La visite du corbeau ( Feat Cynisca ) ( Pv )

7ème jour de la huitième ennéade, an 8

Arichis était revenu la veille de Beronia avec le sentiment du devoir accompli. Somme tout, son séjour s’était déroulé paisiblement et il avait même pu profiter des spécialités locales. Le retour à Soltariel s’était fait dans le calme estivale, la cité continuait de vivre comme si le princesse estreventine n’avait jamais posé les pieds ici-même. Au marché, les éclats de voix retentissaient toujours avec le même timbre, les enfants de quartier de Sainte-Aléria jetaient toujours des cailloux sur les gondoles et les miliciens riaient toujours aux même blague du tavernier de la « Saucisse rabougrie ». Azénor et Cécyllia l’avaient quitté il y a à présent quelques jours, et déjà leur absence se faisait ressentir auprès du patriarche. Seul, Arichis se sentait désarmé, affaiblit et cela, malgré la victoire politique qu’il venait de recevoir.

Au matin, avait eu lieu un autre conseil royal de régence. Déjà, certains semblaient commencer à s’en désintéresser. Il fallait dire que l’animation n’y était plus au rendez-vous depuis la disparition de Kahina, et son remplacement ne provoquait pas autant d’émoi et d’enthousiasme. L’Anoszia sirota son jus de grenadine à la menthe tout le long du conseil, et se leva en même temps que ses collègues lorsque la session expira et qu’il fut l’heure de déjeuner. La salle du banquet était aussi grande que celle d’Ydril mais légèrement plus haute, et les tables étaient d’un bois plus lourd. Sur l’estrade, déjeuner les plus illustres conseiller du roi, avec la droite du siège ducal vide, bien au centre, celui symbolique de Son Altesse Royale, aussi vide. Le régent lui, se trouvait deux sièges plus loin, prenant la place du sénéchal lorsque sa protectrice le délaissa. Les esclaves firent plusieurs services, amenant et débarrassant toute sorte de viande blanche. Arichis muré dans son mutisme n’adressait la parole à personne, son regard était fixé sur les tablées plus basses où des courtisans riaient et jouaient aux dés entre deux tripotage d’esclaves. Il réfléchissait, ses pensées le menèrent de Velmone à Alonna où il devait bientôt se rendre. La rumeur des fiançailles de Sysiphe avec Sarina devait lui être parvenue, un navire avait quitté Soltariel pour Ydril à destination de Serram, de là, la rumeur devait circuler vers les contrées septentrionales mais peut-être le régent arriverait avant elle à Alonna. Il retardait toutefois son voyage, ne souhaitant pas rater une missive d’Azénor à Soltariel. Il ne pouvait s’empêcher d’être inquiet pour sa cadette, seule sur les flots en direction de Diantra ou d’ailleurs. Le régent se leva de table avant les autres, et se retira vers ses appartements pour une sieste. Il faisait trop chaud pour vaquer à une quelconque activité.

Ses appartements se trouvaient dans une tour, celle de l’Argenterie de Soltariel réaménagée en Argenterie Royale. Pas particulièrement plus haute que le donjon de la Chancellerie, elle disposait d’une cave devenu à vin, et de trois étages avec office, chambres et compagnie. Alors allongé sur des soieries, les yeux à demi-clos, un valet vint le déranger dans sa quiétude. Une dame en détresse demandait à le voir, à moitié dans les vapes. Arichis lui demanda son nom, le valet ne su y répondre, il demanda sa description, il ne su le renseigner. Le régent le chassa alors d’une main, lui ordonnant de revenir s’il avait de meilleures informations. Ce qu’il fit une vingtaine de minutes plus tard. Il ne connaissait toujours pas son nom mais pu la décrire ! Une ydriaine rousse à l’habit délicat et au teint clair. Par les sept enfers abyssaux s’exclama le régent en se relevant. Arichis se lava le visage puis suivi le valet vers le salon où on avait installé Cynisca. Il trouva celle-ci étendue sur un divan avec une servante, des gardes portant des coffres et une femme la ventilant avec une branche de palmier taillé en la priant de se réveiller. Arichis gronda la femme pour l’état de sa maitresse alors que la pauvre n’y était pour rien, elle n’eut pas le temps de s’expliquer ou de s’excuser que l’ydriain la somma de chercher de l’eau et de quoi rafraichir le front de l’invitée surprise. Un poil inquiet, et soucieux. Arichis s’installa sur le divan à ses côtés, releva sa tête pour la poser sur ses genoux et lui attrapa la main, murmurant plus pour lui-même que pour son amante évanouie.

« Pourquoi es-tu venue jusqu’ici Cynisca… »

En réalité, sa présence le ravissait et derrière ses maques d’impassibilité, le touchait.        

Elle jouait la comédie. Arichis voulu lui adresser un regard sévère mais il la gratifia d’un sourire amusé à la place. Cela ressemblait bien à sa Cynisca, il aurait du s’en douter. Mais cela signifiait que si elle avait du user de ce stratagème que quelque chose ou plutôt quelqu’un l’avait empêché de pénétrer au palais. L’Anoszia se promit de sermonner les gardes, bien que cela ne soit pas de leur faute, après tout ils ne faisaient que leur travail et ne connaissait pas l’ydrilote qui avait clamée connaitre le Grand Argentier du Royaume.

Elle le taquinait. Il ne l’avait pas vu depuis des mois, peut-être même presque un an et la voilà qui lui donnait l’impression de ne jamais l’avoir quitté. La Dame était sa plus fidèle amante depuis quelques années, c’était avec elle à son bras, lorsqu’il ne pouvait s’afficher avec l’une de ses filles, qu’il ouvrait les bals et les fêtes à Ydril. Il n’avait bien sûr jamais songé à l’épouser, un mariage ne lui apporterait rien sur la scène politique avec elle, mais il ne l’avait pas autorisé à se remarier par contre. Il avait commencé à la fréquenter peu avant la mort de son époux et avait bénéficié de sa disparition pour s’afficher en public avec elle. La Dame-Corbacs, c’est ainsi qu’on la surnommait vulgairement parmi les petits gens ou la dame aux corbeaux parmi les plus grands. Il avait rencontré Alanya entre temps, une plus jeune femme ayant su lui donner du plaisir lors de son passage. Mais que Néera le damne, Cynisca lui avait manqué et ce n’est qu’avec elle sur ses genoux qu’il s’en rendit compte.

« Bien évidemment qu’il y en a peu comme moi ma dame. Votre Grandeur me sied parfaitement à présent, j’ai plus de responsabilités et plus de pouvoirs. »

Il ne doutait pas que c’était ce qui avait attiré Cynisca en premier lieu. Nombreuses ont été celles après la mort d’Hélène à vouloir une place près du patriarche, certaines avaient réussi, brièvement mais aucune n’était resté aussi longtemps que la trentagénaire. Elle lui posa un doigt sur le front, taquine qu’elle était, elle se vengea comme elle le pouvait.

« Qui ne s’inquiéterait pas devant une dame évanouie ? Je suis votre chevalier servant, ne l’oubliez pas. »

Durant un tournoi à Ysari organisé quelques années auparavant, il l’avait couronné reine d’amour et de beauté en ayant gagné sous ses couleurs la joute. Cynisca se releva, redressa sa tête et arrangea les plis de sa robe un moment avant de s’adresser à nouveau à lui. Elle lui demandait des cadeaux pour lui pardonner son délaissement et son inquiétude quant à son état de santé. Bien qu’il ait essayé d’étouffer les rumeurs de Langehack, des mots avaient réussi à filtrer bien que la vérité fût atténué.

« Le devoir ma dame m’a tenu éloigné de vous, c’est que j’ai un royaume à reconquérir à présent. »

Ce qui était bien avec Alanya, c’est qu’elle ne lui avait rien demandé en échange. Il n’avait pas eu à l’entretenir, contrairement à sa maitresse qui lui coûtait dans le temps une petite fortune déjà. Mais il n’avait pas à se plaindre, la jolie savait se montrer coquine. Son baiser au coin de ses lèvres le fit sourire, à sa manière sans doute elle le punissait.

« Promis, vous profiterez de mes largesses. Je vous ferais venir une robe de Langehack, mon fils y est à présent duc. » Dit-il avec fierté.

L’ambition était un trait dominant chez le vieux dragon. Toute sa vie il avait aspiré à d’avantage, alors conseiller militaire d’Ultuant puis de Trystan il désirait devenir sénéchal, mais les différentes histoires de succession et les exils l’avaient freiné. Son retour triomphant à Ydril lui avait par contre permis quelques manœuvres lorsqu’il sût profiter de la situation avec Bohémond et Altiom. Ce fût d’ailleurs à partir de là que débuta l’incroyable histoire des Anoszia. Mais Arichis était conscient d’une chose, plus haut ils se retrouveront mais plus dure risque d’être leur chute ! Il chasse toutefois ces mauvaises pensées de son esprit à la vu du sourire de la belle.

« J’en suis fier, mais ces exploits ne sont pas individuels, ils sont le fait de toute ma famille. »

Sa famille. Il n’y avait rien de plus sacré pour lui, pas même les dieux. Arichis se tu devant les taquineries de sa maitresse et la gratifia d’un regard sévère. Bien sûr il ne lui en voulait pas, elle avait le droit de s’en prendre à lui avec presque toute l’année écoulée sans qu’il ne donne signe de vie ou juste de ses nouvelles. En même temps il avait eu énormément à faire, la guerre des Deux-Dragons, la chute de Diantra, le conseil de régence, la course des soleils. Cynisca lui demanda si son fils attendait un enfant, un sourire illumina cette fois-ci le visage d’habitude sombre du patriarche. Méliane, sa belle-fille qu’il n’avait que très peu vue durant sa convalescence avait le ventre depuis plusieurs ennéades déjà. Arichis allait devenir grand-père pour la troisième fois et espérait vivre assez longtemps pour voir tous ses enfants en avoir à leur tour.

« Oscario vient d’avoir Faustina, Oschide attend également un nouveau-né. Puisse Néera veiller sur lui et le protéger. »

Il tentait par contre de ne pas trop espérer, il savait bien que Tyra pouvait appeler à n’importe quel moment ce bébé et les fausses couches étaient nombreuses. Hélène en avait eu quelques unes entre Oscario, Cornélia et les autres. Cynisca se rétracta sur ses exigences et ne demanda qu’une robe finalement, Arichis allait quand même lui offrir quelques bijoux pour lui faire plaisir. Il ne manquait pas de sous et ses nouvelles charges lui apportaient un très bon revenu. Il imaginait déjà le bijou qu’il souhaitait la voir porter autour de son cou et se dit qu’il devait en faire de même pour Alanya lorsqu’il irait la voir au nord. La Dame Corbeau se pencha pour lui susurrer quelques mots à l’oreille, qui lui firent étirer les lippes une nouvelle fois.

« Une danse d’estrevent ? Et bien ma dame je serais ravi de voir cela. »

Il pouvait bien accorder à sa dame quelques instants, d’autant plus qu’il était intrigué par ce qu’elle avait à lui proposer. Il avait déjà vu des danseuses de Thaar à quelques réceptions, se faisant donc déjà une idée de ce qui l’attendait.

Dame Corbeau près de lui debout prenait plaisir à l’aguicher. Sa phrase pleine de sous-entendu fit sourire le vieux dragon qui n’avait pas besoin de d’avantages d’indices pour comprendre où cela les mènerait. Elle se leva en glissant un doigt dans son col et tira dessus de manière provocante, l’invitant à la suivre. Le salon dans lequel ils étaient n’était pas le plus intime des endroits, des courtisans pouvaient les surprendre à tout moment en franchissant l’une des trois portes de la pièce menant chacune à un couloir différent. Il se leva donc et prit les devants de la marche pour les mener à sa tour, la tour de l’Argenterie où se trouvait ses appartements et ses bureaux. Cynisca demanda à l’Anoszia de s’assoir confortablement. Toujours autant amusé, il posa séant sur un fauteuil rouge finement ouvragé tandis que sa maitresse s’en alla se rafraichir et s’habiller. Son sourire s’agrandit lorsqu’il la vit revenir en tenue estreventine tout juste habillé, des bijoux de moindre qualité – car l’Anoszia avait l’œil pour l’or, aux  poignets et chevilles.

Provocante à souhait, elle lui demanda de profiter du spectacle alors qu’elle faisait glisser un doigt lascivement sur son sein. Comme Solaara, elle était de ces femmes qui ne perdaient pas en beauté avec l’âge mais qui devenait juste plus mature.

« Très bien, voyons voir ça. »

Le son métallique des breloques à ses articulations et à sa ceinture prit rapidement le dessus tandis qu’elle bougeait avec grâce et harmonie vers lui puis autour de lui. Arichis ne se concentrait plus sur son visage mais sur son corps qui comme à chaque fois savait réveiller son désir pour elle. Proche de lui, elle traça un demi-cercle avec sa jambe révélant une cheville puis la cambrure d’une cuisse ciselée. Agile et non moins taquine, elle lui attrapa avec une vitesse insoupçonnée une main qu’elle porta à sa bouche.

Elle les frôla de ses lippes, glissa vers sa joue qu’il caressa du dos des doigts. Elle prenait toujours autant soin de sa peau, peut-être des bains de lait avec quelques produits étranges pour que l’effet soit autant réussi. Elle fit glisser la main ensuite vers son provoquant décolleté en lui proposant un massage.

« Ma dame je crains ne pouvoir vous autorisez à m’abandonner. Pour le massage.. Hum c’est avec plaisir. »

Il se leva, retira sa main du décolleté pour la ceinturé avec et l’attira puissamment à lui dans une étreinte à la fois douce et ferme. Il se pencha pour l’embrasser alors qu’elle pouvait d’or et déjà sentir la bosse dans son pantalon. Il joignit ses lèvres aux siennes lentement pour lui offrir un baiser plein de significations. Elle avait fait le chemin d’Ydril à Soltariel pour le revoir, il lui avait manqué et il en était flatté. Il le lui montra, il lui montra qu’il était heureux de la revoir.

Finalement il se détacha d’elle pour montrer la pièce dans laquelle ils étaient. Un autre salon avec des sortes de triclinium une sorte de lits de table, des grands canapés, des larges fenêtres et un mobilier simple mais cher.

« Comment dois-je m’installer ? » Questionna-t-il en délassant le col de sa tunique.