Un jour mon prince viendra | Amarilys, Myosotis

8e jour de la 7e ennéade de Karfias ~ été
17e année du XIe Cycle

A la pointe de jour, les oiseaux chantent sur les toits, les mouettes crient et les goélands piaulent en accueillant les derniers bateaux de pêches au ventre alourdi des prises de la nuit. Dans le ciel, un légère brise chassait les rares nuages. La journée s'annonçait radieuse. Mais elle ne le sera jamais autant que la jeune femme qui venait de sortir de l'auberge. Elle était suivie par deux adolescentes.
D'un bon pas, elles dévalèrent la pente pour aller à la plage.

- Dis grande sœur, pourquoi il faut que tu jettes ce bout de tissus dans l'eau ? Demanda la plus jeune à la chevelure d'or.

- Pour que cela porte bonheur à notre couple ! A Ydril, il est de coutume que le matin des noces, la jeune mariée doit jeter à la mer un symbole de sa vie passée pour accepter celle à venir ! La belle brune avait ses deux mains jointes, tenant le précieux symbole contre son cœur. Ses yeux étaient si brillants qu'ils pouvaient rivaliser avec l'astre solaire.

- Heureusement que le mariage n'est pas à Termer… La rousse, avait un sourire amusé en imaginant le bain matinal dans les marais…

- Sommes nous à Ydril ?

- Non… Mais c'est une coutume… Comme celle d'organiser une veillée avant le mariage et celle que les futurs époux ne se voient pas avant le mariage.

Ha… L'adolescente se pris son menton dans sa main pour réfléchir. Ha ! Mais c'est pour cela qu'il y avait un rideau qui séparait Hespéris et son fiancé, hier soir ?

- Oui. Mais, je ne suis pas certaine qu'il faille cumuler les deux.

- Dis Hespéris, c'est quoi ce bout de tissus tout sale à l'odeur nauséabonde ?

- Ce bout de tissus, comme tu dis, m'apportait beaucoup de réconfort pendant mon plus jeune âge. Maintenant, j'aurai un doux et beau mari. Et c'était ça ou vous deux…

Nous deux ? Les sœurs avaient posé la question en même temps.

Oui, car après tout, je dois me séparer de vous pour connaitre un bonheur plus grand encore ! Le bonheur de fonder une famille ! La demoiselle avait posé ses mains contre une joue et souriait aux anges Comme nos parents ! Regardez comme ils sont heureux !

Les cadettes se regardèrent et ne dirent plus rien. Alors la future mariée en profita pour entrer dans l'onde saline. Afin d'honorer une autre tradition, elle se mit à genoux dans l'eau après avoir lancer son chiffon. Elle priait pour le regard des Dieux se pose sur leur couple et bénissent leur union.

Les rayons du soleil de ce début d'après midi pénétraient le temple de Néera en une cascade de lumière douce et pure. De fines particules de poussière dansaient dans l'air frais comme autant d'étoiles d'or et d'argent. Les bancs et les colonnes avaient été décorés de somptueux bouquets de fleurs blanches dont l'odeur estivale élevait les cœurs déjà vibrant d'émotions.

Des représentants des deux familles étaient venus de loin pour célébrer devant les dieux l'union de deux êtres que l'amour le plus pur avait réunis (1). Une jeune enfant, cachée sous un banc, les yeux grands ouverts devant la beauté de l'évènement observait le couple de prêtres officier de leurs voix unies et chantantes à coté de l'autel décoré. Mais ce qui l'emplissait plus encore d'extase, c'était la robe blanche richement brodée d'or d'Hesperis de Termer, ses chaussures doublées d'hermine, sa peau de porcelaine, et sa longue chevelure de jais dont les reflets luisaient d'or sous les rayons qui l'illuminaient comme dans un écrin.

Hesperis était heureuse, elle rayonnait de bonheur devant son futur époux. Depuis qu'il l'avait vue cheminer entre les hauts piliers de pierre blanche, il avait été fasciné par la beauté, par la perfection de la promise qu'il regardait maintenant dans les yeux, et qui lui semblait à cet instant la perfection incarnée. Cela ne rendait que l'instant plus beau, avait pensé la jeune femme!

-Moi… heu… Sigismon Arsinoé…. Choisis…. Librement… prendre comme.. Hum… épouse… Hesperis de Termer. Et devant tous les dieux, je… je… je fais le serment de… la protéger.. De l'honorer, de lui rester fidèle, defairedesonmalheurmonmalheuretsesintérêtsmesintérêts…. Deux soufflesuneseulevie."

Le père du jeune marié s'était posé la main sur le visage en un signe universel. La mariée, elle, était aux anges.
 
-Moi, Hesperis de Termer, choisis librement de prendre comme époux Sigismon Arsinoé! Et devant tous les dieux, je fais le serment de le soutenir, de l’honorer, de lui rester fidèle, de faire de son malheur, mon malheur, et ses intérêts, mes intérêts. Deux Souffles… une seule vie! »

On aurait eu dit qu'elle chantait, elle avait travaillé les pauses. Il fallait dire que l'ainée des de Termer s'était beaucoup entrainée. Elle se souvenait de toutes ces fois où elle avait répété avec ses sœurs dans le petit château de Termer. L'exercice n'avait pas été inutile.

***

-Il faut le refaire encore une fois!" Hesperis s'adressait à ses deux sœurs. Elle était vêtue d'une robe blanche pure comme la neige, tout comme Myosotis qui se tenait face à elle et dont la mine oscillant entre indifférence et lassitude. Derrière les deux sœurs se trouvait la troisième, Amarylis, vétue d'une robe d'un bleu semblable à celui des prêtresses de Neera. Elle semblait un peu perdue.
-Encore?" Avaient répondu d'un même cœur sincère la rousse et la blonde. Car cela faisait bien deux bonnes heures durant lesquelles elles répétaient encore et encore avec leur grande sœur.
-Oui. Myo, tu es belle, jeune, enthousiaste ! Tu te maries aujourd'hui avec moi, essaye de faire preuve de plus d'enthousiasme! On dirait ton enterrement.
-Je n'ai pas très envie de me marier, Hespe. Même avec toi. Ta partie est parfaite, la mienne est… futile. Tu ne veux pas trouver un beau garçon pour le faire à ma place ?" Et là-dessus, la demoiselle était partie, abandonnant la charmante donzelle à son triste sort.

Heureusement, elle n'était pas seule. Hesperis s'était tournée vers sa jeune sœur vétue de bleu.
-Hmm… aller, viens en face de moi, regarde moi bien dans les yeux, tu fais le marié.
-Mais?
-Ah! Tu as raison, il te faut une robe blanche.

Hesperis était toujours un peu étrange quand elle était pressée, pensa Amarylls. Sans crier gare, cette derniere se déshabilla pour se changer, sous le regard éberlué de sa grande sœur.
-Ama! C'est un lieu sacré!
-Je croyais que c'était ta chambre…

***

Les mariés avaient échangés leurs vœux, les prêtres avaient célébré l'union. Les parents des mariés avaient le cœur empli d'un bonheur sincère devant les opportunités que cette union allait générer.

Le chœur se joignit à la célébration en entonnant les champs liturgique de circonstance. Des jeunes filles, vêtues de blanc et couronnées des mêmes fleurs blanches qui donnaient au lieu cette virginale atmosphère. Parmi elles se trouvaient les deux plus jeunes sœurs d'Hesperis de Termer.

On les avait placées à l'arrière. Myosotis ne pouvait pas s'empêcher de se dandiner souplement au rythme de la musique. Quant à Amaryllis, on lui avait spécifiquement demandé de faire semblant de chanter: Elle trouvait les chants liturgique peu inspirés d'un point de vue mélodique et avait tendance à improviser des améliorations.


(1): et surtout des intérêts concordants, car le pragmatisme est la plus belle des valeurs.

Danses, musique, chants. La fête battait son plein. On avait célébré l'union de deux êtres, mais surtout de deux familles,. Maintenant il était l'heure de boire, de manger, de rire. On avait installé des lampions, des rubans, les lumières de la fête illuminaient les jardins de la lueur de milles étoiles.

Une brise légère s'était levée en début de soirée, l'atmosphère était chaude et pesante en cette nuit d'été . Quelques râleurs avaient bien remarqué les nuages noirs qui s'étaient amoncelés au dessus de la mer, mais on les avait ignorés. .

***

Amaryllis de termer n'aimait pas les fêtes. Elles ne la mettaient pas à l'aise. Trop de gens, trop de risques de dire quelque chose qui risquerait de lui attirer des ennuis. La jeune fille ne parvenait pas à comprendre ce qui habitait la tête de ses congénères. Tant de bruit, tant de non dits, tant de mots qui signifiaient le contraire de ce qu' il paraissait...

Elle s'était débarrassée de de la lourde robe que lui avait choisi sa sœur Hesperis, du corset qui avait contraint son ventre, son buste et jusqu'à sa posture pour toute la journée. Amaryllis n'en pouvait plus. Les rubans, les fleurs qui decoraient ses cheveux étaient seules à rappeler encore que c'était jour de fête. Pourquoi était-elle si triste ? Était-elle jalouse de voir un jeune homme lui voler sa grande sœur ?

C'était aussi quelque chose d'étrange qui l'avait mise mal à l'aise. Tous ces garçons qui avaient voulu danser avec elle, lui avaient murmuré des mots qu'elle supposait devoir qualifier de galants. Ils voulaient quelque chose, elle ne savait trop quoi. Malheureusement, ils avaient fui lorsqu'elle avait demandé.

La benjamine de la famille était assise sur le rebord du grand lit, pieds nus, vêtue seulement de sa chemise. Elle ruminait ses sombres pensées pendant que la servante rangeait la robe, attendait qu'elle vienne défaire ses cheveux apprêtés lorsqu'on frappa à la porte.

Sans attendre de réponse, elle s'ouvrit. La jeune fille avait souri en se tournant vers l'entrée ,car elle attendait Myosotis. Son sourire se mua alors en une expression d'étonnement.

Son père, Adonis de Termer, se tenait à l'entrée. Son regard glissa sur elle, il avait le sourire aux lèvres.

Pendant un long instant, le brouhaha étouffé de la fête, dehors, furent seuls à braver le silence. Ce fut la fille qui finit par briser le sort.

-Père, cela ne va pas ?"

L'homme ne lui répondit pas.
-Constance, pourriez-vous nous laisser ? " La femme entre deux âges s'inclina respectueusement et s'esquiva sans un mot. C'était une ancienne, elle servait les de Termer depuis qunm'elle était enfant, et avec grandi avec le seigneur. Constance avait appris à ne pas se mêler de ce qui ne m'a regardait pas.

Le seigneur referma la porte derrière lui, tourna la clé et la mis dans sa poche.

Il fit quelques pas vers sa fille, sa démarche hésitante. Il avait bu. Il s'arrêta, il la caressa du regard.

La jeune fille préféra regarder devant elle, mise mal à l'aise
-Je peux... Faire quelque chose pour vous ? J'ai fait une bêtise ?" Elle n'était pas certaine. La petite blonde ne pensait pas avoir commis d'impair, mais elle savait par expérience que c'était un domaine dans lequel elle ne pouvait pas avoir confiance en son jugement.

-Tu grandis si vite.. Tu me fais penser à ta mère... Quand elle était jeune. Plus belle encore... " Il s'approchait pesamment, elle releva les yeux pour le suivre du regard. Elle n'avait aucune idée de ce que le seigneur voulait.
-Beaucoup plus obéissante que ta garce de sœur... "
-Père!" La demoiselle voulu se relever, son père posa la main sur son épaule à moitié dénudée, l'autre s'était abattue sa bouche.
-chut. " Adonis s'agaçait." Tais-toi. Tais-toi! Apprends à te taire ! Quand tu te TAIS, on pourrait croire que tu n'es pas écervelée ! "

Le silence à nouveau. Amaryllis n'osait plus bouger, son cœur battant. Lui sourit, ses doigts sur son épaule remontèrent sur sa peau nue, sur son cou fin, jusque sur sa nuque altière. Elle frémit, son regard de biche apeurée sur lui.
-Voilà... C'est mieux... Beaucoup mieux." la main de son père car caressa sa joue, puis descendit sur sa gorge soyeuse. Elle trembla, son souffle rapide." Tu crois que je ne t'ai pas vue... Aguicher ces hommes... Comme une catin ?"

C'était faux pensa-t-elle. Ou était-ce vrai ? La jeune fille ne pensait pas avoir rien fait de mal. Elle s'était si souvent trompée. C'était si difficile de comprendre les hommes. Elle secoua la tête.

-Ne me ment pas… Tu aimes ça… " La main s'était glissée sous sa chemise. Il serra un sein ferme, si douloureusement que la jeune fille gémit au travers de sa paume et saisit de ses deux mains fines le bras solide qui la bâillonnait. Elle le repoussa, les muscles bandés. L'homme de tressaillit pas, démontrant largement l'impuissance d'Amaryllis.

Il la poussa contre le lit sans ménagement en retour. La longue chevelure d'Amaryllis, ornée de fleurs et de rubans blancs,  répandue comme un halo de lumière sur la couche, la jeune fille gracile en son pouvoir, Il en rêvait depuis qu'elle était devenue femme.

Elle se débattait, la panique s'empara-d-elle alors que la main de son père abandonnait le sein qu'il avait capturé pour dénuder ses cuisses. Elle poussa un cri étouffé, ses jambes battirent maladroitement, elle lui donna un coup de pied. il s'appuya sur elle et lui donna une gifle étourdissante en retour.

-Tais-toi. Sois sage , tu en veux une autre?

Elle se tut, sanglotant, tremblante au contact de sa main sur l'intérieur soyeux de ses cuisses. Plus haut monta la chemise de nuit. Que pouvait-elle faire? Qu'avait-elle fait? Elle devait avoir fait quelque chose qui le poussait à agir ainsi.

-C'est mieux… c'est bien.. Si douce…

Amaryllis ferma les yeux, angoissée. Si elle ne bougeait pas, ce serait fini bientôt.

Il y eu soudain un bruit sourd, Adonis poussa un cri, elle sentit son poids sur elle. Quelqu'un tirait son bras, elle rouvrit les yeux pour voir Myosotis qui la tirait à elle vivement.
-VIENS!"

Elle suivit le mouvement, la panique dans les yeux. La lourde bassine avec laquelle sa grande sœur avait frappé leur père tomba sur le sol, et elles partirent en courant vers la sortie.

La porte ne s'ouvrit pas. Le seigneur des lieux avait la clé.

Myosotis tira sur la poignet frénétiquement, une fois, plus deux. "Myo !" Dans le regard de sa sœur se trouvait quelque chose qu'elle n'avait jamais vu auparavant. De la panique ? De l'incompréhension ? De l'impuissance? "Myo !" répéta-t-elle. "C'est fermé…" La rousse enfant s'élança vers la porte qu'elle avait emprunté pour entrer en serrant la main de sa sœur si fort qu'elle lui faisait mal. Sur le lit, Adonis maugréa, étourdit par le choc. Il se leva soudainement et tendit le bras pour attraper ses deux filles.

Il n'attrapa que les courants d'air, et retomba à genoux au sol. Un filet de sang coulait le long de sa joue. Son regard dément accrocha celui d'Amaryllis alors qu'elle disparaissait par la chambranle. Elle frémit.

-REVENEZ! Sales garces!

Dehors, la foudre tomba. Une fois.
Le tonnerre gronda.
Frappant les panneaux de verre de la riche demeure, la pluie s'abattit, comme un torrent.

L'orage était là. La fête était terminée.

-REVENEZ! Vous allez me payer ca, catins.

Haletante, paniquée, Myosotis courrait dans les couloirs de la grande bâtisse dont elle ignorait tout à la recherche d'une sortie. Sa sœur la suivait, amarrée à son bras. Leur chevelures, l'une de cuivre, l'autre d'or, toutes d'eux ornées de fleurs, flottaient derrière elle comme la dentelle de sa chemise de nuit. Cela ne pouvait pas arriver, se répétait la plus vieille des deux, les larmes aux yeux. Leurs pieds nus glissèrent sur le parquet ciré lorsqu'elles prirent un virage trop brusque. Le bras d'Amaryllis accrocha un vase, qui tangua, chuta. La demoiselle tenta de le rattraper, mais, entrainée par sa sœur, ne fit que l'effleurer.

La faillance se brisa comme un écho au tonnerre.

Déséquilibrées elles aussi, elles enfoncèrent violemment une porte de bois verni et tombèrent au sol sur le riche parquet. Myosotis, grimaçante, écarta sa tignasse rousse de ses yeux et se releva sans hésiter. "Viens!", grogna-t-elle, essoufflée,  à l'attention de sa puinée. Son regard paniqué alternait entre celle qu'elle voulait tant protéger et le couloir sombre zébré par les éclairs derrière elles, et surtout sur ce qui s'y trouverait bientôt.

Amaryllis, lèvres entrouverte, regard perdu au loin, ne comprenait pas. "Myo…" murmura-t-elle pourtant d'une voix faible alors que cette dernière la tirait à elle.

***

Les chaussures élégantes de l'homme frappait méthodiquement le parquet, pas après pas.

Pas après pas, résonnant entre les coups de tonnerre,  Il s'approchait inexorablement.

Les chaussures s'immobilisèrent. Son regard perçant, ivre de colère, s'était posé sur une flaque d'eau et des débris de faillance. Il glissa sur la porte ouverte au-delà.

Un sourire en coin se dessina sur son regard.

Coincée.
La jeune fille sentait la pierre froide dans son dos et la chaleur de la poigne de son père contre sa gorge. Elle lutta et tapa le bras qui était sensé la guider dans ce monde. Mais rien n'y fit. Elle ne faisait que monter. Monter. Monter.

Myosotis lutta pour avoir une lapée d'air et se contenta de partager celui méphitique de son géniteur.

- Comme ça… tu es jalouse ?

Le sourire de l'home était carnassier avant de se jeter contre elle. La pression se relâcha au niveau de son cou.

- Tiens toi tranquille pour une fois…

Ayant besoin de sa main, il lâcha sa prise. Le jeune cœur battait si fort que des pulsations bâtaient contre ses tempes. Elle ne voulait pas. Pas ça. Pas encore. Tandis que les mains douces de son père relevait le tissus délicat de sa tenue de nuit, elle tremblait.

Comme à l'accoutumée, il fut brutal. Un coup. Deux coups. Il s'écroula en avant en grognant.

Sous le rideau des larmes, la demoiselle distingua sa sœur, les yeux exorbitées sur le dos du patriarche. Ses yeux parvinrent à se focaliser sur le dos qui lui faisait face, sur tout le rouge qui s'étendait, sur le manche qui en dépassait, sur les armoiries qui y étaient gravées.

Là trônait Epingle, enfoncée jusqu'à la garde. Sa dague avait trouvé un nouvel écrin.

Elle avait la nausée. Amaryllis, dressée derrière l'homme, semblait l'observer avec curiosité, pensive. Elle avait l'air aussi cruche que d'habitude, et elle avait poignardé le seigneur de Termer.

Quand enfin libre, elle se releva, leur père tenta de l'agripper en grognant, le regard fou de colère. La large main ne rencontra que le vide.

- Catin…..

Myosotis saisit la main frêle de sa sœur, et l'entraina à sa suite.

Impossible de se souvenir dans le détail ce qu'il s'était passé ensuite. La course dans les couloirs alors que la tempête zébrait le ciel de ses éclairs d'une violence impitoyable, la sacoche qu'elle avait ramassé, les mots qu'elle avait prononcé.

Amaryllis n'avait pas posé de question. Pourtant Amaryllis posait toujours des questions.

Elle n'avait pas réfléchi, elle ne se souvenait pas comment ses mains s'étaient emplies, mais elle avait emporté le manche et la lame d'Aiguille.

Ni comment elles s'étaient retrouvées ainsi dans la nuit, sur un cheval non scellé, à cavaler sous la pluie.

Loin.

Le plus loin possible.

Sans regarder en arrière.