« J’étais là ! » Proclama avec fierté le soldat, assit sur une souche, éclairé par des flammes crépitantes, la lumière réhaussait avec malice les traits anguleux de son visage alors qu’il retournait la lame de sa dague dans le feu de camp devant lui ; une fois que l’acier eut prit une couleur satisfaisante il ressortit ladite dague et l’examina une dernière fois avant de se lever.
« On sait, tout le monde sait que t’y était. » Répondit un autre soldat qui s’agenouilla de l’autre côté de la souche, imité par le vieux drow à la longue dague chauffée à blanc. « Mais voilà : t’es pas le seul ! » Asséna le jeune blanc bec en posant une main, les doigts écartés, sur la souche et tendant l’autre pour recevoir la dague.
« Peut-être, mais j’étais dans le palais ! » Répondit le vétéran, à l’orgueil un peu touché, il devait l’admettre, il attrapa le bout du manche et tendit le reste à son interlocuteur. « T’en connais beaucoup toi, qui étaient dans le palais ? »
La recrue prit la dague, la retourna et se concentra, faisant sortir le bout de sa langue sans s’en rendre compte. Voyant qu’il ne répondait pas, le vieux sombre prit ça comme une victoire et un sourire triomphal fleurit sur ses lèvres.
« Bah non t’en connais pas vu qu’y’a que moi ! »
La recrue se mit à faire lentement danser la dague entre ses doigts, faisant brièvement siffler le bois mort à chaque coup assassin. Le manque de réponse du soldat concentré fut interprété par le vétéran comme un encouragement.
« Bref, j’étais là. »
Debout, il se tourna lentement pour regarder une seconde chaque membre de l’assemblée, une poignée de compagnons d’arme qui avaient la chance de ne pas avoir été affecté à un tour de garde nécessaire, après tout à quoi bon surveiller l’intérieur du camp ? Evidemment ils ne comptaient pas aller chercher leurs supérieurs pour que ceux-là puissent rectifier cette erreur alors ils avaient décidé de s’amuser comme ils le pouvaient. Surtout que vu l’heure, les supérieurs en question devaient dormir et les réveiller pour ça n’aurait pas été professionnel. Ils auraient pu aller à Frontière mais ils auraient dû passer par les portes du camp et on aurait pu leur demander ce qu’ils allaient faire et s’ils n’avaient pas mieux à, justement, faire ce qui aurait pu causer des soucis. Alors ils étaient restés au même endroit, à attendre. Toutefois ils s’étaient vite ennuyés et lorsqu’on s’ennuie on fait des trucs pas forcément intelligents. Des trucs pas forcément intelligents comme se couper. La recrue, un affranchi, poussa une série de juron mais il s’arrêta à deux doigts du blasphème, après avoir lâché l’arme il se prit la main pour couvrir sa blessure.
« Faut croire que les dieux veulent que je la raconte à nouveau. » Il regarda la recrue avec un sourire narquois aux lèvres. « Oui, bon, tu vas pas pleurer, c’est qu’une coupure. Passes moi l’outre. » Il essuya les dernières gouttes d’eau qui ruisselait sur son menton avant de commencer son histoire.
« Donc, j’étais là, lorsque Nisétis est tombée, j’étais là lorsqu’on a pris le palais impérial et que dans la salle du trône, dansait une elfe. Elle était là, seule, à moitié nue, et elle dansait. »
Puis il s’arrêta, remarquant sans mal qu’il n’intéressait personne, il s’attendait presque à ce que deux guerriers se mettent à discuter à côté.
« Vous l’dites si je vous emmerde, hein ! » Les recrues en face de lui avaient un oui sur le bord des lèvres mais bien qu’il n’était pas un conteur émérites il restait tout de même leur supérieur hiérarchique direct.
« Non, c’est pas ça, c’est juste qu’on la connait la suite, on connait la chanson. »
Le vétéran ne savait pas vraiment s’ils disaient ça pour se laisser une porte de sortie mais ça ne changeait rien à l’affaire alors il se rassit sur la souche.
« Bien, si vous voulez pas écouter on va chanter alors. »
Alors l’escouade se mit à chantonner un air qu’ils connaissaient bien car elle était chantée de temps en temps, durant les longues marches, c’était un air qu’ils sifflotaient pendant qu’ils faisaient autre chose alors il vint naturellement aux lèvres.
La dernière princesse
Dans le palais des empereurs disparus
Rinya danse avec les fantômes des Dragons
Ceux qu'elle a oublié
Et ceux qu'elle trouvés
Ceux qu'elle a détesté
Et Ceux qu'elle aimé.
L’elfe tourbillonne dans l’espoir d’oublier
Et l’elfe tourbillonne dans l’espoir d’oublier
Son destin tout tracé, ne pourra y échapper
L'elfe tourbillonne dans l'espoir d'oublier.
Les noms des souvenirs par le temps effacé
Elle danse avec les héros du passé
Car ce matin, la capitale est tombée
Et Rinya, solitaire, se sait condamnée.
L’elfe tourbillonne dans l’espoir d’oublier
Et l’elfe tourbillonne dans l’espoir d’oublier
Son destin tout tracé, ne pourra y échapper
Et l'elfe tourbillonne dans l'espoir d'oublier.
Les Sombres passent la porte,
Elle n'écoute que ses envies
Les guerriers regardèrent la princesse danser.
Car l’elfe tourbillonne dans l’espoir d’oublier
Et l’elfe tourbillonne dans l’espoir d’oublier
Son destin tout tracé, ne pourra y échapper
Et l'elfe tourbillonne dans l'espoir d'oublier.
Dans Nistetis en ruine, ils prirent son honneur
Dans Nistesis en ruine, ils prirent sa vie.
Mais l’elfe tourbillonne dans l’espoir d’oublier
Mais l’elfe tourbillonne dans l’espoir d’oublier
Son destin tout tracé, est déjà scellé
Son destin tout tracé, depuis bien des années.