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Sujet: Dans les méandres de son esprit | Artiön & Mac Mar 31 Mar 2020 - 22:00
Début de la 3ème ennéade Hiver, Verimios de l’An 17:XI
Le froid. Il faisait si froid. Ciryië avançait en grelottant, peu habituée qu’elle était aux températures si basses et au vent qui s’infiltrait à travers ses vêtements. Elle portait pourtant une couche de plus que ses camarades mais cela n’était pas suffisant. Son corps avait si longtemps connu la chaleur du Puy… Ithri’Vaan et Ardamir offraient un climat déjà bien plus doux à ses yeux. Mais les montagnes de Daranovar n’avaient rien en commun avec Elda. Là-bas, il n’y avait pas de saison. Ici, non seulement elles existaient mais l’hiver y était synonyme de neige et de glace et il n’y avait pas de lave pour réchauffer l’atmosphère ambiante. Les membres du petits groupe regardaient leur protégée avec un air désolé mais ils ne pouvaient pas s’en aller. Pas maintenant.
Partis à la fin du mois précédent depuis les terres d’Ardamir, ils avaient pris le parti de commencer par explorer les terres plus au Nord pour rejoindre lentement mais sûrement l’Epine dorée avant de traverser les régions qui bordaient la mer. Les premières Noss qu’ils avaient rencontré de leur avaient rien appris. Aucun d’eux ne pouvait rien pour la petite elfe au regard vide de toute émotion. A moins que le discours de ses guides n’ait pas su les convaincre. Certains clans ornedhels pouvaient se montrer des plus farouches quant à la défense de leur secret qui ne devait pas être révélés à la légère. Pourtant, à tous, les Mirthil’Di leur avait raconté l’histoire de l’enfant Taledhelle enlevée à sa famille, torturée dans le plus sombre des cachots d’Elda et aujourd’hui privée de sa propre vie. Après ce qu’elle avait fait pour l’une des leurs, elle méritait de retrouver non seulement ses souvenirs mais aussi la possibilité de vivre, tout simplement. Cependant, la chance semblait être avec eux. Sur ces terres montagneuses, l’histoire de Ciryië toucha son auditoire. Quelques Noss avaient acceptés de leur parler d’une potentielle solution. Quelque chose qui, peut-être, pourrait offrir à l’ancienne esclave la vie dont elle était privée. Mais ce n’était encore qu’une éventualité. Seul un clan saurait le leur confirmer. Seul un clan pourrait le lui accorder. Seul un clan connaissait le chemin… Il leur fallait donc passer par eux.
Aussi, les trois Mirthil’Di, la petite mage des ombres et sa mère arpentaient à présent les flancs de la montagne, suivant les indications qui leur avaient été données. Ici, la forêt était moins dense que dans la vallée mais les autochtones n’avaient pas besoin qu’elle soit plus épaisse pour savoir s’y dissimuler. Les Noss en avaient bien conscience et avançaient en restant vigilants. Les deux taledhelles se tenaient au milieu de ce trio dont deux étaient armés d’arc et celui en tête d’une épée. Cependant, la lame était au fourreau et les flèches toujours dans leurs carquois. La région n’était pas connue pour être particulièrement vindicative envers ses visiteurs et ils ne voulaient pas attirer leur méfiance. Il était évident qu’ils ne faisaient pas que passer. Ils progressaient sans montrer la moindre intention de s’en aller trop avant. Leur pas était lent et leurs regards guettaient le moindre mouvement, la moindre présence. Ils ne marchaient pas vers une autre direction : ils étaient arrivés et cherchaient leur destination finale.
On ne trouve pas les Noss. Ce sont eux qui vous trouve. Tout anedhel sait cela.
Artiön Laergûl
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Sujet: Re: Dans les méandres de son esprit | Artiön & Mac Mer 1 Avr 2020 - 4:42
À qui en connaissait les angles et les aspérités, les affleurements rocheux des plateaux de Daranovar étaient une cache aussi providentielle que pouvaient l’être les branches des gigantesques arbres d’Ardamir. Et les affleurements rocheux des plateaux de Daranovar, peu de Souffles les connaissaient mieux que les elfes du Lantaluïme. Vêtus de cuirs pâlis au point d’en être devenus du même beige que les pierres abondant en ces lieux, et portant au dos des fourrures aussi blanche que la poudreuse couvrant déjà les hauteurs, les chasseurs du Lantaluïme étaient à l’affut.
Ils étaient à l’affut de proies au départ. En cette période de l’année, la route qu’ils surveillaient devenait le lieu de passage de nombre de vieux cerfs, pour lesquels la période des amours aura été infructueuse. Des proies faciles. Des proies ayant déjà fait leur part dans le Cycle de la vie. Des proies qui ne viendraient jamais si une présence menaçante venait leur couper la route… Cinq Anëdhels. Des voyageurs, très certainement. Leurs habits n’étaient pas faits des essences locales. Pas des Taledhels. Les Taledhels ne portaient pas ce genre de marques sur la peau. Ces marques en particulier, ces cheveux couleur d’automne, c’étaient les marques des Mirtil’Di. Les marques d’un clan respecté dans l’entièreté dans la forêt… mais qui venait tout de même de ruiner leur chasse.
Pourquoi ? Les deux archers attendirent de le découvrir. Prêts à suivre le flanc de falaise pour discrètement pister les intrus, ils s’étaient finalement retrouvés immobiles. Aussi immobiles que ceux qui les avaient interrompus. Pourquoi ? Les deux archers attendirent de le découvrir. Confortablement – du moins ils l’auraient bien voulu – installés dans leur cache, les yeux rivés sur le petit groupe en contrebas.
Et rien ne se passait.
Le petit groups semblait attendre. Attendre quoi ? Ils ne le savaient pas. Mais ils attendaient. Ils attendaient tandis que les chasseurs attendaient qu’ils aient fini d’attendre. La défi de patience était lancé. Et il ne leur était pas favorable. Parce qu’ils finiraient par avoir faim, les chasseurs, et leur clan aussi, si les étrangers restaient plantés au milieu de la route de leur gibier. Il attendirent longtemps, beaucoup trop longtemps, avant de réaliser qu’il leur faudrait peut-être prendre les choses en main.
Le premier des deux chasseurs traversa la rocaille enneigée de trois bonds, pour venir se planter face à l’épéiste roux. L’autre resta en arrière, laissant à son camarade le loisir d’ouvrir le dialogue ou le combat. L’arc en main plutôt qu’au dos il attendait à nouveau. Il serait plus utile depuis là.
- Qu’est-ce que vous faites plantés au milieu d’une route de chasse ? le jeune chasseur lance d’une voix agitée Vous allez faire fuir le gibier !
Pas la plus délicate des introductions, mais au moins la question avait le mérite d’avoir été posée.
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Sujet: Re: Dans les méandres de son esprit | Artiön & Mac Mer 1 Avr 2020 - 9:08
Le temps s'écoulait lentement et rien ne se passait. Ciryië grelottait de plus en plus sans pour autant se plaindre. Elle avait enduré bien pire que cela. Mais sa mère ne pouvait s'empêcher de s'inquiéter pour elle. Elle savait pourquoi ils étaient là, pourquoi ils attendaient, mais cela commençait à prendre bien trop de temps à son goût. Elle s'approcha alors de l'ornedhel à l'épée.
-Yesevelas, pensez-vous que nous devrons encore attendre longtemps ?
Le Mirtil'Di se retourna vers elle et posa sur la Taledhelle un regard désolé.
-Pour être honnête, je n'en sais rien. Ça peut prendre encore une minute comme une heure. Tout dépend de leur patience. -Pourrions-nous au moins allumer un feu ? -Nous sommes sur leur territoire de chasse. Répondit-il comme si cette réponse pouvait avoir un sens pour quelqu'un qui n'avait quitté une cité que pour se rendre dans une autre. L'ornedhel comprit bien vite sa méprise mais il ne pouvait prendre le temps de lui expliquer les bases de la survie des Noss. Il trouva donc une réponse bien plus rapide. Si nous ne voulons pas nous attirer davantage leurs foudres, pas de feu.
Maliss soupira avant de retourner auprès de sa fille et Yesevelas la regarda s'éloigner dans rien dire. Demeurer sur la piste des cervidés aurait déjà tendance à irriter leurs hôtes. Y poser les bases d'un camp serait pire encore. Cela lui semblait si évident mais il pouvait comprendre qu'une Taledhelle n'ait pas cette présence d'esprit. S'il devait se retrouver immerger dans le monde des cités, il commettrait probablement des erreurs lui aussi. Le Mirtil'Di se savait observé. Les voix de la forêt lui disaient qu'ils n'étaient pas seuls mais ils attendaient. Ils attendaient que les chasseurs viennent à eux, qu'ils daignent entrer en contact avec eux. Et même s'ils avaient voulu les dénicher, les techniques de camouflages n'étaient pas les même en montagne qu'au cœur d'Anaëh.
La patience finit par leur apporter ce qu'ils attendaient. Deux silhouettes sortirent des ombres et de la neige. Yesevelas attira l'attention des siens à l'aide d'un petit sifflement convenu. Les archers se tournèrent vers les nouveaux venus, conservant un œil averti autour d'eux. Et le dialogue s'engagea entre les deux ornedhels.
-Nous sommes désolé pour le dérangement. Nous ne faisions qu'attirer votre attention. Répondit-il, un sourire amical étirant le coin de ses lèvres. Dans sa posture, il ne voulait pas que l'on puisse y lire une quelconque velléité. Il se présentait humblement devant eux afin de leur faire savoir la raison de leur intrusion plutôt inhabituelle. Nous sommes à la recherche des Lirfelû. On nous a laissé entendre qu'ils pourraient nous aider.
D'un geste de la main, il désigna les deux femmes qui l'accompagnaient et qui ne faisaient visiblement pas partie de son clan. Si les peaux qu'elles portaient étaient à eux, leurs vêtements étaient ceux de Taledhelles. L'une était grande et son corps encore gracieux était d'une certaine sécheresse qui trahissait son âge. Elle posa ses yeux sur celle qui se tenait à ses côtés. Petite, semblable à une enfant, ses traits étaient aussi beaux que vides de toute expression. Elle posait sur les nouveaux venus un regard impassible et dépourvu de la moindre émotion. Une véritable statue capable de respirer et de se mouvoir. C'était pour elle qu'ils étaient ici.
Artiön Laergûl
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Sujet: Re: Dans les méandres de son esprit | Artiön & Mac Jeu 2 Avr 2020 - 23:19
Agacés, extrêmement agacés, les deux chasseurs choisirent malgré tout de mettre leur colère de côté.
Un jour, les Voies d’I Ëmel les perdront.
En attendant, la détresse qui devait être celle d’elfes ayant choisi de se planter au milieu de sentiers enneigés à la recherche d’aide était suffisante à assez les attendrir pour qu’ils s’astreignent à apporter leur assistance. Mais leur assistance à qui, et à quoi exactement ? Les flèches retrouvèrent leur place dans le carquois de l’archer resté en retrait, et l’arc retrouva sa place à l’épaule. Le grand blond s’avança d’un air inquisiteur en direction de son camarade, et les deux ensemble, de leurs regards trop semblables – trahissant leur parenté – jaugèrent ceux à qui ils faisaient face.
- Vous vouliez de l’aide pour quoi exactement ?
À qui et à quoi ? La réponse était finalement bien plus simple qu’ils ne l’auraient pensée. Il n’y avait finalement pas besoin d’être le plus grand des détectives – bien qu’entre chasseur et détective, la frontière soit fine – pour le comprendre. Ces yeux vides. Cette vieillesse de l’âme dans un corps d’apparence si jeune… et pourtant si abîmé… Une maladie du Souffle. Impossible qu’il en soit autrement. Et s’il ne s’agissait pas d’une maladie du Souffle, pourquoi au juste la rumeur les aurait-elle conduite vers les Lirfelû ?
- C’est elle ?
Seulement, le parachèvement d’un Souffle avait un prix. Un prix que les Lantaluïme ne connaissaient que trop bien. Le parachèvement se gagnait au prix du sang et de la sueur, de l’épreuve et de la souffrance. Le parachèvement n’était pas un remède aux maux du Souffle. Au contraire…
Mais les étrangers ne connaissaient que les légendes des survivants.
Les étrangers étaient aveugles devant ceux que leurs maux avaient mené à la perdition.
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Sujet: Re: Dans les méandres de son esprit | Artiön & Mac Ven 3 Avr 2020 - 20:18
Devant la réaction des chasseurs, les archers Mirtil'Di agirent en miroir. Les arcs en main, bien que non armés et non bandés, passèrent dans leurs dos. De ce qu'ils pouvaient en comprendre, ils étaient arrivés à destination. Certes, leur entrée en matière n'était pas la meilleure qui soit pour se faire apprécier mais leurs intentions étaient louables et ils avaient eu raison de penser que cela ne leur fermerait pas le cœur de leurs hôtes. La réponse que leur offrit Yesevelas était certes sommaire mais elle avait le mérite d'être claire. Il n'y avait nul besoin de mots pour comprendre la gravité de l'état de la jeune fille qu'ils escortaient. Cependant, un peu d'explications supplémentaires ne serait pas un luxe pour leur permettre de mieux appréhender la situation et l'épéiste n'empêcherait pas les chasseurs d'approcher leur protégée pour l'étudier s'ils en ressentaient le besoin.
-Elle s'appelle Ciryië. Le sombre peuple l'a enlevée alors qu'elle n'était qu'une enfant. Elle a subi plus de souffrances que je n'en connaîtrai dans toute ma vie, même si elle devait durer plusieurs millénaires. Ils l'ont modelée comme ils le souhaitaient si bien que son corps vit mais pas son Souffle. Les seules émotions qu'elle connaît sont la peur et la colère et elle est incapable d'apprendre notre langue alors qu'elle en maîtrise parfaitement deux autres.
C'était un récit plutôt bref du siècle d'esclavage qu'elle avait connu, du conditionnement dont elle avait fait l'objet et des séquelles qu'elle en avait gardé. Mais il n'allait pas s'étendre, pas ici et pas maintenant. Il ne voulait leur donner que les éléments nécessaires qui leur permettraient de juger si le secret qu'ils gardaient permettait de la guérir ou non.
-Les Taledhels tentent de la soigner mais leurs progrès sont si infimes qu'il faudra des siècles avant qu'elle n'esquisse son premier sourire. Malgré tout ce qu'elle a enduré, c'est une jeune fille curieuse et charitable, elle ne mérite pas de vivre ainsi.
Si on peut appeler ça "vivre"... Se dit-il mais il garda cette réflexion pour lui. Il n'imaginait pas ce que cela pouvait faire d'observer un monde sans parvenir à le comprendre, sans pouvoir s'intégrer, non pas parce qu'on ne le voulait pas mais parce qu'on en était incapable. Ciryië ne s'en rendait pas totalement compte de la même manière qu'un fou ignorait qu'il était fou. Cela voulait-il dire qu'il ne fallait pas chercher à soigner un fou pour autant ? Mais une autre question demeurait.
-Dites-nous seulement si vous pouvez l'aider. Si la réponse est non alors nous passerons simplement notre chemin. Dit-il paisiblement.
Ils les avaient déjà dérangés dans leur chasse, il ne voulait pas s'imposer plus que nécessaire. Ces ornedhels semblaient porter une réelle attention à la situation de la jeune fille et n'étaient en rien vindicatifs à leur égard, il ne ressentait donc pas le besoin d'insister outre mesure pour faire entendre leur message. Son attitude était d'ailleurs aussi détendue qu'elle était grave et sincère. Il se souciait réellement de l'avenir de cette jeune fille dont le destin semblait lui tenir à cœur.
Artiön Laergûl
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Sujet: Re: Dans les méandres de son esprit | Artiön & Mac Ven 3 Avr 2020 - 21:39
La séparation. La souffrance. L’aliénation. La destruction du Soi. La construction d’une autre. C’est ce qu’avait connu la pauvre Ciryië. Comme d’autres infortunées avant elle. Comme certainement d’autres dans le futur. À l’écoute du Mirtil’Di, les visages et les corps des deux chasseurs ne purent retenir d’exprimer tout le dégoût qui était leur. Dégoût non pas dirigé envers la pauvre victime qui leur faisait face de ses yeux éteints, mais envers les infâmes créatures qu’étaient les Eldéens. À eux pour qui la perfection du Souffle tenait une place aussi importante, l’idée d’une Âme brisée et transformée en simple objet était d’autant plus écœurante. Alors si le Mirtil’Di disait vrai – et nul doute qu’il dise vrai – il était de leurs devoirs en tant que Gardiens d’Anaëh de faire tout ce qui était en leur pouvoir pour aider « l’enfant. »
- Peut-être que nous pouvons. le premier chasseur répond du tac au tac Mais ce ne serait pas sans risques.
- Elle pourrait mourir. l’autre renchérit Dans d’atroces souffrances.
Ou pire. Elle pourrait se perdre. Et personne ne sait ce qu’il arrive aux perdus. Certains des Anciens racontent que leur confusion nourrit le Labyrinthe, faisant de chacun des échecs des Lirfelû une difficulté de plus pour leurs successeurs. D’autres les décrivent au contraire comme une aide souffreteuse, condamnée à soutenir ceux qui passent après, pour ne pas qu’ils se retrouvent comme eux éternellement condamnés à subir le pire d’eux-mêmes.
- La Shaman et la Prime-Sorcière sauront mieux la conseiller que nous.
- Si elle est prête à être éprouvée.
Utiliser le Secret pour guérir plutôt que pour sublimer… le clan l’avait déjà fait par le passé. Le clan en gardait encore aujourd’hui de grandes histoires. Des légendes et des contes que l’on ne partage pas avec les étrangers. Des légendes et des contes qui sont leur folklore. Leur passé. Leur intimité. Des légendes et des contes d’estropiés au Souffle malade mais à la volonté formidable. Des légendes et des contes d’elfes dévorés par leur propre personne. Autant de belles histoires que de terribles avertissements.
- Vous nous suivez ?
Autant de belles histoires que de terribles avertissements qu’il n’appartenait qu’à Prime-Sorcière et Shamane.
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Sujet: Re: Dans les méandres de son esprit | Artiön & Mac Sam 4 Avr 2020 - 11:40
Ciryië suivait la conversation du regard, incapable de traduire ce qu'il se disait. Et même si elle avait pu comprendre les mots, son expression n'aurait pas été différente de celle qu'elle arborait maintenant. Elle n'entendait rien à leur langage et elle ne savait pas non plus interpréter celui du corps. Elle voyait défiler sur leurs visages les expressions liés à leur dialogue mais cela ne lui donnait malheureusement aucun élément pour imaginer les propos qui se tenaient. Tout juste comprit-elle que l'on parlait d'elle, parce qu'elle était l'objet de ce voyage et parce que les regards sur elle se succédèrent et se multiplièrent. Finalement, Yesevelas tourna une dernière fois ses yeux vers elle sans un mot avant de hocher la tête. Les chasseurs leur montrèrent leurs dos et s'éloignèrent. Et tout le groupe se remit en marche. La petite elfe suivit le mouvement tout en levant ses iris claires vers sa mère.
-Que se passe-t-il ?
Un soupçon de surprise traversa l'air grave de Maliss. Elle avait bien conscience que, même s'ils trouvaient la solution miracle, soigner sa fille ne se ferait pas en douceur. Cependant, les propos des onedhels n'avaient pas manqué de l'inquiéter davantage encore. Elle observa l'expression impassible de son enfant qui l'interrogeait sur ce qui venait de se dire à ses dépends. Elle pourrait mourir, oui. Mais qu'est-ce qui lui serait le plus insupportable ? De la perdre définitivement ou de continuer à la voir évoluer plus lentement qu'elle ne vieillissait ?... Question épineuse.
-Ils nous conduisent près de celles qui prennent les décisions dans leur clan. -"Qui prennent" ? Dit-elle d'un ton monocorde. Et la taledhelle millénaire de mettre du temps avant de comprendre où se trouvait son questionnement. -Oui. Dans les cités, c'est le Protecteur qui décide, après avoir entendu les avis de ses conseillers. Mais, dans certains clans, ils sont plusieurs à décider. Chez eux, il s'agit d'une Shamane et d'une Sorcière. -Des mages. Conclut la petite elfe. -C'est un peu plus compliqué que ça... Sourit tristement Maliss qui n'avait pas le cœur à se faire plus explicite pour le moment sur un sujet qu'elle maîtrisait plutôt mal.
Aussi, le reste du trajet se fit-il en silence, les cinq intrus suivants leurs guides sans un mot de plus. L'esprit préoccupé pour certains. L'habitude pour Ciryië. Marcher avait au moins le mérite de réchauffer a minima sa frêle silhouette, même si le vent s'engouffrait toujours sous ses vêtements.
Artiön Laergûl
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Sujet: Re: Dans les méandres de son esprit | Artiön & Mac Sam 4 Avr 2020 - 16:20
À qui n’est pas habitué à les pratiquer, les affleurements rocheux des Hauts-Plateaux du Norn sont traîtres, particulièrement lorsque le manteau blanc de l’hiver s’épaissit, et que la neige en dissimule les fêlures. Les chasseurs avancent avec une précaution de tous les instants, rendue bien trop discrète par l’expérience qui est la leur. Plusieurs fois ils se trouvent forcés de stopper leur suite dans son élan, de la forcer à un détour, qu’il soit court ou long, trop inquiets de ce que le risque n’en vaille pas la chandelle, et que dans leur ignorance des obstacles invisibles, les étrangers ne se blessent.
Ce qui aurait pu n’être qu’un peu plus d’une heure de trajet se transforma en une longue ascension de plateaux. Et le soir finit par poindre à l’horizon. Ce théâtre se serait-il joué un peu plus tard que les journées déjà courtes auraient rendu l’ascension plus périlleuse encore. Mais ils y étaient. La tanière actuelle des Lirfelû. Grotte à flanc de falaise, le sanctuaire n’était pour le moins pas le plus facile à rallier. L’aide et la guidance des deux chasseurs se retrouva précieuse aux elfes des forêts, qui au moins dans le cas des Ornedhels, finirent par trouver dans la danse de rocher en rocher un substitut à leurs chorégraphies arboricoles. Tous cependant – avec plus ou moins d’efforts – finirent par arriver à bon port.
- Attendez à l’entrée. les chasseurs ordonnent à leur suite On s’occupe d’aller les chercher.
Quelques dizaines de minutes à attendre. Quelques dizaines de minutes durant lesquelles les étrangers purent tant observer qu’être observés par les elfes du clan de sorciers. Des montagnards, à l’image des Citadins du même protectorat… ou plutôt étais-cent les Citadins du Protectorat qui étaient à leur image. Pour des Ornedhels ils étaient grands, rivalisant aisément de taille avec majorité de Taledhels. Leurs peaux rôties par le soleil des sommets prenant des teintes mordorées, à l’image des rochers des Norn. Les cheveux clairs pour la majorité, allant du blanc au blond sale. Les oreilles particulièrement longues. Les épaules larges, les jambes galbées et les bras forts, transformés par la vie qu’ils mènent dans cet environnement difficile. Et tous, tous marqués de différents tatouages faits d’autant d’éléments naturels que d’obscures symboles.
- Les Lantaluïme disent que vous vouliez nous voir. une voix suave résonne depuis les galeries Pour une petite que les Taledhels n’arrivent pas à guérir.
- J’espère qu’ils vous ont aussi dit prévenu qu’il y a un coût à tout ça une voix grave et sèche renchérit Et c’est elle qui devra le payer. Seule.
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Sujet: Re: Dans les méandres de son esprit | Artiön & Mac Sam 4 Avr 2020 - 20:57
Yesevelas avait eu raison d'attirer l'attention des chasseurs plutôt que de chercher leur campement. Si les Noss étaient doués pour ne laisser aucune trace derrière eux afin de ne pas être suivi, tous ne savaient pas comment vivre dans les différents climats et terrains qu'offrait Anaëh. Aussi les Mirtil'Di auraient-ils été bien incapables de dénicher la tanière des Lirfelû sans aide. Ils n'auraient pas davantage pris le risque d'escalader les rocheuses. Sans guide, cela se serait révélé bien trop dangereux pour une chance de réussite bien trop faible. Celle qui peina le plus dans cette ascension fut bien évidemment Maliss. Elle n'avait sans doute jamais produit autant d'efforts physiques que ce jour-là. Son âge lui avait fait perdre souplesse et agilité tandis que sa fille évoluait avec une aisance plutôt sidérante à ses yeux. Elle comblait toutes ses propres lacunes de part sa jeunesse et son corps fraîchement remis à neuf par la bienveillance de quelques mages. Cela eut au moins le mérite de la réchauffer pleinement.
Arrivé à bon port, elle ne tarda cependant pas à remettre la couverture qu'elle avait abandonné pour la montée, autant pour ne pas être gênée que parce qu'elle n'en ressentait plus le besoin. La petite elfe n'aurait su dire ce qui était pire : constater les regards qui se posaient sur leur groupe ou ne pas pouvoir comprendre ce que les Noss pensaient de leur présence. Les Mirtil'Di étaient parfaitement détendus, n'hésitant pas à incliner la tête pour saluer quelqu'un passant près d'eux. Quand les deux voix grondèrent soudain, les cinq étrangers se tournèrent vers leur source. Yesevelas se tenait une fois de plus en première ligne. D'un geste de la main, il invita Ciryië à venir se positionner à ses côtés afin que les deux femmes puissent la voir.
Ainsi donc, ceux qui les avaient mené jusqu'ici n'étaient pas du clan des Lirfelû. Ils s'étaient pourtant inclus dans leur réponse au sujet du secret qui pourrait aider leur protégée. C'était intéressant mais il prendrait le temps de s'interroger à ce sujet plus tard. Pour l'instant, il devait encore régler la question de l'épreuve que la petite mage des ombres aurait à passer et de ce fameux prix qu'il fallait régler.
-Ils nous ont parlé d'une sorte d'épreuve. En quoi consiste-t-elle exactement ? Et de quel coût s'agit-il ?
Dans leur groupe, ils étaient tous d'accord pour dire que Ciryië était capable d'endurer beaucoup de choses. Les souffrances physiques n'étaient pas une difficulté pour elle. Quant à son esprit, c'était plus compliqué à dire. La magie ne pouvant l'aider, seules les évaluations basiques permettaient de se faire une idée de son cas. Alors que certains sujets pouvaient rapidement l'ébranler, elle demeurait totalement insensible à d'autres. Et puisque c'était son mental la source du problème, ses réactions face à ce qu'elle risquait de subir étaient imprévisibles. Cependant, la préparer à ce qui l'attendait pourrait l'aider. Si leurs hôtesses acceptaient de leur en parler au préalable, bien sûr.
Artiön Laergûl
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Sujet: Re: Dans les méandres de son esprit | Artiön & Mac Dim 5 Avr 2020 - 17:51
- Vous en savez déjà bien assez. la voix de la shamane tonne à nouveau Le reste du chemin c’est à la petite de le faire.
Elle fait un pas en avant, vers Yesevelas, pas vers Ciryië, et de son regard à la couleur d’une étrange profondeur elle le fixe. Droit dans les yeux. Sévère. Craintive. Protectrice d’un secret comme tous les Ornedhels savent les clans avoir. Ce qu’il demande, elle ne peut le lui donner. Ce qu’ils veulent pour la petite, ils prennent déjà un risque immense en se proposant de le lui offrir.
- Nos traditions sont d’ores et déjà brisées. Ne vous rendez pas coupables d’en avoir enterré le cadavre.
Les seuls étranger au clan ayant jamais été accepté aux portes du Labyrinthe portaient le sang des Lirfelû. Les seuls étrangers au clan ayant jamais passé l’épreuve n’étaient jamais que des descendants perdus, réclamés par La Montagne, et astreints au respect de leurs origines. Et ils étaient peu. Très peu. Des elfes des vieilles lignées de Lanthaloran. Des sorciers des vieilles lignées de Lanthaloran. Des sorciers puissants, dont les arcanes devaient pleinement revenir au service de la forêt.
Comme le veut la tradition
Mais elle… elle elle était une inconnue. Une inconnue en peine dont le sang ne les connaissait pas. Une inconnue en peine dont ils ne pourraient pas garantir le silence. Qu’elle obtienne victoire face au Labyrinthe et ils seraient à la merci de La Montagne, et des souvenirs qu’elle aura bien voulu laisser à la jeune blessée. Qu’elle obtienne victoire face au Labyrinthe et qui sait si leur secret en resterait un ? Qui sait si elle n’entraînerait pas la fin de leur clan ? Qui sait si elle n’emmènerait pas d’autres jusqu’à la Porte, pour en conduire autant à la perdition qu’elle aurait convaincu de Souffles dont ce n’était pas là la vocation ?
- Nous pouvons tenter de l’aider. la Prime Sorcière s’avance à son tour, de sa démarche gracile au point d’en être tentatrice Mais pour cela il faut que vous nous fassiez confiance. Nos secrets doivent rester nôtres. La petite devra faire son chemin seule avec nous. Et c’est aussi seule qu’elle devra porter le poids du silence.
La grande blonde s’agenouille, portant son visage à hauteur de celui de celle au Souffle blessé. Elle sourit. Elle réfléchit. Elle pense. Elle se pose la question de si le sang trahira l’enfant. Puis son visage se relève en direction des adultes.
- Le Choix est le vôtre. Puisse I Mîngely le guider.
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Sujet: Re: Dans les méandres de son esprit | Artiön & Mac Dim 5 Avr 2020 - 19:40
Yesevelas avait incliné la tête vers l'avant en signe d'acceptation. Il n'avait nullement l'intention de mettre à mal leurs traditions. Il comprenait la valeur de chaque secret détenu par les Noss. Sa question se voulait innocente et guidée par l'inquiétude qui était la sienne au regard de tous les avertissements qui leur étaient faits depuis plusieurs heures. Il ne s'attendait pas à une réponse franche mais au moins à quelques mots, même énigmatiques. Un indice sur ce qui attendait la petite elfe. Cependant, il n'y aurait rien de tout cela et il ne leur en tiendrait pas rigueur. Il acceptait, tout simplement. Ce clan n'était certes pas le sien mais il reconnaissait néanmoins l'autorité de la Shamane et de la Prime Sorcière et entendait leurs arguments.
Ciryië observait les deux femmes en silence, toujours inconsciente de ce qu'il ce disait exactement. Une d'elles se mit à sa hauteur et, puisqu'elle n'avait nullement l'intention de la toucher, elle demeura immobile. Elle soutint son regard sans la moindre difficulté, attendant simplement qu'elle ait fini de l'observer. Elle ne pouvait que supposer qu'il s'agissait de l'une des mages dont sa mère lui avait parlé. Si elle ne se sentait nullement impressionnée par un Roi, il en était de même pour une manipulatrice des arcanes de la forêt. A ces yeux, tous les êtres étaient semblables et elle n'avait appris à craindre qu'une seule personne. Une personne qui ne pourrait plus jamais lui faire de mal.
Finalement, lorsque le silence vint, la mage des ombres se tourna vers Yesevelas. Elle lui parla en olyian et sa mère se chargea de faire la traduction.
-Elle demande si elles sont d'accord.
Le Mirtil'Di retint un soupir. Il ne savait pas vraiment comment lui répondre. La situation était un peu compliquée. Et si la petite elfe ne faisait montre d'aucune espèce d'appréhension, il sentait l'angoisse dans le regard et l'attitude crispée de Maliss. Mais ce n'était pas à eux de choisir. Ciryië était capable de prendre ses propres décisions et, puisqu'elle allait risquer sa vie, autant qu'elle soit préparée à la donner.
-Vous pouvez lui expliquer ? Demanda-t-il à la Taledhelle. Cette dernière hocha la tête et tendit une main vers sa fille afin de l'inviter à la rejoindre. Lorsque l'enfant quitta son côté, Yesevelas se tourna de nouveau vers les deux Lirfelû, l'air grave. J'espère que l'un des vôtres parle la langue que l'on entend à l'Ouest de l'Olyia. Sinon, j'ai bien peur qu'elle doive se passer de vos conseils...
Ce n'était pas un avertissement ou une tentative de les faire changer d'avis au sujet de leur secret, seulement un constat. Leur protégée ne connaissait pas un seul mot elfique, pas même bonjour et merci. S'il le fallait il se tenait prêt à leur expliquer que son esprit avait toujours été fermé à un tel apprentissage alors qu'elle était parfaitement capable de comprendre et d'intégrer d'autres informations. Le sombre qui l'avait rendue ainsi avait sans doute fait en sorte de couper tous ses liens avec Anaëh et de les lui rendre inaccessibles.
Derrière lui, Maliss s'était accroupie devant sa fille. Elle avait manqué la toucher mais s'en était retenue à la dernière seconde devant son mouvement de recul.
-Ces femmes pensent qu'elles peuvent t'aider et elles sont d'accord pour le faire. Seulement, ce qu'elles te proposent n'est pas sans risque. C'est même très dangereux. -Pourquoi ? -Justement, nous n'en savons rien et elles ne veulent pas nous le dire. Les Noss ont des secrets et n'en parlent à personne pour mieux les protéger. -Mais elles me le diraient à moi ? -Elles y sont bien obligées pour te soigner. Mais elles n'accepteront de le partager avec personne d'autre parmi nous. -J'irais toute seule. Conclut la petite elfe. -Oui. Répondit gravement sa mère. Elle hésita, cherchant en elle la force de prononcer les mots qui allaient suivre. Ciryië... Tu pourrais ne jamais revenir.
C'était la meilleure alternative qu'elle ait trouvée pour ne pas utiliser le mot qu'elle redoutait tant. Trop des siens l'attendaient déjà au Senarda. Elle ne voulait pas qu'il y en ait une de plus... Mais ce n'était pas à elle de décider, elle avait été privée de cette possibilité trop longtemps. Elle devait reprendre sa vie en main et cela passait par ce genre de décision. Le silence se fit très lourd aux yeux de Maliss qui comprenait que son enfant était en train de réfléchir. Et ce fut elle qui le rompit.
-Je suis revenue du plan des ombres. Je peux bien revenir de là-bas.
Toute autre personne comprenant le sens des expressions aurait simplement dit "j'ai connu pire", mais Ciryië ignorait les métaphores et autres tournures de phrases alambiquées. Elle demeurait factuelle en tout instant et, si ce qu'elle s'apprêtait à vivre n'avait rien de commun avec les tortures de Don'dar et de son ami, elle savait qu'elle était capable d'endurer bien des maux. La Taledhelle se força à lui sourire, même si elle savait que cela ne voulait rien dire pour sa fille. Retenant un sanglot, une larme perla malgré tout sur sa joue.
-Souviens-toi... ce que t'a dit Ashera. Accroche-toi à ce qui te tient le plus à cœur. Et tout ira bien.
Artiön Laergûl
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Sujet: Re: Dans les méandres de son esprit | Artiön & Mac Mar 7 Avr 2020 - 12:49
Un pas de plus de la shamane, manière de s’interposer sans réellement le faire entre la petite et ses gardiens. Les yeux violacés glissèrent de l’une à l’un, puis de l’un à l’autre. Il était temps maintenant. Temps qu’il s’en aillent. Temps que la petite soit mise à l’épreuve, compréhension ou pas des vieilles langues d’Anaëh.
- Si elle n’entend pas notre langue… les yeux de la Shamane se posent avec dureté sur Ciryië Et bien ce sera une épreuve de plus.
À l’opposé de celle aux iris de violine, celle aux yeux d’or s’écarte en direction des profondeurs des grottes, son regard toujours fixé dans celui de la Marchombre. Elle recule lentement, légèrement accroupie, ses mains tendues en direction de la petite elfe. Ses doigts l’appellent, l’invitent, tout dans le langage de son corps se veut le plus évident possible, car la Prime-Sorcière sait d’ores et déjà qu’elle n’aura jamais que celui-ci pour qu’elles se comprennent. Et que si jamais elles devaient se comprendre par le langage du corps, alors elle ne comprendrait jamais rien de l’enfant.
Comment guider un Souffle que l’on est incapable d’entendre ? Comment interagir avec un être dont on ne peut toucher les réactions, trop enfouies derrière les murs de peine érigés par ses bourreaux ? Les Lirfelû ne pouvaient se vanter le savoir. Au contraire, l’humilité les astreignait à confesser l’ignorance. Mais ils essaieraient. Ils feraient de leurs mieux. Pour l’enfant de La Mère souffrante. Pour sauvegarder cette infime par de l’Œuvre qu’était Ciryië. Pour qu’à I Ëmel soit rendue sa bien-aimée. Pourvu qu’il reste encore la moindre trace de cet amour dans le cœur de l’enfant.
- Que La Gardienne et La Très-Sage en décident ainsi, et elle vous reviendra. le visage de la Shamane s’adoucit un instant, en une moue trop peu caractéristique de ce qu’elle a l’habitude de montrer d’elle Maintenant il faut lâcher prise en la remettre entre les mains des Déesses.
Lâcher prise et tout remettre entre les mains des Déesses. C’est ce qu’elles devraient faire elles aussi, les deux guides du Clan. Car elles non plus ne savaient pas. Elles non plus n’avaient pas la moindre idée de comment ni de quand. Fallait-il donner à l’enfant de s’essayer aux rites dès l’instant pour tenter de sauvegarder ce qu’il reste de son Souffle ? Ou valait-il mieux suivre la tradition, et prendre le temps de lui enseigner ce que voulait dire être Lirfelû, quitte à ce que son Âme troublée ne le comprenne jamais ?
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Sujet: Re: Dans les méandres de son esprit | Artiön & Mac Mar 7 Avr 2020 - 21:49
Yesevelas ne pouvait que serrer les dents en entendant la réponse de la Shamane. Malheureusement, s'ils voulaient que Ciryië puisse jouir de leur aide, ils ne pouvaient rien faire de plus. Elle allait sauter dans le vide sans même savoir voler. Sans même qu'on n'ait pu lui expliquer comment faire. Elle devrait agir par instinct... Et même s'il ne craignait pas pour elle en situation dangereuse, les choses étaient différentes dans le cas présent. Elle préférerait sans doute faire face à un Kerkand plutôt qu'à ce qui l'attendait...
La petite elfe remarqua la main tendue vers elle. Ça, c'était un signe qu'elle comprenait. Sans aucun étalage d'émotions, elle se détourna de sa mère et s'avança en direction de celle qui l'appelait. Maliss sentit son cœur se serrer. C'était une nouvelle preuve de l'état de sa fille. Elle s'apprêtait à affronter la mort et non seulement elle lui faisait face sans trembler mais elle marchait vers elle sans même prêter attention à ceux qui tenaient à elle. Toute autre enfant à sa place aurait été terrifié ou aurait au moins adressé un dernier mot... un dernier regard... une dernière étreinte... Mais il n'y eut rien de la part de la petite elfe. Retenant le flot d'émotions qui menaçait de la submerger, la taledhelle la regarda s'éloigner le plus simplement du monde, espérant en vain qu'elle se retourne avant de disparaître dans l'ombre. Et lorsqu'elle ne fut plus en vue, son ventre se noua subitement. Peut-être venait-elle de parler à sa fille pour la dernière fois. Et elle se sentit mal à cette pensée, si bien qu'un des archers posa une main sur son bras et dans son dos pour la retenir en la voyant presque défaillir.
Macabre avançait, suivant la Prime sorcière sans un mot, sans un signe, sans une émotion. Elle ne pouvait pas communiquer avec ceux qui l'entouraient. Elle était désespérément seule mais cela ne semblait pas la gêner. Si l'ombre prédominait à l'entrée de la grotte, elle était remplacée un peu plus loin par une lumière qui n'était pas étrangère à la petite elfe. Alors que ses yeux s'étaient recouverts d'un voile noir pour parvenir à suivre la Prime Sorcière, la jeune mage des ombres interrompit son sort dès qu'elle perçu la lueur des champignons afin de pouvoir détailler l'endroit de ses propres yeux. Sans prêter attention aux regards que l'on pouvait lui porter, elle suivit son guide jusque dans un espace parsemé de couchettes qu'elle identifia comme étant le dortoir. La seconde "pièce" ressemblait plus à une grande pièce de vie. On lui indiqua où s'asseoir. On lui tendit une écuelle dont elle détailla le contenu un petit moment avant de se décider à manger. Elle se méfiait un peu. Elle était en terrain inconnu après tout. Elle faisait attention aux mouvements autour d'elle, ne quittaient pas des yeux ceux qui s'approchaient trop près. Elle ne se montra pour autant pas vindicative ni sur la défensive. Yesevelas et Maliss l'avaient confiée à eux, c'est qu'elle devait être en sécurité malgré tout. Une fois le repas terminé, on la conduisit de nouveau vers le dortoir. On lui montra où dormir et elle se coucha mais ses yeux ne se fermèrent que lorsqu'il n'y eut plus un mouvement dans la salle. Elle se réveilla bien avant tout le monde et elle se contenta de s'asseoir sur sa couchette. Assise en tailleur, la couverture sur les épaules, elle attendit sans montrer le moindre signe d'impatience. Elle était habituée à être seule lors de ses courtes nuits...
Artiön Laergûl
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Sujet: Re: Dans les méandres de son esprit | Artiön & Mac Mer 8 Avr 2020 - 23:27
Bien vite les nouvelles Gardiennes de l’enfant se rendirent compte à quel point détachée elle pouvait être. Au même moment mourut l’affection que l’une et l’autre considéraient due à une elfe dans sa position. Ensuite pestiférèrent la crainte et l’appréhension face à celle qui ne comprenait pas, mais qui affrontait tout de même. Le toit, le couvert, la couche. De sommaires attentions. Rien de plus, rien de moins pour l’instant. La délicatesse dans le geste, la délicatesse dans l’attitude. Rien de plus pour l’instant. Demain serait un autre jour. Au soir serait décidé le lendemain. Longtemps les Lirfelû attendirent en vain de voir l’enfant fermer l’œil. Longtemps le Conseil des Maîtres guetta l’instant où son oreille s’abaisserait, où sa vigilance s’éteindrait, et où l’avenir du Secret pourrait être discuté. Dans la nuit noire ils se rejoignirent, en cercle autour de Shamane et Prime Sorcière. Et dans la nuit noire ils se tentèrent à décider du futur.
- Va-t-on vraiment offrir le Labyrinthe à une étrangère ? Et si elle en ressortait ? Et si sa transe se terminait avant qu’elle ne se soit assez écartée de La Porte ?
- N’est-ce pas un risque que l’on devrait être prêts à courir pour la vie d’une Sœur ? Tous ici, l’épreuve du Labyrinthe nous a fortifiés pour que nous puissions veiller sur l’Œuvre. N’en fait-elle pas partie ?
- Mais comment être certains qu’en sauver une ne nous condamne pas à en perdre des dizaines ? Qui sait combien de Souffles orgueilleux pourraient se perdre durant une épreuve qu’ils n’auraient pas dû passer, et par la même occasion souiller les lieux que La Très Sage nous a chargé de garder ?
- Alors priver une sœur d’une chance de vivre serait un pouvoir qu’aujourd’hui nous osons nous attribuer ?
Des heures durant les arguments fusèrent, furent débattus et réfutés, jusqu’à ce que finalement le Conseil des Maîtres ne s’y accorde : l’enfant devait passer l’épreuve. Mais l’enfant ne serait pas marquée. Elle ne serait pas accompagnée. Elle ne serait pas guidée plus loin qu’à l’orée de son propre pouvoir. Et c’est à Hîril Lothren et à ses Chants guerriers que reviendront la seule décision de si la petite doit faire chemin ou pas jusqu’à la porte.
Et le Conseil alla se coucher épuisé, sans savoir qu’à la lueur des fonges, de grands yeux les observaient déjà.
Le lendemain, au matin
C’est au petit matin, avant le lever du soleil, pensant sortir la petite d’un songe, que la Prime-Sorcière se retrouve face à celle qui telle une dérangeante statue vivante, observait. Linyenwë se retient malgré tout de faire témoignage de sa surprise, préférant profiter de l’occasion pour ne pas perdre plus de temps. Des mains à nouveau l’Ornedhelle appelle l’ancienne esclave, l’appelant à la suivre à travers les boyaux de la caverne-maison. Plus elles avancent plus le froid est intense. Quelque part non loin est une ouverture, une gueule béante de la grotte vers le ciel, où le vent d’hiver s’engouffre pour souffler ses hurlements à travers le réseau de veinules. Quelque part non loin se trouve leur destination. Une salle circulaire naturelle dont le plafond s’ouvre vers le ciel encore étoilé, et dont les murs sont parsemés d’étranges glyphes. Là les attend déjà la Shamane, un bol d’un étrange liquide à la main.
L’Olos’Curun est prêt.
Alors la Prime-Sorcière appelle la mage d’ombre à l’imiter, se saisissant d’un bol elle la première pour avaler d’un trait la liqueur qui ouvre les sens, et les yeux brillants des arcanes qui la traversent, inviter une fois de plus la jeune elfe à l’imiter.
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Sujet: Re: Dans les méandres de son esprit | Artiön & Mac Jeu 9 Avr 2020 - 19:00
La nuit avait été courte mais la petite elfe ne montrait pas le moindre signe de fatigue. Aucune cerne, aucun bâillement, aucune faiblesse du corps. Elle se tenait droite sur sa couche, immobile, les épaules ni tendues ni relâchées. Lorsque son regard vide perçut enfin un mouvement, elle tourna son visage dans sa direction pour voir apparaître la Prime Sorcière. Il y eut une seconde de battement tandis que la Noss s'arrêtait soudain en la découvrant ainsi. Ciryië ne se posa pas la moindre question concernant sa réaction. Bien vite, on lui demanda de la suivre. Cette femme devait-elle être son guide jusqu'au bout ?
Sans plus attendre, la petite elfe se dégagea de la couverture, se leva et emboîta le pas à la blonde sans que ses pieds sur le sol ne produisent aucun son. Elle la suivit à travers la demeure du clan et leurs pas les conduisirent bien plus profondément que la veille, jusque dans les tréfonds de cette caverne. La jeune elfe observait autour d'elle mais elle ne témoignait rien, une fois encore. Ni crainte, ni curiosité, ni appréhension. Rien. Tout ce que l'on pouvait voir de son ressenti concernant cette situation, c'était qu'elle avait froid, ses épaules frissonnant au passage d'un courant d'air.
Finalement, les deux femmes débouchèrent sur un espace un peu plus large. Une sorte de clairière dans la montagne. Un cercle presque parfait... Alors que les parois ne présentaient pas la moindre trace d'un outil quelconque qui les auraient façonnés. Cependant, étudiant la magie depuis quelques temps à présent, la petite elfe observa les dessins sur les murs et pencha légèrement la tête sur le côté. C'était le premier signe d'intérêt depuis son arrivée. Un rapide coup d’œil sur le ciel lui permit de savoir qu'il faisait encore nuit mais elle n'y accorda pas plus d'importance qu'au reste... Elle baissa les yeux pour découvrir la Shamane, un bol entre les mains. Et la Prime Sorcière d'en prendre un autre pour en boire le contenu. Un geste invita Ciryië à agir. Elle regarda dans la direction indiquée et trouva un nouveau récipient qui attendait. Elle mit quelques instants avant de s'en approcher. Elle s'en saisit, non sans une certaine méfiance. Elle en huma brièvement le contenu pour en déceler d'éventuelles traces de poison. Elle en avait tant manipulé qu'elle savait les reconnaître. Mais il n'y avait rien. Alors elle but. Que la boisson soit bonne ou mauvaise, aucune expression ne traverserait son visage. Elle avait appris à se détacher du goût des choses pour se concentrer uniquement sur la nécessité de les avaler. Seul son sang elfique lui avait permis de ne jamais tomber malade là où elle était enfermée. Elle pouvait trouver des choses bonnes mais rien n'était vraiment mauvais à ses yeux...
Ceci fait, elle reposa le bol et attendit de savoir ce que l'on attendait d'elle à présent.
Artiön Laergûl
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Sujet: Re: Dans les méandres de son esprit | Artiön & Mac Dim 12 Avr 2020 - 22:34
La trame semblant folle même dans son immobilité, la Symphonie hurlant des murmures, tout son corps lacéré d’une délicieuse douleur, sensible qu’elle avait été rendue par la concoction au moindre stimulus, Linyenwë n’en restait pas moins extrêmement calme. L’Olos’Curun n’avait pour elle plus rien de nouveau. Arrive un jour où force d’être consommé, le poison ne semble plus en être un, et voilà des siècles déjà qu’elle s’était accommodée de ces sensations. La petite par contre… Linyenwë craignait que la petite ne prenne peur.
Pour la majorité d’entre eux, les Taledhels étaient Sourds. Ou du moins, ils l’étaient presque. Parce qu’I Ëmel jamais n’abandonnera ses enfants. Parce que Kÿria jamais n’acceptera que le lien entre la Prime-Œuvre et le peuple qu’elle a créé soit totalement rompu. S’ils n’entendent plus, si leur conscience s’est fermée, ils restent tous enchaînés à leur nature. Et les spores de la Vision du Sorcier, pour certains, le leur rappelle de manière spectaculaire. Quand les sensations dormantes se réveillent, quand les Chants sonnent à nouveau au Souffle des Sourds, alors pour beaucoup ils s’en effraient, paniquent, comme soudainement envahis par une présence étrangère se tentant à leur dérober leurs pensées. Alors elle dont l’esprit était brisé… comment réagirait-elle.
La Prime-Sorcière ne laissa pas le temps au temps de le lui apprendre. Tant que l’enfant semblait encore en possession de ses moyens, elle s’affairerait à la guider. Prenant la petite main dans la sienne, elle l’emmène face à l’arbre solitaire se dressant au centre de la pièce. L’accompagnant de ses gestes, elle assied l’enfant face au tréant, et guide sa main contre la surface rugueuse de l’écorce. Et la Shamane commence à psalmodier. Les incantations de la mysticiste se rencontrent en une multitude d’échos rebondissant sur les murs de la pièce circulaire. La trame s’agite. La trame s’emporte. Et pour les deux elfes dont la Vision court dans le sang, le tonnerre de magie n’en est que plus spectaculaire. Une main contre l’épaule de l’enfant, une main contre son flanc, la Prime-Sorcière respire. Lentement. Elle essaie d’entraîner la petite avec elle, au cas où la panique viendrait à la prendre. Elle attend jusqu’à ce que le nuage d’éther se soit formé, et ce n’est que juste avant que la foudre ne frappe… qu’elle l’abandonne.
Traversée par les flux, faite focaliseur vivant pour un sortilège qui ne se matérialisera jamais, l’enfant est soumise aux mêmes douleurs que les jeunes enfants du Lirfelû et de Lantaluïme durant la cérémonie de la marque des arcanes.
Le soleil se lève.
Ses premiers rayons frappent les parois, se répercutent contre leur nacre en un éblouissant concert de rayons. La lumière est le glyphe manquant. La lumière est ce qu’elle attendait. La psalmodie de la Shamane va crescendo, le tonnerre de magie se fait foudre, blizzard, ouragan, typhon, cyclone et mousson. Et l’instant dure. L’instant dure ce qui semble être une éternité, et qui pourtant pour la mage déjà accomplie qu’elle est ne représente que quelques longues minutes. L’instant dure, l’enfant piégée entre la tempête arcanique et des Chants qu’elle ne comprend pas. Appelée par l’arbre solitaire. Dévorée par l’arbre solitaire. Assimilée à l’arbre solitaire. Partageant son existence avec lui d’une manière que seul permet le lien donné par I Ëmel à ses créations.
Le soleil s’était levé. Mais la salle était toujours obscure. Eclairée d’une lumière noire par un arbre aux feuilles faites des ténèbres qui sont l’Art de Ciryië.
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Sujet: Re: Dans les méandres de son esprit | Artiön & Mac Lun 13 Avr 2020 - 20:27
Ciryië posa son bol et le simple effleurement de la matière en retirant sa main la surprit. Elle regarda ses doigts, passant son pouce sur son index et son majeur. Sa peau... Il y avait quelque chose de différent. Quelque chose qui s'intensifiait. Que venait-on de lui faire avaler ? Mais pas le temps de se poser la question plus longtemps. Son esprit avait à peine frôlé le sujet que d'autres phalanges saisirent sa dextre. La Prime Sorcière l'entraîna vers le centre de la "pièce". Vers cet arbre dont la présence était plutôt saugrenue. Avançant vers lui sans même l'avoir souhaité, la petite elfe l'observa, contrainte de relever de plus en plus la tête afin de le conserver dans son champ de vision. Finalement, elle en arriva bien trop près pour pouvoir le détailler plus longtemps et elle se résigna à baisser les yeux pour découvrir qu'elle s'approchait encore et toujours de lui. En fin de compte, la Noss la plaqua contre le tronc avant que la voix de sa comparse ne commence à raisonner entre les murs de pierre. Le contact de l'écorce contre sa peau était désagréable. Dérangeant. Mais bientôt, tout lui fut dérangeant. L'écorce, l'odeur du bois gelé, ses vêtements qui la frôlait, ces mains qui la maintenaient en place, le froid de plus en plus glacial, cette voix qui lui semblait de plus en plus forte, les flux dont elle percevait la présence sans même le vouloir et qui s'agitaient dans une danse folle... Et puis, il y avait autre chose... D'autres sons lui parvenaient. Comme des chants... Mais des chants qui cherchaient à entrer en elle. A entrer dans sa tête. Et, bien plus que la douleur de sentir tous ses sens exacerbés, ce fut cette sensation là qui lui fut intolérable.
Alors qu'elle avait encore l'impression que les mains de la Prime-Sorcière la maintenaient, elle s'agita pour s'en défaire et ne trouva aucune résistance. Elle se retourna pour constater que l'ornedhelle l'avait déjà lâchée. Les sourcils froncés, c'était la première fois qu'elle exprimait une émotion depuis qu'elle était arrivée. Sa méfiance se muait lentement en crainte et son regard passa de l'une à l'autre des magiciennes pour tenter de savoir laquelle essayait d'entrer dans sa tête. Cependant, les feuilles d'ombre leur masquant le soleil lui indiquait qu'elles œuvraient à une toute autre tâche... Mais alors qui ? Par réflexe, elle tenta de lutter contre cette intrusion qui était -à ses yeux- la pire des sensations car liée à une douleur qu'elle ne pouvait pas apaiser. Ou plutôt, que son esprit ne pouvait pas nier. Elle essaya même de s'éloigner de plusieurs pas mais cela ne changea rien...
Entre incantations d'une part et bataille pour conserver son esprit libre et solitaire d'autre part, le temps passa sans même que personne dans cette clairière des montagnes ne le remarque. Ciryië était consciente que s'en aller ne règlerait rien au problème. Alors elle resta dans cette pièce, prenant sa tête entre ses mains, serrant ses tempes et ses oreilles pour tenter d'empêcher ces sons -à l'origine de son malaise- d'entrer. Comme si cela pouvait l'apaiser... Quelle était cette décoction étrange qu'on lui avait fait boire ? Que lui arrivait-il ? Qu'est-ce qu'elles étaient en train de faire ? Et pourquoi cet arbre était empli de magie ? La même magie que la sienne ! Tant de questions dont elle ne pouvait obtenir les réponses... Il se passait ici des choses qu'elle ne comprenait pas et elle ne pouvait qu'attendre en espérant que tout s'arrêterait. De préférence plus tôt que tard.
Artiön Laergûl
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Sujet: Re: Dans les méandres de son esprit | Artiön & Mac Mer 15 Avr 2020 - 23:06
Les choses étaient faites.
La Shamane cessa ses incantations, laissant la trame tranquillement revenir à la stabilité. À nouveau Linyenwë s’approcha de la petite, lentement, doucement, son visage prenant la moue la plus tendre qu’il lui soit possible d’afficher.
Tout se jouait maintenant.
Les mains de la Prime-Sorcière se portèrent à ses oreilles, pour ensuite les libérer, faisant mine de s’accrocher à l’air alentour, et de même l’appeler à son crâne. Ecouter. Elle continue d’approcher, ses doigts se tendant vers le cœur de la petite elfe, se tentant à le toucher d’une main, tandis que l’autre allait à l’Arbre. Conduit vivant entre l’Arbre et Ciryië, la Vitaliste soupire quelques murmures d’un ancien patois, insufflant un peu de sa propre magie dans les chairs de la Mage d’Ombre, se tentant à soulager celle qui est littéralement portée à fleur de peau par la substance courant dans son sang.
Le regard de la Vitaliste va de la demoiselle à la plante, et de la plante à la demoiselle, l’invitant à suivre ses yeux. Les doigts de la Prime-Sorcière se font plus pressants contre le cœur de l’enfant, car il faut à tout prix maintenant qu’elle comprenne ce que les mots ne peuvent exprimer. Il faut qu’elle se laisse faire. Il faut qu’elle s’ouvre. Il faut qu’elle se laisse guider par La Mère là où aucun elfe ne pourra la guider.
Le travail des Lirfelû est maintenant fini, ici commence celui de Ciryië.
Le Clan ne peut maintenant plus que se contenter de l’accueillir, de l’accompagner au jour le jour, de lui permettre de survivre jusqu’au moment où la Symphonie fera son œuvre, où la Vision se décidera à l’emmener, au moment – s’il doit venir – où la forêt aura accepté de lui offrir ce dont elle a besoin pour vivre.
La Prime-Sorcière se recule, ramène ses mains à elle, pour aller se poster auprès de sa collègue matriarche. Les deux femmes offrent une moue sérieuse. Les deux femmes posent leurs mains à leurs oreilles. Les deux femmes tirent une main de l'oreille à leur cœur. Les deux tirent leur révérence. Les deux sourient. Les deux s’en vont.
Dernière édition par Artiön Laergûl le Mer 22 Avr 2020 - 13:30, édité 1 fois
Cilastiel
Elfe
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Sujet: Re: Dans les méandres de son esprit | Artiön & Mac Jeu 16 Avr 2020 - 18:58
Ciryië avait tout observé sans un mot. Même si elle avait eu tendance à se soustraire aux contacts physiques qu'on lui imposait, l'un d'eux la soulagea, un peu. Puis les deux femmes étaient parties sans plus se préoccuper d'elle. Cette fois, elle ne devait pas les accompagner. La suite des évènements devaient se dérouler ici... De ce qu'elle en comprenait. Alors elle reporta son regard sur l'arbre. Pourquoi avoir fait la liaison entre lui et son cœur ? Pourquoi ce peuple parlait tant de cet organe qui, à ses yeux, ne servait qu'à faire circuler le sang dans son corps ? Pourquoi tout le monde en parlait, d'ailleurs ? On avait déjà tenté de lui expliquer une fois qu'il s'agissait du centre des émotions, chose qu'elle n'avait pas compris. Ciryië regardait l'arbre et elle entendait les voix revenir à la charge. Une fois encore, elle posa les mains sur ses oreilles et se recroquevilla sur le sol. Les Noss étaient parties, alors d'où pouvaient bien provenir ces chants ?! Cela ne faisait plus aussi mal mais n'en demeurait pas moins dérangeant à un point qu'un anedhel ne pouvait imaginer. Car elle avait connu des souffrances qu'ils ne pouvaient imaginer. Et des larmes coulèrent sur ses joues...
Les oreilles, le cœur, l'arbre... Les oreilles, le cœur, l'arbre... Les oreilles, le cœur, l'arbre...
Ne pouvant se défaire de cette mélodie, elle chercha à comprendre ce que la Prime Sorcière avait voulu dire. Elle se remémora ses gestes. Elle avait pris l'air autour d'elle pour l'attirer à ses oreilles... De l'air et des oreilles... Les sons ? Elle voulait qu'elle écoute les sons ? Elle retira lentement ses mains, les laissant tomber sur ses genoux. Elle écouta mais elle ne comprenait pas ces voix. Elles parlaient un autre langage... Un langage qu'elle n'avait encore jamais entendu. Ni au Puy, ni en Ithri'Vaan, ni en Anaëh. Jamais. Dans un soupir, elle rouvrit les yeux et observa l'arbre. Le cœur et l'arbre... Il n'y avait peut-être pas trois éléments dans l'équation mais seulement deux... Le cœur et l'arbre faisaient peut-être partie du même problème. Elle le détailla et son regard s'arrêta une nouvelle fois sur ses feuilles faites d'ombre. Faites de sa magie. Est-ce que... Son cœur et l'arbre étaient liés ? Elle avait été plaquée à lui de face et les incantations avaient commencé immédiatement après, cela pouvait donc être ça. Mais pourquoi ? Pourquoi la lier à un arbre ?
Lentement, elle se remit debout. Elle s'approcha du tronc et posa la main sur son écorce. Elle était peut-être parvenue à interpréter les signes de la Prime Sorcière mais la solution finale de s'imposait pas à elle. A quoi servaient les voix ? Et en quoi ce rituel devait-il l'aider à guérir ?
-Je ne comprends pas. Confia-t-elle à l'arbre, comme s'il avait pu l'entendre et, mieux encore, la comprendre...
Cilastiel
Elfe
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Sujet: Re: Dans les méandres de son esprit | Artiön & Mac Mar 21 Avr 2020 - 20:56
Les jours passaient et se ressemblaient pour la petite elfe aux traits de marbre. Tous les matins et tous les soirs, la Prime-Sorcière et la Shamane la conduisaient à l'arbre, lui faisaient boire la décoction, la liaient au végétal et s'en allaient, la laissant seule face à une énigme bien plus grande qu'elle. Et lorsque la potion ne faisait plus son office, commençait alors pour la petit elfe une journée parmi les membres du clan durant laquelle elle restait là à les regarder aller et venir, observant sa comprendre. C'était presque à croire qu'elle n'était pas capable de penser. Pourtant, après quatre jours, certains commencèrent à tenter d'interagir avec elle. Si les mots ne lui parlaient pas et qu'elle ne parvenait à en retenir aucun, les gestes l'aidaient un peu à comprendre. Ainsi, grâce à leur patience et leur gentillesse, elle put détailler les ornementations gravées dans le bois d'un arc qu'on lui tendit, analyser la composition d'un collier qui la troublait, étudier les ingrédients de ce qu'on lui faisait manger et qu'elle reniflait toujours avant de le porter à sa bouche comme si elle craignait l'empoisonnement... Si on avait de l'empathie ou même de la pitié pour elle, elle ne le remarquait nullement. Les jours lui semblaient longs et les livres de la bibliothèque d'Ardamir lui manquaient pour passer le temps. Quant aux membres de son groupe, si elle posa la question pour savoir où ils étaient, elle ne comprit pas la réponse. Si tant était qu'on l'ait comprise...
C'était un jour comme les autres aux yeux de l'enfant des taledhels. Elle portait des vêtements qui n'étaient pas les siens mais, après une ennéade, il était normal qu'on lui ait finalement prêté quelques tenues de rechange. C'était confortable et c'était chaud. Quant à savoir si elle trouvait ça beau, elle n'aurait eu aucune réponse à donner. Elle n'avait pas encore réellement de goût et donc d'avis esthétique. Ciryië arriva à l'entrée de la pièce aux rituels. Elle regarda le bol qu'on lui tendait et mit quelques secondes avant de s'en saisir afin d'en avaler le contenu. Si elle ne comprenait pas ce qu'il se jouait ici, elle était certaine d'une chose : elle n'aimait pas les effets de ce breuvage. Elle s'y habituait un tout petit peu mais cela n'aidait visiblement pas pour faire changer l'issue de tout ceci. Cela n'en demeurait pas moins éprouvant pour ses sens et son esprit qui se fatiguait à lutter. La petite elfe essayait de le commander afin qu'il se détende et permette au rite de s'accomplir enfin mais cela ne faisait qu'épuiser un peu plus ses forces. Cela ne s'était pas senti les premières nuits mais, finalement, le sommeil de l'invitée de Lirfelû s'était fait peu à peu plus long que d'ordinaire. Le matin-même, il avait fallu la réveiller pour qu'elle soit prête avant l'aube.
Une fois de plus, elle se colla face contre l'arbre. Une fois de plus, la voix de la Shamane entonna sa prière. Une fois de plus, elle se retrouva seule avec les chants et l'arbre.
Debout devant l'immense tronc, la petite elfe l'observait inlassablement. Elle cherchait le moindre indice sur ce qu'elle devait faire ensuite. Elle écoutait les sons qui lui parvenaient, toujours semblables à son oreille. Elle n'avait toujours pas compris d'où le son provenait et comment il était possible qu'elle ne les perçoive qu'en ayant bu cette potion. Une hallucination peut-être... Les heures s'égrainèrent et Ciryië se mit à bâiller. Elle était fatiguée de tout ceci... Fatiguée d'essayer de se faire à ces sensations. Fatiguée de rester là à tenter de décrypter une énigme. Fatiguée de s'évertuer à comprendre un langage qui n'était pas le sien. Elle sentait sa tête l'alourdir et ses jambes peiner à la porter. Alors, la jeune mage des ombres vint s'adosser au tronc de l'arbre. Assise en tailleur, le dos et crâne posés contre l'écorce, elle continua à scruter le feuillage noir. Elle lutta contre ses paupières qui ne faisaient que se fermer contre sa volonté. Elle secoua la tête pour essayer de rester éveiller. Et... Sans s'en rendre compte... elle finit par sombrer doucement dans la froideur de la nuit.
Ciryië rouvrit soudain les yeux. Elle s'était endormie ? Le rituel ! Quelle heure était-il ? Allongée sur le sol, elle se redressa subitement et chercha l'arbre du regard... Mais il n'y avait aucun arbre à proximité. Elle se mit prestement sur ses jambes et regarda autour d'elle. Elle n'était plus là où elle s'était assoupie. D'un côté, il y avait un mur rocheux et brut. De l'autre, c'était le vide. Il n'y avait aucune porte, aucune voie par laquelle elle aurait pu arriver et ne comprit pas ce qu'il s'était passé. Elle se pencha pour examiner la falaise qui représentait la seule voie d'accès potentielle... Mais elle n'était pas une grimpeuse ! Elle ne savait même pas monter dans un arbre. Le regard bleu clair de la jeune fille détailla un peu mieux les alentours. Si elle était ici, c'était sans doute qu'elle avait enfin réussi. Le but de la potion n'était donc pas de changer quelque chose en elle ou de lui transmettre un message mais de la conduire ici. Elle avança donc le long de cette étroite voie qui n'avait qu'une seule fin : celle d'une cavité béante dans la roche. La petite elfe pencha la tête sur le côté. Que faisait-elle là ? Qui avait eu l'idée de la placer dans un lieu aussi difficile d'accès ? Et pourquoi l'entrée n'en était pas masquée par la végétation, comme dans tout lieu abandonné ? Car il était peu probable que quelqu'un vienne entretenir la porte de cette caverne. Cependant, puisque c'était apparemment le seul chemin, Ciryië s'y engouffra sans la moindre peur ni appréhension. Ses yeux se parèrent d'un voile noir pour lui permettre de distinguer les formes à l'intérieur. Elle n'était pas une sombre mais, à l'aide de ce simple sort, elle avait au moins leur capacité à voir dans la nuit la plus noire. Une aide providentielle dans ce genre de situation. Ou pas...
Artiön Laergûl
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Sujet: Re: Dans les méandres de son esprit | Artiön & Mac Mer 22 Avr 2020 - 15:13
La moiteur de la cave rend le froid plus prégnant encore. Le complet silence n’est jamais brisé que par les incessants clapotis de l’eau tombant des stalactites. Parfois l’eau contre la roche. Parfois l’eau contre l’eau elle-même. Ici rien ne semble vivre. Tout semble éteint. Comme transi de froid. Figé dans l’éternité. Tout sauf les omniprésentes mousses et lichens pesant de leur forte odeur d’humus sur l’atmosphère. Les senteurs rancies t’agressent les narines. Quelques pas à peine et le monde extérieur semble déjà bien loin. Quelques pas à peine et tu es déjà happée par la solitude. Et pourtant Macabre, il y a quelque chose qui rend cette atmosphère lugubre fascinante à tes yeux.
L’obscurité t’est habituelle. L’obscurité t’est même confortable. Voilà longtemps, des années, la majeure partie de ta vie, que tu évolues à travers l’obscurité. Tu n’as jamais connu rien d’autre après tout. Jamais. Tu en es persuadée jusqu’au plus profond de toi-même. Ou l’es-tu ? Mais peu importe. Ces questions sont vaines. Elles ne valent pas la peine d’être posées. Tu es et cela te suffit. Tu fais et cela te suffit. Chaque pied mis devant l’autre est une victoire. Chaque seconde à réchapper à une mort qui t’a toujours – à chaque instant – guettée est une victoire. Chaque instant à trancher ton chemin à travers les ténèbres vers les ténèbres plus profondes encore qui sont ta lumière est une victoire. Accumuler ces petites victoires et continuer d’avancer pour mieux retourner en arrière. Accumuler ces petites victoires, car elles sont la preuve que tu es capable de faire ce que l’on attend de toi te suffit.
Du moins tu en es persuadée
Mais par qui ?
Les clapotis miment le rythme de tes pas. L’odeur rance t’agresse les narines. Le froid humide se plaque contre les parois de ta gorge, de ta trachée, de tes poumons, et il t’enserre. Il t’enserre et il t’emprisonne là où tu n’es pas censée être, là où on t’a laissé aller car tu n’avais pas ta place ailleurs, dans l’espoir que la montagne ne te le dise elle-même, et ne te soustraie à l’existence, toi qui n’existe plus depuis bien longtemps déjà.
As-tu seulement existé un instant ?
La question fait sauter un battement au cœur que tu n’as pas. Mais tu continues d’avancer malgré tout. Car ce ne sont pas des questions auxquelles on t’a appris à répondre. Ce ne sont pas des questions auxquelles on t’a appris à penser. Ce ne sont pas des questions ayant le moindre sens devant toi. Tu es et cela te suffit. Tu fais et cela te suffit. Tu réponds à ce qui est dit, tu touches ce qui te touches, tu vois ce qui passe face à tes yeux, entends ce qui fait vibrer tes tympans, goûte ce qui touche ta langue et sent ce qui t’agresse le nez. Tu es. Tu existes. Tu es. Tu existes. Tu… tu…
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Sujet: Re: Dans les méandres de son esprit | Artiön & Mac Ven 24 Avr 2020 - 7:21
L'odeur était forte, c'était vrai. Et si elle n'était pas habituée à la nature, elle avait connu bien pire que cela malgré tout. Enfermée des décennies durant dans une cellule sans fenêtre. Une cellule humide dans les sous-sol d'un eldéen où il était si difficile de respirer, où elle dormait à même le sol battu, au milieu de sa nourriture pourrissante, de l'eau croupie et de ses déjections dans une tenue trop grande pour elle et qui n'avait jamais été lavée. Il était facile d'imaginer l'épouvantable odeur qui régnait dans une telle atmosphère. Cependant, là où elle aurait pu croire qu'il ferait meilleur à l'intérieur d'une grotte que dans le vent glacé de la montagne en hiver, elle fut surprise de découvrir que le froid la mordait avec plus de force ici. S'il grandissait encore, les vêtements des Noss ne suffiraient bientôt plus à la préserver des tremblements qui secoueraient son corps en une vaine tentative pour la réchauffer un tant soit peu.
Mais c'était le seul chemin, alors elle continuait d'avancer... Et tandis qu'elle avançait, des questions et des pensées vinrent frapper son esprit. Pourquoi songeait-elle à cela maintenant ?
Pourquoi songeait-elle à cela, tout court ?
Et ces questions, plutôt que de les ignorer, elles l'affectaient, la perturbaient, la frappaient. Depuis quand donnait-elle de l'importance à ce genre de réflexions ?
Et comment pouvait-elle même avoir ces réflexions ?
Jamais encore la petite elfe n'en avait été capable. Jamais encore elle n'avait pu se demander ce qu'elle était, pourquoi elle était...
Était-elle, seulement ?
Aujourd'hui, on l'appelait Ciryië mais ce nom ne représentait rien pour elle. Elle ne se souvenait pas l'avoir déjà porté par le passé. Avant, on l'avait surnommée Macabre ou Mac... Et elle n'avait pas compris pourquoi. Pourquoi ils éprouvaient ainsi le besoin de lui donner un nom. Car, encore avant cela, elle n'en avait pas.
Macabre est le destin De ceux sur son chemin
C'était ce qu'elle était. Une ombre dans l'ombre. Une lame dans l'ombre. La mort qui frappait lorsqu'on s'y attendait le moins. C'était ce qu'elle était. Ce que l'on avait voulu qu'elle soit. Ce qu'on lui avait commandé d'être. C'était ce qu'elle était. La main armée d'un autre. Un outil agissant en son nom, sans réfléchir et sans remord. C'était ce qu'elle était. Rien. Absolument rien. Elle n'existait pas. Elle ne devait pas exister, pour personne.
Une larme glacée coula le long de sa joue. Pourquoi est-ce que cette pensée lui faisait aussi mal ? Pourquoi est-ce que cette pensée la dérangeait aujourd'hui ? Et pourquoi voyait-elle l'image de Don'dar chaque fois qu'elle pensait à cette volonté qui avait fait d'elle bien pire qu'un fantôme ? Car le fantôme, lui, existait. Il y avait un mot pour définir ce qu'il était. Il n'y en avait pas pour elle...
Macabre est le destin De ceux sur son chemin
Voilà. C'était ça. Ce qu'elle était. Et pourquoi est-ce que cela la faisait pleurer ?
Artiön Laergûl
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Sujet: Re: Dans les méandres de son esprit | Artiön & Mac Ven 24 Avr 2020 - 21:59
Ton cœur saigne
Littéralement
Un parfum métallique tranche soudainement à travers les fragrances ambiantes. Une ligne glaciale se trace au creux de ta poitrine, puis le long de ton abdomen. Une poisseuse substance échappe de sous ta clavicule. Et tu as mal. Tu n’as pas mal parce que ton corps souffre, tu as mal, parce que ta mère pleure. Les hurlements de désespoir de Maliss emplissent ton crâne, et battent contre tes tympans comme s’ils furent des tambours de guerre. Ta mère pleure trombes et cascades, et si seulement il n’y avait que cela ! Oh si seulement ! Si seulement ta mère ne faisait que pleurer le sang fuyant ton cœur ! Non. Il y plus. Il n’y a pas que vous. Il y a vous et il y a un meurtrier. Il y a vous et un meurtrier mais il n’y a que vous.
Macabre est le destin de ceux sur son chemin
Tu fus un jour sur son chemin, Ciryië
Le lac cavernicole se déploie devant toi dans toute son azurée splendeur, mais dans cet océan de bleu clair tu ne vois qu’un sombre constat. Sur le miroir de la surface se dessine ton reflet, votre reflet, toi et toi, la meurtrière et toi, et tu la vois, l’abomination qu’elle est, l’abomination que tu es, extirper une lame que tu ne connais que trop bien d’entre les deux moignons faisant office de seins à l’enfant que tu es restée.
Macabre est le destin de ceux sur son chemin
Les hurlements de Maliss s’étouffent en un gargouillis indescriptible, l’indescriptible gargouillis se fait un seul souhait difforme, murmuré au travers des larmes, un seul souhait, regrettant le passé plutôt qu’appelant à un avenir meilleur, appelant au nom d’un homme, et des souvenirs qui lui sont attachés. Appelant le nom d’un homme, et des souvenirs qui lui vaudront d’être dévorée par les eaux, dans la cruauté du silence le plus complet, pour que le calme revienne. L’oppressant calme voulant faire croire que jamais rien n’arriva.
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Sujet: Re: Dans les méandres de son esprit | Artiön & Mac Sam 25 Avr 2020 - 19:29
Sentant quelque chose couler le long de son corps, Ciryië baissa les yeux et vit une tâche rouge se former sur son cœur. Un teinte qu'elle ne connaissait que trop bien... Elle regarda le sang se répandre et s'écouler sans comprendre ce qui avait bien pu se passer. Si elle avait une résistance toute particulière à la douleur, elle la ressentait malgré tout. Mais là, rien... Il n'y avait rien. Le liquide coulait sans qu'elle ne ressente le moindre mal. Son esprit souffrait tout autrement. Elle reconnaissait la voix qui pleurait. Pour quelle raison en revanche, cela lui échappait totalement.
Un mouvement sur l'eau attira son regard. La surface était si paisible qu'elle était aussi nette qu'un miroir. Et elle se voyait le plus distinctement du monde. Elle, mais aussi la silhouette noire qui lui faisait face. Une silhouette qui faisait sa taille mais plus mince encore qu'elle ne l'était, maladive. Ses longs cheveux noirs tombaient en ligne droite vers le sol, encadrant un masque blanc. Ses mains gantées retiraient une dague de la poitrine de son reflet... La dague... Et plutôt que de chercher à comprendre ou à s'enfuir, la petite elfe demeura là, immobile. Elle venait déjà de la tuer de toute façon... Elle détailla son double... Elle n'avait jamais pu aussi bien se voir qu'en cet instant. Elle portait tout cela à sa demande pour des raisons qui lui avaient toujours échappées. Et qui lui échappaient encore. Finalement, elle leva le bras, et la main de son reflet vint retirer le masque de son assassin. Elle découvrit alors ses traits aussi impassibles que les siens. Son visage creusé par la fatigue, desséché par la soif, blanchit par la faim, couvert de cicatrices et un large pan de la peau arraché au niveau de la mâchoire gauche. Ce qu'elle pouvait être laide...
-C'est maintenant que tu te décides à le faire ?...
Elle avait tant désiré la mort. La seule issue vers la liberté. Tout du moins l'avait-elle longtemps pensé. Pourtant, l'idée de se la donner elle-même ne l'avait jamais traversée un seul instant. Pour des raisons qui lui échappaient, elle comprenait seulement maintenant que cela aurait pu tout résoudre depuis des décennies.
Mais cela n'aurait pas arrêté les larmes de sa mère...
La mage des ombres observa inlassablement les traits de la meurtrière, se découvrant sous un tout autre jour. Quelle vie avait-elle eu ? Quelqu'un avait-il déjà souffert autant qu'elle ? Tuer n'était pas ce qu'elle voulait faire. Depuis des années, elle regardait les enfants courir et jouer sans même réaliser qu'elle n'avait pas connu tout cela, ou qu'elle n'en avait pas le souvenir. Ce qu'elle avait vécu, elle ne le souhaitait à personne. C'était la raison pour laquelle elle avait bravé l'interdit en aidant Miresgal, en ancrant son esprit à la réalité par un simple mot, un simple prénom. Son prénom. Du peu de temps qu'elle avait vécu libre, d'après les quelques choix qu'elle avait pu faire, elle était certaine d'une chose : elle ne voulait pas faire de mal. Rien ne lui manquait dans son ancienne vie. Elle avait tant de fois fait couler le sang mais il ne l'appelait pourtant pas...
Alors elle regarda son double vêtu de noir, comme sorti d'un cauchemar.
-Je n'ai jamais voulu être toi.
Ce qu'elle aurait voulu être, elle n'en savait rien. Mais, d'elle-même, elle n'aurait pas choisi cette voix...
Artiön Laergûl
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Sujet: Re: Dans les méandres de son esprit | Artiön & Mac Jeu 30 Avr 2020 - 14:35
Pourtant c’est ce que tu as choisi
Ou alors n’es-tu simplement pas assez forte pour lutter pour toi-même ? Combien d’autres avant toi ? Combien d’autres après toi ? Combien d’autres de tes frères, sœurs, cousins, créatures de sangs purs ou mêlés se sont retrouvés dans la même situation que toi ? Combien d’autres plutôt que de succomber aux mensonges, à la magie, à la manipulation, se sont battus jusqu’au bout ? Combien d’autres ont préféré la mort à l’anéantissement de leur personne ? Combien d’autres se sont sacrifiés pour ne pas déshonorer leurs dieux, pour ne pas trahir La Mère, pour ne pas étendre leur malheur à des innocents ?
Seras-tu forte cette fois ?
Car tu fus autrefois l’une des faibles. Une pauvre victime s’étant refusé à ériger des défenses face à l’agresseur, et pourquoi ? Le sais-tu seulement ? Pour vivre peut-être. Pour survivre plutôt. Abandonner le droit de vivre pour survivre. Tu n’as pas été la seule. Ni la première ni la dernière. Les faibles sont légion. Les fragiles sont nuées. Les cyniques et les défaitistes embrassent ces deux armées. Mais si enfin tu cherches à en réchapper, si enfin tu cherches à t’évader, si enfin tu cherches la force qui te permettra d’exister, tu es en train de te fourvoyer, car le temps du sacrifice est passé.
Il est trop tard pour mourir, trop tard pour t’offrir. Te laisser dépérir n’effacera pas ce que tes victimes ont pu souffrir. Tu as posé ta marque dans le monde, une marque poisseuse et obscure, une marque que rien ne saura dissoudre sinon toi-même. Toi pas Elle. Toi, celle dont le cœur saigne.
Tu meurs Ciryië, et Macabre te regarde.
Pour celle que tu aurais été l’heure est venue de tuer.