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| Epopées hivernales : Le siège d'Eteniril | |
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Mélnaica
Elfe
Nombre de messages : 68 Âge : 27 Date d'inscription : 13/12/2016
Personnage :.: MANUSCRIT :.: Âge : 207 ans Taille : 1m78 Niveau Magique : Arcaniste.
| Sujet: Epopées hivernales : Le siège d'Eteniril Mer 9 Aoû 2017 - 17:32 | |
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Calimehtarus de la quatrième ennéade de Kärfias Dixième année du Onzième Cycle Les pauvres hères auront suivi ce qu’ils croyaient être leur route tout du long. Les Etenirili n’apprendront donc jamais… Les lances se plantent dans le sol aux pieds de Taledhels mortifiés et incrédules. D’où venaient-elles ? De l’avant ? De l’arrière ? Des arbres ou de sous la terre ? Ils n’avaient tout bonnement rien vu avant que leur convoi ne se heurte, au sens propre, contre les hampes des armes plantées dans le sol. À quel moment cela était-il arrivé ? Ils suivaient attentivement la trace de leurs éclaireurs pourtant, et par la Mère, les yeux et les oreilles des armées du Protectorat n’avaient que peu de choses à envier à celles des Limiers Ardamiris ! - Alors c’est maintenant l’heure de notre mort ? Celui parmi les pierres ne portant pas l’arme à la ceinture fut le premier à hausser le ton, hurlant son exaspération à la forêt entière, comme si son oreille sourde eut été capable d’en entendre la réponse ; et seuls lui répondirent les craquements plaintifs des buissons au feuillages saisis par l’hiver le plus rude qu’a connu l’Anaëh au cours du dernier millénaire. Une main se posa sur son épaule, l’incitant fermement à reprendre contenance, alors qu’un regard vigilant se posa sur le lointain, mimant ceux de la formation aux arcs bandés. Le cueilleur se mord la lèvre inférieure pour en retenir les élans lyriques, se prenant à réfléchir à ce qu’il pourrait bien être arrivé aux autres convois comme le sien, partis à la recherche de plantes comestibles dans les environs de leur Cité, espérant renflouer les greniers de la capitale avant qu’ils n’aient atteint seuil trop critique. Les ennéades précédentes en avaient vu d’autres prendre sa place et partir, mais la moitié à peine revenir, et sur cette moitié, moins nombreux encore furent ceux dont la récolte fut satisfaisante. Assiégés par les clans, réduits à l’inaction par l’hiver trop mordant, viendrait rapidement le moment où ceux de la Cité d’Eteniril se verraient forcés de faire couler plus de sang que de raisonnable devant Kÿria. La liberté a un prix, et si leur Mère a accepté de la leur offrir, ce n’est pas à leurs vieux frères de la leur reprendre. Une flèche fuse, se fiche dans l’épais épiderme d’un innocent, et à la faveur de ses cris de douleur vous offre une ouverture. Les Ornedhels de cuir blanchis et de fourrure albâtre vêtus glissent sans un bruit à travers le décor, s’engouffrant dans le creux qu’est la part de cercle occupée par celui dont l’arc n’est plus bandé. Les Taledhels ne vous voient pas, car lorsque la lumière ne vous enveloppe pas, vous êtes comme les prédateurs du royaume des sans-souffle, rampant à même les pierres et les branches, faisant preuve d’un mimétisme que les pierres ne vous connaissent pas. - Pas maintenant, à moins que vous ne le choisissiez. Que vous soyez tombés du ciel ou sortis de terre ne fait pas la moindre différence, quand de concert vous menez vos lames à leur gorge et vos mains à leur chevelure, tirant vigoureusement leurs têtes vides vers l’arrière. De ceux des bois tu es le dernier à apparaître, grand enfant au visage sévère, rongé en même temps que son corps par ces quelques dernières ennéades. Contrairement au reste de ceux des bois affichant mine menaçante, c’est un sourire désabusé qui plane sur ta face tendues, dont les yeux brillants retiennent visiblement leurs larmes. Il en est ainsi chaque fois que tes habiles tours de passe-passe font une victime supplémentaire. Il en est ainsi chaque fois qu’une tête blonde te rappelle à quel point ceux des villes t’effrayaient encore il y a quelques jours à peine, à quel point ton impuissance devant leur ignorance te terrorisait et à quel point la puissance incontrôlée qu’ils représentaient t’inquiétait. Aujourd’hui, à tout cela s’ajoute une sincère pitié. S’ils ne savent pas, c’est parce qu’ils ne peuvent pas savoir. S’ils n’entendent pas, c’est parce qu’ils ne peuvent pas entendre, et ils ne pourront pas tant que les vents de leur souffle ne s’ourlent pas autour de cette seule et unique envie. Pour autant de fois que tu aies souhaité leur destruction au cours de ta courte existence, voir celle d’une seule et unique Cité aussi imminente te prenait à la poitrine. Cette solution ne devrait rester que le fantasme d’un enfant perdu. Cette solution est un échec ; seulement Eteniril avait failli depuis bien longtemps déjà. - Lâchez les armes maintenant, et il ne vous sera fait aucun mal. Ils sont sourds et pourtant c’est en parfait écho avec la forêt qu’ils t’entendent. Ces gens ne te connaissent pas, ne t’ont jamais vu, n’ont jamais entendu parler de toi, et pourtant un mot de ta bouche et ils ne peuvent que te vouer le plus grand des respects. Une Autorité donnée par la Mère, une force de persuasion transcendant presque toutes les barrières pouvant s’élever au sein du peuple elfique, c’est le véritable présent de Kÿria à ses hérauts. Il aura fallu que coule le sang des tiens par la main des tiens pour qu’enfin tu en prennes pleinement conscience. Les arcs tombent au sol, vite suivis des dagues et des épées de fer. Les muscles des guerriers et des chasseurs se détendent assez pour que le tranchant des os taillés s’écarte de leur jugulaire, les mathandils sont libérés et le convoi des Pierres abandonné à la nature, tandis que la neige craque bruyamment sous les pas de la compagnie entière, en direction du campement où ils passeront le reste de cette guerre. - Tenez. Le cueilleur et les guerriers attrapent maladroitement l’amoncellement de tissus jeté dans leurs bras par le groupe de Noss à l’air patibulaire chargé de leur accueil. - Ni armes ni armures pour les Citadins ici, on se change. Des échanges de regards gênés, de premiers gestes timides, accueillis par des hurlements d’impatience, et finalement les pierres se virent infligés nudité. On leur arracha jusqu'au vêtement porté sous l'armure, car sous le vêtement des hérétiques se cachent les armes faisant naître les guerres blasphèmes ; car les étrangers doivent se rappeler qu'ici ils sont en position de soumission, fragiles, leurs vies à la merci de leurs hôtes ; car c'est nu qu'on naît, c'est nus qu'ils doivent renaître. Seulement après cette première preuve d'humilité ils auront le droit de dissimuler sous ceux de leurs atours n'ayant pas vocation au combat, et même d'enfiler en par-dessus le vêtement qu'on leur offre pour les protéger du froid. Mais que les prisonniers tiennent leur coeur haut et leur orgueil bien bas, car selon qu'ils choisissent d'accepter ou de se rebeller contre la loi de ceux qui les accueillent, cela pourrait être la dernière comme la première des humiliations.
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| | | Telenwë Neraën
Elfe
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| Sujet: Re: Epopées hivernales : Le siège d'Eteniril Ven 18 Aoû 2017 - 11:59 | |
| "A force d'en ramener, l'un d'eux va réussir par retourner à la cité et révéler où nous sommes. - C'est le risque à payer. C'est déjà une bonne chose que la majorité soit ramenée ici plutôt que tuée. - En attendant, le fait que nombre de charriots ne reviennent pas ne va pas aider à baisser la haine qui a pu s'installer dans le coeur de nos frères. L'idée d'une guerre ouverte ne me plait toujours pas, même si comme tout le monde j'ai dû me faire à cette idée. - Toujours à grogner, à ce que je vois, Telvan. - J'ai de quoi, Capitaine. - Tu as encore beaucoup à apprendre, répondit Falaedhel en souriant. Si ça continue comme ça, tu vas finir par me ressembler... - Euh ?"
Le vieil elfe eut un franc rire. Depuis sa tentative d'assassinat, il avait vieilli à un point que tout le monde s'était demandé s'il passerait l'hiver. Mais il s'était repris, le poids des responsabilités était devenu sa force et le rude hiver avait étrangement été bienfaiteur pour son vieil esprit. N'importe qui pouvait tomber ; le tout était de se relever, toujours. Au moins jusqu'à ce que sa mission soit terminée.
"Des nouvelles de la cité ? - Très peu. Ils ne sont pas en train de s'entretuer et il semblerait que de nombreuses questions se posent, notamment concernant l'emprisonnement du protecteur. - Peut-être n'est-il pas resté pour rien, dans ce cas. - Telvan, n'oublie jamais que ce n'est pas pour rien qu'une personne est élue protecteur et encore moins pour rien qu'il est accepté par l'Aube, et ce même si nous n'en comprenons pas toujours toutes les raisons. Neraën n'est peut-être pas le meilleur en parlote et a un sale caractère quand il s'y met,vu le personnage il devait y avoir une chance que son stratagème fonctionne pour qu'il se laisse emprisonner. Maintenant, à savoir s'il tiendra encore longtemps et si le Trône Blanc agira d'une manière ou d'une autre. - S'il n'agit pas en sachant ce qui se trame, c'est une forme d'action. - Effectivement. - Capitaine, en parlant de citadins... voilà un nouveau convoit. - Ah, oui... et pour ne pas changer, ils n'ont pas l'air heureux."
Falaedhel siffla par deux fois une suite de notes en direction de l'intérieur de la grotte, avertissant ainsi les gardes les plus proches qu'ils allaient devoir venir. Ce n'est qu'une fois ceux-ci arrivés que l'elfe s'avança vers le groupe de nouveaux venus et de noss, tenant bon dans la neige grâce à sa canne. Il s'arrêta à deux mètres d'eux et les regarda chacun droit dans les yeux, essayant de voir à travers l'énervement et la peur pour commencer à voir quels individus il devrait recadrer d'office et en lesquels il ne pourrait donner sa confiance.
"Soyez les bienvenus. Pour ceux qui ne me connaissent pas, je suis le capitaine Falaedhel et vous allez désormais faire partie du camp rebelle, pour faire... L'un des soldats venant de la cité eut une réaction insultate, raison pour laquelle il se prit un poing en pleine figure qui le fit tomber par terre. Tout en le toisant, Falaedhel continua comme si de rien n'était. - ... simple. Nous vous emmènerons au camp dans peu de temps, mais avant sachez que vous avez tout intérêt à vous tenir à carreau si vous voulez que tout se passe au mieux. Pour la survie de tous nous ne pourrons permettre aucun écart. Concernant les noss, s'ils vous demandent quelque chose, faites-le ; ils sont loin d'être nos ennemis dans cette histoire, vous comprendrez bientôt pourquoi."
D'un signe de tête, Falaedhel demanda aux noss s'ils avaient quelque chose à ajouter. Une fois qu'il put faire en sorte que les citadins entrent dans la grotte, il ordonna à ses elfes de les raccompagner pendant qu'il restait là, face au druide. Les relations étaient parfois tendues avec les sylvains, parfois au contraire elles laissaient apparaître quelques sourires sincères. Avec Mélnaica, il ne savait pas toujours comment réagir : comme les plus jeunes de ses elfes, il le voyait changer au fur et à mesure de cette triste guerre. Mais que ce soit en bien ou en mal, Falaedhel était dans le fond content - si c'était vraiment le bon mot - de le voir se rapprocher de ce qu'il imaginait d'un druide.
"Solandiel et Elveä souhaitaient nous voir tout à l'heure, surtout toi. Si en attendant qu'ils reviennent ou avant que vous ne repartiez vous voulez manger ou boire quelque chose, n'hésitez pas."
Pour le coup, il s'était adressé à tous les sylvains présents. Il se doutait qu'il aurait un refus plus ou moins poli, mais son éducation faisait qu'il se devait de le leur proposer. Tout de même, s'ils étaient plus libres que n'importe qui de faire ce qu'ils voulaient, il fit signe à Mélnaica de le suivre. Les deux guides Linwë n'allaient plus tarder à revenir.
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| | | Mélnaica
Elfe
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| Sujet: Re: Epopées hivernales : Le siège d'Eteniril Sam 9 Sep 2017 - 4:22 | |
| - Quand est-ce que tout ça va enfin s’arrêter ?
Tu regardes le capitaine donner de la canne vers l’avant, lancer son pas là où il a besoin de te guider avec une assurance tout bonnement dégoûtante. Tu observes les gardes emporter sans douceur aucune vos prises de l’instant vers l’intérieur de la grotte. Vers l’intérieur de ce qui est votre abri, et qui deviendrait, s’ils refusaient d’ouvrir les yeux, leur enfer. Sauf que les Etenirili n’ouvraient jamais les yeux que lorsqu’il était déjà trop tard. Après que les Ëalas aient perdu emprise sur eux. Après qu’ils se soient volontairement faits orphelins de leur Mère, quel pouvoir pouviez-vous imaginer avoir sur leurs cœurs ? Tu ne voyais pas quelques Taledhels de plus marcher vers la vérité, tu voyais quelques Taledhels de plus marcher vers ce qui s’annonçait pour eux être de longues ennéades d’humiliation, et pour vous, de longues ennéades à vous couvrir de honte devant ce que vous seriez obligés de leur infliger si vous ne vouliez pas qu’ils se rebellent.
Ton monde oscille autour de toi, et tu aimerais en retourner les miroirs pour en faire disparaître la misère. Tu aimerais que les sourires qu’affichent les uns soient d’un sincère bonheur, tu aimerais que les larmes, tes larmes, abandonnes tes paupières juste pour quelques heures. Tu aimerais que ce que tu es capable de créer ne soit pas qu’illusion. Tu aimerais que ton pouvoir de refaire le monde ne soit pas que jeux de lumières. Ton monde tremble, se couvre de failles, s’écroule sur lui-même. Noir et blanc s’entremêlent dans l’infinité de tons de gris auxquels tu préférais être aveugle, de peur qu’ils ne te dérobent le reste de tes couleurs, car c’est ce qu’ils font maintenant. Ton monde tremble, et tu observes, impuissant, Falaedhel se traîner vers l’avant comme si tout cela n’était rien. Rien que normalité. Rien que le destin. Rien qui ne justifie d’arrêter d’avancer. Et pourtant tes jambes refusaient de te porter auprès de lui.
- Je n’en peux plus Falaedhel. Tu laisses échapper dans un murmure. J’en ai assez ! tu hurles, la voix complètement disloquée J’en ai assez d’attendre que le gratin d’Alëandir daigne montrer le bout de son nez. J’en ai assez de surveiller les portes d’Eteniril comme un chien de berger ! J’en ai assez de rapatrier des brebis galeuses ! ta mâchoire souffre de te laisser prononcer ces mots, et tes yeux brûlent de rage J’en ai assez d’espérer d’Eteniril qu’elle comprenne. Ils sont aveugles et sourds ! Ils ne comprendront jamais !
Tes poings se serrent. Ton univers s’assombrit, et le monde ressemble un peu plus à celui des cauchemars qui agitent tes nuits. Tu es fatigué. Tu es excédé. Tu as peur. Tu es en colère. Tu es en colère contre eux, contre lui, et contre toi-même. Tu es en colère parce qu’ils sombrent dans la folie, que tu es perdu, et que lui marche vers l’inconnu sans regarder ni à toi ni à eux.
- Pourquoi est-ce qu’on ne peut pas tout simplement en finir ?
Pourquoi ne pas simplement les détruire ? Pourquoi ne pas effacer la plaie de la surface de l'Anaëh avant qu'elle ne s'infecte et ne pourrisse le corps entier ? Vous en avez le pouvoir. Vous en aviez le droit. Votre croisade serait légitime. Pourquoi ne pas t'abandonner à la même véhémence que celle qui anime ton totem ? Pourquoi ne pas chasser ton frère du nid et s'attribuer sa nourriture ? N'est-ce pas ainsi que fonctionne la nature ? N'est-ce pas le rôle du plus fort, du plus apte, de celui que la Mère a choisi, que de dévorer ceux qui font la faiblesse de sa création ? Il n'y a plus aucun espoir pour eux, alors pourquoi t'en veux-tu autant de souhaiter leur disparition ?
- PS:
Quand je décris ce qu'il se passe dans "le monde" de Mél, ce sont effets visibles de sa magie. Donc effectivement, à cause de son humeur tout bonnement médiocre, autour de lui ça a tendance à s'assombrir et à trembloter. D'ailleurs quelqu'un qui passe dans sa périphérie proche et qui a l'estomac fragile pourrait facilement se retrouver l'estomac aussi noué que Mél et pris de légères nausées =p
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| | | Telenwë Neraën
Elfe
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| Sujet: Re: Epopées hivernales : Le siège d'Eteniril Lun 11 Sep 2017 - 13:34 | |
| Falaedhel s'arrêta, posant sa canne de fortune sur la neige glaciale. Il ne se retourna pas quand le druide se mit à crier, ni quand autour d'eux la magie de la lumière se laissait à s'exprimer. Dans les mots du jeune noss, le vieil elfe pouvait ressentir l'énervement, la fatigue et la colère... émotions qu'il pouvait comprendre bien qu'il s'était suffisamment durci pour ne plus les laisser refaire surface.
"Pourquoi est-ce qu’on ne peut pas tout simplement en finir ?"
Cette question, posée depuis le début sous différentes formes et par différentes personnes. Cette question qui avait tout son sens, toute sa logique. Cette question qu'un simple "oui" en réponse amènerait une simplicité déconcertante. Pourtant, Falaedhel n'avait pas été le seul à vouloir que cette fameuse réponse ne soit pas ce "oui" tant attendu ; même des noss respectés, bien qu'étranges, le souhaitaient. Alors pourquoi ? Quelle folie les faisait marcher sur des oeufs au lieu de tout simplement régler le problème par la force ?
Il se retourna enfin. Sans rien dire, à l'aide de sa canne il revint sur ses pas, jusqu'à ce qu'il se retrouve juste en face du druide. Nul besoin de crier. Nul besoin de s'énerver. Nul besoin d'avoir peur, non plus ; parce que la peur pouvait toujours faire commettre des actes que l'on regretterait à jamais.
"La réponse la plus simple à ta question, et celle que tu aimerais certainement entendre, serait sûrement celle-ci : je suis de la cité et bien que je sache quelles sont les intensions d'une partie des conseillers, j'ai conscience qu'il y a des milliers d'innocents et je refuse catégoriquement de les envoyer à Tari pour l'idiotie de quelques uns. J'ai encore une femme et trois enfants là-bas, que je veux retrouver vivants et j'espère sincèrement qu'ils sont en bonne santé. De plus, je refuse que la mort des hauts-conseillers qui étaient pour la paix avec les noss et la mort de ceux qui m'ont suivi, ainsi le risque que prend celui que je considère comme un ami, ne servent à rien. Soient anéantis d'un simple claquement de doigts, d'un simple "oui" à la question que tu viens de me poser. Tout cela, je le pense bien. Et pourtant, ce n'est pas la réponse que je t'apporterai, pas celle qui répondra vraiment à ta question, qui me tient à coeur et m'aide à continuer sur cette voie."
Falaedhel regarda Mélnaica droit dans les yeux, avec calme et assurance. Les Etenirilis étaient pour la plupart devenus fous, cela il ne pouvait le nier. Mais une chose que certains oubliaient facilement, du moins à ce qu'il lui semblait voir, était que ces mêmes Etenirilis pouvaient être de fervents croyants. L'idiotie était une chose, la religion en était une autre - surtout lorsque la tradition lui était liée. Et Falaedhel ne dérogeait pas à cette tendance.
"Pourquoi ne peut-on pas tout simplement en finir ? Je vais te répondre sincèrement ce que je pense. Ce qui arrive actuellement devait arriver et même est pensé depuis des années voire même des siècles. Pas par ceux que nous sommes mais par ceux qui sont là-haut, notamment notre Mère. Je pense qu'elle avait ressenti depuis longtemps le changement qui s'opérait en Eteniril et a décidé d'agir à sa manière, sans pour autant mettre un terme à la vie de ses enfants. Elle aurait pu l'éviter ce de nombreuses fois. Il lui suffisait de faire en sorte que l'Aube n'accepte pas Neraën ou encore qu'il n'aille pas lui-même faire la guerre à Eraïson, que le commandant en chef de l'Armée Royale ne vienne pas à son intronisation. Et pourtant... Ce pourrait n'être qu'une série de hasard, je te l'accorde. Mais je suis sûr que non. Que l'Aube accepte un protecteur capable d'au moins ressentir la Symphonie, voire même de la comprendre ; qu'une enfant n'ayant aucun sang noss soit destinée à être druide, la première originaire de cette cité depuis des cycles ; que toi tu ais été présent juste à ce moment-là... et j'en passe. Trop de hasard sur plusieurs siècles pour que ce soit vraiment la cas. Je reste persuadé qu'elle nous met volontairement au pied du mur et place ses pions depuis beaucoup de temps pour que nous finissions par nous rendre compte de notre erreur et que nous retournions vers le droit chemin. Une mère a tout autant intérêt à retrouver ses enfants assagis qu'à les condamner... tout comme un père."
Il eut un sourire, sincère. Voilà ce qu'il pensait : Elle leur avait suffisamment laissé d'indices pour qu'ils puissent avancer. L'Aube en faisait bien entendu partie, même si rien n'avait jusqu'alors pu prouver que la magie qui était à l'intérieur était de nature divine. En fait, personne ne savait ce qu'elle était exactement et si sa fonction première différait de sa fonction actuelle. Quoi qu'il en soit, son "avis" ne pouvait être qu'un signe... là était la croyance etenirilie.
"Voilà ce que je pense, Mélnaica. Voici pourquoi je continue ce combat de la sorte et pourquoi je ne peux répondre qu'un "non" à ta question. Viens maintenant. Je sens que le printemps n'apportera pas avec lui que la renaissance des plantes et, avec un peu de chance, peut-être qu'enfin nous aurons une réponse du fameux gratin d'Alëandir."
Son sourire s'accentua, puis il lui fit signe de la tête de le suivre. Le druide lui faisait penser à l'un de ses fils, sur un certain point. Instinctivement, cela lui donnait presque envie de se montrer paternel envers Mélnaica... s'il ne l'était pas déjà un minimum. Tout en commençant à marcher, il lui demanda :
"Mais toi, dans tout cela. Tu n'es pas obligé de rester et pourtant tu es là à aider à sauver des vies qui n'ont pas vraiment d'importance à tes yeux. Pourquoi restes-tu ? Comment et pourquoi te bats-tu ? Pourquoi ne pas t'être laissé à détruire la cité ? En tant que druide, tu en aurais pourtant l'influence."
La question était sincère et n'avait aucunement pour but de piéger celui qui y répondrait. Peut-être même que le simple fait d'être énoncée de plusieurs manières différentes n'était là que pour aider ce jeune elfe qui ne voyait pas le bout du tunel qu'il avait emprunté.
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| | | Mélnaica
Elfe
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| Sujet: Re: Epopées hivernales : Le siège d'Eteniril Mar 19 Sep 2017 - 3:38 | |
| - I Mîngely ne place pas de pions comme le ferait un joueur. Le souffle nous a été accordé pour que l’on ait pleine liberté, mais elle continue de parler à tous. Ne fait l’œuvre de Kÿria que celui qui l’écoute… tu repenses à tous ces sourds, à tous ces aveugles, à tous ceux aussi loin de la Déesse que leur cœur désire en réalité en être près …de quelque manière que ce soit. Que Neraën ait été choisi par l’aube, ou une enfant des Cités appelée par la Nature, que je me retrouve ici… ce ne sont pas des pions placés pour servir un plan plus grand ; ce sont des messages de plus en plus désespérés d’une Mère que ses enfants n’écoutent plus.
Certains étaient comme toi. Certains baignaient dans les Chants. Certains se laissaient guider par l’émotion, flottaient au gré de la Symphonie, s’y perdaient parfois, mais ainsi se retrouvaient toujours là où l’Aînée les désirait. D’autres étaient comme lui. L’oreille percé mais le cœur ouvert, prêts à accueillir la pensée des frères à travers les mots des hérauts, prêts à risquer leur vie en l’honneur de la Mère. D’autres étaient comme lui, s’agrippant encore assez fort à ce qu’il leur reste de leur nature première pour résister à la folie. Parmi ceux comme toi, parmi ceux baignant dans les Chants, courait tout de même une toute autre sorte de folie. Celle contre laquelle tu luttes, celle qui nait des émotions contraires, nées du conflit entre le souffle d’Elenwë et la promesse du service de Kÿria. Parmi ceux comme toi, court une folie qui en pousse certains à prendre des vies, parfois même la leur, car à cause d’un esprit incapable de saisir l’exhortation de la Sylve dans toute sa complexité, ils se retrouvaient pour toujours piégés dans l’état de détresse que t’inflige cette guerre fratricide.
À sincèrement souhaiter ce qu’il ne veut pas, et à combattre ce qu’il ne sait pas vouloir, l’esprit s’est vite perdu.
- Je ne suis ici que parce qu’Ir Iarwin m’a demandé de l’être. Je dois rester, il en est ainsi. J’attends tu déglutis parce que les frères ne chantent pas encore la guerre… pas parce que je le veux. Tes doigts s’entremêlent, se crispent les uns contre les autres J’attends, parce que j’espère que les frères n’auront pas à la chanter. Quelque part, depuis mon échec, j’espère que l’Aînée entende ma prière et donne aux innocents d’entendre ce que je n’ai pas pu leur faire entendre, et les éloigne de la folie.
Tu marches à la suite de Falaedhel, confus par ton propre discours, perturbé par la constatation de la distance existant entre ta pensée et ton ressenti. Car oui, ta pensée est claire, et c’est ta pensée, pour le meilleur, qui gouverne tes actes ; mais ta pensée ne saura jamais expliquer le profond désir de destruction que nourrit chez toi la détresse. Tu es une colonne de granit fêlée, posée sur un plateau de verre, battue par des vents tempétueux. Tu es une Grande Œuvre, mais tu es fragile. Tu es fragile et les larmes d’Eteniril comme l’eau de pluie s’immisce à travers tes failles, les creuse, lentement mais sûrement. Tu as mal à cause de la pluie, alors quoi de plus simple que de souhaiter qu’elle s’en aille ?
- Je ne sais pas pourquoi. Je ne sais plus comment. Je ne fais qu’espérer Falaedhel Les larmes finissent par couler, mais tu ne t'écroules pas. Tu ne peux plus te payer le luxe de vaciller Et je ne sais pas si je pourrai encore tenir bien longtemps.
Jeune druide si tôt mis face à son devoir, jeune héraut à qui l’on a volé son enseignante, il ne te reste plus que les frères pour te guider, plus que les frères pour te garder, plus que les frères pour te comprendre, plus que les frères à qui parler. Jeune druide si tôt mis face à son devoir, agissant sans comprendre et comprenant sans agir, en ces jours d’hiver où les festivités battent leur plein chez les Pan’Mera, tu ne t’es jamais senti aussi seul.
Et pourtant ils sont nombreux à t'entourer.
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| | | Telenwë Neraën
Elfe
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| Sujet: Re: Epopées hivernales : Le siège d'Eteniril Mar 19 Sep 2017 - 10:06 | |
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Qu'y avait-il à rajouter ? Rien. Le jeune druide avait donné son avis et Falaedhel n'était pas celui qui allait s'amuser à jouer sur les mots. Que l'un voit dans les faits un dessin de la Mère alors que l'autre y voyait des cris de désespoir, les deux elfes étaient en accord sur un point : c'était là une volonté de Kÿria et non un simple hasard. C'était le principal à retenir et ce qui motivait le militaire.
Tout en continuant de marcher à pas lents, le capitaine écouta le noss. Il ne l'interrompit pas, ne montra pas une seule seconde qu'il pouvait avoir des questions ou remarques quant à ce qu'il racontait. Ce qu'il lui confiait, même. Falaedhel tourna juste rapidement son regard vers l'autre pour apercevoir les larmes couler sur ses joues avant de le porter sur l'entrée de la grotte, qui ne se trouvait plus bien loin. Tout de même, aubout d'un moment, il s'arrêta. Mimant un mal de jambe à endiguer à cause de sa blessure, cet arrêt était en réalité une marque respect de la part du citadin. Il avait vu l'état du druide. S'il ne le prendrait pas dans ses bras comme un enfant, il allait cependant continuer rapidement sur ce point sensible du héraut de la Mère. Faire en sorte que les autres ne perçoivent pas sa faiblesse était, aux yeux de l'etenirili, une marque de profond respect.
"Qui te dit que c'était vraiment un échec ? Je n'ai pas tout à fait compris ce que tu as essayé de faire avec Neraën dans le temple mais si le but était d'ouvrir l'esprit des elfes, d'une certaine manière, il semblerait que vous ayez réussi. Du moins est-ce là ce que j'ai pu entendre et ce que je peux voir des deux premiers groupes que vous avez ramené ici. Sinon..."
Il joua un instant avec sa canne avant de se retourner à demi vers son interlocuteur. Bien que sa mine était sévère, il ne put s'empêcher de sourire intérieurement : malgré les larmes et les doutes, ce petit restait debout et montrait une force que certains lui enviraient certainement.
"Sinon, vois cette histoire comme une chance de te relever plus fort que ce que tu ne l'étais avant de tomber dans ce tas de ronces. Faire de ses faiblesses des forces est un long apprentissage mais qui en vaut la peine, crois-moi. Peut-être même que cette saison t'aura apporté autre chose, qui sait."
Comme le fait d'apprendre à se connaître et à se comprendre. Mais cela, s'il pouvait deviner que Mélnaica avait encore des progrès à faire de ce côté-là pour avoir côtoyé un autre énergumène dans le même cas pendant pas mal de siècles, il ne le lui dirait pas. Il n'était pas à lui de lui mettre ce fait devant le bout de son nez, du moins pas aujourd'hui.
"Allez, sèche tes larmes et vient boire quelque chose au chaud, ça te fera du bien. Et ce sera toujours mieux d'attendre Soliandiel et Elveä là-bas qu'attendre que la neige ne retombe."
Pas de sourire, cette fois-ci. Le boiteux reprit sa marche, ne laissant pas le choix au druide que de le suivre. Ils allèrent ainsi jusque dans la grotte où habitaient pour l'hiver les quelques citadins vivant au coeur de la forêt. Comme dit plus tôt Falaedhel proposa à boire au druide, et fut même relativement surpris de voir le jeune elfe accepter le bol de thé chaud. Ils ne discutèrent pas vraiment, voire même pas du tout, en attendant que les deux noss arrivent. Il se passa une vingtaine de minutes pendant lesquelles Falaedhel repensa à sa famille restée en ville, avant qu'on ne vienne les chercher. Visiblement, les Linwë avaient décidé de rester dehors...
Ce jour-là, Elveä s'était fait une coiffe très... particulière au goût du citadin : elle qui souvent tressait ses longs cheveux avec des perles, elle s'était ce jour-ci amusée à tournicoter d'épaisses mèches de cheveux autour de bouts de bois, d'os et de feuille pourries. Bien qu'étrange, la manière dont elle avait agencé le tout sur sa tête formait une couronne forestière des plus intriguantes. Bien entendu, elle ne s'était pas départie de ses nombreux gris-gris et autres habituels, tout comme Solandiel et la petite tête blonde qui les suivait, grelotant de froid malgré les peaux plus lourdes qu'elle-même qui lui servaient de vêtements. En voyant Falaedhel et Mélnaica arriver Elveä sourit et s'avança pour les saluer à sa manière, tenant d'une main sa lance, l'autre caressant du bout des doigts leur visage, traçant d'un crayon invisible une demi-lune sur leur côté droit.
"Les deux lunes éclairent vos chants, amis. Les histoires sommeillent en ce jour, il est temps pour nous d'apporter une autre voix au bourdonnement."
Falaedhel se contenta d'incliner la tête, ne comprenant absolument rien de ce que la chef des Linwë venait de raconter. Certainement avait-elle voulu dire qu'il était temps de faire un point sur ce qui était, peut-être bien de prendre un tournant... Ah ces noss, surtout ceux-là, ils étaient parfois incompréhensibles ! Mais bon... on s'y faisait, on s'y faisait...
"Nous allons devoir partir pour les terres que vous appelez Actellys. Nos savoirs sont demandés, pour vous présenter la chose simplement, aussi nous aimerions savoir ce qu'il en est de votre côté avant. Mélnaica ?"
Le vieux druide n'avait dit mot, se contentant pour l'heure de laisser la petite elfe aux cheveux blonds se coller contre lui pour essayer de retrouver un peu de chaleur, et de poser une main paternelle sur son petit corps frêle. Cependant, tout comme Elveä, son regard se posa sur ce jeune druide qui avait encore à apprendre.
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