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 L'ombre d'un doute

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Roderik de Wenden
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Roderik de Wenden


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MessageSujet: L'ombre d'un doute   L'ombre d'un doute I_icon_minitimeJeu 27 Oct 2016 - 12:36

Thème musical:


Neuvième année du onzième cycle
Deuxième ennéade de Favriüs
Le septième jour...


Roderik de Wenden était un arétan de pur sang, et la terre de ses ancêtres était la sienne, depuis sa naissance et jusqu'à sa mort.

Pourtant, lorsqu'il la contemplait du haut des remparts de la citadelle, il se sentait comme dans la peau d'un étranger. La bourgade qui avait prit forme au fil des siècles autour de la citadelle, la vie qui avait essaimé jusqu'en ses faubourgs, formant ainsi le chef-lieu du comté, lui était étrangère. La ville était laide ; des habitations robustes, mais érigées ça et là de manière hasardeuse, ce qui avait peu à peu formé un labyrinthe d'allées étroites et distordues. Elle était dense, surtout, pour qui n'avait pas grandi dans une véritable cité. La populace y grouillait, avec ses bruits, sa chaleur et son odeur.
Au-delà des faubourgs, pourtant, des terres vastes et d'apparence sereine s'étendaient dans les lueurs mordorées du déclin du jour. La lumière pâle de l'automne scintillait sur le cours paisible de la Würm, et Roderik devinait sa source, là-bas dans les collines des Pyks d'Ortheim à l'est, le pays de Külm la rocailleuse ; et elle traversait la capitale, puis serpentait jusqu'au nord, vers la cité portuaire de Lün, pour enfin se jeter dans l'Eris. C'était l'Eris qui grondait au nord et à l'ouest, tapi au-delà des plaines, derrière l'immense soleil couchant ; océan déchaîné et colérique, cauchemard des navigateurs, implacable gardien des confins du monde.
Le nord du pays était riche et varié ; grâce au savoir-faire des pêcheurs lünestenais et des artisans de Külm, il fourmillait de cités et de communautés paysannes, protégées par des places fortes érigées à la faveur d'escarpements rocheux. Au cours des derniers siècles, les seigneurs de ces mêmes places fortes avaient si bien défendu leurs terres des envahisseurs qu'ils pouvaient, aujourd'hui, oppresser eux-mêmes les peuplades placées sous leur « protection ». Lün et Külm, néanmoins, avaient toujours su tenir en respect ces seigneurs de guerre ; quant aux villages égarés, ils croulaient sous les taxes.

Roderik n'avait pas grandi dans cet Arétria. Le sien était celui de la malelande, avec ses plaines interminables où l'on pouvait chevaucher tout le jour durant sans rencontrer âme qui vive ; un pays vaste et plat, dont le ciel capricieux changeait le terreau en boue par temps de pluie. La nuit venue, le voyageur égaré ne devait pas commettre l'erreur d'allumer un feu ; car s'il éloignait les loups, il attirait immanquablement les maraudeurs qui pouvaient le voir à plusieurs heures de chevauchée. L'homme assoiffé qui venait s'abreuver de l'eau d'un ruisseau devait prendre garde ; celui-ci était parfois rempli de cadavres. La malelande était un pays impitoyable, aussi rigoureux et implacable que les hommes qui naissaient en son sein. Roderik avait eu la chance de naître dans une forteresse ; Wenden protégeait depuis des siècles la trouée vers Serramire. Il avait grandi dans la sécurité d'un solide rempart contre la violence du monde extérieur, un rempart qui le protégeait autant d'éventuelles incursions serramiroises que des propres dangers de la malelande.
Il n'avait pas vécu dans le confort pour autant ; Wenden n'était qu'un fort autour-duquel s'était formé un minuscule bourg fortifié. Ici, point de citadins comme dans le nord ; il avait grandi avec des artisans forgerons et des hommes d'armes. Tout seigneur qu'ait été son père, les Wenden menaient une existence rude et partageaient le quotidien de leurs hommes. Tout jeune encore, Roderik avait parcouru la malelande avec les reîtres de son père, et mené des expéditions punitives. L'on ne peut commander à des êtres aussi abrupts que les malelandois qu'à condition d'être forgé du même fer.

On lui avait fait payer sa trop confortable naissance, pourtant ; lorsque son père était tombé sous les remparts de Sainte-Berthilde, on avait chassé Roderik de son château. La vacance du pouvoir à la tête du comté laissait prévaloir la loi du plus fort, et le jeune fils de seigneur né dans la chaleur d'un château n'était point à la hauteur. On lui avait prit Wenden, on lui avait prit sa femme et son fils ; et il avait mené l'existence vagabonde d'un aventurier dans les plaines inhospitalières du pays vide. Alors il s'était affermi dans la clandestinité et les nuits silencieuses et solitaires ; puis, à la tête d'un parti d'hommes restés fidèles à son père, et qui avaient comme lui échappé aux vautours et aux geôles de Sainte-Berthilde, il était parvenu à reconquérir par l'épée son modeste héritage.
Il n'avait jamais rien reçu de personne ; quand enfin Arétria s'était retrouvée un comte en la personne de Wenceslas de Karlsburg, il y avait déjà longtemps que Roderik s'était rétabli de lui-même dans son fief de Wenden. Il n'avait jamais aimé ce nouveau comte, un homme austère et prude qui ne devait son titre que parce qu'il n'avait pas combattu les Berthildois, et qu'il avait quémandé la faveur de la Dame de Sainte-Berthilde, cette ennemie contre-laquelle Roderik et son père s'étaient battus. Ironie du destin, tous ces gens étaient morts désormais. Et c'est en épousant la cousine de Wenceslas que Roderik se retrouvait à la tête du comté.
Mais la vieille rancune que tenaient les arétans à l'encontre du marquisat de Sainte-Berthilde était sur le point de se raviver.

- Que vas-tu faire ? chuchota dans son dos la voix calme et apaisante d'Aliénor, sa soeur, alors qu'elle posait une main sur son épaule.
- Je ne sais pas encore.

Il n'avouait jamais son indécision à haute voix devant ses hommes. Pour un puissant seigneur, mieux vaut prendre la mauvaise décision que de ne pas en prendre du tout. Pourtant, la prudence lui commandait de ne pas précipiter les choses ; mais le temps, le temps était précieux.
D'un pas lent, Aliénor le contourna pour se retrouver face à lui.

- Saint-Aimé ne te fera plus confiance, désormais, dit-elle doucement, comme si chaque mot était mûrement réfléchi avant d'être dit. Tu l'as blâmé en public. Si tu fais marche arrière maintenant, tu te retrouveras complètement isolé.
- Je ne sais vers qui me tourner.
- N'as-tu confiance en personne ?
- Excepté toi, non.
Aliénor fronça les sourcils.
- Il faut que tu découvres la vérité, dit-elle. Tu ne peux pas savoir dans quelle direction aller, si tu n'as aucune certitude. Si le petit roi n'est pas mort, alors Saint-Aimé ne devrait pas être marquis, et tu serais en droit de le dénoncer. Mais si l'enfant est vraiment mort, si c'est Saint-Aimé qui a raison... c'est toi que l'on accuserait d'être un traître.
- Quand bien même je détiendrais la vérité, je ne suis pas assez fort pour m'opposer au marquis.
- Trouves un homme qui partage tes doutes, et qui soit suffisamment fort pour t'appuyer.
- Le baron d'Olyssea, peut-être. Il se méfie aussi du marquis, mais il ne semble pas être du genre à comploter, même lorsque le but est légitime. D'ailleurs, la dernière fois qu'Arétria et Olyssea ont œuvré ensemble contre le Berthildois, cela ne s'est pas bien terminé pour nous.
- Quelqu'un d'autre, alors ?
- Aymeric de Brochant, dit immédiatement Roderik. Il ne semble toujours pas s'être prononcé en faveur de Sainte-Berthilde ou de Soltariel, et l'homme est du genre à réfléchir avant d'agir.
- Peux-tu te fier à lui ?
- Je ne peux me fier à personne. Brochant suit ses intérêts, comme tout le monde. Mais il est possible que ses intérêts rejoignent les miens. L'ennui, c'est que je ne peux pas le rencontrer sans éveiller les soupçons de Saint-Aimé.
Aliénor soupira.
- Je vois bien une solution, mais je doute qu'elle te plaise.
- Laquelle ?
- Le mariage de la Dame de Lourmel. Brochant y sera probablement. Ce serait le parfait prétexte pour que tu te rendes en Serramire, et l'occasion de le rencontrer discrètement.
Roderik fit la grimace.
- En effet, cela ne me plaît pas.
Elle soupira.
- Ecoute, j'ignore ce qui s'est passé entre cette femme et toi, et même si j'ai mon idée là-dessus...
- Tu m'épargneras tes suppositions.
- Mais je n'ai pas envie de le savoir. Tout ce que je dis, c'est que tu as l'occasion de rencontrer Brochant. Si tu ne veux pas saisir cette occasion, mieux vaut tout arrêter tout de suite.
Roderik haussa les épaules.
- Je ne suis pas invité.
Aliénor leva les yeux au ciel.
- Bon sang, Roderik ! Est-ce vraiment cela qui t'arrête ? Tu cherches seulement un prétexte pour ne pas y aller !
- Ce n'est pas ça...
- Bien sûr que si, c'est ça. Allons, Roderik, réfléchis. Cette femme inviterait la propre soeur du comte d'Arétria à son mariage, mais pas le comte lui-même ? Ton absence lèverait déjà des soupçons, et ce serait encore pire si l'on te refusait l'entrée. Lorsqu'ils te verront arriver, ils n'oseront jamais t'empêcher d'assister aux noces. Ce serait avouer publiquement que la dame de Lourmel et toi, vous étiez amants.
- Je ne confirmerais pas tes suppositions, Aliénor.
- Comme si j'en avais besoin.

Les bras croisés, Aliénor le fixait avec cet air autoritaire qui leur rappelait à tous les deux leur père. Roderik prit une profonde inspiration, avant de finalement hausser les épaules.

- Entendu. J'irai.
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