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 Mille et une nuit.

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Lilyanna
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MessageSujet: Mille et une nuit.   Mille et une nuit. I_icon_minitimeDim 12 Jan 2020 - 2:14

La prêtresse ne venait que très rarement dans les quartiers riches de la ville, principalement parce qu’elle n’était pas riche et que ce qui s’y trouvait était bien en dehors de ses moyens ; sans compter que ce manque de richesse était assez évident et contrastait donc facilement ses résident ce qui n’aidait en rien à ne pas s’en faire virer. Alors certes elle n’avait pas d’ordinaire l’air d’une mendiante mais en même temps lorsqu’elle allait dans les soieries c’était toujours revêtue de sa robe bleue à bustier blanc, de son manteau, de boucles d’oreilles en or et en argent qui ressortaient d’entre ses mèches de cheveux blanches et blondes, de ses gants noires et d’une bague sur laquelle trônait un rubis travaillé ; elle se rappelait être passé à deux doigts de se battre avec un autre membre d’équipage du Katrian parce que lui aussi l’avait voulu cette anneau, sans doute pour l’offrir à son aimée, ou sa favorite, mais il n’avait pas protesté longtemps, se souvenant les créatures enchaînées dans les cales du navire et qui n’obéissaient qu’à la prêtresse. Elle ne passait peut-être pas pour une dame riche mais au moins échappait-elle à la rudesse des gardes qui foutaient dehors les mendiants de plus les couleurs n’étaient pas sans rappeler le culte de Tari et plus rares encore étaient ceux qui voulaient se mettre un clergé, quel qu’il soit, à dos ; surtout que tout le monde, à un moment ou un autre, a besoin de la prêtrise de la Gardienne et y fait donc appel. Les gardes des diverses milices privées des résidents de ce quartier somme toute plaisant, une rareté à Thaar qui mérite donc d’être souligné, lui jetaient bien des regards, certains se moquant bien de ses vêtements pour se concentrer sur ses formes que lesdits vêtements trahissaient.

Mais Lilyanna n’eut pas à le supporter bien plus longtemps vu qu’elle arriva justement devant la demeure qu’elle cherchait.

« Qu’est-ce que vous voulez ? » Demanda un garde adossé au mur qui protégeait les jardins du regard des passants.
« Je viens pour les leçons de Khosro. » Le garde la détailla de bas en haut avant de hausser les épaules et de se tourner vers son compagnon.
« Mais me regardes pas comme ça, je connais pas l’emplois du temps du patron. » La prêtresse voulut rappeler, d’un ton professoral, qu’il s’agissait de la progéniture de leur employeur mais elle se ravisa, elle ne les connaissait pas et ne voulait donc pas se voir refuser l’accès pour si peu s’ils le prenaient mal.
« Bah va vérifier au lieu de rester planté là espèce de débile ! »
« Ah euh… bien vu. » Le second garde, de loin le cadet du premier, se dépêcha d’obéir et partit au pas de course dans les jardins pendant que Lilyanna se mit à siffloter l’air d’une chanson que chantaient souvent l’équipage du Katrian. Après dix bonnes minutes le deuxième garde revint finalement, le souffle court.

« C’est bon, elle peut rentrer. » Lilyanna hocha la tête avant de passer entre les deux humains et d’être arrêté par le revenant. « On m’a dit de vous dire que vous êtes en retard et que c’est inacceptable. »
« De combien de minutes suis-je en retard ? »
« La patronne a dit : elle a cinq minutes de retard, c’est inadmissible ! »

Lilyanna inspira profondément mais se retint de pousser un long soupir, tout commentaire était inutile mais si jamais on lui demandait le motif de son retard elle n’hésiterait pas à dire que c’était les gardes qui l’avaient retenu à l’entrée. Une esclave l’accueillit dans le vestibule de la demeure pour la mener aux appartements de Khosro. L’adolescent avait été des plus difficile et avait refusé un bon nombre de professeurs pour lui apprendre les bases théoriques de la magie mais la prêtresse se demandait si le physique n’avait pas prévalu sur la compétence pour l’acceptation d’un tuteur. Elle entra dans le bureau pour y voir l’adolescent en question assis de l’autre côté, jouant avec une plume et un anneau.

« Avez-vous les livres que je vous ai demandé? » Khosro tourna rapidement la tête vers la voix qui le dérangeait.
« Pas tous. » Répondit-il avec un air de défi.
« Puis-je savoir pourquoi ? »
« Mère juge que certains des ouvrages demandés me sont inutiles car je n’ai pas le niveau nécessaire et que je n’en tirerais donc rien. » Lilyanna fit la moue en se retournant pour fermer la porte derrière elle. La mère de l’adolescent n’avait pas tort et pour cause, ce n’était pas pour Khosro que la prêtresse avait demandé les livres en question mais bien pour elle.
« J’en discuterais avec votre mère après votre leçon. Pouvons-nous commencer ? » Il hocha la tête et elle fit un pas de plus dans la pièce pour commencer à partager son savoir.

Lilyanna sortit en se massant les tempes, un violent mal de crâne pointait le bout de son nez. Khosro était particulièrement talentueux pour tester les limites de sa patience mais, malheureusement, elle ne pouvait pas dire qu’il était talentueux pour quoi que ce soit d’autre mais, évidemment, l’expliquer à sa mère était quelque chose qu’elle n’avait pas envie de faire dans l’immédiat. Mais avant de partir, et de recevoir son salaire, elle devait tenter de convaincre ladite mère de prendre les livres dont elle avait besoin. Après avoir demandé son chemin elle arriva dans l’antichambre des quartiers des maîtres de maison où elle attendit jusqu’à ce que la porte s’ouvre enfin pour laisser sortir quelqu’un qui laissa la prêtresse sans voix. Elle voulut lui parler mais alors qu’elle allait prononcer un mot la mère la coupa dans son élan.

« Tu voulais me voir Lilyanna ? »
« Oui madame. »

Elle entra donc à son tour et lorsqu’elle en sortit elle avait vraiment mal à la tête. Toutefois lorsque la maîtresse des lieux appela un esclave pour l’escorter jusqu’à son intendant pour la payer, la prêtresse en profita pour lui demander si l’homme couvert de tatouage était encore là et pour son plus grand malheur on lui répondit que non, qu’il était parti juste après sa consultation. Elle l’avait donc loupé de beaucoup, les tractations avaient duré bien trop longtemps alors elle demanda où il était possible de le trouver et l’esclave lui donna l’adresse de son cabinet.

Cabinet auquel Lilyanna se rendit, elle frappa trois fois à la porte et elle replaça sa tresse et une mèche avant de mettre ses mains dans le dos et d’attendre patiemment qu’on vienne lui ouvrir.
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Cécilie de Missède
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MessageSujet: Re: Mille et une nuit.   Mille et une nuit. I_icon_minitimeDim 12 Jan 2020 - 4:00


La porte reliée à une clochette cliqueta en se refermant et l'homme à l'âge indiscernable salua de la tête la jeune femmes aux traits forts qui triait des herbes, assise à la table toute proche. La pièce, qui ressemblait à un laboratoire d'alchimie plus qu'à une boutique, était alourdie par tout un mélange d'odeurs fortes. Quelques paroles échangées, un sourire, il posait son turban sur le coin de la table et passa derrière le rideau de bille qui obstruait l'ache donnant sur la cour intérieur.

Les clients se succédaient nonchalamment, venant chercher les décoctions et onguents commandés. La jeune femme accompagnait les patients avérés dans la cour intérieur et leur indiquait l'escalier qui menait à la terrasse du toit. Une fin de matinée somme toute habituelle et une chaleur toute à fait supportable.

Nubia reposait un gros pot de sel de terre sur l'une des étagères lorsque de nouveaux coups retentirent à la porte. Pourtant les prochaines commandes étaient pour l'après-midi et le dernier patient du Maître n'était pas encore parti... Comme elle en avait l'habitude, elle vérifia cependant la perfection de sa tenue clinquante  avant d'aller ouvrir. Si la Maître était toujours habillé sobrement, il tenait à ce que son petit commerce soit considéré par les plus grands comme un commerce de qualité, et cela passait par la tenue et les bijoux légèrement ostentatoires de sa plus fidèle employée. Heureusement, tout était en place. Du reptile doré qui lui glissait autour du coup à la tiare d'améthyste qui lui ceignait le front. La jeune femme vêtue d'un violet aussi soutenu que celui de ses iris ne perdit pas une seconde de plus et alla ouvrir avec la plus grand déférence.

Au premier regard, il ne s'agissait pas d'une servante ordinaire venue chercher un filtre un peu en avance.

Un vague sourire soulignant un regard perçant, elle s'effaça en s'inclinant légèrement pour laisser à la visiteuse tout loisir d'entrer.

- Bonjour noble dame. Entrez je vous en prie. Si vous venez pour voir Maître Mehmet, il n'est pas disponible immédiatement, mais je peux sans doute faire quelque chose pour vous ? "
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Lilyanna
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MessageSujet: Re: Mille et une nuit.   Mille et une nuit. I_icon_minitimeLun 13 Jan 2020 - 0:52

Lilyanna tira sur ses gants pour les remettre en place et entra dans la boutique laissant son regard vagabonder sur ce qui s’y trouvait avant d’être rapidement interrompu par la… servante ? Assistante ? Compagne ? Peut-être les trois à la fois. Elle se retourna donc pour lui faire face.

« Je pense que vous pouvez en effet, dans quel domaine officie maître Mehmet ? »

Nubia ne put cacher un mouvement de surprise en refermant la porte.

- Et bien Maître Mehmet est un guérisseur. " Tout en retournant vers la table elle invita la nouvelle venue à l'y suivre, lui désignant l'une des deux chaises particulièrement confortables qui permettait aux client d'attendre " Mais puisque vous ne semblez pas le connaitre, puis-je vous demander pourquoi vous êtes ici ? "
« Je… » elle hésita, baissant la tête avant de finalement reprendre. « Pour être tout à fait honnête j’avais quelques questions à lui poser mais maintenant que j’en connais davantage sur sa profession je vais pouvoir vous en poser une : peut-il guérir les maux de tête ? »

Un sourire amusé et l'assistante hocha la tête.

- Ce serait un bien piètre guérisseur s'il n'en était pas capable. Je vous proposerais bien une huile pour faire diminuer la douleur mais j'ai comme l'impression que vous allez refuser. " La prêtresse pencha légèrement la tête sur le côté et la jeune femme attrapa deux verre en terre cuite et une carafe de jus de canneberge pour les remplir. " Vous pouvez attendre ici il devrait... "

Des pas rapide trahissant le mécontentement traversaient la cour intérieur et un homme de belle prestance rejeta le rideau de billes de bois d'un mouvement agacé pour sortir par la porte de devant en ne lançant qu'un regard agacé à la jeune tenancière. Il faillit lancer quelque chose à la femme blonde qui semblait attendre mais s'était retenu à la dernière seconde pour disparaitre dans la rue suivit d'un nuage de mauvaise humeur.

Cette dernière s’était raidit machinalement et lorsqu’il fut sortie elle tira à nouveau sur ses gants, elle lança donc un regard étonné à son hôtesse et, étrangement, le comportement ne semblait pas décontenancer Nubia le moins du monde. Elle finit de servir les deux verres avant d'ajouter d'un air tranquille :

- Cela arrive de temps en temps. Certains patients détestent avoir tort...
« A qui le dites vous... » elle poussa un soupir las en se remémorant sa leçon de magie de ce matin et les négociations qui avaient suivi. Elle se massa ensuite les tempes en fermant les yeux. « Finalement je ne dirais pas non à l’huile. »
- Inutile. " sourit une fois de plus la jeune femme. " Maître Mehmet était sensé en avoir encore pour une demie-heure. D'ici quelques minutes il sera tout à vous. L'huile aurait à peine le temps de faire effet. " Une clochette installée dans un coin tintinnabula vigoureusement. " Je sous-estime encore sa réactivité. Donnez moi votre nom et je vous y conduit de ce pas. "
« Merci, je m’appel Lilyanna. »

Portant un petit plateau sur lequel trônaient les deux verres, la jeune apothicaire pris le chemin de la cour intérieur, grimpa l'escalier qui la longeait sur la gauche et se retrouva sur une terrasse, séparée de la rue par un muret et une haie soigneusement entretenue. Seule une pièce cubique avait été ajoutée sur la terrasse et ne prenait qu'un tiers de son espace, créant tout de même une salle de belle taille.

Nubia frappa à la porte et la poussa sans attendre de réponse, se dirigeant de suite vers une table qui bordait la pièce du côté gauche pour y déposer son chargement. L'endroit était éclairé par de grandes mosaïques de verre de nombreuses couleurs et de nombreux cristaux pendaient ça et là en plus de plusieurs livres et babioles sur des étagères. Au milieu, une couchette couvertes de coussins et de draps trônait bien en vue et le sol était dégagé de manière à ce qu'on puisse déambulé tout autour sans peine. La prêtresse regardait de partout autour d'elle, quelques pas derrière sa guide, laissant la curiosité la consummer jusqu'à ce que la porte soit ouverte ; au lieux de continuer son exploration visuelle des lieux, les yeux rouges de Lilyanna se posèrent directement sur la silhouette en face d'elle.

Au fond, un homme au crane rasé se lavait les mains au savon dans une vasque d'eau claire. Sans être monstrueux, on pouvait facilement le qualifié de force de la nature et bien qu'humain, il avait les épaules larges et la physionomie solides. Ses mains en particulier étaient particulièrement massives... Et couvertes de petites lettres noires. A vrai dire, chaque once de peau découverte était tatoué de la même façon. Les mots ainsi gravés semblaient enroulés autour de son corps depuis le haut de son crâne rasé. Lilyanna tira à nouveau sur ses gants en entrant à la suite de Nubia et attendit patiemment que Mehmet finisse ses ablutions.

- Maître Mehmet, je vous présente Dame Lylianna. Elle demandait à vous voir.
- Veuillez m'excuser une seconde, madame, je termine tout juste.

Étrangement, la voix de l'homme était douce et dégageait une assurance sereine qui démentait la violence que pouvait déployer un corps comme le sien. Sa diction fluide donnait l'effet d'un cour d'eau emportant l'attention de l'auditeur sans même qu'il s'en aperçoive. Sans heurt ni agressivité, il était particulièrement agréable de l'entendre parler d'ailleurs.

« Je… je vous en prie. » Elle ne s’était pas attendu à ce qu’il lui parle tout de suite et encore moins à ce que sa voix contraste autant avec son physique, elle tira à nouveau sur ses gants et continua d’attendre, observant l’homme et surtout ses tatouages jusqu’à ce qu’ils se retournent, la prêtresse releva brusquement la tête pour le regarder dans les yeux afin de ne pas être prise sur le fait mais elle ne put s’empêcher de le dévisager. Alors, confuse, elle baissa le regard pour admirer se bottes et tirer à nouveau sur ses gants.

Ses énormes mains disparurent dans une étoffe blanche pour se sécher tandis qu'il se retournait. Son visage aux traits forts et au nez typique des Vaanis avait le menton en galoche et des lèvres épaisses. Ses yeux effilés étaient ombragés par deux sourcils très noirs qui – croisés à ses tatouages – lui donnaient une expression complexe ; à la fois compatissante et suspicieuse. Et si son âge était difficilement discernable, ses iris mauves avaient une intensité qui ne vient qu'avec le temps.

- Merci, Nubia. Je m'occupe du reste.

Un signe de tête et la jeune femme reparti avec l'étoffe humide et le plateau, ne laissant derrière elle que les deux verres remplis d'un liquide rouge aussi frais qu'acide. L'homme, lui, fit doucement le tour de la couchette, ses mains se frictionnant toujours. Ses mouvements semblaient particulièrement contenus. Une longue tunique de toile très simple mais parfaitement à sa taille couvrait un pantalon ample et n'était agrémenté que d'une ceinture de cuir à boucle ornée. Une chaînette était visible autour de son cou, mais le pendentif disparaissait loin sous ses vêtements.

- Enchanté. Je ne crois pas que nous ayons déjà eu l'occasion de nous rencontrer. Nubia n'a précisé aucun rendez-vous. J'en vient donc à me demander la raison de votre visite, Dame Lylianna.
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Cécilie de Missède
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MessageSujet: Re: Mille et une nuit.   Mille et une nuit. I_icon_minitimeLun 13 Jan 2020 - 2:50



Lorsqu’il s’adressa à nouveau à elle directement elle releva la tête, peut-être un peu trop brusquement car son mal de crâne se rappela douloureusement à elle.

« De… de même, maître. En effet je viens sans rendez-vous et je vous remercie de bien vouloir me recevoir tout de même. »

D'un geste, il indiqua la couchette puisqu'il n'y avait sinon qu'un petit tabouret pour s'asseoir. Elle défit son manteau et le calla sous son bras avant d'aller s'asseoir.

« Nous nous sommes vu, du moins je vous ai vu, très brièvement ce matin, chez une de vos clientes, vous sortiez de son bureau et j’attendais pour y entrer. J’ai ensuite appris que vous étiez guérisseur et la leçon que j’ai donné ce matin m’a donné un mal de tête insupportable. »

L'homme l'observa un moment sans un mot, prenant le temps de s'asseoir en tailleur sur un épais coussin proche de la table ou les verres avaient été posés. La distance qui les séparait rendait la différence de niveau moins rude qu'elle ne l'était en réalité.

- Et vous avez demandé spécifiquement à me voir pour un mal de tête que Nubia aurait pu faire passer en un battement de cil avec une huile ou une décoction de saule ? » Sans agacement, il posa ses énormes mains sur ses genoux, son regard détaillant sa visiteuse sans empressement.

« Je lui ai demandé pour l’huile mais elle m’a répondu que ça prendrais trop de temps. Mais vous avez raison, je ne suis pas venu spécifiquement pour ça cependant est-ce que vous pouvez vous en occuper s’il vous plaît ? »

- Pour ça il faudra que j'use de magie. Contrairement à ce que la plupart des habitants de cette ville semblent croire, sentir le corps d'une autre personne via l'Art est un acte intime. Se permettre d'intervenir sur le fonctionnement de ce dit corps est une prise de contrôle que vous seule pouvez accepter ou non. » Les yeux mauves de l'homme cherchaient intensément ceux de sa visiteuse qui tentaient de fuir pour tirer ses gants. Elle hésitait, elle ne s'était pas attendu à cette réponse et, en réalité, n'avait jamais pensé à cette facette-là de la magie de la vie et de la relation entre le guerrisseur et son patient.

«  Sachez également que je ne guéris pas un symptôme mais que je rééquilibre l'ensemble du corps de façon à permettre à l'esprit d'y prendre toute sa place. Le but n'est pas d'éliminer le symptôme mais de faire en sorte que ses causes réelles soient dénouées. Si cette méthode vous va et que vous souhaitez toujours procéder, je peux tenter de faire quelque chose pour votre mal de tête et pour votre tic nerveux. »

« Mon tic ner… » les yeux toujours baissés elle vit le bas de son gant tenu entre son pouce et son indexe alors qu’elle allait à nouveau le tirer. Après quelques instants de réflexion elle releva finalement la tête pour trouver les yeux du guérisseur.  Il souriait d'un air entendu.

« J’accepte mais… je ne sais pas si j’aurais les moyens de vos services. »
- N'ayez crainte. » commença-t-il en dépliant sa stature imposante. « Comme vous le voyez, je ne manque de rien. Vous avez été menée jusqu'à ma porte et il ne sera pas dit que j'ai détourner les yeux de Ses Volontés. » Il commença a rouler méthodiquement ses manches de façon à ce qu'aucun faux-pli ne tire ou ne marque le tissus. « Donnez ce que vous pouvez et acceptez de discuter avec moi une fois que nous en aurons fini. Vous me direz ce qui vous a véritablement poussé à me chercher, et ce sera amplement suffisant. »

D'un nouveau geste de la main, il invita la jeune femme à s'allonger sur la couchette rembourrée de dizaines de coussins , ce qu'elle fit, bien que nerveuse elle obtempéra et il tira le tabouret près de son flanc gauche.

Il commença par saisir le poignet de la jeune femme, le regard dans le vide comme s'il était attentif à quelque chose de très précis, puis le reposa avec précaution. Il poursuivit en allant se placer à sa tête, posant ses grosses mains sur les tempes de sa patientes. « Fermez les yeux si vous le souhaitez et pensez à un lieu dans lequel vous vous sentez bien. En sécurité. Cela vous aidera à vous détendre. »

Elle acquiesça et prit une grande inspiration en cherchant dans sa mémoire un lieu dans lequel elle se sentait bien et, étonemment ce fut la maison de ses parents qui lui apparut directement en tête. Les doigts de Mehmet glissèrent sous le crâne de sa patiente pour descendre légèrement le long des vertèbre, revenir le long de la mâchoire. Puis il continua sa marche pour venir appuyer sur un point bien précis de son abdomen, une main plus bas que les côtes. Une douleur remonta jusqu'à l'épaule de la jeune femme, tendant instinctivement son côté et lui arrachant un hoquet plus de surprise que de douleur. Il remonta près de sa tête, posant simplement les deux mains sur les épaules de la jeune femme.

« Respirez. » Ordonna-t-il de sa voix calme. « Respirez. » Souffla-t-il a nouveau quelques secondes plus tard, plus bas, avec cette même force de rivière à la fois tranquille et implacable. Elle obtempéra à nouveau et reprit une grande inspiration et repensa à la demeure de ses parents et elle se surprit à nouveau en se demandant ce qu'ils étaient devenus depuis le temps.

Le plus silencieusement possible, Mehmet regagna son tabouret, s'assit et avança la main pour la poser à plat sur le nombril de l'eldéenne. L'autre tira de sa chemise un épais pendentif représentant un reptile mordant sa propre queue, constitué de bronze, d'or et d'argent, enroulé sur une rose des vents piquée de pierres précieuses de différentes couleurs. Il respira profondément, les yeux fixement ouvert sur le corps devant lui. A partir de la main posée sur le tissus blanc, des veinules commencèrent à irradier d'une lueur tamisée par le vêtement, à moitié sous la peau, à moitié à la surface du corps. Elles croissaient selon une pulsation lente et posée. Sur leur passage, alors qu'elles prenaient leur temps pour prendre possession de leur nouveau domaine, la peau se hérissait, les muscles en étaient comme doucement électrifiés. Les lueurs formèrent un nœud au niveau du cœur et continuèrent jusqu'au dessus du crâne. Mehmet respira un grand coup, puis ne bougea plus. S'il n'avait pas sentit sa patiente suffisamment détendue et consentante, il se serait arrêté là, alors qu'elle ne pouvait ignorer la présence de cet autre sous sa peau. Elle compris alors pourquoi est-ce qu’il l’avait mise en garde mais elle ne regrettait pas d’avoir accepté. Elle n’eut plus à forcer pour maintenir ses paupières fermées, elle se détendait plus rapidement, plus profondément également.

Les couleurs des veinules fluctuaient. Certaines voies se créaient, d'autres bougeaient légèrement. Un tintement cristallin vibrait parfois à la limite de l'audition lorsqu'un changement important avait lieu.

Les tensions musculaires quittaient une à une le corps de la femme allongée là. De temps à autre, sa main ou son pied était pris d'un spasme, le temps que le membre se mette véritablement au repos. Ses épaules se relâchèrent. Durant quelques instants son rythme cardiaque monta en flèche avant qu'il ne se stabilise pour redescendre paisiblement, emportant avec lui une curieuse tension ventrale. Son cou s'appuya délicieusement sur les coussins et laissait tout le poids de son crâne peser sur la couche, sans retenue. La mâchoire que la migraine avait tendue se décrispa et ce qu'il restait de douleur quitta le front de la jeune femme tandis que ses souvenirs devenaient plus précis et plus vifs.

L'opération avait bien pris une demie-heure, mais il resta ainsi encore quelques instants, regardant les veinules de lumière pulsées de leurs couleurs maintenant statiques, avant de laisser la magie refluer doucement de la tête au cœur, du cœur au nombril et se résorber dans la paume de sa main.

Inspirant profondément, il reposa ses deux mains sur ses genoux, sans cacher tout de suite son talisman, et regarda la jeune femme pour déterminer si elle s'était ou non endormie et après une dizaine de minutes à n’entendre qu’une respiration lente et régulière il était claire que ce fut le cas.
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Lilyanna
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MessageSujet: Re: Mille et une nuit.   Mille et une nuit. I_icon_minitimeMer 15 Jan 2020 - 2:57

Lorsque plusieurs heures plus tard Lilyanna ouvrit à nouveau les yeux, son regard mit un certain temps avant de se concentrer sur quoi que ce soit, restant dans un délicieux vague. Si ce n’était ses yeux ouverts on aurait pu croire qu’elle dormait toujours, elle était entièrement détendue et craignait qu’au moindre mouvement la tension ne revienne. Cependant elle devait bien bouger à un moment ou un autre et elle commença par s’étirer comme pouvaient si bien le faire les félins. Lorsqu’enfin elle se rendit compte qu’elle n’était pas dans sa cabine à bord du Katrian elle se releva brusquement et regarda partout autour avant de reconnaître la pièce dans laquelle l’avait amenée Nubia puis la raison de sa venue lui revint d’un coup et elle chercha Mehmet du regard pour ne trouver qu'une pièce vide. Elle se leva et chancela, tentant de se rattraper à la première chose qui était à sa portée. L'étagère vibra sous l'impact mais tint bon… Ce qui ne fut pas le cas de l’œuf en verre coloré qui trônait en son centre et qui – délogé de son présentoir – roula rapidement vers une chute certaine et malgré les efforts de la prêtresse il tomba au sol et se brisa. Lorsqu'il touche le sol le coeur de Lilyanna rata un battement et elle resta devant les morceaux de verre colorés, une main couvrant sa bouche pour masquer un cri horrifié qui, de toute façon, était muet. Quelques instants plus tard, la porte s'ouvrait sur la silhouette imposante du Maître des lieux. Le son de la porte la fit sursauter comme si un dragon avait grogné derrière elle. La prêtresse se retourna brusquement et en voyant Mehmet elle recula d’un pas.

« Je vous présente toutes mes excuses, je jure sur l’Unique que je n’ai pas fait exprès, je me suis levé et j’ai eu le tournis et pour éviter de tomber je me suis rattrapé à l’étagère et ça a déstabilisé l’œuf et j’ai essayé de le rattraper et... » elle dû s’arrêter pour reprendre son souffle, l’air commençait à singulièrement lui manquer à force de parler si vite mais elle ne reprit pas, à la place elle regarda le maître des lieux, anxieuse, attendant un courroux qui ne vint pas.

L'homme aux expressions et aux gestes contenus inspira, ses yeux se plissant comme s'il retenait un sourire. Un étrange sourire semblable à la caresse du velours à rebrousse poil. Son ton était toujours fluide.

- C'est le destin de tout œuf de s'ouvrir un jour. Visiblement, c'est une nouvelle Sœur que contenait celui-ci. " Une grosse main venait de tirer son imposant pendentif de sous sa tunique pour le luire à la lumière du jour. Seuls ses yeux bougeaient, allant du visage de Mehmet à son médaillon et elle resta bouche bée devant ce dernier, plus particulièrement devant les couleurs des écailles.

" Respirez. J'ai éliminé les plus grosses tensions, mais la façon dont vous utiliser votre magie tire sur votre système sanguin et sur vos reins. La pression que vous vous imposez pour atteindre vos buts sans faillir est également bien présente. Ne rajouter pas d'angoisses inutiles ou les migraines reviendront et les tics ne cesseront de se multiplier. Vous devriez vous faire masser de temps en temps, en surface pour faire circuler la lymphe et en profondeur pour rééquilibrer le passage du sang. Vous regagneriez en énergie et en concentration, croyez-moi... Et laissez le verre ou il est, je m'en occuperai plus tard. " D'un geste, il l'invita à sortir pour le suivre vers des coussins et tapis posés sur la terrasse sous la végétation serrée qui les séparaient de la rue, profitant à la fois de l'ombre et du soleil extérieur. Elle acquiesça plusieurs fois avant de le suivre et elle attendit qu’il reprenne la parole, n’osant le faire elle-même.

- Mais vous n'étiez pas venue pour une consultation après tout. Puis-je croire que nous allons parler de la véritable raison de votre venue à présent ? Je suppose que mes tatouages m'ont trahis aux yeux d'une Sœur initiée ? "

« Oui. » Admit-elle, un peu honteuse que ce soit fait dans ces conditions. Assise en tailleur elle regarda ses gants et se surprit à ne pas les tirer en arrière puis elle releva alors la tête. « J’ai été l’élève d’un prêtre mais il n’a jamais voulu m’apprendre à lire ou écrire le nissétien alors quand j’ai vu vos tatouages je me suis demandé d’où ils venaient, ce qu’ils voulaient dire et si vous les comprenez. »

Mehmet passa machinalement une main sur son crâne rasé de frais jusqu'à la base de sa nuque.

- Je comprends les mots gravés sur ma peau. Je sais les lire, les comprendre et les prononcer. Mais mes bases de grammaire sont très lacunaires et mon vocabulaire n'est pas beaucoup plus développé que celui utilisé dans ces textes. " Elle hocha la tête puis il ajouta avec un soupçon de regret: " mon professeur est parti bien avant que je puisse lire ou parler couramment la langue de mes ancêtres.

Dans ses yeux mauves, un voile terne passa. Déception ? Culpabilité ? Souvenir douloureux ? La chose n'avait pas l'air agréable, mais face à une Sœur qui avait été spécifiquement guidée vers ce détail, il ne voulait pas cacher d'informations... Pourvues qu'elles ne servent pas en suite à s'en prendre aux siens au cœur de leur foi.

- Je vous en parlerai volontiers, mais j'ai besoin de savoir à qui j'ai affaire avant cela. Vous avez été initiée par un prêtre mais êtes vous prêtresse vous-même ? Pratiquez-vous dans une loge ? Etes-vous une Descendante du peuple ou une Amie ? "
« Je comprends votre méfiance. Mon professeur m’a confirmé comme prêtresse mais peut-on dire que j’en suis une si je suis incapable de lire les textes sacrés de l’Unique ? Je dois d’ailleurs vous admettre que si je suis rentré dans une loge c’était d’abord pour continuer mon apprentissage de la magie et plus particulièrement du spiritisme toutefois au fil des siècles je me suis rendu compte que c’était ma foi qui m’avait fait rester bien après avoir maîtrisé la magie qui m’intéressait tant ; je ne suis pas une descendante des dracennes bien que mon maître en fut un, ma loge n’existe plus aujourd’hui, à ma connaissance j’en suis la seule survivante. »

Au fil de son explication, le regard inquisiteur s'était fait plus doux, plus compatissant et la finalité du discours avait fermer les paupières lourdes de l'homme pour quelques instants. Sa main se porta à son talisman, suivie par les yeux de Lilyanna qui se concentrèrent sur les couleurs des écailles. La nouvelle semblait profondément l'affecter.

- J'en suis désolé. Vous avez toute ma sollicitude. " acquiesça-t-il en rouvrant les yeux. " Je n'ose pas imaginé ce que vous avez du traverser...
« Merci, le plus regrettable reste la nature de nos attaquants : une autre loge. Après avoir eu l’honneur d’observer les trois dragons métalliques se battre contre le rouge nous avons réussi à récupérer une des deux écailles du bronze qui étaient tombées et c’était ce que convoitait nos assaillants. »
- La coopération est rare et le savoir plus rare encore... Si je m'affiche avec fierté, j'avoue être beaucoup plus circonspect lorsque cela concerne les autres membres de ma loge. Entre les eldéens et les sectes les plus violentes, la discrétion reste le meilleur gage de protection pour la plupart d'entre eux. " Bougeant un peu pour trouver une place plus confortable dans les cousins, Mehmet cherchait toujours le regard de son interlocutrice. " Nous avons enquêté sur l'apparition des dragons mais nous n'avons rien trouver d'autre que des rumeurs et des écailles de wyvernes vendues à la sauvette. Mais... Je me doute que vous ne me répondrez sans doute pas après l'expérience que vous avez eu, mais avez-vous encore cette écaille ? "

Lilyanna baissa les yeux vers ses gants, observant les paumes de ses mains grandes ouvertes et elle le fit pendant un temps incertain, perdue dans ses pensées jusqu’à ce qu’elle pousse un long soupir las. Elle releva ensuite la tête, s’arrêtant quelques instants sur le pendentif pour finalement retrouver les yeux mauves de Mehmet

« C’est fatigant de devoir sans cesse fuir, se cacher, sans pouvoir faire confiance à ceux qui partagent ma foi... j’ai récupéré l’écaille il y a peu et j’ai tenté de localiser la seconde mais sans succès toutefois comme je ne suis pas en mesure de la protéger je comptes aller la rendre à son propriétaire légitime sous peu. »
- Son propriétaire légitime ? ... Vous voulez dire... ? "
« Le Grand Dragon de Bronze. »
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Cécilie de Missède
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MessageSujet: Re: Mille et une nuit.   Mille et une nuit. I_icon_minitimeMer 15 Jan 2020 - 2:59


Mehmet se raidit instantanément

- Vous savez ou Il se trouve ?
« Non mais après leur combat contre le Grand Dragon Rouge, les autres sont partis vers le nord et maintenant que Sol’Dorn est tombé, que les seigneuries morcelées sont plus… sûres, je peux tenter d’aller chercher en Anaëh. Si j'avais pu je serais partis bien plus tôt mais un tel projet demande de l'argent. Beaucoup d'argent. Une somme que je n'ai pas. »
- Vous êtes sérieuse... " Pas une question mais une constatation lourde de sens. " C'est un voyage dangereux et l'Unique vous protège si vous souhaitez vous adresser directement à l'un des Titans. Je vous souhaite de tout cœur d'y parvenir... Et si nous pouvons vous aider avant votre départ, ce serait un honneur. Les miens seront mis au courant de votre entreprise, mais je... " Il tendit la main pour se saisir de celle de la jeune femme si elle l'acceptait. " Jurez sur votre foi que cette écaille existe bien et que votre entreprise est sincère. "
« Je peux faire bien plus que vous le jurer. »

Elle n’attrapa pas la main de Mehmet, à la place elle se leva pour aller chercher son épais manteau puis elle chercha à tâtons l’ouverture sur la doublure dans laquelle elle cachait l’écaille en question. Une fois à l’air libre, elle la posa à côté pour plier son manteau et la déposer sur celui-ci avant de retourner vers le guérisseur en tenant la relique avec toute la révérence qui lui était due.

« Je ne m’en sépare jamais. »

L'homme se leva à la seconde ou elle entra dans son champ de vision, ouvrant les yeux sans retenue. Ses gestes contenus et la tension qui ne quittait pas son corps massif semblaient avoir diminués, laissant place à des mouvements plus saccadés et brutaux. Il n'attendit que la jeune femme soit tout a fait arrivée jusqu'à lui pour la saisir par le bras, au risque de faire tanguer l'écaille, le cœur de la prêtresse rata un battement et la peur faillit lui faire échapper la prunelle de ses yeux lorsqu'il la tira vers sa salle de pratique, elle ne retint un cri que de justesse. Dès qu'il fut à l'intérieur, il la lâcha pour refermer la porte.

- Qu'il vous reconnaisse et vous garde pour le prochain monde. " chuchota-il sans pouvoir quitter la relique des yeux. " Puisse les Titans vous épargner toute souffrance pour cela. " Sa main approcha doucement sans pouvoir se résoudre à la toucher. Puis il tomba à genoux, amenant le front jusqu'au sol. " Gloire à l'Unique et à ses Avatars. Gloires aux Titans salvateurs. Gloire à vous, Lylianna gardienne de bronze, pour avoir préservé cette relique. Mon histoire et mes savoir sont vôtres. Je vous enseignerai tout ce que je sais sur l'ancien langage. et je vous en prie, acceptez de venir nous raconter votre histoire et échanger vos savoir à notre prochaine Tenue. "

Elle resta là pendant quelques secondes, incapable de dire quoi que ce soit. La prêtresse déposa la relique avec son manteau sur le premier meuble qu’elle trouva puis elle mit un genoux en terre pour se mettre au niveau du guérisseur. Il frémit lorsqu'elle posa une main sur son épaule mais obéit à son invitation.

« Je vous en prie, relevez-vous Mehmet, c’est… c’est trop. J’accepte votre offre avec plaisir, quand aura lieu votre prochaine réunion ? »
- S'il vous plait, rangez là. Cachez là. S'il lui arrivait malheur parce que vous avez accepter de me la montrer... " Un trémolo c'était glissé dans la voix étrangement moyenne par rapport à la corpulence de l'homme. La prêtresse hocha la tête et se retourna, elle adressa une brève prière à l’Unique avant de prendre l’écaille pour déplier son manteau et la glisser à sa place. Il en profita pour se reprendre et se remettre debout, il poursuivit toujours fébrile sans jamais la regarde tout à fait de face. Au contraire, Lilyanna le dévisageait presque, l'incompréhension commençant à se lire sur ses traits.

" Nous nous réunissons le dernier jour de l'ennéade, au couché du soleil. Je... J'ai besoin de réfléchir. Vous êtes ici chez vous. Que vous vouliez rester ou non, Nubia et moi seront à votre entière disposition. Je... Je reporterai mes patients pour que nous puissions parler en toute quiétude et si vous le souhaitez, je serai heureux de partager ma couche avec vous. " Sa main fébrile se posa sur la poignée pour sortir de nouveau.

« Attendez. » Souffla-t-elle en faisant un pas dans sa direction, elle savait qu’elle ne pourrait pas l’y forcer mais elle se doutait que ça ne serait pas nécessaire. « Pourquoi réagissez-vous  ainsi? Je ne suis qu’une prêtresse, le Titan dont j’ai l’écaille ne sait même pas que j’existe et il en est de même pour Ses frères. Votre offre me touche, vraiment, la dernière peut-être un peu moins que les autres, mais j’ai du mal à comprendre pourquoi. »  

Elle n'eut qu'un sourire crispé pour toute réponse.

- C'est normal que vous ne compreniez pas. Vous nous apportez la preuve. Celle que nous attendons depuis près de deux décennies. Cette écaille est la preuve que les Titans sont bel et bien de retour. Vous n'avez pas conscience de votre propre importance, comme... " Un vague rire lui échappa. il baissa les yeux, prit par une vieille pensée. " Vous n'êtes peut-être pas une Drakma, une élue des dragons, mais j'ai le sentiment que vous avez une place dans ce qui doit advenir. Votre venue aujourd'hui ne peut être une coïncidence. "
« Si vous le dites. » Dit-elle sans grande conviction avant de remettre son manteau et après l’avoir fermé elle regarda à nouveau son interlocuteur. « Qui d’autre n’a pas conscience de sa propre importance ? »
- Demain matin, vous aurez toutes vos réponses.
« A quelle heure et où dois-je vous rejoindre ? »
- Ici. Dès que vous le désirez, pourvu que le soleil soit levé. "
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MessageSujet: Re: Mille et une nuit.   Mille et une nuit. I_icon_minitimeMer 15 Jan 2020 - 3:01

Elle hocha la tête et sortit de la boutique, une fois dehors, Lilyanna mit sa capuche et disparu dans les rues de Thaar. Une fois de retour dans l’auberge où elle louait une chambre, elle entra dans ladite chambre et se laissa tomber sur sa paillasse en se disant qu’elle aurait peut-être dû rester chez Mehmet, c’était bien plus confortable. Toutefois elle ne voulait pas prendre le risque de briser autre chose donc peut-être que c’était pour le mieux. La nuit passa lentement, très lentement, du fait qu’elle avait déjà dormi elle ne put s’assoupir alors elle passa son temps la salle commune à boire et discuter mais surtout à écouter les histoires de marins que racontaient ceux de passage dans cette ville gigantesque. Elle demanda quelques nouvelles du Katrian mais on ne lui répondit pas grand-chose et rien d’utile. De dépit, la prêtresse retourna dans sa chambre et, allongée, elle en profita pour réfléchir sur ce qui s’était passé aujourd’hui jusqu’à ce que la fatigue ne la rattrape.

Le lendemain elle se réveilla lentement avant de se rendre compte qu’elle avait une leçon à donner et qu’elle risquait d’être en retard. Cette fois elle ne prit pas la peine d’enfiler sa robe, elle mit ses vêtements habituels, ses gants et son manteau avant de sortir en trombe de sa chambre. Elle arriva essoufflée mais à l’heure et après une leçon qui sembla durer une éternité, elle sortit enfin et se dirigea directement vers la boutique de Mehmet. De la même façon que la veille, elle replaça sa tresse et une mèche rebelle avant de toquer à la porte. De la même façon que la veille, Nubia lui ouvrit. Mais cette fois, la jeune femme ne l'interrogea pas plus qu'elle ne la fit patienter. Elle l'accompagna plutôt dans la cour intérieur pour pénétrer dans la pièce qui se situait en face tandis que Lilyanna retirait son manteau et le plia avec un soin tout particulier. Une pièce a vivre tout ce qu'il y avait de plus banale, accolée à une cuisine et à un couloir qui devait donner sur d'autres pièces. Assis en tailleur, accoudé à une table basse, son talisman sous une tunique grise à la coupe très semblable à sa tenue de la veille, Mehmet était en train de lire un épais manuscrit relié de corde.

Voyant son invité, il l'invita à s'asseoir avec lui tandis que Nubia leur promettait un repas dans peu de temps. L'odeur d'un tajine épicé flottait d'ailleurs dans toute la pièce et le ventre de la prêtresse fit part de son impatience alors qu'elle allait s'asseoir comment proposé.

- Je suis heureux de vous revoir. " salua le guérisseur, son aplomb et son contrôle de la veille retrouvés comme si les dernières minutes de leur échange n'avaient jamais eu lieu. " J’espérais que mon comportement d'hier ne vous avait pas trop effrayée. "
« J’admets que c’était… surprenant mais je n’ai pas hésité. » Elle déposa son manteau à ses côtés, posant une main protectrice dessus. Elle regarda ensuite l’ouvrage que consultait le guérisseur et se sentit légèrement mal à l’aise. « Je peux revenir plus tard si cela vous convient mieux. »
- Inutile. Vous ne me dérangez pas. Au contraire. " Le volume fut rapidement fermé. " Vous savez, j'ai beaucoup réfléchi et beaucoup prié cette nuit. Retrouver mon équilibre n'a pas été une mince affaire. Voir cette... relique, de mes propres yeux a été un grand chamboulement pour moi, et je vous suis reconnaissant pour cela, mais je n'aurait pas du présumer de Sa Volonté. Vous suivez le chemin que vous estimez le bon et cela est louable au même titre que nos décisions à tous. Je vous présente mes excuses pour avoir réagit aussi violemment. "
« Ce n’est pas nécessaire, je comprends, après tout ce n’est pas tous les jours que l’on a une preuve du divin devant soit. Si vous aviez vu les quatre Grands Dragons danser dans le ciel… » elle secoua la tête pour éviter de se perdre dans son souvenir. « Et dire que les dracennes nouaient des liens avec eux... ce que je donnerais pour voir Nisétis à son apogée, pour voir les Titans virevolter entre les dômes des palais. » Elle poussa un soupir, bien consciente de l’incongruité de formuler un tel souhait pour une personne qui avait du sang eldéen dans les veines. Mehmet ne dit rien, mais son regard scintillait comme celui d'un enfant. « Je comprendrais que ce soit un peu tôt mais voilà : pouvez-vous commencer à m’apprendre le nisétien ? »

- Bien sûr. Notre Loge considère que propager le savoir de nos ancêtres est un honneur. " Le volume fermé glissa sur la table du guérisseur vers l'hybride. Elle posa une main sur le volume sans oser l’ouvrir jusqu’à ce que Mehmet commence à décrire ce qu’il contenait.

" Sur chaque page, il y a un signe de l'alphabet avec ses transcription phonétique en fonction de son accentuation dans une phrase. Les suivantes sont couvertes de chants et de quelques annotations explicatives. Ceux que je porte sur ma peau en sont tirés " ajouta-t-il. Elle tourna une page après l’autre, passant quelques instants à en parcourir une avec des yeux écarquillés d'enfant devant son gâteau d'anniversaire rêvé avant de passer à la suivante.

" Je ne peux vous offrir ce livre. C'est l'unique exemplaire en notre possessions, mais vous pourrez le consulter quand il vous plaira en venant ici. Il faut aussi que vous sachiez que celle qui l'a écrit - et qui m'a enseigné les bases - m'a dit qu'il s'agissait d'un dialecte ancien et recherché. Pas la langue la plus courante. "

Elle tourna une page après l’autre, passant quelques instants à en parcourir une des yeux avant de passer à la suivante.
« C’est bien plus qu’il ne m’en faut, merci infiniment. » Elle continua à lire avant qu’elle ne réalise ce qu’avait dit le guérisseur, elle leva brusquement la tête, les yeux scintillants. « Vous connaissez une personne qui maîtrise plusieurs niveaux de langue et dialectes... vous connaissez une dracenne ? »
- Une Drakma. " rectifia Mehmet en acquiesçant cependant. " Je pense sincèrement que les dracennes se sont éteints avec les dragons et qu'ils étaient différents autant par l'esprit que par le sang. Peut-être reviendront-ils sous une nouvelle forme puisque les Titans sont de retour, mais là n'est pas la question. Ma loge considère qu'en plus des anciens Avatars comme l'Empereur ou les Dragons, l'Unique choisi également des élus parmi tous les peuples pour manifester sa présence et faire avancer le Grand Dessein. Ces élus grandissent comme vous et moi jusqu'à ce qu'ils se révèlent à eux-même et acquièrent des pouvoirs anormaux. Certains sont voués à la destruction, à la guérison, à la manipulation, à la mémoire, ou que sais-je encore. Et en règle général, ils n'ont pas conscience de la finalité de leur existence. " Les larges mains bougeaient au rythme de ses explication, appuyant en quelques mouvements curieusement contenus les temps forts et les informations importantes. " Celle que j'ai rencontrée a acquis un savoir instinctif de ce qu'étaient les dracennes. Sans jamais avoir appris à lire ou à écrire, elle comprenait les anciens textes, écrivait et même prononçait ce dialecte comme s'il s'agissait de sa langue natale. Elle manipulait une forme de magie oubliée et avait été choisie pour porter le savoir des anciennes générations. " Se yeux luisaient à nouveau et dans sa voix perçait un souffle enthousiaste rempli d'espérances.

« Puis-je… puis-je la rencontrer? » Demanda-t-elle d’une voix fébrile, incapable d’imaginer que, si Mehmet parlait d’elle au passé c’était parce que l’Unique l’avait rappelé. La grosse main de Mehmet se posa sur le bras de la jeune femme, désolé.

- Croyez-moi, j'aimerais vraiment vous dire oui. Je sais qu'elle est en vie, mais je ne sais pas où elle se trouve. " Il soupira. Il n'avait jamais semblé si mortifié jusqu'à présent. " Quand je l'ai rencontrée, elle était perdue. Je l'ai aidé de mon mieux, j'ai essayé de lui faire comprendre ce qu'elle était, mais j'ai fait une erreur. J'ai mal agis. Nous avons tenté de nous approprié son savoir sans son accord et elle est partie. Je le regrette encore... Mais après des années d'absence j'ai eu la joie de la revoir. C'était au début de cette année, dans cette ville. Je sais qu'elle finira par me revenir peu importe le temps que j'ai à attendre. " Une certitude vibrante, un espoir. L'émotion de l'homme était visible, à ce demander ce qu'il y avait eu entre lui et la femme dont il parlait. Puis il pencha la tête pour regarder la table. " J'ai sauvé sa plus loyale amie d'une septisémie. Puis elle a quitté Thaar vers mi Karfias. Je ne sais pas ou elle a été en suite et je ne veux pas la suivre si elle refuse ma présence, mais je peux vous donner l'adresse de la parfumerie ou elle séjournait. Peut-être que vous pourrez lui faire comprendre la réalité de son implication. "
« De ce que vous me dites d’elle, je ne sais pas si essayer est une bonne idée, elle comprendra bien en temps voulu, lorsqu’Il l’aura jugé bon. Toutefois si elle a bien été choisie par l’Unique alors peut-être que ma quête l’intéressera. Avez-vous de quoi noter l’adresse ? »
Mehmet se tourna vers la cuisine pour appeler Nubia qui leur apporta une mine charbon et une chute de tissus beige. Il y nota l'adresse, également dans les Soieries ainsi que l’annotation ' Demandez Irulan ' tout en complétant à voix haute.

- Elle voyageait avec une drow et un humain aux yeux vairons. " Lilyanna prit la chute de tissus et après avoir lu l’adresse hocha lentement la tête avant de poser une dernière question à son hôte :
« Et comment s’appelle-t-elle ? »
- Je n'ai jamais su son véritable nom. Je l'appelais simplement Drakma, mais elle aime se faire appeler Irulan. Une transcription approximative du mot 'ruine' dans le dialecte qu'elle nous a enseigné. D'ailleurs, si vous n'avez pas d'autres questions, nous pourrions commencé par la prononciation de certains phonèmes un peu spéciaux ? "
« Je n’ai pas d’autres questions mais peut-être serait-il meilleur de commencer par la prononciation d’Iru… Irou… Iryiouuu… »
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