Le rêve est au bout du fleuve...

Suivant le temps de la guerre venait le temps des bâtisseurs. Oeuvre visant la postérité, ouvrage dont le premier désir ne se voulait différent que celui de marquer son temps et celui à venir. La vision de la cathédrale de Notre Dame d'Oesgard aurait suffit à éveiller en chaque visiteur de l'antique cité, la splendeur. S'il était des constructions pour la gloire et l'émerveillement, d'autre se suffisait seulement à la protection et la défense. Le temps des château avait fait s'émerger des pics de pierre dans le paysage. Il y avait grande habileté aux menuisiers et autres artisans de savoir survivre à la guerre, n'était-il point meilleur temps pour bâtir que lorsque les murailles et tours s'en trouvaient amoindris de leurs pierres. Le trésor royal s'en trouvant les moyens, le royaume de Sgarde avait fait grand cas des fortifications et habiles ouvrages qu'on désirait faire bâtir.

En ce jour là, à la cour il n'était pourtant pas question de régler ce genre d'affaire, le Roy se devait de rendre jugement d'un de ses mauvais sujets. Un seigneur qui du haut de sa maison forte faisait vivre des effroyables calvaires à ses bonnes gens. On lui avait rapporté de nombreuses triste affaires. Ce ne fut que quelques uns de ces chevaliers, qui non avide de justice, l'était plus de sa seigneurie qu'il revendiquait comme la leur, s'était fait les hérauts de justice. L'affaire avait été mené rondement. Les chevaliers, tout deux frères, qu'on nommait de la Viraille (du nom du domaine qu'il convoitait), s'était tout autant fait renommer la "frétèche", car jamais on ne voyait l'un sans l'autre. Ils étaient autant indivisible en leur personne qu'en leurs biens qu'ils partageaient en une équité que tout bon pentien se devrait d'observer. Les deux galants ayant débusqué quelques badauds que le seigneur brigand avait usage à ses basses besognes, les témoignages ne manquaient pas. Le bougre sous la question avait avoué tout les crimes du méchant homme et bien plus long encore. On avait appris avec quel vilenie il avait prit possession du corps d'un bourgeois en visite dans le village voisin de Ferlat, pour le maintenir fait prisonnier en son château. La pauvre épouse du gentil marchand s'en était trouvé à devoir payer rançon de sept cent Lyon d'or sans quoi elle se devrait de se faire veuve. Son âme aimante de son époux la fit obéir scrupuleusement. Sa malfortune fut faites, lorsque le méchant seigneur ayant compté et recompté les pièces, amena son époux tout enchaînés et ensanglantés. Le coquin qui ne se satisfaisant pas d'une vil rapine, jeta la pauvre femme à ses hommes, pour qu'il en tire satisfaction s'ils étaient avide de ce pain là. Durant deux jours, la pauvresse eut à supporter tant de mauvais traitement qu'elle en éveilla la pitié à ses propres bourreaux. Le seigneur de Viraille désireux de faire leçon à ses hommes sur sa cruauté, égorgea l'époux avant de planter sa dague dans la poitrine de la pauvresse lui demandant avec moult blasphème si cela la faisait jouir. L'affaire n'avait fait grand bruit alors, on avait seulement parlé de la vilaine odeur qui émanait des fosses de la maison forte où un grand feu avait été allumé et les corps brûlés.

La frétèche eut à son bonheur de découvrir de la bouche du coquin, bien d'autres crime, et non pour se risquer à la triste loi testis unus, testis nullus (témoin unique, témoin nul), il en avait trouvé deux autres dont les crimes pesant plus lourd sur leur conscience que sur celle de leur maître ne tardèrent pas à être avoué. Le seigneur de la Viraille croyant pas quelques captieux propos s'en sortir indemne eut à mal en découvrant ses hommes de se faire figure d'innocent. Sa mauvaise réputation fit de son discours d'être qu'une victime d'un artificieux complot, peu de cas. Goar, se voulant être un roy de justice, prit à grand coeur de faire savoir que la loi touchait aussi bien les manants que les seigneurs. Il condamna à être roué de coup, émasculé puis écartelé le seigneur bandit, avant que son corps soit exposé pendant quarante jours. Se montrant des plus aimables qu'on fasse grand cas de la justice, il donna à la frétèche le fief de la Virtaille, ces deux tendres amis, n'en furent pas sans grâce. Et bien qu'on eut mal à croire que si petit seigneur eut grand à jouer, ils se devraient de refaire une merveilleuse apparition à la cour en des temps futurs. Justice étant rendu, la cour se retourna à ses plates occupations. Ce ne fut l'arrivé d'un petit clerc qui se glissant auprès d'Arnoul le Meingre, lui fit savoir qu'un maître bâtisseur demandait à louer ses services. Les travaux et les emplois en manquant pas, il était de la place pour ces artisans qui se massaient en la capitale. Goar l'oreille pendante trouva l'affaire plus intéressante que celle qui se devait d'accomplir.

-"J'aurais grand plaisir à entendre gentil artisan plutôt que de me devoir d'admonester des mauvais sujets. Fait le donc quérir ici."

Le petit clerc qui n'en discutant pas plus long l'ordre royal s'en disparu à la recherche de l'artisan. Il était peu habituel que le roy s'occupa d'affaire de la sorte, son connétable ayant plus à propos de se faire lui même le grand maître d'ouvrage du royaume. Le roy glissant de quelques pouces sur son trône cherchant une place plus confortable, se dit à lui même qu'il n'était un bon roy qui châtie les mauvais sujet mais ne se préoccupe point de ce qu'on bâtit en son pays. Il était de plus curieux du métier de ces habiles gens qui savaient se faire s'élever en si grande pompe et étrange mécanique des édifices si beau et si fort pour que les seigneurs y vivent.

Goar trouva fort commode ces braves gens, il lui rappelait sa prime jeunesse où il arpentait les routes en quêtes de tournoi et de guerre louant son épée et celle de ses comparses. Il y avait en cet artisan la même fougue qu'il eut jadis. Cela lui plut, non sans qu'en premier abord il trouva quelque peu trop audacieux le ton que prenait cet homme du peuple face à un monarque. N'étant point homme à s'étendre sur ces faits, il les oublia tout aussi rapidement. Se tournant vers Arnoul, il le tança de ne lui avoir fait rencontrer plus tôt des hommes de cette trempe qui sied à merveille à son royaume. L'audace, la fougue et ce brin d'inventivité désireuse de fuir l'oisiveté. "N'est-ce pas pitié de savoir que pareil gens se trouvent souvent désœuvré par manque de fonds. Mon bon ami, nous aurons gage de donner plus de moyens pour voir plus grand travaux en nos terres". L'aimable Arnoul esquissa un délicat sourire, n'étant point homme cupide, il se plaisait cependant à s’accommoder d'une plus grande bourse.

-"Gentilz artisan, tu auras bien ouïe, il y a moult et grand ouvrage qui n'attende que de trouver mains et sapience pour se faire s'élever les pierres et se monter les armes sur les tours. Ta sapience, je gage, saura trouver à s'exercer plus que tu aurais pu l'escompter."

Il y avait nombre de château à rebâtir suite à la guerre et nombre de travaux était encore en cours. Si la plupart des destructions avaient déjà été remis en état, il n'en restait pas moins qu'on escomptait bien rendre plus forts les châteaux qu'il ne l'était déjà. La ville d'Amblère qui dans son grand incendie avait fait table rase de tout son bourg, se voyait l'objet de bien d'ouvrages. Les châteaux d'Essenburg ou Nebelheim ayant eut à souffrir à grand foison, se voyait engagés à devenir de puissantes forteresses. Il était même question des cols et des cours d'eaux, où on comptait bien les rendre aussi défendable que la terrible cité d'Oesgard. Plus loin encore, il y aurait même en Alonna quelques ouvrages et non moins en Adurie où l'on comptait faire s'élever fortifications sur la route menant à l'Estrévent.

-"Quel serait donc l'usage que tu pourrais faire de des talents ? Il ne manque certes pas d'artisans à mon service capable de bâtir des arbalètes de tours ou de faire s'élever des murailles."

Goar attrapa les parchemins qu'un serviteur lui avait apporté. Il y devinait les constructions que les croquis sur le vélin se devait de représenter, surtout pour ce qui était des armes de sièges, cependant il n'eut plus de sapience pour en saisir le sens artisanal. Après avoir passer quelques temps à étudier ces papiers il les passa à Arnoul, qui se lança dans une étude plus approfondi de ces documents. Le roy ne douta pas qu'il y aurait là moult machine suderonne sachant l’impressionner, cependant il eut quelques dédains à imaginer des armes d'origines méridionale en son royaume. Non qu'il n'eut quelque apathie pour les terres du méridion, mais ces dernières étaient davantage connu pour être terres de marchands et de sorciers qu'une terre de chevalerie ou la guerre se devait d'être un noble art.

- "J'aurais sûrement grand plaisir d'un beffroy et d'une trébuchet lors d'un siège", lança Goar à la cour, désireux d'initier le rire (qui fut suivit, aussi bien naturel que forcé), "Je n'ai la sapience en l'artisanat pour parvenir à saisir quels importances auraient ces armes du sièges du méridion par rapport à celle que nos artisans se savent déjà construire. Je mirous cependant quelques habile moulin à eau dont je n'ai guère comprit le sens n'ayant que peu usage de travailler au moulin."

Le Roy prenait un certain plaisir à comprendre comment fonctionner ces choses de la vie commune de ses sujets, sans en saisir parfaitement tout les nuances et usages qu'on pouvait en faire. Pour lui un moulin ne se résumer après tout qu'à moudre du blé pour en faire de la farine, les roulis de sa mécanique restait encore pour lui d'un grand mystère.

- "Je ne comprends que bien peu ces sapientes mécaniques que tu me présente mais j'ai grande fiance qu'il y a bel ouvrage du méridion. Point de méprise pourtant, nous sommes ici en fort pays de castels et non en pays de palais comme on dit être le sud. Qu'est ce donc que ces moulins et autres artisanat à la conception si ombreuse ?"

Sa majesté restait quelques instant à s'imaginer les grands moulins de Dormmel, il avait déjà quelques moulins qui tournait à l'eau, quant aux machines de sièges, la Sgarde était certes un pays ou la guerre se devait de se marier à la sapience mécanique. Ce n'était certes pas ces simples présentations qui avait su trouver auprès du monarque quelques intérêts, c'était plutôt l'homme. Pétris d'expérience à ses dires, il était sûrement vrai qu'il avait su voir et bâtir de grandes choses. Son orgueil piqué de vouloir son royaume plus grand et plus beau que même les saltimbanques ne saurait exprimer son règne, la chose était fait.

- "Gentilz maître artisan, j'aurais de mon Chambrier qu'il vous délivre une lettre de maîtrise pour que vous vous puissiez d'exercer en notre royaume."

Goar donna ses ordres à ses clercs puis se tourna vers Arnoul, qui manifestait lui aussi un certain intérêt pour l'artisan songeant aux grands travaux qui était alors déjà en cours.

- "Mon gentilz ami, fait en sorte que ce aimable maître artisan soit au mieux de pouvoir faire montre de sa sapience, j'ai grande foi en ses compétences, il me serait désagréable de savoir qu'elles ne sont pas employés de la meilleur des façons."

Goar faisant signe qu'il en avait finit, se leva de son trône, il entendrait les autres réclamations un autre jour. Il lui venait à présent envie de partir chasser l'après midi aux côtés de ses chiens et de son lion à corne. La volonté du roy ne sachant souffrir la patience, il disparu de sa cour avec son proche entourage laissant derrière lui Arnoul avec ses directives.