De la Culture au sein de la Décadence [Shyn'Tae]

« Si vous êtes là, c’est que vous devez être à la hauteur, quoique cela puisse signifier… Même si cela ne tient qu’au fait de mieux supporter ce genre de mondanité. »

Elle disait cela en pensant au Maître Façonneur et membre du Zho’us Raghar – ou ex-membre… Ignorant ce qui constitue un motif d’exclusion suffisant pour ce genre de groupe, difficile à dire. Est-ce que la poursuite à distance de ses études et travaux, en étant financé par une étrangère pour quelques décennies sans doute, était suffisant pour motiver au renvoi d’un précieux façonneur ? Le rejet des valeurs eldéennes par un tel individu motivait-il davantage ou considérait-on toujours cela comme les divagations d’un esprit connu malade mais doué en son domaine ? Bref, une grosse parenthèse pleine de vent, mais c’est ce qui arrive lorsqu’on touche à « Lui » - qui ne consentait qu’à reculons à participer à ce genre de sauterie sans intérêt – sinon de temps à autre, à se montrer et appâter le gros poisson. C’est qu’il fallait bien que l’investissement rapporte quelque chose de temps à autre – sinon une distraction prompt à faire perdre du temps à celui qui avait pourtant l’éternité dans le sang.
Bref, pour un mage qui consacrait son esprit à percer quelques secrets des dieux, c’était d’une inutilité complète.

Et donc pour une raison ou une autre, d’une manière ou d’une autre – d’un bidule féminin (chose ça sonne mal) ou d’une autre etc… -, cette mage paraissait avoir le temps de se consacrer à ce genre d’évènements, c’était donc qu’elle avait certainement certaine qualité pour y prétendre – considérée feignante, n’ayant rien de mieux à faire- et si Ranaghar avait été présent, il aurait sûrement produit sa conclusion, mais la Dame Blanche ne s’égara nullement dans ces considérations… Elle en ignorait trop au sujet de l’Etude Noire pour supposer quoique ce soit.

En passant, elle évacua sans y prêter d’attention la mention du « malfaisant »… Quoiqu’on en dise, ou quoique certaine prétende savoir sur son compte, son avis sur les eldéens n’avaient pas besoin de préjugés ou de jugements supposés moraux pour se faire, l’histoire lui suffisait amplement. Mais son regard n’était en vérité pas si différent de celui qu’elle portait à certaines populations de la Péninsule, la différence tenait dans la proximité et le poids d’une présence plus importante d’Elda.
En produit de la culture thaarie, elle chérissait son cosmopolitisme et l’amalgame des héritages variés, et avait de fait pour adversaires ceux qui soutenaient la supériorité de leurs cultures et aspiraient à sa domination sur les autres.
Ainsi, si la culture et l’art eldéen l’intéressait, c’était au même titre que tout autre.

Mais trêve de blabla, revenons à l’essentiel.

« Il paraît effectivement que la Bibliothèque de Thaar ait accaparé votre attention depuis votre arrivée dans notre cité. Y avez-vous trouvé votre bonheur ? » L’intérêt était réel, une authentique eldéenne qui donne plus d’intérêt au lieu de savoir qu’à tout autre était digne d’attention.

Qui sait, après tout… Une eldéenne réellement intéressée par la culture pourrait représenter une interlocutrice plus attrayante que les autres pour accéder à des pièces et des pans plus rares – ou difficile d’accès – de ce qui peut reposer dans les profondeurs du Puy.

« Eh bien, eh bien ! Vous ne faites pas les choses à moitié, à ce que je vois. »

Bon, comme elle l’avait dit elle-même, c’était une première approche large, certes, mais peu approfondie, mais tout de même, cela dénotait d’un intérêt certain pour une culture étrangère, ce qui était une chose peu commune chez ceux de son espèce.

« Nous avons notre content sur ces sujets, effectivement, l’œuvre de passionnés et de mécènes au cours des années autant que le résultat de notre héritage cosmopolite. Nul autre endroit ne s’alimente et ne voit coexister autant d’influences différentes, après tout. »

Il y avait de la fierté, tant parce qu’elle appartenait au nombre de ceux qui y contribuèrent le plus, et les années ne feraient qu’accroître la part qu’elle y avait, que parce qu’elle était thaarie, cité où se mêle héritages et cultures ailleurs en conflit.
L’évocation des civilisations antiques, toutefois, apportait une touche d’ombre et de regret… Oui, Thaar bénéficiait certainement d’une des plus riches collections et d’un des plus importants rassemblements d’œuvres culturelles, par sa variété, du continent. Mais la Principauté était en même temps affligée d’un mal terrible infligé par les eldéens et par les pentiens – dans une bien moindre mesure - : elle était amnésique. Héritière pour partie des Nisétiens, elle n’en possédait plus ni la sagesse ou les connaissances, et même son histoire la plus ancienne, la plus importante lui était interdite.
Légendes et contes, balades et chants furent partiellement conservés par la mémoire des bardes préservés de la Chute, Quelques écrits, quelques tablettes comme celle dont elle avait fait faire une copie pour cadeau, retrouvés et préservés par ceux qui tentèrent de sauver ou de s’enrichir – comme ses ancêtres – sur ce qui n’avait pas été emporté ou détruit. Mais on en avait perdu la véritable signification, on en avait perdu l’essentiel.

« Si vous devez vous intéresser aux civilisations antiques, il vous faudra effectivement vous nourrir de patience et de persévérance. Nous souffrons d’une mémoire lacunaire et de plus en plus défaillante à mesure qu’on revient en arrière. »