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Sujet: Pour le Sang et la Gloire ! Ven 23 Fév 2018 - 17:09
Un soleil pesant s'abattait sur la ville de Thaar, couvrant la ville d'une chape de plomb que tous fuyaient à la recherche d'une zone quelque peu d'ombragée. Les jardins couverts autour des fontaines attiraient maints passants avides d'une température plus agréable lorsque l'astre solaire se trouvait au zénith. Les bistrotiers réalisaient des affaires juteuses en proposant de la bière rafraîchie grâce aux pains de glace conservés sous leurs caves depuis les rudes mois d'hiver. Dans les palais ou dans les bordels, les esclaves se voyaient réquisitionnés afin d'aérer les seigneurs grâce à de grandes feuilles de palmier servant d'éventail géant. Même les malandrins s'affairaient avec moins d'entrain, leurs mains prestes comme éteintes malgré la vue de bourses bien rebondies.
Toutefois, il en était certains qui malgré la chaleur ne cessaient pas leurs activités. Dans les faubourgs de la ville, les écoles de gladiateurs continuaient à organiser leurs entraînements à plein régime afin de se trouver toujours prêtes à fournir leurs marchandises lors des fêtes que décrétaient régulièrement tel ou tel Prince Marchand. L'une de ces écoles commençait à se faire un nom dans le milieu : "l'école de l'Aile Blanche", un nom similaire à celui d'un bordel huppé du quartier nord des Docks et que l'on disait géré en sous-main par un archimage Eldéen à l'ego surdimensionné et à la patience notoirement limitée. Rumeurs ou réalités, force était de constater que certaines écoles rivales de l'Aile Blanche avaient récemment rencontré de légères difficultés imputables à une malchance provoquée par une main experte.
Lorsqu'un voyageur encapuchonné aux habits salis par la poussière se présenta aux portes de l'école, le portier envoya chercher le Lanista en charge des lieux. La monture de l'inconnu et la finition ouvragée de ses armes indiquait un visiteur de qualité, potentiellement un envoyé d'un Prince Marchand comme il en venait parfois pour affaires. Le gaillard semblait toutefois avoir fait du chemin, à preuve sa peau plus claire indiquant son origine péninsulaire. Le Lanista ne s'en formalisa toutefois pas, son maître lui ayant indiqué avant son départ pour le Puy de saisir toutes les opportunités d'ouvertures qui se présenteraient à lui pour accéder à de nouveaux marchés. Même si la Péninsule ne disposait pas d'arènes comme en Ithri'Vaan, cela valait la peine de s'y intéresser.
Bienvenue chez nous, voyageur, que souhaites-tu ? Organiser un combat entre nos champions peut-être ? Ou acheter un de nos gladiateurs ? Je voudrais m'engager, répondit Hanegard Kastelord en rabattant sa capuche.
La présence de l'ancien baron d'Alonna et châtelains de deux fiefs en Velteroc et Alonna pouvait surprendre, surtout lorsqu'il affirmait vouloir s'engager comme gladiateur. Le Lanista ne réagit pas car il n'avait pas la moindre idée de l'identité du volontaire que seul un péninsulaire proche de la noblesse aurait pu reconnaître. Néanmoins quelques explications s'imposent pour aider à comprendre comment le vaincu de la bataille de Valdrant se retrouvait si loin de chez lui.
Après avoir versé la rançon à Cosimo et quitté l'ost royaliste qui se battait (royalement) les flancs devant la cité de Chrystabel, Hanegard était rentré chez lui en Alonna mais sans réussir à y trouver le repos. La trahison subie de la part de Nimmio, le poids de tous ces hommes morts à Valdrant pour une cause déjà perdue le hantait au point de lui en faire perdre le sommeil. Que valaient encore les notions d'honneur et de loyauté dans un monde où seul comptait le pouvoir absolu sur les peuples de la Péninsule, quel qu'en soit le prix ? Sans compter qu'il se trouvait catalogué parmi les fidèles du "rebelle" Nimmio et donc un homme à surveiller tant que la stabilité ne serait pas retrouvée des frontières wandraises aux côtes de Soltariel.
Tous ces éléments avaient incité l'ancien baron a quitter la Péninsule, tant pour se faire oublier que pour chasser ses démons intérieurs. Il lui fallait faire revivre l'ancien Hanegard, le mercenaire au service du duc Merwyn qui même après avoir été anobli par le roi Trystan Ier de glorieuse mémoire n'avait jamais abandonné ses principes ni le code d'honneur des guerriers wandrais. Ses fiefs se trouvant en son absence gérés par Jena, ils seraient de fait sous la protection de Néera elle-même, cible bien plus malaisée à viser pour les royalistes extrémistes qu'un châtelain rebelle. Avant son départ, Hanegard avait soigneusement déposé son testament dans un office notarial à Alonna ainsi qu'une copie chez un de ses confrères de Velteroc, réservant l'héritage de ses fiefs à chacun de ses deux fils, sa fille se voyant dotée d'une belle dot apte à lui promettre un mariage intéressant.
La lourde rançon payée à Cosimo grévait certes sérieusement les finances de ses fiefs, mais Jena avait démontré ses capacités de gestionnaire et son statut de Gardienne lui facilitait l'emprunt auprès des banquiers en cas de besoin. Ses affaires domestiques réglées, Hanegard avait embrassé les siens avant de prendre la route de l'Est, leur promettant de leur donner de ses nouvelles et de revenir à eux lorsque le chaos aurait enfin cessé dans ce royaume déchiré par des guerres fratricides. Ce pèlerinage qu'il s'imposait ne devait pas l'amener à un sanctuaire spécifique car seul le destin guiderait ses pas, mais très vite un projet avait pris forme dans son esprit avant même d'atteindre l'Ithri'Vaan : défier la mort, cracher dans l’œil du destin et se prouver à lui-même que le sang bouillonnant des wandrais brûlait encore dans ses veines.
Bien entendu, le Lanista ne s'intéressait à rien de tout cela, aussi se contenta-t-il de demander :
Je vois... tu as déjà combattu, je suppose ? Oui, j'ai servi comme mercenaire pendant des années, de Serramire à Naelis et jusqu'en Velteroc. Pris liitéralement, ce n'était pas un mensonge.
Les deux hommes discutèrent pendant plus d'une heure des clauses du contrat. En effet, si certains gladiateurs étaient des esclaves à la merci du Lanista qui pouvait même les faire exécuter, les gladiateurs volontaires disposaient d'un contrat stipulant précisément la durée de leur engagement et le paiement qu'ils recevraient. Lorsqu'enfin ils tombèrent d'accord, ils topèrent puis apposèrent leurs signatures en bas d'un parchemin où un clerc avait repris les différents éléments.
Hanegard Kastelord
Ancien
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Sujet: Re: Pour le Sang et la Gloire ! Dim 25 Fév 2018 - 13:45
Après une nuit de sommeil dans une chambre au confort pour le moins spartiate, Hanegard fut réveillé aux aurores par un colosse à la barbe grisonnante et au visage buriné qui se présenta comme Valkor, le responsable des entraînements pour les nouvelles recrues. Le gaillard lui tendit une tunique et un pagne de toile rêche, constituant la tenue standard des gladiateurs à l'intérieur de l'école, puis l'emmena dans une petite arène située près du bâtiment principal où s'échauffaient déjà quelques combattants malgré l'heure matinale. Hanegard vit que le lanista observait la scène du haut d'une terrasse où se trouvait installé son bureau. Ainsi, tout en traitant ses affaires ou en recevant ses hôtes de marque, le maître des lieux pouvait conserver sous la main sa marchandise. Mais son attention fut vite attirée par Valkor qui entreprit de lui enseigner les bases de son art.
Première chose à savoir, le nouveau : les combats de gladiateurs sont un spectacle. Le public ne vient pas pour voir une boucherie bâclée en quelques coups, il veut oublier son quotidien morose et c'est nous qui devons l'aider à y arriver. Alors oublie tout de suite tes réflexes de mercenaire qui te poussent à régler ton affaire en un minimum de temps, pour conquérir la foule il te faudra faire durer le plaisir. Les combats sont gérées par des règles pouvant varier suivant les souhaits de l'organisateur. Les grandes fêtes suivent en général un schéma en cinq phases destinées à faire monter la tension dans le public durant la journée.
Valkor brandit son poing et leva un doigt épais comme un saucisson.
Première phase : des combats de démonstration, le plus souvent entre gladiateurs débutants ou pour ceux qui ont récemment combattus et qui ont besoin d'être un peu épargnés. Ces combats sont en majeure partie scénarisés et visent plutôt à montrer des attaques ou des défenses qui seront ensuite utilisés en combat réel, afin de laisser le temps aux spectateurs de s'installer ou de saluer leurs connaissances.
Petite pause, puis un deuxième doigt se leva pour rejoindre le premier.
Deuxième phase : des combats d’entraînements entre jeunes recrues sous la surveillance d'arbitres que nous nommons les sumarudis et qui arrêtent le combat une fois qu'ils estiment qu'un des deux adversaires a démontré sa supériorité. Les armes y sont émoussées mais les coups réels, c'est un excellent moyen de se faire connaître de la foule, tous les grands champions ont été repérés durant cette phase.
Un doigt de plus.
Troisième phase : des combats d’exécutions. Des criminels sont envoyés contre des gladiateurs. Les armes sont réelles et les condamnés sont graciés s'ils arrivent à tuer un gladiateur. Cela arrive rarement, ces misérables sortant des geôles de la cité sont mal nourris et souvent désespérés. Mais ça reste bien plus amusant qu'une banale exécution en place publique. Lorsque nous manquons de condamnés, il arrive que ce soient des animaux sauvages qui servent de cible. Le plus souvent, la troisième phase se termine aux alentours de la mi-journée et une pause est organisée afin de permettre à chacun d'aller se restaurer, boire et pisser. De toute façon, il faut nettoyer l'arène des cadavres qui y traînent.
Le quatrième doigt rejoignit ses confrères.
Le spectacle reprend durant l'après-midi pour la quatrième phase : les véritables combats. Les gladiateurs s'affrontent, en duel ou parfois en équipes. Chaque combat est suivi par un sumarudi qui veille à sa bonne tenue. Le public veut du beau spectacle, pas question donc de bâcler les choses ou de tricher. Le combat est arrêté lorsqu'un des adversaires s'avoue vaincu ou est blessé trop gravement pour continuer à combattre. Oh... si le public estime qu'un gladiateur a combattu trop lâchement, il arrive qu'il réclame sa mort. Autant la foule respecte celui qui est dominé par plus talentueux mais qui combat avec vaillance, autant le couard ne subira que des huées.
Enfin Valkor présenta sa grosse paluche avec tous les doigts tendus devant le visage d'Hanegard.
La cinquième phase enfin est la plus belle de toutes... malheureusement elle n'est plus organisée à chaque fois. Il s'agit du combat à mort entre deux champions. Pas de sumarudi, pas de règles, tous les coups sont permis. Les lanistas n'apprécient guère ces affrontements car ils peuvent y perdre un de leurs meilleurs gladiateurs, mais ceux qui en ressortent vivant deviennent les idoles de tout un peuple.
Ajoutant que c'est tout ce qu'il y avait à savoir pour un début, Valkor expliqua à Hanegard qu'il s’entraînerait dans l'école tous les jours jusqu'à ce qu'il soit prêt à entrer en arène. Le matin serait consacré aux exercices physiques afin de maintenir un état de forme optimale, l'après-midi aux maniements des différentes armes. Les gladiateurs maniaient souvent un type d'arme qui constituait leur outil de prédilection, mais leur entrainement devait les amener à disposer d'une vaste palette de possibilités afin de ne jamais être pris de court lors d'un combat. Les repas se prenaient en commun dans une grande salle, seuls les champions disposant d'appartements privés et de serviteurs à leur entière exclusivité car il s'agissait des investissements les plus rentables pour le lanista qui les chouchoutait donc pour s'assurer qu'ils continuent à lui amener des rentrées financières.
Quant aux sorties en dehors de l'école, elles se trouvaient fortement restreintes pour les gladiateurs-esclaves ou pour les nouveaux venus qui devaient encore faire leur preuve, la vigilance se relâchant une fois les premiers combats en arène effectués. Toute tentative de fuite se voyait par contre sévèrement châtiée, le lanista ne supportant pas que ses poulains lui glissent entre les doigts. Rares parmi les volontaires qui disposaient d'un contrat indiquant leur période d’assujettissement à l'école, ces tentatives se révélaient plus fréquentes chez les esclaves qui rêvaient toujours de conquérir leur liberté. Au repas du midi, Hanegard apprit que certains esclaves particulièrement talentueux se voyaient affranchis et devenaient des gladiateurs sous contrats, preuve que le système cherchait toujours à appâter ses ouailles pour les inciter à donner le meilleur d'eux-mêmes lors des combats.
Voilà un monde qui le changerait totalement de celui qu'il connaissait en Péninsule.
Hanegard Kastelord
Ancien
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Sujet: Re: Pour le Sang et la Gloire ! Mar 27 Fév 2018 - 13:41
[Deux ennéades plus tard]
Hanegard était entré dans une certaine routine depuis son arrivée à l'école de l'Aile Blanche. Chaque matin, il se levait aux aurores dès que le coq chantait, partageait le repas de ses condisciples -excellent repas au demeurant, le lanista veillait à ce que ses poulains aient une saine alimentation- puis rejoignait le terrain d'entrainement. Avec plusieurs nouvelles recrues, il exécutait alors les exercices que leur dictait un gladiateur plus aguerri qu'eux, ou s’entraînait seul lorsqu'il souhaitait se concentrer sur tel ou tel groupe musculaire. Après un nouveau repas en commun, l'après-midi se voyait consacrée au maniement des armes, contre des cibles d’entraînements ou d'autres élèves. D'anciens gladiateurs ayant cessé de participer aux combats se trouvaient également présents pour les conseiller dans le maniement des armes, les esquives ou les techniques de combat que leur longue expérience leur avait enseigné.
Après plusieurs essais de différentes armes, Hanegard avait conservé ses habitudes de combat avec une épée bâtarde associée à une rondache. L'épée bâtarde disposait de l'intéressante particularité de pouvoir se manier à une seule main ou à deux s'il lâchait sa rondache, ce qui lui permettait alors d'asséner des coups plus puissants pour mettre à terre un ennemi affaibli. Un couteau à la ceinture complétait son arsenal offensif, couteau bien équilibré afin de pouvoir être utilisé comme dague de jet si nécessaire même s'il s'agissait alors d'un coup désespéré. En matière d'armure, les gladiateurs se voyaient souvent plus limités, aussi l'ancien baron porta-t-il son choix sur des jambières pour se protéger des coups bas que sa rondache ne pourrait contrer, ainsi que sur une épaulette en métal pour protéger son bras d'arme. De fait, peu de gladiateurs choisissaient de lourdes armures car les combats se tenaient généralement en plein soleil et le poids de l'acier les aurait trop vite épuisé. La plupart faisaient comme notre héros et protégeaient uniquement quelques points vitaux pour le combat, comptant essentiellement sur l'agilité pour esquiver les assauts adverses.
Régulièrement, des apothicaires et autres praticiens les examinaient sous toutes les coutures afin de s'assurer de leur condition physique ainsi que de leur hygiène de vie. Les gladiateurs constituant un investissement sur le long terme, il importait de s'assurer qu'aucun pépin de santé ne viendrait impacter leurs qualités en arène, d'où un soin très particulier pris envers eux. Après chaque séance d'entrainement, des masseurs les huilaient soigneusement et dénouaient leurs muscles de leurs doigts habiles. Soumis à ce régime digne d'un guerrier spartiate, Hanegard en ressentait déjà les effets : sa peau commençait à bronzer sous le soleil et la petite bedaine que des années de vie fastueuse dans les châteaux de la Péninsule lui avait fourni se résorbait pour laisser les abdominaux reprendre leur place légitime. Si les premiers jours avaient été éprouvants et qu'il se couchait le soir tout endolori, l'entrainement revenait bien et il se sentait plus jeune que jamais.
Cette après-midi-là, l'ancien baron assénait coup sur coup à un confrère demi-drow dénommé Roödran qui portait l'un de ces lourds boucliers qu’utilisaient certains colosses. Les deux gladiateurs souhaitaient vérifier l'intérêt d'une telle protection à l'aune de la fatigue qu'engendrait dans les bras le poids de métal supplémentaire. Le test se révéla vite non concluant, car alors que son adversaire soufflait comme un phoque et tenait à grand peine le bouclier de ses bras tremblants, Hanegard continuait ses assauts sans faiblir. D'un commun accord, ils arrêtèrent et rangèrent le bouclier à l'armurerie, satisfaits d'avoir eu la confirmation de son inutilité dans les températures caniculaires qu'il leur fallait affronter.
Valkor les observait depuis un moment déjà. Lorsqu'ils eurent fini, il leur fit signe d'un geste sec de le rejoindre.
Pas mal, vous progressez. A la prochaine énnéade se tiennent des jeux en l'honneur du mariage de la fille d'un prince-marchand. Vous y participerez, d'abord dans un combat d'entrainement puis pour l’exécution d'un groupe d'esclaves fugitifs. D'ici là vous êtes dispensés des séances d’entraînements collectifs, vous les ferez directement avec moi.
Un frisson d'excitation et d'anxiété mélé emplit les veines du wandrais : un combat, enfin !
Hanegard Kastelord
Ancien
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Sujet: Re: Pour le Sang et la Gloire ! Sam 10 Mar 2018 - 20:01
[Une énnéade plus tard]
Ce n'était pas la grande arène de Thaar, celle où se tenaient les grandioses festivités organisées par le conseil des princes-marchands, mais une arène plus petite se situant non loin des faubourgs et du quartier des écoles. Malgré tout, les lieux permettaient aisément d'accueillir plusieurs centaines de spectateurs avides d'émotions dans de vastes gradins dominant la fosse de combat. Bourgeois, marchands, membres de la petite noblesse locale ou simples artisans se pressaient dans les travées écrasées par un soleil victorieux, échangeant des amabilités avec leurs connaissances ou essayant d'attirer l'attention des vendeurs de vin qui proposaient leurs petites jarres emplies du précieux liquide tout juste tiré des caves où des blocs de glace le maintenaient au frais. Bref, l'ambiance était à la fête en ce jour de mort et de sang.
Dans le long couloir souterrain menant à l'arène, Hanegard vérifiait une dernière fois son équipements tout en jetant un œil distrait aux voûtes de pierres taguées de nombreux encouragements ou bravades inscrites par des gladiateurs depuis des lustres. Ses jambières se trouvaient solidement attachées à ses tibias, les prises de son bouclier enserraient bien son bras gauche mais sans qu'il lui soit impossible de s'en dégager si besoin, et son épaulière droite se trouvait maintenue par d'épaisses lanières se croisant sur sa poitrine. Dans sa main d'arme, l'ancien baron tenait son épée bâtarde d'entrainement soigneusement émoussée car l'objectif de cette première participation à des jeux ne devait pas être de verser du sang. Tout du moins pas immédiatement, car on annonçait un combat d’exécution pour la suite durant lequel il troquerait cette épée contre une autre au fil véritablement tranchant.
Les sumarudis passaient dans les rangs, vérifiant que les gladiateurs se trouvaient correctement appareillés, Hanegard se trouvait en compagnie d'un gladiateur venu d'une autre école, armé d'une lance et d'un lourd poignard, vêtu d'une cuirasse qui lui protégeait le torse. "Parfait, il s’essoufflera vite", pensa le wandrais en se souvenant de ses entraînements à l'Aile Blanche. Satisfait, leur lanista ainsi que ses collègues donnèrent le signal du départ.
Allez ! Et combattez bien !
Au petit trot, les gladiateurs sortirent du tunnel pour rejoindre l'arène sous les acclamations du public. Chaque duo suivi son sumarudi jusqu'à l'emplacement prévu pour l'affrontement. Six duos allaient combattre simultanément en ce jour, ces combats servant à faire découvrir de nouveaux gladiateurs au public que le héraut citait au fur et à mesure de leur entrée. Hanegard se trouva ainsi simplement nommé "Haven l'ours wandrais" par le crieur, les gladiateurs utilisant des pseudonymes pour leur métier en se basant sur leurs particularités physiques ou sur leurs origines ethniques. Les combattants originaires des wandres se trouvant rares en Ithri'Vaan, ce surnom s'imposait de lui-même. Quant à l'ajout de l'ours dans le nom, il s'agissait d'une idée du lanista qui aimait ajouter des noms d'animaux -son champion d'ailleurs portait le pseudonyme de "scorpion"- et sans doute estimait-il que les ours constituaient la faune la plus représentative des lointaines wandres.
Sur un signal du sumarudi, les deux gladiateurs se jetèrent l'un sur l'autre. Déviant de son bouclier un coup de lance porté en direction de son abdomen, le wandrais répliqua avec un taillage de sa lame à hauteur des genoux que l'autre n'esquiva qu'en reculant précipitamment. Rendu prudent par la vivacité de son adversaire, le gladiateur à la lance commença à tourner prudemment autour d'Hanegard, cherchant à l'atteindre grâce à l'allonge supérieure de son arme. Cette tactique lui donnait l'avantage de pouvoir porter ses attaques, certes avec peu de chances de réussite, mais sans l'obliger à s'exposer lui-même. Dès lors, il lui suffisait de compter sur une erreur du wandrais pour le toucher et amener le sumarudi à lui accorder la victoire. La pointe de son arme se trouvant par ailleurs entourée de piquants, Hanegard ne pouvait pas la saisir pour tenter de la lui arracher.
Pendant plusieurs minutes, les deux combattants tournèrent ainsi l'un autour de l'autre, la lance de l'un ripant sans cesse sur le bouclier de l'autre, les rares contre-attaques d'Hanegard fendant le vide car il n'arrivait pas à réduire suffisamment la distance pour prendre l'avantage dans un corps à corps. La sueur coulait à grosses gouttes sur le visage du baron malgré le ruban de tissu qu'il s'était noué autour du front, et il portait toute la concentration de son être sur l'ennemi, entendant à peine les cris de la foule pour les encourager, les applaudissement lorsqu'un autre duo finissait en beauté un duel ou leurs huées lorsqu'un gladiateur manquait de courage à l'assaut. En cet instant tout lui paraissait si simple : lui et l'ennemi face à face, sans la traîtrise de Nimmio ni la cruauté de Thibaud ou l'ambition de Renaud. Juste deux hommes face à face, leurs muscles noués et leurs nerfs tendus cherchant à trouver la faille dans un ballet martial reflétant la beauté du combat dans toute sa simplicité.
Comprenant qu'il lui fallait changer de tactique, Hanegard choisit de ruser en se souvenant d'un conseil de son premier maître d'arme, Le vieux guerrier wandrais lui avait enseigné qu'un combat bloqué se remporte lorsq'un participant fait une erreur en se découvrant, et que feindre une faiblesse peut amener l'ennemi à se découvrir dans le faux espoir d'en finir. Sur l'attaque suivante, le baron para volontairement un peu tard et tituba sous l'impact, mettant un genou à terre pour maintenir son équilibre. Croyant sa victoire assurée, l'autre gladiateur prit le risque de frapper de nouveau et plongea sa lance droit vers la poitrine d'Hanegard. Mais ce dernier avait feint la chute sans véritablement perdre ses appuis et il sauta agilement de côté lorsque la lance fondit sur lui, abattant au passage son épée sur la hampe en bois qui pour être épaisse se brisa net sous l'impact comme un vulgaire fétu de paille. Son adversaire hébété regardant avec stupéfaction le tronçon d'arme qu'il lui restait, Hanegard ne lui laissa pas le temps de reprendre ses esprits et lui flanqua de toutes ses forces sa rondache en plein visage. L'impact brisa net le nez du malheureux qui fut renvoyé en arrière et s'effondra au sol, sonné pour le compte.
Une brume rougeâtre avait envahi l'esprit du wandrais, qui déjà s'avançait vers le vaincu et ne fut arrêté que par la badine blanche du sumarudi qui se leva devant lui pour lui rappeler que le combat n'était pas à mort. Se calmant peu à peu tandis qu'on le déclarait vainqueur, le wandrais regarda lentement tout autour de lui le public qui avait apparemment apprécié le combat au vu des applaudissements nourris. Tous les autres duos s'en étant déjà rentrés dans le tunnel, Hanegard comprit que son combat avait duré plus longtemps. Combien de minutes exactement ? Il aurait juré que l'affrontement venait à peine de commencer, mais la douleur qui irradiait dans ses muscles lui indiquait sans l'ombre d'un doute qu'un effort prolongé venait d'être soutenu. D'un pas lent, mais levant bien haut son épée pour saluer le public, le vainqueur rejoignit ses confrères en savourant pleinement l'ivresse de l'instant.
Pas de trahison, pas de politique.
Juste le combat.
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Sujet: Re: Pour le Sang et la Gloire !
Pour le Sang et la Gloire !
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