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 Le Dragon et le Cygne (Griffon)

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Gaubert de Prademont
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MessageSujet: Le Dragon et le Cygne (Griffon)   Le Dragon et le Cygne (Griffon) I_icon_minitimeMer 4 Déc 2019 - 17:39

Troisième ennéade de Favrius
An 17, XIe Cycle

Gaubert somnolait dans un fauteuil à larges accoudoirs, s'aggripant du bout des doigts au vélin de la dernière lettre de Jocelyn de Buthen. Son voyage en Isgard approchait et tout était prêt pour accueillir le comte. Il allait agrandir ce fichu port et en faire une escale incontournable pour tous les commercants qui transiteraient par la Nord. Il éclipserait le port de Seram et étoufferait économiquement ces maudits etherniens, il s'en était fait le serment.

Raoul entra dans le salon en ouvrant la porte en grand, faisant sursauter son vieux frère pour sa plus grande satisfaction.

Holà mon frère ! Je te dérange ?

Le comte fit tomber son parchemin et frona les sourcils prêt à incendier l'impudent qui avait troublé son repos. Il se ravisa en reconnaissant son plus jeune frère. Le bougre aurait répondu à sa colère par un de ses sourires narquois en haussant les épaules et en le traitant de vieille mule, alors à quoi bon ?

Quelles nouvelles, Raoul ?
Ma foi, plusieurs ! Je pars bientôt en Sainte-Berthilde, à Casteldulac, tu connais ?
J'ai une tête de géographe ?
Seulement de vieille mule.

Quel immonde petit trou du cul. Il l'avait sorti son insulte préférée en haussant les épaules, même sans que Gaubert ne lui rentre dans le lard. Et il souriait l'effronté.

Et ensuite, j'ai ouï dire d'un tournoi en Oësgard pendant leur grande foire. Barkios va être un mois splendide !
Tu as déjà épuisé l'or de celui de Hautval ?
Non pas ! Mais si je peux réupérer quelques piécettes en plus et botter quelques fessiers au passage, je suis partant.

Il aurait aimé lui rabattre son caquet de fanfaron mais il devait bien admettre qu'il avait probablement raison. Raoul était un jouteur émérite et même réputé et il se hissait toujours aux places d'honneur dans les tournois qu'il écumait sans cesse. Il ne doutait pas qu'il ferait bonne figure lors de ces deux évènements. Il représentait fièrement les couleurs des Prademont et du comté, démontrant à chaque fois la valeur des chevaliers nordiens.

Tiens, en parlant de Hautval, comment se porte ma nièce ?
Bien, fort bien même. Elle m'a semblé avoir apprécié le séjour.
Hahaha, tu m'étonnes !
Plaît-il ?
Je crois qu'elle n'a pas été insensible aux charmes suderons !

Sude... quoi ? Comment ça "charmes suderons" ? Qu'est-ce que c'était que cette histoire ? Et il souriait béatement, ce merdeux. Ce qu'il pouvait être énervant quand il s'y mettait.

Peux-tu arrêter de parler par énigme ?
Eh bien, figures toi que le fils du marquis de Langehack lui a tapé dans l'oeil !
Nooon ?
Sisi et je crois bien que c'est réciproque. Tu aurais vu ce puceau tenter de l'impressionner en me défiant et lui faire des ronds de jambes pendant le dîner. C'était délicieux et risible en même temps.
Attends, tu veux dire qu'Alaïs pourrait ...
Marier l'héritier du Griffon ? Oui, mon frère !

Par les Cinq cette petite pouvait bien lui amener une alliance des plus intéressantes. Un rapprochement avec le langecin pourrait permettre de développer le commerce maritime bien plus vite qu'il ne l'avait prévu, sans parler des avantages en terme de construction navale. Le cerveau de Gaubert machinait si fort qu'il en aurait presqu'eu de la fumée qui sortait des oreilles.

J'y vais mon frère, je passe embrasser mes nièces avant de partir et je reviendrai d'ici quelques ennéades !

Il ne répondit que par un grognement, plongé dans ses pensées. Il fit venir Paulin dans les minutes qui suivirent et lui fit la dictée.

Citation :
À l'attention du seigneur Griffon de Langehack,
Marquis du Langecin

Votre Excellence,

J'espère que ce pli vous trouvera en bonne santé et sous les meilleures augures qui soient.
J'ai tout récemment eu connaissance de la rencontre qui a eu lieu entre votre fils, le seigneur Théodoric et ma fille, Dame Alaïs et de l'intérêt qu'ils se portent l'un à l'autre. En tant que parents responsables, il me semble de bon aloi d'engager quelques discussions les concernant, eux et leur avenir. Un rapprochement entre nos deux maisons m'apparaît comme souhaité par ces deux jeunes gens et souhaitables à bien des égards. Je souhaiterai vous inviter en cinquième ennéade, dans mon château d'Odélian-ville, afin de nous rencontrer, ainsi que votre fils Théodoric, qu'on m'a présenté comme un parfait gentilhomme. J'ose confier à Son Excellence, que cette visite ferait la joie de ma tendre fille.

Que les Cinq veille sur vous.
Paulin Caron
Au nom de Gaubert de Prademont, comte d'Odélian


Dernière édition par Gaubert de Prademont le Jeu 5 Déc 2019 - 17:03, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Le Dragon et le Cygne (Griffon)   Le Dragon et le Cygne (Griffon) I_icon_minitimeMer 4 Déc 2019 - 22:25


« Il a fait quoiiiiiii?! »

Voilà les quatre mots qui retentirent haut et fort dans la salle du trône du palais ducal. Ludolph se tenait devant son seigneur après que ce dernier ait fait sortir les gens venus demander audience au marquis. Rendre la justice avait ses côtés ennuyeux et même bien souvent ses casse-têtes mais voilà, c’était toujours plus agréable que d’apprendre des nouvelles de ce genre.

« Reprenons calmement. » Intervint Galyn de Langehack en faisant un pas en avant. « Nous t’écoutons sir Ludolph. »

« Ouais on t’écoute. » Gronda un Griffon assez mécontent.

« Lors du banquet suivant le tournois de Hautval, après être arrivé en demi-finale, Théo est visiblement tombé amoureux d’une dame pour laquelle il a juré de tuer une grosse bête. »

« Mais pourquoi il a fait ça cet imbécile?! »

« Pour racheter une faute qu’il aurait commise, je crois, j’ai pas tout compris. »

Un sourire narquois passa sur les lèvres de Galyn lorsqu’il entendit son frère marmonner dans sa barbe.

« Ça t’apprendra à vouloir faire de ton fils le parfait exemple du chevalier de roman. »

« Certes. Bon où il est? »

« Sur la route de Missède, il veut aller chercher des informations à la bibliothèque. »

« Pardon? »

« Il n’a pas voulu repasser par Langehack, il a simplement fait un détour à Sorault. »

« Va me le ramener tout de suite! » Explosa-t-il en se levant de son siège. « Prends Gabriel avec toi et n’économisez pas vos chevaux ! »

Le chevalier hocha la tête et s’en alla au pas de course vers les écuries.

« Ne t’inquiète pas, Théo n’est pas stupide au point d’y aller seul. »

« Tu veux parier? » Maugréa-t-il en descendant les marches qui menaient jusqu’à son trône, suivi par son frère alors que les gardes ouvraient les portes vers les cuisines. Le marquis avait besoin de boire un peu de vin pour se calmer. « Ce gosse aura ma peau. »

« Peut-être que c’est ce qu’il cherche. » Répondit le prêtre en riant. « Mais ne t’inquiète pas, Ludolph et Gabriel vont le retrouver et le ramener jusqu’ici. »

« J’en doute pas, je préfèrerais qu’ils n’aient pas à le faire. »

« On a pas toujours ce qu’on veut. »

« A qui le dis-tu... »

En effet les deux chevaliers trouvèrent le fils de leur seigneur sur la route de Missède et après une claque du hautvalois ils prirent le chemin inverse pour rentrer à Langehack. Une fois de retour, le jeune homme fut invité par son père dans la salle du trône où ce dernier appris la nouvelle. Ils étaient seuls, même les gardes étaient partis, Théodoric se présenta devant les marches en regardant Griffon avec une expression neutre.

« Théo, j’ai cru comprendre que tu voulais partir dans une quête pour une dame, puis-je savoir pourquoi ? » Ce dernier acquiesça et expliqua ses motivations dans un discours enflammé et une fois la fin arrivée, n’arracha qu’un soupir à son père. « Je ne peux, et ne vais, pas t’en empêcher, tu as juré sur ton honneur que tu l’accomplirais mais avant ça tu vas m’accompagner jusqu’à Odélian. Vois-tu, j’ai reçu il y a peu une lettre intéressante : Gaubert de Prademont m’a invité pour discuter. Peut-être sais-tu ce qu’il a en tête. »

Le jeune homme secoua la tête.

« J’imagine que ça doit avoir un lien avec sa fille, Alaïs de Prademont. »

« Tu imagines... Alaïs de Prademont serait-elle la dame pour laquelle tu t’es lancé dans cette quête ? »

« Oui. »

« J’ai en effet l’impression que tu imagines bien. Gaubert m’a invité pour parler, pour qu’on le rencontre. Je suis content d’apprendre que tu t’es comporté comme un parfait gentilhomme et tu seras sans doute content d’apprendre qu’Alaïs se réjouit de ta venue. Malheureusement j’ai bien peur que tu t’apprêtes à la décevoir. »

« Père ? » Demanda le jouvenceau, ne voyant visiblement pas où voulait en venir le marquis.

« Et bien tu ne peux pas à la fois courir après des monstres et te présenter à la cour d’Odélian à mes côtés. »

« Je peux commencer ma quête après notre voyage ! »

« Pourtant tu avais l’air si pressé de te lancer à cœur perdu sur les routes. »

« C’est que… »

« Files preparer tes affaires avant que je te renvoies sur les routes avec un coup de pied au cul, nous partons pour Odélian dans deux jours. »

Ce fut le cas, deux jours plus tard, Griffon, son fils et quelques chevaliers prenaient la mer pour se rendre à Odélian. Ce fut donc un cortège de quelques chevaliers qui escortèrent leur maître et son héritier jusqu’à la ville d’Odélian, un des chevaliers fut d’ailleurs envoyé en avant du groupe, portant les armes de la maison de Langehack pour prévenir de l’arrivée de Griffon un jour à l’avance.

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MessageSujet: Re: Le Dragon et le Cygne (Griffon)   Le Dragon et le Cygne (Griffon) I_icon_minitimeJeu 5 Déc 2019 - 11:17

Le Dragon et le Cygne (Griffon) Cg4sLe Dragon et le Cygne (Griffon) Feqn
Alaïs et Blandine

Messire ! Messiiiiire ! Les langecins arrivent !

Gaubert finit de nouer le cordon de ses chausses et inspecta sa tenue une dernière fois dans le miroir. Il portait une tunique bleue richement brodée de fil d'argent, aux couleurs de sa maison, abandonnant ses traditionnelles tenues plus ternes et confortables. On accueillait pas un marquis et sa clique sans sortir les beaux atours. Si Griffon avait répondu à son invitation, c'est qu'il voyait lui aussi d'un bon oeil ce rapprochement entre les deux territoires et mieux, qu'il était prêt à envisager un mariage entre leurs enfants. De quoi faire fredonner sa fille pendant quelques ennéades de plus.

Il sortit de sa chambre et avança d'un pas décidé vers le perron. Il inspecta au passage les meubles et les tapisseries qui ornaient les murs. Gaubert avait ordonnait de faire briquer la moindre latte de parquet et épousseter le plus petit bibelot du château. Rien ne devait servir de prétexte au refus de cette union. Les jeunes gens semblaient épris l'un de l'autre, mais c'était loin d'être une condition essentielle dans la noblesse. Pour que le langecin accepte que son héritier épouse une fille d'un rang inférieur, il fallait que tout soit parfait.

Alaïs rejoint son père avec une certaine hâte. Elle avait opté pour une toilette élégante avec un maquillage discret qui soulignait légèrement le bleu de ses yeux. Elle portait une tiare fine sur la tête et portait une robe vert pâle au bord orangé, qui contrastait avec sa blondeur. Une natte faisait le tour de son crâne et donnait l'impression d'une auréole délicatement posé sur sa tête. Cette petite savait se mettre en valeur. Elle semblait tout à fait impatiente, ne sachant que faire de ses mains qu'elle plaçait tantôt le long du corps, tantôt jointes devant elle, sans parvenir à trouver une position confortable. Alors que le son des sabots langecins se faisaient de plus en plus proches, Gaubert se tourna vers son aînée.

Où est ta soeur ?
Je suis là, Père !

Blandine apparut, fardée comme une comédienne qui sortait de scène. Elle avait parlé du tas désabusé qu'elle affectionnait tant ces derniers temps. Là où Alaïs choisissait des atours discrets et nobles, la cadette optait généralement pour un agglomérat de poudres et de crèmes parfumées qui lui donnait un teint orangé des plus vulgaires au yeux de son vieux père. Elle soutenait mordicus que c'était la tendance à Diantra et dans les grands salons du Sud. Gaubert avait eu beau lui signifier qu'elle était nordienne et que la mode suderonne n'avait pas d'intérêt ici, elle n'en demeurait pas moins accroché à ses frivolités qui le dépassaient. Cette petite merdeuse lui avait fait rouler les yeux vers le ciel plus d'une fois et aujourd'hui ne ferait pas exception. Elle avait lâché ses cheveux sur ses épaules et portait une robe rouge constellée de volants de soie. Elle ressemblait plus à une bohémienne qu'à une fille de la noblesse, mais tant qu'elle se tenait correctement en présence des invités, il ne ferait aucune remarque. Elle était superficielle et agaçante, mais pas complètement stupide au point de pousser la provocation et de déclencher le courroux de son vieux père.

La délégation du Langehack entra enfin dans la cour à la suite de l'étendard de leur marquis. À leur tête, Griffon caracolait aux côtés d'un jeune homme qui partageait de nombreux traits avec lui. Du coin de l'oeil, il vit Alaïs se redresser en voyant le jeune homme, c'était donc lui ce fameux Théodoric. Il dut admettre qu'il était plutôt séduisant pour un suderon, cette fois encore, elle montrait qu'elle avait du goût. Les gens du château accoururent pour aider le marquis et son fils à mettre pied à terre, alors que Prademont descendait la volée de marches pour accueillir ses invités comme il se doit.

Votre Excellence, bienvenue en Odélian ! J'espère que votre voyage a été paisible !

Il s'inclina respectueusement, un sourire apparaissant sous sa barbe poivre et sel. Il écarta les bras en désignant l'escorte du marquis.

Laissez-moi faire escorter vos hommes jusqu'au Fort du Bélier. Ils y trouveront de quoi se nourrir et se reposer ainsi que du fourrage et de quoi panser vos montures.

Il frappa des mains à l'attention de quelques palefreniers, qui s'étaient rassemblés dans la cour avec les autres serviteurs, qui à leur tour se dépêchèrent de remplir leur mission en prenant soin des destriers langecins et de leurs cavaliers.

D'une main tendue, il invita ses deux invités de marque à monter les quelques marches qui menaient à l'entrée du château et poursuivit les présetations.

Laissez-moi vous présenter mes filles. Alaïs et Blandine de Prademont.
Votre Excellence.
Votre Excellence.

Les deux jeunes femmes effectuèrent une révérence élégante en inclinant la tête. Alaïs eut un petit sourire en croisant le regard de Théodoric, trahissant son intérêt pour le jeune homme. Blandine, elle, restait plutôt froide aux charmes du langecin. Elle souriait à peine, se donnant cette attitude de petite peste trop bien pour montrer son intérêt à quelque chose d'autre qu'à son reflet. En redressant la tête, elle croisa le regard de son père qui fronça légèrement les sourcils, d'un air désapprobateur. Elle se força donc à afficher un sourire plus franc même s'il sonnait faux. Ne préférant pas relever, Gaubert poursuivit en indiquant l'intérieur du château.

Si vous le voulez bien, nous pouvons passer dans la salle à manger, j'ai fait demander à mes cuisiniers de préparer une biche rôtie, j'espère que vous avez faim !


Dernière édition par Gaubert de Prademont le Jeu 5 Déc 2019 - 14:59, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Le Dragon et le Cygne (Griffon)   Le Dragon et le Cygne (Griffon) I_icon_minitimeJeu 5 Déc 2019 - 13:31


La suite de Griffon avait débarqué à Seram dans une des galères de la flotte langecine, faisant du cabotage depuis Tall, où le fils bâtard de Guilhem de Tall, Guiche de Tall, pu retrouver son père un jour durant après un long séjour à la cour de son seigneur. Mais voilà : ils n’étaient pas passés par là pour ça ainsi donc Guilhem apprêta rapidement un navire pour le marquis qui prit la mer le lendemain. Une fois qu’ils mirent pied à terre rejoindre la Route Intérieure fut facile et ils ne s’arrêtèrent à Etherna que pour quelques heures, le temps de se reposer un peu et de boire un coup. Ils repartirent ensuite mais s’arrêtèrent à Beaumont pour la nuit avant de faire le trajet restant le lendemain, ce fut à ce moment que Guiche de Tall fut envoyé en avance pour prévenir les de Prademont de leur arrivée prochaine. Ils arrivèrent en vue de la ville d’Odélian même alors que le soleil commençait à se coucher, ils pénétrèrent dans ladite ville sous le regard des habitants qui se demandaient quelques instants qui ils pouvaient bien être.

« Tu n’aurais pas pu choisir d’offrir ton cœur à une suderonne, Théo ? »

Demanda Gabriel de Bone, châtelain de Bone et ancien beau-frère de Griffon, qui avait tissé des liens étroits avec ce dernier, d’autant plus après la mort de sa sœur. Avant que l’intéressé ne puisse répondre ce fut son oncle, Galyn qui prit la parole.

« Mais non, notre brave garçon a décidé de sauver cette pauvre fille de la dépression nordienne. Elle doit être triste ainsi elle se met dans tous ses états en se disant qu’elle va enfin pouvoir quitter cette ville morne et comment lui en vouloir ? Tout manque de couleur ici. »

« C’est sûr qu’on est loin des maisons rouges, jaunes, bleues ou vertes de Langehack ou même des rues de Missède. » Intervint Griffon en regardant un peu atour de lui.

« On comprends mieux pourquoi ils sont tous dépressifs dans le nord. » Ajouta Alceste de Saunier, l’homme qui brandissait bien haut la bannière de Langehack, et qui ouvrait donc la marche. La remarque en fit rire quelques-uns et sourire les autres.

« Vous verrez bien pourquoi lorsque vous l’aurez sous les yeux ! » Se défendit Théodoric qui avait enfin la possibilité d’en placer une mais alors qu’Alceste allait répondre leur seigneur leur intima le silence, ils approchaient du château. Une fois à l’intérieur, il mit pied à terre en premier, puis son fils l’imita, suivit de Galyn, de Gabriel et enfin des chevaliers.

« Votre grandeur, je vous remercie, notre voyage l’a été même si Théodoric a vivement insisté pour faire un détour lorsqu’il a vu un dragon bleu au loin. » Ce qui était faux, les drakes bleus ne s’aventuraient que très rarement au-delà du large de Nelen et avoir croisé le grand dragon bleu aurait signé la mort de leur navire et, par extension, probablement la leur mais ça, avec un peu de chance, le vieux comte ne le savait pas. Le marquis hocha la tête et sa suite fut accompagnée jusqu’au fameux fort pour qu’ils puissent s’y reposer. Puis il accepta l’invitation de Gaubert et monta les marches, son fils, qui n’avait d’yeux que pour Alaïs malgré la présence de Blandine, sur ses talons. Ce qui expliquait peut-être la froideur de la cadette.

« Heureux de vous rencontrer, mes dames, Alaïs vous connaissez sans doute déjà mon fils, Théodoric de Langehack mais j’ai cru comprendre que ce n’était pas votre cas, votre Grandeur, ni même le vôtre, dame Blandine. » Expliqua-t-il une fois en haut des marches. « Avant de passer dans la salle à manger, pouvons-nous nous changer ? Goûter votre biche rôtie en tenue de voyage serait un affront que je n’ai pas envie de laver dans le sang. »
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MessageSujet: Re: Le Dragon et le Cygne (Griffon)   Le Dragon et le Cygne (Griffon) I_icon_minitimeJeu 5 Déc 2019 - 15:38

Votre grandeur, je vous remercie, notre voyage l’a été même si Théodoric a vivement insisté pour faire un détour lorsqu’il a vu un dragon bleu au loin.

Gaubert leva les sourcils, surpris et jeta un oeil vers les quelques chevaliers qui prenaient le chemin du Fort, puis lança un regard discret vers le jeune Théodoric. Soit il était royalement crétin, soit le marquis faisait un trait d'esprit étrange. Comment avec dix bons hommes, suderons qui plus est, comptait-il terrasser un dragon ? Dans le doute, le comte préféra opter pour la boutade plutôt que pour la médiocrité intellectuelle de celui qui pouvait être son futur gendre.

Une fois sur le perron, Gaubert présenta ses filles et Griffon en fit de même pour son fils.

Heureux de vous rencontrer, mes dames, Alaïs vous connaissez sans doute déjà mon fils, Théodoric de Langehack mais j’ai cru comprendre que ce n’était pas votre cas, votre Grandeur, ni même le vôtre, dame Blandine.
En effet, votre Excellence, même si je dois admettre n'avoir entendu que des compliments sur lui.

Alaïs ne quittait pas son preux prétendant des yeux. Son coeur s'était mis à battre un peu plus vite lorsqu'il était apparu aux côtés de son marquis de père. La filiation était évidente et Griffon dut être en son temps un charmant jouvenceau. Gaubert lança l'invitation à dîner, mais Griffon objecta poliment.

Avant de passer dans la salle à manger, pouvons-nous nous changer ? Goûter votre biche rôtie en tenue de voyage serait un affront que je n’ai pas envie de laver dans le sang.

Un petit sourire contri se dessina sur le visage du comte qui répondit.

Mais bien entendu, votre Excellence ! Nous avons fait préparer deux chambres au premier étage.

Deux valets accompagnèrent les langecins dans l'escalier pour leur présenter leurs chambres. Les deux filles de Gaubert observèrent les deux hommes monter et lorsqu'ils eurent disparus de leur champ de vision, Blandine se pencha vers son aînée.

Moui, pas mal. Le père est tout de même plus séduisant que le fils.
Qui t'a demandé ton avis ?
Blandine
Je le donne quand même. Quitte à te donner à un langecin, autant choisir le plus beau et le plus riche !
Blandine ! Tais-toi.
Oui, père.
Dans la salle à manger, toutes les deux. Et tenez-vous devant le marquis !

Le trio entra donc dans la pièce où on avait fait dresser une grande table nappé de rouge. La vaisselle était rutilante et dans le coin de la pièce, Gaubert avait fait venir un troubadour pour égayer le repas de quelques notes de luth. À croire que son aventure avec le seigneur de Lourmel l'ennéade précédente lui avait donné le goût de la musique. Alors que les jeunes filles se plaçaient face à leur siège, Blandine tira la langue vers Alaïs, qui leva les yeux au ciel sans répondre à la provocation de la chipie. Leur père lança un regard noir à l'attention de la cadette avant de lui dire à mi-voix, dans une colère froide.

Je t'assure que si tu te fais remarquer, je te ferai donner le fouet et je fais enfermer dans un couvent aux confins de l'Oësgard.
Oui, Père.

Elle baissa les yeux, reconnaissant la dernière limite à ne pas franchir. Son père pouvait se montrer tolérant, même lorsqu'elle se montrait provocante et provocatrice, voir même insolente, mais lorsqu'il usait de ce ton, avec ce regard, sa patience arrivait à son terme. Et la dernière fois qu'elle avait franchi cette limite, elle avait regretté amèrement son attitude et il avait tenu parole en faisant claquer le fouet sur ses fesses rebondies. Elle avait dû s'asseoir sur un gros coussin pendant trois ennéades entières.

Quelques minutes plus tard, les valets ouvrirent la porte pour laisser entrer les langecins. Gaubert ouvrit les bras avec bienveillance.

Messeigneurs, je vous en prie !

Griffon fut inviter à s'asseoir à la droite du comte, face à Blandine, tandis que Théodoric pouvait s'intaller à sa gauche, face à Alaïs, qui eut un petit sourire charmant et charmé pour le jeune homme. Le ménestrel pinça les cordes de son instrument pour accompagner leurs installations.


Dernière édition par Gaubert de Prademont le Jeu 5 Déc 2019 - 17:03, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Le Dragon et le Cygne (Griffon)   Le Dragon et le Cygne (Griffon) I_icon_minitimeJeu 5 Déc 2019 - 16:20

Griffon fit signe à son fils d’avancer le premier, de suivre les valets dans l’escalier alors qu’il retirait ses gants d’équitation ce qui lui permit d’entendre qu’on parlait devant l’entrée du château mais il ne sut pas ce qui se disait. Toutefois le ton commençait à lentement monter. En entendant ça Théodoric se retourna pour voir si sa belle s’était attirée de quelconques soucis avant que le marquis le ne pousse à avancer alors que les valets attendaient devant leurs chambres respectives avec leurs vêtements de rechange. Une fois à l’intérieur ils se changèrent, le jeune homme revêtit un doublet frappé des armes de leur famille : d’azur et d’argent avec un dragon d’or passant ; le doublet était, littéralement, d’azure et d’argent plus qu’il était très richement brocardé d’argent et fait d’un bleu azur. Quant à Griffon il avait aussi opté pour un doublet mais celui-ci était de rouge et d’or, réhaussé de pierreries et perles. Le pantalon des deux hommes suivait le même schéma que le reste de leur vêtement pour le compléter et, pour finir, des bottes de cuir faites par les meilleurs artisans langecins achevait ce portrait. Certes Langehack était plus connue pour ses tenues féminines, et notamment ses robes et ses corsets, mais ça ne voulait pas dire que les hommes étaient en reste.

Une fois prêt, le marquis sortit pour toquer à la porte de son fils qui répondit quelques secondes plus tard.

« Je ne suis pas prêt. » Cria-t-il pour être certain qu’on l’entende à travers la porte même s’il se trouvait à l’autre bout de la pièce. Le marquis poussa tout de même ladite porte pour voir que, si, son fils était, en l’état, prêt à descendre rejoindre leur hôte. Théodoric se trouvait devant un miroir, tentant de discipliner sa tignasse. Il se retourna brusquement, sans doute de peur que ce fut Alaïs. « Ah, c’est vous, Père. »

« Tu comptes venir un jour? Tu mets plus de temps à te préparer que Prudence. » Adossé au mur jouxtant la porte, un sourire moqueur, il observait son fils qui s’était retourné face au miroir. « Laisse tomber Théo, je n’ai jamais réussi à dompter mes bouclettes, tu n’est jamais parvenu à maîtriser les tiennes et tu n’y arrivera pas en quelques minutes. » Le jeune homme se retourna, déçu, il savait que son père avait raison mais il avait tenté jusqu’au bout. Toutefois il tenta une dernière fois avant de rejoindre Griffon. « Mais ne t’inquiète pas, elle les aime, tes bouclettes. »

Théodoric releva la tête, dans ses yeux on pouvait y lire la question qu’il n’osait poser et son père hocha la tête pour lui confirmer qu’il ne disait pas ça simplement pour lui faire plaisir. Ils descendirent ensuite tous deux, suivant une fois de plus les valets vers la salle à manger promise. Griffon sourit au comte devant l’accueil qui leur était réservé et le jeune homme sourit, un peu bêtement, en voyant à nouveau Alaïs.

« Merci. » Il prit sa place à la droite de Gaubert tandis que son fils s’empressa de s’installer devant Alaïs. « J’ai cru comprendre, votre Grandeur, que vous avez fait préparer une biche, seriez-vous un amateur de chasse à tous hasards ? »

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MessageSujet: Re: Le Dragon et le Cygne (Griffon)   Le Dragon et le Cygne (Griffon) I_icon_minitimeJeu 5 Déc 2019 - 16:58

Les langecins prirent place de part et d'autre du comte, vêtus de leur riche tenue brodée et brocardée. À peine leur cul de suderons posés sur l'assise, les serviteurs arrivèrent avec des pichets remplis de vin pour remplir la coupe de nobles attablés.

J’ai cru comprendre, votre Grandeur, que vous avez fait préparer une biche, seriez-vous un amateur de chasse à tous hasards ?
Oui-da, votre Excellence !

Il laissa le verre du marquis se remplir ainsi que la sienne et poursuivit tandis qu'on servait leurs enfants.

Mes terres natales au nord du comté sont cises entre la forêt d'Hedda et le Pélanchon, deux terrains de chasse giboyeux et propices à ce noble art !

Tandis que les pères échangeaient, Alaïs parvint à croiser le regard d'émeraude de Théodoric. Elle sentit le rouge lui monter aux joues, mais réussi à ne pas baisser le regard, combattant sa timidité quasi-maladive. Il avait fière allure dans cette tenue aux couleurs de son blason et sa tignasse bouclée et indisciplinée brisait l'image trop lisse qu'avait certains jeunes nobliaux trop soucieux de leur apparence. Un petit éclat de fougue qui ajoutait au charme du beau gentilhomme. Elle lui sourit, souhaitant lui faire comprendre la joie qu'elle avait de le revoir, sans se permettre de couper la parole aux deux seigneurs qui continuaient leur conversation, alors qu'on apportait le tourne-broche depuis les cuisines.

Je ne mentirai pas en disant que j'ai moi-même abattu cette bête, ce sont mes veneurs qui l'ont tués, hier. Si vous êtes un adepte vous-même, je serai honoré de vous inviter à une partie de chasse, tantôt. Vous êtes également le bienvenue, Sieur Théodoric.

Il leva sa coupe vers Griffon, puis vers son fils, bientôt imité par ses filles.

Je lève mon verre à l'amitié entre nos maisons !

Il but une gorgée et savoura le nectar avec délice. Il avait fait sortir des tréfonds de sa cave, quelques bouteilles des meilleurs crus hautvalois que l'intendant avait pu trouver. Du Hautval 976 et du 978, bien connu pour être légèrement sucré en fin de bouche, des vins parfaits pour entamer un repas. Puis, il avait prévu des crus de 998, une année fameuse si l'en était, reconnu pour ses vins ronds qui se mariaient à merveille avec le goût marqué du gibier.

Tandis que les serviteurs entamaient la découpe de la bête empalée, Gaubert croisa le regard de Blandine qui toisait Griffon en minaudant. Elle semblait complètement ignoré le jeune théodoric, mais elle désirait que le marquis s'intéresse à elle. Même si Griffon en venait à le faire par politesse, la jeune femme se ferait probablement tout un roman qu'elle ne manquerait pas de partager à sa soeur pour la narguer. Il était parfois fatiguant d'avoir deux filles, surtout quand l'une d'elle était Blandine.

Dites-moi, Seigneur Théodoric. Mon frère Raoul m'a dit que vous avez jouté contre lui en Hautval. Il m'a dit beaucoup de bien de vous, sachez-le.

Il jeta un petit coup d'oeil en coin vers Alaïs, laissant un petit sourire en coin être remarqué par sa fille. C'est dans des moments comme celui-là que les deux frères se ressemblaient le plus, et comme par hasard, c'était toujours avec ce petit air amusé lorsqu'ils la regardaient.
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MessageSujet: Re: Le Dragon et le Cygne (Griffon)   Le Dragon et le Cygne (Griffon) I_icon_minitimeJeu 5 Déc 2019 - 17:37


Griffon observa le vin couler sans rien laisser paraître de sa curiosité pour le cru qui était servi, il tourna finalement la tête vers le comte lorsque ce dernier entreprit de lui en dire un peu plus à propos de ses terres.

« Intéressant. Il se trouve que le sud a aussi son nombre de bois qui se prêtent très bien à la pratique de la chasse, Bois-Clair pour ne nommer que le plus important. »

Quant à Théodoric il n’avait d’yeux que pour Alaïs, délaissant complétement Blandine qui le lui rendait bien étant donné qu’elle ne lui lançait même pas un regard, ce qui n’était pas plus mal. En voyant son aimée rougir il détourna le regard, craignant de la mettre mal à l’aise en la fixant alors, à voix basse pour ne pas déranger leurs pères, il entama une conversation via une banalité. Puis on apporta la broche sur laquelle reposait l’animal vaincu la veille. Animal que regarda le marquis un moment avant de se tourner une fois de plus vers le comte pour l’écouter.

« Ce serait avec grand plaisir, votre Grandeur ! Toutefois j’espère que vous n’avez rien contre la chasse au gros gibier. Bien que rare de par chez moi, j’aime beaucoup m’attaquer aux toxeuroves qui hantent parfois les marais pharentans et je me demande quelles bêtes peuvent être trouvées dans la forêt d’Hedda ou dans le bois de Pélanchon ; sans doute y’a-t-il des créatures contre lesquelles un chevalier peut prouver sa valeur. »

Les langecins imitèrent leur hôte, levant son verre bien haut. Ce fut à cet instant que son regard, d’un vert plus foncé que celui de son fils, croisa celui de Blandine et voir la jeune fille ainsi le fit sourire. Il ne comptait rien faire, il avait largement l’âge pour être son père, après tout Prudence ne semblait pas être bien plus âgée qu’elle, et les relations avec un grand écart d’âge le répugnait ; il les trouvait déshonorante bien qu’il comprît que, pour le bien d’une alliance, ces mariages-là existent toutefois il ne comprenait pas comment on pouvait les rechercher en dehors de la nécessité. Mais rien ne l’empêchait de lui adresser un sourire charmeur le temps d’une poignée de secondes avant de passer à Alaïs avant de finalement retourner à Gaubert.

« A nos maisons! »

Puis il l’imita aussi, avalant une gorgée puis il hocha la tête d’appréciation. Bien que le vin particulièrement bon, Griffon avait développé un goût partial pour les productions langecines et malgré la qualité du produit hautvalois, il préférait ce qui se faisait chez lui.

« C’est un honneur, Votre Grandeur et vous m’en voyez ravi. Avoir eu l'occasion de combattre contre pareil jouteur fut, en soit, une chance et ses conseils sont précieux, je compte bien les appliquer lors du prochain tournois auquel je participerais ou bien, que Néera nous en garden à la guerre. »

Après ça le vin glissa dans les gosiers aussi vite que la viande glissa dans les assiettes et, le repas, aussi arrosé de délicieux crus hautvalois que de conversations d’un intérêt divers pour chacun des convives, il arriva le temps de, finalement, discuter de choses sérieuses alors que le repas en question touchait à sa fin.


Dernière édition par Griffon de Langehack le Jeu 5 Déc 2019 - 20:50, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Le Dragon et le Cygne (Griffon)   Le Dragon et le Cygne (Griffon) I_icon_minitimeJeu 5 Déc 2019 - 20:29


Ce serait avec grand plaisir, votre Grandeur ! Toutefois j’espère que vous n’avez rien contre la chasse au gros gibier. Bien que rare de par chez moi, j’aime beaucoup m’attaquer aux toxeuroves qui hantent parfois les marais pharentans et je me demande quelles bêtes peuvent être trouvées dans la forêt d’Hedda ou dans le bois de Pélanchon ; sans doute y’a-t-il des créatures contre lesquelles un chevalier peut prouver sa valeur.
Figurez-vous que pas plus tard que l'ennéade dernière, je suis tombé sur une horde de gobelins dans l'Hedda ! Je pensais que cette saloperie verte vivait plus au nord, chez les nains et forniquait avec les sigols dans leurs montagnes, mais non, il en vient jusque sur les bonnes terres du Roy.

Gaubert tourna la tête et cracha par terre, signifiant son dégoût de l'engeance vertepeau à ceux qui pouvaient encore en douter. Puis ils trinquèrent en continuant d'échanger sur divers sujets, engloutissant le repas et sirotant le vin goulûment. Blandine continuait ses oeillades ridicules à l'attention de Griffon qui répondait par des sourires polis uniquement alors que de l'autre côté de la table les deux tourtereaux échangeaient à demi-voix, se souriant et se dévorant du regard. Ah que les premières heures d'une amourette étaient jolies. Les jeunes gens se regardaient plein d'émerveillement et d'attention, cherchant à faire naître un sourire sur le visage de l'autre pour se délecter de cette image, osant à peine se toucher même s'ils en brûlaient d'envie.

Le repas toucha à sa fin et Gaubert se tourna vers Alaïs, lui souriant tendrement.

Ma douce fille, que dirais-tu de faire visiter les jardins au seigneur Théodoric ? Son Excellence et moi devons nous entretenir et tant que la nuit est jeune, c'est un endroit charmant, surtout avec l'automne qui colore les feuilles.

Elle hocha la tête avec enthousiasme, rougissant un peu avant de croiser le regard de Théodoric et de baisser les yeux, espérant que cet excès d'entrain ne donnerait pas l'impression qu'elle était facile. Blandine haussa les épaules, légèrement vexée de n'avoir pas su attirer l'attention du marquis. D'ordinaire lorsqu'elle papillonner en présence de nobles, ceux-ci n'avaient d'yeux que pour elle et ce vieux bouc l'avait presque ignoré. Elle quitta la table et fit une petite révérence face aux invités de son père avant de disparaître dans sa chambre.

Je vous souhaite le bonsoir, Messeigneurs.

Alaïs se leva à son tour, suivi par le jeune chevalier. Elle fit mine de le prendre par la main mais se ravisa, ne sachant pas comment cette proximité serait vu par Griffon et son père. Les leçons de protocole et d'étiquette se mélangeaient sous sa crinière blonde. Son père avait eu une riche idée en proposant de visiter les jardins d'Asovia. C'était le seul vestige de la gouvernance de Dame Thyl d'Asovia, plus de vingt ans plus tôt. Elle avait fait créé ces jardins qui représentaient des incarnations de ses nombreux voyages à travers le monde. On y trouvait un petit labyrinthe fait de haies qui fleurissaient au printemps, des tapis de fleurs de divers coins de la Péninsule (qui ne serait pas visible en cette saison certes) ou encore quelques petits bosquets qui dissimulaient un belvédère qu'on surnommait la Niche des Anges, à cause des petits angelots sculptés sur les fins piliers qui soutenaient le toit.

Les enfants étant partis vivre leurs propres aventures, Gaubert se tourna vers Griffon, souriant face au spectacle charmant que leur avait leur progéniture.

Votre fils est à la hauteur des compliments qu'on m'avait fait sur lui, votre Excellence. C'est un parfait gentilhomme.

Toujours commencer une négociation par un petit compliment. Comme disait l'adage, ça ne mange pas de pain et ça fait toujours plaisir. D'autant qu'il n'y avait là que pure vérité. Il fallait maintenant entrer dans le vif du sujet.

Je pense que vous avez constater comme moi, que ces jeunes gens s'aiment, et cela m'apparaît comme un amour sincère. Je pense que vous avez parfaitement compris la teneur de mon invitation ici, alors je ne perdrais pas de temps à tourner autour du pot. Êtes-vous prêt à consentir à des épousailles et à l'union de nos maisons ? Et sous quelles conditions ?

Les dés étaient jetés ...
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MessageSujet: Re: Le Dragon et le Cygne (Griffon)   Le Dragon et le Cygne (Griffon) I_icon_minitimeVen 6 Déc 2019 - 18:24


Les dés étaient jetés ... et ils l'étaient avec une franchise que Griffon appréciait tout particulièrement alors, quand le comte dénota l'amour flagrant qui avait étreint les deux jeunes gens, le marquis acquiesça et il recommença lorsqu'il fut question du motif de l'invitation dudit comte. Il termina sa coupe puis la reposa sans faire attention au serviteur qui la remplit à nouveau.

« Je suis prêt à y consentir. Pour ce qui est conditions, je suis certain que vous vous doutez de ces dernières. Vous venez de parler sans détour alors permettez moi de faire de même: je veux qu'Isgaard revienne dans le giron langecin que la ville n'aurait pas dû quitter. »

Le marquis parlait sans ambages lui aussi et il n'y allait pas de main morte sur les exigences. Le comte failli éclaté de rire, pensant dans un premier temps à une blague, mais le visage fermé et le regard acéré de Griffon ne laissait pas de place à la confusion, il pensait ce qu'il venait de dire. Les négociations s'annonçaient longues.

Votre Excellence, vous savez très bien que c'est impossible. Isgaard a été donné à Odélian il y a plus de cinq ans, par décret royal. Le même décret qui a transféré la vassalité d'Etherna à Sainte-Berthilde. Tout ceci a été acté afin de préserver le royaume des guerres qui ont rongés nos terres pendant des années entières. Combien de vies ont été perdues pour garder ses frontières, en vain ?

Le comte but une gorgée de vin, observant le marquis par-dessus sa coupe avant de reprendre.

En revanche, en unissant nos maisons, il est évident que nous pourrions trouver un accord commercial avantageux pour vos marchands, voir même avoir leurs entrepôts dédiés et un droit de passage quasi-nul sur la Sirilya. Non seulement cela vous ouvrirez des perspectives de commerce avec Alonna et Oësgard sans être inquiété par l'Etau, mais cela offrirait une escale bienvenue à vos navires qui voudraient commercer en Estrevent. Isgaard, jadis terre de conflit entre nos terres pourrait devenir une terre de réconciliation et de partenariat.

Il sourit au marquis en menant de nouveau la coupe à ses lèvres, la balle était dans le camp du langecin qui l'observa longuement, l'écoutant attentivement, laissant planer un silence avant de finalement répondre.

« Non, ce ne fut pas là l'objectif de ce... partage, s'en fut le prétexte tout au plus. Il est temps de réparer cette injustice: les langecins se sont fait spolié le fruit de leur labeur et il n'est donc que justice qu'ils le récupèrent. Mais je peux vous proposer des accords commerciaux avantageux, des accords dont vous ne pourriez même pas rêver autrement.»

Gaubert haussa les épaules, écoutant l'argument qui ne lui semblait pas pertinent.

Cette spoliation n'est pas de mon fait et même si je le désirais, je n'aurai aucune possibilité de changer les choses. Isgard est odélian, il n'y a pas lieu d'en débattre plus avant. Et si je puis me permettre une remarque, l'enclave fut missédoise et non langecine, vous ne fûtes spoilé de rien. Je suis prêt à vous offrir les mêmes avantages que votre vassal car je le peux. Votre offre ne repose que sur l'éventualité que je cède aveuglément un territoire qui n'était pas le vôtre. Je sais que vous êtes un homme intelligent et que vous comprenez mon point de vue. Mon offre est concrète et peut être mis en place immédiatement, nous profitant à tout deux dès demain et sans nécéssiter de validation royale interminable et fastidieuse. Vous conviendrez qu'elle est déjà très généreuse.

Le ton était poli et aimable mais suffisament ferme pour ne pas prêter à confusion, ce port et les terres qui l'entouraient était passé sous la bannière d'Odélian et le resterait. Il avait invoqué l'autorité royale pour ne pas paraître vindicatif et catégorique, mais Prademont ne lâcherait pas un pouce de terrain isgardois. Le marquis faisait lentement tourner sa coupe dans sa main avant d'en avaler une gorgée.

« Isgaard est missédoise mais sous occupation odélianne, votre Grandeur. Mais soit, vous ne voulez pas, tant pis, je suis tout de même prêt à vous proposer la chose suivante : donnez Isgaard à Alaïs. » Reprit-il de son ton neutre et calme avant d’avaler une nouvelle gorgée pour finalement reposer sa coupe sur la table.

C'est qu'il était têtu le bougre ou qu'il ne voulait pas comprendre. Il ne proposait pas, il ordonnait et disait au comte quoi faire de ses terres. Il était bien fou si il croyait arriver quelque part avec cette méthode.

Tous les ressortissants missédois de la ville ont été renvoyés sains et sauf par bateau jusque leurs terres tout au long des cinq dernières années, votre Excellence. Ceux qui ont souhaités rester ont du prêter allégeance au comte d'Odélian et sont soumis à sa gouvernance. Je puis vous assuré que cette terre est dorénavant aussi odélianne que Dens ou Assar. Elle demeure sous la tutelle militaire de l'Etau, vous savez sans doute les difficultés que présentent certains habitants de l'arrière-pays. J'ignore le fonctionnement sur vos terres, mais dans le Nord, une femme ne peut exercer de gouvernance militaire.

Il sourit aimablement tandis qu'il tendait sa coupe pour la faire remplir au serviteur en faction près d'eux.

« Voir un père qui ne fait pas confiance à son enfant m’attristera donc toujours. » Il poussa un soupir en lançant un regard rapide vers la porte que Théodoric et Alaïs avaient traversées pour partir s’isoler dans les jardins. « Alors, votre Grandeur, que proposez-vous à la place ? Je ne peux croire que vous n’avez qu’un accord commercial en tête. »

Oh il n'est nullement question de confiance votre Excellence, mais bien de sexe. Elle est née femme et nulle femme n'a accès à ce genre de poste ici.

Il haussa les épaules, comme une évidence. Il ne mentait pas, les moeurs nordiennes étaient encore très encrés dans la tradition. Peut-être qu'au sud on autorisait les bonnes femmes à occuper des postes militaires à responsabilité, mais pas chez lui et Gaubert n'avait pas l'âme d'un réformateur, spécialement sur ce point.

Je ne propose pas un simple accord commercial, Monseigneur. Je vous propose une alliance ! Commerciale autant que militaire. Si nos maisons s'unissent, nous aurons une descendance commune et nous serons membre d'une même famille. Ces liens sont sacrés, ici, dans le Nord. D'un point de vue commercial, je peux m'assurer que vos marchands puissent avoir accès aux produits qui arriveront d'Estrevent au même prix que les miens. Je peux également assurer des prixs préférentiels sur le grain qui sort de mes champs à destination de vos ports. Et militairement, si un jour un ennemi venait à menacer l'intégrité de vos terres, Odélian vous soutiendrait. Je vous propose une véritable collaboration, seigneur Griffon, respectant les souhaits du Roy et pouvant profiter à notre descendance sur plusieurs générations. Sans parler des bénéfices que cette alliance pourrait nous faire engranger à tous les deux. Qu'en dites-vous ?

« C’est une offre tentante, du moins sur le papier. L’alliance, aussi bien militaire que commerciale, est là l’objectif du mariage et va de soi, je ne pensais pas qu’il fallait le préciser, j’en viendrais presque à me dire que ces liens ne sont pas si sacrés que ça, dans le nord. Quant au point commercial j’ai déjà ce que vous me proposez si ce n’est pour votre grain mais je peux déjà obtenir des prix plus avantageux en Estrevent. Pour ce qui est de l’alliance militaire et bien ma foi j’en serais ravi mais vous y gagnez probablement plus que moi. »

Il attrapa à nouveau sa coupe pour boire une gorgée et pousser un soupir.

« Je ne demande qu’à donner ma bénédiction pour cette union, seigneur Gaubert, mais pour le moment je ne vois pas pourquoi est-ce que je le ferais. Comprenez-vous maintenant pourquoi j’ai tant insisté sur Isgaard ? »

Non messire, cela ne va pas de soi. J'aurai pu vous proposer une dot sous forme d'or et m'en tenir là. La proposition n'aurait pas été insultante et aurait respecté les coutumes, sans pour autant vous offrir un quelconque avantage financier ensuite. C'est mon attachement à ces valeurs familiales qui me fait vous proposer pareils avantages.

Gaubert tapota son index contre la table, légèrement irrité par les remarques désobligeantes envers ses propres terres. Remarques qu'il confirmait avec sa réponse.

D'un point de vue militaire, la seule chose que j'aurai a envier à Langehack est sa marine, mais sur terre ferme, nul n'est meilleur qu'une armée nordienne, vous le savez très bien. La combinaison de nos deux forces nous rendraient extrêmement puissants, nous y gagnerions autant l'un que l'autre. Et d'un point de vue commercial, tant que les dragons voleront au-dessus de Nelen, tous les navires estreventins feront leur première escale péninsulaire en Isgaard, me permettant s'il m'en prend l'envie d'acheter les stocks pour les revendre en gonflant les prixs ou pour les distribuer à l'envie. Une technique fourbe que je souhaiterais éviter, mais envisageable si d'aventure on me prenait pour un agneau sans cervelle.

Il sirota son vin en toisant Griffon, qui secoua lentement la tête, déterminé.

J'ai bien entendu votre insistance, votre Excellence et je suis certain que vous avez entendu mon refus et les raisons de celui-ci. Je vous propose tout de même des avantages équivalents en terme d'or récolté en vous épargnant la pacification nécessaire du fief. Vous avez tout à y gagner en vérité.

« L’or... » Griffon avala une nouvelle gorgée de vin avant de reposer sa coupe à nouveau sur la table, doucement, sans faire de bruit. « C’est donc ce qui vous intéresse? » Il secoua à nouveau la tête. « J’aimerais vous conter une histoire, si vous le permettez, votre Grandeur. C’est l’histoire d’un jeune homme qui a un peu plus d’une vingtaine d’années, il a tout du preux chevalier alors lorsqu’il entend dire que l’ost royal est levé et s’en va punir des traîtres, il lève ses propres troupes pour voler à l’aide de son Roy. Mais voilà, ce jeune homme est bien plus proche des félons et arrive à la frontière avant tout le monde. La fougue de la jeunesse le pousse donc à combattre et le voilà qui part traverser des marais avec son armée sans attendre le renfort d’un seigneur qui vit, lui, dans les marais et les connait bien. Après tout il s’agit d’un endroit dans lequel il a grandi. Savez-vous ce qui est arrivé à ce preux chevalier ? » Il laissa la question planer le temps de boire une nouvelle gorgée pour se désaltérer. « Ses troupes se sont fait harceler, jours et nuit, triplant le temps de trajet nécessaire pour traverser le marais et la dernière nuit, alors que ses hommes étaient à bout, démoralisés par des pertes causés par un ennemi contre qui ils ne pouvaient rien, un peu à l’instar de fantômes, les marais se sont embrasés. Les flammes dévoraient tout, traitant l’eau comme s’il s’agissait de bois sec. Notre héros s’en est sortis mais une partie non négligeable de ses hommes et de ses vivres n’ont pas eu cette chance. »

Il avala une nouvelle gorgée avant de poursuivre, plus pour laisser ses dernières paroles imprégner l’air que parce qu’il avait soif.

« Vous vous demandez peut-être pourquoi je vous raconte tout ça, seigneur Gaubert, je le fais pour deux raisons. Premièrement le feu de pharet est aussi dangereux sur terre que sur mer alors non, la flotte de Langehack n’est pas la seule chose que vous devriez nous envier. Deuxièmement, pacifier les alentours d’Isgaard me seras plus aisé qu’à vous, moins couteux, que ce soit en or, en hommes ou en temps ; je sais me battre dans les marais, j’ai vécu une partie non négligeable de ma vie dans cet environnement inhospitalier et c’est aussi le cas des brigands dont nous voulons tous deux nous débarrasser. Vous avez tout à y gagner en donnant ce fief à Alaïs. Qui plus est, la descendance de nos deux enfants hériterait à la fois de Langehack et d'Isgaard, faisant d'Odélian le suzerain du futur marquis, resserrant d'autant plus les liens que nous aurons tissés entre nos deux familles. »

Le comte ne put retenir son rire plus longtemps. Griffon haussa un sourcil avant de les froncer. Ce suderon pouvait s'étaler en rodomontades, il ne l'impressionnait pas une seconde avec son récit. Lui aussi avait mener des guerres, lui aussi avait vu des choses incroyables en pourfendant des drows et des chaotiques et dans tous les combats qu'ils avaient menés depuis.

J'ai déjà répondu plusieurs fois, Monseigneur. Non. Ma fille ne peut se voir transférer la gouvernance militaire d'Isgaard. Et ce ne sont pas vos menaces à peine voilées qui y changeront quoi que ce soit. Si vous y tenez tant que ça à ce fief, venez le prendre. Le Royaume saura avant le Conseil des Pairs que vous menacez la paix du Roy et tentez de bafouer ses décrets. Libre à vous de vous mettre tout le monde à dos. Je vous ai fait une proposition plus qu'honnête, libre à vous de la refuser et de lever vos armées. Vous serez seul dans votre combat et désavoué par Diantra même. Malgré tout, mon offre reste la même, je consens à vous la proposer une dernière fois.

« Vous vous méprenez grossièrement. Je n’ai rien voilé jusqu’ici et je ne compte pas commencer maintenant, si je voulais vous menacer je l’aurais fait directement. » Son ton calme et posé était toujours présent mais il s’était fait beaucoup plus froid. « Toutefois que vous y voyez une menace laisse penser que vous craignez les forces suderonnes bien plus que vous ne voulez l’admettre, seigneur Gaubert. Je vais donc expliciter ma proposition vu que vous peinez à en saisir les implications : je m’occuperais de pacifier les alentours d’Isgaard, vous seriez libre de m’assister ou non, pour que la gouvernance militaire ne soit plus nécessaire, vous permettant de faire de votre fille la châtelaine d’Isgaard qui restera votre vassale et ses descendants également ; nos deux familles se porteront mutuelle assistance en cas de conflits ; les marchands langecins et odéliannais seraient les bénéficiaires de divers accords facilitant le commerce entre nos deux terres ; les de Prademont seront les bienvenus dans le marquisat de Langehack si un malheur devait les déposséder de tout fief, que la DameDieu vous en garde ; je m’engage à discuter avec la haut-prêtresse de Néera, Irys d’Arosque, pour tenter d’obtenir que le mariage de Théodoric de Langehack et d’Alaïs de Prademont soit célébrer dans la cathédrale de Sainte Deina. »

Il me semble que "non" à la même signification ici que dans le sud pourtant. Isgaard est odélianne et si vous souhaitez le contester, il faudra venir armé. JE m'occuperai de pacifier moi-même le fief et ma fille ne sera pas faite châtelaine du fief, car ce n'est pas à vous de décider de comment je gouverne MES terres. Je ne crains nullement vos soldats, Messire. Et je ne suis pas un imbécile qui ne sait pas voir ce qui se cache sous des contes "innocents". Vous voulez me faire croire que vous me parlez des feux de pharet, de votre magnifique flotte et de votre héroïsme pour faire la conversation peut-être ? Mais les feux pharétans appartiennent aux mervalois, pas à vous. De même qu'Isgaard a appartenu à Missède et non à vous. Je serais étonné de connaître l'avis de vos vassaux en sachant que vous vous attribué leurs biens. C'est probablement une manie, vous essayez bien de me faire diriger mon fief selon vos désirs. Peu me chaut que ce mariage se fasse dans une chapelle ou à Sainte Deina. Je vous ai fait une proposition plus qu'honnête, parce que ma fille me semble éprise de votre fils et qu'il y avait l'occasion de réaliser de grandes choses en coopérant ensemble, mais je ne souhaite rien vous imposer, ni vous mener en bateau. Je suis prêt à faire des concessions dans les limites du raisonnable, mais pas de céder à votre chantage ou aux menaces que vous ne voulez admettre.

Il ingurgita son vin et défia le marquis du regard, si le langecin se répétait et continuait de tourner en rond, la discussion n'avait plus vraiment d'intérêt.

« Cela peut paraître étrange pour ceux qui n’y sont pas habitués mais à Langehack, le marquis et ses barons travaillent de concert, je peux compter sur eux comme ils peuvent compter sur moi. Prenez mes paroles pour des menaces ou du chantage si ça vous chante, il ne fut pas question de ma flotte et encore moins de mon héroïsme et je me demande pourquoi vous vous sentez si menacé, seigneur Gaubert. Pour l’instant je vais me retirer, il serait dommage que l’un de nous ne dise quelque chose qu’il ne pense pas, nous reprendrons nos discussions demain si cela vous sied. »

Travailler de concert. Les licrones pétaient des arc-en-ciel et les dragons forniquaient avec les ânes tant qu'on y était. Les mervalois confiraient leur si précieuse arme à leur suzerain au risque qu'ils les retourne contre eux, le marquis rêvait tout haut ou se berçait d'illusions ridicules. Plus ridicule encore, s'il pensait faire avaler pareille couleuvre au vieux grigou qu'était Gaubert. Il en avait connu des tractations de ce genre et il ne démordrait en rien de ce qu'il avait annoncé jusque maintenant.

Je vous souhaite la bonne nuit, seigneur Griffon. L'un de mes valets va vous escorter jusqu'à votre chambre
« De même. »

Griffon hocha la tête avant de suivre le valet, laissant le comte seul dans la grande salle à manger, faisant tournoyer le vin qui restait au fond de son verre.


Dernière édition par Griffon de Langehack le Ven 6 Déc 2019 - 20:57, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Le Dragon et le Cygne (Griffon)   Le Dragon et le Cygne (Griffon) I_icon_minitimeVen 6 Déc 2019 - 20:51

Le lendemain matin, tous se retrouvèrent au même endroit pour prendre le petit déjeuner. La discussion entre les pères n'avait mené qu'à une impasse. Les deux jeunes gens, eux, semblaient avoir partagé un moment exquis et s'échangeaient des regards amoureux de moins en moins discrets. Alaïs avait rejoint Gaubert en fredonnant, semblant flotter au-dessus du sol tellement elle avait fait des rêves enchanteurs. Son père se contenta de sourire gentiment, lorsqu'un vint déposer sur sa joue couverte de barbe, un petit baiser qui claqua. La pauvrette n'avait aucune idée de la teneur des discussions qui avaient animés la pièce quelques heures plus tôt et le comte ne voulu pas briser son rêve d'épouser le langecin tout de suite.

Un jour nouveau s'était levé et avec lui le comte qui souhaitait tenter une nouvelle tactique pour adoucir le Griffon et ses revendications. Il avait fait mander ses veneurs et leurs plus gros limiers. Le marquis aimait la chasse au gros gibier, il allait lui en trouver du gros gibier. Au coeur de l'automne, en remontant les rives de l'Ohin à travers le Pélanchon, on pouvait encore trouver quelques ours qui descendaient depuis les hauteurs alonnaises pour s'engraisser avant d'entrer en hibernation. Lors des jours précédents, les chasseurs lui avaient parlé d'un gros mâle qu'ils avaient vu pêcher des truites tandis qu'il traquait le dîner engloutit lors du repas de la veille. La bête avait été repéré quelques jours avant, plus loin au nord-est et il semblait se rapprocher d'Odélian même et des troupeaux de vaches rouges qui broutaient l'herbe grasse des pâturages. C'était là l'occasion de faire d'une pierre, deux coups. D'un côté, il éliminait la menace qui pouvait peser sur le bétail et de l'autre, il donnerait de quoi se défouler au marquis en manque de sensation forte. Et comble du bonheur, si la bête venait à bouffer Griffon, faisant de facto de son fils le marquis, les tractations autour du mariage seraient pliées en deux coups de cuillères à pot.

Déjà vêtu de sa tenue de chasse, il attendit que le repas s'achève en échangeant quelques amabilités tièdes avec son invité de marque, avant de se lever en déployant un large sourire.

Votre Excellence, vous et votre fils souhaiterez peut-être se joindre à moi pour une partie de chasse ? Vous m'avez confié aimer la chasse au gros et mes veneurs ont débusqué une proie qui devrait vous convenir. Je vous fournirai tout le matériel nécessaire bien entendu !

Blandine bailla nonchalamment, visiblement peu intéressé par le projet tandis qu'Alaïs inclina les sourcils dans une expression légèrement inquiète. Elle croisa le regard de son père qui hocha de la tête doucement pour la rassurer, puis elle chercha le regard de Théodoric, en quête d'une confirmation supplémentaire. Le comte ota ses gants de sa ceinture et les enfila avant de frapper dans ses mains.

Êtes-vous de la partie, Messeigneurs ?

Il espérait que l'air frais des sous-bois et la nuit permettraient à Griffon d'être réceptif à une nouvelle discussion
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MessageSujet: Re: Le Dragon et le Cygne (Griffon)   Le Dragon et le Cygne (Griffon) I_icon_minitimeVen 6 Déc 2019 - 21:52

Ce fut un Griffon fulminant qui avait suivi le valet pour rejoindre sa chambre, il avait eu du mal à se contenir, le comte ayant petit à petit érodé sa patience par ses sous-entendus et ses moqueries, voir son mépris pour finir par ne même plus les masquer. Il avait donc préféré s’en aller plutôt que de risquer de défier Gaubert en duel pour ses affronts ; le goût amer de sa dernière défaite était encore sur ses lèvres, ce qui aidait à l’assagir. Dans tous les cas, une fois dans sa chambre, il se déshabilla avant d’aller s’allonger sur son lit mais bien qu’il fermait les yeux il n’arrivait pas à trouver le sommeil, resassant sans cesse ce qui s’était dit cette soirée, du moins son échange avec le maître des lieux. Il se demandait ce qu’il aurait bien pu dire différemment, de quels arguments il aurait pu user mais il abandonna bien vite ; plus il y pensait et plus ce qu’il aurait dû dire lui venait en tête, ce qui le faisait se sentir de plus en plus stupide. A la place il parcourut de long en large la pièce lorsqu’il finit par entendre des bruits de pas, il se leva donc et en ouvrant la porte il put voir son fils rentrer poser la main sur la poignée de sa chambre. Au moins il y en avait un qui avait passé une bonne soirée. Il arborait un grand sourire, une démarche guillerette l’avait mené jusqu’ici et le marquis était certain que si l’heure n’eut pas été avancée il aurait sifflé un air joyeux.

« Théo, vient s’il-te-plaît. » Ce dernier hocha la tête et entra dans la chambre de son père à qui il ne restait que ses chausses. Ce dernier alla s’asseoir dans un fauteuil tandis que son fils restait debout. « Tu l’aimes vraiment ? »

« Oui Père! »

« Pas si fort, tu as vu l’heure? » D’un geste de la main il lui intima de baisser le ton.

« Pardon, oui, je l’aime de tout mon Souffle. » Griffon regarda son fils alors que le silence s’étirait. « Père ? » Ce dernier secoua vivement la tête comme pour sortir d’un rêve.

« Oui? Oh, pardon Théo, tu disais? » Le marquis savait que son fils lui avait dit quelque chose, il avait brièvement vu ses lèvres s’agiter mais quant à savoir ce qui s’était dit, c’était un mystère.

« De quoi avez-vous discutés avec le père d’Alaïs ? » Il mit quelques instants avant de lui répondre, regardant ses yeux d’émeraude allumés par une flamme des plus vives. C’était un regard qu’il avait connu, autrefois, un regard qu’il ne pensait pas revoir. Ses bras se décroisèrent, quittant son torse pour retrouver ses flancs, lui faisant pousser un soupir alors qu’il fit quelques pas dans la chambre.

« De tout et de rien. » Théodoric haussa un sourcil, il attendait visiblement plus de détails mais son père, lui tournant le dos, ne lui répondit pas. « Merci Théo, tu peux aller te coucher. » Le concerné hésita à dire quelque chose avant de faire un pas en arrière et finalement sortir, laissant Griffon seul avec ses pensées.

Le lendemain le marquis fut surpris en descendant de voir que le maître des lieux portait une tenue qui ne seyait guère à un petit déjeuner mais malgré la discussion de la veille Griffon se montra aimable avec le comte. La nuit portait conseil mais il hésitait à tous les appliquer. Le marquis haussa un sourcil une fois la proposition venue, se demandant à quoi Gaubert pouvait bien jouer mais il fallait admettre que l’idée était tentante et qu’une bonne chasse ne faisait jamais de mal. Enfin si mais rarement à lui. Théo se retint de répondre par l’affirmative mais il n’était pas bien difficile de voir son enthousiasme, malgré l’inquiétude sa belle, alors il regarda son père, certain que ce dernier allait accepter. Toutefois il ne répondit pas de suite et ce ne fut qu’à la seconde invitation qu’il hocha la tête.

« Avec grand plaisir. »

« Ce serait un honneur, votre Grandeur ! » S’exclama Théodoric, éclipsant par son entrain la tiédeur de son père.

Il regarda ensuite Alaïs et voulut prendre à nouveau sa main, comme il avait pu le faire à Hautval ou même la veille, pour la rassurer mais il n’en fit rien, il n’osa pas devant Gaubert. Il n’osa pas non plus proposer que la belle en question les accompagne. Il se leva un peu brusquement avant d’être imité par son père qui le plus lentement.

« J’aimerais, si cela ne vous dérange pas, seigneur Gaubert, convier mon frère à cette belle partie de chasse. »

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MessageSujet: Re: Le Dragon et le Cygne (Griffon)   Le Dragon et le Cygne (Griffon) I_icon_minitimeSam 7 Déc 2019 - 12:06

Les deux langecins, père comme fils, acceptèrent l'invitation, l'enthousiasme du plus jeune contrastant avec la réponse polie mais tiède du plus vieux. À l'image de sa fille, Théodoric semblait d'humeur joviale. Ces deux-là n'avaient décidement aucune idée de la teneur de la discussion qui avait eu lieu la veille. Le jeuen homme leva sa main pour prendre celle de sa dulcinée mais se ravisa en croisant le regard de Gaubert. Le vieil odélian observait d'un regard neutre la scène, surpris autant que ravi de voir que ce jeune homme avait assez de respect pour lui pour ne pas oser toucher sa fille sous ses yeux. Chasteté et pudeur étaient les maîtres mots pour les jeunes femmes nordiennes et Théodoric l'avait visiblement bien compris. Brave gamin. Il se redressa d'un bond, bientôt imité par Griffon qui se pencha vers le comte.

J’aimerais, si cela ne vous dérange pas, seigneur Gaubert, convier mon frère à cette belle partie de chasse.

Gaubert sourit, en se frottant les mains.

Bien entendu, votre Excellence. Plus on est de fous, plus on rit ! Je vais l'envoyer quérir au Fort. Son nom s'il vous plaît ?

Les trois hommes passèrent la porte qui donnait sur l'escalier après avoir saluer les filles du comte, Gaubert précédant ses invités. Il leur dit sur le ton de conversation.

J'ai pris la liberté de faire monter quelques vêtements de chasse dans vos chambres. Je vais m'assurer qu'on en apporte une à Monsieur votre frère et faire venir vos chevaux des écuries. Retrouvons-nous dans la cour, si vous le voulez bien. À tout à l'heure, Messeigneurs.

Sur ces mots, il joignit le geste à la parole en envoyant un valet portant une tenue de cuir souple à l'oncle de Théodoric, tandis qu'un lad sortait les montures langecines de leur stalle. La meute de chiens de chasse fut amenée depuis le chenil dans un concert de jappements excités et d'ordres secs hurlés par les veneurs. Gaubert fit attacher deux gros couteaux de chasse à sa selle et un carquois bourré de flèches. Un écuyer lui tendit Larmanon, cise dans son fourreau, et noua la ceinture autour de sa taille, avant d'enfourcher son brave Targon. Le brave destier odélian faisait paraître les montures suderonnes pour des poulains, tant les chevaux du comté étaient des bêtes massives. Certes, il était d'aspect un peu plus pataude, avec ses franges de poils blancs qui coiffaient le haut de ses sabots, mais le comte avait toujours préféré sa sihouette musculeuse et puissante, à celle plus élancée et fine des eraçons ou des autres races péninsulaires. On pouvait y voir un chauvinisme certain et on n'aurait pas tort sur ce point.

Plaçant ses mains sur le pommeau de sa selle, Gaubert patienta jusqu'au retour de ses invités. Quelques gardes se joignirent à eux, mené par le fidèle Roland qui portait le cor aujourd'hui. Ils se postèrent autour de leur seigneur en bon ordre, tenant leurs solides montures par la bride. Targon remua la tête lorsqu'un limier tenta de bondir vers lui en remuant la queue, mais ce fut là le seul fait notable avant que les suderons ne réapparaissent.
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MessageSujet: Re: Le Dragon et le Cygne (Griffon)   Le Dragon et le Cygne (Griffon) I_icon_minitimeLun 9 Déc 2019 - 15:13

« Galyn de Langehack. » Répondit l’intéressé en suivant le maître des lieux avant de prendre la direction de leurs chambres pour aller se changer. Alors certes ce n’était pas la sienne mais Griffon se sentait toujours bien dans une tenue faite pour son loisir favoris. Il rajusta la veste, tira un peu sur ses gants pour être certains qu’ils étayent en place et qu’ils ne bougeraient pas puis il secoua un peu la jambe avant de finalement sortir. Son fils n’avait pas l’air aussi à l’aise, la chasse ne l’intéressait guère, alors certes c’était toujours agréable mais il ne partageait pas la passion de son père ; sauf lorsqu’il s’agissait de traquer et d’abattre des monstres, il répondait toujours présent lorsqu’il était question d’abattre un toxeurove ou quelque chose du même acabit mais pour ce qui était de tuer un daim, l’ennui le gagnait bien vite.

Ils descendirent donc dans la cours une fois prêt pour y retrouver Galyn, sur le chemin qui menait jusqu’ici, discutant à grands renforts d’éclats de rire, avec le valet qui avait pour mission de l’amener dans la cour. Il était également en tenue de chasse mais il avait toujours son tabard frappé des armes d’Othar.

« Ah, mon frère, mon neveu ! » S’exclama le prêtre en voyant Griffon et son fils. « Je vous présente Rathier, un homme très serviable. Rathier je te présente mon frère, le marquis et son fils. » Rathier fit une révérence maladroite mais ce n’était pas faute d’essayer de la faire correctement.
« Enchanté. »
« De même, monseigneur. »
« Galyn, le comte nous attend. »
« Ah oui, c’est vrai, j’arrive. » Il se tourna vers le valet avant de partir avec les deux hommes. « Merci Rathier, on devrait pouvoir trouver notre chemin mais n’ait crainte, la prochaine tournée est pour moi ! »

Ils entrèrent finalement dans la cour où leurs montures avaient été apprêtées et où tout semblait prêt pour qu’ils partent. Enfin presque, il manquait tout de même une chose.

« Seigneur Gaubert, avant de partir, allez-vous vous joindre à nous pour prier ? »

C’était un rituel qui accompagnait chaque chasse entreprise par le marquis, quelle qu’elle soit, qu’il fut question de chasser un lapin ou une créature aux dents acérées et, ça tombait bien, il n’y avait pas besoin de retarder plus que nécessaire le départ de la chasse vu qu’un prêtre d’Othar se trouvait déjà sur place. Ce dernier attendit que tous ceux qui voulaient prier, se joindre aux deux autres langecins, se manifestent avant de commencer sa cérémonie. Elle fut rapide, un chant guerrier et une bénédiction étaient suffisantes, alors Griffon, son frère et son fils montèrent à cheval et tout ce beau monde partirent pour les forêts du nord où devait les attendre leur proie. Le marquis se doutait bien qu’il ne s’agirait pas d’une créature particulièrement redoutable, après tout, ces chasses-là se préparaient été puis ils n’étaient pas partis avec suffisamment d’hommes pour tenter de braver un kerkand. Mais peut-être que le grand air ferait réfléchir Gaubert.

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MessageSujet: Re: Le Dragon et le Cygne (Griffon)   Le Dragon et le Cygne (Griffon) I_icon_minitimeMar 10 Déc 2019 - 11:27

Griffon réapparut, flanqué de son fils et d'un homme arborant un tabard ou était cousu le symbole d'Othar. Comme il partageait le même nez que le marquis, Gaubert en déduit qu'il s'agissait du frère que le valet était allé quérir quelques instants plus tôt. Le seigneur langecin interpela alors l'odélian avec une demande qui le surpris quelque peu.

Seigneur Gaubert, avant de partir, allez-vous vous joindre à nous pour prier ?

Le comte arqua un sourcil en souriant. Voilà une étrange coutume suderonne. Prier avant d'aller chasser. Il ignorait que le marquis fut aussi pieu, à moins que ça soit la présence du curé familial qui l'avait rendu aussi porté sur les bondieuseries. L'odélian mit pied à terre.

Ma foi, avec plaisir votre Excellence !

Le prêtre se lança dans une litanie chantée devant les fidèles qui baissaient la tête pour recevoir leur bénédiction. Même la meute de molosses sembla se calmer face aux gesticulations rituelles de Galyn. Lorsqu'il se tut, Gaubert redressa la tête et rouvrit les yeux, cherchant du regard ses invités.

Eh bien, en route ! Avec le regard d'Othar posé sur nous, je devine que cette chasse va être fameuse !

Sur ses mots, il remonta en selle et attendit que les langecins le rejoignent pour avancer à la tête de la partie de chasse. Les veneurs se laissèrent entraîner par les limiers à leur suite, dans un concert d'aboiement et de grognements surexcités.

Au bout de vingt minutes, le groupe atteignit les rives de l'Ohin et bifurqua vers le nord et la lisière du Pélanchon. Pendant ce petit bout de chemin, Gaubert et ses invités échangèrent des banalités, évitant de reprendre les tractations autour du mariage devant tout le monde et casser l'ambiance plus légère qui régnait ce matin. Le groupe arriva en vue d'un bassin où tombait une large cascade. Le comte se tourna vers Griffon.

Nous allons devoir laisser nos montures ici. Les futaies son épaisses et il va falloir progresser sur les pentes qui longent la rivière.

Les veneurs lâchèrent les chiens après que quelques-uns d'entre eux soient entrés dans le sous-bois pour garder la meute à portée de voix. Les premiers cris des éclaireurs retentissaient pour guider les chiens et rabattre le gibier vers la rive. Gaubert se tourna vers Griffon.

Nous allons nous poster plus en amont, pendant que mes gens trouve la piste de la bête, Messeigneurs. Il faut passer un peu plus à l'ouest pour remonter la colline.

Le chemin était plus étroit, ne permettant pas aux chevaux de passer à plus de deux de fronts. Gaubert se retrouva aux côtés de Théodoric, tandis que Griffon chevauchait au côté de son frère. Le comte se pencha vers celui qui pouvait devenir son gendre.

J'espère que vous avez apprécié la visite des jardins, hier soir, Messire.

Il sourit en jaugeant Griffon du coin de l'oeil qui s'entretenait avec son frère. Le sentier s'élargit un peu une fois qu'ils atteignirent le sommet de la butte et les pères purent se remettre côte à côte. Regardant au loin, l'air de rien, Gaubert souffla à Griffon.

Avez-vous songé à notre discussion d'hier soir, votre Excellence ?
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MessageSujet: Re: Le Dragon et le Cygne (Griffon)   Le Dragon et le Cygne (Griffon) I_icon_minitimeMar 10 Déc 2019 - 23:57

Une fois la prière terminée, Griffon se releva en poussant sur son genoux arqué et une fois debout, sortit son épée du sol pour la rengainer et se diriger vers sa monture imité par son fils, et son frère bien que ce dernier prit le temps de répondre au maître des lieux.

« Oh mais je ne doute pas qu’elle le sera ! » S’exclama-t-il avec une bonhommie qui contrastait singulièrement avec celle du marquis, il se dépêcha ensuite de monter lui aussi sur sa monture pour partir sans plus tarder. Tous prirent leur place dans la colonne qui quittait Odélian jusqu’à arriver vers une bien belle cascade qui réveillait le lyrisme du prêtre, ce dernier déclamant de la poésie, un peu dévoyés pour ne pas ennuyer son auditoire composé d’hommes d’armes à l’éducation qui laissait à désirer, il prenait le temps ensuite d’expliquer la perversion des vers avec un langage qui était parfois cru ; jusqu’à ce que Gaubert expliquât que les montures devaient être laissées.

« Très bien. » Le marquis mit pied à terre en regardant davantage autour de lui, enfin il hocha la tête, faisant confiance au comte qui connaissait bien mieux que lui, il fallait admettre que ce n’était pas bien difficile, la région. Alors que Galyn posait des questions à propos des chiens à leurs maîtres respectifs, Griffon se tourna vers ce dernier en voyant le chemin se rétrécir, laissant son fils passer devant.

Théodoric ne put se retenir de sourire en pensant à la soirée de la veille et il ne le cacha pas, que ce soit sur son visage ou dans sa réponse, quand bien même l’homme à qui il répondait était le père de son aimée.

« Elle fut exquise, votre Grandeur et, si vous me le permettez, dame votre fille est une guide des plus charmante. »

Quant à Griffon, il se tenait un peu en arrière, avec son frère qui arrêta de discuter en le voyant approcher.

« Alors, quand a lieu le mariage ? »
« Je ne sais pas encore. » Répondit-il à voix basse cette fois, profitant de la discussion de ceux qui les accompagnaient pour camoufler un peu la leur.
« Comment ça ? » Demanda le prêtre en lançant un regard un peu inquiet à Théodoric et en baissant lui aussi la voix.
« La veille mule ne veut pas lâcher Isgaard. »
« Et il a bien raison. »
« Tu ne vas pas t’y metre toi aussi. » Siffla-t-il entre ses dents, retenant de justesse un éclat de voix.
« Moi aussi ? » Demanda Galyn avec un sourire sardonique sur les lèvres mais il ne laissa pas le temps au marquis de répondre à sa question rhétorique. « Peut-être que si d’autres s’y mettent il y a une raison, mon frère. »
« Tu ne m’aidera donc jamais? »
« Mais j’essaye de t’aider, Griffon. Et pour tout dire tu ne me facilites pas la tâche. » Il regardait son neveu qui échangeait quelques banalités avec le comte, parlant d’Alaïs quand il le pouvait, la discussion lui venait aux oreilles par bribe.
« Alors que me conseilles-tu? »
« Consent au mariage. Regarde Théo, il n’a que sa belle à la bouche, il est aussi amoureux de la nordienne que tu l’étais de sa mère. Ne soit pas stupide, laisse tomber Isgaard. » Le marquis ne répondit rien pendant quelques secondes et le sentier allait bientôt s’élargir alors, sachant que leur conversation privée arrivait à sa fin, le prêtre lui lâcha quatre derniers mots qui firent grommeler son frère. « Fait-le pour lui. »

Une fois au sommet de la bute, Théodoric céda sa place à son père et retourna en arrière lorsqu’il croisa le père en question.

« Un problème ? » Demanda-t-il innocemment, son grand sourire disparaissant lentement.
« Ton oncle est pénible. » Laissa-t-il tomber d’un ton neutre sans s’arrêter.

La vue n’était pas particulièrement magnifique mais ce n’était pas ce qui comptait, ce qui comptait c’était que le marquis et le comte soient seuls. Bon ils ne l’étaient pas vraiment, leur suite se trouvaient derrière, mais ils avaient un semblant de solitude, Galyn occupait le reste de la troupe en racontant une histoire grivoise de son passé de novice. Sans regarder son interlocuteur, Griffon hocha la tête.

« Oui, j’y ai littéralement songé. » Il ne précisa pas que le songe n’avait pas été des plus agréable avant de jeter un regard en arrière, cherchant pendant un instant son fils du regard. Il le trouva vite et se retourna ensuite vers son hôte. « Voici ma réponse, seigneur Gaubert : je consent au mariage. Selon vos termes. »

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MessageSujet: Re: Le Dragon et le Cygne (Griffon)   Le Dragon et le Cygne (Griffon) I_icon_minitimeJeu 12 Déc 2019 - 9:41

Le comte détaillait les frondaisons jaunes et rouges, laissant le temps au marquis de lui donner sa réponse. Au loin, les aboiements de la meute brisait le silence matinal.

Oui, j’y ai littéralement songé. Voici ma réponse, seigneur Gaubert : je consent au mariage. Selon vos termes.

Ah oui ? Ah ! Oui ? Ah oui ! Il dut admettre qu'il n'avait pas vu ce coup là venir. Lui qui s'apprêtait à livrer une nouvelle joute de négociations dans les fourrés le temps de débusquer la proie, voilà qui simplifiait grandement la chose. Un grand sourire ourla ses lèvres tandis qu'il tournait le regard vers Griffon.

Grande nouvelle, votre Excellence ! Je connais deux jeunes personnes qui seront ravis de l'apprendre.

Gaubert parlait suffisament bas pour que seul le marquis l'entende, ne voulant pas vendre la mèche trop tôt à son futur gendre. Il eut une pensée pour sa fille qui n'avait d'yeux que pour le jeune homme depuis que la délégation langecine avait franchi les portes du château. Au fond de lui, ses boyaux se nouèrent. Lui qui n'avaient jamais était un grand sentimental envers les premières fois de ses enfants, il se découvrit cette âme de père qui revit Alaïs qui courait vers lui du haut de ses trois ans. À l'époque, il était le seul à avoir droit à son attention, mais le temps avait filé et c'était désormais pour un bellâtre du Sud qu'elle réservait cela. Il posa son pouce derrière son ceinturon et posa à nouveau son regard vers l'horizon, tentant de repérer du mouvement dans les fougères qui longeaient le sentier.

Que dites-vous de l'annoncer à nos enfants à notre retour au château ? Cela nous laissera le temps de choisir une date qui convienne.

Un cor barrit au nord de leur position. Gaubert fit un pas en avant, alors que les hurlements des chiens se rapprochaient. Il leva l'index vers son oreille et haussa légèrement la voix pour que le petit groupe entende.

La proie est repérée ! La traque a commencée. Tenez-vous prêts, Messeigneurs !

Roland souffla dans le cor qui pendait à son cou, en réponse au premier. Gaubert tendit la main vers le garde qui portait son arc et ses flèches et se saisit de l'arc. Il indiqua un amas de rocher, non loin, sur leur droite.

Nous devrions avoir un meilleur point de vue de là-haut.

Tandis qu'ils se dirigeaient vers l'endroit indiqué, Gaubert en profita pour souffler à l'attention de Griffon.

Je ferai passer les consignes auprès d'Isgaard et des marchands afin d'acter notre alliance dès que nous aurons annoncer les fiançailles à tout le Royaume.

Il fallait que toute la Péninsule soit témoin de l'engagement du marquis, Gaubert ne se contenterait pas d'un contrat oral qu'on pouvait briser aussi vite qu'on l'avait prononcé. Les nobles grimpèrent sur les rochers lorsque retentit le cri rauque de l'ours traqué. La bête était proche et courait vers les rives de l'Ohin. Bientôt, il surgit, énorme et brun.
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MessageSujet: Re: Le Dragon et le Cygne (Griffon)   Le Dragon et le Cygne (Griffon) I_icon_minitimeJeu 12 Déc 2019 - 15:02

Le sourire de Gaubert agaça bien Griffon mais il préféra ne rien montrer, ce n’était qu’un moment désagréable à passer. Il voulut lancer un regard à son frère qui l’avait poussé à accepter ce marché ; il savait que la nouvelle devrait le réjouir mais pour le moment il ne pouvait penser qu’au goût amer qui lui restait bouche. Mais avoir écouté Galyn était sans doute pour le mieux.

« Grande nouvelle en effet, votre Grandeur. J’ai ma petite idée sur les deux jeunes gens en question. » Répondit-il en souriant faiblement alors qu’il regardait la forêt s’étaler devant lui. Il hocha ensuite la tête, il valait mieux qu’Alaïs et Théodoric l’apprennent en même temps.

« Qu’il en soit ainsi alors. Nous… » il fut coupé par le cor de chasse et le sourire lui revint sur les lèvres après un moment de surprise. Une proposition de date disparue, remplacée par la chasse. Lorsqu’il était question de s’attaquer à un animal, quel qu’il soit, il était toujours plus prudent de s’y appliquer. Surtout lorsque l’animal en question était particulièrement dangereux. Il hocha la tête à la proposition du comte, sans doute avait-il raison alors il lui emboîta le pas.

« Soit, j’en ferais de même auprès des marchands langecins. »

Pour monter il se servit de sa lance de chasse comme d’un bâton de marche et une fois en haut il la saisit à deux mains, modifiant sa posture comme s’il s’apprêtait à arrêter une charge de cavalerie, il attendait avec ce mélange d’appréhension et d’excitation qui lui faisait tant apprécier ce sport. Il ne savait pas ce que c’était, le comte n’avait pas daigné l’en informer mais au vu du bruit que ça faisait en s’approchant à grands pas d’eux, ça devait être quelque chose d’énorme. Et en effet c’était une bien belle bête. L’ours était massif et se prendre un coup de ses grosses pattes ne pardonnerait sans doute pas. Alors qu’il tenait bien haut sa lance, le marquis campa sur ses positions et devant la lance, l’ours freina comme il pouvait en sortant des fourrés et pour éviter de s’empaler il termina debout sur ses pattes arrière ; battant l’air devant lui comme s’il pouvait effrayer la lance en faisant étallage de sa force et de sa rapidité.

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MessageSujet: Re: Le Dragon et le Cygne (Griffon)   Le Dragon et le Cygne (Griffon) I_icon_minitimeJeu 12 Déc 2019 - 17:26


La bête, le monstre serait plus exact, arriva en courant et se redressant face à la lance du marquis de Langehack en beuglant, des filets de bave monumentaux pendant au bout de ses canines. Relevé sur ses pattes arrières, l'ours mesurait bien deux hommes et ses pattes étaient bien plus larges qu'une tête sous un heaume de chevalier. Ses griffes, noires comme la nuit, étaient semblables à des piolets.

Le groupe se déploya face à la bête, les gardes du comte l'entourèrent tandis qu'il bandait son arc. Les langecins avaient fait un pas en avant, se portant aux côtés de Griffon qui défiait la bête. Les cors des rabatteurs retentirent et la meute de chiens déboula en hurlant. L'animal tourna la tête , rendu encore plus hargneux maintenant qu'il se savait pris au piège. Gaubert écarta les doigts et sa flèche jaillit de l'arc en sifflant pour venir se planter dans l'épaule de l'ours, qui hurla en agitant les pattes.

Les limiers se ruèrent sur la bête, qui en envoya voler deux d'où ils venaient en couinant. L'ours haletait, épuisé d'échapper au vacarme qu'avait provoqué les veneurs et leur meute. Il savait qu'il livrerait ici son dernier combat et il était déterminé à vendre chèrement sa peau. Il envoya un coup de pattes vers Galyn, alors que Gaubert libérait un autre trait qui l'atteint à la patte.

Par les seins pendants de Tyra, arrête de gesticuler maudite bête !

Le comte colla son arc dans les bras d'un garde voisin et dégaina son épée. Cette foutue saloperie se ferait occire au corps-à-corps et il était hors de question de laisser toute la gloire de l'affrontement au marquis et à sa famille. Cet ours serait le symbole de cette alliance nouvellement forgée et chacun pourrait témoigner que ce combat fut autant celui de Griffon que le sien. D'ailleurs, le marquis jouait avec habilité de la pique, profitant de la distraction qu'offrait les attaques des dogues hargneux qui revenaient à la charge, malgré les coups que leur envoyait le monstre brun. Gaubert vint se placer entre Griffon et son fils, tenant Larmanon devant lui.

Hardi, Messeigneurs ! La bête s'épuise, bientôt nous pourrons porter l'estocade !

Gaubert dut faire un pas en arrière pour éviter les griffes massives du plantigrade enragé par ses blessures. Il se battait avec l'énergie du désespoir, ne reculant plus devant personne. Il croqua un des chiens qui poussant un couinement aigü et désespéré avant qu'ils s'étouffent dans ses babines. Un des veneurs poussa un cri à son tour, touché de voir un de ses limiers favoris être la première victime de cette terrible chasse. Le manant fit quelques pas en avant, les larmes aux yeux. Ce fut quelques pas de trop, la bête envoya un coup de patte monumentale qui arracha la tête du cou du malheureux. Le sang jaillit, tel la lave d'un volcan en éruption, tandis que la tête grimaçante de douleur passait au-dessus du groupe emmenait par les nobles.

Le combat se poursuivait et l'ours ne faiblissait pas.


Dernière édition par Gaubert de Prademont le Ven 20 Déc 2019 - 8:23, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Le Dragon et le Cygne (Griffon)   Le Dragon et le Cygne (Griffon) I_icon_minitimeJeu 19 Déc 2019 - 15:04

Dire que la creature n’impressionnait pas le marquis serait un mensonge, alors certes des créatures de cette taille il en avait chassé, que ce soit chez lui où dans le nord, en compagnie du seigneur de Höginheim mais c’était là tout l’intérêt : il avait vu bien des monstres mais il n’en était toujours pas blasé. Ce qui n’était pas plus mal en réalité, lorsqu’il ne ressentirait plus rien face à ce genre de bêtes il devrait chercher plus gros, plus puissant, plus destructeur et il y avait de fortes chances que son fils lui succède. Cependant pour le moment Théodoric n’était pas encore prêt et Griffon ne comptait pas se laisser emporter par Tari tant que son héritier ne fut pas formé pour prendre la relève de façon décente. L’objectif du marquis n’était pas de blesser l’ours mais de l’ancrer pour que d’autres puissent tuer, il était une menace, une épée qui pendait au-dessus de la tête de la créature chassée et qu’elle ne pouvait pas se permettre d’ignorer. Si jamais elle faisait cette erreur, comme lorsqu’elle tenta de frapper Galyn, Griffon enfonça son arme dans son flanc.

Le juron du comte fit tourner la tête du prêtre qui lui aurait lancé un regard sombre s’il en avait eu le temps mais ce ne fut pas le cas et il dût se concentrer sur sa cible pour ne pas finir comme l’un des chiens qui n’eut pas l’occasion d’esquiver. Comme le disait d’ailleurs le même comte, la bête, en effet s’épuisait lentement et même s’il ne comptait pas mourir sans combattre, il ne pourrait pas combattre bien longtemps. Du moins ce fut ce que pensait le marquis alors il avança après la mort du garde pour planter sa pique dans le torse de l’ours dans l’espoir de lui faire mal et de gêner ses mouvements. Sans doute avait-il sous-estimé la force qu’il restait à l’animal car ce dernier fut plus rapide qu’anticipé et le marquis dût esquiver un coup qu’il réussit justement à éviter grâce à l’intervention de son fils et du comte, les deux profitèrent de se trouver sur le côté de la patte pour la frapper, avec la flèche déjà plantée dans celle-ci, et les nouvelles blessures, le coup put être suffisamment ralentis pour être esquivable.

Petit à petit les chasseurs érodèrent la force de l’animal jusqu’à ce que ce dernier devienne trop lent pour empêcher les attaques qui venaient de tous les côtés. Après ce qui sembla une éternité il s’écroula enfin et il fut ordonné de monter le cadavre sur un chariot pour la ramener au chariot, au vu du monstre il aurait été dommage de l’abandonner.

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MessageSujet: Re: Le Dragon et le Cygne (Griffon)   Le Dragon et le Cygne (Griffon) I_icon_minitimeVen 20 Déc 2019 - 9:19


L'ours vendait chèrement sa peau, agitant ses grosses pattes devant lui en subissant les attaques qui venaient de toutes parts. Malgré les plaies qui saignaient partout sur son corps, la bête ne semblait pas faiblir et se montrait toujours plus mençant. Chaque combattant, car il s'agissait bien plus d'un combat que d'une chasse, dut esquiver la mort promise par les griffes épaisses du plantigrade enragé. La bave suintait de ses babines au rythme de son souffle marqué. Tantôt c'était la lance de Griffon qui arrachait un grondement à la bête, tantôt la lame du comte ou celle de Théodoric. Les chiens tournoyaient autour de la proie en aboyant pour détourner son attention, tandis que les hommes entaillaient sa chair toujours plus.

Après plusieurs longues minutes de combat, la bête s'écroula en poussant un dernier grognement plaintif. L'ours avait livré un combat épique sur les rives de l'Ohin et le trophée qu'il représentait avait été obtenu de haute lutte. Gaubert posa la lame de son épée bâtard sur le sol et prit un temps en s'appuyant sur la garde pour reprendre son souffle. Le temps se rappelait à son bon souvenir après ce genre de combat ardu. La bête était vaincue grâce à l'alliance des combattants odélian et langecin, une belle allégorie de ce que promettait le mariage entre les deux terres.

Le comte donna ses ordres et l'on fit venir un chariot qui fut chargé de la carcasse volumineuse. La partie de chasse s'acheva ainsi, et tandis que la troupe regagnait les murailles d'Odélian, un danger de moins hantait les frondaisons du Pélanchon. Les veneurs se lancèrent dans des chants qui égayèrent la route du retour et des éclats de rire résonnèrent lorsque des boutades fusèrent à travers les rangs. On préférait l'ambiance frivole à la nostalgie des défunts du jour. Gaubert ferait une prière à la Damedieu et Tyra en leur mémoire.

Quelques heures plus tard, autour de la grande table qui avaient accueillis les langecins la veille, les deux patriarches annoncèrent à leur progéniture leur décision. Alaïs enlaça son père et Théodoric empoigna son avant-bras avec reconnaissance. Les deux tourtereaux se laissèrent aller à leur premier baiser officiel sous les yeux de leurs pères. La décision était actée.

Quelques jours plus tard, un pli traversa la Péninsule, porteur de grandes nouvelles.

Citation :
Favrius de l'an 17

Son Excellence, le marquis Griffon de Langehack
et Sa Grandeur, le comte Gaubert de Prademont

ont l'honneur d'annoncer les fiancailles de leurs enfants

Ser Théodoric de Langehack et Dame Alaïs de Prademont

Puisse l'union de leurs maisons apporter paix et joie dans le Royaume.

FIN
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