Une intruse pas comme les autres | Artiön

À Wyslena. Mederith avait fini par céder, ou presque. Au moins il avait fini par reconnaître la vérité : Ardamir s’était rendue coupable de « perversion de l’artisanat » bien avant ton accession au Trône. Ardamir avait probablement « perverti » son artisanat bien avant ton arrivée dans ce monde, et bien avant la sienne. Du moins, il avait fini par la reconnaître au moment où tu t’étais retrouvé à redéfinir ce que tu considérais être les frontières d’Ardamir.
Ardamir – la Cité – était peut-être innocente, mais Ardamir – la Terre Ancestrale – avait autant de sang sur les mains que n’importe quelle autre. Wyslena, Mera et feu Eraïson revendiquaient bien moins de scrupules que la Cité aux Mille Bibliothèques, et quand le Protecteur finit par te le souffler, quand Mederith finit par accepter de te diriger vers qui-de-droit, alors les choses furent rapidement tout autres. Face aux Eraïsonniens ce fut à toi de devenir la Voix de la Raison, de retenir les ambitions vengeresses et de tempérer les discours haineux. Face aux Eraïsonniens, tu t’étais presque senti coupable d’abus de faiblesse. Ils pansaient encore leurs plaies, et tu venais de les rouvrir. Et tout ça pour quoi ? Tout ça pour obtenir d’eux qu’ils t’offrent leur soutien dans ta croisade.

- Tout doux Virìn, tout doux.

Tu te penches en avant, ta main vient flatter la crinière de cendre blanche, et la course de la caëngal se fait un peu moins sèche. Voilà quelques temps que ta partenaire et toi n’aviez pas voyagé ensemble, et aujourd’hui que vous renouiez le contact, elle te trouvait pensif et anxieux. Avec un peu de chance, le reste du chemin en direction de Wyslena vous donnerait l’occasion à vous tous les deux de vous calmer. À condition que les féliniers qui t’accompagnaient ne s’évertuent pas à profiter des manques actuels de votre symbiose pour tenter de vous semer.

- Tiens… tu souris Tu sais quoi ? ton sceptre fait un tour entre tes mains On va les rattraper.

Des rubans iridescents dansent autour de ton sceptre, les étoiles dans tes yeux se rejoignent en un cercle d’or, et lorsque ton poignet coupe le mouvement de ton focaliseur, c’est au tour du pelage de ta camarade de briller. Galvanisée par l’éther, ta partenaire se lance dans des foulées plus longues, plus puissantes, plus rapides, et les coussinets des montures alliées ont vite fait de se rapprocher. Une moue de défi au visage, répondant à celle amusé de tes partenaires, ta monture et toi regagniez du terrain, dévoriez du terrain, creusiez l’avantage, jusqu’à ce que les lumières faiblissent et vous laissent devant eux.

Tu laisses échapper un gloussement victorieux, fêtant ton succès sous la clameur de la Sylve et au rythme de la Vie. Mais ces célébrations n’auront été que de courte durée.

- Humanoïde au Sud-Est. tu donnes un à-coup vers la gauche, et Virìn vire sur le côté Il y a quelque chose qui cloche.

La pulse de la créature a tout de l’elfe, mais il est comme une incertitude dans son rythme, quelque chose qui distingue la signature de son essence de celles dont tu as l’habitude… ou alors peut-être est-ce la Symphonie qui t’inspire ces doutes. Peut-être n’est-ce que les questionnements de la Sylve qui te poussent à remettre en question ce que ta magie te donne de percevoir. Quoi qu’il en soit, ta décision est prise. Tu ne trahiras ni La Très Sage, ni tes instincts.

- Par ici !

Quelques instants à peine, c’est le temps qu’il faut à vos rapides montures pour vous mener à bon port. Quelques instants à peine, ce fut le temps qu’il te fallut pour que tes yeux se posent sur la créature.

Une elfe. Seule.

Tu te redresses sur ton assise, et d’un mouvement du torse envoie Virìn en avant au pas. Tes camarades sous tes ordres restent dissimulés, tandis que tu te dévoiles à la jeune rousse. Tu t’approches quelques peu, et une fois face à elle, conservant une distance plus que respectable entre vous, tu prononces les premiers mots.

- Qu’est-ce que tu fais seule ici ? machinalement, ton focaliseur fait quelques tours entre tes doigts Ce n’est pas raisonnable, la forêt est plus dangereuse qu’elle en a l’air.

Surtout lorsque -comme si les hurlements de Liltalaima ne suffisaient pas - les vêtements de la demoiselle en question laissaient entendre qu’elle était tout sauf Ornedhelle.

Labolangue:

La tenue du jour:

Eraïos. Ciriyë. Miresgal. Lirunwen. Neassa-Laëlla d’une certaine manière. Zaahrian d’une autre. Maintenant elle…
La Prime-Œuvre était probablement dans son état le plus instable depuis des Cycles. Depuis quelques années – en grande partie par ta faute – l’Anaëh se voyait transformée, tant dans son rapport à elle-même que dans son rapport au reste du monde. Plus que jamais, l’Anaëh se méfiait de l’extérieur de ses frontières, car l’intérieur était tel les chairs d’une nymphe derrière la chrysalide : fragile, en pleine métamorphose. Plus que jamais, l’Anaëh se méfiait de l’extérieur de ses frontières, mais si l’Anaëh s’en méfiait autant, c’est parce que l’Anaëh avait à nouveau accepté d’exister face au reste du monde. Les Sylvains découvraient leurs visages… et c’est peut-être pour cette raison que La Mère rendait aujourd’hui au cœur des égarés le désir de retrouver leur culture, leur histoire, leur famille, leurs Frères, leurs Sœurs, leur Monde.

Tu t’approches un peu plus, appelant de ta main libre tes deux accompagnateurs à te rejoindre. Les nasaux de Virìn hument l’air, curieux de la fragrance de l’inconnue, mais dans sa fragrance, la fauve n’aura trouvé aucune assurance. Toi tu fais confiance au félin, et restes précautionneux. L’histoire de celle qui s’est longtemps faite appeler Maxabre ne t’aura que trop bien appris de quelles retorses stratégies sont capables ceux qui ont marqué le bras de celle-ci. Les Eldéens sont vils, rancuniers et vicieux. Vicieux au point de retourner les vôtres contre vous – fusse dans la vie ou la non-mort – dans l’abomination qu’est leur guerre sainte. Et c’est peut-être là le plus triste. Le vice des Eldéens vous a dérobé quelque chose de précieux : l’espoir.

- Nous allions en direction de Wyslena ton timbre se veut avenant, mais il y reste une certaine froideur C’est le fort le plus proche. Nous pouvons t’accompagner jusque-là. D’autres pourront t’aider une fois là-bas.

Ta monture méfiante continue son approche, jusqu’à ce que tu te retrouves posté au flanc gauche de la rousse, les trois autres féliniers formant un triangle autour de vous.

- Tu n’as qu’à nous suivre.

Vous suivre, elle n’en a pas véritablement le choix. La présence pressante de ta Caëngal au flanc de son cheval pousse sa monture à avancer, la formation prise par tes ailiers lui interdisant de toute façon tout espoir de fuite. Quant à obtenir de vous que vous l’aidiez… oui elle pouvait l’espérer. Là-dessus elle pouvait même compter. Seulement l’aide que vous lui apporteriez sur l’instant ne serait peut-être pas l’aide qu’elle recherche. L’aide que vous lui apporteriez sur l’instant serait plutôt celle dont elle a besoin. Pour autant, se diriger vers le second ne devait pas empêcher de préparer le premier, et pour préparer le premier, il était impératif que vous sachiez…

- Comment tu t’appelles ?

Question profondément innocente dans toutes autres circonstances, le souvenir d’un prénom et d’une lignée qui rattache encore un peu de son identité à votre monde pourrait pourtant tout changer.

Rapidement montées au petit trot, vos montures retrouvent le rythme de croisière qui devrait d’ici la fin d’après-midi vous avoir mené aux portes de Wyslena. Quelques heures de trajet tout au plus, et vous pourriez vous décharger du dilemme vivant qu’était la réfugiée entre les mains d’autres elfes pour continuer votre voyage en direction de Linaëh. Encore que celle-ci… celle-ci il ne suffirait probablement pas de la confier à n’importe quel Arpenteur. Celle-ci, comme Ciryië avant elle représentait un danger potentiel, et comme Ciryië avant elle, il faudrait lui trouver un accompagnateur qui puisse protéger les autres d’elle, la protéger d’elle-même, et la protéger des autres.

Heureusement, ils ne sont pas trop rares les vétérans ayant quitté la milice pour les ordres.

- Alors tu es née là-bas ? tu baisses un instant les yeux avant de rétablir le contact avec ceux de ton interlocutrice Ce sont nos Frères prisonniers là-bas qui t’ont appris notre langue ?

Ce serait logique. Tu as déjà vu les Eldéens mettre leurs sales pattes sur des elfes blessés pour disparaître avec. Tu as déjà vu une elfe brisée et reconditionnée par le Puy. Quant à l’autre monstre d’ancien Ditronw Da’re… il aura au moins eu le mérite – le temps qu’il aura essayé de feindre la sincérité – d’avoir porté ton regard sur les horreurs ayant cours au Puy.
Pourtant… même sachant que des esclaves elfes là-bas il devait y en avoir plus d’un ; même trouvant normal que des esclaves d’un même monde cherchent du réconfort les uns auprès des autres ; tu ne peux t’empêcher de trouver absolument dégoûtante l’idée que l’union d’elfes dans les tréfonds du Puy d’Elda ait pu donner lieu à descendance. Ou peut-être dégoûtant n’est-il pas le mot juste. Qu’un enfant ne voie le jour dans des conditions pareilles serait plutôt…

Tragique.

Alors elle était l’un de ces jeunes Souffles, dérobés par les Sombres durant les temps de leur présence sur vos territoires. Ô combien conflictuelles étaient les émotions nées en toi lorsqu’elle avait confié s’être faite enlever. Pouvais-t-on décemment être soulagé qu’une Sylvaine ait été arrachée à son foyer et contrainte à la métamorphose en un sujet d’Elda ? Pouvait-on décemment trouver délivrance dans l’idée d’avoir autrefois perdu une jeune Âme ?

Peut-Être

Tu n’y pouvais rien. Ainsi étais-tu. Après tout le mal n’était-il pas moins douloureux que le pire ? Même pour elle, à ne pas être l’engeance de sous les cheminées du Vatna il y avait un espoir. Un espoir de retrouver d’anciennes attaches. Une famille, des amis perdus, des connaissances… d’autant plus qu’elle semblait jeune sans trop l’être. Assez jeune pour n’avoir probablement perdu que peu de proches aux folies de la guerre et de l’âge. Assez âgée pour s’être construite auprès d’autres et être aujourd’hui reconnue. Par l’amour de La Mère, tu espérais que ses dires ne soient que vérité, et avec un peu de chance, elle trouverait sa place sans avoir à subir le même sort qu’Eraïos et Ciryië avant elle.

- Aucune idée de ce qu’avait été ton nom en ce temps-là, ou d’où tu viens ? au fur et à mesure, ton timbre se fait plus avenant Artiön, d’ailleurs. tu finis enfin par offrir un sourire Je m’appelle Artiön.

D’Alëandir ou d’Eraïson, probablement. Si elle avait effectivement été victime d’un rapt datant des alentours du précédent siècle, elle devait l’avoir été autour du lac d’Uraal. Et en ces temps-là, en dehors des soldats, il n’y a guère que les Lëandrins et certains elfes des Terres Ancestrales d’Ardamir qui se risquaient aux alentours d’Uraal.

Saletés tordues d’elfes noirs. C’est qu’en quelques siècles ils vous en ont infligées des blessures. Mais il semblerait que La Mère ait trouvé son temps dans les temps d’aujourd’hui. Que les vôtres commencent ainsi à vous revenir ne pouvait être anodin. Les conflits à venir ne t’en paraissaient que plus imminents.

Vous seriez bientôt testés. Tu en étais certain.

Les pupilles qui se dilatent, le regard sans point focal, une légère tachycardie, la respiration plus profonde, la mâchoire qui se relâche, le réflexe de déglutition qui s’éteint : symptômes de l’introspection. Aurais-tu été un mage de l’esprit que son voyage à travers ses souvenirs ne t’aurait probablement pas été beaucoup plus évident. Aurais-tu été un mage de l’esprit que tu aurais par contre probablement pu l’y accompagner, et l’aider à trouver ce qu’elle te semblait désespérément chercher.

De la même manière que ceux de Ciryië, ses souvenirs sont emmurés.

Certains, pas tous. D’apparence au moins, elle restait plus en possession de ses moyens que la petite mage d’ombre. Alors il suffisait de trouver des cavités, de faire preuve de logique, de contourner les barrières, et alors elle découvrirait probablement bien des choses sur elle-même sans avoir à forcer une quelconque forteresse mentale. Le temps viendrait cependant où le Siège deviendrait inévitable, mais ça… pour ça vous seriez là pour l’accompagner. Pour peu que ses apparentes intentions soient sincères.

- Pas vraiment. ton sceptre tourne entre tes doigts, et se pare de lueurs arcaniques Beaucoup d’entre nous apprennent la magie avec des précepteurs particuliers. beaucoup dont toi par exemple Mais on a aussi deux Académies de longue date. Une dans l’Ouest, et une dans la Capitale.

Tu laisses ton esprit vagabonder à moitié dans le concert d’essences vous entourant, te gorgeant de cette merveilleuse sorcellerie qu’était la vie elle-même. Et comme galvanisé par cette pulsation fondamentale, tu te permettais une intervention peut-être un peu plus délicate auprès de la rescapée.

- Si les Daedhels t’ont capturée il y a environ cent ans, alors il y a de forte chances que tu sois une Lëandrine, une elfe de la capitale. tu soupires Et vu comme tu es jeune, il y a de fortes chances que l’un de tes parents ait été un militaire. tu laisses un instant flotter le silence En ce temps-là les drows rôdaient autour de l’Uraal. Et en dehors des militaires il y a très peu d’elfes qui se sont retrouvés en position de les croiser. Les quelques rares rapts ont souvent pris pour cibles des convois de matériel destinés aux soldats, gérés par d’autres soldats et paramilitaires – en âge de partir sur le terrain. elle, il est impossible qu’elle ait été en âge de le faire dans le temps Les seuls exceptions à la règle étaient les familles des déployés, qui ont parfois pris le risque de faire le déplacement pour voir leurs aimés. ton sourire se fait mélancolique C’est un risque. On y a perdu des vies. tu clignes lentement des yeux, et les lumières autour de ton sceptre s’intensifient, tirant la couleur du métal du bronze vers l’or Mais parfois la séparation est un risque encore plus grand. tu ris doucement On est de grands sensibles, il paraît.

- Le fort ne devrait plus être bien loin.

Et effectivement, pour vous qui connaissiez les lieux, Wyslena approchait dangereusement. Quand l’inextricable canopée Ardamirie commençait à s’éclaircir, que les omniprésents chants d’oiseaux de la forêt commençaient à perdre en force, et que des semblants de sentes, conséquence du piétinement des régulières patrouilles commençaient à se dévoiler à vous, c’est que l’ancienne Cité de bordure n’était plus très loin.

- Encore quelques minutes.

Quelques minutes, c’est le temps que vous aviez passé dans le silence avant que les hauteurs de la forteresses ne se découpent à travers la végétation. La vérité, pas des hypothèses, c’est ce qu’elle voulait. Mais la vérité tu ne l’avais pas, alors à quoi bon ? Tu avais préféré te taire et prendre ton mal en patience. Là-bas un autre prendrait le relai, lui servirait de chaperon, la surveillerait. Là-bas un autre s’assurerait qu’elle ne mette en danger ni sa propre vie ni celle des autres, puis l’accompagnerait dans sa quête de vérité. Aujourd’hui tu n’avais pas le temps de paterner un second Eraïos.

- Voilà.

Des militaires. Beaucoup de militaires. Et des artisans affairés à servir la milice. À l’occasion, un prêtre. Un autre. Des Guides et des Voilés trahis par leurs atours. Des militaires, des artisans et des prêtres, c’est exactement ce qu’il faudrait à Cirincë pour s’avancer dans sa quête d’un passé oublié. Les sabots de la monture de l’intruse résonnaient dans les rues de la petite ville-forteresse. C’était malgré tout vers les immenses félins aux pattes longilignes que se tournaient la majorité des regards. Même après tout ce temps vécu avec eux comme partenaires, les fauves faisaient toujours leur petit effet.

- Si tu cherches la vérité, tout commence ici.

Quelques pas de plus des animaux, et tu sautais de selle, pour approcher de la rousse, et poser la main contre le flanc de son cheval. Ta paume flatte nonchalamment l’animal, traçant ton chemin à travers sa robe jusqu’à ce que tu ne te retrouves mis face à la jeune Cirincë.

- Les temples de La Voilée ton regard se tourne en direction d’un bâtiment décoré d’ornements bleutés, dont l’ouverture laissait comprendre l’intérieur parcouru de canaux et de bassins conservent les registres de toutes les naissances, morts et disparitions connues de Taledhels depuis des Cycles. tes yeux se posent sur tes camarades féliniers, puis reviennent vers Cirincë Avec un peu de chance, ils seront capables de retrouver ta trace. Et avec un peu plus de chance encore, entendre ton nom t’évoquera des souvenirs.

Pour retrouver des souvenirs perdus, ils pourraient aussi l’aider. Ils pourraient, si elle n’en avait pas peur, l’aider à briser la barrière mentale qui s’était érigée entre elle et son passé. Les prêtres de La Gardienne savaient mettre leur magie au service de la guérison des Souffles et des Esprits confus. Seulement, quand la magie devenait le premier médicament… non. Tu laisserais les Voilés décider par eux-mêmes de quand il serait judicieux de lui présenter cette option.

- Suis-moi. tes pas au lieu de te diriger vers le Temple de la Voilée s’écartent vers celui de La Mère On va te trouver quelqu’un pour te guider.

Une chance que parmi les Guides des Cités de frontières, ils soient nombreux les vétérans à la retraite.

Le vent n’a que bien peu d’effet sur toi, la langue ayant échappé d’entre les lèvres de l’étrangère par contre… elle aura suffi à te tendre la mâchoire. Ne pas t’emporter. Il ne te fallait pas t’emporter. Il ne leur fallait pas s’emporter. Ton regard se tourne vers tes frères d’armes, tes sourcils se froncent, un ordre silencieux est donné.

Soyez patients.

Qu’elle connaisse la langue de ses geôliers ne voulait pas dire qu’elle en soit toujours leur suppôt. Qu’elle connaisse la langue de ses geôliers était naturel lorsqu’elle s’était trouvée prisonnière de leur monde durant la moitié de sa vie. Vous ne pouviez pas lui en tenir compte. Vous ne deviez pas. Tu déglutis, ton visage redevient la mine affable que tu offris il fut un temps à un elfe échappé des terres humaines, et de Cirincë tes pupilles glissent vers sa monture, puis vers le lointain, avant de s’en retourner en direction de l’un de tes accompagnateurs.

- Tu l’emmènes aux étables ?

Un hochement de tête plus tard, et pressant légèrement l’équidé de la présence du fauve, ton compagnon de voyage guide l’animal en direction d’un endroit où l’on pourra s’occuper d’elle. Pauvre bête. Tu n’oses mêmes pas imaginer par quelles tribulations la jument a dû passer durant ses années formatives. Peu de chances que les Eldéens aient plus de considération pour leurs bêtes qu’ils n’en ont pour leurs propres congénères. Et leurs propres congénères étaient les premiers à souffrir de leurs mains.

- I Hall… tu réfléchis un instant, reprenant la marche par la même occasion I Hall est celle qui a permis que nous soyons toujours en vie toi et moi. ton regard se perd dans le lointain Après que Kÿria notre Mère nous ait fait, et obtenu qu’Elenwë nous accorde son Souffle, Tari – à qui tous les Souffles sont destinés – par amour pour les enfants de Sa Sœur, a promis à La Mère qu’elle ne viendrait jamais prendre nos vies. une moue plus sérieuse que de raison te saisit le visage Tari nous a offert l’éternité auprès d’I Ëmel. Et lorsque notre Souffle finit par fatiguer, et qu’inexorablement notre corps finit par le suivre, alors elle nous accompagne jusqu’à la dernière demeure. tu lèves légèrement le menton C’est elle aussi qui est la Gardienne des eaux. Certains disent d’ailleurs que ce sont les eaux qui porteraient les Souffles jusqu’au Senarda.

Face à vous, les bâtisses de Wyslena laissaient de plus en plus place à la verdure intérieure du fort. Le Sanctuaire du Kÿria approchait à grands pas.

- Mais même si cette partie ne devait être qu’une légende, l’eau a un véritable pouvoir sur les Souffles des vivants. Elle est au cœur des rites du culte. vos pas finissent par vous mener à l’orée du Sanctuaire, où ton regard cherche un visage connu. Hûlion ! tu hèles un grand elfe, qui vous rejoint d’un pas solide J’ai une échappée qui aurait besoin d’un guide qui a tes… compétences.

Pas besoin d’en dire beaucoup plus. L’ancien militaire se contenta de spartiates salutations, ses sourcils déjà froncés à l’idée d’avoir à potentiellement rejouer de la lame, même en tant que prêtre.

- Hûlion, enchanté. l’elfe offre une révérence un peu plus détendue à la rousse Il semblerait que nous soyons destinés à nous côtoyer quelques temps. À qui ai-je donc l’honneur ?

Il sourit, et son visage légèrement buriné par le temps et l’épreuve s’éclaircit. Voilà passée la première étape vers sa vérité.

- Alors pour l’instant, ainsi soit-il, Morna.

L’elfe se tourne dans ta direction, et hoche discrètement la tête, te laissant comprendre que la tâche était acceptée. Tu lui rends la pareille, et fais un pas en arrière, puis un autre. Le Guide est maintenant d’entre vous deux le plus physiquement proche de la rescapée Eldéenne. La passation est faite, et il ne reste plus qu’à l’acter.

- Heru Aran, le brun pose un poing contre son cœur La nouvelle protégée d’Anaëh est entre de bonnes mains. Si vous êtes ici, j’imagine que c’est parce que vos responsabilités vous appellent.

- C’est bien cela. tu souris Et il est temps que je leur réponde. tu te tournes vers la jeune rousse Hûlion se chargera de te guider à travers Anaëh, et de te réapprendre notre culture. Ecoute le bien, et fais-lui confiance petite. tu te tournes vers l’ancien militaire Quant à toi Hûlion, sois patient avec elle.

- Toujours.

Tu fais de dignes salutations aux deux elfes que tu abandonnes, pour regagner la porte de Wyslena, et rejoindre les deux féliniers avec qui tu l’as traversée. Vos réserves de vivres reconstituées et les félins reposés par ces quelques instants de pause, vous pourriez reprendre le chemin. Pas question de passer la nuit au fort. Le temps était trop précieux pour.

Hûlion

Surnoms & titres : ∅
Âge / Naissance : ~ 550 ans

Description :

• Taille : 2m09
  
• Couleur des yeux : Verts

Ancien pavois de Wirskeinfyl, Hûlion est un elfe de grande taille et de forte carrure. Sa peau très pâle, tranchant avec ses cheveux d’un noir de jais, l’ont toujours distingué du commun des elfes du Norn, généralement plus basanés et aux cheveux clairs.
Bien qu’elle ne l’ait pas départi de sa jeunesse, la guerre a définitivement laissé sa marque sur Hûlion. Son visage légèrement buriné, et sa peau en moult endroits épaissie par le frottement des habits de guerre ne sont rien devant les multiples cicatrices – de faible ampleur, heureusement pour lui – qui lui lacèrent l’épiderme.

Hûlion est exactement ce qu’il paraît au premier abord. Ou presque.
D’une rigueur toute militaire, et fortement attaché à la discipline, il n’est pas de ceux qui apprécient les manquements à l’étiquette. Pour autant, tout sévère qu’il est, Hûlion n’est en réalité pas de ceux qui se refusent à faire preuve de sympathie. Obéir au cadre imposé par sa compagnie, c’est s’obtenir un camarade détendu et loquace, mais surtout bienveillant. Mettre au défi son intransigeance cependant, c’est donner à l’elfe l’occasion de se montrer d’une extrême froideur. Et si l’entraînement militaire l’a rendu assez patient pour ne pas céder à la violence, il lui aura donné les clefs pour faire proprement usage de sa force.

Histoire : Wirskein d’origine, Hûlion a longtemps donné sa vie à l’armée. Cependant chez lui avec le temps, les guerres et l’horreur qui vient avec finit par naître une certaine lassitude. Fatigué de voir ses frères mourir, et considérant avoir assez versé de son sang, il prend sa retraite après la débâcle d’Ellyrion, pour offrir aux Guides du culte de Kÿria une alternative plus musclée à leurs enseignements. Devenu le conseiller des elfes récalcitrants et des vétérans fatigués, il a choisi d’œuvrer dans l’un des Sanctuaires à la frontière d’Anaëh sachant qu’il trouverait là plus que nulle part ailleurs des elfes à qui son approche pourrait être précieuse.

Relation avec le demandeur : ∅

Précision supplémentaires : ∅