Wenceslas de Karlsburg
Ancien
Nombre de messages : 115 Âge : 34 Date d'inscription : 17/07/2013
Personnage :.: MANUSCRIT :.: Âge : 28 ans Taille : Niveau Magique : Non-Initié.
| Sujet: L'éveil de l'Arétan Dim 27 Oct 2013 - 17:50 | |
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Sous une pluie battante, une demi-douzaine de cavaliers provenant du Médian traversèrent au galop le village d'Ormesson et poursuivirent leur route pendant deux bonnes heures. Sur leur passage, les quelques badauds qui s'aventuraient au-dehors par ce temps s'arrêtèrent pour les regarder passer. Montés sur les robustes chevaux du pays arétan, ces cavaliers arrivant par le sud n'étaient pas des étrangers, mais bien des hommes du nord rentrant au pays. En attestait, brodé sur la cotte du meneur de la troupe, l'Aigle emblématique de la maison de Karlsburg. La butte sur-laquelle ils firent halte leur offrit une vue imprenable sur les vastes plateaux arétans qui s'étendaient presque jusqu'à perte de vue, où commençait à se dessiner un horizon de forêt.
- Vous êtes chez vous, Votre Grandeur, dit le cavalier qui se tenait à droite du meneur. Tout ce qui s'étend à perte de vue vous appartient, désormais.
Silencieux, le seigneur à l'Aigle descendit de selle et posa enfin pied sur sa terre. Du fait du mauvais temps, celle-ci était boueuse et il embourba ses bottes jusqu'à mi-cuisse, mais cela ne sembla guère l'affecter. Il aurait aussi bien pu tomber dans la merde qu'il n'en aurait pas bronché pour autant : Wenceslas de Karlsburg, Comte d'Arétria, était de retour au pays, un pays qui, en son absence, était devenu sien. Le silence s'étendait sur les plateaux arétans. On n'entendait que le souffle des chevaux et la respiration des hommes du Comte, tandis que Wenceslas s'agenouillait et ramassait une poignée de terre. Les cavaliers se taisaient, laissant leur seigneur et maître se recueillir comme il l'entendait. Des efforts de son père pour s'accaparer la suzeraineté des maisons arétanes, Wenceslas avait hérité d'une terre aride et sèche, impropre à la culture, et pourtant c'était la pluie qui accueillait son retour aujourd'hui, comme un signe des dieux qui annonçait son début de règne sous les meilleures auspices.
- Repartons, décida-t-il après quelques minutes.
Il remonta en selle, et le petit groupe de cavaliers reprit sa route un moment. Ils traversèrent la plaine, interminables étendues si familières et dont il avait tant rêvé lors de son séjour en Velteroc. La pluie cessa, et le soleil du midi daigna se montrer, timidement. Alors le terrain se fit plus accidenté, et c'est en parvenant à un abaissement de terrain que le Comte découvrit, rassemblée en bon ordre, une armée de près de douze cent hommes. Jamais le petit seigneur de Karlsburg n'avait commandé tant d'hommes sur un champ de bataille; mais le Comte d'Arétria en dirigerait cinq fois plus, une fois ses forces regroupées et les villes arétanes rassemblées dans son giron. Pour la première fois, Wenceslas sourit.
- Tu m'as bien servi, mon cousin, lança-t-il au jeune cavalier qui depuis le début chevauchait à sa droite. Toi et ton père, vous m'avez été fidèles. Je ne l'oublierais pas.
A l'heure où il aurait à redistribuer les possessions de ceux qui avaient eu la bêtise de lui tourner le dos, Wenceslas penserait évidemment, en premier lieu, à ceux qui partageaient avec lui le lien du sang. Sa famille occupait depuis toujours une place modeste parmi les maisons arétanes. Il allait maintenant travailler à l'élever et à la maintenir au sommet.
Lorsqu'il chevaucha en direction de son armée, une clameur s'éleva dans les rangs pour l'accueillir, une clameur telle que le comte, guère habitué à se voir témoigner telle marque d'affection, manqua de défaillir. Comment tant d'hommes pouvaient se tenir là, aujourd'hui, jurant fidélité à un seigneur maigrichon qui ne devait son titre de Comte que parce qu'il l'avait quémandé à une grande dame qui vivait à des jours et des jours d'ici ? Il le devait à ceux de ses vassaux qui avaient, les premiers, choisi de compter sur lui. En premier lieu Roderik de Wenden, son cousin maternel, qui avait ramené la plupart des hommes présents ce jour-là dans la plaine. Il fut bien naturel que Roderik soit des premiers à se diriger vers lui.
- Votre Grandeur, soyez le bienvenu en Arétria, lança-t-il lorsqu'il parvint à sa hauteur.
Si Wenceslas avait grandi avec ses cousins paternels, c'était la première fois que Roderik et lui se rencontraient en personne. Nul doute qu'en d'autres circonstances, ils ne se seraient pas reconnus tant il était peu évident qu'ils aient un lien de famille. Wenceslas était maigre, de petite taille, laid de visage et la mine sévère; Roderik était grand, solidement bâti et avait des traits bien plus avenants, respirant une certaine jeunesse tout en lui donnant une vraie allure de seigneur. Il ressemble plus à un Comte que moi, songea Wenceslas. Le genre de seigneur que les hommes de guerre aiment suivre. Il me suivra tant qu'il y aura intérêt, et se retournera contre moi dès lors qu'il pourra y gagner davantage. Il me faudra le ménager... et m'en méfier. Roderik avait déjà su négocier son allégeance avec les cousins du Comte. Sa participation dans la reconquête du pays lui octroyait de droit un siège au conseil, et il avait déjà laissé entendre qu'il souhaitait voir sa sœur mariée à Wenceslas.
Le Comte passa en revue l'ost rassemblé sous ses ordres. Les bannières de nombreuses maisons arétanes s'étaient levées pour accueillir son arrivée. Un signe que nombre de seigneurs avaient fini par désirer que le chaos et l'anarchie, qui secouaient le pays depuis qu'Arétria n'avait plus de maître, prenne fin. Pour autant, il avait été difficile de convaincre la plupart d'entre eux d'ouvrir leur cassette pour payer la rançon d'un suzerain qui s'était laissé capturer avant même d'être rentré sur ses terres. La mésaventure de Wenceslas en Velteroc avait retardé son retour et ne lui avait pas fait bonne réputation. Par chance, il avait pu compter sur de bons alliés, et les choses s'étaient mises en place en son absence. Mais le prix de la rançon avait porté un coup sérieux aux finances du comté, qui ne brillait déjà pas par sa richesse. Et c'était là autant d'or qui finançait les opérations douteuses du comte de Velteroc dans le nord. Une fois l'ordre rétabli en Arétria, il lui faudrait faire face à cette autre menace. Les choses auraient pu être plus simples, si Wenceslas avait choisi de rejoindre les bannières de ceux qui refusaient la légitimité du Roi Bohémond et l'autorité de la régente olysséenne; mais il n'avait pu se résigner à trahir la femme qui l'avait fait Comte d'Arétria. La parole qu'il donnait, Wenceslas la respectait, pour le meilleur et pour le pire.
- Mettons-nous en route pour Arétria-la-ville, dit le Comte. Il me tarde d'être enfin chez moi.
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