Une alliance. [Jérôme]

Aux alentours du 20eme jour de Bàrkios, an 7 du 11ème cycle.

Le temps est quelque chose d'étrange. A certains moments il est très lents et vous en êtes à vous demander si un plaisantin ne l'a pas arrêté et à d'autre, il défile tellement vite que vous n'avez pas le temps de faire tout ce que vous auriez envie. Jérôme se trouvait dans la deuxième spirale ces derniers temps. Entre des messages d'Etherna dans lesquels on lui demandait son avis et Bastylle, nouvellement conquise, il ne savait plus ou donner de la tête. Il s'était bien entendu montré au mariage de Nestor et de sa cousine scellant ainsi l'entente entre les deux familles qu'étaient Versmilia et Clairssac. Tout se passa pour le mieux, les mariés semblaient radieux, joie réelle ou pas vu que c'était un mariage arrangé. Toujours est il que l'héritier et le baron s'entendaient très bien et trouvaient souvent des sujets de conversations qui les intéressaient tous les deux et pas juste pour le protocole.

La chasse aux bandits était également prenante, les cavaliers écumaient la région à la recherche des campements. Une carte avait été dressée pour indiquer les lieux ou les pillards frappaient et tenter de les situer grâce à d'ingénieuses déductions. Lorsqu'on parvenait en dénicher un camp, il était mit sous surveillance le temps que d'autres cavaliers ou fantassins arrivent pour l'éradiquer. Puisque le baron avait donné une chance de se racheter en changeant de style de vie, aucun quartier n'était fait aux gueux qui se permettaient de propager le feu et le sang sur le marquisat. Des convois venaient régulièrement en provenance d'Etherna afin d'aider Bastylle à se redresser. Le baron faisait des allers venus chez les nobles afin de les rencontrer et apprendre à mieux se connaitre mutuellement.

Maélyne d'Outremont était très retournées suite au décès de sa sœur et depuis l'enterrement auquel Jérôme avait naturellement assisté, il n'avait plus guère de nouvelle. Pourtant, les deux nobles s'étaient fort bien entendus et il y avait la quelque chose à faire mais le nouveau seigneur de Bastylle ne désirait pas forcer les choses et passer pour un être qui ne pensait qu'à lui. Lorsqu'on lui indiqua que la dame de Lourmel était arrivée et désirait s'entretenir avec lui, il fut agréablement surprit. Elle avait de la chance qu'il soit présent mais l'hiver qui approchait ralentissait ses visites et il se préparait pour l'endurer. Il ne se permit pas de la faire attendre, elle fut introduite dans un salon de petite taille, plus "intime" et douillet, un feu ronflait dans la cheminée et les fauteuils présent à côté de l'âtre semblait confortables.

Maélyne lui parla et l'appela par son prénom, preuve du rapprochement qu'il y avait eu. Elle fit allusion à leur récente entente et le remercia pour son aide. Jérôme avait toujours l'échec de la disparition de sa jumelle sur le cœur. La joie qu'il avait eut lorsqu'elle avait été libéré grâce à la participation de Valerian, châtelain de Sainte Berthilde avait été réelle et le décès un coup dur pour le moral. Enfin il n'en montrait rien afin de ne pas accabler la pauvre femme qui était face à lui. La moindre des choses à dire, c'est qu'elle ne ressemblait plus à celle qu'il avait vu pour la première fois à Serramire. Elle semblait beaucoup plus renfermée sur elle même et il était bien en peine de connaitre son état d'âme. Il se permit de lui sourire mais d'un sourire moins chaleureux qu'il l'aurait voulu, non pas qu'il n'appréciait pas de la voir mais c'était surtout un rictus de soutien ainsi qu'une marque de son respect et ses bonnes intentions à son égard

"Voyons, il n'y a aucun merci à donner. Notre collaboration à très bien fonctionné et cela dans les deux sens. Je suis ravis d'avoir pu m'associer avec vous."

Il invita Maélyne à s'assoir et s'installa lui même dans l'un des fauteuils

"C'est un réel plaisir que de vous voir ici. Mais si vous me permettez, qu'est ce qui me vaut votre visite ? non qu'elle me déplaise."

Les banalités d'usage avant d'entrer dans le vif su sujet.

Maélyne demanda si son intendant pouvait entrer et se joindre à la conversation. Jérôme n'y vit bien évidemment aucun inconvénient mais il se mit sur la réserve, du moins intérieurement. Apparemment, la dame n'était pas venue pour une visite de courtoisie si elle faisait ce genre de requête. L'homme entra, le baron se souvenait l'avoir vu à Lourmel lorsqu'il était allé en compagnie de l'ancienne marquise chercher l'appui des seigneurs de la châtellenie. Tout indiquait son âge avancé, que ce soit sa chevelure blanche et d'une longueur plus que respectable aux traits de son visage qui démontraient qu'il avait vécu bien des épreuves. Il devait sans doute être des plus sage et avisé pour que la nouvelle dame de Lourmel ne le prenne comme conseiller.

Maélyne le présenta, il s'agissait de l'intendant de Lourmel, un certain Céodred de Forgestrange, seigneur du domaine du même nom. Elle indiqua qu'ils devaient clairement discuter et elle se lança. Jérôme l'écouta attentivement, ne l'interrompant pas mais ses sourcils se fronçaient au fur et à mesure qu'il réfléchissait et assimilait ce qu'on lui disait. Lourmel avait été épargné, plus que Bastylle et Versmilia c'était certain vu que les deux s'étaient heurtés à la conquête des troupes venus d'Etherna. Brochant également s'en était bien tiré mais il n'avait pas fait d'efforts comme promis pour lutter contre le brigandage sur ses terres, surement trop occupé par ses nouvelles fonctions de marquis.

Puis elle changea et dirigea la conversation sur Brochant et sa crainte de le voir accéder au titre qu'il convoitait apparemment énormément déjà avant. Elle voulait donc officialiser le rapprochement entre Lourmel et Bastylle avançant que cela stabiliserait le marquisat. Il était certain qu'en plus de cela, le mariage entre les Clairssac et les Versmilia favoriserait ce climat d'entente et réduirait au minimum les intentions belliqueuses des seigneurs entre eux.

Un silence s'installa, le temps que Jérôme réfléchisse. Il avait également de souvenir bien amer de sa dernière tentative pour voir Brochant et qui s'était soldé par un échec.

"Lors de notre première rencontre, vous m'aviez déjà fait part de vos craintes concernant le marquis de Brochant. J'avoue tristement qu'il m'a fait des serments qu'il n'a pas tenu. Heureusement, nous n'avons pas décimé la noblesse bastylloise, surement à son grand dam vu ses envies de revanche déplacées."

Comment Jérôme pouvait renier ses serments, lui qui plaçait toujours son honneur sur un piédestal. Il se souvint de sa conversation avec sa sœur et il fit un sourire qui lui était réservé

"Aymeric est des plus décevants, je dois bien l'admettre et je prends donc pleinement en considération votre envie de vous mettre à l’abri de ses possibles représailles futures. Je n'avais pas perçu le côté sournois de l'individu et ses belles paroles m'ont embobinées, j'en suis navré. Sinon, pour moi, il existait déjà un rapprochement entre nos deux personnes et de ce fait, entre les fiefs sous notre responsabilité. Mais si vous désirez l'officialiser, ce sera avec joie. Plus nous monterons que nous sommes forts et moins il y aura de tentatives pour nous désarçonner et nous affaiblir. Qu'avez vous en tête ?"

Il s'était permis de l'appeler par son prénom, l'homme ayant perdu toute considération pour le baron. Il marqua une courte pause

"Vous qui connaissez l'individu mieux que moi, pensez vous savoir quelles sont ses préoccupations maintenant qu'il a réussit à se hisser à la tête du marquisat ? Savez vous que j'ai tenté de le rencontrer et qu'il a refusé de me recevoir et de me parler ?"

Le fait d'avoir été repoussé ainsi avait grandement entamé la bonne volonté de Jérôme concernant les efforts à fournir. Il avait encaissé mais il l'avait toujours en travers de la gorge.

Maélyne se fit donc un devoir d'expliquer à Jérôme ce qu'elle savait sur le marquis en place. Le moins que l'on puisse dire, c'est que l'on naviguait dans un banc de requin à cette époque toute proche. Il ne faisait pas bon être l'ennemi ou le rival sous peine de finir empoisonné ou discrédité. L'on touchait même à la famille afin d'arriver à ses fins, chose que le baron ne pouvait pardonner. Heureusement, il semblait que tout cela n'était pas non plus du gout de la dame de Lourmel, qu'elle était en désaccord avec les agissements qui eurent lieu, le comportement de sa propre mère et de son époux. Quelle tristesse pour elle de s'être retrouvée au cœur de toutes ces machinations.

"Voila une histoire des plus rocambolesques, ce monde de la noblesse, qui est malheureusement le notre, est bien cruel."

Il avait été élevé pour diriger une terre, aussi Jérôme avait reçu l'éducation qu'il convenait et savait parfaitement ce qu'exigeait la politique et l'ambition mais il ne pouvait dignement l'accepter sans une pointe de dégout.

"Je comprends maintenant mieux vos craintes. Vous voila donc la dernière représentante de sa déchéance et la première sur sa liste s'il veut effacer l'affront qui lui a été fait. Entre votre mère qui l'a trahit et votre époux qui faisait parti de la famille de Bastylle, il a un double intérêt à vous voir disparaitre."

Les tenants et les aboutissements devenaient clairs, les nœuds se défaisaient et il n'arrivait pas à croire ce que son cerveau lui mettait sous les yeux

"Il m'avait paru beaucoup plus sympathique lorsque nous nous sommes rencontrés. Je suis de nature à voir le bien en chacun, j'en ai conscience mais rarement je me suis autant trompé sur quelqu'un."

Il regardait Maélyne de ses yeux bleus, une flamme invisible bien entendu au fond de ses prunelles, rageant contre lui même de s'être fait abusé de la sorte par Brochant. L'homme était tellement ambitieux qu'il ne reculerait devant rien, ni aucun mensonge ?

"Aux vus de tout cela, je ne peux que vous exhorter à la prudence si vous décider d'aller le rencontrer. Il sera forcément plus fort dans les murs du château de Serramire que chez vous, du moins s'il accepte de vous rencontrer. J'avoue que ce qu'il m'a fait endurer sonne pour moi comme un outrage cuisant."

ses points se serraient sur les accoudoirs du fauteuil

"En tout cas, je comprends mieux votre envie "d'officialiser" notre entente. Ainsi, il devient plus embêtant de trouver une excuse pour vous discréditer ou vous pousser dans vos retranchements. Quel dommage que nous ne nous soyons pas rencontré avant que vous n'abdiquiez, les choses auraient sans doute été autrement."