Apreplaine,
Kÿrianos de la 9ièmeennéade de Karfias de la 10ème année du 11ème cycle,
Cher ami,
J'ai appris par Suzanna le contenu de la lettre que vous avez envoyé au conseil de Sa Majesté. Comme je vous le disais dans ma dernière lettre, j'ai naturellement touché un mot de votre problème à S.E. le Sénéchal mais naturellement aucune réponse ne m'est arrivée. Vu l'état des routes vers le nord, tout cela n'est pas étonnant.
J'ai été heureux d'apprendre dans votre dernière lettre que M. de Travol vous a été d'un secours important. C'est un homme de grande valeur et qui dispose sur l'ensemble des troupes de Sa Majesté d'une aura importante. Je ne doute pas qu'avec un assesseur de cette trempe, vos ennuis de discipline resteront simplement de faibles problèmes. A vrai dire j'en doute si peu que je ne crains pas pour vous.
Mes craintes à votre endroit en revanche Hans reposent bien plus sur le contenu de votre lettre au conseil. Je sais que votre cœur est au bon endroit. Je sais que vous êtes un homme voulant respecter autant l'esprit que la lettre de la Loi. Je sais tout cela car nous nous connaissons depuis longtemps maintenant et que malgré les péripéties des domaines, nous savons tous deux que la fidélité au Droit est un point qui nous relie.
Je me souviens encore comme si cela s'était déroulé hier votre grande discussion avec M. de Vallencourt sur les principes du droit commun et de la continuité légale dans nos contrées. Je connais votre passion pour le rétablissement de la Couronne dans les plus prompts délais et la défense importante que vous avez mené pour celui que dont considériez que devions nécessairement reconnaître comme notre souverain.
Maintenant que la chose est faite, je vois que vous souhaitez être le roc qui ne flanchera pas devant les potentiels prises d'intérêts des domaines vassaux de Sa Majesté. Ma fierté de vous connaître grandit à chacune des occasions que j'ai de vous voir officier. Sans aucun doute Sa Majesté n'a-t-elle jamais été aussi bien servie à Vallancourt que depuis que je vous ai invité à reprendre la suite de M. de Vallencourt, dont le nom avait de proximité auditive avec son domaine qu'il était loin de le servir correctement.
Mais ma passion m'égare et je ne devrait pas parler ainsi en mal des morts.
Cher ami, si la passion m'égare, celle que vous avez pour le Droit pourrait aussi vous égarer. Lancer un ultimatum à un domaine, quel qu'il soit, serait une escalade politique inutile et dangereuse vu le contexte actuel. Que Soltariel décide d'occuper vos terres est un problème certainement, mais souvenez-vous que depuis notre retour sous la souveraineté de Sa Majesté, nous n'avons jamais été mis aux premiers rangs des décisions. C'est même l'opposé.
Notre destin et celui des sujets de Sa Majesté sur nos terres sont malheureusement conditionnés par des jeux de pouvoir qui nous dépassent. Il est même probable que chacun autour de nous regarde les terres de Sa Majesté avec une certaine forme de concupiscence. Il n'est pas impossible que la prise de Diantra et les mouvements dont vous nous faites parts soient l’œuvre de vocations que nous ne pouvons totalement maîtriser.
De toute manière nous n'avons ni la force ni le droit de lutter. La situation économique de la Péninsule est suffisamment délicate pour pouvoir affirmer que si nous mettons par simple principe le feu à l'huile, nous pourrions lancer un conflit dont l'issue sera funeste à l'essentiel de ses participants. Il est également probable qu'un mouvement de résistance, même se voulant être au nom de Sa Majesté ne soit détourné pour affirmer notre révolte.
De fait mon cher ami je vous conseille de prendre votre mal en patience et de vous concentrer sur l'office civil de votre baronnie. Le silence de la chancellerie, du conseil de Sa Majesté et des personnes qui nous font face ne sont pas un hasard.
Je comprends de votre lettre que vous avez peur qu'il s'agisse, malgré vos bons et loyaux agissement, du premier signe d'une volonté pour les grands de ce royaume de vous éliminer. C'est malheureusement possible, nous vivons depuis l'invasion du Médian avec cette possibilité au dessus de nos têtes. Aussi injuste et aussi désespérant que cette vision puisse être, je vous invite à faire preuve de flegme et de courage. Maintenez votre office, gérez avec industrie et justice ces terres qui vous sont confiés et ne prenez aucune décision influant la politique de la royauté. Là n'est plus notre place malheureusement.
Nous sommes des battants et des justes, laisser passer ces injustices et voir s’abattre cette infamie sur nos têtes nous donne l'envie de nous battre et de rétablir les mensonges que certains pourraient tisser à notre propos. Mais cette option serait la perte des sujets de Sa Majesté sur nos terres, nous le savons. Notre courage est encore plus grand d'accepter notre sort pour le bien de ces terres que nous chérissons pour Sa Majesté, quand bien même ceux utilisant la déchéance de la Couronne à leur profit cherche à nous abattre.
Restez fort, restez calme et par pitié ne prenez aucune forme de décision militaire contre les domaines qui marchent sur nos terres. Restez en aux instructions de la chancellerie et à informer qui de droit de la situation. Nos instructions sont de remonter nos terres et de faire acte de défense envers les personnes ne reconnaissant pas Sa Majesté. Restez en là et laissez Soltariel et les autres jouer à ce jeu guerrier dont nous avons été exclus de facto depuis que nous avons donné notre sang et la vie de milliers des sujets de Sa Majesté dans la guerre civile.
Avec mon amitié toute entière,