L'art de la vengeance | Halystra

Lorsqu’Haldren se réveilla, Halystra dormait encore, chose rare car d’habitude elle se réveillait avant lui pour le tirer du sommeil avec câlins et baisers, forfait tout compris. Pelotonnée contre lui, elle récupérait d’une nuit agitée où les deux drows avaient somme toute peu dormi. Une tigresse infatigable dans les joutes du lit que cette jeune femme, mais là elle payait le rpix de ses efforts.

Plusieurs jours s’étaient écoulés depuis la tentative de meurtre perpétrée contre lui. A cet occasion, Halystra avait fait preuve d’une fidélité envers son maître qui avait surpris le Ditronw Da’re. Non seulement l’avait-elle prévenue que son petit déjeuner était empoisonnée mais avait-elle tué l’empoisonneur pendant que son maître s’occupait des commanditaires. Non, décidemment, cela méritait bien une récompense.

Haldren s’était donc demandé ce qui manquait à la belle. Des vêtements déjà… de fait, la garde robe de son esclave restait limitée à la robe diaphane qu’il lui avait offert le premier jour et qu’elle n’utilisait pas tout le temps pour éviter de l’abimer. Non pas que le Ditronw Da’re se plaigne de voir une jolie fille se balader nue dans son appartement… non non. Mais tout de même, il fallait qu’elle puisse disposer de plusieurs tenues.

Le mage avait en tête d’autres endroits où ils se rendraient une fois Halystra équipée dans le domaine vestimentaire. Des cadeaux qui lui feraient sans doute particulièrement plaisir, mais qui seraient amplement mérité. Elle s’était accommodée de son statut d’esclave du seigneur du C’nros, bien qu’il faille admettre qu’Haldren ne soit pas un maître inhumain.

Les punitions étaient rares et jamais appliquées par caprice, uniquement suite à une faute. Halystra avait certes repassée une nuit suspendue au bout des chaînes de la petite salle de torture suite à une maladresse de sa part lorsqu’elle avait cassé malencontreusement un vase de prix. Mais une fois libérée, elle s’était jetée aux genoux de son maître pour le supplier de lui pardonner… ce que dans son immense bonté il avait fait…

Flanquant une petite claque sur le joli postérieur de la donzelle, le mage s’exclama d’un ton amusé :

Debout ma belle ! Nous sommes de sortie aujourd’hui, alors pas le temps de lambiner.

Tirée du sommeil d’une manière fort surprenant, Halystra eut besoin de quelques minutes pour se réveiller entièrement. Pour une fois elle avait dormi plus tard que son maître et cela l’agaça profondément. Ce n’était pas dans ses habitudes de dormir aussi tard.
Mais visiblement son maître était de bonne humeur, et cela n’avait pas l’air de le déranger outre mesure. Elle n’avait pas envie de retourner dans la petite pièce….froide et sombre…non elle aimait mieux servir docilement son maître plutôt que d’être attachée par les poignets toute une nuit.

Lui lançant un regard étonné, Halystra regarda son maître, un sourire ravi peint sur son visage. Visiblement il avait une idée en tête et dans ce genre de moment il valait mieux lui obéir au doigt et à l’œil. Surtout qu’elle n’avait aucune idée de ce qu’il avait prévu.
Elle était déjà très étonnée qu’il ait pensé à elle pour l’accompagner.

Se levant docilement, Halystra enfila sa robe et remit de l’ordre dans sa coiffure. Elle ne voulait pas ressembler à un épouvantail aux côtés de son maître. Quand elle fut prête elle se tourna vers son maître et l’aida à s’habiller rapidement. Des vêtements propres et sombres qu’elle avait préparé sur une chaise la veille avant de se mettre au lit avec lui.

- Où allons-nous, Maître ? demanda-t-elle finalement.

Elle était curieuse de nature, et malgré son statut d’esclave, elle continuait à s’intéresser à tout. Et puis il fallait dire que c’était la première fois depuis la tentative d’assassinat de son maître qu’il voulait qu’elle l’accompagne à l’extérieur de ses appartements. Il y avait donc de quoi attiser sa curiosité.

Peut-être que son dévouement lors du combat qu’il y avait eut dans l’arène avait suffit pour montrer au seigneur Baenfere toute sa soumission. Ce jour là, elle aurait été prête à mourir pour lui et il avait du le lire sur son visage au moment où elle l’avait aidé à regagner ses appartements.
De ce jour là elle conservait encore un bandage à son bras gauche. Le cuisinier y avait laissé une entaille profonde et douloureuse. Mais avec quelques soins rudimentaires, sa blessure ne serait qu’un souvenir dans quelques jours.

Enlaçant d’un bras son esclave, Haldren déposa un baiser sur son front, un autre sur son nez mutin, le suivant sur la bouche… et il se retint à grande peine de continuer, faute de quoi il sentait qu’ils passeraient le reste de la matinée à batifoler au lit.

C’est une surprise, répondit-il d’un ton moqueur à la question d’Halystra.

Fouillant dans son armoire, il en sortit une cape qu’il posa sur les épaules de son esclave. La robe qu’elle portait était quasi transparente et s’il aimait la contempler ainsi « vêtue », il tenait aussi à sauvegarder sa pudeur en public. Au moins, en refermant les pans de la cape, elle n’aurait pas l’impression de se balader nue dans le Puy.

Une fois prêts, les deux drows sortirent de la chambre arcanique, Halystra sur les talons de son maître. D’un bon pas, le mage prit la route des niveaux supérieurs, la foule s’écartant instinctivement devant lui, comme devant tout les seigneurs des profondeurs.

Sans hésiter, le mage poussa la porte d’une boutique et y entra. A l’intérieur, les présentoirs étaient recouverts de dessous affriolants, de robes qui dévoilaient plus qu’elles ne cachaient, de bottes en cuir qui gaineraient admirablement les jambes fuselées d’Halystra… oui, le genre de tenues faites pour attiser le désir des mâles, exactement ce qu’il cherchait.

La marchande, une drow qui avait du faire tourner bien des têtes avant que l’abus de nourriture ne gâche sa ligne, s’approcha en se frottant les mains à l’idée des affaires qu’elle allait pouvoir réaliser auprès de ce riche client.

Monseigneur… votre présence honore mon humble boutique.
Bien sur Lihma, bien sur… je suis venu pour étoffer la garde-robe de mon esclave que voici. Qu’as-tu à me proposer ?

Suivant son maître avec toujours autant de curiosité, Halystra resserra les pans de la cape lorsqu’ils remontèrent au niveau supérieur. Gardant les yeux levés, ce qui était assez surprenant lorsqu’on savait qu’elle n’était rien de plus que l’esclave du Seigneur qui la précédait. Elle s’amusait des regards effrayés que lançaient les passants lorsqu’ils s’écartaient du chemin de Haldren. S’ils savaient à quel point il pouvait être…doux et agréables…En même temps, il valait mieux pour lui qu’il garde sa réputation, et puis la mort de trois mages, dont un qui avait tout simplement disparu, avait renforcé la crainte qu’il inspirait déjà.
Son maître finit par pousser la porte d’une boutique….de vêtements féminins. Effectivement, comme il l’avait dit plus tôt, il s’agissait bien d’une surprise. Elle n’aurait jamais cru passer la porte d’une telle boutique avec son maître pour…comment avait-il dit ? ….étoffer sa garde-robe !

La vendeuse lui prit le poignet fermement et l’entraîna sans ménagement vers le centre de la pièce, elle l’étouffa presque lorsqu’elle voulut retirer la cape. Visiblement le mot esclave voulait dire pour elle, aucun sourire et gentillesse pour Halystra et du cirage de botte pour le maître.

- Allons, nous allons bien te trouver quelque chose.

Sortant de nulle part un mètre, elle mesure Halystra de la tête aux pieds, longueurs de bras, de jambes, tour de hanche, de taille et de poitrine… tout y passa.
Visiblement excédée par les proportions de la jeune femme, la vendeuse devint encore plus désagréable.

- Et bien tout dépend de ce que vous cherchez monseigneur. J’ai quelques robes basiques pour son travail, des dessous, des robes plus luxueuses, plus chères aussi. Mais je doute que celles-ci vous intéressent, du moins pour elle.

Faisant le tour de ses rayons et étagères, Lihma piocha tout un tas de vêtements qu’elle étala l’un après l’autre sur une chaise devant le seigneur Baenfere.

Halystra resta sans bouger derrière la commerçante. Elle n’osait pas croiser le regard de son maître. Déjà qu’elle ne comprenait leur présence dans cette boutique, elle ne voulait pas avoir l’impression de s’extasier devant la beauté des étoffes qu’elle voyait.
Elle n’était plus maître de sa vie et bien qu’il y ait tout un tas d’habits qui attirait son regard, ce n’était plus son droit de se vêtir comme elle le voulait.

- Que pensez-vous de celle-ci ? demanda Lihma en montrant une robe d’une simplicité presque insultante. Ca avait tout juste l’air d’un sac…

Haldren poussa un grommellement de mécontentement. Lihma comprenait tout de travers décidément. Se levant brusquement du fauteuil où il s’était assis, il attrapa la vendeuse à la gorge et la plaqua contre le mur, renversant au passage plusieurs robes de qualité. Il n’était pas venu pour plaisanter, et n’appréciait guère l’attitude de la drow.

A ton avis espèce d’idiote, si j’amène personnellement mon esclave dans cette boutique, si je prends sur mon précieux temps pour cela, est-ce pour lui voir proposer des sacs à patates ?

Ses yeux laiteux ne cillant pas, il approcha son visage de celui de la marchande dont les jambes commençaient à flageoler. Mais Haldren était vraiment mécontentent, mécontent qu’on lui fasse perdre son temps, mécontent qu’on manque de respect à son esclave, et par la même à lui.

Un autre client entra à ce moment, contempla la scène quelque secondes, puis comprenant de qui il s’agissait fila sans demander son reste. Désignant Halystra du doigt, le Ditronw Da’re cracha presque :

Je veux des vêtements qui épousent ses formes, qui la mettent en valeur, qui donnent envie de les lui enlever pour jouir de son corps ! Je me fiche du prix que cela coutera !

La lâchant, il retourna s’asseoir et déclara d’un ton glacial :

Elle a un corps splendide, ses vêtements doivent l’être aussi. Comprends bien une chose : ce n’est pas n’importe quelle esclave du C’nros. Halystra est mon esclave personnelle, et elle à plus de valeur à mes yeux que ta vie.

Le sous-entendu était clair… pour être une simple esclave, Halystra restait la possession de l’un des seigneurs du Puy. A ce titre, un minimum de courtoisie et de politesse était non pas demandé mais exigé…

La colère du Seigneur Baenfere fut aussi violente qu’inattendue. Lihma se retrouva la gorge serrée par la poigne de fer du mage, n’émettant que de faibles gémissements de douleur.
Halystra n’eut même pas pitié pour elle, elle était trop surprise par les paroles de son maître. Aussi improbable que cela pouvait paraître, il semblait la trouver belle et il désirait lui acheter n’importe quel vêtement la mettant en valeur.
Bien sur, depuis qu’il l’avait acheté elle ne pouvait pas ignorer la mutuelle attirance qu’il y avait entre eux, d’autant plus qu’elle passait toutes ses nuits avec lui. C’est bien qu’il appréciait un tant soit peu sa compagnie. Mais jusque là elle avait tout simplement pensé qu’il faisait avec, faute d’autre chose. Elle était son esclave, il pouvait donc lui demander n’importe quoi sans avoir à dépenser une seule pièce…

Mais ses paroles, bien que prononcées avec colère, éveillèrent en elle un sentiment qu’elle ne connaissait pas…ou peu.
Coquette, elle l’avait toujours un peu était et elle avait toujours su trouver des vêtements lui permettant d’avoir toutes les attentions masculines, mais jamais personne ne l’avait ainsi complimenté.

La commerçante reprit son souffle en quelques secondes et se dirigea vers l’arrière boutique pour prendre ce qu’elle avait de mieux afin de satisfaire le puissant seigneur. Passant à côté d’Halystra, elle lui adressa un pâle sourire avant de laisser le maître et son esclave seuls quelques instants.
Croisant le regard de son maître, Halystra lui adressa un sourire timide. Elle n’avait pas l’habitude que l’on prenne ainsi soin d’elle…même si ces soins n’étaient pas entièrement gratuits, elle mettait du baume au cœur de l’esclave.

- Voilà, j’ai trouvé…j’ai un large choix monseigneur….des robes superbes lorsque vous sortirez, accompagné de votre…de cette charmante demoiselle…mais aussi des robes plus simples mais non dénuées de charmes et parfaites pour épouser ses….ses divines formes…

Halystra ne masqua pas sa surprise et sa gêne lorsque la commerçante étala les robes devant elle plutôt que devant le mage comme elle l’avait fait plus tôt. Un coup d’œil vers son maître la rassura néanmoins et elle désigna du doigt une robe simple mais raffinée. Blanche, moulante avec un corset en cuir noir…de quoi la mettre en valeur.
Aidée par Lihma, Halystra enfila la nouvelle tenue. L’étoffe était douce et agréable à porter et le résultat était tout aussi agréable à voir. La robe était taillée dans un voile blanc léger qui voletait autour d’elle lorsqu’elle faisait quelques pas. Le corset mettait en valeur la finesse de sa taille et la rondeur de ses seins.

- Elle vous va à ravir, murmura la vendeuse en essayant de cacher le plus possible l’amertume qui lui prenait la gorge.

Halystra ne jeta même pas un coup d’œil dans le grand miroir derrière elle, le seul juge s’ était son maître et elle attendait son verdict, les yeux rivés dans les siens. Un détail qui n’échappa pas à la commerçante.

Lihma revint bien vite, chargée de tenues qui cette fois ne rappelaient pas des sacs à patates. Nul doute qu’elle avait du en catastrophe sortir ses plus belles robes pour ces clients peu ordinaires qui patientaient dans sa boutique. Aidée par la marchande, Halystra essaya une première tenue plus adaptée à sa condition, le tout sous l’œil de son maître qui bien sur ne perdait rien du spectacle.

Un corset de cuir noir et une robe en voile blanc, une tenue qui épousait les formes de la belle et les mettaient en valeur. L’élégance de la simplicité, des vêtements qui demandaient à être portés par une fille à la carrosserie impeccable. Tournant autour de son esclave, la jaugeant sous toutes ses coutures, le Ditronw Da’re laissa échapper un sifflement admiratif. Retournant s’asseoir, il annonça son verdict.

Sublime, je prends !

Du regard, il fouilla les autres tenues et fut attiré par un ensemble vermillon composé d’une petite tunique laissant le ventre et les épaules nus, une robe si courte que l’on pouvait se demander si le couturier n’avait pas picolé avant de la concevoir, de hautes bottes en cuir et une cape qui complétait le tout, sans doute pour apporter un minimum de décence à une tenue qui dévoilait beaucoup plus qu’elle ne cachait.

Rien qu’à imaginer Halystra vêtue (bien que « vêtue » ne soit pas le terme idéal) ainsi, le mage sentait son sang bouillir. Heureusement que ses vêtements amples cachaient l’excitation qui gagnait une certaine partie de son anatomie. Jetant un coup d’œil que d’aucuns n’hésiteraient pas à qualifier de « lubrique » à son esclave, il ordonna :

Hmm… Halystra, essaye voir cela…

Visiblement la première robe plaisait à son maître, au point qu’il annonça qu’il la prenait avant de se mettre en quête d’une autre tenue….un peu plus différente. Halystra fut presque tentée de lui dire qu’avec une elle en aurait assez, mais elle ne voulait pas l’énerver. Et puis elle n’allait pas se plaindre non plus ! Il s’agissait de robes de qualité, elle n’en avait jamais porté de pareille même lorsqu’elle était ‘libre’. Son maître la gâtait, lui offrait une vie plus confortable et plus luxueuse, le prix à payer en échange était bien faible au goût de l’esclave car sa nouvelle condition lui était presque plus agréable à vivre que l’ancienne. Elle avait de l’affection pour lui, plus qu’elle n’en avait jamais eu pour personne.

Il lui arrivait de se demander ce qu’elle aurait fait s’il avait péri lors du combat dans l’arène ou si pour une raison inconnue elle retrouvait sa liberté…sa vie deviendrait bien triste et banale. Aujourd’hui elle s’occupait du bien-être d’un homme aussi surprenant qu’attachant. Capable d’autant de froideur que de tendresse…

Dans la boutique, la commerçante se jeta sur la robe qui avait attiré l’œil du mage et aida Halystra à l’enfiler en un temps record en prenant soin de mettre la précédente de côté. Le plus compliqué à mettre se fut les bottes mais le résultat final avait l’air de plaire à son maître.
La tunique était courte…vraiment très courte, laissant même entrevoir la naissance de ses fesses, de quoi attiser le désir de celui qui la verrait ainsi habiller….et elle espérait que ce ne soit que son maître.

Bien que très osée cette tenue lui allait comme un gant. Elle n’avait plus tellement l’air d’une esclave mais après tout elle n’avait pas à discuter les choix d’Haldren.

Faisant quelques pas pour vérifier si la robe n’était pas trop serrée, Halystra finit par croiser le regard de son maître. Se rapprochant de lui, elle fit quelques pas devant lui, tourna sur elle-même, puis lui fit face à nouveau.

- Vous plait-elle, Maître ? demanda-t-elle un petit sourire malicieux au coin des lèvres.

Elle connaissait déjà la réponse, le regard ardent qu’il lui jetait était suffisamment explicite. Lihma qui contemplait la scène, se mit à chercher à nouveau sur ses étagères d’autres robes qui pourraient taper dans l’œil du mage. Mais il était clair que celle que l’esclave portait en ce moment avait plus que tapé dans l’œil du seigneur Baenfere.

- Elle lui va, se contenta de dire la commerçante toujours aussi frustrée, en faisant mine de préparer une autre tenue pour la suite.

Halystra observa Lihma un sourire amusé sur les lèvres. Cette pauvre femme ne ressemblait plus à grand-chose pourtant elle avait du être fort belle. Mais passer son temps à s’empiffrer n’était pas le meilleur moyen pour garder des formes et des courbes parfaites.
Reportant son attention sur son maître, Halystra fit à nouveau un tour sur elle-même pour lui donner l’occasion de la regarder sous toutes les coutures.

Haldren cherchait comment décrire Halystra dans sa nouvelle tenue…. Sublime ? Excitante ? Provocatrice ? Divine ? Le décolleté était au-delà des limites de l’indécence, et la jupe si courte qu’elle laissait par moment entrevoir la naissance des jolies petites fesses d’Halystra… une fois de plus le mage fut soulagé de l’ampleur de ses vêtements qui heureusement ne comprimaient pas son entrejambe…

Cela ferait trois tenues à Halystra, trois tenues qui la mettaient admirablement en valeur, trois tenues dont elle n’aurait sans doute même pas pu rêver auparavant. Mais Haldren tenait à ce que son esclave soit agréable à regarder. Après tout, la jeune femme était sa propriété et il tenait à en prendre soin. Une esclave aussi belle et aussi docile, sans tomber dans de l’abjecte soumission, voilà une chose rare…

Halystra fit mine d’ôter sa petite tenue de cuir vermillon pour repasser sa robe lorsqu’un geste de son maître l’arrêta.

Non, garde là. Mets juste la cape par-dessus.

Outre l’aspect excitant de cette tenue, mais dont le mage profiterait plus dans ses appartements, elle avait un avantage non négligeable… une trace de sang partirait plus facilement que sur les deux autres vêtures de l’esclave. Se tournant vers Lihma, il lui demanda le prix de ses achats. Sans même chercher à le négocier, il lui jeta une bourse d’or dans les mains puis fis signe à Halystra de le suivre.

Bien. Allons-y.

Ordonnant à la marchande d’envoyer le reste des vêtements au C’nros, le Ditronw Da’re sortit dans la rue sans un regard en arrière, parfaitement tranquille quand au fait que Lihma obéirait. La crainte qu’il lui inspirait éviterait tout risque de malveillance discrète et il savait que les vêtements serait livrés en parfait état. Une fois dehors, il ne prit pas la direction des niveaux intermédiaires... il avait apparemment autre chose en tête.

Alors qu’elle allait se changer, son maître l’arrêta et lui demanda de garder sa robe actuelle. Il était visiblement pressé soit de rentrer, soit de se rendre autre part. Après avoir donné quelques ordres à la commerçante, Haldren sortit, son esclave sur ses talons.

Serrant un peu plus fortement la cape autour d’elle, Halystra suivit docilement son maître sans se poser de question.
Il venait de lui acheter deux nouvelles tenues et elle n’avait même pas eut le temps de le remercier qu’il filait déjà à travers la foule qui se fendait sur son passage. Lorsqu’ils furent dans une ruelle un peu moins encombrée, Halystra pu se rapprocher un peu plus de son maître.

- Merci Maître, pour les deux robes.

Continuant d’avancer, Halystra finit par reconnaître les rues. Elle était déjà venue dans cette partie de C’nors…et il n’y a pas si longtemps que ça d’ailleurs. Plus elle avançait et plus elle se posait des questions.
Cette petite boutique bizarre sur leur droite…elle l’avait déjà vu, elle l’avait déjà trouvé bizarre la première fois qu’elle était passée devant… et puis cette petite place, cette statue…oui, elle était déjà passée par ici.

- Où allons nous Maître? demanda-t-elle.

Alors que les mots franchissaient ses lèvres, la lumière se fit dans son esprit. Elle vit les grandes portes en bois un peu plus loin dans la rue. C’était les portes qu’elle avait franchit juste après avoir été acheté par Haldren…

Le stand de Radkorn, le plus réputé des vendeurs d’esclave du Puy…
Mais pourquoi retournaient-ils là bas ? Halystra serra les poings. Serait-elle capable de se maîtriser lorsqu’elle croiserait à nouveau le regard de cet homme ? Il avait fait assassiné son père sous ses yeux, il l’avait arraché à sa vie (bien qu’elle ne la regrettait pas tant que ça)….il lui avait fait passer les jours les plus horribles de toute sa vie d’esclave. Même Haldren ne l’avait pas traité de la sorte.

Sa haine pour cet homme était toujours intacte et il lui faudrait faire d’énormes efforts pour ne pas céder à son envie de l’étriper. Et puis….pourquoi se dirigeaient-ils vers le marché d’esclaves ? Haldren souhaitait-il faire une nouvelle acquisition ? N’était-il pas content d’elle ?

Guidant Halystra, le Ditronw Da’re se rendit là où il s’étaient rencontrés pour la première fois… chez le marchand d’esclave Radkorn. Nul doute que ce retour en ces lieux devait être douloureux pour elle, car de fait elle ne pouvait certainement pas imaginer, fusse une seule seconde, la raison qui motivait leur visite.

Radkorn se trouvait dans la salle lui servant de salle de vente, à relire le programme de la prochaine présentation. Voyant entrer Haldren, il fit une courbette obséquieuse et jeta un regard mauvais à Halystra. Tout sourire, le mage posa familièrement son bras sur l’épaule du vendeur de chair et commença à parcourir la salle à ses côtés en expliquant les motifs de sa venue.

Voyez vous, mon cher Radkorn, je suis confronté à ce que les philosophes appellent couramment un dilemme. Halystra m’a rendu un grand service et je tiens à l’en remercier. J’ai donc réfléchi à ce qui lui ferait plaisir et je pense avoir trouvé.

Le marchand d’esclave acquiesça en silence, légèrement inquiet. Le fait que le Ditronw Da’re soit si amical indiquait clairement qu’il réservait ses batteries pour la suite. Et la présence d’Halystra, brûlante de haine, ne risquait pas de le rassurer.

Comment vous l’expliquer en termes simples ? Halystra, mon esclave, vous en veux férocement de votre attitude envers son père et envers elle. De fait, je doute qu’elle puisse être apaisée autrement qu’en vous tuant de ses jolies petites mains…

La pâleur gagnait peu à peu le visage de l’esclavagiste qui sentait instinctivement qu’il n’allait guère aimer la suite du monologue d’Haldren. Des messages d’alertes devaient commencer à remonter dans sa tête au fur et à mesure qu’il comprenait où voulait en venir le mage.

Vous comprenez ? Je suis dans la situation d’un marchand face à une balance. D’un côté j’ai la satisfaction d’Halystra, et de ce fait la qualité de son travail auprès de moi, de l’autre j’ai votre vie.

D’un ton soudain glacial et d’où toute sympathie avait disparu, le Ditronw Da’re acheva sa phrase :

Et la balance ne penche pas en votre faveur.

Ainsi donc les intentions de son maître étaient de faire plaisir à son esclave. Aussi hallucinant que cela puisse paraître, Radkorn n’avait pas l’air de douter un instant des paroles du mage. Et il avait de quoi être craintif, il se souvenait encore le vol qu’il avait fait quelques jours plus tôt lors de la vente d’Halystra.
Celle-ci était restée en retrait, toujours derrière son maître. Elle tenait serrée les pans de la cape devant elle et écoutait attentivement.
Dans sa tête tout se chamboulait, elle ne comprenait plus rien.
Quelques jours plus tôt elle s’était confiée à son maître, lui expliquant combien elle haïssait le vendre d’esclave, autant pour ce qu’il lui avait fait que pour le traitement qu’il avait infligé à son défunt père. Elle n’avait pu masquer sa colère et il avait du lire dans ses yeux combien elle aurait donné cher pour le tuer.

Et voilà qu’il le lui offrait sur un plateau. Son cœur se serra étrangement, étreint par un sentiment jusque là inconnu. Peut-être un mélange de remerciement, de gratitude et….d’amour….

Essayant de masquer l’étonnement que provoquaient en elle les récentes actions de son maître, Halystra sentit un sourire étirer ses lèvres. Narquois et dur à la fois.
Si elle n’avait pas été aussi bien élevée et aussi respectueuse de son maître elle se serait déjà jetée sur l’imposant marchand.

- Mais….Mais...vous ne …. Vous ne pouvez pas laisser faire une chose pareille….Elle….elle….Je ne veux pas….et puis….c’est une esclave ….une trainée…je suis un commerçant respectable….son père me devait de l’argent…..je n’ai fait que reprendre ce qui m’appartenait….c’était mon droit…et puis….et puis vous devez avouer que je vous ai rendu service…

Les bafouillages incessants du commerçant commençaient l’esclave. Plus de sourire. Elle s’approcha de lui et le gifla violement.

- Lorsque tu t’adresses à mon maître tâche de te souvenir que tu lui dois plus de respect que ça espèce d’idiot.

Le regard de Radkorn montrait combien il était choqué par le comportement de l’esclave. Il ne s’était pas du tout attendu à ce qu’elle prenne ainsi le parti de son maître et à croiser son regard il pouvait voir combien Halystra désirait se venger.
Alors qu’il faisait un pas pour reculer, pour échapper à ce regard assassin, Radkorn se retrouva acculé à l’estrade de son stand. Il commençait déjà à trembler ce qui fit à nouveau sourire la drow.
Pour le moment il ne craignait rien d’elle. Elle n’était pas armée et à main nue elle aurait du mal à le tuer facilement, et puis elle attendait le feu vert du mage.
Après tout il n’avait pas encore dit si la balance penchait suffisamment en sa faveur !

Haldren sourit lorsqu’Halystra gifla le marchand en lui ordonnant de faire preuve du respect envers son maître. Bon, de toute façon cela ne changerait rien pour l’esclavagiste au final… le mage alla fermer la porte et poussa la barre qui la verrouillait. Ils étaient trois dans cette salle, mais deux seulement en ressortiraient.

Se concentrant, le mage tendit la main devant lui, bien en évidence. Du théâtral certes, mais la magie est une sorte de théâtre… doucement, pour rendre le sort plus impressionnant vis-à-vis de participants ne maitrisant pas les arcanes, il invoqua les ombres, ses compagnes depuis plusieurs siècles.

Comme sortis de nulle part… en fait ils sortaient que quelque part mais qui est un nul part pour un drow… bref… une phrase gâchée… reprenons. Comme sortis de nulle part, des filaments d’ombres se mirent à tournoyer dans sa main tendue, au début de façon anarchique, puis peu à peu une logique sembla apparaître, comme un ballet compliqué.

Lentement, très lentement, une forme apparut, forme à laquelle les filaments d’ombres venaient se coller l’un après l’autre, s’y incorporant. Un objet allongé… effilé. Sous les yeux d’Halystra et de Radkorn, un poignard composé d’ombres pures se constitua dans la main d’Haldren. Un poignard qui pour être de nature magique n’en restait pas moins parfaitement effilé.

Comme tout objet créé à partir des ombres, ce poignard n’existerait qu’un temps dans le monde matériel. Une journée peut être, deux touts au plus. Mais de toute façon, le Ditronw Da’re ne comptait pas en faire un instrument permanent. Il serait l’instrument d’une vengeance. Le tendant à son esclave, il signa l’arrêt de mort de Radkorn :

Il est à toi Halystra.

Halystra regarda l’arme se matérialiser sous ses yeux ébahit. Elle n’aurait jamais cru voir une chose pareille. Certes, elle avait assisté au combat de son maître quelques jours plus tôt et elle avait donc pu voir la puissance de ses pouvoirs, mais cela l’étonnait encore. Voir quelque chose sortir de nulle part était toujours surprenant…
Prenant l’arme, l’esclave resta un moment à la regarder sous tous les angles. Elle était admirative car l’objet était fort beau. Mais il ne lui servirait hélas pas à faire quelque chose de noble, cependant elle n’en avait que faire de se comporter de la sorte. Radkorn avait fait pire.
Lorsqu’elle releva les yeux pour les plonger dans le regard du marchand d’esclave, une toute autre expression se dessina sur ses traits. De la haine, du dégoût mais également de la pitié pour cet homme, il ne lui restait pas longtemps à vivre après tout!

- Ce cadeau est le plus beau que vous puissiez me faire Maître, murmura-t-elle en s’approchant d’un Radkorn tremblant.

Cependant, il sembla se rendre compte du ridicule de sa posture et tenta de retrouver un peu de fierté en fronçant les sourcils et en se redressant de tout son long. Mais cela n’eut pour seul effet que de faire sourire froidement la jeune femme. S’il comptait s’en sortir il se trompait lourdement. Elle comptait enfoncer cette lame dans sa chair. Elle comptait le regarder mourir. Plus question de faire demi tour.

- Crois-tu que je vais me laisser faire petite sotte. Qui te dit que tu as plus de chance que moi de t’embrocher ?

Sortant le poignard du fourreau qu’il portait de côté, il menaça de la pointe tranchante la jeune femme qui s’approchait de lui.
A moitié courbée, genoux fléchis près à bondir, Halystra avait la posture d’un félin sur le point de se jeter sur sa proie. Une proie dont elle savourerait là mort, ne serait-ce que pour la mémoire de son père, et pour ce qu’il avait fait d’elle.

- Ce sera plus amusant pour moi de te tuer si tu tentes de te débattre. Cette fois si nous sommes à armes égales.

Halystra se doutait bien que si elle mourrait, son maître ne laisserait quand même pas vivre Radkorn…du moins elle en avait l’intime conviction.
S’approchant encore un peu plus, l’esclave adressa un sourire carnassier au drow avant de bondir.
Surpris, Radkorn recula, gémissant lorsque son dos heurta violemment l’estrade. Néanmoins il n’avait pas abaissé son arme. Et il regardait cette fois d’un air un peu plus effrayé la tigresse qui jouait avec le petit animal qu’il était.
Peut-être que l’instinct de survis fut plus fort que l’élan de fierté qui l’avait submergé plus tôt, quoi qu’il en soit, Radkorn tenta de s’enfuir. Courant le long de l’estrade il grimpa les marches et essaya de gagner la porte par laquelle entrait les esclaves lors des ventes.
Mais Halystra fut plus rapide que lui. Avec agilité, elle sauta sur le plancher en bois et fit face à Radkorn avant qu’il n’ait pu mettre un pied dans le long couloir qu’elle avait traversé quelques jours plus tôt.

Dans son élan, il se retrouva qu’à quelques centimètres de la jeune femme, distance qu’elle combla en allongeant son bras à une vitesse qui surprit Radkorn. L’homme ouvrit deux grands yeux ronds. Halystra l’observa de longues secondes durant lesquelles le temps semblait s’être suspendu. Elle mit toute sa haine, toute sa rage et toute sa douleur dans son coup afin d’assouvir entièrement sa vengeance. Radkorn s’effondra, la lame d’ombres plantée juste sous sa cage thoracique.
A partir de ce jour, elle penserait plus à lui, elle ne penserait plus aux journées et aux nuits qu’elle avait passé dans la cellule du marchand d’esclave, ni la nuit où il était venu la chercher après avoir assassiné son père.

Elle se sentit libre, légère et cela elle ne le devait qu’à son maître, à qui elle adressa un regard remplit de gratitude et de remerciement lorsqu’elle sauta du haut de l’estrade pour atterrir devant lui avec souplesse.

S’écartant, le Ditronw Da’re laissa les deux adversaires vider leur querelle. Radkorn sortit un poignard de son étui de ceinture… bien, il comptait résister, cela permettrait également au mage de jauger les qualités combattantes d’Halystra, car il commençait à avoir une petite idée sur ce sujet.

Halystra attaqua la première, bondissant vers l’esclavagiste, qui, surpris, recula trop vite et heurta l’estrade, ce qui lui arracha un gémissement de douleur. Comprenant sans doute qu’il ne s’en sortirait pas vivant, car même si il gagnait son duel face à la jeune femme, il n’aurait eu aucune chance contre Haldren, Radkorn grimpa les marches de l’estrade et tenta de s’enfuir.

Mais l’esclave fut la plus rapide et sauta d’un bond sur l’estrade, apparaissant devant son adversaire médusé. Avant que le drow n’ait eu le temps de se remettre en garde, elle raccourcit la distance qui les séparait et lui plongea la lame d’ombre dans le torse. L’espace d’un instant ils restèrent figés, comme deux gravures, la peur et la souffrance sur le visage de Radkorn, la joie et la cruauté sur celui d’Halystra.

Oui, elle était parfaite, digne d’être son esclave, se dit le Ditronw Da’re. Elle savait obéir lorsqu’il lui ordonnait et agir lorsqu’il fallait. Peu d’esclaves pouvaient gérer ce double rôle, rester totalement soumis à leur maître sans pour autant être réduit à l’état d’un simple objet, abandonnant tout initiative. Lorsqu’Halystra sauta de l’estrade et atterrit devant lui, un sourire de gratitude aux lèvres, Haldren l’enlaça et murmura d’un ton taquin.

Ma tigresse.

Jetant un regard au cadavre de l’esclavagiste, il laissa le sort se dissiper. La lame toujours profondément plantée dans le corps se troubla, devenant transparente puis se dissipant complètement. Il était inutile de se débarrasser du corps, les associés de Radkorn auraient tôt fait de le faire pour eux, trop heureux de reprendre ses affaires à leurs comptes.

Viens, inutile de nous attarder ici, nous rentrons au C’nros.

Une fois au bas de l’estrade, Halystra fut accueillie par un grand sourire. Visiblement maître était content d’elle et cela la rassurait. Ses yeux glissèrent vers le corps inerte de l’esclavagiste, enfin sa haine et son désir de vengeance étaient apaisés. Alors que la lame s’évaporait, Halystra leva les yeux vers son maître et lui sourit. Elle n’aurait pu rêver meilleur que lui, il était si…attentif à elle et à ses besoins. Cela ne faisait qu’accentuer son désir de le rendre heureux et de faire tout son possible pour l’aider au quotidien.

Maintenant elle se retrouvait avec toute une nouvelle garde robe, elle avait tué la personne qu’elle détestait le plus et elle retrouverait certainement les bras de son seigneur pour une nouvelle nuit agitée.
La lame plantée dans le torse de Radkorn s’évapora bientôt et Halystra hocha la tête aux paroles de Haldren. Il était tant qu’ils rentrent. Leur petit escapade avait duré plus d’une heure et son maître devait avoir autre chose à faire de plus important, bien qu’elle apprécia totalement de passer du temps ainsi avec lui.

Resserrant à nouveau les pans de la cape autour d’elle pour masquer sa tenue provocante aux yeux des badauds, Halystra suivit son maître. Encore une fois la foule se fendit devant lui, il n’y eut aucune protestation pas même un murmure sur leur passage. Jusqu’à ce qu’ils aient regagné les appartements du Seigneur Baenfere, aucun mot ne fut échangé. Mais dès que la porte fut refermée derrière eux, Halystra osa adresser la parole à son maitre.

- Vous m’avez énormément gâté aujourd’hui Maître. Y aurait-il quelques choses qui vous ferez plaisir pour vous montrer toute ma gratitude ?

Enlevant cape qu’elle portait sur ses épaules elle la suspendit sur le crochet près de l’entrée avant de se tourner à nouveau vers Haldren. Elle remarqua juste à cet instant le petit colis enveloppé déposé sur la table du salon. Ce devait être le reste des vêtements envoyés par Lihma. Elle avait fait vite, craignant sûrement la colère du Ditrown Da’re.

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