Pourquoi ça sent le poisson ? | Kha’linas

An 18 du Cycle 11 Mois de Favriüs, premier mois de printemps, troisième ennéade, Julas

— Il travaille bien messire, assurait un homme bedonnant tout en agitant nerveusement les lunettes qu’il tenait dans sa main droite. Et précis avec ça ! C’est un véritable cadeau que vous me faites !

Il peinait à soutenir le regard argenté de son interlocuteur. Tranchant et froid comme l’acier, il le dévisageait intensément. Il le détailla un moment avant de revenir à son visage. L’homme portait une ample cape noire qui peinait à masquer son armure sombre et la large épée qui était suspendue dans son dos. Ses cheveux clairsemés de gris étaient retenus en arrière à l’aide d’un lacet des plus sobre et une barbe de quelques joues encadrées sa mâchoire, lui conférant un air dur que ce pauvre bibliothécaire n’était guère habitué à recevoir dans son établissement.

— Merci de prendre soin de Lyad, Darvan, fit la voix de Nehril en lui octroyant un sourire qui se voulait amical. Un piètre effort, à en juger la mine déconfite du bibliothécaire. Je repasserais dans quelques jours.

Il reporta son attention vers le jeune homme qui feuilletait plusieurs ouvrages à quelques mètres d’eux et leva une main pour lui signaler son départ. L’autre lui répondit maladroitement, faisant tomber quelques tomes en imitant son geste. Nehril secoua la tête et sortit du bâtiment.

Les odeurs disparates de la cité vinrent lui chatouiller les narines. Le matin même, plusieurs chariots de poissons avaient été renversés sur la place, baignant les lieux d’une odeur entêtante aux relents marins. Il était encore tôt, et le mercenaire songea à retourner à son auberge. Ceralyn ne l’accompagnait pas aujourd’hui, elle avait décroché un contrat dans les environs. Nehril s’était retenu de ne pas la suivre lorsqu’elle avait quitté l’auberge aux premières lueurs du jour, sachant qu'elle serait furieuse si elle venait à le surprendre. Il devrait lui faire confiance pour sa toute première mission. Mais cela ne l’empêchait pas d’être anxieux.

Un petit déjeuner pourrait le ragaillardir. Le mercenaire se mit en mouvement. Ainsi qu’une bière en accompagnement. Il marcha un peu plus vite. Une bière ou deux...

Les yeux vides fixaient doucement la goutte sanglante qui se frayait un chemin dans les crevasses de sa peau cendrée. Comme une rivière qui traçait doucement son passage sur une plaine rocheuse. La lame s’enfonça encore un peu plus, alors qu’une voix s’élevait. Une voix – que dis-je plutôt des murmures. De doucereuse paroles pour le visage hurlant, une offrande pour sa déesse. La goutte tomba doucement sur le masque d’Onous'Delab. Puis la porte derrière elle s’ouvrit, laissant s’échapper un grincement, avant de se refermer. Le regard de Gul’Uss ne bougea pas, se contentant de fixer le contraste du rouge sur sa peau cendrée. Ce fut Berg’il qui vint briser la méditation de la prêtresse.


« Il s’est enfui…. »


Et qui aurait pu le blâmer? Qui aurait pu blâmer cette pathétique créature? Il ne savait que trop bien dans quelles mains il était tombé. Savait trop bien le sort qu’il l’attendait a la fin de sa quête. Impassible, Kha’linas n’eut aucune réaction, comme si cela l’importait peu. A quoi bon être se laisser envelopper par la rage pour un insecte? La prêtresse planta un peu plus profondément la lame dans son bras, alors qu’elle cambra légèrement la tête, savourant ce désir électrisant remontant en elle. Les yeux clos, comme en extase, elle laissa s’échapper un soupir, avant de regarder droit devant elle, le couteau toujours bien ancré dans le bras. Elle expira profondément, toujours dos à Berg’il, ne le laissant pas voir son visage découvert. Avant de lui donner un ordre des plus explicite; « Et qu’est que tu attends pour aller le chercher? » Beg’il s’Inclina, même s’il se doutait bien que Kha’linas ne verrait pas son mouvement, mais jamais il ne ferait quoique se soit pour provoquer sa colère. Il lui était fidèle, avait voué sa vie à la protéger, même s’il se doutait très bien que cette dernière le tuerait en une seconde si elle le décidait. Il tourna les talons, puis sortit de la pièce, laissant Gul’Uss dans sa séance de torture.

***

Berg’il plissa le nez lorsque l’odeur de poisson atteignit finalement ses narines! Quelle puanteur! À se demander pourquoi les Thaaris adoraient tant cette cité en perdition! L’odeur, les mœurs, tout était hors de contrôle. De la bonne vieille discipline Eldéenne. C’est ça qui leur manquait! L’ilythiiri replaça la broche ressemblant étrangement à un visage hurlant qui tenait sa cape noire sur ses épaules, camouflant son armure ainsi que les nombreuses armes qu’il avait sur lui. On n’était jamais trop prudent dans ce pays de cinglé! Il balaya le regard de la foule de ses mirettes rouges, un doeb lui avait déjà mentionné que le dénommé Jor avait été aperçut au port. Probablement à espérer qu’un bateau l’amène incognito en péninsule, loin des mains de la Haute-Prêtresse. Il soupira avant de chercher la foule à nouveau. Mais où était ce maudit port? Comment était-ce possible de se repérer dans cette saloperie de ville. Soudainement, une figure encapuchonnée attira son attention. Il pouvait voir la carrure de son armure sous la cape, peut-être un mercenaire ou un soldat? Bref, quelqu’un qui pourrait l’aider à trouver le rat qui s’était enfoui. Berg’il s’approcha de l’homme avant de l’interpeller. « Eh toi! » commença l’ilythiiri, « Tu m’as l’air de savoir te retrouver dans cette cité. Ou pourrais-je trouver un mercenaire pour une tâche rapide? Et surtout, ou es le port? »

Nehril pivota en direction de l’homme qui avait pris la parole. Il le détailla un moment avant de répondre.

— C’est ton jour de chance, je suis un mercenaire, fit-il en se tournant complètement vers lui. Il lui octroya un sourire carnassier. D’ordinaire, je t’aurais conseillé de suivre l’odeur de poissons pourris pour trouver le port, mais ces derniers jours toute la cité empeste la poiscaille.

Le semi-elfe hésita un moment. L’attrait d’une bière fraîche et d’une après-midi d’oisiveté semblait encore le tenter.

De l’argent facile, songea-t-il en faisant quelques pas vers l’inconnu.

— Je peux t’y conduire si tu le souhaites, annonça-t-il finalement. Suis-moi et donne-moi les détails.

Berg’il regarda l’homme – ou plutôt l’elfe? Du moins la chose qui lui faisait face, difficile à dire avec cette énorme barbe! Il était particulièrement dégouté de demander de l’aide à ce grand barbu, mais ce n’est pas comme s’il avait nécessairement le ton de négocier toutes les clauses du contrat. Il acquiesçât avant de suivre dans la rue le mercenaire. Curieux comme ce dernier n’avait pas négocié son tarif. À croire qu’il était réellement désespéré, ou qu’il allait l’entuber. Malheureusement pour lui, c’était avec la favorite de Kiel qui s’occuperait de lui à ce moment-là et l’Ilythiiri ne souhaitait même pas cela a son pire ennemi. « Je ne te le fais pas dire! Cette ville empeste le fretin! Je sais pas comment vous faites, les Vaanies pour supporter ça! » Il suivit le mercenaire, portant ses mirettes rougeâtres sur les passants, cherchant du regard sa cible. « Je cherche un homme, un esclave que ma maîtresse a acquis il y a quelques jours. Il est grand, bien bâtit, a de longs cheveux bruns et des yeux verts. » Il s’arrêta un moment, pensif, tentant de se rappeler son véritable nom, mais il fallait croire que les deux ilythiiris n’en n’avaient rien eu à battre de son prénom, préférant lui donner un adorable sobriquet qui ne cachait pas son statut de vermine.


« Oh! Et il a une grande cicatrice au visage, sur l’œil droit. » Berg’il continua à suivre le mercenaire, en tassant les gens qui se dressait devant lui. Rien à dire, il était agacé par cette situation. Quel détail supplémentaire pouvait-il réellement donner au mercenaire? Il savait le plus important en ce moment. Inutile de lui dire d’où il venait et qui il servait. De toute façon les Vaanies le sauraient bien assez vite. Quant à Jor, il s’assurerait de trouver les bonnes chaînes la prochaine fois. À croire que Gul’Uss n’avait pas été assez clair dans son message. « T’as d’autres questions sur le fugitif? En tout cas, tu peux être assuré que ma maîtresse te payera bien.» Parlant de paiement… « Ça fait longtemps que tu roules ta bosse comme mercenaire? » Ce n’était pas de la politesse, mais une façon de savoir quel prix tout cela allait coûter…

Nehril écouta attentivement les propos de l’homme tout en le guidant à travers les rues de la cité. Les badauds s’écartaient naturellement d’eux, jaugeant plus prudent de faire de la place à ces deux hommes qui arboraient une mine patibulaire.  

— On cherche donc un esclave, répéta le mercenaire aux yeux d’argent en balayant les alentours. Il laissa un silence avant de répondre à sa seconde interrogation. Depuis combien de temps j’exerce ce métier ? Il eut un rire sans joie. Depuis longtemps. Bien trop longtemps…

À mesure qu’il se rapprochait du port, la foule se fit plus nombreuse, plus houleuse, et des éclats de rire et des rugissements de colère retentirent devant eux.

— Apparemment votre homme s’est réfugié là où il sera difficile de le retrouver, commenta Nehril en fronçant les sourcils. Avec de la chance, ce sont ses vêtements qui le trahiront.

Il jeta un coup d’œil à son compagnon.

— Pas sa cicatrice, confirma-t-il en lisant la question sur le visage de l’homme. N’importe quel imbécile arborant une marque aussi visible l’a cacherait aussitôt, là où se vêtir nécessiterait de l’argent. Il caressa sa barbe brune, pensif. Comment était-il habillé ?

Voler de l’argent serait également une solution pour lui, songea le mercenaire, mais les gens d’ici sont prêts à se battre bec et ongle pour la moindre pièce volée.

— Nous devrions chercher un homme emmitouflé dans une large cape, drap ou autre. Quelque chose susceptible de cacher son visage et son corps.

Comme pour confirmer ce qu’il disait, il arracha la capuche d’un passant qui se mit à l’injurier. Sous le regard flamboyant du mercenaire, ses insultes se tarirent tout aussi vite et il se hâta de s’éloigner.

Depuis bien trop longtemps… Et il ne donnait pas ses tarifs dès le départ? C’était peut-être une tradition de Vaanie. Quitte à se faire entuber, autant que ça soit bien profondément par les mercenaires locaux! Les deux êtres arrivèrent finalement au port de Thaar, et l’ilythiiri ne put s’empêcher de froncer les sourcils alors que l’odeur pestilentielle venait à nouveau se saisir de ses narines. Mais quel quartier de merde! L’odeur salée et celle du poisson s’entremêlait à la sueur de la vermine.  L’arête de son nez se fronça alors que les mirettes rubis se mirent à détailler la foule qui vaquait à son occupation. C’était définitivement un canarphadeum de race cette ville! Les humains qui se mélangeaient aux hydrides. Un elfe qui aidait un drow a transporté une caisse. Décidément, une honte à l’Elda !


« Apparemment votre homme s’est réfugié là où il sera difficile de le retrouver. Avec de la chance, ce sont ses vêtements qui le trahiront. »


Berg’il se tourna vers le mercenaire en haussant un sourcil. Ses vêtements? Puis lorsque l’explication vint il haussa des épaules. Ouais, c’était logique. Mais que portait Jor au moment de sa disparition? Et surtout avait-il des vêtements tout courts. Pensif, le drow resta silencieux, tentant de se rappeller la moindre information qui pourrait les aider, ce qui était un défi en soit, lorsque l’on porte peu attention à la vermine. « De mémoire, il avait une tunique de lin et de pantalons bruns. Rien qui puisse réellement nous aider plus que ça. Peut-être qu’il y avait quelques taches de sang sur sa tunique, car il a passé un mauvais moment avec Suliss avant de s’enfuir. » Il s’arrêta net, remarquant qu’il en avait déjà un peu dit trop.


« Nous devrions chercher un homme emmitouflé dans une large cape, drap ou autre. Quelque chose susceptible de cacher son visage et son corps. »


Berg’il acquiesçât alors que le mercenaire enlevait la cape d’un passant. Bon certes, quelques paroles colorées volèrent, mais l’homme s’arrêta net devant l’air de l’homme aux cheveux blanc. L’ilythiiri se mit à marcher à travers la foule observant les visages et surtout les réactions des gens qui l’entourait. Puis il remarqua une figure encapuchonnée qui lui lança un regard avant de s’engager dans une ruelle. C’était suspicieux. Beaucoup trop suspicieux. «EH! » Merde! C’était quoi déjà son nom? Peu importe, le mercenaire semblait avoir capté qu’il lui parlait. Il montra la ruelle d’un mouvement de menton, lui faisant comprendre que quelques choses clochaient, puis se faufila dans la foule pour atteindre ladite ruelle. Celui lui prit quelques longues secondes, les badauds se tenaient bien serrés, et le port était bondé à cette heure. Néanmoins, le drow put au moins apercevoir le pan de tissus au bout de la ruelle, alors que le fuyard tournait à droite. Berg’il dégaina rapidement son épée avant de se mettre en marche dans la ruelle. « Ou trouver quelqu’un qui tenterait de nous éviter…» dit-il, expliquant vaguement la situation au mercenaire.

Lorsque Berg'il se tourna pour s’adresser à Nehril, il remarqua que ce dernier avait disparu. Au moment même où l’homme lui avait désigné la silhouette encapuchonnée, le mercenaire s’était aussitôt engouffré dans une ruelle adjacente qui empestait la charogne. L’odeur aidant à faire fuir les badauds, la venelle était vide et les quelques obstacles que formaient plusieurs caisses furent hâtivement contournés.

Berg'il put voir disparaître au fond de la ruelle un coin de la cape du fugitif, mais celle-ci fut immédiatement suivie par la silhouette du semi-elfe qui l’agrippa avec force. Lâchant un piaillement aigu, l’homme essaya de se débattre et fit quelques nouveaux pas avant de s’effondrer au sol.

Lorsque Berg'il rejoignit le mercenaire, il put observer une étrange scène. Nehril avait sa longue épée dégainée et clouait le fugitif au sol avec sa pointe. Derrière lui une large foule vaquait à ses occupations sans leur prêtait attention. Elle était si dense et si compacte que si jamais le semi-elfe relâchait son emprise sur l’esclave en fuite, il disparaîtrait pour de bon. Quelques navires mouillaient également et les cris rauques qui s’élevaient ne laissaient que peu de doute sur leur départ imminent.

Nehril adressa un sourire carnassier à Berg'il.

— Et maintenant, si on négociait ma prime ?

« Et maintenant, si on négociait ma prime ? »


Berg’il s’arrêta net à l’entrée de la ruelle, alors qu’il avait devant lui un spectacle hors du commun. Cela avait été bien trop facile! Peut-être qu’il n’aurait pas dû demander l’aide de l’homme au final? Mais bon, il était trop tard… « On peut dire que c’est mérité! Alors quel est ton prix? » Bon il n’avait pas d’argent sur lui, mais il inclurait bien le transport de la marchandise jusqu’au manoir où ils logeaient. C’est alors que Jor sembla réalisé ce qui se passait. L’humain observa le mercenaire, avant d’avaler difficilement sa salive. Il pouvait sentir ses doigts s’enfoncer dans la poussière, se mélangeant avec le sang séché qu’il avait encore sur ses doigts. Une de ses arcades sourcilières semblait gonflé, et légèrement bleutée, preuve que quelques sévices lui avaient été administré durant son court séjour chez l’Obok Yatharil de Kiel.


L’expression du mercenaire sembla réveiller quelques choses chez l’humain. Ces yeux s’agrandirent alors qu’il fixait le sourire carnassier du mercenaire. Il sentit la panique sembla s’emparer de lui. Il devait faire quelques choses, sinon il y passerait, sinon il ne pourrait jamais survivre – du moins le croyait-il. Jor tenta tout de fois un dernier essai désespéré, il attrapa la cheville de Nehril avant de se mettre à crier. « Non, s’il vous plait! Tout mais pas ça! Ne me ramenez pas à….à… à elle.  »  Son regard semblait suppliant, alors que ses mains tremblaient sur la cheville du demi-elfe. Il était terrifié, mais cela ne l’empêcha pas de continuer son plaidoyer; « Tuer moi…. Tuer moi au lieu de me ramener. » Berg’il soupira avant d’asséner un violent coup de poing au visage de l’esclave. Il se retourna vers Nehril avant d’hausser les épaules; « Ah les esclaves… que de la vermine! » L’ilythiiri toucha l’esclave du bout du pied, s’assurant que ce dernier soit bel et bien KO, avant de se tourner vers le mercenaire; « J’vais supposer que le transport était inclus? » dit-il un sourire carnassier aux lèvres avant de renchérir; « Nous longeons dans un petit manoir en bordure des soieries, rien de trop pompeux, mais ce n’est pas à côté. » Oh oui. Berg’il ne soulèvera définitivement pas la vermine, après tout pourquoi engager un mercenaire s’il ne faisait pas le travail…

L’homme n’avait pas l’intention de le payer. Il n’avait aucun argent sur lui. De ça, le mercenaire venait de le comprendre. Il avait eu pour intention de forcer Berg'il a s’acquitter de sa dette, et avait préféré garder le jeune esclave sous le coude comme garanti. S’il s’était avéré que Berg'il, comme l’innombrable majorité des employeurs de Nehril qui brillait par leur malhonnêteté, n’avait pas l’intention de lui fournir une rétribution sonnante et trébuchante, il aurait relâché l’esclave dans cette foule dense et il n’y aurait eu aucun moyen de le retrouver. Malheureusement les choses ne se déroulèrent pas comme il l’avait prévu.

Déjà, Berg'il n’était pas son contractant direct. Il n’était qu’un subordonné. Et Nehril détestait négocier avec les subalternes. Pour une raison toute simple : le mercenaire aimait jauger en amont de la solvabilité de la personne qui choisissait de l’employer. Cela lui permettait également de ne pas se faire plonger un couteau dans le dos. Le problème inhérent à la situation dans laquelle il était actuellement, résidait dans le fait qu’il ne savait rien de sa mystérieuse maîtresse. Y avait-il une embuscade qui l’attendait dans ce manoir ? Cette femme était-elle une figure d’autorité de la ville ? Souhaiterait-elle que disparaissent cet esclave désobéissant et celui qui l’avait attrapé afin de dissimuler des preuves ?

Nehril avait roulé sa bosse. Il avait vu de nombreuses choses, comme pouvaient l’attester plusieurs de ses cicatrices. Prendre en otage le jeune homme jusqu’au manoir et menacer de le tuer si jamais quelque chose tourner mal n’était guère une solution viable. Cette « maîtresse » pouvait n’avoir aucun intérêt à sa survie.

Les réflexions de Nehril furent interrompues par l’esclave qui s’emparait de sa cheville, une lueur folle dans le regard.

— Encore une maîtresse cinglée hein ? marmonna-t-il pour lui-même. C’est à croire que je ne cesse de les attirer.

Le mercenaire releva le jeune homme d’une poigne ferme.

— Désolé, mais je ne peux rien faire pour toi. Il reporta son attention sur Berg'il. Conduis-nous.

Après quelques détours qui témoignés de la maladresse de Berg'il a s’orienter dans cette cité, ils arrivèrent rapidement face à un manoir imposant. Nehril haussa les sourcils en se demandant comment il faisait pour ne fréquenter que des personnes qui vivaient dans un luxe ostentatoire : Neassa, Maralina… Il se mit à regretter la tour sale et poussiéreuse du repère de Dante. Ainsi que sa bouteille d’alcool.

Il patienta longuement dans une large salle. Berg'il venait de le quitter. Le semi-elfe tourna sa tête vers l’esclave.

— J’ai cru comprendre que tu ne souhaitais pas revenir ici, s’enquit-il d’une voix écorchée. Pourquoi ?

L’esclave déglutit avant de regarder autour lui, « J’ai eu des maîtres qui étaient fous… Mais elle… elle est juste mauvaise… » Il avala sa salive alors que sa respiration s’accélérait. Il pouvait sentir son torse se refermer alors que la panique commençait à s’emparer de lui. Ses membres se mirent à trembler alors qu’il lança un regard terrifié au mercenaire; « C’est l’Obok yatharil de Kiel Elghinn. » Il ne put parler après cela. Sa gorge se resserra alors que la panique le laissa complètement muet. Jor ignorait si le mercenaire comprenait le drow. Ignorait s’il savait qui était la Haute-Prêtresse de Kiel, ou même s’il avait seulement une idée de qui était la maîtresse des souffrances. Il ouvrit la bouche pour tenter de parler à nouveau, mais soudainement il ne put respirer, comme si une main écrasait ses poumons. Puis, il la vit… il vit la figure voilée qui se tenait dans l’obscurité. Trop occupé par sa conversation, il n’avait pas entendu le murmure, n’avait pas vu cette main torturée se crisper alors que le sortilège à peine audible s’échappait de son masque.


«Dos telanth ulu mzilt»
Tu parles trop.


Ce fut à ce moment que Berg’il entra dans la pièce en faisant un vacarme hors du commun. Voyant que Gul’Uss y était déjà il s’arrêta avant d’incliner la tête en murmurant; « Suliss » Bien conscient de la bourde qu’il venait de commettre. Il avait espéré pouvoir payer le mercenaire avant que la prêtresse s’en rendre compte, question d’éviter quelques problèmes, mais ce n’était pas aisé de cacher quoi que ce soit à la grande figure voilée. L’ilythiiri relâcha finalement son sort, et il put enfin respirer. Il s’écroula sur le sol, profitant qu’il pouvait à nouveau avaler de grandes bouffées d’air. Pendant qu’une voix impassible, semblant dénudé d’émotion vint briser l’ambiance des plus légères.


«Usstan orn'la saph zhaun ele gaer zhah natha darthirii wun ussta delmah»
J’aimerais savoir pourquoi il y a un elfe dans ma demeure.


Bon en tant que tel, ce n’était pas réellement sa demeure, mais un manoir emprunté a un doeb adorateur de Kiel. Mais bon, soyons honnête, il n’avait pas à refuser à la prêtresse quoi que ce soit.


«Usstan'bal hired ukta ulu ragar jor lueth uk grahs tlu yaithess»
Je l’ai engagé pour trouver le rat et il est là pour être payé


Le silence s’empara de nouveau de la pièce, alors que les yeux vides fixaient à travers son épais voile le demi-elfe qui avait fait éruption chez elle. Une vermine, un moins que rien. L’idée de le torturer lui traversa l’esprit, mais à quoi bon? C’était une pauvre offrande à faire au visage hurlant.


« Quel est ton prix, demi-elfe? » enchaîna la Prêtresse dans un olliyan parfait.


Berg’il se redressa alors qu’il entendit le terme elfe. Ses yeux se portèrent sur le mercenaire, l’air légèrement méfiant. À croire qu’il avait réellement merder. Puis la voix impassible reprit la parole;


« Berg’il, ramène la vermine dans sa cellule. Assures-toi qu’il ne puisse plus bouger. »

Nehril écouta les propos de l’esclave avec attention avant qu’il ne soit brusquement interrompu par l’arrivée d’une femme voilée. Il comprit aussitôt qu’il avait affaire à la mystérieuse employeuse de Berg'il ainsi qu’à la vile maîtresse de l’esclave. En détaillant ses vêtements, le mercenaire leva un sourcil dubitatif. Voile et robe noire, elle avait tout d’une grande antagoniste de roman telle qu’aimaient les lires Ceralyn. Son pouvoir était néanmoins véritable, comme en témoignait le visage bleuté de Jor.

Nehril attendit qu’elle s’entretienne avec Berg'il dans sa propre langue, comprenant l’essentiel de leur conversation même s’il n’avait guère eu l’occasion de travailler son drow. Généralement il se limitait aux « Je vais te crever » et « Dégage d’ici pouilleux ». Il n’était pas sûr que ce genre de phrase soit véritablement approprié dans cette situation.

Lorsque la drow lui demanda son prix, le mercenaire découvrit ses dents :

— Un souverain suffira, lâcha-t-il visiblement sur de lui. Après tout, la poursuite fut brève et la lutte quasi inexistante.

Nehril jeta un regard vers Jor et croisa les bras. Les deux sous-fifres semblaient terrorisés par la présence de la femme. C’était une raison supplémentaire de s’en méfier. Mais après tout, il n’était ici que pour encaisser sa prime, pas pour tailler une bavette. Il était hautement improbable qu’ils se recroisent à l’avenir.

Les yeux vides fixèrent le mercenaire alors que ce dernier ne réclamait qu’un souverain. Cela ne lui annonçait rien de bon. Peut-être qu’il avait quelques choses en tête. Peut-être irait-il raconter des informations aux Princes Marchands.  


« Kyorl »
« Attend »


Berg’il s’arrêta net alors que ce dernier empoignait l’esclave pétrifié. Il lança un regard interrogateur à Gul’Uss, puis voyant que cette dernière ne daignait pas lui donner une explication, il retourna à son poste, bloquant la porte derrière lui. L’okok yatharil, quant à elle, enleva doucement le voile qui couvrait son visage pour dévoiler un visage camouflé par un masque Onous'Delab. La seule chose que le mercenaire put voir était ses prunelles blanches, terrifiante. Un regard vide d’émotion. Vide d’humanité. La main brûlée lâcha le voile sur une table non loin, alors que reprendre la parole; «Ce prix me semble inadéquat.» Immobile, son regard ne se détacha pas du mercenaire. Il semblait si calme, si insouciant. À croire qu’il ne croyait pas au panthéon eldéen.


« La lâcheté est pire que la paresse… » dit-elle s’approchant du demi-elfe, s’arrêtant tout près de ce dernier alors que les prunelles vides rencontraient les siennes. Sa main torturée se crispa alors que les murmures l’envahir, alors qu’elle entendait leurs paroles. Le torturer…. Non… Il ne briserait pas. Par contre, sous ses aspects de dur a cuir il avait peut-être une petite lueur qui pouvait s’entrevoir. Ne restait qu’à voir jusqu’où elle pourrait le pousser. Laisse-le s’envelopper dans l’obscurité… Un sourire apparut derrière le masque, Gul’uss, si elle avait tenté d’étouffer ses pensées, maintenant elle les embrassait, elles faisaient partie d’elle, elle était son ombre et son guide. C’était la voix de Kiel. La voix de la maîtresse des souffrances qui lui murmurait à l’oreille, sous les peurs effrénées des flammes qu’elles avaient prises. Si au début, la prêtresse avait eu du mal à faire la différence, maintenant elle savait pertinemment quelle voix était celle de sa maîtresse. Elle contourna doucement le mercenaire, laissant ses longs cheveux blancs virevolter, alors qu’elle continuait son chemin vers Jor « Dis-moi, mercenaire. Comment devrais-je punir ce lâche? » L’obok yatharil s’arrêta devant son esclave terrorisé. L’humain tremblait devant la prêtresse masquée, il était totalement pétrifié par la peur, sachant déjà trop bien ce qui arriverait…

Les yeux de Nehril se plissèrent d'un air méfiant. La drow ne semblait guère vouloir le laissait partir après qu’il ait empoché son maigre salaire. Il avait pensé qu’en sous-évaluant ses services, il aurait regagné rapidement la lueur du jour. Ses sens lui criaient que la femme empestait la violence et le meurtre, mais le semi-elfe, plutôt habitué à de telles fréquentations, resta impassible même si quitter les lieux lui démangeait atrocement.

Lorsqu’elle fit mention de la paresse, le mercenaire haussa les épaules avant de se tourner vers Jor. Il détailla un moment son visage terrorisé avant de reporter son attention sur la drow. Il connaissait ce timbre de voix qui ne présageait rien de bon pour l’esclave.

— J’imagine que sa mort lui paraîtra trop douce à vos yeux, commença Nehril en plongeant ses deux yeux glacés dans le regard sans vie de la drow, et qu’une torture mentale préalable lui siérait davantage.

Nehril croisa les bras, faisant crisser les mailles qui recouvraient son torse. Il se rendit compte qu’il s’était placé du point de vue de la femme, non du sien. Il s’agissait d’une fâcheuse habitude qu’il avait prise dans l’optique de comprendre les motivations de ses employeurs. Il reprit donc d’une voix plus tranquille, s’efforçant de trouver une réponse plus adéquate :  

— Tout dépendrait de la lâcheté dont il a fait preuve. Le lâche des uns est souvent le brave des autres. Mais si son comportement vous a fortement déplu, une correction est souvent bien plus efficace que la mort. Cela évite à devoir reformer un nouvel esclave aux tâches auxquels celui-ci est habitué. Qui plus est, cela permet de l'apprivoiser. Le semi-elfe leva les mains. Mais je dois dire que je n’ai jamais eu d’esclave. Je crains de n’avoir aucune autre réponse satisfaisante.

Un sourire étira ensuite ses lèvres cendrées alors que ses bras retombaient lentement à ses côtés.

— Et vous ? Comment traitez-vous les lâches ?

La lâcheté est pire que la paresse… Deux reproches bien distinctes qui pouvaient non seulement décrire Jor mais aussi Berg’il. Après tout, c’était ce dernier qui avait engagé un mercenaire pour retrouver un simple esclave… Quelle perte de temps! Il faisait définitivement un piètre garde du corps… Incapable de retrouver un humain à moitié crevé. Peut-être que c’est lui qu’elle devrait punir. Peut-être que c’est lui qui satisferait les voix dans sa tête? Non… Pas lui. La tête de l’Obok Yatharil eut un léger tic, alors que la voix rugissait dans sa tête. Il est inutile, je ne le veux pas. Cela ne servirait à rien. Tellement de voix différentes, tellement de murmures, mais tous semblaient avoir la même idée… Punir Berg’il ne satisferait pas le visage hurlant… Gul’Uss redressa soudainement la tête avant que sa voix ne s’échappe derrière du masque. « Torture mentale? Non… je crois que ce n’est pas nécessaire. » Suffisait de regarder le nordien pour que ce dernier se mette à trembler. Elle l’avait déjà brisé. Avait déjà brisé son simple petit esprit, il lui obéissait, mais la peur de mourir l’aveuglait. Il avait encore beaucoup de travail à faire, mais elle se doutait bien qu’il ne survivrait pas ses traitements. Cela ne serait pas une grande perte il fallait l’avouer…


La Prêtresse resta un moment silencieuse, écoutant attentivement les remarques du demi-elfe. Elle pouvait sentir l’excitation s’amoindrir jusqu’à sa dernière phrase. Le masque impassible se retourna vers le mercenaire, alors que les prunelles vides semblaient s’illuminer d’un tout autre éclat. « Connais-tu Kiel Elghinn, demi-elfe? » Question rhétorique, elle se doutait bien que ce dernier n’avait pas l’illumination que pouvait donner la maîtresse des souffrances. Berg’il eut un sourire, alors qu’il se cala un peu plus contre la porte, écoutant attentivement l’Obok Yatharil. La main de Kha’linas se crispa alors que les murmures revinrent. Éduque-le… Montre-moi s’il peut survivre nos enseignements… La main brûlée, torturée sembla se détendre pendant un court instant, alors que la voix dénudée d’émotion traversa une nouvelle fois le masque. « La maîtresse des souffrances est celle qui nous guide à travers la douleur, qui nous apprend à ne pas en avoir peur. À l’apprécier… » Elle fit un pas, vers le mercenaire, s’arrêtant à quelques centimètres de ce dernier alors que les prunelles blanches fixaient ses mirettes. « Je ne te dirais pas comment je punis les traîtres, mais je peux te le montrer. Si tu sens que tu peux y assister… » Un sourire amusé vint orner son délicat visage derrière le masque alors qu’elle remontait doucement ses manches, dévoilant des bras entièrement déformés par l’acide, des brûlures horribles, dégoutantes, qui ne donnaient aucunement envie de survivre aux mêmes enseignements que l’Obok Yatharil.

Nehril ne prit pas la peine de répondre à sa question, car il jugea que celle-ci était rhétorique. Néanmoins le nom de Kiel Elghinn ne lui était pas totalement étranger. Il aurait juré en avoir entendu parler à Frontière, peu de temps avant s’être infiltré à Sol'Dorn lorsqu’il avait pour mission d’y escorter le jeune Lyad. Mais sa mémoire pouvait lui jouer des tours, donc il préféra ne pas réagir.

Le mercenaire nota la proximité de Kha’linas, mais ne fit aucun mouvement pour se mettre hors de sa portée. À sa dernière proposition, il sentit qu’elle le mettait au défi d’accepter de voir comment elle se chargeait de ses traitres.
Le semi-elfe resta un moment indécis. Après avoir échangé quelques mots avec la drow, Nehril n’avait désormais qu’une hâte : partir au plus vite de cet endroit. Les yeux sans vie de Kha'linas lui laissaient un léger goût amer dans la bouche. Il avait un mauvais pressentiment. Il espérait qu'en définitif il ne lui faille pas tailler un chemin l’épée au clair pour sortir de cette demeure.

Finalement, malgré ses réticences, il hocha la tête. Il était plus sûr d’accepter sa proposition. D’autant plus qu’il était légèrement intrigué par sa manière de régler le sort des traitres. Après tout, cela pourrait lui donner des idées lorsqu’il tomberait sur un individu particulièrement récalcitrant.

Pauvre petite créature…

Ce fut la seule pensée qui lui traversa la tête. Son silence et son attitude voulait tout dire. Ou était passé le bravard de mercenaire? Il semblait que l’Obok Yatharil avait cet effet sur les gens. Elle attirait les regards, elle donnait l’impression d’être une créature cauchemardesque. Rien de son physique, du moins, les traits qu’elle laissait volontairement à la vue de tous était invitante. Ces bras, brûlés, étaient une horreur sans nom, ses mains tordues semblaient être crispées dans une position des plus inconfortables.  « Que se passe-t-il, mercenaire? Tu as perdu ta langue? » Kha’linas s’approcha doucement de l’elfe s’arrêtant qu’a quelques centimètres de ce dernier. Les prunelles fixant celle du mercenaire, observant la moindre réaction, le moindre malaise. S’il tentait de se montrer brave, il était loin de l’impressionner. « Si j’étais toi, je partirais rapidement. Cet endroit est particulièrement morne. Ne trouves-tu pas? » Elle plissa légèrement les yeux alors que sa main se crispa à nouveau alors que les murmures recommençaient.


Kha’linas recula de quelques pas avant de se retourner vers Jor qui la regardait d’un air effrayé. Tous ses membres tremblaient comme une feuille alors qu’il était recroquevillé dans un coin de la pièce, l’air terrifié. C’était réellement pathétique de voir un si grand homme perdre son attitude… Un spectacle des plus désolants. « La pièce a besoin d’une touche de rouge… » Elle prit une lame qui se trouvait sur une table avant de tourner la tête sur le côté, enfonçant la lame dans la paume de sa main, traçant une croix. Et soudainement Gul’Uss s’approcha de son esclave avant de gifler ce dernier, laissant une marque ensanglantée sur la joue de ce dernier. Jor laissa échapper un couinement de peur avant de se laisser tomber sur le côté, les genoux repliés contre son torse, tel un enfant. Les yeux vides se retournèrent vers le demi-elfe. « Tu es encore là? » Berg’il fit signe au mercenaire de sortir par la porte avant de lui tendre une petite bourse emplie de pièce. Kha’linas se retourna vers son esclave, le couteau toujours en main, regardant à nouveau la pauvre excuse d’homme qui lui servait d’esclave. « Encore une fois, je suis laissé insatisfaite… Mais ne t’inquiète pas… Je ferais tout avec toi, Jor.» L’humain se mit soudainement à pleurer bruyamment, signe que les prochaines heures seraient particulièrement difficiles.

Le mercenaire resta impassible en la voyant s’approcher à nouveau.

« Que se passe-t-il, mercenaire ? Tu as perdu ta langue ? »

Les yeux de Nehril se plissèrent. Un bref éclat de colère traversa ses yeux argentés. Que la drow y prenne garde, il n’était pas un de ses esclaves.

— Ma langue est bien où elle est, drow. C'est mes pieds qui désirent être ailleurs.

Le semi-elfe balaya rapidement le regard des lieux, notant plusieurs sorties avant que Kha’linas ne reprenne.

« Si j’étais toi, je partirais rapidement. Cet endroit est particulièrement morne. Ne trouves-tu pas ? »

Nehril la fixa un instant avant de jeter un œil à Berg'il. Ce dernier ne s’écartant toujours pas de la porte, il fronça les sourcils, mais ne fit aucun signe pour lui demander de le laisser passer. Il assista à la gifle qu’un des sous-fifres de Kha'linas asséna à Jor avant que cette dernière ne se tourne à nouveau vers lui.

« Tu es encore là ? »

Berg'il s’écarta finalement de la porte avant de lui tendre une bourse remplie. Si la femme avait manifestement un goût particulier pour la torture, elle payait bien. Nehril empocha l’argent en hochant la tête avant de quitter la demeure, tâchant de faire abstraction des hurlements qui commençaient à s’élever derrière lui.