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 [Terminé] Réformer la Lance: souvenir de bataille [Aranos]

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Timérion Adantar
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MessageSujet: [Terminé] Réformer la Lance: souvenir de bataille [Aranos]   [Terminé] Réformer la Lance: souvenir de bataille [Aranos] I_icon_minitimeLun 11 Mar 2013 - 21:39


Il venait d'achever sa longue chevauchée. Finalement, il avait pu se recueillir quelques instant en Holimion sur la tombe de son épouse. Il n'aurait pas été jusqu'à dire que cela lui avait fait du bien, mais il se sentait plus serein désormais. La pensée de la mort s'était fait plus ténue dans son coeur et il ne pensait plus sans cesse à son visage et au son de sa voix... Du moins, il n'y pensait plus avant aujourd'hui.

Devant les grandes étendues calme et scintillante du lac Uraal qui ondulaient paresseusement sous le soleil de l'été, il chevauchait en silence, le regard tourné vers un terrible passé. Il ne se souvenait que trop bien de ce chemin, celui-là même qu'ils avaient emprunté quelques siècles auparavant. Les armures étincelante de l'armée royale défilant en ordre impeccable dans la brume matinal. Les bannières claquant dans la légère brise qui chassait progressivement le brouillard. Et le feu... la lueur rougeoyante d'un autre brasier qui menaçait la forêt au sud.

La fumée âcre, les cris, le métal contre le métal... Et la magie, la terrible magie, véritable débauche d'énergie. A l'approche d'une simple cabane le long de la rive, le Seigneur Protecteur se secoua enfin, s'arrachant à ces souvenirs atroces. Comme on l'avait renseigné au temple de Calimenthar d'Aléandir puis dans les casernes d'Ardamir, ici se tenait le demeure secondaire d'un des officiers que Timérion tenait en plus haute estime... et qui avait survécu jusque là.

Il n'avait pas nécessairement été un des plus grands héros de l'Anaeh. Peut-être n'était-il pas non plus le meilleur dans son domaine. Mais Timérion l'avait vu au combat, ils avaient combattu ensemble. Dans le désespoir et la douleur, face à la marée noire. La magie et la lance déchaînées. Cela faisait longtemps qu'il n'avait plus revu ce compagnon d'infortune... Il refusa de se rappeler depuis quand, sachant pertinemment bien quels souvenirs allaient à nouveau jaillir de cette réminiscence.

Sans un mot, il descendit de son Meheras blanc aussi souplement que possible, ayant au préalable défait les entrelacs de lierre qui immobilisait sa jambe. C'était encore un mauvais jour. Elle commençait déjà à le lancer alors qu'il n'était même pas encore midi. Fort heureusement, il ne devrait pas trop lui en demander ce jour. Du moins, il l'espérait.

"Capitaine Helmëlion! Il est à votre porte quelqu'un qui souhaite s'entretenir avec vous."


Dernière édition par Timérion Adantar le Ven 5 Avr 2013 - 13:27, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: [Terminé] Réformer la Lance: souvenir de bataille [Aranos]   [Terminé] Réformer la Lance: souvenir de bataille [Aranos] I_icon_minitimeMar 12 Mar 2013 - 1:18

      Sur les rives à jamais souillées du Lac d’Uraal, Aranos laissait son regard plonger sous les flots : c’était encore eux qui avaient reçu le plus vaste lot des trépassés, lorsque les Drows avaient transgressé la lisière d’Anaëh jusqu’à venir combattre sur ces rives blanches. Sous les eaux d’argent, récemment encore noircies par le poison, reposeraient toujours les cadavres broyés des Elfes des deux natures. Un fumet de dévastation s’attardait encore sur les berges boueuses d’Uraal, et mordait le nez d’Aranos.

      Le Prêtre n’avait rien oublié de ce jour terrible, ni l’odeur du sang éclaboussé sur sa cuirasse des
I ehtyari, ni le visage de tous ceux qui étaient tombés. C’était ici même, à quelques pas des bottes de l’Elfe, que Caranthir s’était effondré, finalement défait, lui qu’on disait avoir conquis toutes les arcanes du savoir ; les Drows avaient abattu alors le meilleur rempart de chair qui prémunissait Anaëh contre les maux de l’Est.

      La vision d’Aranos s’allongea sur la droite, balayant les quelques herbes folles qui bientôt rougiraient sous le soleil de l’Automne : c’était là aussi que, pour la première fois, Calimenthar avait murmuré à son oreille des paroles emplies de fureur. Celui qui n’était alors pas même Lieutenant des Lanciers, se ressouvint brusquement de la première pique projetée avec jouissance au travers des côtes craquantes d’un Sombre ; le bon sang noir avait coulé avec délice du fer à la hampe, un flot à la saveur suave pour le guerrier.

      « Calimenthar ... souffla Aranos dans l’air frais au-dessus du Lac. »

      A peine le nom du dieu Soldat était-il lancé, que les mémoires de colère revinrent prendre d’assaut l’esprit de l’Elfe. La colère planait encore sur ces rives autrefois douces, et des sentiments violents vinrent semer la confusion dans l’esprit du Prêtre : il avait brisé des Lances dans l’estomac de tant de Drows, cette journée-là, que le sang des Sombres maculait encore ses joues lorsqu’il avait reçu ses galons de la victoire ; et ç’aurait pu être folie de prolonger la bataille de quelques heures seulement. Mais privé des frappes furieuses inspirées par le dieu, jamais Aranos n’aurait survécu au massacre qu’avait été Uraal, et sa carcasse aujourd’hui verdirait dans les profondeurs du Lac.
      Le chemin vers Calimenthar était long encore, devant le Prêtre, et courait loin.

      Une démarche bancale claudiquait sur les berges, dans son dos, et Aranos fit volte-face ; vers lui marchait celui qui désormais était Seigneur Protecteur de l’Epine Dorée, loin dans le Nord et l’Ouest, là où l’Anaëh n’était pas en guerre ; des terres bénies, que jamais le Capitaine n’avait vues de ses yeux, lui qui n’avait toujours veillé sur le Trésor de Kyriä que depuis les hauteurs du Fort.

      « Timérion Adantar, s’inclina le Capitaine des Lanciers devant le Seigneur Protecteur, comme le commandaient les usages, Êl síla erin lû e-govaned vîn. »

      Même sur les immortels, le temps prenait son tribut, et la fougue avait quitté ceux qui avaient combattu le cœur plein de rage, à trois siècles depuis ce jour. A retrouver la jambe raide et l’œil manquant, Aranos revit la silhouette folle d’un mage enflammé, les mains gorgées d’étincelles, et le corps rougi par le sang de son maître éventré. Sur l’Uraal planaient encore ces sombres mémoires.

      Le temps n’a en revanche aucune prise sur les sentiments des Elfes, et Aranos put dignement saluer son ancien compagnon de guerre, comme s’ils n’avaient rengainé leur colère que le jour d’avant.

      « Seigneur Adantar, reprit doucement le Capitaine, le sort de Dame Nimuë m’est connu. L’
I liyúmë i eldaiva ne lavera jamais sa souillure, de n’avoir pas su tenir la Forêt contre les Sombres. »
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MessageSujet: Re: [Terminé] Réformer la Lance: souvenir de bataille [Aranos]   [Terminé] Réformer la Lance: souvenir de bataille [Aranos] I_icon_minitimeMar 12 Mar 2013 - 9:50


« Timérion Adantar, s’inclina le Capitaine des Lanciers devant le Seigneur Protecteur, comme le commandaient les usages, Êl síla erin lû e-govaned vîn. »

Timérion inclina légèrement et respectueusement la tête en réponse au salut du capitaine. Il n'y avait pas vraiment besoin de plus. Il avait identifié dès qu'il avait aperçu le militaire, l'endroit où il se tenait. Comment aurait-il pu l'oublier? De vagues et fugaces images d'un passé si lointain et pourtant trop proche. Le sang mêlé dans la plaine et dans l'eau. Les corps mutilés flottant à la surface du lac. Et surtout, Caranthir...

« Seigneur Adantar, le sort de Dame Nimuë m’est connu. L’ I liyúmë i eldaiva ne lavera jamais sa souillure, de n’avoir pas su tenir la Forêt contre les Sombres. »

Alors qu'il avait eu tant de mal à juguler le flot de souvenirs qui déferlait dans son esprit, cette nouvelle phrase en appela d'autres, plus terrible encore. Et le souvenir appelai le souvenir, créant une chaîne de réactions explosive. Mais le Seigneur Protecteur ne se laissa pas aller jusque là, jusqu'à sombrer dans la tourmante. Il avait fini par prendre l'habitude de ces cauchemars éveillés et surtout avait appris à les refouler. Lentement, il s'immergea dans la Symphonie paisible des bord du lac. Le seul souvenir qui lui revint fut celui de la haine qu'avait un jour véhiculé ce chant. Il put enfin répondre à son interlocuteur.

"Vous n'avez rien à vous reprocher, Aranos. Nous n'aurions jamais pu prévoir cette manoeuvre. Faelia était réputé impénétrable et mortel, nul n'aurait parié sur cette folie. Et une fois les sombres repérés, il était déjà trop tard. Nous avons fait ce que nous pouvions ici même... Et d'après d'autres nous aurions fait des prouesses, même si je doute qu'aucun de nos compagnons d'arme puisse qualifier cela de la sorte..."

Il aurait voulu se faire rassurant, chaleureux où même seulement aimable mais c'était apparemment au delà de ses capacités désormais. Il observa distraitement un martin-pêcheur voler entre les roseaux, à la recherche d'un petit poisson sans doute. Laissant le silence et le vent emporter ses paroles comme ils avaient emporté les cris et le son des cors et des tambours le jour de la bataille. Tout semblait si paisible.

Finalement, Timérion se décida à rompre de nouveau le silence pour poser une question sans autre forme de transition. Une énigme qu'il n'avait jamais pu résoudre concernant le Capitaine d'infanterie de l'armée royale, et ce quelque soit la manière dont il la tournait dans son esprit.

"Aranos... Pourquoi Calimenthar?"
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MessageSujet: Re: [Terminé] Réformer la Lance: souvenir de bataille [Aranos]   [Terminé] Réformer la Lance: souvenir de bataille [Aranos] I_icon_minitimeJeu 14 Mar 2013 - 1:28

      « Des prouesses, Seigneur Adantar ? sourit doucement Aranos. Je doute que la bataille qui a rougi ici jusqu’aux racines des arbres, et vu tomber ou périr les plus excellents des Elfes, soit jamais louée dans les légendes. Nous avons combattu nos frères de jadis, pied à pied et pouce à pouce, dans une lutte si terrible que l’Anaëh en béera à jamais par toutes ses plaies ouvertes. »

      Le regard d’Aranos tomba sur le visage estropié de Timérion, et sa jambe empêchée : il était lui-même, le Seigneur Protecteur de Malereg et de ses bois, une image de la Forêt après la guerre. Même sa longue retraite parmi les arbres, à écouter ce que certains appelaient encore la Symphonie, n’avait rien effacé : ni son œil manquant, ni son pas claudiquant. La guerre s’arrogeait un tribut qui ne s’estompait pas avec les âges, pas même pour le Beau Peuple qui passait au travers des cycles.

      Lorsque Timérion reprit la parole, et que le nom de Calimenthar jaillit hors de sa bouche, Aranos se sentit blessé jusque dans son orgueil. Les Enfants de Kyriä peinaient encore à voir le Capitaine des Lanciers bénir sa pique au nom du Père des Batailles, et se jeter dans la tempête avec l’appui des effigies de la Guerre ; Aranos aurait attendu d’un aussi vieux compagnon que Timérion, et aussi sage disait-on, qu’il ne blâme pas lui aussi le Prêtre, pour toutes les guerres passées et celles qui ne manqueraient pas de venir encore.

      « Il arrive un jour où les crocs des loups, les serres des corbeaux, et jusqu’à la colère d’un ours, ne suffisent plus à passer les cuirasses de métal, Adantar, se contenta de répondre Aranos, un jour où la Forêt ne peut plus résister aux assauts parce que ses ombres n’effraient plus. La guerre est une voie contraignante pour qui ose la suivre, mais le dieu Soldat est franc et fidèle. »

      L’Elfe pouvait sentir, près de sa gorge, dans son cou, battre le collier orné du signe de Calimenthar. Il serait toujours étrange de voir s’éveiller la colère du Père des Batailles, alors qu’alentour s’étendait la Forêt, le giron de la Mère ; pourtant, ce n’était que depuis les murailles de pierre d’Ellyrion, et porté par l’ardeur du dieu Soldat, qu’Aranos avait su que l’Anaëh pourrait dormir en paix une nuit encore.

      « Regarde autour de toi, Adantar, s’écria soudain l’Elfe avec colère ; la Forêt n’a pas su garder sa lisière, et les Sombres ont pu pénétrer la barrière des arbres jusqu’à cette rive d’Uraal. Si les Elfes avaient connu la parole de Calimenthar, et lui avaient érigé des colonnes de pierre, jamais une telle bataille n’aurait saisi la Forêt par le cœur. »

      La fureur des guerriers hantait encore la berge désolée du Lac, et elle inspirait à Aranos des propos terribles.

      « Calimenthar nous aurait donné la force de préserver Anaëh et défendre la Mère, Timérion, là où la Forêt a failli ; et Dame Nimuë vivrait encore. »

      L’aurait-il vraiment fait, le dieu Soldat ? Son Prêtre lui-même ne pouvait le savoir, encore moins le prophétiser. Mais à contempler la rive à jamais embourbée dans la mort et le sang, Aranos savait que la Forêt seule, elle, avait échoué ici même, il y avait trois siècles maintenant.
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MessageSujet: Re: [Terminé] Réformer la Lance: souvenir de bataille [Aranos]   [Terminé] Réformer la Lance: souvenir de bataille [Aranos] I_icon_minitimeJeu 14 Mar 2013 - 10:02



« Il arrive un jour où les crocs des loups, les serres des corbeaux, et jusqu’à la colère d’un ours, ne suffisent plus à passer les cuirasses de métal, Adantar, se contenta de répondre Aranos, un jour où la Forêt ne peut plus résister aux assauts parce que ses ombres n’effraient plus. La guerre est une voie contraignante pour qui ose la suivre, mais le dieu Soldat est franc et fidèle. »

Timérion opina lentement de la tête. Aussi étrange que cela puisse paraître, il comprenait bien ce que voulait dire le lancier. Il se retrouvait un peu dans cette définition. Alors que lui avait trouvé son réconfort en Tyra qu'il priait chaque soir, le prêtre avait tourné sa foi vers Calimenthar. C'était une juste évolution, dictée par la nécessité de ces deux êtres et par leur vécu. Là où Timérion était empli par le chagrin et la mort, Aranos avait subi le colère et la frustration de l'impuissance.

Ayant repéré le léger changement dans les traits de son interlocuteur, le Seigneur Protecteur ne s'étonna pas le moins du monde qu'il explose. Aranos n'était pas connu pour sa patience. Et à ses yeux, il appréciait beaucoup sa franchise. Elle était rassurante et apaisante pour celui qui avait passé sa vie à devoir parler une langue de bois face à des oreilles de pierre.*

« Regarde autour de toi, Adantar, s’écria soudain l’Elfe avec colère ; la Forêt n’a pas su garder sa lisière, et les Sombres ont pu pénétrer la barrière des arbres jusqu’à cette rive d’Uraal. Si les Elfes avaient connu la parole de Calimenthar, et lui avaient érigé des colonnes de pierre, jamais une telle bataille n’aurait saisi la Forêt par le cœur. Calimenthar nous aurait donné la force de préserver Anaëh et défendre la Mère, Timérion, là où la Forêt a failli ; et Dame Nimuë vivrait encore. »

Il avait beau s'être attendu à des paroles inconsidérées, la dernière phrase venait pourtant de lui écorcher l'esprit. Il n'aimait pas entendre le nom de son épouse prononcé dans de telle tirade, emplie de haine. Et cela le peinait énormément de penser à ce qui aurait pu arriver si... Mais les "si" étaient aussi nombreux qu'inintéressant. Ce qui était, était. Nimuë reposait au fond du lac Tindanen et un jour il irait la rejoindre. Et c'est sur un ton aussi froid que les eaux montagneuse qui se déversaient dans le lac que le vieil Elfe répondit à son compagnon.

"Tu sais bien que le temps ne se remonte pas, Aranos... Il se subit. Je sais bien que mon épouse pourrait encore être en vie si nous avions été plus fort ou plus prévoyant, si nous avions eu plus de soutient des dieux, si elle était demeurée à Malereg au lieu de m'accompagner, ou si j'avais écouté ses présentiments. Mais toutes ces suppositions sont vaines et ne la ramèneront pas.

Quant à Calimenthar, ce n'était pas un reproche. C'était une simple interrogation. Je sais bien que tu as l'habitude de te voir dédaigné pour ton choix. Mais pour ma part, je n'y ai jamais vu quoique ce soit de méprisable. Chacun choisit sa voie autant que faire se peut."


Un courant d'air tiède vint ponctuer sa tirade, faisant bruisser les roseaux et les feuilles des arbres alentours. Une après-midi si paisible. Il était bien triste de parler de guerre dans un lieu où tout respirait la paix. Cependant, c'était bien la guerre qui se profilait. Une guerre encore et toujours. Comme si le destin du "beau" peuple était de s’entre-tuer constamment avec leurs cousins ou un quelconque voisin.

"Cependant, je pense que tu as raison. Nous n'avons pas mis assez de foi dans nos combats et dans l'art de la guerre. Les temps ont changé, et nous avons conservé nos habitudes. Et voilà le résultat, Wyslena et Eraison en feu, les clans et les golems obligés de se lever pour répondre aux failles de l'armée royale, ce n'est pas tolérable.

Nous sommes toujours restés sur des tactiques et stratégie de défenses et nous y excellons, c'est vrai. Mais l'ennemi connait tout notre registre, si bien que désormais il nous force à l'attaque. Ces machines de guerre nous empêchent de tenir nos positions et nous contraignent à l'assaut. Et nous ne sommes pas fait pour l'offensive. Ou plutôt nous ne sommes pas préparés pour cela.

Les charges désespérées sont ridicules et inefficaces. Elles nous mènent à des massacres inutiles. Mais je suppose que tu sais tout cela. Et j'espère que tu as déjà réfléchi à ce problème. C'est en effet aussi bien en ami qu'en Protecteur de la Prime Forêt que je viens à toi aujourd'hui. Il nous faut réformer la lance."

HRP:
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MessageSujet: Re: [Terminé] Réformer la Lance: souvenir de bataille [Aranos]   [Terminé] Réformer la Lance: souvenir de bataille [Aranos] I_icon_minitimeVen 15 Mar 2013 - 5:54

HRP:

      « Pardonne-mon emportement, Seigneur Adantar, souffla un Aranos maussade en se détournant de l’Elfe ; son regard, toujours, retombait dans les profondeurs de l’eau par-là la bordure de la rive. Tu sais comme moi combien il est dur de demeurer sur la berge, et regarder mourir ceux que l’on appelle immortels. »

      Après sept siècles passés à veiller la Forêt, le Capitaine avait compris qu’il était né combattant parmi un peuple qui méprisait la guerre, et n’y poussait ses armées qu’à reculons ; et si ce que d’autres appelaient la Symphonie n’était pas même un souvenir pour lui, qui jamais n’avait entendu l’appel du bois, Aranos sentait dans une lisière couverte de rouge que certains malheurs ne devraient jamais déferler. Adorer Calimenthar en Anaëh n’était rien moins qu’une malédiction : depuis longtemps désormais, le Capitaine des
I ehtyari soupesait un arbre non plus à sa splendeur, mais à la dureté de son écorce. Ses yeux ne regardaient plus les bosquets que pour deviner combien de cavaliers pourraient s’y dissimuler, et les racines valaient au nombre de Sombres qu’elles sauraient faire trébucher entre leurs nœuds — puisqu’aucun parmi les Elfes ne semblait accepter cette besogne, il fallait bien qu’un, au moins, s’en acquitte.

      Dans son dos, Timérion avait repris la parole et comptait les tristes heures de l’armée des Elfes, acculée à la charge par des bêtes de bois et de métal, arrachées aux fosses du Volcan. Le Beau Peuple n’y avait répondu que par des assauts déjà passé dans la légende, selon les mêmes mouvements qui avaient permis à Lyra’Suan de voir Tinùviel défaite, dès l’aube des premiers cycles ; un ménestrel de la Péninsule aurait prophétisé le plan de bataille des Elfes, et au pas près, avant même que leur ombre ne se profile sur la plaine.

      « Wyslena et Eraïson en feu, Seigneur Adantar, grimaça Aranos en songeant à l’Ellyrion perdu ... au moins les Sombres ont-ils compris, eux, comment tourner une forêt vers la guerre. »

      Les mémoires de ses visites au Temple de Calimenthar à Alëandir revinrent soudain à l’esprit du Capitaine ; là-bas, dans les arcanes du sanctuaire du Soldat, il avait appris comment plier le feu à son contrôle. C’était un terrible pouvoir, pour qui devait veiller sur la lisière d’une Forêt.

      « Oui, Timérion, j’ai déjà pensé à réformer la lance, reprit l’Elfe, et plus d’une fois. Je sais que l’on murmure derrière mon dos, comme on murmurait déjà sur les tours du Fort, que je préférerais voir l’Anaëh brûler ou se changer en pierre ; mais Calimenthar n’enseigne pas de saccager l’Œuvre, jamais. Nous livrons bataille dans la Forêt comme les Nains combattent sur leurs sommets ; et Alonna a montré la folie d’une
I liyúmë i eldaiva chargeant à nu sur des plaines privées d’arbres.

      L’Œuvre est forte encore, on dit qu’elle combat avec ses Fils et ses Filles ; mais je ne crois pas qu’un vol d’éperviers puisse faire céder les Sombres jaillis du Volcan. Si l’Anaëh doit livrer bataille, c’est par des troncs affutés pour faire chuter des herses, des branches taillées en épieux pour être les dents du sol ; et des ingénieries de bataille pour égaler les créatures conçues à l'Est. La Forêt est une arme qu’il nous reste à forger, Adantar, vieux compagnon. »
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MessageSujet: Re: [Terminé] Réformer la Lance: souvenir de bataille [Aranos]   [Terminé] Réformer la Lance: souvenir de bataille [Aranos] I_icon_minitimeVen 15 Mar 2013 - 22:09



Les paroles du lancier ne purent que rappeler à Timérion son propre pouvoir, la preuve que, même des pires maux, découlait parfois un bien. Entre ses mains, un arbuste pouvait se transformer en un bouclier aussi qu'en une arme. Et il avait bien d'autres tours dans sa manche pour utiliser son don que ce soit dans l'offensive ou la défense. Les végétaux à croissance rapide proches de la composition des arbres étaient de loin son outil favori pour leur rapidité de déploiement et leur économie en énergie. Et au vu des entrelacs de lierre sur les troncs, les rives du lac Uraal s'en souvenait encore. Ce jour là, les sombres avaient vu leurs corps transpercés par ce végétal et avait appris à craindre ce pouvoir qu'ils ne comprenaient pas. Comment une race hérétique utilisant la magie dans le but de détruire pourrait-elle comprendre la manière dont lui façonnait l'Oeuvre de la Mère?

Cependant, le Seigneur Protecteur n'était pas tout à fait d'accord avec Aranos. Pour lui, les Elfes ne devaient pas se servir de leur demeure pour se défendre. A quoi bon protéger la Prime Forêt si c'était pour la détruire en le faisant? Cela dit, il énonçait une réalité qui ne pouvait être éludée: l'ingénierie. Cette science tant prisé des Nains qui leur avait permis de développer des machines capable de mettre à mal les rang d'une armée tout en se tenant hors de portée des traits.

Cela avait paru être une abomination pour les Sylvains et les voûtes et les troncs serrés leur avaient donné l'illusion d'être à l'abri. Mais cette technique c'était répendue. Et si la voir en Péninsule n'était pas des plus inquiétant, le fait qu'elle ait atteint le Puy était autrement considérable. Et le pire de tout était advenu lorsque ces machines avaient crachés le feu. Désormais, elles étaient devenues un avantage majeure des guerres et leur absence handicapait profondément les Elfes. Bien que sa proximité avec la forêt ne puisse que le faire frémir à l'idée de voir de telles réalisations, il ne pouvait nier leur nécessité...

"Je ne pense pas que la forêt soit prête pour de tels extrêmes, Aranos. Je ne retire rien à la vérité de tes propos, tout comme toi j'ai remarqué que l'absence des moyens modernes de la guerre était un handicape de taille pour nos armées. Mais, je doute que le mimétisme soit chose possible. Aucun des nôtre n'appréciera cela. Pire! Certains pourraient vouloir supprimer ceux qui en font la réalisation. Nous sommes tous deux conscient des sacrifices nécessaires et d'une certaine parcimonie dans nos agissements. Ni trop, ni trop peu.

Mais nombre de nos frères ne connaissent pas la guerre et ses réalités. Ils ne comprendraient pas notre geste. Même si nous savons que nous ne réalisons qu'un sacrifice minimum et nécessaire pour éviter un plus grand mal, eux ne verraient là qu'une hérésie, une trahison de la Mère et une destruction de l'Oeuvre. Et attisée par leur foi et conforter par le sentiment, légitime somme toute, d'être dans leur bon droit, ils en arriveraient vite aux pires extrémités. Résultat, nous partirions d'un projet constructif qui nous paraîtrait bon et nous arriverions à une catastrophe. Au lieu de repousser l'ennemi extérieur nous nous créerions un ennemi intérieur.

Non, Aranos, ce n'est pas une solution. Nous devons trouver un équivalent à cela mais il devra nous être propre et respecter au maximum la Mère et, dans la mesure du possible, les cinq au complet. Je viens plutôt te voir pour la première étape de cette évolution. Comme tu l'as dis toi même, lorsque notre peuple s'élance, il suffit d'un chant et nos ennemis savent à quoi s'attendre. Je pense que nous devons d'abord les surprendre dans ce domaine. Nos tactiques sont bonnes et efficaces, je ne dis pas le contraire, mais elles sont tellement connues qu'elles en deviennent faciles à contrer. Et d'autant plus pour nos abjectes cousins...

Je sais que j'aurais pu aller en voir d'autres, des généraux plus réputés ou des érudits dont certains sont même mes aînés. Mais je pense que tu es le mieux placé pour m'aider dans cette entreprise. Tu as gagné ta connaissance aussi bien dans les livres que sur le terrain. Ta vocation au dieu des batailles ne te rend que plus digne de cette tâche. Et puis, j'ai combattu à tes cotés, j'ai confiance en toi... Et je ne peux pas en dire autant de tous nos frères..."


Il était rare que Timérion fasse ainsi part de ses doutes. Mais devant un allié et quelqu'un qu'il pouvait considérer comme un ami, ici, sur la rive paisible du lac, loin de toute oreille indiscrète, le Seigneur Adantar se permit de mettre sa prudence un peu de coté. Il avait dit qu'il lui faisait confiance, et c'était la vérité. Aussi il s'était finalement décidé, sans vraiment y avoir pensé à confier à moitié ses soupçons sur la loyauté au sein de la Prime Forêt.

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MessageSujet: Re: [Terminé] Réformer la Lance: souvenir de bataille [Aranos]   [Terminé] Réformer la Lance: souvenir de bataille [Aranos] I_icon_minitimeDim 17 Mar 2013 - 6:52

      Ce laïus d’Adantar s’était révélé long, et Aranos l’avait souffert, sans mot dire, le dos résolument tourné vers le mage, et le regard noyé sous les flots impénétrables. Ce que Timérion disait là, le Capitaine l’avait entendu à l'aube de chaque nouveau siècle que Kyriä leur accordait : les Elfes n’étaient pas un peuple guerrier ; quiconque dresserait la Forêt à mener l’assaut, serait banni et chassé loin des frondaisons d’Anaëh. Servir dans l’armée du Sud était un fardeau, peut-être digne, mais pas un honneur ; le combat était une vicissitude, c’était le tribut que les Elfes devaient acquitter pour vivre sur des terres peuplées de mortels farouches.

      « Que l’on amène les clans nomades, et tous ceux de la Forêt, maugréa la voix d’Aranos sous son front prématurément ridé, et qu’ils voient Ardamir en flammes ; qu’on les mène au sommet des tours d’Ellyrion, et qu’ils contemplent les étendues dévastées des Sombres, et la pierre de Yutar qui défie le ciel, et le bruit des marteaux lorsque nos ennemis pénètrent plus avant dans la terre à chaque heure, Calimenthar sait vers où... Alors peut-être, les Elfes honoreront ceux qui combattent aux portes d’Anaëh. Cela vaut bien toutes les tactiques de guerre. »

      Le Prêtre s’était retourné, et ses yeux passaient sur le décor encore meurtri qui servait d’écrin à leur rencontre ; même en Eté, les berges d’Uraal conservaient la même froideur depuis trois fois cent ans.

      « Regarde alentour, Adantar, reprit tristement Aranos, et souviens-toi des atrocités que nous avons vues ici accomplies. Nous savons ce qu’est la guerre, le Père des Batailles nous a honorés de ce terrible présent ; lorsque tu entends le battement de tambour des Sombres, loin à l’Est, ton cœur se serre comme le mien, et tu vois déjà la Forêt se muer en un vaste Uraal à perte de vue. Mais combien sommes-nous à avoir connu le feu et la mort, Adantar ? Reclus à Tethien ou Holimion, sans jamais avoir quitté la Forêt et vu une plaine, voilà que des frères viennent nous dire de ne pas froisser les feuilles d’Anaëh. Qui ne connaît pas la guerre, ne devrait pas me dire comment défendre mon peuple. »

      Quelle importance alors de parler techniques, ruses ou balistes ? Certains Elfes avaient oublié jusqu’au son du fracas des armes, et ceux qui le connaissaient encore, priaient la Mère que ses racines arrêtent les Osts et les cohortes. Quant aux derniers des combattants, ils se souvenaient comment le Beau Peuple avait toujours remporté ses combats, et ils avaient élevé jusqu’à un art la mimique des armées des cycles passés.

      « Les Nains ont peut-être raison de nous mépriser sur le champ de bataille, Adantar. Un peuple qui plaint ses soldats, ne doit pas se lamenter d’être défait dans la bataille. »

      Une grande tristesse passait à présent dans le regard d’Aranos. Si eux ne parvenaient pas à éveiller leur peuple au combat, alors Calimenthar le ferait ; comme jadis sa rage avait chaviré l’esprit du Capitaine sur les berges d’Uraal, le Père des Batailles viendrait asséner l’effroyable vérité en moissonnant largement jusqu’aux enfants des Elfes. Combien d’autres Nimuë devraient encore périr, pour que le Beau Peuple choisisse de mener ses guerres et non les endurer ?

      « Je ne suis pas de bonne compagnie aujourd’hui, seigneur Adantar, concéda Aranos d’un ton mi-amusé, mi-peiné. Tu dois avoir de bien nombreux ennemis parmi nos frères, Protecteur, pour m’avoir préféré, moi, le plus sombre, à tous les autres combattants de l’Anaëh. Qui crains-tu donc dans la Forêt ? »
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MessageSujet: Re: [Terminé] Réformer la Lance: souvenir de bataille [Aranos]   [Terminé] Réformer la Lance: souvenir de bataille [Aranos] I_icon_minitimeDim 17 Mar 2013 - 14:11



Timérion savait reconnaître quand une cause était perdue. Ce n'était pas aujourd'hui qu'il ferait comprendre au Capitaine les disparités de l'Anaeh profonde. Il se souvint cependant des clans marchant eux-aussi vers la guerre et se battant avec férocité. Il se rappela également l'ire de la forêt qui s'était communiquée à tellement d'Elfe, les rendant insensibles à la peur, la douleur et dans certains cas on aurait juré que même la mort n'avait pu échapper à cette immunité. Le Seigneur Protecteur ne laissa pas aller plus loin ses souvenirs. Parce que déjà se profilait à son esprit l'image de Caranthir submergé de sombre, l'air crépitant de magie alentour et pourtant... Et pourtant, il ne pouvait se laisser submerger par cette image.

Il savait également que la Prime Forêt n'était pas si réticente que cela à la levée des armées. Mais Aranos en aurait conscience et confirmation bien assez tôt comme cela. Ce n'était pas à Timérion de lui annoncer cette nouvelle, à la fois bonne et terrible. Ils avaient plus d'allié qu'il ne souhaitait le penser. Et nombreux était les Elfes qui révéraient les valeureux combattants qui défendaient leur foyer. Certes, Holimion était loin, mais il y avait bien d'autre territoire devant lui et Timérion savait que l'armée en faction à la porte était honorée jusqu'aux confins d'Aléandir. Mais cette presque vénération était discrète. Les Elfes n'étaient pas des plus démonstratifs. Cela n'empêchait pas les Temple de la Mère et de la Voilée de recevoir chaque jour depuis l'attaque de la Porte un flot continu de fidèles venus prier pour leurs défenseurs. Le temps de la faiblesse était entrain de passer et il était grand temps.

« Je ne suis pas de bonne compagnie aujourd’hui, seigneur Adantar. Tu dois avoir de bien nombreux ennemis parmi nos frères, Protecteur, pour m’avoir préféré, moi, le plus sombre, à tous les autres combattants de l’Anaëh. Qui crains-tu donc dans la Forêt ? »

Un sourire toujours emprunt de sa tristesse caractéristique s'étira un instant sur les lèvre du Protecteur. Il était vrai qu'Aranos n'était pas dans son meilleur jour. Mais en ces temps troublés, il était fort probable qu'il n'y ai plus de bons jours pour grand monde. Ce sourire eut tôt fait de s'effacer lorsque le Capitaine des lancier revint sur les doute du Protecteur. Il se sentit vaguement gêné d'y avoir fait allusion, soudainement ses soupçons paraissaient moins justifiés, plus frivoles et moins concrets qu'ils ne lui semblaient dans sa pensée. Faisant fi de ce sentiment qui n'avait rien de constructif, Timérion répondit à la question du Capitaine, reléguant à plus tard les réponses qu'il aurait pu donner à Aranos et sa tirade.

"Je ne le sais pas encore, hélas. Sinon crois-moi qu'ils ne seraient sans doute plus. J'ai eu le temps de consulter les archive à la bibliothèque d'Aléandir et un certain nombre d'éléments m'ont troublé. Particulièrement l'enquête sur la mort de la Dame Protectrice d'Holimion. Tout laisse à penser qu'il s'agit d'un attentat Drow. Les carreaux, le témoin, le mode opératoire... Mais il y a un certains détails qui me dérange. Comment les Drows auraient pu s'enfoncer si loin dans l'Anaeh sans se faire repérer? Pourquoi tant de preuves accablantes? Et surtout, comment pouvaient-ils savoir où se retirerait Dame Riwhiril? Le lieu n'était peut-être pas tenu secret mais le fait que la Dame s'y déplaça lui n'était pas prévu de très longue date. Pour moi, il y a un complice intérieur, voire plusieurs.

Peut-être que l'isolement m'a rendu un rien paranoïaque, mais j'ai la désagréable impression qu'une menace est présente sous les arbres. Par chance, les Seigneurs Protecteurs restants sont tous de ma connaissance ou presque. Je ne pense pas que mes doutes puissent concerner les hautes sphères. Il n'en reste pas moins que j'hésite à faire confiance à mes semblable désormais. Et le conflit bois-pierre ne m'encourage pas plus.

J'ai été élu sciemment pour me faire manipuler de manière à servir l'intérêt de l'un ou l'autre parti. Il faut bien avouer qu'ils ont été un rien surpris. Je n'ai peut-être pas connaissance des évènements récents, il me reste des oreilles et de la critique. Ils s'en souviendront c'est certain, mais moi, je me souviendrai surtout que ce conflit est entrain de gangrener la forêt. Et cela ne me plait pas, ces tensions à un moment si délicat me semblent, elles aussi, une trop belle coïncidence pour nos adversaires... Mais d'un autre coté, je ne peux tout imputer à cette hypothèse. Voilà pourquoi tu es la première personne à qui j'en fais part. il ne s'agit là que de doutes et j'espère sincèrement qu'ils le resteront..."


Il redirigea son regard vers l'ondée d'Uraal et s'autorisa un instant de revoir la bataille qui y avait fait rage. Les nuages de flèches qui ne voulaient pas se dissiper. Les éclairs, les torrents, les rocs et le feu qui volait d'une rive à l'autre. Le choc des armes et des boucliers se répercutant sur les rive alors que Sombres et Sylvains entraient dans une collision sauvage. Le roulement des tambours drows, bruit si terrible et angoissant, contré par les cor de l'Anaeh à la note si claire, si pure. Le tonnerre des sabots étouffés par les feuilles morte. Le sang vermeille, mêlé, indissociable, Elfe ou Drow sans différence aucune ruisselant sur les pentes douces. Les corps criblés ou lacérés flottant dans l'eau. Et Caranthir, assassiné d'une lame dans le dos avant de se voir éventrer. La course désespérée, le lierre fusant de toute part, lacérant, étranglant, écartelant. Les coups de canne accompagnés des craquements sinistres d'os et de crânes brisés. Et puis, la convulsion et le noir...

Il soupira et s'arracha à ses sombres visions. Il se sentit un peu plus détendu désormais. Comme si il avait enfin pu faire le deuil de ses moments sombres. A défaut de pouvoir se débarrasser de la douleur d'avoir perdu son âme soeur, il pouvait à partir de maintenant tirer un trait sur le départ de son maître. Au moins, cette rencontre aurait eu cela de bon...
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MessageSujet: Re: [Terminé] Réformer la Lance: souvenir de bataille [Aranos]   [Terminé] Réformer la Lance: souvenir de bataille [Aranos] I_icon_minitimeMer 20 Mar 2013 - 0:08

      Le regard sombre d’Aranos quitta les flots argentés, et cette fois revint se fixer sur le visage couturé du Mage, son compagnon de bataille. Voilà que leur entrevue quittait les marécages honteux du souvenir, de la haine et des colères passées, pour revenir s’ancrer dans les tempêtes présentes : ainsi il y avait un mal rampant qui rongeait la Forêt jusqu’entre ses racines.
      Aranos écouta attentivement, sans mot dire, le long récit des preuves inquiétantes que Timérion avait collectées. Ces signes n’indiquaient rien de bon pour l’Automne qui, déjà, s’annonçait par-dessus les feuillages de l’Œuvre.

      « Il y a des jours où je t’envierais, Adantar, se contenta tout d’abord de répondre le Capitaine de l’Infanterie, des jours où je regretterais d’avoir si longuement monté la garde sur les hauteurs d’Ellyrion. J’ai battu le pavé de ces murailles durant près d’un cycle entier, et à se tenir sur les hauteurs des tours et des remparts, j’en ai oublié le murmure de la Forêt. Tu la ressens inquiète, je ne saurais dire si c’est la vérité ou une fable. Le Fort tombé, je suis, avec mes soldats, de retour entre les branches d’une Anaëh qui nous avait oubliés, et que je ne reconnais plus.
      Ne blâme pas ceux qui se sont jetés dans le conflit du bois et de la pierre : je suis l’un d’eux. J’ai perdu jusqu’au souvenir de ce pourquoi les druides dansent et chantent à la tombée de l’Eté, sous les saules du Nord ; et eux ont dû égarer dans leur mémoire l’image des soldats de la muraille du Sud. Je ne sais pas ce que réclame la Forêt, ni ce qu’elle réprouve, mais nous sommes nombreux encore à nous rappeler que, lorsque nous veillions depuis le Fort, l’Œuvre trouvait la paix ; c’est ainsi que j’ai servi mon peuple, c’est ainsi que j’espère pouvoir le servir une fois encore. Sans savoir décider si j’ai raison ou tort en cela.»


      Les pensées d’Aranos, toujours agrippées à la mémoire de son Ellyrion, flottaient maintenant vers l’Ouest, là où devait se trouver l’Epine Dorée, et Malereg. Ainsi, le danger menaçait là-bas aussi, dans ces bosquets qu’il avait toujours crus saufs car si lointains pour l’emprise des Sombres...
      Les jeux politiques de Timérion dépassaient le Capitaine, qui n’aurait pu démêler les rivalités serpentant dans la pénombre d’un Conseil des Protecteurs ; et encore moins dans les temps troublés que son compagnon décrivait à présent. Une seule idée vint à l’esprit d’Aranos, et c’était la pensée d’un soldat.

      « Nous avons combattu ensemble, Adantar, sur ces berges ; tu y as prouvé ta valeur, et je ne crois pas avoir démérité. Maintenant des jours voilés s’étendent sur Anaëh, et comme tes soupçons qui déjà s’accrochent à certains de nos frères, bientôt chacun pourra craindre toute ombre dans la Forêt.
      Mais pour nous, Adantar, il nous reste Uraal, là où nous avons bataillé pied à pied : là nous avons honoré notre serment de défendre la Mère et son Œuvre, comme nous l’honorerons aujourd’hui encore. Quelle que soit la Fortune que Kyriä nous accorde, faisons la promesse de veiller ensemble sur la Forêt ; que ton rang ou mon grade ne vienne pas nous séparer à nouveau, jamais plus. »
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MessageSujet: Re: [Terminé] Réformer la Lance: souvenir de bataille [Aranos]   [Terminé] Réformer la Lance: souvenir de bataille [Aranos] I_icon_minitimeMer 20 Mar 2013 - 19:33


Timérion ne put s'empêcher de sourire à ces mots. Il était certes terne, mais il n'en restait pas moins présent. Le Capitaine venait de lui rappeler à des instants passés avec sa tendre épouse. Il était curieux que les conseils et les discussions qu'il avait eu avec elle remonte ainsi à sa mémoire. On aurait presque cru à une étrange magie qui permettait à la défunte de communiquer avec son époux par de là la mort. Au fond de lui, il savait pertinemment qu'il ne s'agissait que d'un piège de l'esprit. Cependant, il préférait penser que Nimuë continuait à l'accompagner malgré le mur qui les séparait.

"Il est une chose étrange, Aranos. Depuis que j'ai atteint l'âge adulte, on me demande sans cesse des serments et ce serment en particulier. Lorsque que j'ai rallié les éclaireurs, j'ai juré de défendre l'Oeuvre en tout temps et de mon mieux, de ma vie si besoin en était. Lorsque j'ai commencé ma formation de Mage, j'ai promis que je n'utiliserai jamais mon pouvoir pour mon bénéfice personnel mais pour aider mes frères. Quand j'ai pris la place de mon père en tant qu'Intendant de Malereg, je réitérai les mêmes mots, ceux de protéger ma cité et les marches septentrionales de l'Anaeh. Lorsque je suis devenu Seigneur Protecteur, j'ai de nouveau présenter ce souhait au Roi devant le Conseil des Protecteur. Et ce deux fois, puisque j'entame désormais un deuxième mandat pour le moins inattendu. Et aujourd'hui, c'est au tour de mes propres amis, si rares qu'ils fussent, de m'en demander la promesse.

J'ai survécu à tous ces gens, Roi, Protecteurs, Conseillers, Mages. Et malgré tout, tu me demandes une fois encore cette promesse. Il est évident que j'accepte de la reformuler. La Prime Forêt et ses enfants, mes Enfants, sont la seule et unique raison qui fait que je suis là aujourd'hui. Sans cette mission, je serai soit au fond du lac Tindanen auprès de mes ancêtres, soit au pied d'un vieux charme, attendant que Tyra m'emporte dans une transe bienheureuse. Je n'espère qu'une chose, c'est que, cette fois, ce ne soit pas moi qui vit alors que le demandeur du serment trépasse."


Il soutint encore un instant le regard du Lancier. Un visage dur, taillé par l'épée et la douleur. Douleur de la perte, douleur de la chaire, douleur de l'esprit. Des yeux rendus glaciaux par les horreurs de la guerre. Et une apparence prématurément vieillie par les vicissitude de la vie de soldat. Et lui n'aurait plus le réconfort d'entendre la Symphonie le bercer quand dans la nuit ses souvenirs de temps passés viendraient le hanter et le réveiller. Il n'était peut-être pas le plus heureux des Elfes, mais en tout cas, il n'en était pas le moins bien loti. Un jour, il trouverait peut-être le moyen de rendre au Elfe dit de Pierre l'oreille de la Forêt.

"J'aimerais que toi aussi tu me promettes quelque chose... Que jamais ton opinion ne conduira à des actes qui souilleraient la Prime Forêt du sang de tes frères. Cette promesse semble peut-être banale, mais j'ai eu l'occasion de m'approcher d'Aduram, et le peu que j'en ai entendu me fait craindre que ce qui se passa en Linoïn ne se produise à nouveau. Notre race ne survivra pas à un nouveau schisme."

Rien qu'à la pensée de cette mélodie vrillée, tordue et chaotique qu'il n'avait pourtant perçue que de loin, Timérion sentit la peau de sa nuque s'hérisser. Aujourd'hui encore, il avait du mal à comprendre comment les arbres avaient-ils pu en arriver à un tel point de folie. Souvent les bûcherons étaient venus puiser dans les avancées de la forêt, et rares étaient ceux qui en réchappaient d'ailleurs. Mais jamais ces larcins n'avait causé une telle distorsion au sein des arbres. Pourtant, de ce trouble, aucune trace ne parut dans les yeux du Protecteur. Il y avait déjà suffisamment à se soucier et à redouter que pour ajouter le poids de ses propres incertitudes sur les épaules du Capitaine.
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MessageSujet: Re: [Terminé] Réformer la Lance: souvenir de bataille [Aranos]   [Terminé] Réformer la Lance: souvenir de bataille [Aranos] I_icon_minitimeJeu 21 Mar 2013 - 23:59

      La présence de Timérion Adantar, vieux compagnon de bataille, sur les berges attristées d’Uraal savait conforter Aranos, malgré les paroles dures qui s’échappaient d’entre ses lèvres ; et à savoir qu’un frère encore partageait les plaies du Lac avec lui, le Capitaine finit par sentir un sourire se dessiner sur son visage déjà ridé. Il était vrai que les Elfes professaient un amour des serments.

      « Les promesses sont notre lot commun, Adantar, répondit le soldat, et depuis que j’ai intégré les rangs de l’armée d’Ellyrion, j’ai dû prêter vœu de défendre la Forêt comme nul autre. J’ai lié les mêmes allégeances lorsque Calimenthar m’a accueilli dans son Temple ; et mes frères se trouvaient si inquiets de me voir vouer ma lance au Feu et à la Bataille, qu’ils me firent expressément promettre une fois encore, depuis les murailles du Fort et sur le tronc des vieux chênes, que je défendrai l’Œuvre mieux que ma vie.
      Ce sont ces serments qui nous ont réunis ici même, il y a trois siècles d’aujourd’hui, pour exécuter nos vœux de prendre les armes. Nous n’avons pas failli, aussi nul besoin de jurer une fois de plus d’accomplir le serment qui nous lie depuis si longtemps déjà. »


      Aranos jugeait du regard le Mage ; celui-ci avait-il mal compris ses paroles ? Ou bien refusait-il le serment que lui proposait le Capitaine ?

      « Je veux que nous passions la promesse, Adantar, reprit l’Elfe, de combattre toujours ensemble pour la Forêt. Quelles que soient nos charges ou les obligations pesant sur nous, que jamais l’un livre bataille sans que l’autre combatte à ses côtés. Tu peux être dans les terres de l’Ouest de Malereg, et moi luttant au pied de Yutar ; les fronts peuvent être dissonants ; mais je ne veux pas, un jour, devoir combattre en te sachant sous une autre bannière. »

      Aranos connaissait lui aussi ce qui avait secoué Linoïn, comme tous ses frères, et cette obscure mémoire taraudait encore ses rêves les plus enfouis. Voilà que les Sombres levaient les armes contre une Forêt profondément éclatée, fragmentée jusqu’en son sein, et donc les racines discordantes semblaient prêtes à s’étouffer l’une l’autre. L’Automne et l’Hiver s’annonçait triste pour le Beau Peuple, et certainement rouge.

      « Tu peux sentir approcher la bataille dans ce que l’on dit être le Chant de la Forêt, Adantar, poursuivit le Capitaine. Pour ma part, le souffle de Calimenthar se fait plus chaud alors que le Soleil va bientôt décliner ; la Lance reviendra bientôt défendre la lisière d’Anaëh, et le fera tant qu’elle le pourra. Dispenser la mort est un fardeau, Adantar, tu le sais comme moi. Je ne rougirai pas la Prime Forêt tant que cela pourra être évité. »

      Un voile étrange passa dans le regard d’Aranos. Prêter des serments avant que ne s’abatte la tempête, une tempête dont ils ne connaissaient rien si ce n’est qu’elle serait enragée, voilà qui lui paraissait confus ; que vaudraient ces serments lorsque viendrait le jour de la bataille, et que face à sa lance, de l’autre côté de la muraille, l’on découvrirait des oreilles pareillement effilées ?

      « Les Sombres ont été nos frères, Timérion, mais je les abattrai. Si noir que soit devenu leur sang, la Forêt s’en trouvera néanmoins rouge lorsqu’ils tomberont. »

      C’était maintenant le soldat qui se tenait face au Seigneur Protecteur, lequel devait sentir s’agiter des rouages complexes dans son esprit, toujours préoccupé de soupeser les menaces qui pouvaient hanter ses terres. Une question alourdissait depuis longtemps déjà les pensées d’Aranos, et l’Elfe finit par demander à son compagnon :

      « Crois-tu que la Forêt va céder et se rompre, Adantar, et que d’autres viendront grossir les rangs des Sombres ? »

      L’esprit du Capitaine était hanté de cette silhouette aperçue quelque douze ans plus tôt, et jamais revue depuis : Taurë, l’enflammée. A croire qu’un jour, peut-être, Aranos aurait à abattre sa sœur dans une nouvelle guerre, tout sourire s’évanouit sur ses lèvres minces et serrées.
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MessageSujet: Re: [Terminé] Réformer la Lance: souvenir de bataille [Aranos]   [Terminé] Réformer la Lance: souvenir de bataille [Aranos] I_icon_minitimeVen 22 Mar 2013 - 15:08


« Crois-tu que la Forêt va céder et se rompre, Adantar, et que d’autres viendront grossir les rangs des Sombres ? »

A cette question, tout ce qui pouvait ressembler à un semblant de joie dans le coeur du Protecteur s'évanouit, fondant comme la neige du Nord sous la brise printanière. Il se souvenait des clans et de la cité, se faisant face, prêt à s'entre-déchirer. Il se souvenait de la haine et du mépris qu'il avait lu dans leurs yeux à tous. Et ces regards en appelaient d'autres, ceux des Sombres se jetant contre les rangs des Elfes ici même à Uraal. Et puis, ceux-ci laissèrent la place à celui d'un seul Drow. Celui qui l'avait à jamais privé de tant de joies. Celui qui, en quelques jours, lui avait fait oublier jusqu'à son propre nom. Celui qui l'avait maudit d'une jambe indigne de confiance dont la force allait et venait au gré des envies d'un hasard sournois.

Le regard perdu dans le lointain, Timérion crut qu'il allait être englouti par un nouveau cauchemar éveillé, par ce qui ne s'était jamais contenté de ne hanter que ses nuits. Les tourmenteurs drows sont cruels, des êtres malade qui ont voué leur vie à la torture. Ils ne mutilaient jamais qu'un coté de leur victime, lui laissant, le temps qu'elle survivrait, l'horreur de voir à quoi elle ressemblait avant qu'il ne la travaille. "Tu parleras avant que je ne demande" telle était la devise de celui qui l'avait pris entre ses griffes. Et il y avait la magie aussi... leur odieuse magie d'une déesse noire et corrompue.

Le renâclement de son Meharas ramena lentement Timérion au présent. Légèrement tremblant suite à cette expérience pour le moins désagréable, il remarqua que c'était la première fois qu'il en refaisait l'expérience depuis son réveil... Et il espéra que ce serait la dernière. Rassemblant ses esprits, il se souvint avec difficulté de la question de son ami et du faire un effort surhumain pour ne pas se laisser retomber dans le cycle vicieux du cauchemar. Les Tourmenteurs laissaient décidément des plaies profondes et qui ne guérissaient jamais vraiment, continuant l'oeuvre de leur maître à travers le temps.

C'est d'une voix terne et triste que le Seigneur Adantar répondit au Capitaine des Lanciers. Son regard était toujours perdu dans des ombres que lui seul pouvait voir.

"J'aimerais te dire qu'il ne s'agit là que de foutaise ou de vaine rumeur destinée à faire frissonner les Elfes mondains... Mais je sais au fond de moi que le conflit est bien trop ancré et en de trop haute sphère que pour que ce ne soit que futilités. Si même les instances représentant la Mère et les gradés de l'armée royale y sont mêlés, je ne peux promettre la paix."

Il soupira profondément, évacuant un rien de sa mélancolie et de sa tristesse et faisant reprendre l'étincelle de volonté qui ne l'avait jamais vraiment quittée.

"Mais sois en sûr, tant que je respirerai, je ne laisserai jamais une telle ineptie se produire. J'ai encore dans mon souvenir un temps où les clans et les cités oeuvraient ensembles pour défendre l'Oeuvre et je compte bien faire tout ce qui est en mon pouvoir pour le rétablir. Je ne veux pas retourner au passé, ce serait utopiste et stupide, mais je veux que les Elfes réalisent enfin que la Mère durant la Malenuit n'a pas souhaité donner raison à l'un ou à l'autre, simplement leur rappeler où était leur devoir. Elle nous a offert la chance de revoir la forêt comme aux jours anciens, à nous désormais de lui prouver que nous pouvons en être digne."

Se rappelant l'ascendance de son interlocuteur et sa propre dévotion envers Tyra, Timérion décida qu'il était plus approprié d'ajouter ces deux autres déité à la liste de ses arguments.

"Et je ne doute pas que Calimenthar se réjouirait de voir à nouveau les Clans et les Cités combattre côte à côte dans le déluge de lames, de flèche, de bouclier et de cri que cela représente. Ni que Tyra soit émue de voir tomber au combat, l'un pour l'autre, des Elfes que tout semblait séparer. Les Elfes ont parfois tendance à oublier que leur force a toujours, et plus que tout, résidé dans leur union."
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MessageSujet: Re: [Terminé] Réformer la Lance: souvenir de bataille [Aranos]   [Terminé] Réformer la Lance: souvenir de bataille [Aranos] I_icon_minitimeSam 23 Mar 2013 - 10:47

      « Calimenthar réjoui ? répéta Aranos dans ce qui semblait bien être un autre sourire, et Tyra émue ? Ce sera une étrange journée pour la Forêt. »

      Il était vrai qu’une époque inattendue se profilait pour Anaëh. Les Sombres reparaissaient et refermaient leurs dents sur la lisière, tandis que sous les bois l’Elfe luttait contre l’Elfe ; voilà que dans le Temple de Calimenthar, en Alëandir, la fumée de la bataille se faisait déjà ressentir par tous les corridors, mais les guerriers ne savaient de quel côté ils devraient livrer bataille. Les aruspices étaient confus : il y aurait une tempête de fer sur Anaëh, mais nul n’aurait pu dire par où elle éclaterait. L’entrelacs des racines s’était fait inextricable, et pourtant allait céder et se rompre, voler en éclats avant l’Hiver.

      « Que la Forêt se fragmente ... se souvint Aranos ; pour entendre ces présages, il ne m’a pas fallu attendre de voir les jours présents... »

      La famille Hëlmeliòn, il y a longtemps déjà, avait été rongée et défaite par le poison qui, aujourd’hui, semblait creuser sa voie jusque dans les plus vieilles souches de la Prime Forêt. Voir au-dessus de soi se déployer la bannière de l’armée du Sud, et s’entourer de l’éclat des cuirasses d’or d’Alëandir ; contempler la fuite des clans druidiques jusque dans les ombres de l’Œuvre, et n’entendre bientôt plus que les tambours sauvages pour battre leur pas déclinant ; attendre enfin, attendre que les solstices ramènent ceux qui ont préféré quelques bosquets à leur propre fratrie. Enfin de loin en loin, comme les astres se retrouvent après leurs révolutions, patienter pour que reparaisse une figure étrange et déjà obscurcie, presqu’oubliée, sans plus connaître qui se cachait sous un masque de plus en plus impénétrable. Lire dans des chroniques des actes et des noms, et s’interroger si ceux-là étaient encore de son sang ; douter, douter encore, et puis laisser filer les souvenirs, car la Lance convoquait alors ses porteurs.

      « Une nouvelle fracture dans l’Anaëh, acquiesa Aranos, j’y suis préparé de longue date ; je la redoute trop pour qu’elle me surprenne encore. »

      Depuis le sommet d’Ellyrion, l’on pouvait voir se former les grandes constellations du combat, ou observer les mouvements obscurs des fumées dans les Terres Stériles et au loin, sur le Volcan ; mais il était des choses et des personnes, au pied de la pierre, dans la Forêt, dont on ne voyait plus l’ombre ni la trace.

      « Tu as voyagé plus loin que moi, Adantar, reprit Aranos, et plus longtemps aussi ; aujourd’hui encore, alors que les racines tentent de briser la roche, tu as pu écouter la colère de part et d’autre. As-tu, par hasard, revu celle qui conseilla autrefois la Reine ? As-tu revu Taurë, de la lignée Hëlmeliòn ? »

      Le Lac alentour semblait avoir cessé de clamer sa fureur passée, ou bien Aranos ne ressentait plus sa morsure : c’était maintenant la longue cohorte des Elfes tombés, une lame fichée au cœur par ceux qui furent leurs frères, qui obnubilait l’esprit de l’Elfe. Cela faisait comme un manque qui lui travaillait la poitrine.
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MessageSujet: Re: [Terminé] Réformer la Lance: souvenir de bataille [Aranos]   [Terminé] Réformer la Lance: souvenir de bataille [Aranos] I_icon_minitimeDim 24 Mar 2013 - 17:05


« Une nouvelle fracture dans l’Anaëh, acquiesa Aranos, j’y suis préparé de longue date ; je la redoute trop pour qu’elle me surprenne encore. »

Et si tu redoutes, quel mot devrais-je employer? pensa amèrement Timérion. Si il y avait bien une chose qui le torturerait au point de l'achever, ce serait de voir le peuple qu'il avait substituer aux enfants qu'il n'aurait jamais se déchirer. Comme un père est atteint profondément lorsque ses fils se querelle, Timérion regardait tristement les clans et les cités se faire face, ne pouvant agir qu'en sa propre demeure. Mais comme toujours, il fallait vaquer au plus pressant et pour l'heure, celui-ci portait le nom de Yutar.

« Tu as voyagé plus loin que moi, Adantar, et plus longtemps aussi ; aujourd'hui encore, alors que les racines tentent de briser la roche, tu as pu écouter la colère de part et d’autre. As-tu, par hasard, revu celle qui conseilla autrefois la Reine ? As-tu revu Taurë, de la lignée Hëlmeliòn ? »

Timérion fut sincérement surpris par cette question. Pas tant parce qu'il avait connaissance du passé houleux du frère et de la soeur mais parce qu'ils étaient tellement dissemblable que le Seigneur Adantar en avait complètement oublié leur lien de parenté. Il se rappela de sa rencontre avec la Gardienne, mélange subtile d'agacement, de colère et d'une certaine forme de respect. Il ne pouvait pas décemment dire qu'il méprisait ou qu'il haïssait la Gardienne, si il la trouvait antipathique, hautaine, bien trop fier et trop prompte à dispenser des insultes et des sarcasme à mots couverts plutôt que des paroles de sagesse, il ne pouvait pas lui enlever ses qualités, son mérite et surtout la fonction et le rôle qu'elle jouait. Si la Mère l'avait choisie, elle devait certainement renfermer des qualités qu'il n'avait pas nécessairement perçue lors de leur court entretien.

"Taurë... Je ne sais de quand datent les dernières nouvelles que tu reçus de ta soeur, ou de quiconque l'ayant rencontrée. De ce que j'ai pu voir, elle semble en bonne santé. Si l'on omet la cécité qui accompagne le rôle de Gardienne de la Mère qu'elle occupe désormais, bien évidemment. Mais je suppose que tu te soucies surtout de ses projets.

Il est un fait qu'elle souhaite lever la forêt dans l'objectif, que je poursuis moi-même, de faire tomber Yutar. Mais, il est tout aussi certain que je désapprouve ses méthodes. Je ne sais si c'est l'acharnement des Sombres ou son poste fraichement acquis. Toujours est-il, qu'elle a une confiance aveugle en sa force et qu'elle a tendance a vouloir que tout soit fait quand elle le demande et comme elle le demande. J'ai eu l'impression qu'elle préférait forcer la main à toute la forêt, cités et clans confondus, plutôt que de patienter deux jours de plus.

Si elle fut un jour agréable à vivre, ce jour appartient au passé. Lorsque je me suis entretenu avec elle, c'est une Elfe hautaine, fière et à la langue aiguisée comme les griffes d'un tourmenteur Drow à qui je me suis adressé. Tu l'auras compris, elle ne m'est nullement sympathique. Cela dit, je dois tout de même lui reconnaître ses qualités. Elle est intelligente, forte et redoutable, rompue aussi bien à la politique des cités qu'à celle des bois. Et je me réjouis naturellement de voir nos projets communs...

Cependant, elle me semble bien trop belliqueuse, trop arrogante aussi, j'ai vu en elle le reflet de certains Elfes, montés trop vite et trop haut dans les sphères du pouvoir sans en avoir reçu l'éducation. Je me demande si son rôle n'est pas parfois éclipsé par la fierté qu'elle en retire. Enfin, voilà, mes relations avec ta soeur ne sont pas aussi bonne qu'avec toi, même si il est peut-être un peu hâtif de tirer des conclusions si radicale d'une seule entrevue. Il est quand même étrange que deux jumeaux en viennent à se différencier à ce point..."


Il n'avait pas mâché ses mots, comme toujours quand il discutait avec le Capitaine. C'était un accord tacite depuis qu'ils s'étaient rencontrés la veille de la bataille et qu'ils avaient conservé à travers les siècles. Ils n'utilisaient jamais les détours inutiles et n'ensevelissaient pas le sens de leurs mots sous les subtilité de la langue elfique. Si parfois leur propos étaient plus élaborés ou plus complexes à déchiffrer, il ne s'agissait jamais que de style et non d'une quelconque volonté de parler à demi-mot. Ils conversaient toujours dans ce langage clair qu'ils utilisaient la veille de l'assaut, quand il est vital de parler clairement. Et Timérion n'était pas prêt à se lasser de cette habitude. Après avoir subi un peu malgré lui plus d'un cycle de politique, il savourait avec délectation ces moments privilégiés.
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MessageSujet: Re: [Terminé] Réformer la Lance: souvenir de bataille [Aranos]   [Terminé] Réformer la Lance: souvenir de bataille [Aranos] I_icon_minitimeVen 5 Avr 2013 - 2:36

« Cécité de Gardienne de la Mère, Adantar ? souffla Aranos avec surprise. »

Voilà donc si longtemps que le Capitaine n’avait revu sa sœur, qu’il ne savait même pas qu’elle était à présent devenue Vaisseau de la Mère. Aranos peinait à trouver ce qu’il pouvait en penser : avec son druide de père qu’il avait attiré sa fille dans les rets de la Forêt, parmi les farouches nomades et loin de la pierre, voilà qui ne surprenait pas le frère. Un jour déjà, Taurë était réapparue après un long silence, soudain auréolée de la charge de conseillère de la reine Orelindë ; maintenant c’était une autre dignité. Le Capitaine garda le silence pendant un petit moment.

Lorsqu’il reprit la parole, ses yeux avaient un reflet étrange ; dans la colère et le tumulte que le Seigneur Protecteur lui avait décrits à propos de Taurë, Aranos retrouvait le bouillonnement qui agitait son propre sang. Six siècles d’isolement n’avaient pas suffi à briser les jumeaux.

« Il n’y a pas de grade au fond de la Forêt, Timérion, pas de hiérarchie parmi les bosquets et les bêtes. On monte selon d’autres rythmes. »

L’insupportable, voilà ce qui devait couler en commun dans les veines de Taurë et de celui qui avait été Anàsï. On admirait la valeur du Capitaine lorsqu’il pourfendait les Sombres, et pourtant il bénissait ses victimes du nom d’un Dieu honni des forêts ; Taurë aurait pour sa part dévoré la moitié de l’Anaëh sans un regard, si cela avait précipité la mise à genoux de Yutar. Alors finalement, Aranos éclata d’un rire sombre, et grave, qui plissa ses lèvres aux commissures déjà craquelées par le temps :

« Tu es un sage, Timérion, et tu mènes les Elfes de tes terres avec prudence et clairvoyance ; à l’âge où nos frères et nos sœurs s’apprêtaient à nouveau à la guerre, tu as préféré rejoindre l’isolement de la Symphonie et t’y oublier. Je t’offre les conseils elfiques, les assemblées et les cours, partout où ta voix mesurée saura faire prodige. Mais pour affronter le tempérament enflammée de Taurë, ta raison ne suffira pas, il faudra ma colère. J’irai trouver ma sœur et je lui parlerai. »

Timérion les trouvait-il si différents, ces deux jumeaux ? Ce sourire mordant ne voulait plus quitter les joues d’Aranos. Déchirés entre les extrémités de la culture des elfes, le frère et la sœur semblaient sur le point de se retrouver alors que la guerre murmurait déjà dans le Sud. Qu’Anàsï et Taurë se retrouvent en cette heure assombrie, peut-être serait-ce un bon présage pour toute leur Forêt traversée de pierre et de bois.

« Un au revoir mais pas un adieu, Seigneur Adantar, nos chemins se retrouveront : Calimenthar convoque les bannières de la guerre, et je sais déjà que nous y serons réunis. Et puis ta sagesse pourrait se révéler utile une fois encore, si mes retrouvailles avec Taurë se révélaient plus désastreuses encore qu’il y a douze ans... »

Sur le Lac d’Uraal planaient toujours les souvenirs viciés du combat : de ceux-là, ni Timérion, ni Aranos, ni la Forêt elle-même, ne seraient jamais pleinement lavés. Mais quant aux mémoires de famille qui hantaient encore le Capitaine, elles pouvaient être éclaircies. Alors l’Elfe prit congé de son ami, car c’était seul qu’il devrait se confronter à sa sœur.

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