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 Nous sommes frères, et les frères se protègent entre eux. [Solo]

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Andran Straggen
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MessageSujet: Nous sommes frères, et les frères se protègent entre eux. [Solo]   Nous sommes frères, et les frères se protègent entre eux. [Solo] I_icon_minitimeMar 14 Juil 2020 - 21:45

Arkuisa 5 Karfias de l'An XVIII du Onzième Cycle, Première Ennéade,
Erignac, Marquisat de Sainte-Berthilde, Royaume de Péninsule.


Une journée hivernale usuelle défilait sur Erignac et ses alentours aujourd'hui. La neige envahissait l'herbe humide, les remparts et les maisons qui décrivaient la ville. Certaines flaques d'eau étaient gelées et les rues marbrées se transformaient en patinoires. La nuit noire éclairée par une seule lune en croissant devenait un véritable danger car le moindre pas était un risque de se s'effondrer sur le sol. Pourtant, c'est bien à une heure tardive qu'Andran arriva en ville, puisque l'heure du dîner était passée.

Erignac. Cela faisait si longtemps. Cela faisait si longtemps qu'Andran Straggen, natif de la ville, n'y était justement pas revenu. Cela faisait si longtemps qu'il rechignait tant à y revenir. Cela faisait si longtemps qu'il n'y songeait que pour la mépriser et la fuir encore plus. Cela faisait si longtemps qu'il avait rejeté sa propre famille et grandir loin d'eux. Rien que prononcer son nom suffisait pour que son sang ne fasse qu'un tour.
Cadet d'une noble famille de cette ville du nord de Sainte-Berthilde, Andran avait été envoyé à la Cour d'Eyroles afin qu'il y devienne chevalier, loin de son frère aîné destiné à hériter des terres de la famille. Depuis ce jour, il détestait sa famille, et n'avait jamais réussi à apaiser sa rancœur. Dans son esprit, le seul père qu'il ait jamais eu est celui qui a pris soin de l'éduquer dans les règles de l'art de la chevalerie ; la seule mère qu'il ait jamais eu était cette femme si douce et agréable avec les enfants de laquelle il était page. Son unique frère de sang était désormais un parfait inconnu comparé aux personnes qui ont entouré Andran de ses sept ans jusqu'à aujourd'hui.

Énormément de choses s'étaient déroulées depuis son départ d'Erignac : de la Malenuit à ces guerres incessantes, telles que celle de l'An VIII ou de l'An X, sans parler des crises économiques ou sanitaires par lesquelles est passé Sainte-Berthilde. Le père d'Andran était décédé, et leur mère également, et ce peu après le départ du cadet, décision à laquelle elle s'était farouchement opposée après ses multiples fausses couches. L'aîné, Reynard, avait depuis hérité, et avait mieux fructifié ses terres que ses trois prédécesseurs, bons à s'engorger de vin et à vivre dans l'opulence les plus démesurées. Andran, lui, avaient rejoint l'Ordre des Marcheurs Austères et en était devenu un pilier. A chacun son destin, comme on dit souvent. Ceci étant, nul doute que l'un avait souvent des échos de l'autre, quels qu'ils soient.

Et voilà qu'il revenait... après trente ans. Trente ans de chagrin, de haine, de mépris, de colère. Pour sûr, Andran était partagé entre l'angoisse et le dédain. Il est vrai que l'amour familial avait totalement disparu depuis qu'il était parti, et cela rendait les retrouvailles ternes, maussades. Mais, d'un autre côté, il s'agissait de son frère, et, à force de le dédaigner, le chevalier ne savait même pas comment il réagira en voyant Reynard. Il ne savait même pas à quoi il ressemblait, ni quel genre d'homme il était. D'ailleurs, il n'était même pas sûr des raisons pour lesquelles il était venu jusqu'ici. Pour tenter de repartir du bon pied ? Pour soulager sa conscience ? S'il avait voulu couper les liens pour toujours, rien n'aurait été plus simple que de l'exprimer clairement, ce qu'il n'avait pas fait. A l'inverse, s'il avait souhaité sincèrement les renouer, il aurait agi plus tôt, pour commencer en répondant à ce nombre incalculable de lettres envoyées par Reynard. Il a toujours été ambiguë à ce sujet, et beaucoup d'événements personnels le poussent, aujourd'hui, à faire ce pas que son frère aîné attend depuis longtemps.

A Erignac, les Straggen avaient une très belle maison. Reynard était un vassal d'Erignac, c'est vrai, mais il tenait beaucoup à son rôle de conseil envers son suzerain. Si, la plupart du temps, il s'occupait de son fief depuis un autre manoir qu'il possédait sur ses terres, il revenait très souvent dans sa cité suzeraine, à laquelle sa famille est attachée depuis longtemps. De plus, il oscillait souvent entre ses terres et les villes du Marquisat, notamment pour vendre ses récoltes, et il lui arrivait parfois même de venir à Cantharel.

Plusieurs édifices de la ville voyaient la lumière des torches et des bougies jaillir de leurs fenêtres, et, chez Reynard, des cris d'enfants se faisaient entendre. Andran avait eu vent, par lettres successives, que son frère était marié, et qu'il avait déjà deux enfants. Il avait également appris qu'il était un seigneur bienveillant et réfléchi. Et puis, il avait la sympathie de toujours envoyer une somme correspondant à un petit pourcentage de ses bénéfices à son frère cadet, comme pour lui signifier qu'ils sont bien de la même famille.

L'Inquisiteur de l'Ordre des Marcheurs Austères avait fait le choix de venir seul, accompagné de son épée et de sa jument. Il n'avait pas besoin de plus pour cette épreuve qui s'annonçait difficile et pénible qu'il devait affronter seul.
Une fois proche de la maison familiale, il mit pied à terre et fit franchit les dernières distances qui l'en séparaient à pied. Dans ses souvenirs, la maison était différente, mais certainement car Reynard, ou leur père, l'avait rénové depuis. Pour le reste, le jardin, le portail, et l'écurie n'avait, entre autre, pas changé d'un iota. D'ailleurs, elle était toujours surveillée par quelques gardes. De l'extérieur, Andran entendant les enfants s'amuser. Arrivé face aux gardes, le chevalier se présenta, et fut autorisé à entrer une fois qu'il confia arme et cheval. Conviant les gardes à rester en poste, il entra seul.

A l'intérieur, il aperçut ses deux neveux, dont il ne connaissait même pas les prénoms. Reynard avait omis ou délibérément caché cette information. Il préférait sûrement les lui donner en face, et c'était plutôt compréhensible. Le plus âgé des enfants était une fille d'environ six ans. Elle avait les cheveux auburn et les yeux marrons. Le second est un garçon de trois-quatre ans, brun aux yeux bleus, et étonnamment grands. Plus loin, assis près d'un feu de cheminée se tenaient leur père, qui avait aujourd'hui une quarantaine d'année, et son épouse, de l'âge d'Andran, peut-être légèrement moins. Faute d'avoir été présent à leur mariage, il ne savait rien d'elle également. Il comprit alors que le roux de la petite fille était un trait de sa mère, elle-même rousse. Les deux parents se tournèrent vers leur visiteur dès que les enfants demandèrent qui était cet inconnu.

« Qui êtes-vous ? » demanda immédiatement le chef de maison, qui ne reconnut évidemment pas son frère qu'il n'avait pas revu depuis ses sept ans.
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MessageSujet: Re: Nous sommes frères, et les frères se protègent entre eux. [Solo]   Nous sommes frères, et les frères se protègent entre eux. [Solo] I_icon_minitimeJeu 16 Juil 2020 - 14:21

Andran haussa les sourcils d'un air suffisant. Pourquoi s'attendait-il à ce que Reynard le reconnaisse ? Parce qu'il savait où envoyer ses lettres pour le contacter, ou parce qu'il faisait ainsi depuis plus de plus de dix ans ? C'est également un problème qui arrive lorsque l'on fait tout pour esquiver les retrouvailles avec une famille que l'on dédaigne depuis plus de trente ans. D'un autre côté, il n'aurait certainement pas reconnu Reynard si les rôles étaient inversés. Le chevalier ne reconnut son aîné que parce qu'il savait où le trouver. Chez lui, en l’occurrence. Mais, finalement, il put reconnaître ses yeux et ses oreilles, par exemple.

« Cela fait si longtemps ? » rétorqua-t-il d'un ton ne cachant pas son ironie.
« Nous connaissons-nous ? » rétorqua aussitôt l'aîné, d'un ton qui se voulait pas plus amical.
« Si ce n'était le cas, je ne serais pas devant vous. »
« Je vais éloigner les enfants, mon cœur. »

Ce jeu d'énigme agaçait Reynard, qui avait la mine crispée et les poings serrés, et qui acquiesça d'un signe sec de la tête à la proposition de sa femme. Cette dernière avait le regard chargé de reproches sur le chevalier, qui étira un sourire nerveux, lui-même peu envieux de jouer avec les nerfs de ses visiteurs, bien qu'il voulait également montrer les crocs. Cela n'avait pas réellement d'intérêt, qui plus est. Il posa le regard sur ceux qui étaient ses neveux, alors que son frère fit un pas vers lui.

« Andran ? » qu'il finit par demander, peu sûr de lui. Au moins, le cadet pouvait noter que son aîné était perspicace, car il écarquilla les yeux de surprise. « C'est vraiment toi ? »

Le frère aîné n'en croyait pas ses yeux. Son visage était partagé entre la surprise, l'hésitation et la joie. Andran se demandait comment il avait fini par le reconnaître, pour peu que cela changeait quelque chose. Les deux avaient maintenant la quarantaine ou s'en approchaient. Malgré leur vigueur respective, et l'allure athlétique du cadet, force était d'admettre qu'ils avaient vieillis et que, bon an mal an, ils ne se sont pas vu depuis leur enfance.

« Tu portes la bague de notre mère. » ajouta Reynard, comme s'il lisait dans les pensées de son frère en proie au questionnement. « Je la reconnaîtrais entre mille. Et puis... c'est moi qui te l'ait expédiée, après tout. »
« Elle fait partie de moi depuis si longtemps que je n'y ai même pas pensé... Il est mon seul souvenir d'elle. » répondit le chevalier qui posa le regard sur son doigt portant une bague en argent toute simple.
« C'est pour cette raison que je te l'ai envoyé. Tu en avais certainement besoin, et également le droit. Contrairement à père, tu avais plus de valeur sentimentale à nos yeux. Cela dit, tu aurais pu venir à ses funérailles. »
« Je ne sais pas pourquoi, mais cela sonne comme un reproche. »
« Tu aurais pu... »
« J'aurais pu être là pour mère également et pourtant tu ne me le reproches pas. »
« Non, c'est vrai. En revanche, je me permets de te reprocher ton absence à mon mariage, et à la naissance de mes enfants. De mon côté, j'ai fourni tous les efforts possibles pour renouer notre fratrie, mais TU as refusé, en me dédaignant sans cesse ! »

La voix de l'aîné était devenue presque tonnante, à tel point que le cadet en demeura coi et silencieux. Ce dernier savait pertinemment qu'il avait sûrement mal agi, et c'est pourquoi il ne chercha pas d'arguments fallacieux ou stupides pour se défendre. En détournant le regard, le chevalier remarqua que la femme de Reynard revenait, et elle fusillait encore plus le chevalier du regard que son époux lui-même. Andran en sourit nerveusement, et grimaça plusieurs fois de gêne, peut-être même de honte. Il n'avait même pas cherché à la connaître,

« Tu as parfaitement raison. Et, d'ailleurs, tes reproches sont légitimes. Tu remarqueras également que je ne suis pas venu te jeter la pierre, quelle que soit la raison. Depuis mes sept ans, je me suis fait une raison de couper les ponts, et je ne me voyais pas les reconstruire après toutes ces années. »

Reynard garda le silence et tenant la main de sa compagne. Il n'avait jamais su à quel point son frère cadet était rancunier, et maintenant il comprenait toutes ces années de silence. Il en avait toujours voulu à son propre père de l'avoir envoyé si loin des siens, et, aujourd'hui, l'aîné en payait le prix fort. Ce n'était pas ce qu'il voulait, et Andran était contraint de le reconnaître. Des efforts, son frère en avait fourni ; à son tour de jouer ses cartes maintenant.

« Qu'est-ce qui fait que tu as changé d'avis, alors ? » demanda l'aîné qui fixait son cadet du regard, et dont le ton faisait clairement comprendre que cette question exigeait une réponse sincère.
« Plusieurs raisons m'y ont conduit. D'abord, la curiosité. Je voulais savoir quel genre d'homme tu étais. Et puis... ce sentiment d'inachevé. Quitte à ce que tous se passe mal, au moins, l'incertitude n'aurait plus lieu d'être. Et enfin... une certaine forme de reconnaissance. Rien ne t'obligeait à faire tout ce que tu as fait, et pourtant, tu l'as fait, et ce malgré le fait que j'ai rejeté tes lettres. » répondit le chevalier, qui inclina la tête chaque fois qu'il mit les mots sur une idée.

Le vassal d'Erignac demeura pensif à l'écoute des mots de son frère, l'index devant sa bouche et les yeux plissés rivés sur Andran. Au moins, sa visite n'avait rien d'une visite à l'improviste opérée dans le seul but de satisfaire son ego et de se débarrasser de cet instant en un rien de temps. Andran semblait honnête, et, pour une fois, franchissait ce pas qui pourrait renouer le lien avec son frère. La famille Straggen n'a jamais été aussi proche de la réconciliation qu'aujourd'hui car, pour une fois depuis longtemps, les deux se parlaient, s'écoutaient, et tentaient de se comprendre.

« Puisque tu ne la connais pas : je te présente Anne-Lise, mon épouse. Et mes enfants sont Hilda et Moreth. Ma tendre épouse, voici Andran, mon frère cadet. » présenta Reynard. Sa femme était demeurée muette depuis son retour. « Et toi, tu es venu... seul ? »
« J'ai préféré éloigner tout le monde nos retrouvailles. Je ne voulais pas infliger un quelconque échec à quelqu'un d'autre que moi. »
« Et, sans vouloir vous offenser, je ne suis pas sûre que vos frères d'armes des Marcheurs Austères n'aient à se mêler de vos affaires de famille. » intervint Anne-Lise qui ouvrait la bouche pour la première fois depuis l'arrivée d'Andran. Sa voix était assez fluette et agréable à entendre et son ton ne trahissait aucune malveillance, contrairement à son regard. Face à la mine interrogative de son beau-frère, elle ajouta. « Si vous en doutiez encore, Reynard nous a souvent parlé de vous. Et, de toute manière, vous nom a déjà été prononcé par certaines personnes à travers Sainte-Berthilde. »
« Quoi qu'il en soit, ce n'est pas nécessairement à mes frères d'armes que je songeais. »


Dernière édition par Andran Straggen le Dim 19 Juil 2020 - 13:39, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Nous sommes frères, et les frères se protègent entre eux. [Solo]   Nous sommes frères, et les frères se protègent entre eux. [Solo] I_icon_minitimeDim 19 Juil 2020 - 13:38

Andran fixa celle qui était sa belle-sœur d'un air assez insistant. Non pas qu'elle était incroyablement belle ou à l'inverse affreusement laide, le chevalier la scrutait comme s'il cherchait à connaître ses intentions. Il n'était évidemment pas assez doué pour le savoir, mais il se méfiait toujours de ces retrouvailles, surtout d'elle, car il ne savait pas quel rôle elle avait joué dans tout cela.

« Vous êtes donc marié. » pensa conclure la maîtresse de maison, d'une pointe de voix qui se voulait presque soulagée.
« Disons que ce jour n'est pas encore arrivé, mais que je pourrais céder à son charme si jamais les choses évoluent correctement. » répondit le chevalier, dont la voix ne trahissait aucune hésitation.
« Tiens, tiens. Et quel rôle joue-t-elle dans ta visite surprise ? »
« Nous en avons discuté... une seule fois. Je t'avoue qu'elle m'a conseillé de renouer, même si cela remonte à plusieurs mois. »
A cette période, Clémence était encore marquée par son passé, et elle n'était pas encore amoureuse d'Andran.
« Et elle a un nom, cette bienfaitrice ? »

Andran étira un grand sourire espiègle. Bien évidemment, il avait sa tactique bien à lui, et, malgré qu'il était prêt à aller plus loin qu'une simple soirée pour jauger son aîné, il voulait également se jouer de lui. Maintenant que sa vie s'apprêtait à se stabiliser un peu plus, et qu'il était prêt à suivre la voie du pardon et de la réconciliation, le chevalier voulait se faciliter les choses. Restait à savoir si Reynard serait ouvert au petit jeu auquel il a lui-même joué.

« Bien entendu. Mais... Je n'ai appris celui de Dame Anne-Lise que ce soir. Pourquoi vous donnerais-je celui de ma compagne ? » demanda Andran, taquin tant dans le sourire que dans la voix.
« Je t'accorde ce point. Et je suppose que tu comptes faire de même pour les éventuels enfants ? » demanda le frère, un sourcil levé.
« Je n'ai pas d'enfants ! » protesta le chevalier, comme si son frère avait blasphémé.

Et pour cause, il savait que ce jour était encore loin. D'ailleurs, contrairement à ce qu'avait supposé Reynard, Andran attendrait sûrement le mariage pour... toutes ces choses. A dire vrai, il avait déjà pensé au mariage, mais c'était, aux yeux d'une chevalier, une institution qui méritait un engagement des plus sincères. Il ne voulait pas précipiter cet événement pour s'assurer de ne pas perdre celle qu'il aimait.

« Très bien, très bien. » se résigna Reynard, qui ne souhaitait pas courroucer son frère. « Mais, tu ne comptes tout de même pas nous laisser sur notre faim ? Même moi, concernant Anne-Lise et mes enfants, je t'en ai livré quelques descriptifs. »
« A vrai dire, je ne suis pas sûr que tu me croirais si je te la décrivais. » dit Andran, sans aucune pointe de plaisanterie dans sa voix.
« Tu... C'est une paysanne ? » demanda l'aîné, qui arqua un sourcil et fronça l'autre.
« Si l'on peut dire, oui. Mais, l'un dans l'autre, je peux affirmer qu'elle n'est pas de la noblesse. »

Cette réponse suscita la surprise tant de l'aîné que de son épouse, qui échangèrent un bref regard. Un léger silence s'abattit dans la pièce, avant qu'Anne-Lise ne s'avance, et prenne la parole après avoir passé la langue sur ses lèvres.

« Et... vous pensiez sincèrement que nous vous jugerions pour cela ? » demanda la dame, dont le regard trahissait une réel questionnement.
« Ce n'est sûrement pas ce fait qui vous fera déchanter, Madame... »
« Anne-Lise. » corrigea-t-elle, elle qui abhorrait le formalisme de la noblesse. « S'il vous plaît. A cadre informel, noms informels. »
« A votre guise, Anne-Lise. » répondit Andran en souriant, même s'il ne cachait pas son étonnement. « Pour en revenir au sujet initial, je voulais vous signifier que ma compagne n'est pas une roturière ordinaire. »
« Cela doit être difficile à avaler ou avouer pour que tu en sois évasif à ce point. »
« Elle est estreventine... d'origine zuurthanienne. »

Si déjà son statut de roturière avait surpris les deux maîtres de la maison, celui-ci sonna presque comme un coup de grâce. De prime abord, la surprise se lisait plus que la haine, et ni Reynard ni Anne-Lise ne savaient quoi répondre, car nul doute qu'Andran était sincèrement attaché à cette femme pour qu'il accepte d'en assumer les risques, surtout dans un Nord foncièrement méfiant.

« Il est vrai que c'est difficile à croire... » nota Reynard, qui hésitait sur le choix de ses mots. « Et, je préfère t'avouer que ce n'est pas quelque chose que j'aurais aimé savoir au dernier moment. »
« Et c'est sûrement pour cette raison qu'elle n'est pas avec vous, ce soir. » conclut Anne-Lise. « Vous vouliez connaître notre réaction devant vous. »
« Pour être tout à fait honnête, elle est avec sa famille... sur ses terres. J'ai profité de son absence pour venir vous rencontrer. »
« Et, j'ose espérer que tu ne t'attendais pas à une leçon de morale ? »
« On ne sait jamais. Je sais que Père s'en serait donné à cœur joie. »
« Je ne suis pas notre Père. »

Ces derniers mots de Reynard étaient froids, secs, et trahissaient une certaine colère. Visiblement, il détestait les comparaisons avec ses parents, célèbres pour être parfois méchants et impitoyables. Au moins, une des nombreuses craintes d'Andran venait de s'envoler : son aîné n'était pas comparable avec son paternel... à leur paternel. Si cela ne prouvait pas qu'il était apte à entretenir des relations avec un ou une étrangère, cela était un bon point pour.

« S'il vous plaît, messieurs. Ne vous fâchez pas. Pas maintenant que vous parvenez à discuter calmement et respectueusement. » réagit Anne-Lise, de peur que cela s'envenime.
« Quoi qu'il en soit, je n'en dirai pas plus à son sujet. Je veux que vous découvriez ma compagne vous-même... et j'ai fait les promesses de tenir nombre de ses secrets. »
« Comme tu as dû découvrir Anne-Lise toi-même. » souligna Reynard, qui finalement, ne reprochait pas cela à son cadet. « Dans ce cas, la question qui demeure est quand. »
« Et où. Car, je suppose que votre sanctuaire n'est pas un lieu approprié pour les journées en famille. »[/i]
« J'ai financé l'achat de ma demeure, à Cantharel, et j'y accueillerai mon amante. Lorsqu'elle sera de retour, je vous promets que vous aurez mon adresse. »
« Ainsi, tu es prêt à renouer notre fratrie ? Après toutes ces années ? » demanda l'aîné au bord de l'émotion.
« Tu en as beaucoup fait, je suis le premier à l'admettre. J'ai enfin répondu à tes appels, mais il nous faudra plus d'une soirée pour savoir si cela est réellement possible. Mais, contentons-nous d'entretenir l'espoir. »

Andran tendit la main vers son frère qui s'en saisit pour une poignée de main solide et pleine de volonté. Comme il se faisait tard, Reynard proposa à son aîné de rester pour la nuit. La maison était composée de plusieurs chambres pour les inviter, et un bon lit ferait du bien au chevalier. L'aîné partit alors préparer la chambre, car les employés n'étaient plus disponibles aussi tard, laissant son épouse et son cadet seuls.

« Avant que nous nous séparions, je tiens à vous préciser certaines choses. Reynard est très attaché à vous, et depuis que je le connais, il n'a jamais bien vécu votre silence, et encore moins votre séparation. » commença la belle rouquine d'une voix assez basse, qui leva le doigt alors que son beau-frère s'apprêtait à répondre. Sa poigne et son charisme épataient Andran, qui ne réussit pas à intervenir. « Laissez-moi terminer. Je ne prétends pas que vous l’ayez mieux vécu. Je veux simplement vous faire l'aveu que mon époux a toujours entretenu l'espoir de retrouver son frère. Alors je vous supplie de prodiguer les efforts nécessaires pour que cela fonctionne, et de tenir vos promesses. »
« Et comment voudrez-vous que j'y parvienne si Reynard ne peut supporter la vue de ma compagne ? »
« Que Reynard soit méfiant envers les étrangers ou pas ne change rien au fait qu'il fera tout pour que vous vous réconciliez et... »
« Il l'est, oui ou non ? » la coupa Andran avec insistance.
« Je ne sais pas. Nous n'en avons jamais rencontré, mais, je connais mon mari, et je sais qu'il n'est pas un homme aux idées arrêtées et que, pour vous, il fera les efforts pour que cela se passe bien. Si elle a œuvré pour que vous soyez là aujourd'hui, c'est que cette femme mérite que Reynard et moi y attachions une certaine importance. Suffisamment pour que nous la respections et que nous acceptions votre relation pour le bien de votre fratrie. »
« Et vous ? »
« Je serais honorée de la rencontrer, et d'apprendre à vous connaître, vous comme elle. »

Anne-Lise s'interrompit lorsqu'elle entendit son époux revenir dans le salon pour prévenir que la chambre était prête pour Andran. Ce dernier le remercia, et laissa son aîné partir pour se coucher, son épouse se dévouant pour l'emmener à sa chambre. Ils se saluèrent d'une nouvelle poignée de main, accompagné de sourire timide, mais sincères. L'épouse de Reynard prévint qu'elle le rejoindrait au plus vite, restant seule avec Andran pour terminer leur conversation.

« Et comment faire si cette rencontre se passe mal. J'aime ma compagne, et je ne laisserai personne l'insulter et la salir sans broncher. »
« Votre loyauté et vos sentiments vos honorent, mais vous n'avez rien à craindre de nous. Et... c'est un risque qu'il vous faudra prendre si vous voulez renouer avec Reynard. Vous l'avez dit vous-même, il vous faudra plus d'une soirée. » La maîtresse de maison posa une main hésitante mais douce sur le bras de son beau-frère. « Soyez sans crainte, je vous promets que nous mettrons tout en œuvre pour que cette rencontre se déroule sainement. »

Andran hocha simplement de la tête pour acquiescer. Il était forcé de reconnaître que cette femme débordait de qualités, mais il n'avait plus qu'à espérer qu'elle soit honnête. D'une certaine manière, elle lui rappelait sa mère : douce, belle, bienveillante mais également charismatique et éloquente. Il ne restait qu'à espérer qu'elle soit honnête et loyale. Mais, si elle ne l'était pas, l'aîné l'aurait sûrement déjà répudiée.
Sans un mot, elle l'invita à le suivre jusqu'à sa chambre pour la nuit, puis le quitta à son tour pour rejoindre son mari. Finalement, Andran s'attendait à pire, pour ses premières retrouvailles. Reynard, comme Anne-Lise semblaient être de bonnes personnes, et le chevalier était forcé de le reconnaître. C'est donc le cœur assez léger qu'il dormit dans son ancienne demeure, celle où il avait vu le jour et vécu quelques années. Il repartit le lendemain, non sans avoir fait plus ample connaissance avec son frère, sa belle-sœur et ses neveux, ces derniers s'avérant des plus curieux. Il quitta son frère et sa demeure rassuré, et plein d'espoir pour la suite. Les deux frères Straggen pouvaient croire en la réconciliation.
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