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 L'Oeuvre de Ceädon

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Árólindë Yuitë
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MessageSujet: L'Oeuvre de Ceädon   L'Oeuvre de Ceädon I_icon_minitimeLun 27 Nov 2023 - 21:14

Sixième ennéade de Karfias,
An 21 du Cycle XI,
Ancienne Cité d’Olorainë


Ils avançaient de front. En tête, Eäroníra imposait un trot rapide au reste de la colonne, qui filait ses pas et s’adaptait à son allure. Le drow courrait à ses côtés, sa détermination irradiant de lui comme sourdait l’espoir des racines de l’Estel. A cette résolution, Árólindë avait cédé. Ils allaient aux devants des mêmes dangers et l’épée levée du Lieutenant, l’acier au clair, témoignait de l’abdication de ses réticences.

Autour d’eux se leva le bruissement de dizaines d’ennemis. Enrôlés par la magie du Sorcier-Nécromant, des corps inanimés se mettaient à se mouvoir, subrepticement visibles entre les piliers de pierre rongés par leurs veinules bleus et la sylve, et convergeaient vers ce qui s’apparentait au centre de la Cité. Les engeances répondaient à l’appel de leur maître. Les elfes pressèrent les flancs de leurs montures. Les fines sentes se changèrent en allées, résurgences de la civilisation citadine dans l’enfer hurlant de la forêt viciée. Les ruines se firent plus denses alors qu’ils avançaient vers le cœur du domaine du Seigneur-Sorcier d’Aduram.

Avec un nouveau hurlement, les engeances déferlèrent des deux côtés de la colonne. Désormais, il n’y aurait plus de répits ; les dernières forces du Nécromant se jetaient dans la mêlée avec une fébrilité qui se lisait dans les Flux qu’il agitait. Sans ralentir, les guerriers chargèrent les créatures qui venaient de l’avant, éventrant la muraille de chairs qu’ils opposaient à leur progression. Sur les flancs du détachement taledhel, Aigles et soldats wyslenans jouaient du fer pour ne laisser aux pantins aucune faille dans la formation qu’ils puissent exploiter. Ils allaient au-devant d’un Frère à l’écorce d’ébène qui s’élevait au milieu des décombres d’Olorainë, autour duquel s’était organiquement agrégé une imposante habitation.

L’antre de Porte-La-Peste. Le trône du Seigneur-Sorcier d’Aduram.

Dans le poing d’Árólindë se condensèrent les Flux et, lorsqu’il l’ouvrit, la foudre déflagra. Il fit glisser son bouclier sur son avant-bras et en saisit fermement la poignée. Une cabrade autoritaire d’Eäroníra et un coup de taille lui permirent de se dégager l’espace pour sauter à terre et entraîner la colonne avec lui. La moitié des elfes posèrent également pied au sol et tous reprirent le cri de guerre du Lieutenant porté par les vents qu’il avait invoqué.

« – MAHTARN OTSERCA ELENANRE ! »
Soldats de l’Etoile à Sept Branches !

Son égide brisa l’échine d’une bête. La forêt insufflait une haine qui était le combustible de sa rage. Une haine lucide qui prenait pour objet le palais d’ébène et son occupant.

Un poing tissé de Flux projeta les engeances qui lui faisaient face. L’anathème périrait par le feu.

Sa lame tournoya et lacéra des poitrine nues, qu’elle perfora ensuite d’estocs ravageurs. Le sang du Sorcier allait couler.

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Xal'Zhaun
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MessageSujet: Re: L'Oeuvre de Ceädon   L'Oeuvre de Ceädon I_icon_minitimeJeu 30 Nov 2023 - 20:47


Les griffes noirâtres d’un abject amoncellement de chairs sifflent devant ton visage. Tu te baisses, roules sous la créature difforme, laissant derrière toi et sous lui une discrète trace de carmin, une goutte de sang de la main que tu as entaillée. L’un de tes petits soldats de bois, comme alléché par l’odeur, s’élance soudain à toutes jambes en la direction de l’engeance. La poupée végétale se jette contre les chairs non-mortes, et faisant honneur à l’essence dont elle est née, se fait coeur d’une violente déflagration. Les flammes rongent les chairs de l’engeance, sans complètement la détruire, mais là ne sont pas les limites de ton Art. Loin de là.

Ton esprit ordonnes à ce qu’il reste du petit soldat de se relever. Ton coeur l’encourage à renaître pour mieux livrer bataille. Quelques graines ayant chu non loin de là où a coulé ton sang s’ancrent dans le sol. Et leurs bourgeons se rejoignent, et leurs troncs ne font qu’un, et leur tronc commun perce à travers les chairs meurtries du non-mort, avant de fleurir en une jeune houppe chantant un Chant de guerre.

Un sourire carnassier vient décorer ton visage alors que d’un bond, tu traverses les murs de la « formation » Sylvaine, puis que d’un bond encore, tu évites l’assaut d’un autre tas de chair. Tu danses entre les cadavres mouvants, à la recherche d’un nouveau comme le premier, d’une engeance assez formidable pour abriter les pépins d’un autre de tes petits soldats, et lorsqu’enfin une nouvelle chose assez immonde apparaît, tu lui offres le même destin que la précédente.

Le Chant du second arbrisseau répond à celui du premier, traçant entre eux comme un sentier de battue, où la Dissonance n’est plus, écrasée par la ferveur de leur hymne au combat. Et toi tu continues d’avancer, pour déployer cette haie d’honneur, pour ouvrir la voie aux Sylvains, pour offrir à Kerhel de hurler sa volonté à ses enfants favoris de la même manière qu’elle te l’impose à toi.

Mais autant tes pas te mènent vers le sorcier dément, autant tes pensées vont à l’enragé aux cheveux noirs, et à ce que tu penses… ce que tu sais devoir lui dérober, pour qu’en temps et en heure, la victoire soit ne serait-ce qu’imaginable.
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Aegden Orian
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MessageSujet: Re: L'Oeuvre de Ceädon   L'Oeuvre de Ceädon I_icon_minitimeVen 8 Déc 2023 - 22:13

« – MAHTARN OTSERCA ELENANRE ! »

Le cri avait retenti entre tous, et on eut dit un bref instant que l’air vibra de la ferveur et de la colère des guerriers. L’assaut avait été donné et le grondement des sabots des montures résonna durement contre la terre viciée.

Quelques non-morts difformes se frayèrent un passage entre les rangs. A l’instar de ses frères, Aegden n’eut d’autre choix que de bondir à terre lui aussi.

Une engeance se vit décollée du sol d’un arc de hampe, tandis que la lame trancha les chairs d’un second. La forêt alentour battait d’une rage profonde et sourde. La forêt bouillonnait comme au premier jour où ils y avaient mis le pied, mais il y avait autre chose aussi. Quelque chose de neuf, quelque chose de tout aussi viscéral, si ce n’était plus encore. C’était comme...plus clair. Plus évident.
Aux lamentations douloureuses s’ajoutèrent les tambours de guerre. Et plutôt que de s’affronter, ils se complétèrent.

A la litanie guerrière vint en plus hurler le vent. Il mordit le chair putréfié, trancha des membres agités de soubresaut.

Remplacés les frères tombés, un nouveau gémissement aigu fendit le tintamarre guerrier. La créature semblait fait de plusieurs corps distincts. S’il y avait eu un elfe, là dedans, il n’était plus qu’une structure grossière aux membre exagéré et disproportionnés, d'os et de chairs soutenant un visage émacié mais qui semblait trop lourd pour son faible cou. Au milieu deux point d’un noir d’encre semblaient aspirer toute vie. Il se tenait sur quatre pattes déformées aux quelques plumes maladives, et comme brisées et reconstruites encore et encore. Il n'était qu'un pantin grotesque de plus, enragé de sa condition même.

Elle se jeta dans la bataille, se ruant sur toute chose sur son passage, allié ou non. Elle défonça le torse d’un cadavre devant elle, s’arrêtant à peine sous la nué de flèche qui la hérissa. Une lame trancha son premier membre, une lance piqua son mufle. Ses crocs claquèrent dans le vide alors qu’une hampe lui frappa la gorge. Elle accusa le coup et se jeta en avant, sa griffe unique cherchant à se saisir et dévorer ; et l’erreur lui fut fatale. Plutôt que de s’esquiver, le lancier en face plia le genoux et l’air d’Ailagos qu’un berceur enragea et cisela un peu plus se projeta à la rencontre de la bête, fendue en deux au niveau de sa gorge.

D'un coup d’œil Aegden pu constater qu'autour d’autre créatures de la même race gisaient peu à peu au pied des elfes. La rage de nécromant s’exprimait probablement derrière le déchaînement de ses engeances. Mais la rage des elfes ne souffrait nul retard. Alors, même cette marée nouvelle, n’arrêta pas leur course.
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Inglor Helyanwë
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MessageSujet: Re: L'Oeuvre de Ceädon   L'Oeuvre de Ceädon I_icon_minitimeLun 11 Déc 2023 - 16:33

La fin approchait. Du moins l'un fin d'un énième chapitre avec le commencement du dernier. Un récit dont les rebondissements ne pouvaient être que vécus pour être crus, mais dont la fin s'avèrera, quelle que soit son issue, résolument classique. Approchant du repaire du supposé malfaiteur de ces bois, l'ombre d'une bataille finale s'épaississait. Celle dont on narrera le succès ou l'échec d'une expédition visant à rendre à Anaëh une partie de son territoire d'antan. Une armée de morts-vivant séparaient les guerriers elfes de leur objectif, dont ils n'étaient probablement pas encore conscients de l'entièreté de sa puissance.

Un signal suffit pour que les cavaliers montent à l'assaut de cette armée cadavéreuse. Une charge digne des légendes héroïques les plus populaires parmi les peuples. Ces braves combattants chargeant, lame au clair, une armée qui les noiera par le nombre. Ces quelques héros jetant leurs ultimes forces dans une bataille annoncée comme perdue. Pourtant, nombreuses sont les batailles remportées par la vaillance et la ruse du plus petit nombre.

Concentré au centre de la colonne, les Berceurs alternaient entre l'acier et les arcanes pour terrasser leurs ennemis, soutenant les soldats qui ne possédaient qu'une seule de ces deux armes, à l'exception de leurs commandants. Enhardis par l'approche de l'issue de leur quête, les elfes relâchaient toute cette colère accumulée durant ces innombrables jours d'exposition à la folie. Les cadavres jonchaient le sol à en faire oublier l'herbe ou le feuillage vicié des arbres. Malgré cela, il ne s'agissait là que d'une avant-garde, aussitôt renforcé par une nouvelle vague, plus grande encore. Le Sorcier jetait également toutes ses forces dans la bataille.

Ce dernier chapitre ne s'achèvera pas en quelques lignes.
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Árólindë Yuitë
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MessageSujet: Re: L'Oeuvre de Ceädon   L'Oeuvre de Ceädon I_icon_minitimeJeu 28 Déc 2023 - 10:23

Les pulsations de son cœur s’étaient fondues dans les tambours inaudibles de la forêt. Le murmure va-t’en-guerre enfla, trouvant écho dans la colère du Lieutenant. Si la Dissonance n’était plus, le Chant qui l’avait remplacé n’en est pas moins un appel à la violence. Dans la conscience diffuse du cœur de la bataille, Árólindë sut qu’il avait cédé.

L’éclat rouge d’un trait de feu tomba de la canopée, terrassant les engeances qui s’étaient glissées entre lui et le mage drow. Bouclier brandi, il s’élança au travers de la chair réanimée. Les griffes des engeances accrochèrent son armure, y laissant des entailles et déchirant la trame verte frappée de l’étoile à sept pointes et aux trois feuilles. Derrière lui, les Aigles s’étaient mobilisés et couvraient ses arrières en exécutant des passes d’armes meurtrières.

« – MAHTARN OTSERCA ELENANRE ! »

Le cri de guerre résonna à nouveau, venu de derrière le mage-guerrier. Sa voix se joignit à nouveau à la clameur et il en tira d’autant plus de détermination. Devant lui, le pavé explosa. Le cadavre d’une monstruosité difforme aux énormes proportions s’affaissa et remplacé par une seconde aux difformités plus grandes encore. Deux flèches le touchèrent et il s’effondra également. Árólindë continua sa course.

Il était là.

Il avait le visage émacié d’un être comme lentement abandonné par la vie. Sa peau, gagnée par la même pourriture que ses engeances, était noire là où elle n’était pas d’un blanc diaphane. Son crâne était presque entièrement dépourvus des cheveux gris qui y mourrait, épars. Quand il tourna sa tête vers l’Aigle, le Sorcier braqua sur lui l’éclat vert de son œil unique tandis que le côté gauche de sa tête ne présentait qu’une orbite vide.

Autour de Porte-La-Peste poignait son aura de démence et de lui saillaient les répugnantes pulses d’arcanes de sa magie abjecte.

La brèche qui l’avait laissé visible un instant se referma et les créatures de la non-mort fondirent à nouveau sur les Taledhels.

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Aegden Orian
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MessageSujet: Re: L'Oeuvre de Ceädon   L'Oeuvre de Ceädon I_icon_minitimeLun 15 Jan 2024 - 21:58


A nouveau, une fois de plus la bataille fait rage, animé par la douleur de la forêt et l’ire des soldats. L’une et l’autre se sont mêlées en une seule et même entité, indissociable.
**

-Ada ? Dit Ada ?

L’enfant est encore si petit. Il a pourtant déjà les traits de ses parents, sa petite bouche se tord en une moue songeuse familière. L’enfant est si petit mais grandit déjà si vite, pense son père en s’agenouillant à ses côtés.
Les grands yeux bleus du tout petit elfe se plongent avec un sérieux déroutant dans ceux du soldat.

-Pourquoi est-ce que tu vas loin ?

-Je vais loin ? Sa voix est douce, mais elle reflète son incompréhension. Comment ça petite étoile ?

-Ben… Le monsieur qui est venu te voir. Maman dit que c’est pour ton travail. Mais ton travail c’est d’aller loin non ? Moi j’ai pas envie. Je peux pas venir avec toi ?

Les enfants grandissent si vite. Le soldat passe une main dans la crinière sombre de l’enfant.

-Ici tu es en sécurité Elben. Mais parfois en dehors des murs, le foret n’est pas aussi sûre.

-Comme dans le conte du Petit Faïra et du Gros serpent ? Celui où le petit Faïra sort du terrier alors qu'il n'a pas le droit?

-Presque. Il rit légèrement. Parfois il faut faire en sorte que les gros serpents ne viennent pas manger les petits elfes comme toi. Même lorsqu'ils sont sages. Alors eh ben il faut tordre le coup des serpents en premier.

-Ah ! L’enfant affiche un air à avoir compris l’intégralité du monde.


Mais tu reviendras, dit ?



**

Les engeances qui s’abattent sur leurs murailles semblent infinies, comme des vagues qui ne cessent de refluer pour mieux revenir frapper la grève. La vaillance des elfes ne faiblit pas. Mais est-elle suffisante ?

Les cris de haine, de douleurs et de souffrance emplissent la clairière, en un sordide et familier écho. Elle a déjà connu ces batailles. Elle est ces affrontements. Et elle les hait.

Le lancier abat la magie de sa lance sur un corps de plus, qui se voit projeté au loin en des cliquètements glauques. Mais aussitôt deux de plus reviennent à la charge. Le souffle cours, l’arme dessine arc de cercle à l’horizontal, sépare une moitié de créature de son reste. L’elfe pivote, vient bloquer le coup de griffe mortelle d’une seconde tandis que la première est achevé de quelques flèches.

Un frère à sa droite grogne de plus belle, des signes de fatigue dans ses gestes. Aegden s’empresse de chercher à l’épauler. Les deux hommes s’échangent un bref regard entendu et la dance reprend.
Un cris d’alerte vibre soudain au-dessus du fracas des lames. Le sol tremble une seconde, enfle et éclate brutalement, se dérobe sous les pieds de ceux qui n’ont pas eu le temps de fuir.
**

Loin, très loin dans une époque révolue, devant les murailles cycléénes d’Alëandir, un père porte les yeux sur sa fille. Des mots qu’il se sont échangés, nul de s’en souvient aujourd’hui. Mais leur regard n’y trompe pas, ni l’un ni l’autre n’est dupe : Celui qui dépose un baiser sur la joue de son enfant le fait pour la dernière fois.
Elle l'observe partir et ne saura jamais vraiment de quoi seront fait les derniers instants de celui que l'ont surnomma Erca
**

Il en a toujours été ainsi de l'histoire la maudite Aduram et sans doute en sera-t-il pour la fin des temps : quand on y entrait, on en revenait jamais vraiment.

Un jour ce fut Unvan. Aujourd’hui c’était Porte-la-Peste. Demain sans doute un autre souffle se trouverait ici déformé jusqu’à l’impensable, ne créant que peine et douleur dans son sillage maudit.

Aegden relève un genou de terre. Son visage est maculé de sang et de poussière. A ses cotés son compagnon est mort sur le coup de l’impact, comme bien d'autre. Ses traits ont imprimé la dernière expression de la terreur qu’il l’a pris, la seconde avant que ce ne soit finit.  

Son regard se pose à nouveau sur le responsable de ce nouveau massacre. Il lui semble percevoir un rire rauque s’extirper de sa gorge déchiquetée. Plutôt que d'alimenter une colère déjà au paroxysme, ce rire provoque une forme de résignation terrible pour le lancier.

Ils vont mourir.

Le commandant se relève, ignorant la brûlure lancinante qui irradie avec violence dans son épaule et son flanc droit. Il ignore aussi le flot carmin qui ruisselle sur sa main d’arme et cours le long d’Ailagos.

Est-ce le sang qui bat de cette façon à ses tempes ou les éternels tambours de guerres ?

Sa main réaffirme comme elle peut sa prise sur la lance sifflant d'épais volutes de brume.

Il ne faut pas sous estimer des créatures qui se savent perdues. Ils mourront, mais ils finiront ce pour quoi ils sont venus quoi qu'il leur en coûte.

Comme autrefois quelques héros depuis longtemps oubliés, ce qu’il reste des expéditionnaires d’Aduram lance une dernière fois leur assaut.
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Árólindë Yuitë
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MessageSujet: Re: L'Oeuvre de Ceädon   L'Oeuvre de Ceädon I_icon_minitimeMer 7 Fév 2024 - 22:13

Dans son poing vibrait une force destructrice. Dans les derniers instants de son incantation, il avait senti sa pression s’accroitre en tentant de réparer l’équilibre que lui, s’efforçait de perturber pour tirer parti de sa puissance. Un élément de chaos pour faire sa part d’harmonie. L’ironie était saillante.

« – A terre ! »

Les Aigles qui l’avaient encerclé pour le protéger alors qu’il canalisait se jetèrent au sol. Árólindë ouvrit la main au-dessus de lui. De la Trame émergèrent des aiguillons de glace qui s’étendirent en anneau et allèrent frapper les corps soumis au nécromant.

Porte-la-Peste reparu derrière ses soldats au sol, fixant les guerriers taledhels et jetant en l’air de petits objets qu’il rattrapait adroitement. Les corps tombés se relevèrent et attaquèrent à nouveau, faisant fi des membres qu’ils avaient perdus, des flèches enfoncées dans leurs chairs ou des dégâts infligés par la magie du Lieutenant.

Mais les Aigles ne les laissèrent pas faire. Avant que la brèche ne se referme à nouveau, ils se précipitèrent sur le Nécromant, portés par un nouveau cri de guerre. Car si lui tombait, tout serait terminé.

L’œil du sorcier se porta sur Árólindë, qui chargeait en avant de ses camarades, l’épée brandie. Comme répondant à sa panique, les engeances se jetèrent sur lui, sans égratigner la garde de son égide. Il frappa.

Un instant, toutes les engeances se figèrent. Le hurlement de Porte-la-Peste traversa la Cité en déchirant le silence qui y était soudainement tombé. La lame de l’officier avait touché la jonction de l’épaule au cou, s’enfonçant dans la clavicule, et la pointe de la lance d’une soldate lëandrine avait tailladé son flanc. Une fraction de seconde plus tard, il s’était reprit.

Il déchaîna sa vile magie, la dirigeant directement sur les soldats. La douleur détona dans le crâne d’Árólindë. Incapable de bouger le moindre muscle, il tomba à genoux et son épée chuta aux pieds du Sorcier-Nécromant. Son regard se voila, éblouit par des flamboyances dansant sur sa rétine.

Le sorcier, fébrile, passa une main sur ses plaies, qui se refermèrent à ce contact.

« – … tout ce qu’elle m’a donné… »

Ses yeux s’accrochèrent à la soldate aigle qui agonisait à genou, les traits déformés sous la torture de la magie du nécromant.

« – Tu as ses cheveux… ses yeux aussi. »

Il s’approcha de la Taledhelle. De sa main tremblante, il caressa la joue de la guerrière, incapable de résister au contact qu’il lui imposait.

« – MAIS TU N’ES PAS NORA ! TTU ES VENUE ME LA PRENDRE ! Me la prendre… Nora… »

Le crane de l’Aigle explosa.

Seul un hoquet impuissant sortit de la gorge d’Árólindë. Porte-la-Peste hurla, et son hurlement sonna comme un rire dément.

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MessageSujet: Re: L'Oeuvre de Ceädon   L'Oeuvre de Ceädon I_icon_minitimeJeu 8 Fév 2024 - 0:41


Es-tu un traître, un lâche ou un excentrique ? Aucun des Sylvains – même s’ils en avaient envie – n’aurait le temps de répondre à cette question. Les lames et les flèches épousent les chairs putréfiées autant de fois que la non-mort cherche à enlacer leurs propriétaires. Les cris des serviteurs de Kerhel, des encouragements, tu imagines, se heurtent à une atmosphère rendue lourde et moite par leur sang, leur sueur, et la bile de leurs adversaires.

Tu dois bien l’avouer, ils t’impressionnent. Voilà donc ce à quoi ressemble la fureur des esclaves de la Créatrice. Voilà donc ce à quoi ressemblent leurs rangs, lorsqu’ils s’écrasent contre les vôtres à la guerre. Tu ne peux t’empêcher de sourire. De rire même. Car pour la première fois, malgré l’étrangeté de leur verbiage, quand leurs cris résonnent à la pointe de ton oreille, tu as la sensation de les comprendre. Tu ne connais peut-être pas leur langage, mais les sons de la rage et de la peur, le son de la vertueuse fureur, te ne le connais que trop bien. Et pourtant tu ne te bats pas avec eux.

Tu danses autour des engeances sans jamais leur porter de coup. Tu te contentes, telle un charognard, d’observer, d’attendre, et de plonger sur ce qui a été par deux fois pourfendu. À un cadavre une graine. Et que chaque graine devienne arbrisseau. Là est ta seule préoccupation, et la seule chose en laquelle tu acceptes d’user tes forces. Chaque fois que l’un des Sylvains se place là où tu l’attends, chaque fois que l’un des Sylvains abat sa proie là où tu le veux, tu t’empares de leur victime pour en faire le repas d’un nouveau Chanteur.

Les Elfes succombent à tes sirènes. Ils se laissent emporter par les Chants de guerre. Non, la raison ne les a pas encore quitté, pas encore, mais leur envie de vivre – pour ce qu’il en restait lorsqu’ils ont mis le pied en ces lieux – ne tardera pas à mourir en offrande à leur désir de victoire. Car voici ce que tu leur offres. Une opportunité. Ou du moins son fantôme. Voilà ce que leur souffle tes Enfants : le désir de vaincre par-dessus tout.


L'Oeuvre de Ceädon Szopar10



Ce n’est pas la première fois que tu vois le visage difforme du Seigneur Sorcier d’Aduram. C’est la première fois cependant, que tu ne fuis pas son regard. C’est la première fois aussi, que tu vois son abject faciès animé de la moindre émotion.

Celui-Qui-Manqua-D’Être-Druide est, à sa façon, tout aussi profondément lié à ces lieux que toi. Ainsi, parce que ce qui l’anime se reflète en la Sylve, et parce que ce qui anime la Sylve se reflète en lui, tu ne peux ignorer les sentiments animant son coeur. Et même sans ce lien, comment l’aurais-tu pu ? Porte-la-Peste porte sa colère et son désespoir à fleur de peau. Les Braises du Nécromancien ne sont plus rien, plus rien que des charbons à peine incandescents, que seul rallume occasionnellement le contact des rameaux morts que sont son courroux et son désarroi, le constat de son impuissance, face à la plus élémentaire des lois de la Créatrice.

À toute chair vient sa fin. Car sans fin pas de commencement.

La mort… Porte-la-Peste refusait de mourir avant d’avoir appris comment vaincre la mort. En cela, Porte-la-Peste était le reflet de cette face d’Anaëh, elle aussi transformée pour vaincre la mort qui y avait été semée.
La mort… Porte-la-Peste l’avait vue de trop près lorsque l’Aigle fou avait fondu sur lui. Et quelque part, en la voyant venir, il avait été presque… soulagé. Soulagé d’être enfin libéré de cette futile existence, sans joie ni amour. Soulagé d’être promis au même monde que celle qu’il a perdu. Soulagé d’enfin pouvoir réchapper à l’éternelle douleur qu’est devenue sa vie. Soulagé durant un court instant, puis profondément dégoûté de l’avoir été. Pris d’une indescriptible haine, pour ces créatures, ces anciens Frères, venus lui retirer son dernier espoir, venus lui prendre tout ce qu’il avait péniblement construit, venus lui prendre le dernier espoir qu’il avait de la ramener.

La douleur s’abat sur vous tous. La mort s’abat sur l’une d’entre vous. Puis sur un autre. Et encore un autre. Vous ne pouvez qu’assister, impuissants, paralysés par les arcanes du sorcier, alors que vos rangs maigrissent, lentement mais sûrement. Et vous avez de la chance. Vous avez de la chance car parmi vous, la fine fleur des Mysticistes d’Anaëh fait lutte acharnée aux sortilèges du Vitaliste. Mais pour combien de temps ? Pendant combien de temps, à défaut de démêler la douleur, seront-ils capables d’empêcher le Seigneur-Sorcier de tresser la mort ?


Assez longtemps pour toi.


Loin des yeux loin du coeur. Tu ne bénéficies de l’aide des berceurs que parce que ce n’est pas encore toi que Porte-la-Peste cherche à arracher à la vie. Loin des yeux loin du coeur, tu t’es séparé du bataillon elfique pour continuer de planter les graines de votre avenir. Loin des yeux loin du coeur, tu n’as plus qu’à fermer les tiens, car ton travail se termine ici. Ainsi te laissas-tu choir.

Un entremêlas de lianes vengeresses s’immobilise au contact du crâne du Nécromant. Ce qui lui sert de pieds ancrés dans le sol, le Tréant a joué sa dernière carte. Seulement le mage n’est pas si aisément surpris. Le pouvoir qu’a Porte-la-Peste sur le bois n’est pas celui qu’il a sur la chair. Le Vitaliste n’est pas capable de commander à l’écorce comme il le fait au muscle. Mais en a-t-il seulement besoin ? S’il a réussi à – en apparences au moins – ainsi dompter son petit coin d’Aduram, c’est bien que ce n’est pas le cas.

Dès lors que l’étrange bile servant de sang au nécromant rentre en contact avec le suber, le tissu faisant le bras du Tréant commence à s’effondrer. La nécrose court à une vitesse affolante, dévorant rapidement jusqu’au coeur de ton partenaire et Gardien. Pourtant, avec toutes les forces qu’il lui reste, le Tréant se maintient debout. Et intérieurement, tu souris.

Tu fais à ton Totem présent de toutes les forces que ta Braise fatiguée est capable de lui offrir, et lui se saisit de ta magie. Il te dérobe tes arcanes pour mieux se servir de ce que – durant le chaos des combats – tu as dérobé à l’Aigle. Le Tréant se laisse mourir, laisse périr ce qui fut son enveloppe, pour mieux se revêtir du fruit de La Dernière Graine. Pour mieux se revêtir de l’habit de sérénité que transportait avec lui l’élémentaliste.

Né par deux fois d’Aduram, le Tréant a offert sa vie pour mieux renaître Enfant de l’Estel.

Et faisant corps avec un Chant nouveau, il impose à sa propre progéniture une vision de tranquillité. Et aspirant à cette tranquillité, sa progéniture chante la bataille en redoublant d’ardeur. Mais cette ardeur n’est plus douleur. Cette ardeur n’est plus désarroi. Cette ardeur est espoir. Et le Seigneur-Sorcier, éloigné de sa fanfare, devient soudainement Monarque sans Royaume.
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Aegden Orian
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MessageSujet: Re: L'Oeuvre de Ceädon   L'Oeuvre de Ceädon I_icon_minitimeJeu 8 Fév 2024 - 16:41


-Tu en répondra devant Tari !

Alors que les aigles sont à terre, ceux qui se sont relevé entre temps de l'explosion arcanique forment un second assaut. L’air et les flèches fendent l’atmosphère putride et, si elles ne touchent pas, forcent le nécromant à relâcher son emprise sur leurs frères. Ceux qui restent. Ils sont si peu…

Les quelques elfes à avoir chargé à nouveau voient pourtant une ombre brusquement s’esquiver à leurs lames et l'air seul répondre à leur assaut.
En quelque foulée un loup les contourne, animé d’une vivacité qui n’a rien de naturel. Son pelage décharné  par touffes miteuses, contraste avec un unique œil brillant. Squelletique, sa peau maladive remue et bouillonne comme luttant contre con existence même. Cette créature ne devrait pas être et une part d'elle le sait et s'en hait, cherche presque à s'autodétruire.

Et il rit.

L’animal fait le dos rond et retrousse les babines, mais les elfes ne peuvent s’y tromper, il ne grogne pas comme un loup. Ces dents ainsi découvertes et cette attitude corporelle sont le rictus d’un elfe pris des douloureux spasmes d'un rire sans joie.

Soudain il fonce. Les soldats répliquent, une flèche touche porté par une brise salvatrice. Une épée semble tracer un sillon carmin prometteur dans la chair. L’immonde peut saigner. Il peut mourir. Mais pour l’instant le loup zigzague. Ses dents claquent et mordent des chairs et il disparaît entre les ruines, un temps et revient à la charge. Une fois, deux.

Puis soudain à nouveau non plus le loup mais l’elfe. Un soldat tombe. Le loup. Les mâchoires claquent. Le nécromant revient. Trop prêt pour la lance, Aegden se saisit de sa dague prêt à frapper l’Ennemi qui s'apprête à incanter encore sa vilainie. Mais plutôt que de s'esquiver, ce dernier laisse le coup venir à lui. La lame s’abat à travers l’orbite vide du nécromant mais sans effet. Peut-il vraiment mourir ? L’air vibre, et les arcanes dansent en de macabres traînées moribondes. Les plaies se referment, la lame tombe au sol dans un bruit sourd. L'œil valide brille du même éclat corrompu.

Sa main décharné vient se saisir du poignet de son assaillant, figé dans l’élan de son coup. Une brève seconde, un éclat doré au pouce du soldat attire l’attention du mage qui le contemple. Un bijou se cache sous son gant. Une bague, de l’alliage des parures qu’il avait porté, un jour bien lointain où il s’était marié. Un infime souvenir du temps heureux, de la paix, et de ceux qu’il chérissait de trop loin. 

Ce symbole bien infime, sans importance ni sens pour quiconque autre que son propriétaire, semble enflammer la fureur du seigneur maudit et l’éclat de son œil de s'accroître d'autant.

-Nora…VOUS N’AUREZ PAS NORA !

La magie du seigneur d’Aduram fait brutalement craquer ses os et sa chair déjà mise à rude épreuve. l'avant-bras du lancier ploie et cède en quelques claquement secs. L’elfe ne peut empêcher un hurlement sous le coup de la douleur brutale qui irradie son bras et sa main broyés par la magie. Son esprit tremble alors qu’il plie un genoux incapable de s’esquiver à la poigne mortelle contre laquelle il lutte en vain.

Mais quelque chose change à nouveau. L’air. Les cris. Les chants. Les chants hurlent non plus la douleur et la haine. Mais l’Estel. l'espoir d'un peuple. La guerre, l’ardeur de la bataille. Mais non plus la mort. La guerre pour la vie.

Il le sent, autant que les elfes. Et cet instant de surprise lui sera fatal. Un berceur dénoue une seconde fois sa malveillance. L’autrefois elfe redevient loup et s’esquive brusquement. Une lame le frôle dans sa vaine retraite. De peu.

-Anaëh ! Lance comme un nouvel appel un soldat qu’Aegden entend mais ne voit pas, alors qu'une salve de flèche pleut à nouveau vert leur Ennemi dont ils coupent aussitôt la retraite. ANAËH !

Et sous les branches naissantes, un espoir, infime, lueur au travers des ombres, petite flamme vacillante si facilement soufflée par la brise, danse et prend force.
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MessageSujet: Re: L'Oeuvre de Ceädon   L'Oeuvre de Ceädon I_icon_minitimeDim 11 Fév 2024 - 18:45

Noyé par les vagues infinies des combattants morts de Porte-la-Peste, la férocité des expéditionnaires elfes ne faiblissait pas. Mais pouvaient-ils seulement battre leur ennemi en courbant l'échine et en espérant tenir plus longtemps que lui ? Lui qui, transpercé de mille flèches, lézardé de taillades, brûlé ou gelé par les éléments invoqués par les arcanes des mages présents, se relevait sans cesse, faisant fi des blessures qu'il ne ressentait même pas. Les mysticistes avaient beau incanter pour saper l'armée morte de ses soldats, leur travail paraissait insignifiant face à de telles vagues. N'importe quel soldat ayant reçu le strict minimum de formation stratégique comprendrait rapidement que cette situation était intenable, et que son issue ne serait que fatale.

Non content de constater que son armée submergeait ceux qu'ils décrivaient comme des intrus en son royaume, le maître des lieux se montra. Loin du réel, celui qui était jadis un elfe n'en avait plus aucun attribut significatif, pour devenir semblable à ceux qu'il commandait : livide, décrépit et décharné. L'unique lueur colorée se dégageant de son œil trahissait pourtant toute sa malice et son outrecuidance. Il se montrait à ses ennemis parce qu'il se pensait fort. Parce qu'il se savait fort. Cela ne faisait que confirmer ce que tous les expéditionnaires savaient déjà : s'ils se laissaient submerger,  ils se ruaient droit vers leur fin.

C'est alors que les Aigles prirent les devants, couverts par deux des cinq Berceurs présents. C'était là ce qui faisait leur renom. Capables de s'adapter à toute situation, y compris les plus imprévisibles et les plus tendues. Chargeant de concert, ils s'engouffrèrent dans une brèche laissée par l'armée morte, visant le Nécromant. Visant la colonne qui maintenait cet édifice debout. Visant celui qui était à l'origine de ce cauchemar. Pris par la surprise ou par son arrogance, Porte-la-Peste fut touché, transpercé de plusieurs parts par deux des Aigles. L'espace d'un instant infiniment court, un espoir survola les elfes qui pensaient le combat alors terminé.

Néanmoins, dans les abîmes du monde, rien n'était si simple. Tuer la mort était tant un oxymore lexical que scientifique. Pourtant, c'était un casse-tête que Berceurs, Aigles et Soldats devaient résoudre actuellement, sans quoi ils deviendraient esclaves de ladite mort, sinon pire. Et lever des armées de cadavres n'était qu'un de ses nombreux pouvoirs auxquels les Aigles venaient de s'exposer.

Si Porte-la-Peste s'était montré, c'est parce qu'il se savait fort.

Les Berceurs le ressentirent aussitôt tant sa puissance était grande. Le Nécromant déchaina sa magie sur les Aigles, les paralysant totalement, tous autant qu'ils étaient.

« Berceurs ! Avec moi ! » tonna Inglor, tournoyant son épée autour de sa tête pour imiter le geste du rassemblement. « Protégez les Aigles avant qu'ils ne… »

Il ne put terminer sa phrase que le Nécromant hurla si fort qu'il pouvait déchirer la cime des arbres. Un hurlement à la hauteur de sa puissance, qu'il déchaîna sur une soldate aigle qui vit sa tête exploser telle une pastèque compressée par une immensité de cordes élastiques. D'autres suivraient si les bras armés de Tari n'agissaient pas rapidement.

« Ciaran', reste auprès de l'armée et du Mainyth, je me charge de couvrir nos frères jusqu'à ce qu'ils puissent nous aider. » ordonna le chef des Berceurs, éliminant deux cadavres lui barrant la route d'un ample coup d'épée.

En symbiose, les Berceurs en position luttaient contre la puissance vilénie de Porte-la-Peste, espérant offrir aux Aigles un infime espoir de ne pas voir leur Souffle disparaître aussi violemment que leur corps. Néanmoins, Porte-la-Peste était un ennemi bien titanesque comparé à ceux qu'ils étaient habitués à éliminer. Chacun de ses sorts était une véritable épreuve à conjurer, à tel point qu'ils s'en écrouleraient de fatigue bien avant que leur tâche ne soit remplie. Mais à cet instant, ils ne savaient pas encore qu'ils gagnaient de précieuses secondes, cruciales pour la suite du combat. Cela ne brisait pourtant pas leur moral, animé d'une volonté presque irrationnelle de ne pas renoncer, même face à cet ennemi paraissant imbattable. Leurs bras pouvaient trembler, leurs yeux pouvaient sanguinoler, leurs jambes pouvaient vaciller, leur raison pouvait les quitter qu'ils se tiendraient toujours debout, même vaincus. Car la Voilée ne tolèrerait encore moins le renoncement que l'échec venant de ceux qui avaient juré de la servir, se dévouant corps et souffle à cette tâche herculéenne.

Au bout de longues heures de luttes, qui n'étaient en réalité que d'interminables secondes, alors même que les Berceurs étaient au bord d'une rupture qui pouvait condamner cette expédition à son funeste échec, Porte-la-Peste faiblit soudainement, manquant alors de signer son triomphe. Ce n'est qu'à ce moment que les Berceurs comprirent que leur lutte ne fut pas vaine. Perdu de vue durant l'ardeur de la bataille, le druide drow ne s'était surement pas défilé, pour peu qu'il aurait pu même s'il le voulait. Ayant recouvré sa forme de tréant, il lança ses lianes sur Porte-la-Peste comme il le fut avec Sornor auparavant. Mais cette fois-ci, ils étaient alliés, et le druide venait de leur offrir une chance de reprendre le contrôle.

Préoccupé par cette attaque surprise, Porte-la-Peste affaiblit son emprise sur les Aigles et, surtout, se détourna des Berceurs qui en profitèrent sans attendre pour conjurer le sort paralysant les soldats. De son coté, le tréant avait atteint sa cible mais, à l'instar des Aigles, cela n'avait pas suffit pour terrasser le monstre, dont le sang brisa les lianes. Pire encore, cela semblait l'avoir infecté jusqu'à l'arbre lui-même, pendant que Porte-la-Peste prit une forme encore plus horrifiante que sa forme supposée originelle.

Le “sacrifice” du tréant n'était toutefois pas vain. Alors que le Nécromant, désormais sous la forme d'un canidé tout aussi décharné et dégarni que ne l'était sa forme précédente, se rua sur les soldats elfes rassemblé autour de leur Commandant blessé, l'atmosphère change brutalement. Loin du calvaire des hurlements des bois viciés, elle rappelle la chaleur doucereuse d'un foyer. Une nouvelle fois affaibli, le Mainyth inspira ses hommes qui envoyèrent une volée sur le monstre. Les Berceurs en profitèrent alors pour se rassembler autour des Aigles qui se relevaient peu à peu, à commencer par leur Lassörn. Le combat était encore loin d'être terminé…
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MessageSujet: Re: L'Oeuvre de Ceädon   L'Oeuvre de Ceädon I_icon_minitimeMar 13 Fév 2024 - 22:11

La magie se déchaînait sur sa chair. Les arcanes tiraillaient, tiraient jusqu’à rupture, faisaient suppurer les plaies de lymphe brulante. Mais sa chair résistait. Elle le faisait, non de sa propre volonté, quoiqu’elle soit forte, mais parce que les Berceurs étaient tout aussi cruels envers les constructs déchaînés par le Nécromancien. En périphérie de sa conscience, Árólindë voyait les deux magies s’affronter pour la destruction ou le salut de son corps ; une bataille dans laquelle il était impuissant. Mais il finirait par perdre, sinon par l’action directe du Seigneur-Sorcier sur son sang et ses muscles, par la douleur induite par ces agressions, et qui l’avait obligé à se retrancher en lui-même, perclus, proche de l’inconscience. Son visage était noyé dans le sang que ses yeux pleuraient. Chaque inspiration était une épreuve et un court répit contre la suffocation. La souffrance corrodait son esprit, asphyxiait son Souffle, ordonnait sa reddition.

Sur la gauche du Lieutenant, un camarade perdit le combat et s’effondra. S’il ne se releva pas, ce fût, encore, par l’action des prêtres de la Voilée.

Le Tréant reparu dans son champ de vision, mais ce fut pour y mourir.

Le drow avait disparu, avalé par les racines de son totem impie. Se faufilant entre les pulses de souffrance, la pensée pénétrante qu’un tel être puisse exister s’imposa au guerrier Aigle. Les daedhels étaient à la race anëdhelle ce qu’Aduram était à l’Œuvre. Pourquoi la forêt aurait-elle perdu, en renaissant des cendres laissées par Unvan, le privilège de choisir ses Hérauts ? Pendant un instant, Árólindë s’agrippa à la clairvoyance que lui accordait ses dernières secondes de vie. Pendant un instant, il comprit. Il comprit. Les raisons du combat du drow fait écorce d’ébène lui apparurent. Il perçut sa propre erreur. Sa haine brulait tout, indistinctement, avide de trouver un coupable en toute chose. Il vit son égarement.

Les branches du druide se déployèrent et allèrent toucher le crâne de Porte-la-Peste. Instantanément, elles se figèrent. Le sang pâle de l’elfe apostat gangréna le bois et remonta, en laissant les marques noirâtres de sa corruption, jusqu’au cœur de la créature. Le Tréant était tombé, les libérant du sortilège.

Árólindë s’effondra, sonné, les rémanences de la douleur s’effaçant lentement de ses membres. À tâtons, il chercha son épée et en trouva le pommeau du bout des doigts. Il se retourna maladroitement. Porte-la-Peste avait disparu et son corps s’était métamorphosé pour prendre les proportions d’un loup gigantesque au poil blafard. Son œil unique se porta sur le groupe de soldats mené par le Mainyth. Il fondit sur eux.

Le loup prit deux Souffles dans les rangs taledhels avant que sa forme ne vacille. L’elfe borgne le remplaça et trouva d’autres victimes par sa maîtrise de la magie des chairs. Les armes des guerriers le touchaient en ne laissant sur sa peau que des sillons éphémères. Il saignait mais se refusait à mourir, ou même à faiblir. La silhouette se brouilla et le loup revint. La dague du Commandant se ficha dans l’orbite de l’elfe. Le loup referma se mâchoires. Le sorcier incanta, Aegden hurla.

Árólindë s’était relevé, la prise assurée sur la fusée de sa lame. Il se saisit des arcanes, mais elles se dérobèrent à sa poigne d’éther.

Au milieu des ruines de l’antique Cité dont le nom avait évoqué l’ambition de son peuple à trouver la paix, la non-vie semblait vouloir trouver le chemin d’une victoire. Mais alors, la vie s’imposa. Face à Elle, la mort ploya et un arbre chanta à nouveau, de la mélodie pristine des Frères d’Anaëh. Le Tréant chantait l’Espoir.

Le Seigneur-Sorcier défaillit. Le loup ne revint jamais.


Et la lame d’Árólindë traversa sa poitrine.


L’Aigle mobilisa la Trame, attrapant les Flux qui s’était, avant, refusé à son contrôle et investit son épée d’un feu nourri de sa propre rage. L’épée s’embrasa et enflamma le corps du nécromant. Il s’effondra et son œil s’éteignit après avoir fugacement brillé d’un ultime éclat de compréhension ; la mort l’avait finalement saisi. Il y rejoignait Nora.

Le silence, néanmoins, ne s’abattit par sur la Cité-Qui-Rêvait-De-Paix. Car le Tréant chantait toujours.
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