Retour de la fille prodigue?( Mara)

Comme toujours…la vie continuait son cours. La vie quotidienne du couvent était rythmée par le travail, les cérémonies religieuses et les moments de détente.  Les journées s’enchainaient et se répétaient. J’avais une sensation de refaire toujours la même chose. Certes, j’avais pris mon rythme et je m’étais bien intégrée dans le groupe. Les pensionnaires étaient agréables mais je ressentais tout de même une différence entre eux et moi. C’était déstabilisant d’être confronté à une mentalité différente. Les Oesgardiens abordait la vie de manière différente et à l’opposée de la culture Estréventine.  Par moment, je me demandais si j’avais vraiment une trace qui me faisait sentir Oesgardienne.Si on regardait de plus près sur ma ligne de vie, je n’étais pas vraiment Oesgardienne… Après ma naissance, ma grand-mère avait quitté Amblère pour Serramire-la-Ville. Puis, j’étais à Rochenoire, Missède,Naelis, Ulda’Ritz et Thaar… J’étais comme un oiseau qui voyager fondant son id un peu partout. Pour l’instant, mon véritable Nid était Thaar. Pardon, pour l’instant, mon nid était à Oesgard…

IV me manquait…J’aimerais y retourner. Mais quand ? Je ne savais pas vraiment. Alors, j’oubliais mon mal du pays pour travailler corps et âme dans la couture, la perfection du chant religieux car je n’aimais pas faire un travail sans donner le meilleur de moi-même. D’une part, j’étais perfectionniste mais   c’était un moyen d’enlever mes troubles. Les séquelles étaient toujours là. Parfois, elle jouait sur mes humeurs, sur mes craintes. C’était un combat de longue haleine que j’avais acceptée de combattre. Un temps, je voulais me suicider…je l’avais fait. Je m’étais suicidée symboliquement avec un couteau devant le miroir. Nue devant la glace en mimant les gestes avant de couper ma chevelure. Je l’avais tuée…Maintenant, je devais construire pas à pas cette nouvelle personne dans les cendres de mon ancien moi que je haïssais. Je ne supportais plus l’idée de retomber dans cet état de faiblesse. Dans ces cendres de mon ancien moi, je devais séparer le bon grain de l’ivraie.

Je savais ce que je voulais devenir…Mais, je devais prendre mon mal en patience. Ne pas me précipiter. Comme pour une œuvre d’art, je devais aller pas à pas pour me reconstruire. Tracer les premiers esquisses, les détails, la peinture et les finitions. Je devais me reforger petit à petit. C’était important à mes yeux de pratiquer ainsi. Ainsi, je me questionnais sur des situations complexe…Comment devrais-je réagir ? Devrais-je être aussi impitoyable que ma mère ? Clémente ? Avoir un juste milieu ? Devrais-je être la fille la plus sournoise avec un sourire délicat pour berner les gens. Tout un tas de remise en question. De ce que je sais et que la vie ma vite apprise, je ne pouvais pas accorder facilement ma confiance aux gens. On avait failli me tuer. Et mon échange avec le Comte me rappelait que je devais mieux mentir et que j’avais affaire à des loups potentiellement rusés. Puis, avouons-le, je ne m’attendais pas d’avoir faire face à un comte. Et, je sentais qu’il était curieux de me cerner. Car, il ne fallait pas se leurrer, je n’avais pas du tout l’attitude d’une simple Dame. Une personne du haut rang tels que le comte, il voulait surement savoir qui j’étais. Il pouvait espionner ou avoir d’autre réponse. J’aurais pu choisir le silence typique de Nééra. Le silence aurait été mieux en réfléchissant bien. Mais, je me souvins dans un livre que le silence pouvait être aussi très nuisible. Pourquoi ? C’était très simple. En voulant être silencieux, on devenait mystérieux et intriguant. Pour quelqu’un qui possède un pouvoir, on voudra percer le secret. Après tout…N’étais-je pas le type de femme à vouloir percer un secret ou d’être trop curieuse ? Si c’était moi, j’aurais voulu connaitre l’individu de fond en comble s’il était silencieux. Alors, je donnais de quoi nourrir la curiosité mêlant vérité et mensonge tout en faisant en sorte de cacher les éléments cruciaux de mon histoire. J’avais réussi à créer une histoire simple et cohérente. Mais, j’aurais pu améliorer d’avantage mon histoire. De toute façon, je ne le reverrais plus ce comte. C’était une discussion mondaine après tout. Je ne pensais pas que le comte aurait un grand intérêt de me connaitre d’avantage…..

Enfin…

J’étais dans ma chambre en train de coudre une robe noire. Je tentais de créer des motifs et ce n’était pas simple. Je voulais que la robe soit parfaite. Elle était presque parfaite. Non pas parfaite…mais assez bien. Solveig m’aidait de temps à autres mais elle n’était pas dans la chambre. Elle aidait mère Astrid. Seule dans ma chambre, j’aimais ma petite solitude, chantonnant pour combler le silence. Puis, on tapait à la porte.

« Solveig ? » disais-je
« Non, c’est Hortense. Puis-je ? » demanda-t-elle
« Bien sûr ! » répondis-je

Je la voyais rentrer. Elle était toujours souriante et chaleureuse. Elle ne changerait jamais. Cependant, je pouvais deviner son sourire. Elle était en train de regarder la robe, curieuse de voir le résultat. Je posais la robe sur mes genoux et je la fixais droit dans les yeux. Il ne fallut pas longtemps qu’Hortense profita pour dire sa venue.

« Tu as de la visite ! Ils t’attendent dans le cours proche du potager. Va vite ! » profitant de partir par la même occasion.

Je posais la robe sur la table, arrachant le fil.De là, j’enfilais ma petite cape contre le froid, arrangeant ma chevelure. C’était surement Brohan qui voulait prendre de mes nouvelles. Oui, c’était surement lui. Cependant, il n’était pas seul. Il était surement accompagné de sa garde. Après tout, Oesgard n’était pas encore un endroit sûr.

Je fermais la porte de la chambre derrière moi, traversant les couloirs, les pièces pour atteindre la cour extérieure. Le vent frais caressait mon visage, soulevant un peu la cape par la même occasion. Avec mes mains, je profitais pour maintenir la cape. Je marchais en direction du jardin. Plus, j’avançais ! Plus, je sentais une pression sournoise prendre mon cœur. Je marchais jusqu’à voir les premières silhouettes. Tout d’un coup, je reconnue les formes de Mère. Elle était là ! mon cœur se mit à battre à vive allure. Était-ce la peur ? La joie ? Tout à la fois. Plusieurs fois j’avais hésitée de lui envoyer des lettres pour de mes nouvelles. Mon manque de courage préférait de mettre la lettre de côté et de ne pas faire le premier pas.

 Aujourd’hui, elle était là et je ne savais pas comment réagir. Était-elle toujours en colère ? Était-elle toujours déçue de moi ? Après tout, je l’avais blessé. Je pouvais comprendre sa rancune.

J’étais derrière eux, Ils ne me voyaient. Je profitais de prendre une grande respiration pour calmer les angoisses. Cette angoisse était inutile. Un jour ou l’autre, je devais parler à Maralina et ne plus fuir. J’avançais doucement pour être à quelque pas d’eux. Puis, ma main tira le pan de tissus de ma protectrice. Lorsqu’elle se retourna, je guettais ses premières réactions pour savoir à quoi m’attendre.

« Bonjour. » commençais je avec un sourire tendre, reculant d’un petit pas.
 
J’étais là devant le couple. Je gardais bien ma cape autour de moi cachant cette petite robe simple du couvent. Instinctivement, je passais ma main sur une mèche pour mettre derrière mon oreille. Puis, mon regard se porta sur mère, elle était toujours aussi belle.

La route jusqu’au couvent avait été longue. Beaucoup trop longue. Sans rien laisser paraître, la nervosité de la Princesse Marchande n’avait cessé d’augmenter jusqu’à ce que le couple arrive à Sainte-Peynarde. Cela ne prit pas de temps qu’une mère, dénommée Astrid, les prit en charge. Les invitants à travers les couloirs pour les amener dans la cour. Maralina rabattit doucement la cape de voyage finement décoré sur ses épaules. Silencieuse, elle n’en pouvait plus des jacassements de la mère, elle n’avait qu’une pensée en tête…


« Bonjour. »


Le cœur de la Princesse s’arrêta net alors qu’elle reconnut la voix qui venait de l’interpeller. La Vaanie ferma les yeux pendant quelques secondes, comme pour se donner du courage, puis elle se retourna pour faire face à sa fille. Ses prunelles azurées fixaient sa protégée. Est-ce que cela faisait si longtemps qu’elle avait quitté l’Ithri’Vaan? Comment pouvait-on changer si rapidement? Elle avait devant elle une tout autre jeune femme. Une jeune femme qui, pour la première fois depuis des années, lui semblaient bien sereine, finalement en paix avec elle-même. Elle ne put se retenir plus longtemps, en quelques enjambées elle rejoignit Elia, avant de l’agripper dans ses bras dans une éteinte toute maternelle. Ses mains gantées passèrent doucement dans les cheveux courts de la jeune femme, alors que la Princesse Marchande fermait doucement les yeux pour savourer cette étreinte qui lui avait cruellement manqué. Malgré leur différend, la Princesse n’avait jamais compris l’attachement qu’elle avait éprouvé pour la petite Elia. Peut-être était-ce parce que cette dernière lui avait sauvé la vie à Naélis? Il faut croire que ces événements avaient particulièrement bouleversé la marchande pour que cette dernière éprouve autant d’amour pour une enfant qui n’était pas la sienne.  Maralina se détacha finalement de sa protégée, laissant ses mains glisser doucement sur sa mâchoire pour plonger son regard dans le sien. « Bonjour ma fille. » Elle posa un doux baiser sur son front avant de lui sourire alors que ses prunelles azurées détaillaient attentivement la jeune humaine.


« Tu m’as manquée », lui murmura-t-elle en lui faisant un sourire triste. La voir ainsi, dans de pauvres étoffes ne la réconfortait aucunement. Comment avait-elle laissé sa fille dans un tel taudis? « Comment vas-tu? » Ses prunelles la dévisagèrent alors qu’elle entendit la réponse avec impatience. Des centaines de questions se bousculaient dans ses pensées. Avait-elle assez mangé? Est-ce que les sœurs la traitaient bien? Était-elle correctement logée? Une lueur d’inquiétudes sembla illuminer son regard alors qu’elle attendait impatiemment la réponse d’Elia. Elle se sentait si coupable de l’avoir abandonné. Si coupable de l’avoir laissé dans cet état.  Sa main se déplaça doucement sur ses cheveux, caressant doucement les boucles brunes d’Elia alors qu’elle admirait cette nouvelle coupe. « J’aime beaucoup, cela te fait bien.  Alors, raconte-moi tout. » Maralina prit doucement sa main et l’entraîna vers un banc, elle s’y installa avant d’inviter Elia à faire de même. «  Que penses-tu de ce couvent? » Au fond d’elle-même, Maralina n’en avait rien à faire du couvent. Elle cherchait simplement à trouver une raison pour ramener Elia à la maison, loin de ses sœurs…