Au fil du sentier, un voyage pas si tranquille...

Cela faisait déjà un petit moment que Hyène était entrée dans l'armée et grâce aux nombreux duels entre guerrier, ses compétences au combat s'étaient encore accrues. Elle maniaient désormais ses griffes et sa lance mieux que jamais et aucun adversaire ne lui résistait. Elle avait participé à plusieurs assauts en terre elfique mais ça commençait à dater et sa soif de sang n'avait pas eu de quoi s'étancher. C'est pourquoi, n'ayant rien à faire dans la citadelle, elle était partit vers La Dross tout d'abord dans l'intention d'abattre les elfes qui s'y trouveraient. Juchée sur Arnyek, elle avançait à vive allure vers la ville. C'est alors que loin devant elle, sur le sentier, une humaine et un elfe cheminaient d'un pas tranquille. Un elfe enfin... Ses lèvres s'étirèrent en un sourire carnassier tandis que son tigre bleu grogna et voulut s'élancer vers la nouvelle proie de sa maîtresse mais celle-ci l'en empêcha d'un doux murmure : "pas maintenant" avant de s'enfoncer dans les bois. Elle les suivit de loin, dissimulée par les arbres attendant avec la patience du prédateur qu'ils fassent halte. Hyène s'arma de ses griffes et s'apprêta à faire son entrée mais se figea en voyant l'humaine se lever et quitter le campement. Ravie d'avoir un adversaire en moins, la drow sortit à découvert et salua l'elfe, glaciale.

- Bonsoir. Belle soirée pour mourir tu ne trouves pas ?

Et tandis que ses yeux vérons transpercèrent avec attention l'interessé, la guerrière projeta sa lance avec force mais rata sa cible d'un cheveux, l'arma frola les côtes de la proie en vrombissant et se ficha profondément dans un arbre.
Pestant contre sa maladresse, elle lança sa monture au galop et franchit la distance qui la séparait de lui en un rien de temps. Lorsque le cheval s'arrêta puis s'éloigna une fois que l'elfe noire ait sauté à terre avec souplesse. Elle se jeta sur le sylvain avec férocité et Tanieth faisant de même, bondit dans son dos et le lui lacéra sauvagement. Hyène lui entailla profondément la cuisse et rompit le combat, sentant quelque chose approcher derrière elle. L'assaut n'avait duré qu'une fraction de seconde. La drow se retourna vivement et aperçu l'humaine qui apparaissait entre les arbres. Son instinct ne l'avait pas trompé. Délaissant le blessé, elle fila comme une flèche vers la fille, griffes au clair. Elle frappa sur le côté d'une main et de l'autre visa en même temps au niveau de la poitrine. Son tigre feula, abandonna à son tour le sylvain et vint en aide à sa maitresse.

Ash retournait lentement vers le campement, des branches sèches sous un bras, sa trouvaille sous l'autre. C'est alors qu'elle entendit un horrible cri.

" Iözynn... " murmura-t-elle.

La pirate laissa aussitôt tomber son chargement et se précipita vers le campement, se maudissant de s'être autant éloignée. Fort heureusement, elle ne se séparait jamais de son précieux sabre, par habitude et même plus que ça. Il était une partie d'elle même et son absence la laissait toujours estropiée. Elle piétina les délicates fleurs sans même s'en apercevoir, et c'est donc sabre au clair qu'elle arriva sur la trouée, en hurlant de rage. Elle n'eut le temps que d'apercevoir l'elfe qui gisait au sol, le rouge se mêlant au vert de son vêtement, avant qu'une ombre se jette sur elle. Ash eut un moment d'inattention apercevant l'elfe noire. Elle n'était finalement pas du tout ravie d'en voir par ici. Des animaux, des prédateurs sans conscience. N'étaient-ils donc que ça finalement? Qui d'autre pourrait blesser un être aussi bon et parfait que son ami? Ses quelques secondes d'absence ne lui pardonnèrent pas. Elle reçut un violent coup sur le côté, et recula juste assez pour que le prochain ne lui enfonce pas la cage thoracique.

- Concentre toi Ash, protège Iözynn.

Mais déjà un énorme animal _était-il réellement bleu?_ plongeait sur elle, ne lui laissant aucun moment de répit. La pirate fit tournoyer son sabre de telle manière à se ménager un champ de sureté, simplement pour éviter d'être blessée. Il n'était pas encore temps de riposter. Il lui fallait un plan. Tout en continuant ses moulinets, elle contourna ses assaillants sur la gauche afin de se rapprocher des chevaux et de Iözynn. Les chevaux commençaient à se cabrer d'effroi devant la bête bleue qui feulait. Ash espérait ainsi retrouvait un peu d'avantage. Le feu qui crépitait férocement effrayerait peut-être l'animal, ou peut être même les 2 animaux? Mais il ne fallait pas trop compter sur la chance... Elle ne savait vraiment pas si elle aurait le dessus en combat singulier, il fallait donc qu'elle utilise le terrain à son avantage. Il fallait compliquer la situation. Elle ne se laisserait pas abattre aussi facilement, mais surtout elle protègerait son elfe coûte que coûte. Ash se campa, les pieds enfoncés dans la terre, et se prépara à un nouvel assaut.

L'humaine semblait savoir manier son sabre mais pas suffisamment pour mettre la drow en difficulté. Puis elle se mit à faire des moulinets avec sa lame, forçant la sombre à rompre le combat. Tanieth se replia aussi et la rejoignit en grognant. Tous les deux observait leur proie d'un air amusé, attendant patiemment que son bras n'ait plus la force de continuer à faire valser l'arme de la sorte. Elle les contourna par la gauche, se rapprochant du feu et de l'elfe par la même occasion. Hyène s'interposa et bloqua le cimeterre entre les griffes de son arme de pugilat.

- Ne crois pas pouvoir nous avoir de la sorte, cracha-t-elle agacée.

Elle posa son autre main sur la tête du tigre et d'un ample mouvement désigna l'elfe en murmurant quelque chose en drow. La bête se dirigea vers le sylvain, posa ses deux pattes sur son dos appuyant sur les blessures. Il regriffa par dessus pour retirer le sang coagulé et laisser la liberté au frais de s'écouler.
La sombre l'observait faire avec joie, son apprentissage avait été long pour qu'il en arrive à ça. Puis avec un ricanement cruel, elle déclara impitoyable :

- Regarde ton cher ami se vider de son sang. Il doit terriblement souffrir. Mais rassure toi son agonie touche bientôt à sa fin.

Mais son moment d'inatention avait permit à l'autre de se dégager.

- Pourquoi? Pourquoi fais-tu cela?

Hyène sourit. Un sourire bienveillant qui aurait rassurer n'importe qui sur sa nature si cette personne n'avait jamais vu de drow ni entendu parler d'eux. Leur réputation était en effet loin d'être positive. Race sanguinaire, cruelle et sauvage disait-on. Cela aurait pu être faux si les elfes noirs n'avaient décidés de jouer le jeu et de s'identifier à cette description.

Un sifflement dans son dos la fit se retourner. Un couteau tranchait les airs mais ne la menaçait ni elle ni sa bête. La guerrière fut secouée d'un rire amusée et dédaigneux face à l'action désespérée de l'elfe. Maisl'humaine la rappela à l'ordre en plongeant sa lame dans les flammes afin de projeter des braises incandescentes sur le museau de Tanieth qui couina surpris et momentanément aveuglé par les cendres éteintes. La distance qui la séparait de la bretteuse était trop grande pour qu'il perde la vue pour toujours.

<< Qui est-le plus cruel là ? >> songea Hyène avec mépris.

Tout cela n'avait duré que quelques secondes, le couteau n'avait toujours pas achevé sa course et un sabre meurtrier amorçait sa descente vers le félin qui incapable de voir où il allait s'était mit à portée de l'humaine. La sombre se jeta en avant, étendit le bras et dévia l'assaut de ses griffes, la lame ne laissa qu'une légère estafilade sur l'animal qui fila dans les bois sur ordre de Hyène. Gênée par le canif qui s'était fiché dans son poignet quand elle s'était élancée pour sauver Tanieth, elle ne se faisait plus d'illusion quand à sa victoire sur son adversaire. Mais elle devait au moins abattre le sylvain. Elle rompit le combat d'un bond en arrière, vrilla ses yeux vérons emplit de toute la haine du monde dans ceux de l'humaine avant d'arracher l'arme de son bras et la jeter au loin.
Elle le replia contre son ventre, laissant le sang marquer sa tunique bleue marine d'une tache plus foncée et fonça vers le guérisseur à une vitesse sidérante. Sa soif de sang dictant ses actes et étouffant son instinct de survie.

Mais dans l'ombre une paire d'yeux félins épiaient la scène. Lorsque la voie fut libre, Tanieth se glissa en silence vers le brasier et enflamma le bâton qu'il tenait dans la gueule. Alors que Hyène passait par la gauche, lui s'élança par la droite, calquant sa vitesse sur celle de la drow de façon à ce que l'humaine ne puisse en arrêter qu'un. Le vent dans son dos lui ébourriffa le pelage et emporta quelques étincelles vers le corps inerte du sylvain. Elles crépitèrent sur l'herbe à quelques centimètres de son visage tel la lumière qui l'attendait au bout du tunnel.

Spoiler:

Malgré lui, Iözynn sombra dans un sommeil comateux. Des images se mirent à défiler dans sa tête.

C’était un soir d’été. Une brise tiède s’était levée, à la grande satisfaction d’un petit village elfique dont les habitants avaient trouvé la journée désagréablement chaude. Une jeune fille sortait de chez elle pour se promener quelque temps dans la forêt alentour. Pieds nus, elle trottait en direction du sentier qui plongeait dans le boisé.

La scène d’après, elle avait déjà pénétré dans la forêt. Elle s’était quelque peu écartée du chemin pour visiter une clairière où elle était déjà venue auparavant. Mais, maintenant qu’elle voulait retourner chez elle, elle se rendait compte qu’elle s’était perdue. Autour d’elle, l’obscurité de plus en plus opaque se fait menaçante. La fillette crut discerner des silhouettes dans la pénombre. Elle connaissait la cruauté dont pouvaient faire preuve les drows, et elle craignait que les ombres qu’elle avaient aperçues étaient des elfes noirs. Apeuré, elle s’était mise à courir dans une direction au hasard. Elle ne savait pas où elle se rendait. Des branches lui fouettaient le visage, et quelquefois elle se heurtait aux troncs massifs des arbres. Ses yeux étaient embués de larmes, et sa vue était maintenant floue. À un moment donné, elle s’enfargea dans les racines noueuses d’un arbre, pour venir s’affaler à plat ventre au sol. Elle perdit conscience.

Pendant ce temps, Iözynn, qui aimait bien respirer de l’air pur même en cette heure tardive, cueillait des plantes médicinales un peu plus loin. Il avait découvert le corps inerte de la jeune fille par pure coïncidence. S’il ne l’avait pas découverte plus tôt, elle aurait probablement connu la mort, dévorée vivante par les animaux sauvages de la forêt. Le guérisseur avait guéri la fillette, puis, sachant la présence d’une cité de ceux de son espèce à proximité, avait réussi à la ramener à son foyer. Ses parents, inquiets, avaient été fortement soulagés, et avaient chaudement remercié le thaumaturge. S’il n’avait pas trouvé la jeune fille étendue au sol, elle n’aurait pas connu le même salut.

Depuis ce jour, il avait compris qu’il ne faisait pas son métier en vain, et qu’il ne changerait de vocation pour rien au monde. Il devait rester en vie pour continuer à pratiquer sa profession.

Il voulut ouvrir les yeux, mais sa douleur était encore trop vive pour qu’il ne la supportât, et il replongea dans ses souvenirs.

La scène à laquelle il assista par la suite fut le trépas de son maître. Nagayth, mourrant, était couché au sol de la petite cabane qu’il partageait avec Iözynn.. Sa respiration était haletante. À son chevet, son apprenti, impuissant, faisait tout ce qu’il pouvait pour tenter de le garder en vie. Ses efforts se révélèrent vaines. La dernière phrase que son maître dit fut la suivante :

- Il y a une chose que tu ne dois pas oublier, Iözynn. C’est ta mission. La raison pour laquelle je t'ai formé.

Il avait à peine prononcé ce dernier mot que ses yeux devinrent vitreux, et son regard immobile.

C’est la souffrance qu’éprouvait le guérisseur, moins vive qu’auparavant mais tout de même violente, qui le réveilla de nouveau. Il gémit.

Il ne put savoir si la situation avait changé autour de lui. L’elfe noire qui les avait attaqué était-elle partie? Il n’en avait aucune idée. Mais il ne voulait savoir qu’une chose : si sa compagne et nouvelle apprentie était encore en vie.

Ses lèvres bougèrent.

- Ash…, murmura-t-il.

Si elle était encore vivante – il le souhaitait très fort, car il ne voulait pas être responsable d’un décès, sinon il regretterait toute sa vie de n’avoir rien put faire -, il pourrait peut-être lui fournir les indications pour qu’elle puisse le tirer d’une mort éventuelle – puisque ses blessures ne tarderaient pas à s’infecter, si l’on ne faisait rien.