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 Excursion Nelenite [Solo]

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Drystan
Ancien
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Drystan


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MessageSujet: Excursion Nelenite [Solo]   Excursion Nelenite [Solo] I_icon_minitimeVen 29 Nov 2019 - 16:18

Seconde ennéade de Favrius



Sur la plage isolée où ils s’installèrent des années plus tôt, l’excitation règne dans l’esprit des trois comparses – particulièrement les deux plus grands – tandis que le dragonnier vérifie une dernière fois ses affaires… C’est qu’il ne faudrait pas oublier quoique ce soit d’essentiel une fois là-bas ! C’est un jour auquel ils songent depuis des années déjà, depuis l’instant où, recevant un message de la Dame Blanche, ils apprenaient ce qui s’était joué dans l’Archipel de Nelen. Les motifs ont changé depuis ce jour, et de la curiosité qui va de pair avec le vœu de voir se mêler à ses semblables celui qui est né seul en ce monde – ou tout comme – s’est ajouté une volonté plus… chevaleresque.

Mais ces motifs plus importants, ils sont loin, loin, à l’instant où il achève de vérifier le harnais disposé sur le dragon, qu’il termine d’y accrocher ses sacoches et laisse Monarth s’installer le plus douillettement qui soit dans la sienne, s’enroulant sur lui-même.
Le dragon plie les pattes avant pour faciliter la montée du dragonnier qui finit, dans un geste de routine répété, inlassablement au cours des ans, d’accrocher la sangle qui assure sa sécurité… Une précaution nécessaire pour l’humain, inutile pour le dragon pour lequel le ciel est l’endroit le plus sûr, mais il ne peut oublier complètement lorsqu’il s’apprête à voler qu’il ne l’est que pour moitié.
Tout naturellement, son esprit se confond très vite avec celui du dragon, ainsi que ses perceptions, et ce sont ses muscles qui s’animent alors qu’est donné l’ordre d’envol, ses puissantes pattes arrières qui donnent l’impulsion de départ, ses ailes qui prennent la suite, laissant sous lui la terre dans un petit nuage de sables, quelques battements d’ailes supplémentaires et les voilà bien au-dessus de la mer, sans grand effort.

A peine plus d’une heure après, à l’horizon se distinguent les reliefs d’Achid Kamil, elle accroche le regard, première à se détacher des vastes étendues azurées, mais ils n’en approchent pas davantage, et si celle-ci les accompagne un temps, l’intérêt qu’elle offre est remplacée par celui des Deux Bosses, la seconde des îles entre eux et leur destination. Pour celle-ci, une nouvelle fois, il évite pour l’heure une approche trop franche, se contenant de l’observer d’une position élevée. Néanmoins, quelque chose attire son attention… ou plutôt celle de son partenaire qui vire pour plonger… Pas une pensée, c’est inutile, il sait ce qui a été perçu, un peu plus loin devant eux, tout juste sous les eaux, un grand serpent marin, jeune norkan ? Non, ça, c’est seulement l’humain limité qui s’interroge, au-delà des yeux, le dragon se fit à d’autres sens, la singularité et la familiarité de l’esprit qui fend les eaux avec facilité. Un autre dragon, comme n’en a jamais vu le dragonnier.

Quelques instants, leur vol l’accompagne, et c’est tout autant l’un que l’autre qui cherche à se familiariser, à distance, avec cette créature baignant dans un environnement totalement étranger. Les hommes ont beau avoir appris à parcourir la surface, ce qui se trouve en dessous est aussi inaccessible que le ciel. Les dieux seuls savent ce qui se cachent au-delà, peut-être une civilisation, une race ignorant aussi sûrement la surface qu’eux les profondeurs…

Cette première rencontre prend fin lorsque le Bleu s’enfonce un peu plus profondément, et aussitôt, Pradias reprend de l’altitude et la trajectoire qui les emmènent jusqu’à l’île principale, Nelen. Loin de se laisser simplement porter, Drystan réfléchit… Il veut éviter le contact trop brusque, avec la population de l’île, humaine ou draconique. Aussi, lorsqu’elle se montre, a-t-il une petite idée en tête… Approcher Port-Cinglant pour y être déposé tout en évitant les montagnes dans lesquelles il est plus que probable que des Blancs aient élus domiciles.

Et c’est ce qu’ils font. Longeant la côte sans pénétrer dans les terres, et si par moment, quelque chose vient alerté Pradias, il ne s’y attarde guère pour l’heure. Comme avec le Bronze quelques années plus tôt, ils veulent soigner la première impression, en supprimer le harnais. Avisant un endroit suffisamment remarquable pour être reconnaissable, à environ une lieue de Port-Cinglant, c’est là qu’ils se posent, là que Drystan retire le harnais pour le dissimuler, libérant complétement son dragon.

« Bon, reste à portée, on sait pas ce qu’on va trouver… »

C’était un plongeon dans l’inconnu, littéralement, et le danger pouvait prendre bien des formes, ici… Que ce soit l’île elle-même et sa jungle bien qu’il poursuivrait sur la côte et éviterait d’y pénétrer, les humains potentiellement craintifs ou hostiles ou bien encore les dragons. Dissimulant son visage sous la capuche de sa pèlerine, le voilà qui se lance en direction de Port-Cinglant accompagné de Monarth, ses sens en alerte.
Une lieue plus tard, un peu moins, les signes d’installations se sont multipliés, tous désertés, certains pour partiellement écroulés par manque d’entretien et par les vents marins des dernières années, certainement. D’une certaine manière, cela lui évoque l’Ile du Sanctuaire et ses maisons ouvertes, à disposition, la dégradation en plus, néanmoins rien de surprenant, l’archipel a été abandonnée par une partie de ses habitants à l’arrivée des grands reptiles, il le sait.

Puis se découvre Port-Cinglant, d’abord à l’abri, dans des fourrés, guettant des signes de vies, des activités humaines. Ce qu’il voit préfigure de la suite bien que loin de trahir la vérité, mais si ce n’est de petites créatures, il ne perçoit rien lorsqu’il sonde les alentours, aussi décide-t-il d’aller de l’avant sans attendre sans s’éloigner du bord de mer.
C’est là que ses espoirs prennent un coup particulièrement brutal.

Le port, et plus largement les quartiers adjacents, sont particulièrement endommagés et à l’abandon, balayés par des forces qui n’ont rien de naturelles… Les pontons en lambeaux, la présence de mats perçant la surface témoignent de la probable présence en dessous de petites embarcations comme autant de récifs artificiels condamnant l’accès.
Un scénario se dessine dans son esprit, bien que l’origine soit incertaine… C’est l’œuvre des dragons, ça ne fait aucun doute, mais quelle en est la raison ? Cette question n’a que peu d’intérêt, car il sait, en découvrant les lieux qu’une guerre a été déclenchée, ici ou ailleurs, et que les humains, particulièrement rancuniers, n’oublieront pas, sans se soucier le moindre instant de leur responsabilité… Il était venu en s’interrogeant sur la possibilité d’une cohabitation comme au nord, il savait désormais que c’était plus que compromis, tout comme l’est l’idée d’escorter un navire puisqu’il n’y a plus de moyen de l’accueillir.
Mais le dragonnier s’interroge tout de même car à ses yeux, savoir change tout… Les dragons ont-ils attaqué les premiers ? Ou bien au départ, lorsqu’ils commencèrent à contester la suprématie des hommes, ont-ils été attaqué ? Dès lors, ce qu’il découvre est une réponse.

A cette découverte, il reste un temps immobile, captant les détails avant de s’installer et de méditer de longues minutes pour finalement pousser un profond soupir, loin toutefois d’être accablé.

« Echouer sans avoir rien pu tenter ! C’est frustrant ! »

Il jette un œil à Monarth.

«  Inutile de s’attarder ici, c’est plutôt évident qu’ils ont été attaqué et qu’ils ont foutu le camp. »

Bon, il en déduit d’autres choses, en vérité… Ce qu’il s’est passé a été violent, suffisamment pour inciter les habitants à ne plus revenir, ils ont abandonné les lieux, renoncé à leur accès à la mer. Il ne peut pas exclure qu’ils soient revenus en quêtes d’affaires, mais il n’en trouverait aucune trace. Alors, dos à la mer, il s’enfonce dans la bourgade par l’artère principal, ses sens, tous ses sens, aux aguets, à l’affut du moindre signe de vie digne d’intérêt, croisant çà et là, d’autres signes de destructions, et partout, l’abandon. Ont-ils été attaqué par les serpents marins aussi bien que par les dragons blancs ? Il ne peut l’exclure.

« Une première vague de fuite, comprenant celle de la prêtresse, un sursaut d’orgueil en mer et sur la terre et la destruction, probablement… » A voix haute, il formule son hypothèse, car il sait qu’elle a fui en évacuant le temple… Si les hostilités avaient été vraiment déclarés, sa survie n’en serait que plus miraculeuse et le traumatisme bien plus important, aussi se met-il à imaginer un premier temps où la peur des hommes seules les a convaincu de fuir.

De nombreuses et longues minutes suivent pendant lesquelles il parcourt la bourgade jusqu’à parvenir à la sortie nord au-delà de laquelle s’étend la jungle. Et une nouvelle fois, il observe ce qui se trouve devant lui et s’interroge.

« J’me demande si… »

Pas de corps dans la ville – ou ce qu’il en resterait -, de nombreuses tombes manifestement creusées et rebouchées à la hâte dans le cimetière en périphérie. Si certains ont survécu et n’ont pas pu fuir, s’y seraient-ils réfugiés ? Il connait quelques brides de la « conquête » de l’île, et les dangers qu’il a fallu affronter et les obstacles abattus pour s’y enfoncer… Mais pousser par la peur et l’implacable violence des grands reptiles, auraient-ils fait ce choix ? Loin dans les terres, à l’abri des grands serpents marins… Au plus profond de la jungle, dans laquelle le ciel est bien plus lointain, hors d’atteinte des dragons blancs… Ça aurait du sens.

Il rebrousse chemin, refusant de s’aventurer plus loin, pour sa propre sécurité autant que pour laisser en paix les éventuels survivants. Et pendant les heures suivantes, il parcourt Port-Cinglant, en quête d’un signe, d’une lueur éventuelle, arpentant les rues, pénétrant les demeures sans toutefois y mettre plus de désordre, sans s’adjuger le moindre trésor. Il s’est éloigné de Pradias, pour être en cet instant seulement humain - à supposer qu’il puisse l’être, pour le laisser n’être que dragon alors qu’il pourrait trouver des congénères.

Revenu sur le port, il observe l’horizon, ces quelques heures, il les a mis à profit pour réfléchir à la suite, il s’adresse au dräke - qui n’a pas besoin de cela pour le comprendre.

« Bon, on a tout ce qu’on pouvait trouver ici, l’est temps de songer à partir… Rester ne lui en apprendrait pas davantage, inutile de s’attarder. Mais avant, on a un sanctuaire à trouver. »

Repartant de la chapelle pour point de départ, le dragonnier emprunte un chemin balisé par de petits cairns de pierres blanches sortant de la bourgade pour les hauteurs environnantes. Pendant près d’une heure, il progresse sur ce sentier presque effacé et reconquis par la nature, si bien que plus d’une fois, il le perd de vue, rebrousse chemin pour le retrouver et poursuit.
Quand il parvient finalement en vue d’une petite cabane de pierres taillés à demi incrusté dans le sol, quelque chose l’interpelle, une présence, forte… très forte. Instinctivement, son esprit effleure son lien pour alerter son partenaire, l’inciter à revenir et se replie sur lui-même. C’est désormais sur sa vue qu’il se repose, il avance plus prudemment, et le voit.

Un dragon blanc, à proximité… un jeune. Leurs regards se croisent, et le dragonnier s’efforce de rester le plus calme et le plus serein pour ne pas l’inquiéter plus que ne le fait sa seule présence, mais celui qu’il a en face manifeste des signes de sentiments partagés… Entre crainte et curiosité, il hésite encore. Doucement, il continue d’avancer vers la cabane, sans rompre le contact avec celui qui s’est levé et se maintient à l’écart du chemin.
Quand il parait se tendre, le dragonnier s’arrête, refusant de faire le geste de trop, mais finalement, le jeune blanc prend sa décision et son envol, partant vers le nord sans demander son reste. Son départ est suivi du relâchement d’un Drystan qui ne se réjouit pas pour autant de cette « fuite ». C’est qu’il y en a probablement d’autres dans le coin, et que loin de prendre la fuite, il a pu partir trouver de l’aide… Mais ses propres renforts, à lui, approchent alors il reprend la marche et finit de rejoindre l’humble sanctuaire au allure de cabane de berger – même si un berger n’aurait jamais l’idée de l’y mettre là – sur laquelle la végétation reprend ses droits.
Une courte prière à la Damedieu où il s’excuse, et il pénètre dans le petit sanctuaire où se trouve l’objet de ses pérégrinations, et il ne prend pas son temps pour récupérer la statuette qui y repose, l’emballant dans un linge avant de la plonger dans un sac de toile qu’il a emporté avec lui, à cette fin. Il ne veut pas trop s’attarder dans le secteur maintenant qu’il a croisé un des autochtones.

Quand il ressort, il sait son dragon à proximité, mais celui-ci est en alerte… Les copains du jeune ? Possible… Un dragon. Seul. Un adulte. Instinctivement, il va à sa rencontre tandis que Drystan se retire de son esprit, il décide de le laisser seul pour ce premier contact, c’était entendu de longue date qu’il ne parasiterait pas l’instant. Il ne faut pas longtemps pour que les réponses ne viennent. Il est venu, sans animosité, avec une proposition. S’écartant du sanctuaire, Drystan a sous ses yeux les deux dragons qui se font face, le nouveau venu est plus grand – plus vieux ? –  mais il n’y a aucun conflit dans l’attitude de l’un et de l’autre.

C’est par l’entremise du lien qu’il perçoit d’abord l’échange et la proposition… Libérer Pradias. Rompre le Lien. Enseigner. Il n’existe rien en cas de refus… Ils pourront partir en paix, pour peu qu’ils ne tardent pas, mais une prochaine rencontre serait bien moins cordiale. Il met en garde contre la corruption qu’une telle relation provoque.
Pradias s’interroge, il veut naturellement en savoir plus avant de se décider, mais il ne reçoit aucune réponse, le Grand Blanc a fait sa proposition, il ne tente pas de forcer la main, et désormais il attend la décision. Alors il décide.

Il refuse, est reconnaissant mais refuse. Ce qu’il offre, ce sont des entraves… Qu’un autre lui dicte ce qu’il doit être, ce qu’il doit savoir… Il ne peut l’accepter, surtout si pour cela, il doit perdre ce qu’il est.

Son esprit est calme, s’affirme finalement, et il finit par trouver son dragonnier. Des parias, l’un et l’autre, se refusant à appartenir à un monde en particulier au risque de se fermer à tous les autres. Qui a corrompu le plus l’autre, dans cette histoire ?  
Lorsque le Grand Blanc se fait accusateur à l’encontre du dragonnier pour tenter de le convaincre pour le faire changer d’avis, certainement, lui assénant qu’il enchaine son dragon, qu’il le fera souffrir suite à la décision et le refus de Pradias, celui-ci ne plie pas. Il n’est pas intervenu dans la réflexion de son partenaire, il s’en est bien gardé, et dans ce qui peut paraître comme un haussement d’épaule mental, une pensée lui échappe.

Il a fait son choix.

Enfin d’une seule « voix », les deux s’expriment par l’entremise du dragon, dans ce qui aurait ce sens.

Je/nous te remercie pour ton hospitalité. Je/nous vais quitter l’archipel sans tarder et te promet que je/nous garderais mes distances, à moins que la nécessité l’exige.

L’échange dans son ensemble s’inscrit dans un instant, et la rencontre dans son intégralité ne dure guère plus d’une minute avant que le Grand Blanc ne reprenne son envol, seul. La pression retombe soudain, le dragonnier souffle et son esprit touche affectueusement celui de son compagnon.

« Merde ! »

L’idée de demander si une évacuation des rescapés humains était possible ne lui revient qu’à cet instant, trop tard, infiniment trop tard ! Le dragon ne sera venu que pour tenter de lui prendre Pradias, en définitive. Dommage. D’une pensée, il invite son partenaire à profiter de ce ciel, encore un peu, le temps que lui-même parvienne là où il a laissé ses affaires.
Sur la route, alors que le jour arrive à son terme, il a tout loisir de réfléchir un peu plus, maintenant. Quelle réalité dans la relation des dragons et des nisétiens ? L’existence d’individus comme eux étaient-ils alors mieux acceptés ? Désiré même, pour permettre le dialogue ? Ou bien déjà, en ces temps reculés, faisaient-ils figurent de parias ?
Quoiqu’il en soit, c’est en définitive plus léger qu’ils ressortiraient de cette excursion.

Le ciel s’est assombrit, le soleil se couche à l’horizon quand il parvient à l’endroit où ils avaient posé pied à terre, et son dragon l’attend déjà. Avec une certaine routine, il réinstalle son harnais, fixe les sacoches et glisse soigneusement la statuette enroulée dans du tissu dans l’une d’elle.
Mais tandis qu’il monte sur le dragon et que Monarth prend place également, il écarte l’idée de revenir à Thaar. Il veut laisser retomber cette journée avant d’y retourner pour y restituer la relique et probablement faire face à cette prêtresse. Une pensée pour le ramener plus au nord, plus tôt qu’à l’accoutumée, retourner à la Cité Blanche pour se plonger dans ses études.

Le dragon décolle alors que la nuit s’est installée, cap sur la plage isolée d’où ils sont partis, et le lendemain, après une nuit de repos, ils partiraient sans plus attendre vers le nord.
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