Aidez-moi !

Depuis combien de temps marchait-il ainsi, sous couvert de la forêt ? Ignorant ronces et fossés, Adril fuyait. Ses seuls brèves périodes de repos, c'était lorsqu'il s'évanouissait, s'abandonnant à la fatigue et aux peines. Il s'éveillait soudainement, quelques minutes après, la crainte dans le regard, regardant autour de lui, proie effrayé fuyant le fauve. Sa blessure au flanc, salie par la terre et la sueur, à moité coagulé, le faisait souffrir atrocement. Mais il devait fuir.

Courant sur une crête, évitant les arbres, un faux pas le fait chuter. Roulant sur les ronces et les pierres, l'homme tombe brutalement au fond du vallon, sans connaissance, une nouvelle entaille sur la tête.
L'aube pointe à l'horizon. Il se redresse, se tenant son visage ensanglanté ou se mêle larmes et sueurs. Repart, la main pressée contre son flanc, plié par la douleur.

Un arbre, de tout son poids, Adril s'y appuie. Il sert les dents, retenant cris de douleur et sanglot. Il n'en peut plus. Son poing se sert, il frappe, frappe, frappe.

Tout, toute sa vie. Réduite en cendre avec Torval. Père, mère, amis...Delfine. Un flash, l'épée qui luis, Dorthy s'effondrant. La vieille femme revêche, dont le dernier acte fut de se mettre entre la mort et une mère avec son enfant. De même que sa mère, protégeant son père aveugle. Pourquoi ? qu'elle augure lui avait permis de survivre ?

D'un revers, Adril sèche ses larmes et rejettes ces questions. Survivre, qu'importe les peines, les doutes, les souffrances, les derniers nés Néera n'ont que ce but. Rajustant son sac, il repart.

Lentement, le soleil se lève. Le sous bois se charge d'humidité, révélant les odeurs sylvestres. L'homme marche toujours, à bout de force. Ses jambes se dérobes. Qu'importe, il doit fuir. Sa vision se trouble. Sa respiration se fait difficile... Le coup d'épée. Adril se recroqueville, ses mains crispées sur sa blessure.

Un bruit. L'humain lève la tête. Dans la lumière de l'aube, se détachant parmi les arbres, une silhouette, fine et élancée. Elle s'approche. Désespéré, y voyant de moins en moins, Adril tend une main suppliante.

«Aidez-moi...Je vous en supplie.»

Sa tête bascule dans l'humus, sa main se relâche, toujours tendu vers cette apparition.

L'elfe s'ennuyait et traversait région sur région, errant sans but. Elle n'était même pas fatiguée, ce qui signifiait qu'elle n'avait pas voyagé vite et ça, c'était vraiment très exceptionnel ! Et donc preuve de son désarroi. Elle portait son regard éteint et dénué d'intêret sur les paysages qui l'entouraient, insensible au charme des lieux, indifférente à la silhouette qui s'avançaient vers elle en titubant. Sûrement un ivrogne sorti d'une taverne non loin qui mourait par sa main s'il venait l'importuner. Il s'effondra.

Et elle allait passer son chemin sans lui accorder la moindre attention jusqu'à ce qu'il l'interpelle d'une pitoyable supplication. Alors, les yeux luisants de fureur et de haine, elle se retourne vers lui prête à tuer. Il était là, étendu sur le sol, misérable, taché de boue, empestant la crasse, la sueur et la peur, il la supplie, tend sa main vers elle dans l'espoir qu'elle lui tendrait la sienne en retour pour le secourir. Mais elle n'en fit rien. Elle le dévisageait méprisante puis fit mine de s'en aller si bien qu'il cru qu'elle passerait son chemin sans l'aider. Mais un léger souffle de vent lui fit sentir une effluve nouvelle, piquée, aigre, une odeur qu'elle connaissait bien ; celle du sang. Elle porta de nouveau son attention sur le vagabond avec un intérêt nouveau et remarqua le sang qui souillait ses vêtements. Une nouvelle vague de dédain la submergea lorsqu'elle remarqua qu'il avait perdu connaissance.

Sans la moindre douceur étant donné qu'il n'était plus conscient, elle déchira le tissu qui lui masquait la plaie. Celle-ci n'était pas belle à voir et tira une grimace à la sylvaine.

Et bien l'ami, comment as-tu pu te faire ça ? On dirait que t'es allé fricoter avec des drows ! ricana-t-elle cruelle pour elle.

Un martèlement de sabot suivi sa phrase, un regard suffit à Shyska pour voir les chevaux et connaître leur cavalier. Des sombres.

J'en demandais pas tant ! ronronna la rôdeuse en remerciant la déesse tout en tirant sans ménagement l'homme hors du chemin avec un grand sourire joyeux et une lueur joueuse dansant dans ses prunelles. Puisque tu as réussi à me mettre de bonne humeur, jvais tenter de te sauver.

Il l'aurait sûrement prit pour une folle s'il l'avait entendue. La situation n'était pas très sympathique mais pourtant l'elfe en semblait ravie comme une gamine devant un cadeau qu'elle réclamait depuis longtemps et qu'elle venait enfin d'obtenir.

Elle sortit de sa besace une plante à l'aspect peu engageante qu'elle appliqua sur la blessure, l'homme arqua le corps sous la douleur qui le tira de l'inconscience, contracta ses muscles et le sang gicla, purgeant l'intérieur de la terre et des saletés, dégageant par la même occasion celui qui s'était coagulé. Elle n'avait pas beaucoup de temps. Aussi nettoya-t-elle à la hâte l'entaille en vidant l'une de ses gourdes d'eau dessus et en frottant légèrement avec un bout déchiré de sa tunique puis elle le banda, serrant avec vigeur.

Les poursuivants se rapprochaient...

L'elfe grimpa à toute allure dans un arbre, détacha la corde qu'elle avait toujours enroulée autour d'elle, fabriqua rapidement une sangle de fortune à l'une de ses extrémités et l'envoya au fugitif.

Allé vieux, un tit effort !

Usant de ces dernières forces, l'interessé s'accrocha et l'elfe sauta de l'arbre en tenant la corde qui glissait sur la branche qu'elle avait choisi remontant ainsi le fardeau telle une poulis. La rôdeuse ordonna à l'autre de remonter le fil puis s'entailla le bras et partit en courant laissant derrière elle des goutelettes vermeilles.

Un peu plus loin, elle accrocha à une branche basse un bout des vêtements du fuyard qu'elle avait prélevé un peu plus tôt et reprit sa course, l'ennemi suivant la piste ensanglantée lqui les entraînaient loin de leur cible initiale. Arrivée à une rivière très éloignée du vagabond, la rôdeuse banda la blessure et repartit en sens inverse en prenant soin de contourner largement les cavaliers. Quelques heures plus tard elle était de retour au point de départ.

Toujours perché dans l'arbre, l'homme avait reprit quelques couleurs. Elle avait prit soin de lui laisser de la nourriture et de l'eau avant de partir mais elle ne retrouva ni miette ni même une petite goutte. Elle le fit descendre de la même façon qu'elle l'avait fait monter, mais étant plus légère, elle devait freiner la descente en s'accrochant à tout ce qui passait à sa portée. La descente du perchoir fut donc saccadée et tira des grimaces douloureuse au blessé à chaque à coup.

Une fois qu'ils eurent tous les deux les pieds au sol, ils partirent dans la direction opposée prise par les drows. Ayant reprit des forces, l'elfe n'eut pas besoin de soutenir l'humain et ils purent marcher toute la journée, mettant à chaque pas de plus en plus de distance avec leurs poursuivants.

Ils s'arrêtèrent dans les ruines d'une maison et dûrent se contenter d'aliments froids, le feu étant déconseillé lorsqu'on voulait échapper à quelqu'un. Tout en soignant avec plus d'application la blessure de son compagnon, Shyska entama la conversation de manière plutôt brutale mais tout à fait cordiale qui contrastait avec la douceur dont elle faisait preuve en ce moment pour les soins.

Vraiment enchantée d'avoir fait ta connaissance ! Moi c'est Shyska et toi ? Tu peux m'expliquer un peu comment t'as réussi à te coller des ennemis pareils à tes trousses ?

Elle enchaîna sans même lui laisser le temps de répondre avec un sourire enjôleur et un clin d'oeil, portant dans sa voix caressante un accent détonnant de sincère espoir :

J'espère qu'ils nous retrouveront !

Un éclaire rouge dans son inconscient. Adril s'éveilla brusquement, et ne pus que voir dans le brouillard de sa douleur la silhouette qui appliquait une étrange mixture sur sa plait. Une vague de soulagement le submergea malgré la douleur. Après des heures à marcher, blesser dans son corps et dans son âme, voilà qu'il trouvait enfin un réconfort en cette étrange être qui avait répondu à son appel. Aux larmes la tristesse, se mêlèrent des larmes de reconnaissances sincères.

Alors que la charitable personne nettoyait la plait, Adril évitait de regarder l'entaille, et se concentrait sur le visage de l'inconnue. Sa vision trouble ne lui permettait pas de voir plus que des ombres, mais a force de concentration, il parvint à détailler de beau visage de Shyska. Plongé dans sa tristesse, et ses délires dû à la douleur, il ne savait si ce qu'il voyait était issus de son imagination. Les oreilles pointus, le visages finement ciselé, il se rappela les elfes de compte du vieux Jorfed. Non, il devait rêver.

Un bruit de sabot sur le sol terreux de la forêt. La personne qui l'aidait releva la tête, et avant que l'homme ne réaliste, elle était montée à un arbre, et lui tendait une corde, l'encourageant à s'y attacher. Hagard, Adril obéit, et se retrouva aux cimes. Sans un mot, la silhouette posa un morceau de pain et une gourde dans un creux naturel du tronc et redescendit. Adril, épuisé, se perdit de nouveau dans le sommeil...

Lorsqu'il s'éveilla de nouveau, son esprit était plus clair, mais ses souvenirs n'en était pas moins obscure. Voyant la nourriture et l'eau, l'humain se jeta avidement dessus et englouti le pain et avala le contenu de la gourde cul-sec. Observant sa blessure, il constata l'effet de la pommade de sa bienfaitrice. Se voyant seul, solidement attaché par la corde, il ferma les yeux.

Lorsqu'il les rouvrit, elle était revenue. Sans un mot, elle le redescendit de l'arbre après s'être assuré de son état. Devant son manque de conversation et ses fréquents regards derrière elle, Adril s'abstint de tout commentaire et suivi la femme sans un mot. Ils marchèrent toute la journée sans échanger une parole. L'homme se tenait toujours le flanc, mais s'efforçait de suivre le rythme imposé par la femme, qu'il ne peut se retenir de regarder et de détailler durant toute leur marche. Plus grande que lui, son visage était sans conteste d'une grande finesse. Elle se déplaçait en silence, se glissant parmi les broussailles de la forêt avec grâce. Elle était peut-être un peu trop mince, mais son regard farouche, sa démarche, sa chevelure d'ébène, et son visage, en faisaient son conteste une personne d'un charme certain.

Le soir arrivant, ils trouvèrent une vieille maison en ruine, une ancienne ferme à vrai dire, datant surement de la dernière invasion drow en ces terres. Ces murs évoquèrent à l'humain son ancienne demeure, et ces habitants. Ses yeux se remplir de larmes, qu'il ne retient qu'avec difficulté, et chassa d'un revère de main, espérant que la femme ne les avaient pas vus. Ils s'installèrent en silence, et la femme s'occupa de nouveau de sa blessure, alors que la marche n'avait toujours pas permit à celle-ci de cicatriser. C'est à ce moment que la femme commença la conversation :

«Vraiment enchantée d'avoir fait ta connaissance ! Moi c'est Shyska et toi ? Tu peux m'expliquer un peu comment t'as réussi à te coller des ennemis pareils à tes trousses ?»

Adril la regarda, interloqué. La sincérité de ses propos ne faisait aucun doute, mais...comment pouvait-elle parler d'avoir fait connaissance avec lui, alors qu'il n'avait toujours rien dit ? Il ne releva même pas la partie sur les ennemis avant qu'elle n'ajoute :

«J'espère qu'ils nous retrouveront !»

Le brave paysan resta muet un instant, ne sachant trop quoi répondre à cette personne, après une journée complète passée sans le moindre échange... Finalement, il finit par lui dire, timidement :

«Je m'appelle Adril...Et, je ne vois pas de quels ennemis vous me parlez...»

Son regard se perdit sur les oreilles pointus de Shyska, et il ne put se retenir de lui demander :

«...Seriez-vous une elfe ?»

Non je suis une naine ! répondit-elle très sérieusement.

Puis devant son air incertain, elle ne pu s'empêcher de rire et elle répondit gentiment :

Bien sûr que je suis une elfe. Tu n'en as jamais vu ? Pourtant tu t'es mis des elfes noirs à dos. Ce sont eux qui te poursuivent depuis un certain temps. D'ailleurs il faudrait dormir, on se lève tôt demain.

Ils discutèrent encore un peu puis finirent par se souhaiter bonne nuit. Adril mit du temps à s'endormir et lorsqu'il y parvint se fut pour sombrer dans un sommeil agité sûrement dû à ce qu'il avait vécu dernièrement. L'elfe allait veiller jusqu'au lendemain, ayant besoin de moins de repos que l'humain. Alors que la lune venait à peine d'atteindre son zénith, la rôdeuse, dans un élan de douceur et de compassion, alla s'étendre auprès du vagabond lui offrant une présence reconfortante et protectrice qui sembla l'apaiser quelque peu.

Puis le soleil fit son apparition timidement d'abord à l'horizon puis s'élevant avec plus d'affirmation. La sylvaine alluma un feu, prépara rapidement les dernières galettes de blé avec un peu de miel qu'il lui restait et réveilla son compagnon en lui tendant amicalement son petit déjeuné.

Bonjour ! le salua-t-elle cordialement. Mange vite, il faut qu'on décampe. Les drows se sont sûrement rendus compte qu'ils suivaient une fausse piste.

Obéissant, il engloutit sa collation tandis qu'elle s'occupait encore de sa blessure et ils levèrent le camp peu de temps après. Encore une fois, ils marchèrent une bonne partie de la matinée ne faisant qu'une courte halte en milieu d'après-midi dans une clairière pour dévorer les quelques fruits qu'ils avaient dégotés en route. Ils restèrent silencieux tout le long de leur pause quand soudain, l'elfe brisa le silence dans un chuintement de lames qui sortent de leur fourreau. Elle bondit sur ses pieds, scrutant l'orée de la clairière tous les sens aux aguets. Adril lui jeta un regard interrogateur et elle lui intima l'ordre de se taire d'un geste avant qu'il ne lui pose la question.

Les sombres se coulèrent à découvert d'une démarche de prédateur. Ils étaient trois, armés chacun d'un sabre qui promettait la mort de leur cible.

Fiche le camp Adril ! murmura-t-elle de façon à ce que lui seul puisse entendre. Je les retiens, je te rejoindrai plus tard.

Et elle se jeta sur leurs ennemis montrant par la vitesse de ses attaques et leur précision qu'elle était une guerrière redoutable et confirmée. Elle avait une chance de les battre mais pas si l'humain intervenait. Il était blessé et au lieu d'avoir à une seule personne à protéger, l'elfe en aurait deux. Cela la gènerait et il le savait. Alors il s'éloigna rapidement.

Un des assaillants fondit sur lui mais la rôdeuse s'interposa. Et elle parvint à les retenir un certain moment avant de commencer à fatiguer et d'accumuler de légères estafilades. Elle était parvenue à en abattre un mais elle savait que si elle continuait de combattre ainsi, elle perdrait. Elle s'enfuit.

Un des deux drows se lança à sa poursuite et l'autre sur les traces d'Adril.

Etant à cheval il ne mit qu'une dizaine de minutes à rattraper le blessé.

ça n'est pas très gentil de laisser ses amis en plan fit-il avec un sourire sournois. tu mérites d'être corrigé...

sûr de lui, le drow s'avança vers sa future victime. Elle était frêle, elle avait peur, elle était blessé, qu'avait-il à craindre en sachant que son comparse s'occupait de l'autre.

Ton amie s'est vaillamment battue, elle a tué mes deux compagnons avant de succomber, mentit-il pour insinuer le désespoir dans le coeur de l'humain. Personne ne te viendra en aide donc je vais prendre tout mon temps pour te tuer. Je l'ai mérité, tu nous as bien fait courir.

Et il l'attaqua. Quelques passes d'armes furent échangées avant que le sombre parvienne sans difficulté à désarmer son adversaire.

Je m'attendais à mieux... soupira-t-il l'air visiblement déçu.

A la vitesse de l'éclair, il lui porta un coup de poing qui jeta sa proie à terre et la laissa à moitié assommée. Tout en dégainant un tout petit poignard, il appuya sur la blessure d'Adril se délectant de la douleur qu'il infligeait.

Tu as lutté comme une fille. Donc ton corps à quelque chose en trop, ronronna-t-il plein de sous entendu on ne peut plus clairs.

Il allait frapper quand un sifflement aigu retentit. Un trait noir planté en travers du cou, le drow bascula sur le côté et mourut avant de toucher terre. Shyska se tenait entre les arbres, tachée de sang de la tête aux pieds et l'arc à la main.

Et il n'en resta plus qu'un ! fit-elle joyeusement. ça va ?

L'ombre de son poursuivant se dessina à côté d'elle sans qu'elle ne l'ai entendu approcher. La rôdeuse s'effondra inconsciente, poignardée traîtreusement dans le dos.

/!\ Sang et violence dans le paragraphe précéder de ce signe : /!\

Le sourcille droit d'Adril se leva dans un air d'incompréhension, ne saisissant pas de suite l'ironie de son interlocutrice. Le rire cristallin qui suivit réussit finalement à arracher un sourire à l'homme.

«J'admets avoir déjà aperçut des elfes plus jeunes, il évoqua dans son esprit la forteresse de Kregan lors de l'invasion sombres d'il y à dix ans, mais jamais d'aussi prêt.»

Il observa le ciel nocturne, pensif.

«Ainsi, ils m'ont poursuivi. Sans doute aurai-je dû m'y attendre.»

En quelque mot, le jeune homme exposa à Shyska sa situation. Son récit étant entrecoupé de silence, ou il avalait sa salive avec difficulté, retenant ses larmes. Son arrivé à la ferme, la découverte de ses compagnons morts, le sombre assassinant une vieille femme protégeant une mère et son enfant. Le miracle qui lui avait permit de tuer l'assassin de sa famille. La blessure, l'incendie de sa maison. Sa fuite.
Un regard timide vers l'elfe, lui permis de ressentir cher cette étrange femme une sorte d'écho à ses paroles, comme si son histoire évoquait à l'elfe un passé lointain.

«Je ne sais comment vous remercier pour votre aide.»

Finalement, le duo décida qu'il était temps de s'endormir.

Des flammes. Des cris. Les lames qui s'entrechoquent. L'épée sur la chaire. Le repos d'Adril était remplis de cette nuit funeste. Se retournant dans son sommeil, un unique larme coula. Et il ressenti une douce chaleur. Celle d'un corps. Un corps de femme. Un parfum champêtre, mêlant la terre et la sève. Delfine ? Le tremblement de l'homme s'arrêtèrent. Sa respiration devint régulière. Dans son sommeil, il se recroquevilla auprès de sa bienfaitrice, comme l'enfant dans les bras de sa mère. Sa main alla se poser sur l'épaule de l'elfe, cherchant cette présence rassurante.

Cette présence, Adril la rangea à son réveille parmi ses rêves nocturne. Saluant Shyska, il avala ce qu'elle lui présentait, et ils se remirent en route. Longue, silencieuse. A son tour, l'homme se retournait fréquemment, jetant des regard craintif à la végétation environnante. Au son de la lame de l'elfe, Adril sursauta, les lèvres étroitement clause sur un geste de Shyska.

Les trois sombres sortirent de leur caches, le regard mauvais, leur étranges lames elfiques au clair. S'ils étaient surprit de voir leur proie accompagné, ils ne le montrèrent pas. L'homme porta la main à la garde de son épée

«Fiche le camp Adril !»

L'ordre chuchoté sonna sec. Et il observa l'elfe interdit. Son regard était déterminer, sérieux, et en même temps, on y décelait une petit joie sauvage. Elle bondit sur les trois adversaires. Non, l'homme ne pouvait pas laisser cette femme seul. Il serra les dents, en proie au dilemme. Au premier tintement des lames qui s'entrechoquèrent, Adril comprit qu'il ne serait qu'un gène pour Shyska. Jurant contre sa faiblesse, il tourna les talons et courut dans les fourrées.

*Pour l'amour de Néera, reste en vie.*

Une dizaine de minute plus tard, l'un de sombre lui barra la route. Surprit, l'homme tomba sur son séant. Se relevant en tremblant, il recula peu à peu, alors que son adversaire descendait tranquillement de sa monture, lançant des paroles mauvaises. D'un geste fluide, il dégaina son sabre.

«Ton amie s'est vaillamment battue, elle a tué mes deux compagnons avant de succomber.»

Adril serra sa mâchoire, dégaina à son tour, réprimant ses tremblements de rage et de peur. Le sombre passa à l'attaque, en se fendant. Dans un cri de colère, l'homme dériva l'assaut et se décala. Il ne peut contre attaquer que son adversaire frappa d'un mouvement souple alors même qu'il se tournait vers l'humain. Raide, ce dernier appela à son aide toute sa formation de conscrit, mais il ne pouvait que rester sur la défensive face au sombre plus vif et plus aguerrit que lui. D'une feinte, le drow obligea l'humain à un mouvement trop amble, et d'un battement sec du plat de son sabre, l'elfe noir désarma Adril. Ce dernier désemparé ne vit pas venir le formidable crochet de son ennemis. Sa proie à terre, le sombre dégaina son poignard et appuya sans retenu avec son pied sur la blessure de l'humain, se délectant se son cris de douleur.

Un sourire sadique, il s’apprêtait à faire payer à ce faible humain la mort de Ny'Hym, lorsque Tyra déesse de la mort réclama son dus à Néera déesse de la vie.

«Et il n'en resta plus qu'un, ça va ?»

Une vague de joie submergea Adril à la vue de Shyska, jusqu'à ce qu'elle bascule en avant, un poignard entre les omoplates.
Avec un sourire mauvais, le dernier de sombre enjamba le corps de l'elfe, droit vers Adril.

«Qui aurait crut qu'un simple humain nous demanderai autant de peine ? Et autant de sang ?»

Adril ayant prit le poignard du premier sombre, se releva doucement, serrant le dent de douleur, sa blessure à peine cicatrisé menaçant de se rouvrir. Il reculait, au fur et à mesure que l'autre s’avançait.

«Voyons voyons, tu ne vas tout de même pas m'affronter ? Pourquoi ne te laisserais-tu pas gentiment tué comme tout tes amis ? Cette pauvres elfes serait encore en vie.»

Était-ce l'évocation de son village ? De ses habitants ? Était-ce le sourire carnassier du sombre ? Ou le corps de Shyska ? Adril l'ignorait. Tout ce qu'il savait, c'est que toute la peur qu'il ressentait pour sa vie refluait, remplacé par la colère. Un détail : l'elfe noir avait toujours son épée au fourreau. Il était désarmé.

/!\Dans un cri de rage qui eut un écho lugubre dans la forêt, Adril se jeta sur le drow, le poignard levé. Surpris, son adversaire n'eut pas le temps de dégainé, Adril était déjà sur lui. Levant les bras, il bloqua la lame. Les deux adversaires se retrouvait face à face. Celui à la peau blanche lançait à l'autre un regard de pure haine mélangé à la colère, tandis que celui à la peau d'ébène communiquait la même haine, mais avec le sourire vorace et sadique du prédateur. Mais, l'affrontement physique s'éternisant, le sombre se rendit compte peu à peu de la force du paysan. Poussant un nouveau cri de rage, ce dernier propulsa sa tête sur le visage de son adversaire. Les deux protagonistes chutèrent, et commencèrent à se livrer au sol à une lutte meurtrière. L'on eut dit deux bêtes sauvages, se battant pour la survie. Au milieu des deux corps, luisait de temps en temps la lame du poignard, qu'Adril tenait toujours. Mit sur le dos, l'arme à quelque centimètre de son visage, L'elfe noir ne souriait plus, et se battait avec autant de rage que son adversaire, sentant peser sur lui, l'ombre de la mort. Le visage fou, ne pensant plus qu'a sa survie, ses lèvres se retroussèrent dévoilant ses dents blanche, avec les quels il mordit le bras d'Adril jusqu'au sang. Hurlant de douleur, l'homme frappa de nouveau de son crâne sur celui du drow. Une fois, deux fois, trois fois, ne s'arrêtant plus, se blessant presque autant que son adversaire qui eut le nez brisé, et fini par perdre connaissance, lâchant finalement le bras de l'humain. Ce dernier voyant sa main libre, mais ne remarquait pas l'état de son adversaire leva le poignard et l’abatis sans relâche, perçant le crane du drow, s'éclaboussant de sang à chaque nouveau coup, réduisant son adversaire à l'état de morceau de chaire sanguinolent ou l'on aurait vainement rechercher un visage.

Épuisé, Adril s'arrêta brusquement, le poignard en l'air. Contemplant son ennemis, l'homme lâcha son poignard et bascula sur le coté, le souffle court, réalisant peu à peu ce qu'il venait de faire. Soudain, il se rappela de Shyska. Épuisé, l'homme se leva et tituba vers le corps de l'elfe. Complètement affolé, il observa avec angoisse le manche du poignard. Il réprima ses tremblement, et ôta la lame le plus doucement possible. Le sang gicla de la plaie. Puis, il retira la haut de la tunique de l'elfe. Attrapant le sac de celle-ci, l'homme retrouva la mixture qu'elle avait déjà posé sur sa propre blessure, et badigeonna généreusement le dos de la femme, après avoir soigneusement nettoyé l'entaille. Puis arrachant des morceaux de tunique que deux cadavres d'elfe noir, il banda le plaie, ignorant la nudité de Shyska et sa peau d’albâtre. Il sorti de son propre sac sa grande bâche de tissus, et enveloppa l'elfe dedans, et lui frotta vigoureusement les épaules pour la réchauffer. Il ne fallait surtout pas qu'elle attrape froid. Enfin avec le plus de douceur possible, il l'adossa à un arbre.

Un instant, il resta devant elle, détaillant son visage. Inconsciemment, l'homme remit une mèche de cheveux de l'elfe derrière son oreille pointu. Il finit par se relever, et posa un regard fatigué sur les deux cadavres. Plus loin, se tenait toujours, impassible, le cheval du premier elfe noir. Un oiseau se mit à chanter.

Shyska reprit lentement connaissance de ce qui l'entourait et ouvrit les yeux. Mis à part un oiseau qui chantait, le crépitement d'un feu, le calme régnait. A' croire que la mort avait frappée, que les animaux évitaient l'endroit encore taché de sang.

Soudain, reprenant totalement ses esprits, elle se souvint. Sang cadavre faucheuse...

Adril ! gémit-elle craignant le pire.

Elle voulut se lever, une douleur lancinante lui brûlant le dos, péniblement elle esquissa le geste, les dents serrées lorsqu'une silhouette s'approcha d'elle et doucement lui appuya sur les épaules pour la forcer à se rasseoir. Elle ne lutta pas et docile se laissa faire, reconnaissant son compagnon.

Ouf tu es vivant ! murmura-t-elle soulagée en attrapant la nourriture qu'il lui tendait.

Récupérant un peu d'énergie, malgré la désapprobation du vagabond, elle alla inspecter les cadavres drows. Elle attrapa le sabre de l'un, en admira le tranchant, la finesse de la lame et son équilibre. Puis elle s'intéressa à la garde, ornée de figure finement ciselée et l'incrédulité l'envahit. L'artisan qui avait forgé cette arme ne pouvait être qu'un elfe, la patience et la précision requise pour parvenir à ce résultat ne pouvait en aucun provenir d'un drow.

Non...

Elle s'approcha de l'autre corps sombre et vola toutes ses armes. Une brève inspection lui suffit pour remarquer que toutes étaient de facture elfique.
Le regard emplit de désespoir, elle se tourna vers Adril qui témoin de son agitation avait l'air interrogatif.

Je crois qu'il y a un traître dans mon peuple...

Et une rage meutrière l'envahit, alors que sa haine envers ses semblables rejaillissait dans son coeur. Les yeux pleins de violence, elle ne ressemblait en rien à la douce sylvaine qu'avait connu son compagnon.

C'est la mine sombre qu'Adril avait préparé le campement, il n'était plus question de repartir, ses poursuivant morts, et surtout la blessure de Shyska. Rattrapant le cheval, il l'attacha à un arbre. Ignorant avec malaise les deux cadavres drow, -surtout celui-qu'il venait de tuer- l'homme ramassa des branches morts, et se mit à aménager un cercle de pierre afin de préparer le feu.

Ce dernier brulait déjà lorsque la belle elfe recouvra ses sens. L'humain, concentrer sur sa tache, ne s'en rendit compte que lorsque sa compagne poussa un crie d'angoisse. Relevant la tête, il vit la douleur se peindre sur les traits de Shyska qui tentait vainement de se lever.

«Ne vous relevez pas, votre blessure est bien plus grave que la mienne, vous auriez pu en mourrir.»

Un remord étreint le coeur d'Adril...Cette blessure aurait put être fatal, mais à cause de qui cette femme se retrouvait dans cette situation ? Détournant son regard de l'elfe, il l'aida à se rasseoir, prit l'une de ses miches de pains, qu'il coupa avec son couteau, fit de même avec le fromage et donna deux généreuses portions à la blesser. Le murmure de cette dernier frappa secoua de nouveau le coeur d'Adril de remord. Pourquoi s’inquiétait-elle de lui et non d'elle ?

La nourriture lui redonna des forces, Shysha fini par se lever -non sans peine- ignorant les demandes d'Adril qui la priait de se reposer d'avantage. Observant les deux cadavres qui attiraient déjà les mouches, l'elfe s'intéressa aux lames parcourut d'inscription argenté. C'est alors qu'il put voir le visage de l'elfe se désagréger. Elle émit une légère plaintes, refusant de croire aux doutes qui peut à peut l'envahissait.

Adril, la suivait, faisant attention au moindre signe de défaillance de sa compagne d'infortune. Ces lames...Le drow qu'il avait tué dans sa ferme en possédait une semblable. Fine, harmonieuse, sinueuses, elles évoquaient pour l'homme une promesse funeste. Shyska s'agita alors, récupérant toute les armes ayant appartenu aux deux drows. Elle se tourna alors vers l'homme; et en réponse à une interrogation muette :

«Je crois qu'il y a un traître dans mon peuple...»

Le regard de l'elfe passa du désarroi à la haine, à une vitesse qui déstabilisa le jeune homme. Ses traits semblèrent se durcir, ses yeux se remplir d'une teinte agressive. Une sorte de sauvagerie se dessinait à présent sur le visage de Shyska. Terrible, mais étrangement exotique pour le paisible paysans, et qui n'enlaidissait pas le fin faciès de la femme, loin s'en faut.

Un instant, Adril détailla le nouveau sentiment de l'elfe, réprimandant un frisson qu'il sentait poindre le long de sa colonne vertébrale. La colère...non, la haine de Shyska était si vive qu'il chercha un mot, un phrase, afin de s'excuser envers elle, et se protéger de sa colère. C'était absurde, mais il se sentait directement visé par ce visage tellement celui-ci affichait cette haine à l'état pure.
Il recula d'un pas, et prit une longue inspiration avant de reprendre empire sur lui même.

«Shyska, je vous en pris, calmez-vous, il n'était parvenu à réprimer un léger tremblement dans sa voix, la colère ne vous apportera rien de bon dans votre état»

Sans doute que l'homme ne pourrait jamais comprendre les sentiments de sa camarade. A vrai dire, il ne comprenait pas encore l'origine de sa colère. Pour lui, ces lames -ces belles lames il fallait l'avouer- n'étaient que l'équipement de ces assassins, et rien d'autres. Pour l'heure il souhaitait surtout apaiser cette terrible colère.

«De grâce, reposez-vous et expliquez-vous ? Je ne suis qu'un paysan et ignore presque tout en dehors de mon village, mais comment voudriez-vous qu'une personne de votre peuple accepte de traiter avec ces sombres créature ?»

Ce disant, Adril désigna le cadavre du drow qu'il avait tué. Son regard se posa alors sur son œuvre meurtrière, alors qu'il avait évité tout contacte visuel jusque là. Un haut le coeur lui secoua les épaules. Puis un second. Il ferma les yeux. Mais il était toujours là. Son oeil encore intacte et injecté de sang semblait le regarder par delà la mort. Ces mouches voraces. L'odeur sembla alors apparaitre, violente ,écœurante. L'homme se détourna, et s'éloigna de quelque pas, dans une direction indéfini. Il senti ses jambes le lâcher, alors que l'image occupait toujours son esprit. Il tomba au sol à quatre pattes, respirant de grande bouffé d'aire, le visage couvert de sueur.

Il avait peur... Shyska le sentait, le voyait, vibrait tout entière à la crainte qu'elle instillait dans l'âme de son compagnon, son regard se teinta d'un voile de folie fiévreuse. Elle voulait tuer. Elle allait tuer. LE tuer.

Il la suppliait, mais elle n'en tenait pas compte. Ses vieux ressentiments contre son peuple l'envahissaient, prenaient possession de son esprit, dictaient ses actes, elle était leur marionnette et elle avait soif de sang. Elle ne se retenait que difficilement de ne pas lui sauter dessus et de le saigner comme l'aurait fait le sombre mais lorsqu'en regardant le cadavre de celui-ci, Adril se montra faible, elle ne put se retenir davantage. Il s'éloigna, elle le suivit adoptant la démarche du prédateur qui ne présageait rien de bon. Elle se mouvait en silence et lui, plein d'insouciance et de confiance, lui tournait le dos dans l'inconscience du danger qui planait sur lui.

Un chuintement...

Qu'il ne connaissait que trop bien. Il se retourna, Shyska bondissait sur lui dagues au clair. Instinct de survie peut-être ? Il l'esquiva en roulant sur le côté mais l'elfe le rejoignit et impuissant il se retrouva sur le dos bloqué sous le poids de la rôdeuse et menaçé d'une lame qui lui caressait la gorge.

C'est toi ? Toi le lien entre les elfes et les sombres ? Toi qui leur a fourni ces armes, t'as fais l'appât pour m'attirer et qu'ils puissent m'abattre par la suite ? fit-elle d'une voix rauque. Ils vont déferler sur Miradelphia toute entière, massacrer toutes les races sauf celle des sylvains, laisser des traces pour qu'on les accuse, pour qu'ils n'aient d'autres choix que de faire une alliance avec eux pour survivre ?

La terreur. L'incompréhension. Les yeux éteints, dénué du si bel éclat de la vie, ternis par le chagrin supportaient le regard stupéfait de l'humain.

J'ai tué tes compagnons. Je te tuerai pour ce que t'as fais et je protègerai les miens, même s'ils ne le méritent pas, contre les félons de ton espèce et de ceux à qui elle s'est alliée. Je les préviendrai que les hommes fomentent avec les drows pour les exterminer. Si vous cherchez la guerre alors vous l'aurez. Mais vous ne serez pas vainqueurs !

La pression de l'arme s'accentua, une perle vermeille glissa le long du cou de sa proie. Excitée à sa vue, Shyska appuya encore, une plaie superficielle se forma et le sang s'écoula avec plus de vivacité. Mais cette fois, le frémissement d'Adril, le filet pourpre qui venait agrandir les flaques de sang des elfes noirs la rendirent totalement lucide. Elle secoua la tête et l'émeraude surnaturel de ses iris reprit ses droits sur le voile ténébreux qui l'avait rendu si opaque et inquiétant. Elle pirouetta en arrière tel un animal effarouché.

<< Qu'est-ce que j'ai fais ? Qu'est-ce que j'allais faire ? >> geignit-elle en son for intérieur.

Je... Excuse moi... Je ne voulais pas, je suis dé... Non ne t'approches pas !

Elle avait crié les derniers mots, à la limite de l'hystérie, quand elle voulut reprendre, sa voix se brisa, elle perdit connaissance et s'écroula. Sa blessure dans le dos s'était rouverte à cause des mouvements trop brutaux qu'elle avait effectué.


Elle reprit connaissance peu de temps après. Il était toujours à côté d'elle.

Je ne sais pas ce qu'il m'a pris... Il vaudrait mieux pour toi que je parte, murmura-t-elle faiblement.

Mais il ne semblait pas partager son point de vue et l'empêcha de se lever avec fermeté. Alors elle lui raconta ce qu'il voulait entendre.

J'en veux à mon peuple. Il m'a volé toute mon enfance. Il a détruit tous mes repaires, il a réduit en cendre ce qui formait ma vie... Tout ça car il avait placé des sentinelles incompétentes qui n'ont pas détecté l'intrusion d'une petite armée d'étrangers dans nos forêts... Celle-ci s'est attaquée au premier village qu'elle a trouvé sur sa route, autrement dit le mien. Elle en a massacré les habitants, pillé leurs biens, brûlé leur maison. Mais moi, j'ai réussi à m'enfuir, les destructeurs m'ont traqué, ils m'ont retrouvés... M'ont infligé une blessure qui même cicatrisée me fait encore souffrir. Une arme enchantée... Je suis marquée à vie. Cette étoile luisante qui brille sur ma peau _que d'ailleurs tu as dû remarqué en me soignant_ est née d'un bain de sang et ne se gène pas de me le rappeler en permanence malgré la vengeance que j'ai offerte à mes amis en décimant ceux qui étaient responsables de leur mort.

Silence.

Les elfes ont été naifs de croire qu'ils étaient à l'abri du moindre danger dans leur forêt. ça ne m'étonne pas que quelques uns d'entre eux ai pu traiter avec les drows. Crédules comme ils sont, ils auraient été facile à manipuler pour nos ennemis et eux ne se privent pas d'en profiter.

Une note claire.
La lame qui surgit de son fourreau.

Adril se retourna brusquement, les muscles tendus, prêt à réagir. Un nouvel ennemis ? Un quatrième sombre ?
Rien de tout cela. L'elfe, rendu folle par ses démons intérieur sauta sur l'homme. Le temps sembla s'étirer. Lentement, il bondit sur le côté, sauvant sa vie. Mais, en mauvaise position pour s'enfuir, il se retrouva plaqué au sol, un dague froide contre sa trachée...Et l'elfe parla, d'un voix changé, chargé de la haine acquis au cours d'une longue existence selon les humains.

Il ne bougeait plus, son corps était immobile, l'on aurait pus le croire évanouie, si ses yeux ne fixait pas intensément ceux éteints de Shyska. Son esprit fonctionnait lui à tout allure. Que c'était-il passé ? Pourquoi sa compagne de route réagissait-elle ainsi ? Un soupçon acquis durant les quelques temps passé avec l'elfe se profila. La qualifier de lunatique était bien faible. Elle changeait si rapidement d'humeur, et avec une telle intensité que l'homme soupçonna un lourd passé ayant déteint sur l'esprit de l'elfe.

La lame s'enfonça davantage. Il senti un liquide chaud couler le long de son cou. Il ne bougeait toujours pas, mais sentait sa mort venir. La vie lui sembla soudainement ironique, paradoxale. Il avait survécu à une bande de sombre qui n'était venu que pour tué, et il allait périr de la main folle de celle qui l'avait recueilli. Le sang se mit à couler d'avantage. Un long soupir s'échappa des lèvres du paysans.

Une étincelle, celle de la raison. Shyska s'éveilla de son cauchemars. De la haine, son regard passa à la crainte. Adril senti la pression évacuer son corps. Ses membres se détendirent d'un coup, et il fut prit d'un léger tremblement. C'était la troisième fois qu'il réchappait à la mort. L'elfe bondit en arrière, paniqué. Elle se répandit en excuse, cherchant ses mots. L'homme se redressa et fit mine de la rejoindre.

«...Non ne t'approches pas ! »

Il s'arrêta net. Puis l'elfe s'évanouit.
Adril inspira longuement. Il refit de nouveau bandage pour la blessure de Shyska, ne pensant pas une seul seconde à fuir celle qui avait failli le tuer. Il soigna sommairement sa propre blessure au coup, et raviva le feu. Il ne s'écoula pas une demi-heure que l'elfe reprit ses sens. Elle voulait partir. Comment aurait-il pu en vouloir à cette personne qui se torturait déjà avec ses propres remord ? Doucement, mais avec fermeté, il la força à rester allonger. Et elle lui raconta son histoire.
Le regard de l'homme était perdu dans le feu lorsqu'elle acheva sa dernière pensé. Les flammes dansaient avec grâces, murmurant leur doux chant. Il y revit un instant sa ferme. Puis il cligna des yeux, et revint dans la clairière.

«Dans un certain sens, mon histoire est comme la votre...Mais elle ne date que d'hier, lorsque revenant à Torval, le village qui m'a vut naitre et grandir, un groupe de Drow à massacré tout ceux que je connaissais. Comme vous, j'ai réussi à fuir, recueillant la blessure que vous avez soigner, en tuant l'assassin de mes parents et de tout les habitants de ma ferme.»

Il s'arrêta, et regarda Shyska. Son visage affichait une tristesse insupportable. Celle qui est encore vive, récente. Mais qui pourtant, conservait cette retenu, cette pudeur paysanne, comme une sorte d'abandon au destin.

«Je ne sais même pas comment j'ai pu tuer ce sombre, par chance surement. Quoiqu'il en soit, j'ai du fuir ma ferme alors que les autres assassins mettaient le feu au village. J'ai marché, marché toute la nuit, tombant sans cesse, mais me relevant d'autant. Et au matin, vous êtes apparut.»

Son visage s'illumina d'un sourire de reconnaissance, comme s'il voulait faire oublier à l'elfe sa crise de folie.

«Je ne savais même pas qu'il était à ma poursuite. Sans vous, ils m'auraient rattrapé...et tué.»

Adril réprima un frisson à sa propre parole. Il n'imaginait que trop bien ce qu'il ce serait passé sans Shyska. Abattu, comme un vulgaire bête boiteuse, abattu et laisser sur place, aux charognards et aux vers.

«Madame, ne détestez pas votre race. Tout le monde cherche à atteindre la paix. Elfe, Humain, et autres peuples. Leurs fautes n'est pas de vivre selon leur rêve. S'ils en aient à blâmer, c'est bien ceux qui ne vivent que pour le mal, et qui le répande autour d'eux. Ceux qui on attaqué votre village, ces sombres qui ont détruit le mien. Regarder autour de vous Shyska, le monde est fait pour la beauté, et non pour l'horreur.»

Il soupira. Une seconde fois, son regard se posa sur le visage déchicté de l'elfe noir. Non, le monde n'était pas fais pour ça.

Un bruissement, soudain, fit sursauter l'étrange couple. Cela provenait d'un buisson non loin. Sur leurs gardes, ils empoignèrent leurs armes afin de faire face à un nouvel ennemi, malgré leurs blessures. Cependant ce ne fut pas un drow aux yeux injectés de sang qui émergea des fourrés, mais une jeune femme, couverte de terre et les habits en lambeaux. Elle respirait fort et semblait perdue, affolée et épuisée à la fois. Un instant son regard erra dans la clairière, avant d'apercevoir finalement l'humain et l'elfe qui la dévisageaient, leurs armes à la main. Elle sursauta et voulut reculer, s'enfuir, en proie à une vive terreur. Puis ses yeux se posèrent sur le visage de l'homme et son regard s'éclaira.
« Adril... » murmura-t-elle faiblement.
Et c'est alors que le jeune homme la reconnut, malgré la crasse et le sang qui souillaient son visage. Il s'agissait de son amie Iris, une jeune fille qui avait grandi avec lui à Torval. Il y eut un instant de flottement, de surprise réciproque. La femme fit un pas hésitant dans sa direction. Puis ses forces la quittèrent, et elle tomba au sol, inanimée.

Shyska ne répondit pas. Plonger dans ses pensés, l'elfe méditait surement les paroles de l'humain, confronté à une vision de la vie bien différente de celle qu'elle s'était formé durant ses années de solitude. Seul le souffle du vent et le chant du feu rompait le silence de cette douce après-midi. Adril ferma les yeux, se sentant prit de la lassitude, acquis lors de sa fuite, et de ses combats.

Une branche qu'on écarte. Le bruit d'un pas trainant. D'un bond, Adril fut debout. Il saisit la garde de son épée, et tenta de renier ce sentiment de crainte qui l'animait de nouveau. Avec Shyska dans cette état, il ne devait surtout pas succomber à sa propre faiblesse.

Une jeune femme apparut. Se tenant à un tronc d'arbre, elle semblait épuiser. Son regard dans le vague vit vaguement le couple qui lui faisait face. Sa chevelure était salit par la terre et les brindilles, de même que ses vêtements. Son genou droit découvert était écorché. Une vue sur les armes, elle eut un mouvement de recule alors que le jeune homme qui sentait la pressier le quitter écartait vivement la main de la garde. Son regard croisa celui de l'étrangère.

«Adril...»

Et alors que les yeux de l'homme s'écarquillait, reconnaissant son amie de Torval, Iris elle s'avançait. Un pas, une jambe tremblante qui ne peut plus la soutenir, le jeune femme chuta en avant. Soudainement, l'homme se revit dans le même état la journée d'auparavant. Seul, abattu, maintenue éveillé par la peur. Il se précipita vers son amie, oubliant totalement Shyska. Il ne pouvait y croire. C'était comme si un poids venait de quitter son âme. Il n'était pas seul. Il n'était plus seul. Elle aussi, Néera seul savait comment, avait survécut au massacre des Sombres. Portant la femme, les épaules secoués de sanglot retenu, il l’approcha prêt du feu, nettoya son visage, chercha ses blessures.

Heureusement, mit à part quelque coupure acquit durant sa fuite et quelques brulures, qui étrangement avait déjà été soigné, la femme n'était pas sérieusement blessé. La fatigue seul était cause de son évanouissement. C'est ainsi que rapidement, Iris se mit à s'agiter dans son sommeil, et fini par s’éveiller. Face à elle, le visage d'Adril, toujours inquiet de l'état de son ami. Aussi, ne tenant pas à la brusquer par des questions trop pressente sur les raisons de sa survie à l'attaque de Torval, il lui demanda.

«Comment tu te sens ?»

Était-ce le soulagement ? La joie de pouvoir contempler le visage d'un ami, dernier vestige d'un passé si proche mais pourtant si lointain, arraché par la lame des Drows ? Quoi qu'il en soit, un larme perla au coin de l’œil d'Iris.

Un traître, un traître au sein d'un peuple, un traître au sein de SON peuple, du peuple sylvain, un traître ou des traîtres ? Non juste un seul. Elle ne pouvait pas l'imaginer. Elle avait déjà une piètre opinion de son peuple mais de là à ce qu'il sache également trahir...
Les pensées faisaient rage dans sa tête, tournoyaient comme des tornades cherchant à s'échapper.

Un bruit.

Et Shyska redevint lucide. Elle attrapa son arc, encocha et patienta, le regard froid. Les bruits de pas pesant et hésitant n'annonçaient pas la venue d'un être dangereux mais mieux valait être sur ses gardes au cas où très improbable un drow au visage déformé par la haine surgirait entre les arbres. Ce ne fut pas le cas. Une humaine, à l'aspect fragile, chancelante d'épuisement fit son apparition. L'elfe lu la terreur dans les yeux de la fille ce qui acheva de la convaincre qu'elle n'était pas un danger.

- Adril...

Tiens donc, ainsi ils se connaissaient. Elle laissa son compagnon s'occuper de la demoiselle et s'en alla faire chauffer de l'eau à laquelle elle ajouta quelques feuilles tirées de sa sacoche qui infusèrent, dégageant un parfum douceâtre qui lui fit tourner la tête. Elle remplit un bol du liquide et le tendit à Adril.

- Tiens ça la requinquera un peu.

C'était sa seule façon de se rendre utile. Ils avaient de la chance toutefois, cela faisait longtemps qu'elle n'avait pas voyagé aussi lourdement. C'était sa première occasion de constater que cela pouvait servir.

Elle vient de ton village n'est-ce pas ? murmura-t-elle heureuse qu'il ne soit plus seul à porter ce fardeau.

C'était plus une affirmation qu'une question. Aussi n'attendit-elle pas la réponse et se replia plus loin, faisant mine de s'occuper du cheval de l'elfe noir pour leur laisser "savourer" leurs retrouvailles seuls tous les deux.

Il était temps qu'elle s'en aille. Adril n'avait plus besoin d'elle étant hors de danger et il avait la fille. Ensemble, ils trouveraient la force de se remettre des évènements récents et pourraient recommencer à vivre en paix.
Shyska soupira. Elle, ne pourrait jamais se trouver un port d'attache. Elle était bien trop fautive et responsable de délit, vol, crime etc... Elle n'était ceci dit pas recherchée activement, heureusement d'ailleurs. Mais bon, si elle croisait des autorités un peu trop teigneuses, elle ne ferait pas long feu. Elle vivait avec ce qu'elle parvenait à chipper. Un nouveau soupir et elle baissa les yeux vers une bourse rondouillarde qu'elle avait chappardé à un bourgeois avant qu'elle ne tombe sur l'homme et ses poursuivants noirs.

"Il en aura besoin... " lui murmura sa conscience

"mais moi aussi" gémit shyska

Enfin elle pouvait voler quand elle voulait. Dans un élan de générosité rare elle lui donna l'or prétextant qu'elle l'avait trouvé sur le drow qu'elle avait abattu seule lorsqu'elle les avait attiré loin d'Adril.

Zen aurez plus b'soin que moi. Je pense partir demain. Les charognards vont rappliquer, étrange qu'ils soient pas déjà là d'ailleurs et j'ai pas envie d'être dans le coin à ce moment là.

Non en vérité, elle ne savait pas très bien ce qu'elle voulait. Voyager avec de la compagnie, voilà longtemps que ça n'était pas arrivé et ça n'était pas forcément désagréable. Mais elle se sentait en trop. Elle s'accroupit, voulant attiser un peu le feu qui commençait à mourir, le mouvement déclencha une violente douleur dans son dos. La blessure que lui avait infligé le drow n'était pas guérie bien sûr. Voyager seule avec ce handicap n'était pas une bonne idée. Question de sécurité.

Je crois que je vais vous imposer encore ma présence quelques temps... grommela-t-elle d'une humeur soudain massacrante.

Elle lança un regard assassin à Adril, "cause de ses soucis", qui ne dû surement pas comprendre pourquoi il avait mérité ça avant de se remettre à titiller le feu qui n'en n'avait absolument pas besoin avec un bâton. Des braises incandescentes s'envolèrent dangereusement menaçant d'embraser les alentours. Heureusement, on lui retira bien vite sa branche ce qui l'irrita un peu plus mais évita de faire partir en fumée toute une forêt.
Elle prit une inspiration, ouvrit la bouche pour parler, faillit insulter celui qui lui avait ôté son jouet, se ravisa et retourna bouder à côté du cheval en râlant et lui disant que le monde entier conspirait contre elle.

Deux rescapés dont l'un était un paysan à bout et l'autre une pleurnicheuse.
Elle n'avait pas envie de mener pareille équipée bien que l'humain ait prouvé sa bravoure un peu plus tôt. Le village, bien sûr qu'elle le connaissait, elle s'y était ravitaillé plus d'une fois puisqu'elle errait dans la région à la recherche des méharas, chevaux mythique domptable uniquement par les elfes.

Elle le toisa longuement d'un regard pensif et hésitant, lui attendant en silence une réponse. Elle pesa le pour et le contre. Ses provisions s'amenuisaient à grand rythme, ne leur restait à peine de quoi gagner Almas mais le risque d'une ou plusieurs mauvaises rencontres était bien trop élevé. Elle était leur dernier espoir, elle le savait, mais aimant se laisser désirer, elle refusa.

Si les drows voulaient attaquer ce village comme à laisse supposer vos dires, commença-t-elle d'une voix douce et raisonnable, il est sûrement déjà trop tard et je ne voudrais pas nous exposer au risque bien trop grand que quelques charognards de leur espèce s'y soient attardé. Toi comme moi Adril, ne sommes pas en état pour une nouvelle confrontation, elle prit le temps de gratifier Iris d'un regard glacial et méprisant avant d'achever sa tirade d'une voix tellement venimeuse que ça n'étonnerait personne si l'intéressée se remettait à pleurer. Et je ne pense pas que la demoiselle ici présente se révèle être une combattante d'exception pour nous défendre face aux elfes noirs qui nous tomberaient dessus à la première occasion. Elle ne serait même pas fichue d'abattre le plus faible de leurs petits.

Elle contempla un instant leur mine déçue avec délectation puis sadique, englobant l'est d'un vague mouvement du bras, ronronna :

Mais libre à vous d'être suicidaire et de mourir de faim au milieu des décombres du village. Almas devrait se trouver quelque part pas là-bas. Mais rassurez-vous, les animaux déjà rassasiés par les cadavres des autres villageois ne s'attaqueront pas à vos propres dépouilles. Vous pourrez reposer en paix.

Elle savoura la détresse de la fille avant de constater qu'Adril, échauffé par ses multiples piques moqueuses destinées à heurter Iris, semblait à bout de patience. Alors elle se leva, s'étira puis bougonna :

D'accord je vous emmène, dis à l'autre d'arrêter de geindre et on y va. Il est à quelques heures de marche.

Puis pour adoucir la rancune possible de son compagnon humain, elle sussurra gentiment :

Je propose de laisser le cheval à ton amie. Mais si tu préfères galoper à bride abattue pour arriver plus vite à Almas et prévenir son petit monde, je me ferai un plaisir de l'escorter en douceur jusqu'au village voisin de notre destination.