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| [Molgrunn] Lève la tête et puis s'en va... • Yggdar | |
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Haldin Barbedrue
Nain
Nombre de messages : 200 Âge : 233 Date d'inscription : 23/04/2008
Personnage :.: MANUSCRIT :.: Âge : 228 ans en l'An 18 • XVI Taille : Petite Niveau Magique : Non-Initié.
| Sujet: [Molgrunn] Lève la tête et puis s'en va... • Yggdar Sam 24 Aoû 2019 - 11:57 | |
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17° Année | XIe Cycle Karfias • Été IXe Enneade
Car il n'avait en rien perdu son caractère de cochon, quand il apprit en l'an quinze par la bouche de son roi qu'il devait partir à Molgrunn quelque temps afin d'y apporter son expérience, Haldin pesta plus que de raison. Seulement, un ordre était un ordre voilà pourquoi il s'y plia – nonobstant, après quelques minutes d'insubordination verbale, cela va de soi.
« Vieux couillon » marmonna-t-il toutefois en quittant Hardrek, le Groman-Rik du Zagazorn, quand bien même portait-il le suzerain dans son cœur. Pourtant, malgré la joie qu'avait procuré la redécouverte de la cité à Haldin, désormais Ongaraz Royal il avait incontestablement d'autres chats à fouetter que de se perdre au fin fond du Septentrion ; sans doute se disait le vieux nain, irait-il un jour en villégiature découvrir la cité alors réanimée, mais il était désormais capitaine – royal – d'une petite escouade fort compétente par sa polyvalence, par les couilles rabougries du mille fois maudit Mogar, pourquoi devrait-il alors partir presque deux années jouer en somme aux conseillers dans un paumé trouffion, aussi honorable et important soit-il.
C'est que comme il l'avait fait pour l'élevage entre autres, pour tous les choix qu'il avait réalisé dans sa vie, ce qu'il avait entreprit, il s'y donnait corps et âme ; et aujourd'hui encore une fois, ces tâches auxquelles il s'atelait, l'encensaient avec violence ferveur. En effet le Grommtrommi dans son nouvel élan martial post-elliptique dirons-nous, n'avait de pensée que, pour le combat et le son de sa hache décapitant l'ennemi, pour ses chiens rongeant leurs os, pour la protection des frontières dawies ou pour les visiteurs qu'il fallait à tout prix surveiller malgré qu'il acceptât favorablement leur présence. Non, il n'avait plus le cœur à diriger quoi ou qui que ce fût, sinon des cognards dans l'optique de défendre concrètement sa nation, de faire savoir au reste du monde que les nains étaient toujours ce peuple d'intérêt. Tout cela comme une nouvelle passion, un credo, ou le rêve d'un vieil inconscient !? Et fichtre ! Que le bétail, les pâturages la forêt la faune la flore l'agriculture se trouvent un autre larbin, car lui dans ce domaine il fallait l'avouer, avait tout donné ! Évidemment que le vieux nain ne manquait ni de mérite ni d'exploits à son actif, ce qu'il avait apporté au peuple dawi – plus particulièrement à Thanor – n'était pour lui que les souvenirs d'un passé révolu, qu'il avait déjà fait fructifié. Aujourd'hui il se devait d'aller de l'avant... Bien qu'il ne lui restât que l'équivalent d'une vie d'umgi à vivre, peut-être, avant de calencher... C'est justement pour cela, se disait constamment l'Ongaraz Royal, comme pour se réconforter dans son nouveau choix de vie, autant pleinement s'épanouir avant de rejoindre les Halles, pardi ! C'est qu'il n'était plus Maître Éleveur, Thane ou Conseiller de cité, d'ailleurs qu'aurait-il pu faire en revenant à Thanor après plusieurs années passées à mener des combats contre l'adversité – dragons, dragonneaux, engeances, grobis, wandrais et j'en passe – sinon dépérir d'inanité en voyant la jeunesse prometteuse prendre le relais. Ce qui était déjà le cas.
Il avait fait le bon choix.
Quoique il eût perdu des êtres chers.
Mais il lui restait Mirza et son amour pour elle.
Il lui restait son amour pour le Zagazorn.
Et encore dix, cent, milles tâches à accomplir peut-être !
Il était désormais une bête de guerre, plus terrible que les centaines de galioths qu'il dressat jadis, décidé à exterminer au besoin la violence par la violence, ou la bêtise par la ruse. Il était une sentinelle, mûre et réfléchie. Oui il était une pièce maîtresse à l'instauration d'un futur placé sous de meilleurs auspices, pour les enfants du Zagazorn. Ainsi allaient les choses, et le dawi ne faisait que suivre ce que lui dictait son cœur, tout ce qu'il y a de plus normal pour un honorable dawi tel que le Barbedrue. Et voilà que le Poing-de-fer qu'il avait accepté d'obéir, l'envoyait en pré retraite accomplir il ne savait quelle transmission de savoir ! Sinon ceux de Mogar, ses testicules furent les jours qui suivirent, moult fois cités.
Les jours qui suivirent furent en effet bien agités pour Haldin et les siens. Il leur faudrait partir plusieurs longs mois à ressasser un nonchalant passé, et que pouvait-il faire d'autre sinon espérer accomplir sa mission avec succès afin de retourner au plus vite, affronter l'incontestable présent qu'il voulait absolument appréhender, ainsi qu'il l'entendait. C'est avec Mirza donc son épouse et leurs nombreux animaux qu'ils filèrent promptement jusqu'à la cité perdue de Molgrunn, qu'avaient retrouvé pour le plus grand bonheur du Petit Peuple, une elgi et son fou de père adoptif – un dawi que Haldin connaissait par ailleurs. Ce serait une occasion de le revoir, et qui sait, une fois là-bas, avec un peu de recul, il comprendrait les choix de son roi, car ni l'un ni l'autre n'étaient nés de la dernière pluie.
Le syrphe qu'il tentait de chasser revint à la charge une dernière fois, le faisant loucher tandis que l'insecte statique, volait par-là entre ses deux yeux une fraction de seconde, par-ci titillant une dernière fois ses esgourdes, avant de s'en aller embêter une autre pauvre victime, ou de butiner quelque précieuse fleur de ce merveilleux endroit qu'était le Vallon. Le Vallon, quelle sublime forêt de conifères – presque fantasque – avait-il découvert en arrivant à Molgrunn en début d'année, et ô combien il louait maintenant la sage décision de Hardrek, qui inconsciemment peut-être avait réconcilié le vieux nain avec son passé, son présent et qui sait son futur.
Il repartirait bientôt sur les routes, ça oui, mais sa soif de sang et de justice s'était évaporée, ici, sur cette terre recolonisée qu'il avait su lui-même s'approprier en presque deux ans. Quel plaisir avait-il eu à partager son savoir avec des dawis si enthousiastes, quel baume au cœur avaient-ils reçu lui et son épouse en aidant les nouveaux habitants de Molgrunn. Quelle paix coulait dans leurs veines... Et quel bonheur ressentait-il en foulant la terre d'abondance qui chapeautait la cité, offrant à celle-ci son meilleur moyen de subsistance. C'est à l'abri d'une cabane au milieu de cet énorme plateau arboré qu'ils avaient élu domicile, refusant ardemment de partager le Perchoir avec ceux qui s'en occupait, sous prétexte qu'ils ne voulaient ni lui ni Mirza les gêner alors que les hôtes insistaient ; mais peut-être préféraient-ils eux-mêmes ne pas être gênés par le flux quotidien de barbus qui venaient communiquer avec l'extérieur depuis les hauteurs que les corbeaux voyageurs affrontaient.
Pour en revenir au Vallon, c'était une riche et dense forêt de plusieurs centaines d'hectares que les cimes enneigées bordaient impérieusement ; le gibier abondant était cependant recensé, l'énorme réserve était gérée en différents quartiers afin de mieux gérer les ressources que la faune et la flore offraient aux délicats et responsables hôtes dawis. Sous la direction de l'Ongaraz, des sentiers avaient été tracés afin de rejoindre plusieurs endroits stratégiques, ainsi que de rares zones délimitées et interdites, puis d'autres entretenues par différentes coupes et tailles résultant d'une écoute parfaite de leur environnement, du climat et des réserves du merveilleux endroit. Oui c'était un paradi pour quelque race qui soit, mais c'étaient eux les fiers élus du Septentrion, alors autant être à la hauteur rigolait le nain tandis qu'il se reconnectait avec la terre, lui que le fer avait depuis deux décennies, perverti. Il ne faisait de nouveau plus qu'un avec son environnement.
Pour accéder au Vallon les téméraires devaient soit affronter la périlleuse ascension du Langk Duraz – imaginez falaises pentes et escarpements, abrupts de centaines de pieds de haut – soit tout simplement être dawi et naturellement s'y rendre depuis la cité en passant par la Porte de la Main. C'est après un dernier coup d'œil lancé sous les frondaisons du Vallon, que le vieux nain pensif fit demi-tour, s'engouffra par la porte majestueuse et dévala une à une les marches qui le mèneraient au Quartier de la Chasse, puis plus loin à la recherche du Maître Forgerune Yggdar. Il avait besoin de parler avec quelqu'un. Sa gorge se noua à mesure qu'il approchait des quartiers de son homologue. Il avait besoin du réconfort d'un confrère, d'un ami. En effet, si lui partait, Mirza elle, pensait rester à Molgrunn. Il n'était que tristesse.
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| | | Yggdar Frappe-Rune
Nain
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| Sujet: Re: [Molgrunn] Lève la tête et puis s'en va... • Yggdar Mer 28 Aoû 2019 - 20:12 | |
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Deux années s’étaient écoulées depuis que les Nains du Zagazorn eurent entamé la reconquête de l’antique cité de Molgrunn. Perdue derrière le Langk Duraz, elle fut sauvagement enlevée aux Nains qui en avaient fait leur fief. Le clan des Gueules-Brûlantes, passé maître dans l’art de forger des runes, avait compilé d’antiques savoirs, créant d’innombrables œuvres et perfectionnant les dons de Yaron à un point rarement connu par les Nains. De cette époque révolue, il ne restait que des légendes, des contes et des fables, des récits racontés au détour d’une bière… Jusqu’à-ce qu’une Elfe Noire ne retrouve la fameuse cité, pour rendre au Zagazorn les savoirs d’autrefois et les perspectives d’une futur radieux. C’est dans cet atmosphère de renouveau et de bénédiction qu’Yggdar s’était installé dans ce qui fut jadis une forge d’un membre du clan des Gueules-Brûlantes. Sa demeure souterraine était spacieuse, comme le pouvait être une habitation de pierre, et elle surplombait une partie de la cité, lui permettant d’observer les lieux et l’agitation des Dawis qui s’y étaient établis. Il aimait, après une journée harassante, ou après avoir fait son œuvre dans la Gransalle, s’installer sur une petite terrasse attenante à sa demeure, et s’installer sur une confortable chaise longue. Là, il regardait la cité, voyant, dans les rues, passer les Nains qui continuaient leurs labeurs, qui rentraient chez eux, qui se rendaient à la taverne. Sa bière dans une main et sa pipe dans une autre, il savourait ces instants bénis des Fils de la Forge, heureux qu’il était d’avoir pu rencontrer tant de Dawis et apprendre tant de choses, ici, à Molgrunn. Il y avait eu la venue d’une vieille barbe également, envoyée directement par le Grand Roi lui-même. Yggdar, qui respectait les barbes illustres du pays, accueillit ce nouveau venu avec impatience et grand honneur, et pour cause, il était l’Ongaraz Royal et un ancien membre éminent du Haut Conseil de Thanor. Mais Yggdar était fidèle à lui-même, et si une amitié notoire s’était installée entre les deux, il laissait tout de même un fossé certain entre Yggdar le Nain, et Yggdar le maître Forgerune. Il ne parlait pas de ses connaissances, de ses œuvres, de ses capacités runiques, jamais. Ce serait trahir le code, et cela n’était absolument pas envisageable. Mais il commençait à avoir confiance en Haldin Barbedrue, et, pour une fois, il allait le laisser entrer dans sa forge. C’est que sa journée avait été longue et difficile, comme toutes les autres depuis plusieurs mois. Le Grommtromi et Zagaskroni du clan Frappe-Rune était afféré à une pièce d’arme tout à fait exceptionnelle, laquelle lui demandait d’énormes efforts et beaucoup de travail. Il y était attelé depuis presque trois mois maintenant, œuvrant chaque jour que le Père faisait, du matin au soir, dans la chaleur étouffante de sa forge qui disposait cependant de conduits d’aérations avec l’extérieur. Il frappait le métal, le refroidissait brutalement avant de frapper encore, pour le porter à nouveau à blanc. Au fur et à mesure des jours, des ennéades, l’arme prenait forme. Une hache d’arme, à double lame, faite d’un manche d’acier qui, plus tard, serait recouvert d’un cuir tanné et de fil de soie. Le cuir serait étoffé par des runes taillées rendant gloire au Zagazorn et à Ikthor, et l’arme était forgerunée. Deux runes étaient forgées au sein de l’arme, et ces runes, bien que maîtrisées par Yggdar, demandèrent une telle précision que cette arme était déjà la troisième tentative d’Yggdar. Mais cette fois-ci, le travail avançait bien. L’acier chauffé à blanc rayonne d’une chaleur agréable pour le Forgerune, habitué depuis deux siècles à y être confronté. Chaque coup de marteau – forgeruné aussi – produisait des étincelles, signe que les impuretés étaient boutées hors de l’arme. Des scories, déchets de forge, devaient être régulièrement jetés, mais ceux-ci ne prendraient ni forme ni vie, contrairement à ce qui fut le cas pour Mogar lorsqu’il créa les humains à partir des déchets de la Première Forge. Les Umgis… Des êtres infâmes, pervers et perfides, qui usent de machinations politiques pour arriver à leurs fins. Personne ne fait confiance à un Longue-Jambe, pas même un autre Longue-Jambe, c’est dire. L’arme en préparation reposait dans un bac d’eau froide, lequel produisait une grande colonne de vapeur tant la chaleur peinait à se dissiper. Yggdar avait ôter son tablier de cuir roussi par le temps, et il avait également retiré ses lunettes de protections, se retrouvant en vêtement de coton et en pantalon de cuir, avec de grosses bottes doublées d’acier. Les poings fermés sur ses hanches, il regardait le résultat d’une énième journée de travail. Il était tout au rangement de ses outils forgerunés – d’une valeur inestimable – lorsqu’il entendit derrière lui les pas lourds d’un poilu qui s’approchait. Jetant un rapide regard en arrière, il reconnut Haldin, l’envoyé du Roi. Rangeant alors ses outils dans son tablier, il prit le temps de le ranger lui aussi dans un endroit secret à l’intérieur de la forge, avant de revenir devant son ami à la mine triste. - Eh bah alors, vieille barbe ! Qu’est-ce qu’s’est c’te trogne ? Hum ? Vient ! J’ai quelqu’chose à t’montrer. Il se tourna de trois quart pour montrer à Haldin l’arme en train de refroidir. Elle est pas finie, mais elle commence à avoir d’la gueule. C’t’une hache d’arme For’runée, à l’intention du Groman-Rik en personne. Toi qui l’connais bien, dis-moi, qu’est-ce qu’t’en penses ? Vas-y, balade toi ! T’es l’premier qu’j’autorise à passer l’pas d’la forge. Et tandis qu’Haldin observait, visitait, Yggdar mit sa pipe au bec, bourrant un peu de tabac dedans avant de passer son doigt corné sous la rune d’ignition, laquelle mit bien rapidement le feu au tabac qui laissait s’échapper une agréable odeur de caramel.
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| | | Haldin Barbedrue
Nain
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| Sujet: Re: [Molgrunn] Lève la tête et puis s'en va... • Yggdar Sam 7 Sep 2019 - 12:20 | |
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« Ého ! Salutations, Aldrunr ! Comme d'habitude, on s'cache ? Bon, bon... Je t'attends sur la terrasse ! cria Haldin alors qu'il arrivait non loin de la forge de son ami. Humour et sympathie impregnaient leur relation, ainsi en témoignait le surnom que Haldin avait employé : vieille rune. Surnom qui convenait parfaitement à son homologue. »
Que cette vieille trogne lui était fort amicale ! Comme si le Maître Forgerune qu'il avait apprit à connaître depuis plusieurs mois, appartenait à son propre clan... Mais Haldin ne portait de son clan que l'appellation désormais, depuis qu'il s'était émancipé de son passé. Et, ne disait-on pas après tout que les dawis étaient tous frères ? Cela lui suffisait.
Incroyable mais vrai, le Rhunki de Molgrunn lui ouvrit alors les portes de son antre. Était-il le premier invité à pénétrer ce lieu depuis sa redécouverte ? Possiblement. Au seuil ils échangèrent les politesses habituelles avant de se lancer plus en avant.
« Eh bah alors, vieille barbe ! Qu’est-ce qu’s’est c’te trogne ? En effet l'Ongaraz Royal semblait abattu malgré son sourire – quelque peu forcé. Hum ? Viens ! J’ai quelqu’chose à t’montrer. Ils s'avancèrent d'avantage. – Hm ? fit Haldin avec un intérêt non feint – ignorant superbement la question –, alors que son homologue pivotait sur lui-même, lui offrant vue sur une œuvre d'art en création, reposant docilement au fond d'un baquet d'eau. Il ne s'agissait pas de n'importe quelle arme. – Elle est pas finie, mais elle commence à avoir d’la gueule. C’t’une hache d’arme For’runée, à l’intention du Groman-Rik en personne. Toi qui l’connais bien, dis-moi, qu’est-ce qu’t’en penses ? Yggdar était ce genre de dawi que Haldin affectionnait tout particulièrement, pour sa franchise entre autres. Car lui aussi était sincère, il répondit du tac au tac. – Deb Makaz... Je la trouve inachevée, certes, toutefois... Sublime, ip, sublime. Je n'ai pas souvent – pour ne pas dire jamais – eu la chance d'observer une arme de cette qualité, nai, nai... En prononçant les derniers mots, son regard détaillait chaque millimètre de ce qui pourfendrai l'adversité pendant des temps immémoriaux, tandis que ses grognements appréciateurs en disaient plus sur son ressenti. Il en sera ravi, ip conquis, parole de dawi ! Dit l'ancien Bouc de Thanor. Que représentent les runes ? Demanda-t-il, curieux, car il n'arrivait pas dans leur complexité à déchiffrer leur sens et donc leur pouvoir. »
Quelques instants plus tard, fort de cette information, Haldin osa un regard circulaire lui permettant pour la première fois d'apprécier la forge dans sa globalité. C'est qu'il n'y avait jamais été convié malgré leur amitié – il n'était pas le seul à n'en point douter – et c'était une chose que le nain comprenait ou tout du moins respectait. Comme en réponse à ses doutes, et à sa timidité, Yggdar s'exclama : « Vas-y, balade toi ! T’es l’premier qu’j’autorise à passer l’pas d’la forge. – Par Heidum... C'est un honneur, Yggdar... Et cette fois-ci il ne taquina pas son ami, ne le traita pas d'ours bougon, et franchement touché il se mit à visiter la tanière – non, l'atelier – du vieil ursidé. »
Sans ajouter quoique ce fut donc, les mains derrière le dos, respectueusement le vieux nain déambula, se promenant entre les enclumes et autres outils et à travers les différents espaces de la forge, ressentant l'atmosphère propre de celle-ci avec délectation ; l'odeur, la chaleur, la texture si douillette pour un nain que rendaient feu, roche et métaux, en un enchevêtrement gracieux, tout cela réconforta le nain. Encore une vérité dawie, un secret, un art, que son vieux frère Zagazkroni pérpetrait honorablement, et avec un indubitable savoir-faire.
« C'est donc ce lieu que tu gardes jalousement, là que tu te caches si souvent, respectable ours ! Mais... Je te comprends... Oh oui... En disant cela il se remémora un temps révolu alors que lui-même appréciait le cadre bucolique et la compagnie des bêtes et de leurs pâturages. »
Il bourra sa propre pipe mais à défaut de rune d'ignition il l'alluma conventionnellement, rêveur, méditatif.
« Tu sais que je pars bientôt, dit après quelque temps un Haldin plutôt morose. »
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| | | Yggdar Frappe-Rune
Nain
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| Sujet: Re: [Molgrunn] Lève la tête et puis s'en va... • Yggdar Sam 7 Sep 2019 - 20:48 | |
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Yggdar appréciait le vieux Haldin Barbedrue. Cela pouvait être un exploit en soit. Non pas qu’il n’aime personne, qu’il n’apprécie la compagnie d’aucune tresse ni d’aucune barbe, mais son caractère bougon et sa propension à être aussi cordiale qu’une enclume font de lui un Nain aussi bourru que son faciès buriné. Il dispose ainsi d’une réputation d’Ours, et il en porte le caractère également. D’ailleurs, s’il appréciait la franchise du vieux Haldin, il ne put réprimer un grondement sourd lorsque celui-ci souligna le caractère non terminé de la future Az royale. Cependant, le grondement disparu aussitôt le caractère fascinant et honorifique de l’arme évoqué par le vieux Barbedrue. Si Yggdar était aussi muet qu’un tertre concernant ses habilités et sa magie, il demeurait fier face à ses créations et ses capacités, et la reconnaissance d’un tel travail acharné ravivait toujours sa Braise-Vie. Mais chaque création, chaque succès, il l’imputait à Yaron et Smadan. Le Grand Scribe avait apporté l’art de l’étude, de la perfection des connaissances, et la patience et, surtout, des runes. Et Smedan, le Maître des Forges, apprit aux Nains à maîtriser les métaux et leurs transformations en tout ce qui pourrait être utile au peuple du dessous. Ces deux savoirs ainsi cumulés permirent aux Forgerunes d’exister. Ainsi rendait-il constamment hommage aux deux demi-dieux, les premiers fils de la première Forge. Satisfait à l’idée que le Groman-Rik soit heureux de l’arme en fabrication, Yggdar esquissa un léger sourire sous sa moustache relevée, et tira une bonne bouffée d’air sur sa pipe en acier. Et heureux face aux commentaires du vieux Barbedrue, il s’appuya d’autant plus sur sa canne, ce qui permit à son vieux dos d’être mit au repos, tout comme sa jambe handicapée. Même des décennies après cet accident magique, il souffrait encore des connaissances. Ses mains étaient caleuses et noircie de suie. Par endroit, sur les doigts, on pouvait voir des milliers de petits points rougis parmi la suie, témoignages des impacts des étincelles à chaque fois que le marteau cognait le métal. L’enclume d’ailleurs, s’illuminait d’une légère couleur bleutée semblable à la couleur des océans. Tous les outils du vieux Forgerune avaient été forgerunés par ses soins. En soit, chacun de ces outils était une œuvre à part entière, et valait son pesant d’or, quand bien même personne d’autre que lui ne pourrait s’en servir. La question de la signification des runes, cependant, fit perdre son sourire au vieux runiste. Une telle question n’était pas anodine, et bien des runistes s’étaient écharpés par le passé afin de garder secret le patois runique qui leur était propre. Un tel partage de savoir ne se voyait presque plus depuis le Voile. La destruction de Kirgan avait vu la destruction de la Gransalle, et des milliers d’années de savoirs compilés qui s’y trouvaient. Un affront, une calamité. Le partage de connaissance était toujours difficile entre runiste, et Yggdar n’en faisait pas exception. Il n’acceptait de travailler uniquement avec les runistes de son clan, spécialisés dans la magie immatérielle, pour la plupart. Et pourtant il savait que, par le passé, les plus belles et les plus puissantes créations purent voir le jour grâce aux partages de connaissances et aux travaux communs. Appuyé sur sa canne elle-même forgerunée, le vieux passa une main noircie dans sa barbe blanche, et pesa le pour et le contre. Pas runiste pour un sou, la question de Haldin était sans aucun doute motivée par la curiosité et par l’importance du moment et sa solennité. Et après quelques secondes qui purent paraîtres longs, il s’avança, sa canne claquant à chaque pas sur la pierre taillée, afin de répondre au vieux bouc. - Par ma barbe, t’as bien d’la chance d’être c’lui qu’t’es ! Une telle question chez les runistes à d’jà causé pas mal d’soucis par le passé. Mais puisque la Gransalle renaît de la reconquête de Molgrunn, j’va t’parler d’cette création. Il sort la Az refroidie mais encore légèrement chaude afin de l’emmener plus loin, sur l’établie. Il prit un poinçon, le plus petit de tous, depuis une saoche en cuir tanné vieilli depuis des décennies. Le prenant entre ses doigts, il l’utilisa comme un professeur utiliserait un bâton pour faire lire à ses élèves, les runes marquées au tableau. C’t’une rune complexe. En fait, c’t’un aggloméra de deux runes, une rune de terre et une de feu. Ensemble, elles vont produire un sort à part entière. Je n’peux t’en dire plus, Haldinazul. Cette Az n’est pas encore terminée. C’est ma troisième tentative. Je prie Yaron et Smedan de me donner la force de la réussir convenablement. Il termina cette phrase en prenant, de dessous son tablier, et au creux de sa pogne, la rune de Yaron qu’il porte constamment autour du cou. Une simple rune, sans pouvoir aucun, mais à la signification si importante pour lui. Tandis que Haldin continuait sa visite de la grotte, laquelle, au demeurant, était suffisamment spacieuse pour permettre à Yggdar de bénéficier de deux endroits distincts : une partie dédiée au travail à chaud et une autre, au travail à froid, le vieux maître Forgerune posa sa main sur la Az qui produisait encore un peu de chaleur, ferma les yeux, et tout en maintenant la rune de son pendentif dans l’autre main, se mit à ressasser une prière à demi-mot, en hommage à Yaron. Il eut à peine fini ce moment d’aparté qu’Haldin évoqua ledit lieu, et la jalousie avec laquelle Yggdar tient les autres poilus à l’écart. Et le surnom allait revenir, d’ailleurs. Ours. Un ours. Que ce surnom lui allait bien. Pour toute réponse, Yggdar produisit un rire feutré doublé d’un hoquet. « Tu sais que je pars bientôt Tenant sa pipe d’acier au creux de sa pogne droite, Yggdar baissa quelque peu la tête, son regard acéré se perdant quelque part au sol. Pour première réponse, il hocha de la tête de bas en haut, avec on grondement d’expiration. Il prit finalement la parole. - Ip, Haldinazul, ip. Et je sais qu’ta tressée d’bavette veut rester ici, à Molgrunn. D’puis qu’t’es arrivé ici, j’tai vu changer, Grobidrengi. Ip. Et t’as fait c’qu’aucun aut Dawi aurait pu faire ici-bas, pour sûr ! P’t’être qu’maint’nant, t’pourrais travailler pour toi, tu l’mérite plus qu’quiconque, Ongaraz. Il était conscient que cette phrase allait à l’encontre du projet d’Haldin, et même à l’encontre de ses responsabilités, lui qui était Ongaraz royal. Aussi, un long silence s’installa, uniquement stoppé par les bruits des autres Forgerons au loin. Bah ! Que dirais-tu d’une bonne chopine pour parler d’ça tranquill’ment ? J’dois encore enl’ver mon tablier, et laver un peu mes pognes, et j’s’rai prêt !
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| | | Haldin Barbedrue
Nain
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| Sujet: Re: [Molgrunn] Lève la tête et puis s'en va... • Yggdar Dim 19 Jan 2020 - 12:54 | |
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Ce soir-là ils burent à profusion car peu importe le contenu ni sa quantité, seul importe le contenant. Ainsi fidèles à ce mauvais dicton improvisé, les deux vieillards se pintèrent jusqu'au petit matin, Haldin fuyant sa tristesse imminente – inconsolable de devoir quitter pour un temps sa naine –, et Yggdar échappant à l'impatience de voir son chef d'œuvre achevé, probablement. Jusque-là rien de bien hors du commun pour deux nains qui s'aiment d'amitié et qui savent profiter des choses de la vie, ici en l'occurrence d'adieux en bonne et due forme.
Seulement, cette beuverie n'annoncerait pas des adieux comme il s'en connaît lorsqu'un être quitte un endroit et ses proches. Oh non, c'étaient plutôt les adieux de Haldin à ses projets de voyage, qui se réduisirent à néant en effet lorsque le vieux nain, le lendemain moins frais que surpris chuta du Perchoir alors qu'il venait saluer une dernière fois ses amis éleveurs avant de soit disant quitter Molgrunn.
C'est qu'un malheur arrive si vite !
« Malheur ! » pour toute réponse au diagnostic poussé qu'il avait reçu concernant son genou blessé, pis, fracturé. Et il avait eu de la chance semblait-il, car aucun déplacement n'avait été à noter les jours qui suivirent le terrible accident. Juste une fracture, une bonne mauvaise fracture, en somme...
« Ce sont des conneries d'érudit ! Comment font-ils pour croire que j'ai eu de la chance dans mon malheur ? Je... Je suis destiné à finir ma vie infirme... Ip ! Infirme et boiteux et sédentaire et frustré et... Et... Et ! Tsss... Malheur ! Malheur tout court ! »
Haldin Barbedrue ne serait donc point hanté par la tristesse que quitter Molgrunn lui aurait procuré, tout simplement parce qu'il ne partirait finalement pas de sitôt, que nenni, il devrait vraisemblablement rester les prochaines dix énneades alité avant de commencer une rééducation progressive de son genou hélas immobilisé, et ce une dizaine d'enneades supplémentaires ! Ce qui faisait approximativement vingt énneades... Non cela ne le rendrait pas triste au point de s'en pinter le gosier de bière...
Il était désormais inconsolable de ne plus pouvoir partir... Il était plus conscient que quiconque de la gravité de la situation, et peut-être même ne pourrait-il plus jamais monter à galioth ou tout autre splendide monture dawi...
L'étalon avait vieilli et s'était cassé une patte... Comme une fidèle monture que l'on aurait poussée à bout, et que par pitié l'on se refusait d'abattre... Oui voilà, il était désormais à la retraite sans en avoir le choix et ne tenant que par la pitié d'autrui... Il ne pourrait plus jamais prendre la route ni écrire l'Histoire... Il était une vieille chose cassée, un point c'est tout.
Et pour chapeauter le tout, son ami Yggdar, quitta Molgrunn le lendemain de son accident afin de se rendre à Almis où quelque mystère avait vraisemblablement attiré l'attention du Frappe-Rune. Quant à lui, il resta, et râla des jours durant...
17° Année | XIe Cycle Barkios • Automne En milieu de mois...
« Yggdar ! Regarde ! Suis bon pour l'dépotoir... Quel bel Ongaraz je fais tiens... De toutes façons ils sont tous partis, je n'ai plus de troupe... Je n'ai plus rien... J'ai Mirza... Et toi... »
Haldin plia son genou ou du moins tenta de le plier un tant soit peu. Il hurla de rage et probablement aussi de douleur. La guibole qui n'était plus immobilisée depuis peu restait décidément bien raide, et c'est à l'aide d'une canne qu'il se mit à tout percuter avec une force brutale, saccageant la petite pièce à vivre de sa cabane des Faubourgs. Heureusement que Mirza n'était pas là pour voir son nain détruire une partie de leur mobilier.
« Je ne peux même plus m'occuper d'mes bêtes... »
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| | | Yggdar Frappe-Rune
Nain
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| Sujet: Re: [Molgrunn] Lève la tête et puis s'en va... • Yggdar Jeu 23 Jan 2020 - 8:20 | |
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La soirée s’annonçait comme aussi agréable que les autres en compagnie du vieux maître éleveur, et ponctuerait parfaitement les longues journées chaudes et humides du Rhunki qui terminerait très bientôt, la fameuse hache du Grand Roi. S’il s’attendait à quelques surprises, notamment concernant le taux d’alcoolémie des deux Nains, les plats dégustés – ou plutôt boulotés – ou l’accompagnement musical, il ne s’attendait pas à voir Haldin subir les affres de l’alcool et y laisser sa rotule d’un genou pourtant fidèle jusqu’ici. Le diagnostic fut sans appel : fracture du genou. Ah ! - Eh beh… Pauv’ vieux. Tu m’rappelle moi quand c’te bous’rie m’a pété à la barbe. Il tapote sa jambe infirme. Pour sûr qu’j’ai pas apprécié d’me r’trouver boiteux si jeune ! Neh ! Neh. R’pose toi vieille barbe, t’va en avoir b’soin. J’dois m’en aller à Almis pour qu’qu’temps. Mais j’vais r’venir ! Pour sûr ! Alors soigne toi, et qu’Yaron t’garde ! -------------------------------------------------- Le retour était fort bien venu. Les évènements passés furent ténébreux, difficiles même, et Yggdar, enfin de retour chez lui, ne voulait plus y penser pour le moment. Il préférait allégrement retourner à sa forge pour terminer la fameuse hache, et prendre des nouvelles de son ami Haldin, blessé il y a plusieurs ennéades. Pour sûr qu’il y avait pensé, et pas qu’un peu. Le vieux runiste savait fort bien ce que cela faisait que d’être rendu impotent par un évènement fâcheux. Il se rendit alors jusqu’à la demeure du maître éleveur, qu’il aurait dû quitter il y a plusieurs ennéades. Sans doute Yaron lui-même aura voulu cet évènement pour garder le Nain proche de lui et de la cité retrouvée, afin de bénéficier de son savoir, de son importance, de sa volonté. - Eh ti ! Haldin Barb’Drue ! Qu’est-ce qu’tu râle donc vieille barbe. Pour sûr qu’tu l’as ta Mirza ! Et pour sûr qu’tu m’a moi ! T’as cru qu’j’allais t’laisser ? Neh ! Le cri de colère et de douleur poussé par Haldin rappela au maître Frappe-Rune sa condition d’impotent, et ses douloureux souvenirs lorsque les soigneurs s’étaient penchés sur sa hanche, brulée et détruite par la magie, et tentaient tout pour lui rendre sa mobilité. Les mouvements passifs, où sa jambe était manipulée sans que lui-même n’ait à en contrôler la moindre fibre musculaire, étaient douloureux au possible. Se replonger ainsi dans un souvenir douloureux n’était pas agréable pour le vieux runiste qui avait eu plus que son compte d’évènements douloureux ces derniers temps, et qui ne voulait qu’une chose : retrouver sa forge. Et son clan. Mais rien ne l’empêcherait pour autant de témoigner son soutien au vieux Barbedrue, et alors qu’il s’appuyait de ses deux mains sur sa canne, une idée lui vint, dessinant un léger sourire sur le visage buriné et fermé qu’il arborait pourtant sans cesse. - L’est temps d’passer la main vieux frère. Mais si j’peux pas t’promettre qu’tu pourras gambader comme jadis, j’peux t’aider à t’occuper d’tes bêtes, tant qu’tu poursuit pas tes boucs sur les flancs d’falaises ! T’pourras marcher, et avec un peu d’maîtrise, t’pourras jamais tomber. Il donne un coup de canne sur le sol, lequel fut transpercé par la pointe forgerunée. J’vais t’forger ta propr’ canne mon vieux, Ip. T’me r’ssemblera comme ça, j’sais qu’t’as toujours voulu m’ressembler erk erk erk. Un rire à la fois gras et vieux, témoin de sa condition d’ancêtre et de sa gorge aussi charbonneuse que sa forge. Mais avant, j’vais avoir b’soin d’toi. La Az du Roi est presque prête, et j’aurais b’soin d’toi pour l’offrir. Qu’est-ce t’en dis ?
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| | | Haldin Barbedrue
Nain
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| Sujet: Re: [Molgrunn] Lève la tête et puis s'en va... • Yggdar Mer 29 Jan 2020 - 13:54 | |
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Lorsque j'eus soigneusement pulvérisé chaque objet de mon choix, des babioles et autres ustensiles en bois pour la plupart, puis renversé quelques marmites à moitié pleines et désormais vides, je jubilai à la vue des restes de ragoût se mélangeant au chamboulement que j'avais opéré dans la pièce à vivre. Pièce dont Mirza s'occupait quotidiennement avec dévouement afin que nous puissions manger chaque jour à nos aises et dans la propreté. Mon tendre ami Yggdar tenta de me consoler lorsque je pestai de moi et de tout.
Pour sûr était-il temps de passer la main, oui pour sûr, mais l'entendre dire par autrui que par mon orgueil détruit me fit le plus grand bien. J'allais passer la main, à cause d'un fichtre frêle genou qui de plus est, mais j'oubliais aussi que j'étais à proprement parler un ancien. Ce qui suivit pourtant me procura beaucoup de réconfort, surtout face à ma nouvelle condition de vieillard qui ose enfin se l'avouer.
« Ma... Ma propre canne dis-tu ! Ma propre canne !? Je ne demandais pas mieux. J'étais agréablement surpris. »
Je partis d'un rire tonitruant, mélangeant mes propres grondements à ceux de mon ami, tout analogues à nos respectives voix rocailleuses. J'exultais tellement, que je voulu exploser ma canne en bois contre un solide banc en pierre, je me retins cependant car j'aurais encore l'utilité de cette maudite béquille, tant bien que mal me permettait-elle de marcher. De fait, j'étais en pleine rééducation du malheureux membre que je m'étais hélas fêlé, et si je ne pouvais encore me rendre des Faubourgs au Perchoir – lieu où ma vie avait décidé de prendre une différente tournure –, ce n'était qu'une question de jours avant que ma jambe infidèle ne retrouve une mobilité, certes réduite.
« Soit ! J'en serai honoré mon ami, ip, honoré ! Et puis... Kirgan n'est pas bien loin heing, dis-je comme pour me rassurer. »
Il me faudrait encore quelques bonnes énneades avant d'entreprendre un petit déplacement tel que celui-ci, mais je m'en savais capable ; que n'avais-je tant crapahuté dans ma vie pour qu'un sale genou meurtri m'empêche de continuer, quitte à tempérer le rythme désormais ! Doucement, mais sûrement... Je n'étais plus que joie et bonheur et c'est après que mon ami soit parti que j'entrepris difficilement de nettoyer mon désastre avant que ma compagne ne rentre, gardant jusqu'à ce moment là un sourire béat aux lèvres. Que la naine partagea avec moi retrouvant en effet son jovial vieil Haldin.
Une ou deux énneades plus tard je donnai à Mirza quelques runes griffonnées à l'attention du vieux briscard Frappe-Rune. Ce jour-là j'écrivis une bonne partie de la journée, sans oublier d'aller régulièrement dégourdir mes satanées guibolles dans les parages de ma hutte. J'allai voir mes animaux en fin de journée avec qui je partageai un adorable moment, et c'est après une journée ma foi fort remplie que je donnai encore de mon amour à ma naine, avant de sombrer dans un sommeil des plus réparateurs...
Le lendemain, sous prétexte d'une longue ballade je me rendis au Bosquet en deux bonnes heures là où l'on mettait habituellement quelques dizaines de minutes, et c'est après avoir salué les dawis présents que j'attendis tout en discutant avec ceux-là, la vieille rune qu'était mon ami le forgeruniste, afin que nous nous rendions par la suite ensemble, au Perchoir. J'avais vraisemblablement une missive à envoyer à Thanor, à l'adresse de mon neveu. C'est d'ailleurs dans ma petite sacoche que parfois je tapotais bien décidé à renouer les liens avec mon jeune parent. Dans l'après-midi Yggdar se présenta à l'heure, au lieu de rendez-vous fixé par moi-même la veille.
« Baruk, vieil ours, dis-je d'un air taquin. On m'dit que d'nouveau tu n'sort plus d'ta forge ! Prêt pour la petite balade, mon ami ? » M'exclamai-je en l'invitant à suivre un grand sentier qui nous mènerait droit au Perchoir. Mon air claudiquant fût aussitôt oublié par une conversation animée, Yggdar me racontant enfin les déboires d'Almis et moi le questionnant à outrance.
Il faisait doux malgré l'hiver imminent.
Nous étions presque arrivés lorsque j'avouais le contenu de ma sacoche à Yggdar. Plusieurs lettres, et particulièrement deux me tenant douloureusement à cœur : celle destinée au Thane Barbedrue et l'autre au Grand-Roi du Zagazorn, ni plus ni moins... Cela annonçait des changements... Qu'en pensait mon ami...?
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| | | Yggdar Frappe-Rune
Nain
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| Sujet: Re: [Molgrunn] Lève la tête et puis s'en va... • Yggdar Mer 29 Jan 2020 - 15:18 | |
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Quelle joie que de revoir cette vieille trogne enfin se fendre d’un sourire sincère, et reprendre des couleurs. Ha ! Les Dawis deviennent grincheux quand ils vieillissent, certains bien plus que d’autres. Mais une telle trogne renfrognée ne sied guère au fier Haldin, connu de nombreuses bavettes et de nombreux poilus comme étant un Gromtrommi aussi sage que jovial. Une qualité qu’il ne devait pas perdre, jamais ! - Kirgan l’est pas loin, Ip ! T’en fais pas, on f’ras pas l’chemin qu’tout les deux, y aura des cognards pour nous épauler. Bon ! J’dois m’mettre au travail ! Embrasse ta poilue d’bavette pour moi t’veux bien ? Et r’met toi bien ! J’ai bien envie d’voir le Vallon maint’nant qu’tout est presqu’ prêt. On s’voit bientôt vieux bouc ! Et c’était également avec le sourire aux lèvres que le vieux Rhunki s’en alla retrouver sa forge et ses outils. ----------------------------------------------- Durant les deux ennéades suivantes, Yggdar retrouva de nouveau sa forge et ses habitudes troglodytes. Ne quittant sa forge que pour retrouver la demeure de son clan, il travailla d’arrache-pied pour réaliser la canne de son ami. Puisant dans sa propre réserve personnelle de lingot d’acier, il s’arrangea également pour obtenir un des bois les plus solides de tout Miradelphia : du Merbeau. Ce bois était très dur et très résistant. Poncé et vernis correctement, il était presque incassable – du moment qu’une lame ne tentait pas de le détruire. Si obtenir ce bois était possible, le faire venir jusque Molgrunn demandait du temps, et les commerçants et caravanes de passage qui alimentaient Molgrunn et qui reçurent cette mission, annoncèrent cette terrible nouvelle : - Vénérable Rhunki, pour-sûr qu’on va obtenir c’bois ! Ip ! C’pendant, Heidum m’en soit témoin, c’ra pas avant trois voir quatre ennéades. Mais vous l’aurez, parole ! Un délai bien long, trop long, mais néanmoins incompressible et qu’il fallait accepter. Cela laissait toutefois tout le temps nécessaire au runiste pour forger l’embout de la canne, la seule partie forgerunée. Il s’y attela avec passion et acharnement. La rune complexe qu’il devait sceller étant parfaitement maîtrisée, car figurant parmi les runes favorites du vieux Yggdar. Lorsqu’il reçu la missive d’Haldin l’invitant à le rejoindre dans le Vallon à proximité du Perchoir, l’embout de la canne, long d’une quinzaine de centimètres, était formé et il ne restait plus qu’à y sceller la rune. C’est donc avec une envie peu dissimulée qu’Yggdar se rendit jusqu’au Perchoir, claudiquant, usant allégrement de sa troisième jambe, forgerunée, afin de ne point perdre l’équilibre. Lorsqu’il arriva à hauteur d’Haldin, il lui offrit une accolade fraternelle, heureux d’être à nouveau à ses côté, debout, en vie. - Baruk, vieil ours ! On m'dit que d'nouveau tu n'sort plus d'ta forge ! Prêt pour la petite balade, mon ami ? - Ip ! Vieux bouc ! C’que j’t’ai promis, je l’fais ! Ta canne est bientôt prête, et j’ai une p’tite surprise pour toi quand elle s’ra terminée. Ah ! Il regard d’un œil très curieux le contenu de la sacoche d’Haldin, avide de curiosité mais également quelque peu étonné, peut-être même inquiet, à l’idée qu’une missive indique le retour du Barbedrue à Thanor. Il fut satisfait toutefois lorsqu’il put lire les objets des missives. Huuuum exprima-t-il longuement Je vois que tu as pris ta décision mon ami. C’très courageux, Ip, très courageux. Te v’la bientôt libre d’tes fonctions royales. T’pourras garder ta Mirza et œuvrer pour c’t’antique cité. C’t’un honneur d’savoir ça ! Un honneur ! Pour sûr, Yggdar était heureux de garder son ami avec lui.
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| | | Haldin Barbedrue
Nain
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| Sujet: Re: [Molgrunn] Lève la tête et puis s'en va... • Yggdar Dim 2 Fév 2020 - 12:59 | |
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Au Perchoir, on m'appreciait énormément et je le savais tout autant que je les appréciait aussi, d'une bien paternelle façon. De fait c'est quelques énneades plus tôt que j'avais chuté du toît du perchoir à proprement parler alors que venant saluer mes amis avant de quitter la ville – du moins je le croyais –, je m'engageai à escalader le bâtiment pour y récupérer un corbeau mal en point qui n'avait pu atterrir autrement.
« Voilà Haldin ! Voilà Haldin ! Eh ! Haldin ! Haldin ! Te voilà ! Haldin ! – Ého ! Suis pas sourd, par Heidum, pas sourd, seulement boiteux ! – Oui, et par ma faute, j'aurai dû monter récupérer le corbeau moi-même, savez-vous, je suis désolé... Mais vous étiez tellement content de... – Neh neh... C'n'est pas d'ta faute altrommi, mais ferme-la bon sang, voilà cent fois que tu me le répète, que tu es désolé... Moi aussi, je suis désolé du tragique accident. Mais me voilà ! Ip ! Me voilà ! Bon dis-moi, ce vieux corbeau royal, comment se porte-t-il ? Il savait duquel je parlais. – Que... Un problème, grommtrommi ? – Aucun. Un message de la plus haute importance, c'est tout. – Mon paternel possède d'autres corbeaux plus fiables savez-vous, des plus vigoureux, il serait temps qu'il parte en retraite ce pauvre corbac ! Parlait-il de moi !? – J'ai fait mon choix. Ce sera sa dernière mission, et il l'accomplira à mon instar, comme j'ai accompli ma dernière mission, à Molgrunn. Il est toujours en vie au moins ? – En vie ? Bien-sûr Haldin ! Mais que sont ces histoires de dernière mission , grommtrommi ? Vous... Ne me dites pas que vouz... – Je... Voyant le regard de mon jeune ami je flanchai. Ehh, tu veux vraiment savoir ? Lorsque la missive parviendra au Grand-Roi, je ne serai probablement plus Ongaraz Royal... – Je... Suis... Déso... Un coup de canne vint percuter avec force et dextérité le postérieur du nain. – Attention à toi petit, altrommi – depuis quelques jours certes –, mais ne provoque pas le vieux grommtrommi que je suis ! Allez, allez, file dire à ton père que j'aurais besoin de son aide ! J'ai beaucoup à envoyer ! Je savais qu'il ne manquerait pas de lui révéler mon désir de démission. »
Je repensais au contenu des beaucoup trop longues missives que je désirais envoyer, une particulièrement se rapprochait dangereusement de la lettre, tandis que je me dirigerai vers la volière, malheureusement d'un pas claudiquant.
A Hardrek Poing-de-fer,
Mon Roi,
La missive sera des plus courtes en effet car je ne pourrais écrire tout ce que j'ai à dire sans que cela ne pèse plus lourd que le poids que peut porter ce pauvre vieux corbeau.
C'est avec le plus grand déshonneur qui soit, celui de la vieillesse qui rattrape et qui broie, celui de vous décevoir, de vous faillir et de faillir au Zagazorn, que je vous demande à grand peine de me décharger de mes fonctions d'Ongaraz... Pourquoi une telle démission, qui il faut le dire n'est point de mon ressort ? Un misérable boiteux ne peut prétendre à cette honorable charge, or je le suis à présent... Je ne suis plus digne de servir par ma hache. En outre chacun des cognards sous mes ordres recevront de ma part l'annonce de cette irrévocable décision, et il se rendront auprès de vous incessamment, afin que vous nommiez un nouvel Ongaraz de la milice royale, quelle vous serve davantage que je n'aie pu le faire en étant à sa tête.
Mon ami,
Excuse mon laconisme quant aux explications de mon infirmité, tu comprendras qu'il n'est pas facile pour moi de prendre cette décision, parce qu'elle est forcée. J'espère surtout que tu te portes bien et que tes mires te permettront de lire si petite écriture... J'aimerais tant te dire.
Pourras-tu m'informer de ta présence à Kirgan le mois prochain ? Car saches que très vite, aussitôt que mon genou le permettra, je ferai le voyage pour venir te voir, afin de te présenter mes honneurs et officiellement devenir une illustre figure décrépite... Un vieux bouc. Je ne sais toujours pas à quoi je serai bon après rétablissement, mais à Molgrunn il fait bon vivre, je saurais toujours aider par mes râles ou mes conseils... Tu as eu raison de m'envoyer ici, pour cela je t'en remercie.
Je vous embrasse toi et les tiens.
J'attendis que le vieil éleveur me rejoigne tout en observant les corbeaux, rêveur, de beaux spécimens dans quelques cages, puis d'autres voletant par-ci par-là, attendant pour la plupart d'être relâchés afin de rejoindre leur vraie demeure, parfois bien loin d'ici.
A Athbor,
Mon neveu, ces runes gravées à grand peine, te sont adressées à toi et au Clan, puisses-tu les leur partager... Elles sont des excuses quoique sais-tu le temps n'a guère loisir à être trifouillé par les remords, le temps peut nous permettre néanmoins l'opportunité de mieux entreprendre. Je voudrais hélas mieux faire, mais il ne me reste justement, guère le temps. Ce sont des excuses nonobstant parce que je sais avoir été malhonnête.
Malhonnête voyez-vous, par pur égoïsme je l'avoue enfin, soeurs et frères Barbedrue, car ne voulant pas céder au néant la vie qui m'appelait pour quelque fierté mal placée pensais-je, je décidais de fuir mon sang, prouvant au monde entier que l'on pouvait très bien avoir dans une vie plusieurs voies ; celles de verser le sang ennemi paraissait en ce temps incomparable... Délectable même. [...] *
Loin de mon clan que je laissais entre de bonnes mains et sous le joug dawi – le meilleur qui soit–, rien ne pesait sur mes épaules, seule une responsabilité viscéralement assumée, celle franche de se battre pour le Zagazorn. Je pensais cela être en effet bien au-dessus de mes propres responsabilités de Thane et de Conseiller d'une cité. En somme je vrillais à l'instar du terrible épisode qu'amena la damnée Malenuit, et il n'était pas question de m'y déloger, de ce tourbillon qui intransigeant me rudoyait comme je le faisais moi-même, hélas exterminateur de racaille souillant nos terres sacrées. [...]
Comme vous le savez probablement, depuis mon dernier passage à Thanor voilà six ans révolus, la vie ne m'a guère fait de cadeaux. Et si je vous ai quitté – mon cœur restât avec vous je l'espère malgré l'esclandre de mon départ. Ainsi tentant de retrouver un des pilliers de Thanor, j'errai dans le Nord une bien insidieuse folie s'accaparant de mon bon sens. Faisant fi de cette grande salope beaucoup plus coriace que moi, je ne pus cependant ni trouver Morek, ni le venger. [...]
C'est sous les ordres du Grand-Roi qu'après quelques années de combats effrénés, encore très chamboulé par mes échecs et mes frustrations, que je partis pour Molgrunn afin d'y apporter mon aide... J'y suis depuis, ressassant par mes connaissances, mon passé... Et si, Ongaraz Royal, mon devoir m'appelait à continuer auprès du Grand-Roi ou ailleurs à mener à bien ses ordres et désirs, je ne le peux désormais infirme et boiteux. J'aimerai venir dès que mon genou le permettra, à Thanor, si toutefois vous acceptiez un Grommtrommi repenti. [...]
* Les [...] signifient des paragraphes bien plus longs, et qui vous ennuieraient beaucoup trop.
« Mais c'est trop long ! Et beaucoup trop lourd. Aussi gueulard que son fiston. – Alors scindons-la en deux, que sais-je !? – Quand bien même nous la... – Suffit mon ami, aussi têtu que ton fils je vois ! Celle-là je la ferai parvenir à pied, puis baste. – Rho... Ne te braque pas de sui... – Je ne me braque pas ! Je change d'avis. – Bon, si tu le dis... – Oui, je le dis, je le dis ! Puis tu sais quoi, j'envoie juste le vieux corbeau de Hardrek à Hardrek, quant au reste je me débrouille, j'ai une idée. – Une idée ? – Oui, une idée. Je les ferai parvenir autrement, par quelqu'un qui est de passage à Molgrunn. Il ira moins vite que ces foutus piafs, mais ça fera l'affaire, c'est pratiquement sur son trajet... – Bon... Es-tu sûr ? Je pourrais faire partir ces missives sans problème, elles sont moins lourdes que ta lettre de plomb... Un regard courroucé suffit pour faire taire le vieux nain. Non pas qu'il me respectât pour quelque raison officielle, il était simplement mon ami. Puis il savait que je n'étais plus que le vieux Haldin. – Hmpf. Aut'ment je vois que tu vas bien ? – Toi aussi avec ta canne de vieux ! Ahah ! – Ris toujours ! Mon acolyte pouvait se targuer d'en posséder une également. Eh... Où est passée c't'e vieille rune d'Yggdar ? – Ah, mon fiston avait justement une missive qu'est arrivée pour lui tantôt, quel drôle de hasard d'ailleurs ahah... Laisse-moi relâcher c'te brave pépère et j'arrive, on s'rejoint au chalet ? – On se rejoint au chalet. Et... Merci. Puis, au fait, fais tes adieux à Cormarik, nous ne le reverrons plus dans l'coin, il est bien trop vieux pour tout ça désormais, ce sera son dernier voyage, il rentre chez lui, ip... C'est que Cormarik était un corbeau bien particulier, il m'avait été offert par le Grand-Roi en l'an neuf – l'oiseau devait en avoir à l'époque, probablement treize ou quatorze –, mais ce qui le rendait si particulier c'est que le corvidé semblait avoir survécu à la destruction de Kirgan, à ce moment peut-être ailleurs qui sait ? Toujours est-il quil n'avait par la suite jamais abandonné le Kirgion ; c'est bien plus tard lors de la huitième année du cycle présent, qu'il fût ramassé errant après la recolonisation de Fort-Garmin, oiseau à moitié sauvage, mais si fidèle. Dans mes plus folles suppositions il appartenait à Garmin lui-même. Âgé de vingt-deux ans environ – non loin donc de la longévité maximale de cette espèce – il avait en ma possession rejoint Kirgan plusieurs fois depuis de nombreuses destinations, toujours à l'attention du Gromanrik. Il avait donc droit à sa retraite, beaucoup plus qu'un béquillard pour cause d'ivrognerie. »
Le chalet était un bâtiment entièrement rénové abritant en son sein tous les dawis du clan de mon homologue grommtrommi qui ne tarderai pas à nous rejoindre sitôt la missive au Grand-Roi envoyée. Lorsque j'entrai dans la pièce principale qu'une grande table occupait partiellement, je me fendis d'un sourire en découvrant ce vieux briscard Frappe-Rune attablé, achevant une bonne bière bien fraîche supposai-je. La chaleur régnante me fit du bien – l'âtre accueillant un feu crépitant allègrement –, alors que j'avançais vers les quelques barbes et tresses présentes. Étaient présents certains nains du Clan d'éleveurs de corvidés et une poignée de commerçants venus s'enquérir d'éventuelles missives, ou au contraire en expédier. C'est après avoir salué tout ce beau monde, que je m'assis à côté d'Yggdar.
« J'vois qu'on perd pas son temps en futilités ! Alors, de bonnes nouvelles j'espère ? dis-je en pointant la missive que le nain tapotait à l'aide d'une grosse paluche bien ridée pas moins poilue. »
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| | | Yggdar Frappe-Rune
Nain
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| Sujet: Re: [Molgrunn] Lève la tête et puis s'en va... • Yggdar Lun 3 Fév 2020 - 8:35 | |
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Le vieux Haldin avait des choses à faire, et des affaires à régler. Yggdar, lui, avait également une missive à son intention. Un des Nains du Perchoir avait d’ailleurs croisé Yggdar dans sa montée jusqu’au Perchoir, et lui avait remis la missive. De fil en aiguille, et après une courte discussion, le Nain avait compris qu’Yggdar cherchait à rejoindre Haldin, et l’invita donc à s’installer au chalet afin de pouvoir lire sa missive, et d’y être rejoint ensuite par Haldin lui-même.
A Yggdar Frappe-Rune, Molgrunn.
Cher maître Yggdar, moi, Rodmar Œil-Rapace, suis honoré et ravi de vous faire savoir que ce que vous cherchiez, le bois de Merbeau, est en notre possession et dans la quantité dont vous avez besoin. Une caravane est d’ores et déjà en partance pour Molgrunn, et arrivera jusqu’au pas de votre porte dans 12 jours.
Les tarifs négociés sont toujours les mêmes.
Cette affaire que vous nous avez confié était un véritable honneur. Que Yaron vous garde.
Cette nouvelle était très intéressante, et fit sourire le vieux runiste, d’ordinaire aigri. Au moins cette quête ci se passait bien, et le bois de Merbeau, si solide, si rigide, si fiable et aussi si difficile à trouver, était maintenant sien et allait servir à faire cette magnifique canne promise au vieux Haldin. Satisfait, et confortablement installé sans que sa panse soit trop appuyée contre le rebord de la table, il dégusta une bonne tartine de pain blanc sur laquelle fut tartiné une bien trop épaisse couche de rillettes exquises. Dévorant à pleine dent, une partie de cette denrée finissait par tomber sur la table. Remise sur la tartine, ou déguster avec les doigts, rien ne se perdait pour le runiste qui adorait ce qu’il mangeait là. Et, surtout, la bière était bonne ! Très bonne ! Molgrunn avait décidément tout pour plaire. Isolée, dédiée au savoir des runes, disposant de soldats aguerris, et de certains des clans les plus compétents dans bien des domaines, il paraissait qu’un nouveau clan de maîtres brasseurs et taverniers s’était installé. L’on entendait d’ailleurs frapper à longueur de journée, les coups de burins et de marteaux alors que certains Nains tentaient d’extraire de la roche du Septentrion, les futurs tonnelets qui serviraient à faire maturer la bière produite de ce clan. Yggdar, friand de bière, avait entendu parler de cette volonté de ce nouveau clan de faire maturer de la bière dans des tonneaux de pierre extirpés de la montagne, en plus des traditionnels futs en bois de conifères, de chêne, de peupliers. Des saveurs nouvelles, et sans doute très intéressantes. Yggdar était aux anges. J'vois qu'on perd pas son temps en futilités ! Alors, de bonnes nouvelles j'espère ? Tapotant de ses doigts potelés et caleux la missive qu’il avait lu et relu, Yggdar, n’ayant pas entendu arriver son ami, releva une trogne illuminée. Si cette trogne était bien connue d’Haldin, elle était méconnue, pour ne pas dire légendaire, pour le commun des Dawis. Encore que, depuis les évènements d’Almis, il s’était adoucis sans encore totalement l’accepter. - Ip ! C’p’tiot du Perchoir est bin éduqué ! Une bonne miche, des rillettes et d’la bière d’qualité pour faire patienter un vieux Grommtromi qui attend son ami. Les nouvelles sont bonnes, Ip ! Et t’s’ra bin heureux d’ta future jambe ! Ha ! Hahaha ! Une grande rasade pour pouvoir se désaltérer et humecter le gosier. Et d’ton côté ? Comment qu’tu t’portes ? Des nouvelles ? [/i]
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| | | Haldin Barbedrue
Nain
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Personnage :.: MANUSCRIT :.: Âge : 228 ans en l'An 18 • XVI Taille : Petite Niveau Magique : Non-Initié.
| Sujet: Re: [Molgrunn] Lève la tête et puis s'en va... • Yggdar Mer 12 Fév 2020 - 11:02 | |
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Le vieux nain que la vie commençait à pacifier par des choix disons-le nécessaires et qu'il avait dû une fois de plus combattre, c'était bel et bien moi, Haldin Barbedrue, Grommtrommi d'un clan que j'avais abandonné en toute connaissance de cause, quasiment répudié. Et un Roi que j'avais pitoyablement lâché, et par définition le Royaume que je défendais. Pour autant, j'avais ici un soupçon de famille quand bien même je n'étais point à l'aise avec l'étrange terme issu du baragouinage humain, je le comprenais nonobstant tant bien que mal, ils n'étaient pas les miens mais ils n'en n'étaient pas moins proches ; je n'avais que eux. Mirza, ma compagne, ainsi que le père et le fils Frappe-Rune, mes amis à l'instar d'une bonne dizaine de barbes et de tresses habitant le Vallon, toît de Molgrunn voire dans la cité elle-même mais ils étaient plus rarese. On se connaissait tous un peu certes, certains entretenant une relation plus affinée avec d'autres, puis d'aucuns se conformant entre eux aux simples politesses de base, c'est que chacun entretenait un rôle bien particulier dans cette petite cité perchée. Je devais avouer qu'enfin, je me faisais à l'idée de rester habiter Molgrunn et d'y finir, avant de rejoindre les Halles, mon long séjour sur ces terres. J'étais malgré tout heureux. J'ignorai encore que si j'y résiderai une bonne partie de l'année, je serai également entre Lante et Thanor afin d'éviter toute potentielle fossilisation.
« Ip, ça oui, il est ben brave le p'tiot d'son pèrrre ! » dis-je en m'approchant de mon ami. Je m'assis à ses côtés. C'est dire si cela pouvait me coûter cher, quelques grognements autant d'injures, mais je commençais à m'habituer à ma nouvelle condition, doucement mais sûrement. Il me faudrait encore muscler la jambe longtemps immobilisée, mais elle tiendrai la route j'en étais persuadé depuis qu'elle me permettait d'avancer tout de même. Puis mon ami Yggdar me préparait un cadeau des plus précieux, tant et si bien que je n'arrivais pas à encore y croire.
« C'est l'bois j'parie ! Ahah, j'en étais sûr ! dis-je lorsque tacitement l'ours me le confirma. Passant du coq à l'âne parce que j'y pensais déjà bien assez à cette future canne qui serait mienne et qui me permettrait un bien meilleur appui afin que je ne devienne pas une pièce rouillée ; je n'étais pas un de ces vieux scribes-runes décrépits, neh, plutôt une force de la nature et si je ne pouvais guerroyer je me battrai pour le Zagazorn, jusqu'au bout de mes forces, je le fis savoir à mon ami. Puis j'ajoutai. puis je ne m'inquiète plus, grâce à ton soutien. Mes projets ont changé, mais ils existent mon ami, ils existent ! »
Nous continuâmes nôtre discussion un bon moment avant que d'autres dawis se joignent à nous pour ce qui serait un délicieux repas arrosé de cette toute innovante bière, qui permit par la suite à nos vieux derrières d'allégrement rejoindre nos respectives demeures, vaquant à nos occupations les jours qui suivirent...
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| | | Yggdar Frappe-Rune
Nain
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| Sujet: Re: [Molgrunn] Lève la tête et puis s'en va... • Yggdar Mer 12 Fév 2020 - 13:40 | |
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Haldin avait l’esprit vif et agile. D’une simple phrase, sans détail aucun, il avait deviné le contenu de cette missive qui, rien qu’en étant deviné, lui avait réchauffé le cœur. Et Yggdar était lui aussi content, et souriait autant qu’il lui était possible de sourire, bien que ce dernier fût raisonnablement caché par sa barbe. Tout simplement, il répondit : - Ip ! C’est l’bois ! Crois-moi, t’vas être plus qu’satisfait ! Avec c’te canne, faudra vraiment qu’tu l’fasses exprès pour tomber d’nouveau ! Ha ! La discussion suivit alors son bout de chemin, animée par les rires et les accolades amicales, et agrémentée des nouveaux venus qui vinrent étoffer la tablée et garnir la table. L’un ramenait de nouveau du pain, un autre, du pâté et de la charcuterie. La bière coulait à flot, et l’ambiance était ô combien agréable. Ils se séparèrent enfin une fois la soirée bien entamée. Les vieux Grommtromi devaient se reposer, l’un allait avoir du travail, l’autre, devait prendre encore un peu de temps pour se retaper entièrement. --------------------------------------------------------------- Les jours suivant furent très chargés pour Yggdar. Zagaskroni de son clan, il devait alterner entre son travail à la forge et son rôle d’écrivain des sagas du clan Frappe-Rune, et notamment, écrire les runes des évènements qui se déroulèrent à Almis, et celles des vécus des membres. La pointe de la future canne demande encore plusieurs jours de travail, mais elle était prête la veille de l’arrivée du bois qui servirait du corps de canne. Plus pointue qu’une flèche, plus résistante que n’importe lequel des métaux, que n’importe laquelle des roches, elle était faite de deux tiges latérales qui viendraient se visser sur le corps de canne, assurant ainsi une prise parfaite, une résistance accrue du bois grâce à la répartition de la charge, et un certain esthétisme. Le bois étant enfin arrivé, Yggdar le confia à un ébéniste menuisier. A grand renfort de marteaux et de burins, et de poinçons, il tailla dans cet épais morceau de bois, le corps de la canne en entier, d’un bout à l’autre, avant de travailler beaucoup plus finement. Le corps fut finement ciselé, des runes en hommage à Ikthor et au Zagazorn furent gravées, sans qu’aucun pouvoir n’y soit influé. Le pommeau de la canne, épais, adapté à la large pogne du Barbedrue aux doigts caleux, représentait la tête d’un puissant bélier au regard transperçant, deux de ses cornes, enroulées sur elles-mêmes, surplombant le visage, permettant une parfaite position de la paume de la main, garantissant au vieil Haldin, de ne plus jamais tomber et d’avoir confiance en sa prise. Yggdar, heureux de voir ce projet prendre ses formes finales, se remémora alors l’époque où, lui aussi, avait reçu une canne forgerunée pour palier à son handicap causé par un regrettable accident magique. Il avait été fier de voir qu’un ancien, un maître, avait prit du temps et de l’or pour la lui fabriquer sans rien lui demander en échange. Et depuis tout ce temps, des décennies maintenant, cette canne était son compagnon le plus fidèle, qui perdurerait sans doute bien longtemps après sa propre mort. Alors, quelque peu ému par cette nostalgie, il décida de pousser l’action plus loin encore, et demanda à faire incruster deux pépites d’or, un pour chaque œil du bélier du pommeau. Et lorsqu’enfin, la canne fut prête, Yggdar lui-même y apposa la touche finale : la pointe forgerunée. Elle s’emboitait parfaitement. Le pas de visse était parfait, l’emboitement, au millimètre près. Les deux extensions d’acier furent rivetées au bois, et ainsi la canne, jamais ne ploierait ni jamais ne se briserait. Un cadeau de qualité, une offrande extrêmement honorifique. Un cadeau légendaire. Yggdar le savait très bien. Lui-même honoré par ce cadeau voilà des décennies, il était aussi fier à l’idée de l’offrir, qu’Haldin à l’idée de la recevoir. Conscient que cette offrande ferait jaser bien des langues, il mesurait avec humilité l’impact que cette création aurait sur la trame des runistes, étant donné le faible nombre d’objets forgerunés qui sont produits chaque année. Haldin, le courageux, avait démissionné de son poste prestigieux, mais il en gagnait un autre aujourd’hui, grâce à ce cadeau. - Elle est bin belle Rhunki, Ip ! C’vieux Barb’drue s’ra fier ! Mais l’bois et l’or ont coûté cher Zagaskroni, j’espère qu’tu n’as point prévu d’reproduire un tel cadeau de sitôt ? Demanda un Nain du clan, un « jeune » Grommtromi qui fut nouvellement en charge des bourses du clan. -Ip ! C’t’un chef d’œuvre, et l’vieux s’ra fier et heureux. J’sais bin qu’ce genre d’création ampute grand’ment les finances des nôtres, mais soit rassuré mon n’veu, chaque création d’ce genre, fait toujours jaser les langues, et nous aurons rapid’ment d’quoi renflouer les caisses. L’Zagazorn et les Nains méritent tous les efforts d’monde, qu’Yaron m’en soit témoin. Répondit Yggdar, conscient de ce qu’il venait de faire, et conscient aussi des conséquences bénéfiques pour son clan. Le Zagazorn était un royaume unifié, au peuple certes rustre, mais ô combien puissant, ô combien fier, ô combien soudé. Ainsi les Nains ouvraient autant que faire ce pouvait, pour le clan, pour la cité, pour le Royaume, dès lors qu’il le fallait. Sans broncher, sans compter, sans se plaindre. Yggdar était fier d’avoir montré l’exemple, quand bien même les dépenses avaient été plus grandes que prévues. --------------------------------------------------------------- Début de la 6ème ennéade de Barkios Automne, an 17 du XIème cycle. L’œuvre enfin totalement terminée, Yggdar s’en alla retrouver Haldin. Ce dernier était paisiblement chez lui, attablé, prenant sans aucun doute un moment de collation dont il a le secret. De ce qu’Yggdar voyait sur la table, il y avait du bon pain, de la bonne viande, et de la bonne bière. Où était Mirza ? Peut-être pas loin, mais ne la voyant pas, Yggdar entra en toquant, et offrit son plus beau sourire à son ami qui ne l’attendait visiblement pas. Une accolade amicale, et sans plus attendre – les deux vieux nains attendaient depuis déjà bien longtemps – il offrit aux vieux Barbedrue, la fameuse canne drapée dans un tissus de velours d’un bleu marin profond, n’attendant plus que d’être déballée par celui qui allait devenir son propriétaire. - Ouv’ donc, vieille branche. J’crois qu’t’as été suffisamment patient pour la mériter ampl’ment ! Et il prit place autour de la table, attendant de voir s’illuminer les iris de son ami qu’il aimait plus qu’il voulait bien l’avouer.
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| | | Haldin Barbedrue
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| Sujet: Re: [Molgrunn] Lève la tête et puis s'en va... • Yggdar Ven 22 Mai 2020 - 11:07 | |
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C'était un bien paisible moment celui que vivait Haldin Barbedrue dans l'isolement de sa mignonnette cabane l'esprit voguant allègrement, sa brave naine probablement ailleurs vaquant à ses occupations d'habitante de Molgrunn d'exception, et lui convalescent, de retour dans leur douillet nid d'amour après vraisemblablement une promenade matinale. Sa respiration en disait long sur sa santé et sa présente bonne humeur tandis qu'il respirait avec délectation l'odeur des produits qu'il avait décidé de consommer afin de se restaurer. De fait, à peine assis avait-il déjà absorbé l'équivalent d'une pinte de douce et amer boisson houblonnée, si désaltérante, et dans l'idée de s'attaquer par la suite tout aussi sûrement, au petit casse croûte trônant sur la table, pain, charcuterie, et vivement la deuxième choppe pour faire passer tout cela pensait l'ancien sans avoir même mis à la bouche le divin repas.
Il marchait certes de mieux en mieux, pour autant jamais plus correctement il ne le ferait, et il le savait. Et il commençait à l'accepter aussi sûrement que sa démarche progressait tout autant que son endurance, mais il allait devoir toute sa vie compenser, encore une fois, il le savait. C'est qu'il y avait outre l'éternelle douleur, ce balancement que le membre atrophié créait par son déséquilibre flagrant, et qui donnait l'impression à qui voyait le vieux nain se mouvoir, qu'il risquait à tout moment de flancher vers sa dextre dans un fracas terrible de jurons célèbres ou pas. Mais il ne tombait jamais, le bougre, attention, jamais ; sa rééducation était longue et prodigieuse à la fois : plutôt que de se ruer vers un jeune mal élevé et manquer de s'étaler devenant ainsi la risée de tous, il avait mis au point une technique implacable de tir de cailloux à la précision fatale qui lui évitait de se déplacer brusquement et de casser sa canne sur une jeune contestataire caboche. Et il visait très bien depuis le temps qu'il maniait cet art. Quant aux bêtes... Il les côtoyait, même les plus fougueuses ou les plus puissantes, elles le connaissaient et lui savait leur parler... Et ce qu'il ne pouvait point faire seul, les pénibles déboires de l'élevage ou les rudes nécessités qu'impliquait ce dernier, il les faisait à travers d'autres nains plus jeunes et plus vigoureux que lui hélas, à travers son expérience lorsqu'il s'attardait pendant des heures à raconter ses histoires faisant perdre aux jeunes gens leur temps précieux de travailleurs, alors que lui à part se balader n'en faisait pas plus productivement tel que jadis. Haldin allait mieux, beaucoup mieux, puisqu'il prenait finalement semblait-il, avec beaucoup de calme le fait que sa vie était derrière lui, du moins cet aspect dangereux et mouvementé qui l'attirait tant, et qu'à la vieillesse ennemie il ne fallait peut-être pas chercher les noises en la provoquant, mais en tirant le meilleur de chaque nouvel instant vécu et tout cela avec une docilité qui ne lui était pas familière, certes, mais qui le rendait plus accessible, comme un livre ouvert...
Lorsque son ami arriva et lui présenta sous des soieries drapée une canne en présent, la fameuse canne que le Rhunki préparait avec force passion et ce depuis des ennéades, Haldin se sentit fondre, dégoulinant d'appréhension.
« Yggdar... »
Lorsqu'il s'empara du cadeau les mains tremblantes, il fut prit de vives émotions les unes se bousculant contre les autres avec frénésie. Lorsqu'il réussit à dévoiler la canne forgerunée à son regard gourmand, laissant choir le tissu sur ses genoux, sa gorge se noua avec une précision vicieuse. Lorsque ses mains touchèrent le bois, palabrant avec les runes de leur culture finement gravées rendant hommage à Ikthor et au Zagazorn, les mots lui manquèrent en tentant de remercier son ami à qui il envoyait quelques regards furtifs avant de replonger dans la contemplation admirative d'un tel chef d'œuvre, omettant d'accepter encore qu'elle serait sienne, très vite sienne, déjà sienne... Lorsque ses doigts touchèrent la partie forgerunée il crut être parcouru de frissons alors qu'aucunement l'art dans la pièce métallique n'aurait pu transmettre autre chose que stabilité à la canne... Lorsqu'il s'attarda enfin sur le pommeau de la majestueuse œuvre d'art, au bout de ses peines il n'en pu plus, et un torrent de larmes vint accueillir le présent, une cascade, tant et si bien que lorsque Mirza rentra chez eux, le vieux nain pleurait encore, et ce n'est qu'après des heures qu'il leur parla enfin, comme vidé de toute rancune et de tout regret.
« Me voici accompagné de ma naine, de mon frère, et de Tharkûn, mon aidante canne... » dit-il alors qu'après avoir longuement discuté de tout et de rien au gré des rires, très bien mangé autour d'une table que Mirza voulut vraisemblablement voir s'écrouler, tous les trois se promenèrent dans les Vallons afin d'introduire dans ce monde un objet digne de ce nom, Tharkûn, le Pilier, dans un langage littéraire, qui est aidant.
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