Des affaires et des chasses

Les volets claquèrent, quelques cris étouffés s'éteignaient derrière l'épaisseur des maisons, seul un chien affolé, esseulé le long du chemin aboyait, tirait et rongeait sa corde. Un trait d'arbalète rompit le brouillard et plongea le hameaux dans le silence, la bête sombrant, morte. La brume recouvrait à présent la totalité des quelques bâtisses, et du chemin, surgissait quelques hommes. Puis derrière eux un bien étrange cortège. Les voiles d'obscurité avançaient, et on voyait alors passer un cortège d'exotisme et de chose tout autant incroyable.

Monté à dos d'un immense animal et allongé dans son palanquin, l'Ombre du Levant voyageait. Une ribambelle d'esclaves l'escortaient. Qui était Zurthan, qui elfique, qui drow, et on pourrait presque dire que le monde entier avait été réunis. La maîtresse du Tzerle, tenait l'esclavage comme un art suffisamment digne pour l'exercer depuis plus d'un millénaire. Ce n'était pourtant là qu'une faible part du convoie. Des morgaux suivaient avec leurs dompteurs, des chariots, et tout un vaste panel de frivolités, étranges créatures et objets de tout genre.

La maitresse du Tzerle ne voyageait jamais en petite compagnie, cela serait disgracieux, disait-elle. Et non pas moins sans secouer ce qu'elle pouvait trouvait sur son passage. Se penchant délicatement hors de son palanquin, le convoie s'arrêta. Un de ses disciples, fit amener un petit escaliers pour qu'elle puisse descendre. Un autre l'attendit en bas, accompagné de son morgal préféré. Une bête ignoble, le regard aussi mauvais que sa maîtresse, mais non pas moins soumis à la sorcière du Tzerle.

« Mes tendres amis, Nous avons ici, fort affaire. Qu'on remplisse nos cages ! »

Verld'Ahn, un de ses disciples drow, attrapa, le visage grimaçant de plaisir, une hache à sa ceinture. Il était accompagné de quelques autres bougres. Certains étaient esclaves, ayant accepté avec joie leur statut et servant avec grand zèle leurs maîtresse. La hache se mit à frapper contre l'une des portes, aussitôt suivit en fanfare par d'autres coups de martèlement. Puis vint les cris, et les gémissements de l'intérieur. En peu de temps, on sortit la populace sur la place. Certains tentèrent de résister, bien mal leur pris, ce fut à grand coup de gourdin qu'on les calma.

Les plus vieux, les impotents et ceux faisant mauvaise matière à commerce, furent eux, passé par les lames. On donna leurs cadavres en pâtures aux montures devant l'air horrifié des survivants à qui on apprêtait des fers. Mais une petit fille, pas plus de la dizaine, se mit à courir. La peur avait mué en elle une telle terreur qu'elle profita d'un moment d'inattention pour tenter de se sauver. En quelques instants, un des gardes attrapa son arbalète, prêt à l'abattre. Li'Ssin s'approcha cependant, monté sur sa créature et d'un geste, baissa l'arme. Non, ce n'était pas de l'empathie. Son monstre s'élança vers sa proie à grandes enjambées et en quelques instants, elle fut dessus. Les ombres s'élevèrent et enveloppèrent la chasseuse et l'enfant. La faible créature cria dans les voiles de ténèbres. Puis, plus rien. Seul ressortit, la maîtresse du Tzerle laissant derrière quelques fumées de noirceur se dissipant peu à peu. Au milieu, un corps, sec, semblant avoir été vidé de toute vie.

La terreur suffisait à annihiler toute nouvelle tentative de fuite. Le cortège reprit sa route de plus belle, vidant encore quelques hameaux de leurs habitants. L'Ombre du Levant arriva enfin à Yutar. L'ultime forteresse s'élevait non loin d'Anaeh, projetant son ombre sur les plaines alentour comme un avertissement aux démons de la Forêt. Une fois l'intérieur, la coterie marchande s'installa dans la cour tandis qu'un disciple de la maitresse du Tzerle s'en allait chercher quelques officiers en charge de la forteresse.

La Maîtresse du Tzerle se dégagea délicatement de son palanquin, rejetant les toiles qui l'entourait. Mais non certes pas les filaments d'ombres qui l'entouraient. L'Ombre du Levant n'en avait pas moins les caractéristiques. Elle s'enveloppait de magie et virevoltait en elle, semblable à quelques étranges créatures, un démon, une monstruosité, une sorcière. Mais non pas aussi belle que terrible. Elle semblait virevolter dans les airs, le geste gracieux semblant être animé par le vent et le pas léger semblant qu'effleurer la poussière. La maîtresse du Tzerle se tenait au milieu de ses disciples, une fière bande d'acolyte venant de toutes races, tout endroits, mais ayant en commun ce profond désir d'apprendre l'art occulte et de servir celle qui en avait la connaissance.

-"Je vous remercie, Messire Senger, et je suis des plus aises de vous savoir promu à ce titre. Je ne peux que vous souhaitiez d'y rester longtemps. Oh, je n'en ai que trop vu aller et venir ici, éphémère créature à la vie si courte. Puisse t-il en être autrement pour vous."

Elle en avait vu des officiers arrivé du Puy, passer devant ses domaines et ne jamais y revenir. Faible créature, jura t-elle intérieurement. Oh elle savait qu'on la méprisait de par sa nature. Elle avait que trop subit son métissage. D'abord à Nisétis, où elle avait été chassé. Des terres péninsulaires, ou sa nature effrayait. Et partout où elle allait, on la méprisait. Ce mépris était devenu aisément partagé. Aucune vie n'ayant la moindre importance, rien, si ce n'était ses serviteurs et acolytes. Elle se devait de reconnaître cependant que les manières courtoises du drow ne lui déplaisait guère. Qui plus est, l'étonner de la part d'un guerrier drow.

-"C'est avec grand plaisir que j'accepte votre invitation", et d'un claquement de doigt elle mis en branle sa coterie.

Les disciples allèrent chacun ayant une tâche plus au moins attribuée, certains se chargeaient d'organiser les esclaves. D'autres les bêtes, et quelques uns, parmi les plus compétents accompagnaient Li'Ssin. Le nouveau Senger semblait peu habitué à ses visites pour lui demander le but de cette dernière, ou cela pouvait tout aussi bien être une forme de politesse, l'hybride n'en accorda pas plus d'importance.

-"Mon doux ami, je viens ici pour vous présenter ma marchandise. Il ne m'est pas improbable que vous aviez besoin de quelques esclaves, ou encore de quelques montures suite à vos pertes dans les derniers combats contre les elfes de la forêt, n'est ce pas ? Pourtant, je dois vous avouer que ma visite est bien guidé par un autre désir. Plusieurs de mes tendres acolytes m'ont fait savoir que lors de votre dernière attaque de l'Anaeh, quelques cerfs blancs de cette forêt, connu pour leurs cornes grandioses, et leurs pelages étincelant se serait aventuré au dehors de l'Anaeh. On m'a parlé d'une créature qui rôderait dans les bois aux alentours de Yutar. Je n'ai pu résister à l'envie de venir la chasser, ce magnifique animal étant si dur à trouver, à cause de ces elfes,..." acheva t-elle sur un ton avoisinant l'injurieux, "Maudit soit-ils."