisme de l'elfe et les notes, jusqu'alors joueuses, se firent rieuses. S'énerverait-il ? Elle fuirait. Comme l'hirondelle dont elle pensait pouvoir emprunter les ailes, elle savait être une experte quand il s'agissait de disparaître. Entourée d'Anaëh, elle ne doutait pas de pouvoir s'arracher aux serres vengeresses d'un humain maladroit. S'amuserait-il ? Elle continuerait. Elle était une artiste et de ce fait, en continuelle recherche de son public. Qu'il se trouvât perdu entre les arbres millénaires d'une forêt qui ne voulait pas toujours de lui, quelle importance ? Il était capable d'écouter, d'apprécier, de se souvenir et d'en reparler plus tard.

Il semblait à la recherche de quelque chose. Les feuillets qu'elle avait cru voir, précieusement pressés contre sa poitrine et protégés par ses bras alertes, en témoignaient. Quant à leur contenu, Moïra n'en avait que faire. Elle savait lire, mais quant à le vouloir. Elle préférait encore jouer. Ouvrant à nouveau les yeux, elle le chercha, le trouva sans peine du fait de leur proximité. Leurs regards s'accrochèrent et malgré elle, elle fut troublée. Parce qu'ils étaient aussi verts que les siens, choses rares chez les humains, mais pas seulement. Il y dansait une lueur étrange, qu'elle ne pensait pas avoir déjà rencontrée. Comme un serpent sournois, prêt à mordre mais ne désirant rien d'autres qu'un peu d'ombre pour se dissimuler.

La musique, doucement et d'elle-même, mourut, laissant le silence, veuf, comme seul roi.
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Seamus de Roncelieu
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MessageSujet: Re: Perdues - perdues - perdues ! | L'Hirondelle   Perdues - perdues - perdues ! | L'Hirondelle I_icon_minitimeMar 3 Mai 2011 - 6:28

~ Wojciech Kilar - Death and the Maiden ~








S'énerver... Non. La respiration de plus en plus lente, concentrée, Seamus tendait l'oreille. Avec la patience du serpent, lové sur son tapis de feuille, prêt à jaillir comme un éclair lorsque la proie se risquerait à portée. L'ouïe s'affûtait, méthodique, et l'oeil glissait lentement de côté alors que la musique, incernable, continuait de se jouer de lui. Sa main se pressa sur les feuillets. Rejointe par sa jumelle, elle les roula soigneusement sans qu'il ne perdît une once de concentration.

Et elle se montra, enfin. Dans un bruit de branches secouées, jaillissant telle une diablesse à l'envers, l'Immortelle bascula si près que, malgré toute son attention, il tressaillit. L'oeil clos, le visage paisible ou peut-être bien un peu moqueur - du moins, c'est ce qui lui sembla - l'Elve continuait de faire courir ses doigts sur la flûte comme si sa mélodie était un nouveau langage, une manière de tisser les sons qu'il eût pu comprendre et saisir entre les sursauts du vent.

Un autre, effrayé par cette soudaine apparition et rattrapé par quelque peur superstitieuse, aurait peut-être pris ses jambes à son cou. Un autre encore, au contraire, se serait mis à invectiver la créature, à l'attaquer probablement pour se venger du tour qu'elle lui jouait quand les circonstances ne s'y prêtaient réellement pas. Seamus, s'il hésita sans doute entre l'une puis la seconde de ces deux options, se contenta toutefois d'attendre. Dire qu'il appréciait la musique aurait été du domaine de l'exagération, mais... En fin de compte, et au-delà de toute nervosité, le spectacle, dans son étrangeté, lui plaisait.

Il était coutumier des bizarreries, après tout.

Elle rouvrit les yeux, chercha les siens et les trouva sans mal. Au contraire de n'importe quel être humain normalement constitué, dont les prunelles auraient été dilatées en quête de lumière dans tant de ténèbres, celles de Seamus n'étaient guère plus grosses que deux têtes d'épingle ; mais tout autour, noyé de couleur, l'iris luisait - comme encouragé par la pénombre alentour, comme si la lumière ne pouvait rendre un hommage assez brillant à ses nuances verdissantes.

Il sourit. La flûte, troublée, hésita, puis se tut tout à fait.

Alors, comme si le silence venait de briser le charme qui le maintenait jusqu'ici immobile, Seamus leva la main. Lentement. Doucement. D'un geste qui n'avait rien de brusque mais s'apparentait plutôt à une ébauche de caresse, les doigts frôlèrent. La pommette, la joue, guère plus ; et, avant qu'elle ne se dérobe comme l'oiselle prudente qu'elle était, il parla.


- La jolie joueuse du vent, de ses notes flûtées, voulait-elle m'égarer ? Sois prudente et garde-toi : car si le vent est ton allié, j'en sais d'autres, moi, dont tu ne pourras te défier. »


Et l'obscurité tomba.


De la voix de velours ou des doigts tiédis sur la peau de l'Elve, il serait difficile de dire quel en fut le héraut. Elle s'invita, soyeuse, sous les paupières de l'Immortelle. Elle fut douce, puis envahissante, puis toute-puissante. De ses mâchoires fit disparaître formes et couleurs. La Ténèbre.

Seamus s'écarta alors d'un pas, et rit - d'un rire tout aussi rampant et doux que son maléfice. Se délectant de la cécité provoquée chez l'Immortelle, il attendit. Tenterait-elle, dans une tentative affolée, de se raccrocher à lui ? Tomberait-elle ? C'était lui, pour un temps, qui menait le jeu.
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