Sauvetage en forêt [PV Adria]

L'épaisse et luxuriante végétation que étouffait littéralement cette portion du marais de ses longs et épais doigts verts bruissait d'un vent léger, ondulante, et laissait s'échapper dans l'air une fragrance forte et sucrée qui donnait un peu le tournis. Des plantes carnivores, des zones boueuses et marécageuses, d'épais troncs recouverts de mousse qui s'élevaient au-dessus de cette jungle pour dominer de leur colossale stature les buissons en contrebas...

Berg'inyon, chassant d'une main irritée un moustique gros comme un oeuf, s'emplit les poumons de ce parfum végétal puissant et agressif avant d'esquisser l'un de ses rares sourires. Cet endroit, c'était chez lui ; il s'y sentait bien, calme, coupé du monde, et il aimait y retourner après avoir fini une mission, simplement pour s'enfoncer dans cette végétation sauvage, pour s'allonger dans l'herbe grasse et pour fermer les yeux, bercés par cet immense cocon tentaculaire qui constituait un réseau inextricables de lianes, de racines, de fougères, de plantes, de feuilles, de sève et de terre.

* Ahhh... Et dire qu'il y en a qui considèrent cet endroit avec horreur... *

Ce monde de sons et d'odeurs, cet enfer vert peuplé de créatures toutes plus agressives que les autres, ce territoire dangereux, inexploré et insoumis qui s'offrait aux regards lui paraissait le plus merveilleux des paradis. Ici, nuls hommes ne foulaient cette terre vierge, nuls guerriers n'y versaient leur sang pour des causes indéfendables...
Seule régnait la Forêt, la nature belle et pure comme elle existait à l'aube des temps...

Alors qu'il marchait d'un pas absent, la tête ailleurs quoique tout les sens en alerte, il entendit soudain un bruit étranger aux Marais percer l'épaisse voûte de feuillages entremêlés. Pilant net, il tendit l'oreille juste à temps pour percevoir à nouveau le même son, net et déchirant.

* Un cri... ?*

Tout en se dirigeant vers la source de cette agitation, il réfléchissait. Sa tranquilité avait été troublée et cela ne faisait qu'augmenter son irritation, mais il ne pouvait s'empêcher de penser aux bénéfices qu'il pourrait tirer d'une éventuelle situation. Si c'étaient des marchands ou des voyageurs attaqués par des brigands, il pourrait bien tirer quelque récompense d'un sauvetage de dernière minute...

Ecartant avec ardeur la végétation qui l'entourait de ses bras épineux, il se mit à courir. Sans prêter attention aux ronces qui égratinaient ses bras nus, il franchit avec agilité les derniers mètres pour débouler soudain dans une clairière, devant un spectale saisissant...

Adria continuait son voyage sans vraiment se préoccuper de savoir vers où elle se dirigeait. Ses pas la portèrent vers un endroit comme elle n'en avait encore jamais vu. Le sol était devenu marécageux, ralentissant s a progression car elle s'efforçait de ne pas trop patauger. A ses côtés, Olwë reniflait prudemment les environs. Il n'appréciait pas l'endroit, elle le sentait. Le loup était bien plus conscient des risques que ne l'était la jeune fille qui chantonnait pour passer le temps.

La tête dans ses rêves d'aventures, elle s'enfonçait doucement dans les marais sans y prendre garde. En même temps, si elle s'en était rendue compte elle n'aurait probablement pas fait demi-tour pour autant. Le monde était fabuleux et ne demandait qu'à être exploré : voilà comment elle voyait les choses. Sa cape rejetée en arrière à cause de la chaleur, elle se promenait sans crainte, essayant de ne pas tacher sa robe blanche.

Soudain, Olwë s'immobilisa, devenant invisible. L'elfe s'arrêta aussitôt, sur le qui-vive : s'il réagissait ainsi c'est qu'il y avait un danger quelque part. Danger qu'elle s'efforçait de deviner parmi la végétation sans y parvenir. Un grognement retentit quelque part devant eux, un bruissement la fit sursauter. Mais toujours rien... Adria recula doucement, prenant son amulette dans sa main comme chaque fois qu'elle était inquiète. Il y avait peu de chance pour que le bijou soit utile en cas d'attaque d'un prédateur mais parfois... Parfois la magie se libérait. Trop rarement au gout de l'elfe.

Un nouveau mouvement entre les arbres et elle étouffa un cri : un cogianth venait d'apparaitre. Elle sentit le loup frémir : il n'avait pas une chance face au prédateur. Et elle, encore moins. Le temps parut se figer.

Puis, dans un même élan, le cogianth et le loup s'élancèrent. Le prédateur vers l'elfe, pétrifiée, Olwë sur sa trajectoire. Du moins, c'est ce qu'Adria supposa car il était au maximum de ses capacités d'invisibilité. En tous cas, il lui sauva la vie car le fauve fut forcé de se décaler.

Se reprenant, Adria fit volte face et se mit à courir en hurlant :

" A l'aide ! A l'aide ! "

Il n'y avait personne. Elle allait mourir là et entrainer Olwë avec elle. On n'échappait pas à un cogianth. Elle continua néanmoins à courir. Cela dit, ça ne l'amena pas très loin du fauve. Elle qui était si agile dans la forêt, là, elle se trouvait handicapée par le sol par endroits spongieux. Elle eut beau se démener, elle n'était qu'à quelques mètres lorsque le cogianth bondit à nouveau devant elle, lui barrant la route.

Elle s'arrêta, ne sachant plus que faire, trop effrayée pour bouger. Olwë avait disparu, cette fois, dans tous les sens du terme. C'était fini.

Une jeune fille, une elfe visiblement, se tenait au milieu de la clairière. Enfin, dire qu'elle se tenait n'était pas tout à fait exact ; elle courait, plutôt, et -second détail que remarqua immédiatement Berg'inyon, non sans une certaine irritation- elle courait vers lui.

* Mais qu'est-ce qu'elle fout ici, celle-là ? *

Il était probable qu'elle ne se soit pas encore aperçu de sa présence, affolée à la vue de l'animal monstreux et agressif qui s'était lancé à sa poursuite. Les Cogianth étaient plutôt rares dans les Marais, et jamais encore le drow ne s'était retrouvé confronté à un individu de cette taille. Bien sûr, il avait déjà tué l'une de ces créatures, une fois, mais ce n'était qu'un jeune fauve encore loin de l'âge adulte. Personne n'aurait été assez fou pour se confronter à un Cogianth adulte en pleine possession de ses moyens si il était possible de faire autrement, et Berg'inyon n'avait aucune envie de terminer en second plat sur le menu d'aujourd'hui. Il haussa les épaules. Puisque la créature ne l'avait pas encore repéré, autant en profiter pour s'esquiver vite fait...

Soudain, le monstre se ramassa sur lui-même et, d'un bond gigantesque, il vint barrer la route à la jeune fille, tournant par la même occasion le dos au mercenaire qui observait la scène, impassible. Berg'inyon, comme mût par un instinct supérieur, l'instinct de chasse, comprit qu'il fallait agir maintenant. Le monstre ne s'attendait pas à le voir, l'occasion était trop belle et il n'aurait pas de seconde chance.

Sa main vola vers la garde de son sabre tandis que, dans un faible chuintement, le Veilleur de Nuit glissait hors de son fourreau. La longue lame noire alla frapper au flanc le félin qui, alerté par le bruit à peine audible, eût le temps de se tourner à demi vers son innattendu agresseur. Tandis que l'arme au tranchant impitoyable transperçait l'animal sur toute sa longueur, Berg'inyon sentit des griffes tranchantes comme des lames de poignards imprimer le long de son bras gauche, le plus exposé, cinq sillons sanglants.

Il serra les dents, ignora la douleur sourde qui se répandait en lui et retira sa lame. Le monstre s'écroula dans une mare de sang, gémissant et écumant, avant de cesser ses convulsions. Quand il fut certain que l'animal était bien mort, le mercenaire s'en approcha et tâta du pied le cadavre qui commençait à se rigidifier.

* Une bonne peau gâchée... * Constata-t-il avec une pointe de regret en avisant l'énorme entaille qui avait fendu le félin sur toute sa longueur.

D'un mouvement sec du poignet, il agita le sabre pour le débarrasser des quelques gouttes de sang qui y dégoulinaient et il le rengaina, impénétrable. Son regard d'un bleu troublant se tourna vers la demoiselle, vide de toute expression, et il avança d'un pas calme et sûr dans sa direction... pour finalement passer à côté d'elle en feignant de ne pas la voir, traversant la clairière comme si de rien n'était.

Adria sursauta lorsqu'elle vit apparaitre le jeune homme derrière le cogianth. Elle en profita pour reculer précipitamment et sortir - enfin - sa dague. Elle n'avait toujours pas le réflexe de se servir de son arme, et quand bien même elle l'aurait eu, ça n'aurait pas changé grand chose face à un tel adversaire. A vrai dire, même face à l'agresseur le plus pitoyable de tout Miradelphia, elle ne s'en serait probablement pas très bien sortie...

Son sauveur avait l'air de savoir ce qu'il faisait même s'il se fit rapidement blesser. L'elfe ne parvenait pas à détacher ses yeux de la scène. Emplie d'effroi, elle le vit toucher le cadavre du bout du pied puis rengainer son arme. L'animal était bien mort. Sa tension se relacha d'un coup et elle soupira, ferma les yeux quelques secondes pour se calmer. quand elle les rouvrit, l'inconnu l'avait dépassée et s'apprètait à... s'en aller ?

" Eh ! "

Le cri lui avait échappé. Elle ne pouvait pas concevoir qu'il la sauve pour ensuite disparaitre comme ça sans un mot. Dans le même temps, elle tourna la tête de tout côté cherchant à apercevoir Olwë. Rien à l'horizon, le loup semblait avoir disparu. Elle leva un regard désespéré vers le jeune homme.

" Attendez ! Je... "

Il fallait qu'elle s'éclaircisse les idées, elle était sur le point de craquer. Et vu le comportement de l'inconnu, il n'allait pas patienter très longtemps si elle ne s'expliquait pas. Elle respira un grand coup et le regarda dans les yeux.

" Ne partez pas comme ça, que je puisse au moins vous remercier. "

Elle avait parlé d'une voix un peu plus calme. Elle eut un petit sourire et prit soudain conscience que la personne en face d'elle n'était pas humaine. Ce n'était pas un elfe non plus d'ailleurs, ni un nain. Il ne pouvait qu'être un drow. Beaucoup de personnes à sa place auraient eu au moins un mouvement de recul, mais elle n'en fit rien : il venait de lui sauver la vie et elle avait bien peu d'à-priori sur sa race.

Un mouvement la tira de ses réflexions : Olwë s'approchait en titubant légèrement. Il n'avait pas l'air blessé mais plutôt sonné et elle supposa que le cogianth l'avait projetté hors de sa trajectoire. Elle oublia son sauveur et se précipita vers le loup. Se laissant tomber à terre, elle l'enlaça, soulagée qu'il n'ait rien de grave.

Puis elle se tourna à nouveau vers le drow, souriante.

" Vous nous avez sauvé la vie ! Comment puis-je vous remerciez ? "

Olwë revenu, elle avait retrouvé sa bonne humeur et comptait bien ne pas laisser le jeune homme s'échapper comme ça. Le loup, quand à lui, restait près de sa maîtresse, quelque peu méfiant envers le drow. Il restait visible mais c'était plus à cause de sa faiblesse que par réelle confiance envers l'inconnu.

Berg'inyon, impassible, renvoya à la jeune fille un regard parfaitement dépourvu de toute émotion. Il avait été vaguement surpris de constater son absence de réaction face à sa peau noire -après tout, il était plus fort, mieux armé qu'elle et il appartenait à une race dont la réputation de perversité et de cruauté n'était plus à refaire. Habituellement, les autres races les fuyaient comme la peste, ce qui n'était pas pour lui déplaire, mais cette idiote petite "rivvil" semblait aussi inconsciente que suicidaire...

Pour commencer, c'était vraiment une idée des plus absurdes que de se promener tranquillement dans un endroit aussi désert, hostile et dangereux que les Marais, et en plein dans un territoire drow, en plus. Cette petite sylvaine était-elle réellement aussi folle qu'elle en avait l'air, où possédait-elle quelque pouvoir ou compétence martiale extraordinaire qui puisse lui éviter de terminer en sacrifice aux dieux sombres ?

Au vu de la manière gauche et maladroite avec laquelle elle avait dégainée sa lame - elle la tenait d'une main tremblante, avec un mélange d'appréhension et de précaution, comme si elle avait peur de se blesser- la seconde option était à éliminer. Le guerrier drow savait reconnaître des débutants quand il en avait devant les yeux, et il était évident que cette fille serait incapable de faire la différence entre un cimeterre et une épée si on la lui fourrait sous le nez...

A la question stupide qu'elle lui posa quant au fait de le remercier, il faillit répondre "En me fichant la paix", mais il se retint à temps. Si ça se trouve, il était tombé sur une fille de nobles ou de bourgeois fortunés, et il était prêt à parier qu'avec la chance actuelle qui était sienne, il y aurait bien quelque paquet d'argent à récolter en échange de sa "protégée". Après tout, elle devait bien avoir un ou deux parents éplorés prêts à casquer pour revoir leur fille chérie saine et sauve...

Et puis quoi, c'était aussi son boulot, non ?!

- Je suis mercenaire, lança-t-il d'un ton parfaitement neutre. On me paye, je me bats, et le reste m'est bien égal. Si tu as assez d'argent, je pourrais te ramener en sécurité dans ta famille. Sinon...

Le ton de sa voix indiquait bien que, pour sa part, ce qui pouvait lui arriver était bien peu de choses à ses yeux. Qu'elle crève donc dans la jungle, si elle n'avait pas un rond ! Mais si il y avait quelque moyen de se faire récompenser pour ses services, pourquoi laisser passer une telle occasion ? Comme il le disait lui-même : "Il n'y a pas de petits profits..."

L'expression du drow restait franchement froide et détachée. De toute évidence il l'avait sauvée mais voulait en rester là, ce qu'il lui arrivait ensuite lui importait peu. Mais il en fallait plus pour décourager Adria. Elle avait passer sa vie à s'efforcer de briser la glace avec des étrangers pour lesquels elle était indifférente. Ce serait bien le diable s'il ne décrochait pas trois mots !
D'ailleurs, il finit par lui répondre. D'un ton neutre, mais c'était déjà ça.

" Je suis mercenaire. On me paye, je me bats, et le reste m'est bien égal. Si tu as assez d'argent, je pourrais te ramener en sécurité dans ta famille. Sinon... "

La jeune fille hésita. Elle n'avait pas vraiment envie de se retrouver seule ici. Quelqu'un pour l'accompagner serait une bonne chose, le temps qu'elle se remette de ses émotions. En même temps, elle n'avait pas d'argent. Enfin si, quelques écus, mais surement pas de quoi payer un mercenaire. Quand à sa famille, il n'y avait aucun espoir de ce côté là : elle n'en avait pas. Elle pouvait bien lui mentir mais ça ne réglerait pas le problème de l'argent et d'autre part elle ne voulait pas le manipuler.
Elle haussa les épaules.

" Personne au monde ne paierait le moindre sou pour moi... "

Elle avait répondu d'une manière détachée, laissant entendre qu'elle s'en moquait et s'était faite à l'idée. Mais, au fond, elle n'aimait pas trop y penser.

" Vous demanderiez combien ? "

Elle ne savait pas trop pourquoi elle avait posé la question. Par curiosité, sans doute, elle s'intéressait à tout, mais aussi pour prolonger un peu la discussion. Il allait partir et elle se retrouverait plantée là. Avec Olwë, certes, mais elle ne pouvait pas discuter avec lui comme elle le ferait avec un être humain. et puis, peut-être qu'elle avait assez de sous après tout.

" Vous allez où ? Qu'est ce que vous faites dans le coin ? "

Il aurait aussi bien pu lui retourner la question et elle aurait été bien incapable de lui répondre. Elle se contentait d'avancer au petit bonheur la chance...
Elle s'avisa qu'elle avait toujours sa dague à la main et elle la rengaina avec précaution en attendant la réponse du jeune homme. Olwë ne bronchait pas, mais lui ne verrait surement pas d'un bon oeil qu'ils fassent la suite du voyage ensemble. Il n'appréciait pas les gens armés, les reconnaissants comme des prédateurs. Seule sa faiblesse l'empèchait de se montrer plus menaçant envers le drow. Mais si ce dernier faisait mine de s'approcher trop près d'Adria...

Le guerrier, calme et inexpressif, retint un soupir irrité en entendant la réponse de celle qui lui devait à présent la vie. Lui qui avait cru, en voyant ses habits soignés et sa mine gracieuse et bien élevée, que la chance lui souriait, il se retrouvait frustré de voir à quel point Dame Fortune s'était bien moquée de lui. Elle n'avait pas un rond, visiblement, et elle ne constituait même pas une monnaie d'échange correcte !

* Kss... Une paysanne... *

Si au moins elle avait été riche, il aurait pu lui extorquer un peu d'argent après l'avoir racompagnée chez elle, mais là...
Visiblement, elle lui avait demandé combien simplement par curiosité, quoique il ne puisse vraiment en être sûr. De toute manière, il ne se planifiat jamais des honoraires à l'avance puisque il était bien plus malin et fructueux de laisser les personnes concernées vous proposer leur prix qui, généralement selon le de gré de gravité des ennuis dans lesquels ladite personne s'était fourrée- étaient bien souvent évalués à la hausse par les clients.

- Bien trop que tu ne puisses payer, déclara-t-il dédaigneusement en faisant quelques pas pour s'en aller.

Toutefois, alors qu'il se détournait pour partir, son regard se posa sur l'étrange amulette qui entourait le cou de la jeune fille. Le bijoux finement travaillé, luisant de cet éclat caractéristique aux objets magiques, semblait être d'un certain prix, et le drow, peut curieux de savoir comment pareil trésor eût pu tomber entre les mains d'une débutanta, ne pût s'empêcher de calculer à combien il pourrait revendre cette merveille.

Les objets magiques n'étaient pas monnaie courante, et bian qu'il ignorait en quoi consistait le charme de celui-ci, il pouvait néanmoins se faire une idée assez exacte de son prix. Comme la somme à laquelle il était parvenue était plutôt rondelette, et comme il soupçonnait cette gamine de ne pas connaître la véritable valeur de l'objet sus-mentionné.

Les yeux rivés sur le bijoux enchanté, il tira son long katana aux rebords effilés et en plaça la pointe sous la gorge de la demoiselle, accrochant habilement l'objet d'un mouvement du poignet avant de le faire glisser le long de la lame dans un raclement métallique jusqu'à ce qu'il atteigne la garde. Quant il l'eut en main, le mercenaire l'observa attentivement, une lueur de convoitise dans ses yeux océan.

- Cela fera l'affaire, lança-t-il avec assurance une fois qu'il eut fini son inspection.

D'un geste, il lança l'objet à la jeune elfe qui le reçut dans les mains. Rengainant son arme, Berg'inyon passa à côté de la demoiselle d'un air indifférent, s'arrêtant à l'orée de la clairière pour lancer laconiquement :

- Suis-moi.

Puis, d'un pas tranquille et sûr de lui, il s'enfonça dans le labyrinthe de branches, de tourbe et de broussailles qui constituaient le Marais.

Le jeune homme avait l'air parfaitement impénétrable mais elle devina qu'il ne devait pas apprécier l'idée qu'elle ne puisse le payer. Logique, pour un mercenaire.

" Bien trop que tu ne puisses payer. "

Un mouvement rapide et elle se retrouva la lame sous la gorge, Olwë, dans un grondement sourd, se ramassa pour bondir. Mais l'inconnu avait déjà reculé et se contentait de regarder l'amulette. Le loup patienta, attendant de voir commnent réagirait Adria.

Cette dernière se mordait les lèvres. Le drow n'aurait pas dû. Elle sentait la puissance de la magie enfler doucement. S'il lui volait, les dieux seuls savaient ce qu'il lui arriverait. Et vu ce qu'elle ressentait, rien de bon. Apparemment, il ne s'en était pas rendu compte et observait l'objet avec attention. Puis au moment où elle ouvrait la bouche pour l'avertir, il lui lança l'amulette.

" Cela fera l'affaire. "

Il s'éloignait déjà en lançant un "Suis-moi." Elle obéit, mais en aucune façon parce qu'il le lui avait demandé - ou ordonné.

" Non, je regrette, ça ne fera pas l'affaire. "

Elle continua sur sa lancée et lui lança calmement mais fermement, toute trace de gentillesse évaporée :

" N'y touchez plus où vous le regretterez. Je ne dis pas ça pour vosu menacer, ce n'est pas moi qui vais vous faire peur, je m'en doute. Mais il est dangereux de jouer avec ce qu'on ne connait pas. "

Elle ne savait peut-être pas se battre, ni lancer réellement des sorts, mais au moins, elle était capable de sentir toute magie, et elle savait que la prochaine fois l'amulette ne tolérerait pas le drow. Par contre, elle n'avait pas la moindre idée de ce qu'il se passerait car s'était la première fois que quelqu'un d'autre qu'elle la touchait.

Normalement, s'il n'était pas idiot ou suicidaire, il aurait compris le message. Elle avait parlé sérieusement, quittant un instant ses airs quelque peu naïfs.

" Et puis je m'en voudrais si Olwë s'en prenait à vous. Vous avez eu beaucoup de chance pour ça aussi... "

Elle haussa les épaules, elle ne cherchait pas à l'effrayer mais réellement à éviter qu'il ne lui arrive malheur. Elle eu un petit sourire :

" Peu importe, je vais me débrouiller."

Elle allait partir et se retourna en lançant légèrement :

" Vous faites exprès d'être désagréable ou c'est bien malgré vous ? "

Berg'inyon crut qu'il avait mal entendu quand elle refusa d'un ton
ferme son offre de secours. Partagé entre la colère et la vexation, il
haussa les sourcils d'un air courroucés et lui jeta un regard hautain.
Non seulement cette stupide "rivvil" se permettait de refuser l'aide
qu'il lui proposait alors qu'elle était dans une situation qui ne lui
laissait pas franchement le choix de faire la difficile, mais en plus
elle se permettait de le menacer avec aplomb, comme si elle eût été en
position de dicter ses conditions !

Pourtant, au fond de lui, il devait reconnaître qu'il était surpris et
même -très légèrement- impressionné. Il fallait un certain cran pour se
permettre de parler sur ce ton à un guerrier drow armé jusqu'aux dents,
et sur son propre terrain, en plus ! Elle devait vraiment y tenir, à
cette amulette enchantée, et celle-ci avait visiblement plus de valeur
qu'il ne l'avait d'abord imaginé...

Bref, cette manière qu'elle avait eu de l'envoyer balader l'avait
irrité, mais il lui reconnaissait également une certaine audace. Après
tout, un autre drow que lui l'aurait déjà tuée depuis longtemps, et
même si il avait une certaine patience, il l'aurait déjà plantée là à
ce stade de la conversation. Pourtant, elle avait quand même osé le
provoquer, et elle s'était même permise de le critiquer. Elle n'était
peut-être pas si cruche que ça, finalement...

Il avait rarement un visage détendu, et quand il riait c'était toujours d'une manière aussi arrogante et dangereuse.

- Pour le sourire, c'est plus cher, lui lança-t-il avec cynisme. Alors tu ferais mieux de t'y habituer !

Il haussa les épaules d'un air insolent et passa à côté d'elle avant de
lui poser une main sur l'épaule. Sa poigne était dure, énergique, mais
il savait mesurer sa force et serrer à peine assez pour la retenir sans
lui faire -trop- mal.

- Garde donc ce bijoux de pacotille, fit-il avec un mépris affiché, la
jaugeant de son regard de verre. Je fais mon boulot, à toi de trouver
le moyen de me payer, que ce soit en verroterie ou en monnaie...

Quelque chose dans son regard indiquait que, tout patient qu'il fût et
aussi intéressante qu'elle puisse être, il n'en demeurait pas moins que
c'était sa dernière offre, et que si elle ne voulait pas de ses
services, elle pouvait bien aller se faire pendre quelque part. Il y
avait des limites, quand même !

Derrière lui, le loup-caméléon grondait. Le mercenaire lui lança un regard glacial, conscient que l'hostilité qu'il éprouvait pour la bestiole était mutuelle. De toute façon, il n'allait rien lui faire, à cette petite sylvaine, alors que ce foutu clébard se taise s'il ne voulait pas finir en tapis...

Adria s'était demandé un instant si elle n'était pas allée trop loin mais il était vraiment hors de question de laisser l'amulette à ce drow. Ni à lui, ni à qui que ce soit d'ailleurs. De toutes façons, il semblait que le bijou lui-même n'accepterait pas de se séparer d'elle, et c'était très bien comme ça.

" Pour le sourire, c'est plus cher, lui lança-t-il avec cynisme. Alors tu ferais mieux de t'y habituer ! "

Elle lui en lança un rayonnant :

" Ah oui ? Je sourierai pour deux alors, ce n'est pas un problème ! "

Il s'approcha, lui posant une main sur l'épaule. Probablement pour montrer qu'il dominait la situation. Si ça pouvait lui faire plaisir... Fermement, elle souffla à Olwë de ne pas bouger et, toujours souriante, soutint le regard du jeune homme. Elle remarqua au passage ses yeux d'un bleu sombre, plutôt originaux, surtout pour un drow. Elle avait entendu dire qu'ils avaient en général des iris rouges, mais elle les trouva bien plus beaux comme cela. Dommage qu'il s'acharne à garder un regard aussi froid. Comment pouvait-on se faire un plaisir d'être désagréable ? Elle avait beau chercher, elle qui allait toujours au devant des gens, ne voyait pas ce qui justifiait une telle attitude.

Trouver le moyen de le payer ? Elle hésita. Elle pouvait continuer son chemin toute seule et elle ne lui devrait rien. Elle pouvait aussi l'accompagner et elle devrait trouver un peu d'argent. En général, elle passait quelques soirées en taverne où elle chantait contre une petite rémunération. Et ainsi, elle aurait de la compagnie sur la route.

" Marché conclu. Mais j'ai besoin de connaitre ton prix. "

Elle était passée spontanément au tutoiement vu qu'il l'utilisait aussi.

" Je vais à Diantra. D'ailleurs ça vaut mieux pour toi que d'aller vers Aëlandir je suppose... "

Elle avait hésité entre les deux directions, se promenant au hasard. Finalement, elle avait opté pour la capitale des hommes qu'elle connaissait déjà un peu, d'autant qu'elle n'avait pas la moindre envie de retrouner chez les siens. Elle se demanda un instant s'il l'accompagnerait jusqu'à la ville ou s'il la lacherait à la sortie des marais. S'il voulait être payé, il faudrait qu'il se débrouille pour rester dans les environs et qu'il lui fasse confiance pour la laisser aler gagner ce qu'elle lui devrait.

La seule chose qui ennuyait la jeune fille, c'était l'hostilité réciproque entre Olwë et le drow. Tant que le loup resterait faible, elle pourrait le calmer, mais après... Elle avait bien conscience de faire un choix dangereux en acceptant la compagnie du mercenaire, mais elle avait depuis longtemps renoncé à écarter tout danger de sa vie. Elle prenait les événements comme ils arrivaient et "advienne que pourra" !

Berg'inyon marqua son approbation d'un geste de la tête, se demandant pensivement si il n'était pas en train de commettre une grosse bêtise. Ce n'était pas tout à fait son genre d'accepter des métiers aussi contraignants que garde du corps et encore moins de protéger des demoiselles, surtout quand lesdites demoiselles étaient visiblement fauchées...

Pourtant, il devait admettre qu'elle avait une certaine audace qui méritait que l'on s'intéresse un minimum à son sort. Après tout, il l'avait déjà sauvé une fois, alors autant aller jusqu'au bout. Et puis il y avait toujours cette étrange amulette qu'il avait extrêmement envie de voir à l'oeuvre, juste au cas où. Ce genre de bijoux valait cher, et bien qu'il feigne le désintérêt devant elle, il n'en continuait pas moins à s'intéresser à ce petit objet enchanté. Si elle parvenait à le payer, tant mieux, mais si ce n'était pas le cas...

Il haussa les épaules. Peut-être que l'amulette lui reviendrait, finalement ?

- Ne t'occupe pas du prix, lança-t-il avec négligence. De toute façon, il augmentera en fonction du nombre de fois où je te sauvrai la vie...

Diantra n'était pas la meilleure des solutions pour lui. Une fois sortis de leur territoire, les drows n'étaient pas vraiment le bienvenu ailleurs, surtout depuis quelques temps. Une fois arrivé dans la Cité des Hommes, il se demandait si on ne le forcerait pas à faire demi-tour à coups d'arbalètes...

Et puis, si ça devait être le cas, tant pis ! Il voyageait pour voyager, et il se fichait bien de savoir si oui ou non il était le bienvenu partout où il passait ! Si ils ne voulaient pas de lui, il prendrait un autre chemin, et alors libre à elle de le suivre ou non...

- Allons-y, dit-il en lui faisant signe que la discussion était close. Si tu as des affaires à prendre, dépêche-toi d'aller les chercher avant que nous ne partions d'ici. Il y a bien un ou deux jours de marche avant de sortir des Marais, alors si j'étais toi je voyagerai léger...

Pour sa part, il n'avait d'autres possessions que son armure, sa bourse et son katana. Pour un voyageurs sans cesse sur les routes, quel besoin de s'encombrer avec trop de choses ? Quand il avait faim, il braconnait, et quand il était fatigué il faisait une halte. Qu'est-ce qui pourrait bien lui manquer qui puisse améliorer son bonheur ?

Décidément, le drow ne semblait pas décidé à lui dire combien il lui demanderait.

" Ne t'occupe pas du prix. De toute façon, il augmentera en fonction du nombre de fois où je te sauverai la vie... "

Elle haussa les épaules :

" Alors il ne faudra pas t'étonner si tu n'obtiens pas ce que tu demandes... Mais je ferai mon possible, je suis honnête. "

Elle effleura son amulette, ayant l'impression que le regard du drow glissait un peu trop souvent dessus.

" Ne demande pas l'impossible tout de même... "

Il semblait s'en moquer royalement et elle n'insista pas. D'ailleurs, il reprenait :

" Allons-y. Si tu as des affaires à prendre, dépêche-toi d'aller les chercher avant que nous ne partions d'ici. Il y a bien un ou deux jours de marche avant de sortir des Marais, alors si j'étais toi je voyagerai léger...

Elle secoua la tête.

" Non, je n'ai rien d'autre. Je n'aime pas m'encombrer. "

A sa ceinture se trouvait son escarcelle et sa dague, sa cape lui servait de lit et ça lui suffisait bien comme ça. Du moins, c'était parfait en forêt. Ici, dans les marais, l'humidité traversait la cape de laine durant la nuit et la nourriture qu'elle ramassait habituellement lui faisait parfois défaut.
Adria lui emboita le pas et reprit :

" Tu as un nom ? "

Elle n'aimait pas ne pas connaitre le nom des gens car c'était beaucoup plus difficile de se lier avec eux. Du coup, quand ils refusaient de se présenter elle avait recours à des surnoms inventés de toutes pièces et, en général, on regrettait vite fait de ne pas avoir décliné son identité. Contrairement à son habitude, elle n'avait pas donné le sien. Vu le caractère du drow, il était bien du genre à refuser de répondre et elle n'avait pas envie de lui dire comment elle s'appelait si ce n'était pas réciproque.

Olwë trottinait à côté d'elle. Il avait l'air de se sentir mieux mais en paraissait pas vouloir s'en prendre au jeune homme. Tant que ce dernier se tenait tranquille et qu'Adria allait bien il ne bougerait pas.

Comme tout elfe, la jeune fille marchait légèrement, malgré le sol par endroit spongieux. Elle entama un air entrainant, à mi-voix cependant car elle craignait que le drow lui reproche son manque de discrétion.


[hrp : je risque quand même gros à me balader en territoire drow. On pourrait continuer en territoire neutre ? (autres routes, ou forêt d'aduram par ex) ]

[Ca me dérange pas d'aller jusque dans la ville des humains, mais si je me fais attaquer il faudra qu'on fasse demi-tour^^ On verra à ce moment-là, ok ? En attendant, on peut encore RP un peu sur les routes puisqu'il y a quand même du chemin entre le territoire drow et le territoire humain...]

Le mercenaire marchait à côté d'elle, sans faire visiblement le plus petit effort pour passer inaperçu. Il aurait pu marcher avec discrétion s'il l'avait voulu, bien sûr, mais il n'en faisait rien. Volontairement, par assurance ou peut-être simplement par arrogance, il se déplaçait avec aussi peu de précautions que s'il avait été en territoire conquis.

Alors qu'elle se mettait à chantonner à mi-hauteur, il lui jeta un regard en coin. Elle avait une voix douce, pure et plutôt agréable à écouter, et il se demanda s'il n'était pas tombé sur une bardesse. Après tout, il y en avait bien un paquet qui parcouraient les routes, et ce ne serait pas la première fois qu'il croiserait le chemin d'une artiste passant d'auberge en auberge pour gagner son pain par ses chansons...

Finalement, après un long silence, il daigna à peine entrouvrir les lèvres pour lancer :

- Berg'inyon. Berg'inyon Brekkel, c'est mon nom...

Sans cesser de marcher, il arracha une longue branche d'arbre qui lui paraissait assez solide et il s'en servit pour tâter prudemment le terrain devant eux. Sous toutes ces mauvaises herbes, on ne discernait plus très bien les endroits un peu boueux des marécages, et nombreux étaient les imprudents qui mettaient par mégarde le pied dans une tourbière, croyant marcher sur un coin de terre et de verdure.

Il ne lui avait pas demandé son nom, et d'ailleurs il semblait bien peu s'en soucier. Pour ce qu'il en savait, ele pouvait bien porter le patronyme qu'elle voulait, à partir du moment qu'il touchait son argent !

La marche se poursuivit pendant plusieurs heures, longue et harassante, mais il n'autorisa aucune pause avant que la nuit ne soit largement entamée. Il avaient beaucoup de chemin à faire, et il savait qu'ils devaient profiter de la tombée de la nuit pour continuer à avancer. Ils traversèrent marais, tourbières, clairières et fronderaies, toujours encerclés par cette même végétation dense et étouffante qui se répétait à l'infini. La chaleur alternée de brèves pluies donnait une atmosphère lourde et humide, et cette moiteur désagréable rendait leurs vêtements collants et poisseux. Habitué au climat tropical des Marais, Berg'inyon n'y prenait même pas garde ; mais après avoir parcourut de nombreux kilomètres, ils furent tout les deux en nage.

Son expression avait retrouvé cette immobilité laconique qui le caractérisait, et il paraissait aussi indifférent et insensible qu'une statue de marbre. Les herbes s'étaient faites plus hautes au fur et à mesure qu'ils progressaient, et le mercenaire était venu se placer d'autorité devant la jeune femme, ouvrant la voie. Il ne faisait aucun commentaire, ne lâchait pas une phrase et ne tournait même pas la tête pour vérifier si elle le suivait bien, mais il progressait avec moins de rapidité qu'auparavant. Il aurait pu aller plus vite, si il le voulait, mais il ralentissait volontairement pour aplatir devant lui les hautes touffes d'herbes, facilitant la progression pour la jeune fille qui venait derrière...

Il avait fini par lui donner son nom. Elle n'y croyait plus à ce moment et cherchait un surnom... Berg'inyon, donc. Des consonnances plutôt éloignée des noms elfes auxquels elle était habituée. Apparemment, il se moquait pas mal de savoir comment, elle, elle s'appelait, mais par principe elle se présenta également. De toutes façons, elle n'aimait pas rester silencieuse :

" Moi c'est Adrianëdel, mais on m'appelle Adria, c'est plus simple. "

Ils continuèrent à marcher, pendant des heures. Au début, L'elfe suivit sans mal mais bientôt elle commença à fatiguer. Elle n'était pas habituée aux longues marches ni à ce climat plutôt désagréable. Heureusement, le drow, qui marchait devant, n'allait pas trop vite bien qu'il semble habituée à l'environnement. Finalement, elle renonça à discuter et continua à chanter doucement pour économiser ses forces.

La nuit était tombée mais, grâce à leur vision nocturne, ils n'étaient pas vraiment gênés par l'obscurité. Cependant, quand Berg'inyon décida de faire une pause, la jeune fille fut soulagée. Elle n'avait rien demandé, n'aimant pas se plaindre, mais l'arrèt était plus que bienvenu. Pour olwë aussi, de toute évidence. Le loup récupérait doucement de ses mésaventures.

Adria parcouru du regard la flore qui les entourait. Elle commençait à avoir faim. D'habitude, elle n'avait qu'à se baisser pour cueillir ce dont elle avait besoin, mais là, elle ne reconnaissait pas grand chose. Même si elle avait un petit appétit, il fallait bien qu'elle mange un peu, surtout après tant de marche. Elle lança un regard un peu perdu à Berg'inyon :

" Qu'est ce qu'on peut manger ici ? "

Elle n'ajouta pas qu'elle ne mangeait pas de viande. Vu le caractère du jeune homme, elle se disait que ce serait déjà un miracle s'il se préoccupait de savoir si elle avait faim. Elle ne savait pas si lui aussi rêvait d'un bon repas ni de quoi il avait l'habitude de le composer. En même temps, elle s'inquiétait aussi pour le loup. Il ne voulait pas l'abandonner pour aller chasser de toute évidence. Il ne faisait pas confiance au drow. Pourtant, lui aussi avait besoin de manger.
Elle le caressa doucement et s'agenouilla à sa hauteur :

" Va chasser, Olwë, je ne crains rien avec lui, il va me protéger, tu entends ? Va chasser. "

Au fond d'elle même, elle avait beaucoup de mal à y croire. Mais elle ne voulait pas faire passer les besoins de son compagnon après les siens. Et puis, maintenant qu'elle avait accepté la présence du drow, elle n'avait plus qu'à s'y habituer. Elle ne pourrait pas vivre constamment sur ses gardes. Néanmoins, elle eut un petit pincement au coeur en voyant le loup s'éloigner. Sans lui, elle se sentait démunie et à la merci de... du drow ? Elle ne comptait pas vraiment sur son amulette en cas de problème : cette dernière lui avait fait défaut bien trop souvent.

Elle se raisonna. Si Berg'inyon lui avait voulu du mal, il lui en aurait fait depuis bien longtemps. Il l'aurait peut-être regretté vu la réaction de l'amulette, mais il n'avait pas l'air de tenir compte de son avertissement outre mesure.


[hrp : par contre tu ne peux pas entrer à diantra sinon tu seras automatiquement fait prisonnier. Mais avant d'en arriver là, il y a les routes, la forêt d'aduram et la plaine d'atral, ça laisse pas mal de temps.]

[Ca roule, on n'aura qu'à changer de cap juste avant d'entrer à Diantra...]

Berg'inyon regarda la jeune elfe renvoyer son animal de compagnie sans rien dire, pensif. Déjà, le fait qu'elle accepte de rester seule avec lui dénotait sa confiance et son -excessive- naïveté. Ils ne se connaissaient que depuis quelques heures et, déjà, elle n'avait plus du tout peur de lui ?

Toutefois, malgré le fait qu'elle fasse preuve de cette candeur proche de la stupidité, il devait admettre que c'était plutôt agréable de voyager avec quelqu'un qui ne le traite pas comme une espèce de monstre. Il n'aimait pas trop la compagnie, et il préférait généralement être seul, mais l est vrai aussi qu'à chaque fois qu'il avait affaire à des "rivvils", la peur qu'il inspirait ne rendait pas sa tâche plus aisée. Au moins, comme ça, il pourrait remplir sa mission de garde du corps sans qu'elle se mette à pousser des hauts cris si il s'approchait à moins de cent mètres...

Négligemment adossé contre un immense tronc d'arbre, les bras croisés, il attendit qu'elle se soit un peu reposée avant de lâcher d'un ton sec et incisif :

- Va faire du feu.

Se redressant brusquement, il saisit le long katana posé à côté de lui et s'enfonça à travers les broussailles, disparaissant dans l'épaisse et luxuriante végétation de la jungle. La nuit était tombée depuis une bonne heure au moins, et tout les bruits de la forêt s'estompaient peu à peu pour ne plus laisser que les hululements des oiseaux de nuits et les crissements de grillons.

Dix minutes s'écoulèrent, puis vingt. Au bout d'un moment, un bruissement agita les fourrés et Berg'inyon réapparut, tenant par les oreilles une paire de lapins dans ses mains. Les animaux, morts, pendaient tristement en se balançant au moindre de ses gestes, et il s'assit en tailleur pour les écorcher à l'aide de sa dague. Lorsqu'ils furent préparés, le mercenaire les mit à rôtir au-dessus du feu de camps qui dansait joyeusement dans son cercle de pierres. Après avoir fouillé dans son petit sac de cuir, il mit à jour une poignée d'herbes aromatiques de diverses formes qu'il émietta entre ses doigts. Très vite, une odeur allécheante commença à se répandre autour d'eux tandis que la chair fraiche et tendre brûnissait.

- Tiens, fit-il en décrochant une cuisse qu'il tendit à l'elfe sylvaine.

Alors qu'elle le prenait entre ses doigts, l'air de ne pas savoir quoi en faire, il détourna le regard et commença à manger de son côté avec un bel appétit. Il ne se débrouillait pas trop mal pour la cuisine, peut-être parce qu'il passait beaucoup de temps sur les routes, et qu'il devait tout faire lui-même. En tout cas, il en avait assez du lapin au thym. Il faudrait qu'il songe à refaire sa provision de basilic et de romarin au prochain village, à moins de tomber sur quelques condiments sauvages qui pourraient améliorer leur ordinaire...

[hrp : on sort des marais après la nuit ? J'aimerais éviter de trop y trainer ! ^^]


Faire du feu ? Adria regarda autour d'elle : tout était humide dans les environs... Et puis elle n'avait pas l'habitude d'en allumer. Cependant, elle ne dit rien, de toutes façons, le drow avait déjà disparu. Elle hésita, un peu mal à l'aise de se retrouver seule. Puis son naturel positif revint au galop et elle se leva pour ramasser du bois, le plus sec possible. Quelques minutes plus tard, elle obtenait un petit tas. Restait à l'allumer. Elle sortit son briquer à amadou de son escarcelle, briquet qu'elle n'avait pas utilisé depuis bien longtemps. D'ailleurs, que ce soit à cause de ce dernier ou du bois trop humide, elle eut beau s'escrimer dessus, le feu refusa de prendre.

Adria se redressa, nullement découragée. Ce n'était pas son genre de renoncer et elle s'agenouilla une seconde fois devant son tas de bois. Au même moment, Olwë revenait. Les babines tachées de sang, la chasse avait été bonne. Elle le laissa s'allonger près d'elle et se concentra sur le bois.

Elle avait eu deux explications différentes sur la manière de procéder pour 'allumer un feu magique. Et ça n'avait jamais marché. Il était temps de réessayer. Elle fixa les brindilles et visualisa une flamme. Comme toujours, une barrière s'éleva dans son esprit, faisant obstacle. Tout était calme et rien ne vint la distraire, elle força. Un peu plus, encore un peu plus... Toujours rien mais elle restait concentrée.

Un certain temps s'écoula, qu'elle ne vit pas passer.

Agenouillée, les yeux fixés sur le bois, elle sentait qu'elle y était presque, un bruit la tira brutalement de sa concentration. Berg'inyon revenait. D'habitude, ce genre d'incident mettait fin à l'essai, cette fois, la magie s'engouffra dans la brèche et se libéra brutalement. Une énorme flamme jaillit, faisant bondir la jeune fille en arrière.

Adria jeta un regard au drow. Apparemment, il n'avait rien vu, ou avait feint de ne rien voir. Le feu brulait à présent normalement. Elle repensa à ce qu'elle venait de faire, ne sachant à quel point elle maîtrisait le phénomène.

" Tiens. "

Elle sursauta, tirée de ses pensées, et avisa ce qu'il venait de lui donner. Regardant la cuisse de lapin elle blèmit et réprima un haut le coeur. C'était au delà d'une simple question de gout : elle avait été élevée dans le respect des animaux, elle ne pouvait manger leur chair. Mais certans elfes faisaient des exceptions, elle le savait. Si elle voulait rester en forme, elle se devait d'essayer.

Elle souleva la nourriture et prit une petite bouchée. Berg'inyon, lui, ne semblait pas gèné et elle essaya d'ignorer l'odeur du lapin qui lui donnait envie de vomir. Déglutissant péniblement, elle mangea à peine. Puis elle reposa la cuisse de lapin, presque intacte, se blotit contre Olwë et entamma une chanson douce pour essayer de se changer les idées.

[pas de soucis, répond là où tu veux après mon post et envoie-moi le lieu par MP^^]

Peu troublé par l'attitude de la jeune fille, Berg'inyon continua de dévorer son lapin avec appétit. Si elle n'aimait pas la viande, tant pis, il n'allait quand même pas se casser la tête à essayer de comprendre le pourquoi du comment des moeurs végétariennes des elfes de la surface...

Après tout, si elle avait faim, elle n'aurait qu'à se trouver quelque chose qui daignerait passer par son estomac (pour Berg'inyon, on n'est pas végétarien par idéologie mais par pur caprice, comme vous l'aurez sans doute compris...) ! Lui, pour sa part, acceptait de manger n'importe quoi, et il restait persuadé que si elle n'était pas capable de faire le moindre petit effort pour manger normalement, comme tout le monde, et bien tant pis pour elle !

- Tu ne trouves pas ça bon ? Demanda-t-il d'un ton brusque, plus pour voir la réaction de la jeune fille que pour avoir son avis sur sa cuisine.

Quand il s'ennuyait, comme c'était le cas en ce moment, il avait tendance à devenir irritable et agressif, et il aimait provoquer les gens jusqu'à amener des disputes. Il avait bien envie de la titiller un peu jusqu'à ce qu'elle cède, et peut-être qu'elle se sentirait quand même obligée de manger, ce qui pourrait être assez amusant. Toutefois, elle paraissait vraiment épuisée, et il décida de tempérer son humeur pour lui faire grâce d'une dispute ce soir, surtout qu'il avait intérêt à la ménager si il voulait traverser les Marais le plus rapidement possible...

* Plus vite on sera chez elle, plus vite je me débarasserai de cet engagement idiot... *

Blottie contre la fourrure de son loup-caméléon qui, de temps en temps, jetait des regards mauvais au mercenaire, elle chantonnait à voix basse une mélodie apaisante. Les yeux plongés dans le feu qui crépitait, Berg'inyon restait adossé à son arbre, une main tendrement enroulée autour du fourreau de son katana. Le Veilleur de Nuit ne serait pas tiré cette nuit, ou en tout cas le drow l'espérait. Tant que le feu durerait, aucune bête n'oserait approcher de leur campement, pas même un Cogianth, mais le guerrier à la peau couleur de cendre devinait qu'il lui faudrait rester éveillé une bonne partie de la nuit, juste au cas où...

- Dors, lança-t-il de sa voix basse et laconique à l'intention de la jeune fille déjà presque assoupie. Demain, nous partirons à l'aube, alors tâche de reprendre des forces...

Ils avaient encore beaucoup de chemin à faire, hélas...
Si ils marchaient vite, ils parviendraient peut-être à l'orée des Marais avant midi, mais le drow ne l'espérait pas trop. De toute façons, ils auraient encore beaucoup de route à faire, alors autant en abattre le plus possible.

Quand il fut certain qu'elle se fut endormie, il se leva sans bruit, approcha d'un pas précautionneux et alla s'accroupir juste à côté d'elle pour l'observer attentivement de ses yeux bleus immuables. Elle avait l'air frêle, fragile et vulnérable, mais il ne cessait de repenser à la scène dont il avait été témoin quelques instants auparavant.

- C'était de la magie, hein ? Murmura-t-il à l'intention du loup qui le regardait en grondant doucement, les poils hérissés.

Il se pencha vers elle, approcha une main de son visage et se ravisa soudain. Après avoir jeté un léger regard en coin en direction d'Olwë, il se redressa, fit demi-tour et alla se rasseoir près de l'arbre, une main sur la garde de son arme.

- Je n'aime pas qu'on me cache des choses, souffla-t-il à voix basse, et ta maîtresse ferait bien de me dire tout ce qu'elle aurait malencontreusement "oublié" de mentionner...

Dans l'obscurité, on ne pouvait voir de quoi était fait son sourire...