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Phar'roos
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MessageSujet: La réclamation   La réclamation I_icon_minitimeVen 20 Mar 2015 - 18:37

      Au cœur du quartier militaire de Sol’Dorn, l’antique Forteresse de l’Ost se morcelait irrésistiblement. C’était un fait admis, et toutes les forges du quartier, les tanneries et les armureries qui s’adossaient à ses remparts, et toute la fange des miséreux qui vivotaient dans son ombre, tous avaient appris à reconnaître le claquement d’une pierre qui se dérobe sous une échauguette, ou d’un étançon qui prend le large entre deux murs soudain ondulants. L’érosion de ce bastion eldéen rythmait la vie de Sol’Dorn. On écoutait craquer les souvenirs d’un Ost maintenant démantelé, désarticulé, et réimplanté dans les despotats qui se chamaillaient aux portes de la cité. C’était le cliquetis de la rocaille qui rebondit sur la rocaille, tandis que les tourelles aiguës s’effondraient inéluctablement. Mais aujourd’hui pourtant, de l’aube jusqu’au soir naissant, aucune oreille n’avait pu manquer le nouveau bruit qui était apparu, au milieu de la cacophonie du bastion qui tombait en miettes – un tintement orgueilleux, celui des piécettes, le bruit de l’or.
      Au sommet de l’aile Ouest – la dernière encore occupée – une table de vieux bois équarri branlait sous le poids des richesses accumulées. Par-dessus, on voyait dix doigts crochus, portés par deux mains avides ; puis des bras filiformes, des épaules effacées, un cou interminable – et enfin une face anguleuse, étirée, et rongée d’avidité. Car tel était Waer’jss Hla’zynge, le capitaine de la garde de Sol’Dorn. Non loin de lui, nonchalamment adossé à un mur de pierre sale, se dépliait la silhouette zigzagante de Houn’ue, l’un des boscos de la garde, à la poigne affirmée. Et leurs quatre yeux de Drows, gorgés d’avarice, convergeaient vers l’amas de piécettes qui moutonnait sur la table.
      Aujourd’hui, en effet, la garde évaluait les concessions de pontons pour le port fluvial – pourtant à peine sorti de terre. Ils n’avaient pour l’heure à attribuer que trois diguettes mal étayées. Pourtant, déjà, les armateurs thaaris avaient déversé des torrents d’or aux pieds de la garde. Que ce bel éclat jaune soit un réconfort pour des esprits accaparés par leurs lourdes responsabilités, c’était là le vœu tout innocent des marchands thaaris.
      Mais l’apaisant mutisme de l’or immobile, lui dont on sait qu’il ne s’enfuira pas, fut d’un coup rompu. C’était un cri, déchirant, plein de sang, qui transperça le silence comme un coup de javelot.

      Waer’jss bondit à la fenêtre, et Houn’ue derrière lui. De là ils contemplaient le quartier militaire, avec ses toits aux tuiles tanguant, et ses ruelles qui louvoyaient entre les masures en ruine. A gauche, à droite, de partout, d’autres cris s’élevaient et faisaient écho au premier. Les impasses s’agitaient de mouvements confus, des silhouettes s’entrechoquaient partout, certains tombaient à genoux. Les Drows furent rapides pour humer, avant même de le voir, l’odeur du sang : c’était le fumet vif et picotant qu’exhale la chair tout juste tranchée. En bas du bastion, dans toutes les ruelles, des miséreux portaient les mains à leur visage, en hoquetant de douleur.
      « Waer’jss ! appela Houn’ue, en pointant un doigt blanchâtre. »
      Des masses épaisses étaient apparues entre les masures, comme des colosses féroces. Ils avaient les épaules larges, et légèrement affaissées, de ceux qui ont longtemps porté les armes. Il en émergeait de nouveaux, depuis les coupe-gorges et les culs-de-sac – et tous, ils convergeaient vers le bastion.
      « A la garde ! tonna Houn’ue, son épée déjà tirée, prête à frapper.
      — Non,
l’arrêta Waer’jss d’une voix sans appel. »
      Le chef de la garde balayait les ruelles de ses yeux de bête fauve. Sur le pavé glaiseux du quartier militaire, les mystérieux agresseurs levaient leurs figures goguenardes vers lui, en signe de défi. Aucun de ces visages n’était inconnu de Waer'jss. Bien sûr, les années avaient fait leur ouvrage, elles avaient labouré ces fronts, buriné ces faces – mais on reconnaissait encore les anciens guerriers de Sol’Dorn.
      « Laisse les monter, gronda Waer’jss. »
      Il s’était détourné de la fenêtre, vers laquelle s’élevaient encore les gémissements des miséreux, en contrebas de la forteresse. Waer’jss balaya du plat de son épée les montagnes d’or qui appesantissaient la table de bois, et d’un coup de talon, il la renversa devant lui pour élever une barricade. Houn’ue le rejoignit, l’épée toujours nue dans sa main droite, et la gueule agitée de spasmes nerveux.

      Il ne fallut pas trois minutes aux vétérans pour s’engouffrer dans la forteresse, et en gravir les escaliers quatre à quatre : ces couloirs, ces corridors, ces colimaçons, ils les connaissaient fort bien, pour les avoir parcourus de longs siècles durant. En quelques instants, la porte de bois fut abattue d’un coup d’épaule, et dans l’encadrement apparurent ces silhouettes rejaillies du passé. Baen’t’tar, Auvryth, Do’ghym… sur tous ces visages grondeurs, Waer’jss pouvait encore mettre un nom. Sa main gauche s’agrippa fermement au bord de la table renversée, les jointures blanchies par la contraction.
      Il n’y eut pas un salut entre les deux factions, se toisant de part et d’autre de la pièce exiguë. Le premier des vétérans, Baen’t’tar, rejeta sa capeline en arrière, et plongea une main dans ses poches rougies. Il en tira alors – des oreilles. Un sursaut nerveux agita Houn’ue. C’étaient en effet des oreilles, quatre ou cinq, assez peu effilées, de couleur rosâtre, tendant sur le beige ou le gris. Des oreilles fraîchement tranchées, à n’en pas douter. Des oreilles de métis.
      Le deuxième vétéran écarta lui aussi sa capeline, plongea une main dans ses fontes, et en sortit à son tour quelques oreilles. Le troisième fit de même. Puis vint un quatrième, un cinquième, et d’autres encore – et ce qui n’était qu’un petit tas d’oreilles, devint rapidement un monceau sanguinolent de chairs coupées à vif. C’étaient toutes des oreilles imparfaitement effilées, des oreilles de sang impur – des oreilles d’Ithri’vaan.
      Alors seulement, en fin de cortège, apparut Phar’roos. Sa petite stature dénotait parmi les Drows aux silhouettes puissantes et racées, qui l’encadraient de part et d’autre, comme une meute. De ses courtes mains aux doigts charnus, la matrone jeta elle aussi sa pluie d’oreilles bâtardes, achevant de constituer la colline de viande amassée au milieu de la pièce. Les yeux de la Drow de mauvaise naissance soutenaient fièrement le regard du chef de la garde, et elle cracha de sa voix grave, relevée de l’accent d’Elda :

      « Tu as mal tenu ces pierres qu’on t’a laissées, Waer’jss. »


Dernière édition par Phar'roos le Sam 4 Avr 2015 - 10:15, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: La réclamation   La réclamation I_icon_minitimeLun 23 Mar 2015 - 23:50

      Ffyn risqua la pointe de son nez hors du gourbi où il se terrait. On vit deux narines poilues humer l’air rance qui baignait le Quartier militaire. Alors seulement, comme une flaque d’huile, Ffyn déplia sa silhouette et parut dans la ruelle. Il avait le teint blafard, le nez aplati, et les yeux écrasés de ceux nés pour gémir. Sa trogne terne comme la pierre, et ses loques élimées par les ans, le fondaient dans les murs gris, et sales, et laids, des bicoques mal branlées qui s’élevaient encore autour du Bastion. L’être veule crachota une prière à Teiweon – car Ffyn était aspirant, à jamais aspirant, dans le culte de Sol’Dorn – et il entreprit de se couler vers l’antique forteresse du Quatrième Ost, sinistre avec ses tours en ruines.
      C’est qu’il fallait être prudent, à présent. Le couinement de ses galoches sur le pavé le lui rappelait à chaque instant, comme luisaient encore çà et là des reflets sanglants sur la chaussée. Trois jours à peine avaient passé, depuis que les brutes d’Elda étaient reparues dans Sol’Dorn, et qu’elles avaient tranché toutes ces oreilles. Une odeur de chairs flétries s’appesantissait encore sur les ruelles et les coupe-gorges qui serpentaient le long des flancs du Bastion. Mais en trois jours à peine, les Puysards avaient renversé le petit monde vivotant dans ces ruines. L’aile Sud avait été purgée de ses nuisibles, tous refoulés hors des remparts ; quelques mauvaises gueules, à la peau trop rose, aux oreilles trop rondes, avaient été écorchées sur le champ. Dans les salles les plus crasseuses, celles où la vermine s’était sédimentée pleinement, on avait joué de la torche pour purifier. Quelques étançons avaient été arrachés aux baraques proches, également, pour venir renforcer à la hâte les échauguettes qui tanguaient le plus. Enfin, sur une tour crénelée qui perdait ses pierres, on avait replanté une bannière – un tissu noir et gras, maculé de rouge, mais qui clapotait fièrement dans le vent. Qu’on le colporte dans tous les bouges : Elda était revenu à Sol’Dorn.

      Ffyn avisa une poterne dérobée, qui perçait le rempart du fort, et il s’y faufila. C’étaient des corridors sauvages, souvent des coulées de brigand, percées à travers les murs par quelques adeptes du négoce discret. L’aspirant de Teiweon connaissait ces dédales, car voilà plusieurs années qu’il les pratiquait. La forteresse en déliquescence s’était faite, avec le temps passant, le point de ralliement de nombreux complots ourdis à Sol’Dorn ou dans les despotats. Et justement, si aujourd’hui Ffyn se glissait silencieusement entre les pierres, c’était pour rencontrer quelques comparses aussi sinistres que lui.
      Il avala une volée de marches, laissant derrière lui les ailes Sud et Sud-Est, pour s’élever vers des mâchicoulis fortement érodés. C’était une des dernières tourelles encore vaillantes que Ffyn et sa bande avaient élue comme repaire. On y accédait par un colimaçon fracassé, dans l’ombre duquel s’activaient quelques tarentules. L’aspirant bondit par-dessus les marches brisées, continua de grimper, et il pénétra dans la petite pièce qui coiffait la tour.

      « Compagn… »
      Une rossée lui entra dans le ventre, et lui cisailla le souffle. Ffyn eut un instant de répit pour embrasser du regard le désastre – ses trois comparses retenus, l’un d’eux éventré sur le sol, un autre affaissé dans un coin, et le dernier pressé contre un mur, le visage écarlate – avant qu’une nouvelle torgnole ne lui écrase la face contre terre.
      « C’est lui, le prêtre ! glapit celui qu’on asphyxiait, les veinules rouges et prêtes à claquer. C’est lui ! J’ai … »
      La suite se perdit par la fenêtre, comme on l’envoyait rejoindre le pavé par la voie directe. Un horrible cri se perdit dans les airs, vite emporté par le vent, tandis que le malheureux allait se briser les os contre un toit en ruines. Le corps craqua mollement sur la pierre corrodée.
      Ffyn avait à peine relevé les yeux. Entre les filets de sang qui lui barraient le visage, il saisit une meilleure vue de la scène qui se jouait dans la petite pièce. Il y avait là, en plus de ses deux compagnons inertes, cinq Drows, tous puissamment bâtis. Ils avaient le front large et fier, mais un teint de peau pâlot, comme si l’Ithri’vaan avait eu raison d’un peu de leur pureté sanguine. Leurs mains calleuses ne s’embarrassaient pas de quelconques armes, lesquelles restaient nonchalamment pendues à leurs ceinturons grossiers. Dix regards torves auscultaient la silhouette tremblotante de Ffyn.
      Alors une main saisit l’aspirant du sol, et le plaqua à son tour contre le mur. C’était une sixième silhouette, qu’il n’avait pas remarquée jusqu’à présent. Cette dernière était métisse ou bâtarde, avec des bras trop courts qui portaient des mains trop larges. Sous son front blanchâtre, deux yeux grondaient d’avidité.
      « Es-tu prêtre au temple de Teiweon ? s’enquit la petite Drow. »
      Ffyn tremblotait de frayeur. Mais il avait l’instinct veule des bêtes misérables, celles qui savent comment déceler une chance de survie partout où elle se laisse apercevoir. Il hésita une seconde, puis couina :
      « Aspirant, Jabbress. »
      Les titres clinquants du Puy ne pouvaient pas mal faire. Il y eut un silence, lourd comme l’orage, mais Ffyn frémissait déjà moins : dans les yeux aigus de la Drow, sous sa moue menaçante, il avait deviné l’étincelle opportuniste qui lui vaudrait – pour cette fois – la vie sauve.
      En effet, la Drow desserra légèrement son étau sur la gorge du misérable. Elle interrogea à nouveau :
      « Et Tsabrak ? Est-il encore dans le temple ?
      — Le grand prêtre ?
frétilla Ffyn. »
      Alors l’emprise de la Drow se relâcha, à peine maintenait-elle encore l’aspirant contre le mur. Sur les joues de Phar’roos – car c’était bien elle – un sourire carnassier vint relier ses deux oreilles mal effilées. Sa voix grave se fit gourmande, jouisseuse :
      « Ainsi Tsabrak est encore grand prêtre. »

      L’empoigne de la Drow se retira complètement, laissant Ffyn libre de déglutir six ou sept fois, tandis qu’il se massait la gorge de ses doigts grisâtres et gourds. Ses yeux à l’affut balayèrent les deux recoins où gisaient ses autres compagnons – mais les glougloutements rougeâtres, qui suintaient autour de chacun d’eux, lui firent vite saisir que ces deux-là ne se relèveraient plus. Alors l’aspirant ramena son visage médiocre vers Phar’roos, dont il scrutait le profil taillé à la serpe. Ffyn ignorait ce qui pouvait relier cette matrone à Tsabrak, le grand prêtre dans le culte de Teiweon. Mais – et c’était là son instinct de bête traquée qui parlait – il se dit que, s’il jouait suffisamment serré, peut-être s’en tirerait-il en vie. Ou à peine allégé de quelques doigts.
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May'Inil Baenrahel
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MessageSujet: Re: La réclamation   La réclamation I_icon_minitimeSam 28 Mar 2015 - 18:55

« Le quartier militaire est devenu hors de contrôle. On ne peut plus y mettre un pied sans risquer de se faire ouvrir la gorge !
-Parce qu'avant cela on pouvait ?
-Ne sois pas cynique, Jahred. Tu sais très bien ce que je veux dire.
-Le fait est qu'une situation déplaisante, mais sous contrôle, est devenue parfaitement ingérable. Même la garde est dépassée.
-Et rien ne nous dit que ça ne s'arrêtera là.
-Cesses tes croassements de mauvais augure, Des'qar, ce n'est qu'une bande de soudards mal dégrossis, ils ne dépasseront pas les limites de leur pitoyable taudis.
-N'en sois pas si certains, leur réputation...
-Leur réputation est vieille ! Même toi n'étais qu'à peine né quand ils ont émigrés au Puy.
-Mais ils en sont revenus. Et je doute que ça ne soit que pour se terrer dans une forteresse à moitié en ruine et couper les oreilles des miséreux.
-Exactement ! Par Meingal, il nous faut arracher ce mal à la racine !
-Et donner l'assaut sur la forteresse de la garde ? Avec quelle armée d'ailleurs ? Tu es fou. Lars, ne me dis pas que tu le soutiens quand même.
-Pas vraiment. Les éradiquer semble tout à fait hors de notre portée. Mais il ne faut pas nous laisser aller à l'indolence pour autant. Renforçons nos rangs, tâchons d'en apprendre plus sur ces revenants, sur leurs buts et assurons nous de ne pas voir le nombre de nos alliés trop se dégarnir, si jamais il y avait besoin. Mais évitons de recourir à la violence, notre but premier est de maintenir le commerce. Si les rues venaient à être le théâtre des règlements de comptes entre factions...
 »

Il n'eut pas besoin de terminer sa phrase pour que les trois sang-mêlés se plongèrent dans la réflexion. Ils n'étaient guère nombreux ces jours-ci puisque nombre de leurs confrères vaquaient à leurs occupations, qui les maintenaient ordinairement occupés entre Thaar, Sol'Dorn et les plus lointaines terres sous l'influence de la cité libre. Et il avait évidemment fallut que cette bande de puysards choisisse ce moment pour revenir. En temps normal, ils auraient pu compter sur leur habituel soutien drow, mais celle-ci était encore introuvable à l'heure actuelle. Les dernières nouvelles qui étaient parvenues d'elle dans la cité faisait état d'un passage à Naelis après avoir quitté Thaar, à son retour de péninsule. Où ses actes avaient par ailleurs fait grandement parler d'eux et il était inutile de dire que les opposants attendaient la prêtresse au tournant. Et tous trois, qui la connaissaient mieux que bien des dorniens, se doutaient que cela n'allait pas s'arranger de sitôt.

« Espérons que les prochains jours amènent un peu plus de sens à tout ceci. Je n'aime guère cette situation. » lâcha finalement le dénommé Des'qar, récoltant l'approbation silencieuse de ses confrères, avant de décider qu'il en avait fini et de se lever pour quitter la pièce puis la demeure de Lars, où s'était tenu la réunion.

C'était un petit manoir sur les bords de l'Oliya, non loin des tous nouveaux quais, à l'orée du quartier doeben. Sans doute par son aspect quasiment humain -seuls deux oreilles pointues le distinguaient vraiment- le marchand avait-il choisit de rester plus proche de ce qu'il considérait plus volontiers comme ses confrères. Des'qar, à l'inverse, semblait ne même pas avoir de sang humain : grand, musclé, la peau plus foncée que le plus noir des zurthans, des cheveux ivoires coupés courts, des oreilles pointues bien que fortement abîmées, deux billes rubis en guise d'iris... Tout cela aurait été parfait s'il n'avait pas eu une longue barbe taillées en pointe et tressées de perles et de bijoux qui prolongeait ses traits émaciés. Il ne la portait que depuis quelques décennies, comme une fierté d'enfin pouvoir afficher clairement sa nature après une vie passé dans l'ombre des drows, à essayer de leur ressembler au mieux. C'était peut-être là l'origine de sa crainte -sans doute un peu exagéré- vis-à-vis de ces guerriers qui entendaient imposer leur style.
Il retrouva son escorte qui l'attendait devant les murs de la bâtisse et monta son cheval. Suivit de ses quelques gardes du corps il se mit rapidement en route vers la sortie de la ville, ayant plusieurs producteurs à rencontrer dans les fermes qui entouraient la cité. A l'intérieur du manoir, Lars laissa retomber la tenture qui isolait la pièce des rayons du soleil, lesquels commençaient à devenir ardents avec la saison qui progressait. Il se retourna vers son compère, lequel était à moitié allongé dans un sofa. Il n'avait rien de très remarquable avec son teint de miel, ses yeux marron tirant sur le rouge, ses oreilles légèrement pointus et ses cheveux noirs. En le remarquant, Jahred se redresse un peu :

« Tu es sûr qu'il ne va rien faire d'irréfléchi ?
-Certain. Des'qar est un peu emporté mais ce n'est pas un idiot. Il se rendra vite compte que l'affrontement n'est pas la bonne solution. Nous devons d'abord comprendre exactement à quoi nous avons à faire. Et pour ça, tu es le mieux placé.
 »

Jahred lui renvoya un grand sourire. Il était, de tous, le plus jeune dans le métier, et en fait guère plus qu'un simple vendeur à l'étalage. Mais il avait ce don du parler, ce charisme qui l'avait toujours servis et qui faisait bien les affaires de leur petit congrégation quand la délicatesse était de mise. Il profitait abondamment des largesses de ses plus riches confrères et leur rendait de menus services en échanges. Même si Lars le trouvait trop insouciant et confiant pour vraiment percer dans le domaine, il était un atout précieux.

« Le plus important, c'est d'en savoir plus sur qui les dirige. Ce sont d'anciens soldats, ils ont forcément une bonne hiérarchie. Quand on en saura plus sur celui qui occupe le haut du panier, on pourra commencer à bouger de notre côté. Pour l'instant je vais m'assurer qu'ils ne débordent pas trop de leur citadelle en ruine. »
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MessageSujet: Re: La réclamation   La réclamation I_icon_minitimeSam 4 Avr 2015 - 10:32

      A présent le front de la despote perlait de sueur. Yaz’e avait quitté tôt son manoir dans les plaines, pour prendre la route du Nord, qui conduisait à Sol’Dorn. Il était inhabituel qu’un despote, même d’une petite terre comme la sienne, accompagnât ses négociants et leur cohorte d’esclaves trop maigres, lorsqu’ils montaient à la cité y vendre leur vin et leurs épices. Mais ç’avait été déjà trois négociants châtrés par Yaz’e, sous prétexte qu’ils ramenaient un trop faible pécule, avant qu’elle tendît son oreille effilée aux jérémiades de ses gens. Ainsi, on disait que les taxes ponctionnaient honteusement les despotes, alors qu’elles ne faisaient que couler doucement sur la fortune des producteurs inféodés aux princes thaaris ? Yaz’e avait voulu en avoir le cœur net. Et maintenant, au sortir du quartier des échoppes, la despote avait le front rouge et moite sous l’effet de la colère. Quoi ! La garde s’acoquinait avec les bâtards zurthans et les métisses thaaris. A eux l’octroi minime, aux despotes les taxes gargantuesques ? Il ne fallait plus s’étonner que les carrioles partent chargées à rompre vers l’ancienne cité de l’Ost, mais que les négociants n’en reviennent qu’avec une maigre bourse aux cordons fort serrés. Voilà que les gardes lorgnaient d’un œil goguenard les trop rares piécettes acquises par la despote. Le tintement de celles-là, dans sa main griffue, était léger et ridicule. Yaz’e avisa ces visages moqueurs, l’espace d’un instant elle songea les éventrer, tous, pour que le sang vienne troubler les parfums raffinés qui tournoyaient au-dessus du quartier aux échoppes. Mais las, ç’aurait été peine perdue, c’est toute la garde qui était vendue aux princes marchands. La despote déglutit avec amertume. Que le temps du Quatrième Ost triomphant lui semblait lointain, à présent. On disait la province tenue par des despotes féroces, mais tous n’étaient que des pantins risibles face à la puissance monétaire des thaaris. Yaz’e laissa alors ses yeux embués de rage dériver sur les toits de Sol’Dorn, au-dessus des comptoirs repeints aux couleurs de leur maître dans la lointaine ville des marchands. Le regard de la despote erra sans but, de longs moments, passant et repassant dessus, avant d’en saisir le sens. Soudain elle sursauta : là, par-dessus les reliquats de la forteresse, s’élevait un étendard graisseux mais fier. A cette vue, le sang de la Drow ne fit qu’un tour. Et si la puissance de l’ost vivait encore dans Sol’Dorn ?

      Yaz’e, ayant renvoyé ses suivants, ne fut pas longue à quitter le quartier des échoppes pour rejoindre les abords de la citadelle en ruines. Une masse de souvenirs lui revint, d’un bloc, en mémoire, tandis qu’elle franchissait la première enceinte du bastion, et que devant elle s’élevaient les larges portes aux montoirs saisis par la rouille. L’entrée était à présent flanquée non plus de deux, mais trois Drows ; et si les deux premiers portaient la livrée tachetée des chiourmes de Sol’Dorn, le dernier n’arborait rien de distinctif, sauf une puissante lame pendant à sa ceinture.
      La despote ne dit pas même un mot. Devant elle, et quoique la face bigarrée de quelques cicatrices nouvelles, c’était Do’ghym. Il avait été l’un des plus féroces guerriers de l’Ost, au temps où celui-ci moissonnait encore les terres stériles pour y rafler des foules d’esclaves. Quant à ce que lui pensait, Yaz’e le lut dans ses yeux noirs comme le charbon. Elle était devenue une despote malingre, une parmi les nombreux de roitelets qui bagarraient à quelques encablures devant Sol’Dorn. Les mains de Yaz’e, aujourd’hui plus accoutumées à brasser l’or et les étoffes fines, avaient perdu les cors qu’imprimait le pommeau d’une épée. Ainsi que Do’ghym devait en juger, ces mains étaient redevenues fines, c’est-à-dire faibles. Les deux vétérans se contemplèrent l’un l’autre durant de longues secondes. On aurait dit qu’ils provenaient de deux époques distinctes d’un même récit, et que c’était par une erreur du narrateur qu’ils se retrouvaient l’un face à l’autre dans une même temporalité.
      Do’ghym sourit, d’un rictus bouffi d’orgueil, comme un tyran assuré de son pouvoir. Il quitta alors le mur auquel il s’était adossé nonchalamment, pour rentrer dans les profondeurs épaisses de la forteresse éboulée. Yaz’e le suivit sans dire un mot. Quant aux deux roquets de la garde, hésitant de chaque côté de la porte, on n’avait même pas songé à leur adresser un regard.

      Ce furent trois volées de marches à peine, et quelques corridors remontés au pas de course, avant que la scène ne se reproduisît, mais en plus cuisant encore. Do’ghym avait mené la despote dans une petite salle basse, aux fenêtres étroites et tranchantes, qui laissaient filtrer une lumière pleureuse. Là, dans la demi-pénombre, on devinait une longue table. Au bout de cette table on trouvait, accoudée sur des cartes et d’autres parchemins, une Drow de toute petite stature. Et sur le visage de cette Drow, deux yeux brillaient, débordants d’un jugement carnassier.
      « Phar’roos, salua la despote. »
      Une voix grave, teintée de l’accent lointain d’Elda, lui répondit depuis le bout de la table :
      « Salut, marchande d’épices. »
      Yaz’e accusa le coup, le souffle presque coupé. Toutes deux savaient qu’elle avait été l’une des premières à quitter l’Ost pour tenter de se tailler un domaine à la pointe de l’épée, dans la lande qui s’étirait au Sud de Sol’Dorn. De nombreuses décennies avaient passé depuis lors sans que Yaz’e affrontât le regard de Phar’roos. A présent il ne restait, dans la pénombre, que ces deux yeux fauves, gorgés d’un mépris brûlant. Derrière la despote, Do’ghym claqua la porte de la salle comme on referme une cage. Le dialogue pouvait débuter. Il dura de longues heures.


      Le jour déclinait et les deux lunes reprenaient leurs droits. Sol’Dorn basculait doucement dans la nuit. Une petite carriole avait quitté la cité et elle bringuebalait à présent sur la route du Sud. Les trois esclaves zurthans la tiraient en silence, un mors passé dans les dents. Les rênes consistaient en un fil plombé attaché à leurs parties, que Yaz’e tenait négligemment d’une main, tirant dessus plus pour le divertissement ; cela chougnait si bien. Le corps abandonné sur cette carriole que lui avait cédé Phar’roos, les yeux grands ouverts et plongés dans la nuit naissante, la despote remâchait les paroles de la matrone.
      Ainsi elle ne payerait plus de taxes exorbitantes, plus d’octroi déraisonnable. Sur ses épices et son vin, Yaz’e ne verserait plus qu’une redevance maigrelette ; mais à Phar’roos et à la deuxième dothka, cette fois, non plus à la garde. Plus une seule piécette n’irait aux chiourmes de la ville – et si ceux-là grognaient, Yaz’e avait l’assurance grognarde que la deuxième dothka jaillirait aussitôt pour les faire taire.
      Il ne faisait aucun doute que cette faveur d’un vétéran à un autre vétéran ne passerait pas inaperçue. Que bientôt, tous les despotes aux terres les plus étriquées, tous ceux que la garde saignait avec ses taxes agressives, tous ceux-là se presseraient sans attendre devant le bastion de la deuxième dothka. Ce serait un ballet de traîtres, orchestré par les Puysards revenus dans leur ancienne cité. Peut-être les plus veules finiraient-ils pendus aux échauguettes du bastion, mais la plus grande part des despotes serait acceptée sous la coupe de la deuxième dothka. Et le nom de Phar’roos, bientôt, serait à nouveau sur toutes les lèvres.
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MessageSujet: Re: La réclamation   La réclamation I_icon_minitimeVen 21 Aoû 2015 - 17:57

      Ainsi écrivait Dzaër’jaar, le Rebouteux, sur quelques pages jaunies :


      Car il est entendu que je suis du parti des ignobles, étant au service de maîtres ignobles ; que Sol’Dorn a la figure d’un chiard sur le partage duquel deux traînées s’entredéchireraient, en hurlant et en crachant, à risquer de rompre en deux le petit corps ; que toute la cité, entre ses murs bruns, n’est qu’un terrain d’affrontement entre des licteurs de plusieurs factions ; que je suis du clan des innombrables qui ne se fient qu’à la position, non à l’être, et qui servent celui qui domine pour la seule raison qu’il domine, et l’abandonnent dès qu’il ne domine plus, pour la même raison qu’il ne domine plus ; que le roue du temps tourne, que ces années-ci elle s’est fixée sur les Sombres d’Elda, que ce sont eux qui tiennent la bride de Sol’Dorn tout entière ; que de ce fait, et jusqu’à ce qu’une faction la défasse et la fracasse, je suis servile devant la deuxième dothka ; que le sang humain, qui dans mes veines coule en majorité, m’est indifférent dans cet acoquinage.

      Ce matin, on me vint chercher : c’était un Sombre, gaillard et fier, la voix grave. Je demande où l’on me requiert, j’apprends que c’est à la Citadelle des Sombres qu’on m’envoie, vers cette ancienne forteresse aujourd’hui presque redressée. Les efforts de la deuxième dothka ont été majeurs, je le mesure à chaque pas que je fais dans l’enceinte de cette ruine autrefois, de ce bastion à présent, fort et me semblant imprenable. Les tours paraissent d’aspect solide, il n’y a pas une échauguette qui se dérobe sans qu’un œil, embusqué quelque part, dans quelque renfoncement, y veille avec précision. C’est sûrement pour Sol’Dorn tout entière un mauvais présage, qu’un pouvoir si grand se soit rétabli et raffermi dans le sein de la cité ; mais pour moi, et pour mes finances, cela est une bonne chose : les Dieux m’ont fait l’esprit conciliant.

      Je gravis les escaliers, je monte par des couloirs inconnus et presque indécelables ; ce n’est pas vers les grandes salles qu’on m’entraîne. Il y a un colimaçon dérobé par un voile rouge, et deux hussards pour l’encadrer : on me fait signe de monter. Enfin j’arrive, après cette ascension éprouvante, dans une pièce basse et oblongue, où une faible lumière perce, quand les nuages ne la dérobent pas. Je peine à discerner, pourtant il y a bien une forme là, étendue sur des peaux de bête. J’entends un grondement, je devine que la couche s’agite, et soudain un doigt, court, gourd, jaillit de l’ombre, et me fait signe d’approcher. Je me sens plonger vers des mystères effarants, et la science de mon poudres et de mes onguents, que je serre dans une petite boîte tenue tout contre mes côtes, ne m’est alors d’aucun réconfort. J’avance ; je tremble, je l’avoue.

      Enfin un rai de lumière veut bien luire, et la bête est dévoilée. C’est une Sombre, une Drow, mais fort blessée ; sur les peaux de bête qui la supportent, le vermillon a dégouliné à pleins torrents. Quand bien même elle est étendue sur le dos, je devine qu’une méchante plaie lui ronge toute la nuque et l’échine, à voir les mouches bombiner alentour pour s’infiltrer sous sa carcasse. Une puanteur abjecte s’exhale de ce corps comme fracassé.

      Les mots sont inutiles, j’applique aussitôt ma science et tout mon savoir. Les saignées sont vite faites, les sangsues placées tout autour des ouvertures ; et j’enduits d’un onguent renforcé de sel, pour bien pénétrer le corps, ces déchirures qui la traversent de part en part. La douleur cisaille son visage, la chose est bonne : ce sont les grands cris qui révèlent la grande médecine. Enfin, une heure peut-être s’écoule, avant que j’aie fini d’enduire et de panser ces plaies. Du plat de la main, par délicatesse, je brise les larves et les nuées qui affleurent dans les draps flétris par le sang.

      Alors je veux m’en aller, alors je veux partir : même à l’homme de science, le spectacle des chairs retournées n’est jamais plaisant, sauf pour la curiosité de l’esprit. Mais étourderie, ou complaisance, je me crois tenu de souffler un bon mot, et voilà que je dis : « A endurer si bien d’aussi terribles blessures, tu fais l’honneur de ta race, Sombre maîtresse. Je n’ai jusqu’à ce jour vu une telle vivacité chez aucun peuple, hormis les Nains. »

      Ce sont deux explosions de fureur dans l’ombre, quand les deux pupilles de la blessée soudain se rouvrent, et dardent sur moi leurs éclairs : si un regard pouvait hurler, alors celui-ci tonitruerait. En une seconde – mais une effroyable seconde – j’aperçois les doigts épais, les jambes courtes, la taille forte, et les joues où s’ébauche le hâle de quelques poils de menton. La nature profonde de cette Drow, qui est bien impure, aussitôt me saisit au cœur ; et dans ces yeux assassins, je devine qu’il n’est pas bon de percer l’essence des êtres, lorsque ceux-ci sont puissants et ombrageux.

      Voilà pourquoi, depuis cette seconde, je me terre ici chez moi ; et sur l’huis de ma porte, je garde l’oeil.



      Ainsi écrivait Dzaër’jaar, le Rebouteux, et on ne le revit plus.

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Phar'roos
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MessageSujet: Re: La réclamation   La réclamation I_icon_minitimeSam 5 Sep 2015 - 10:26


      La paillasse aux draps gris, où Phar’roos convalescente avait été alitée des jours durant, se trouvait à présent vide. On avait rouvert les rideaux, et la fenêtre laissait entrer une lumière pâle et sale. La porte n’était plus fermée, elle révélait un escalier disparaissant dans les étages. Sur les premières volées de marches, restait une trace pesante dans la poussière, comme si quelqu’un avait peiné pour monter. Cette trainée brillante s’élevait le long du colimaçon, jusqu’au sommet, au faîte de la Tour Ouest de la Citadelle.
      De là, on dominait la cité entière. Phar’roos se tenait contre le mur, agrippée aux poutrelles, les dents cadenassées par l’effort. Un souffle rauque sortait, par à-coups, de son corps encore blessé. La Matrone embrassa du regard la ville brune qui s’étalait sous elle, avec ses ruelles torves, ses placettes crottées, et ses murailles arrogantes. Quelque part au-delà, vers l’Est ou peut-être le Sud, devaient achever de pourrir les derniers corps, cette sédition que la deuxième dothka avait fait broyer. Phar’roos avait déjà oublié où, et quand. Mais c’était sans importance. De l’autre côté des remparts, on devait avoir déjà réinvesti les lieux : sans doute ces rues grouillaient-elles à nouveau de Zurthans, d’impurs, tous de sang sale. Et alentour, et dans la cité, et jusque sous les échauguettes du Bastion, la vermine vivait et prospérait.
      Sol’Dorn échappait encore aux Drows. Rien n’était fait.
      « Mais nous ne sommes que trente, grogna Phar’roos. »
      Surpris par sa voix, une nuée de corbeaux s’échappa de la tour. Leurs formes noires et pures disparurent vite dans les brouillards grisâtres de la ville.
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