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 À Lwar. [Meavh]

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Norah
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MessageSujet: À Lwar. [Meavh]   À Lwar. [Meavh] I_icon_minitimeDim 14 Juil 2013 - 8:45


- Cyrsa -



Gervard avait cessé de les poursuivre lorsqu’elles avaient quitté la ville. Quand les dernières fermes et les champs labourés s’étaient estompés dans le paysage pour devenir plaines et forêts. Malgré tout, Norah avait demandé à ne pas ralentir le rythme de leur fuite. Depuis lors, aucune d’elles n’avait dit mot. Morgane s’était contentée des maigres explications que lui avaient fournies une Merry essoufflée, tentant tant bien que mal de semer deux gaillards aux épaules larges. Elle n’avait d’ailleurs rien élucidé, mais les regards déterminés des bougres avaient suffi à les dissuader de taper la discussion mais plutôt prendre leurs jambes à leur cou. Lorsqu’elles avaient atteint les portes de la grande Diantra, la sang-mêlé l’avait menée vers une écurie plutôt bon marché où elle avait prétendu avoir deux montures. Il fallait croire qu’elle ne mentait pas, puisqu’à peine arrivées, deux étalons aux robes blanche tachetée et brune les attendaient. Norah, qui n’avait jamais monté de sa vie, avait du essayer tant bien que mal de grimper sur l’immense animal, plutôt jeune. L’affaire prit un certain temps. Puis, lorsqu’on lui eut expliqué avec force détails comment diriger la bête, elle avait progressé d’abord au trot, puis quelques lieues plus tard, au galop. Elle n’eut pas trop de mal à avancer par la suite, mais l’animal semblait plus suivre son compagnon de poils que les gestes de son cavalier, ce qui frustra longuement Norah.

Le temps était clément. Du moins pour l’instant. De lourds nouages s'amoncelaient, prédisant une nuit pluvieuse et zébrée d’une tempête, mais jusque là, rien n’avait éclaté à part les mottes de terres sous les sabots de leurs chevaux. C’était comme si l’automne retenait son dernier souffle avant le déferlement glacial de l’hiver. Elles avaient opté comme itinéraire, de tracer leur route jusqu’aux côtes de l’océan d’Eris, puis, lorsqu’elles y seraient parvenues, suivre littoral vers le sud jusqu’à rejoindre Ydril. Du moins, c’est ce qu’elles avaient convenu. Mais c’était bien sans compter les imprévus des chemins. Pour Norah, son voyage s’abrégea de la manière la plus brève et la plus absurde qui soit.

Alors qu’elles atteignaient presque l’extrémité des terres de Diantra, qu’à peine quelques jours les séparaient de reflets bleutés de la mer et de son air salé, une bande de détrousseurs de grands chemins leur tendirent une embuscade. Près de gros rondins de bois amassées sur la route, les hommes débarquèrent sur les côtés avec grands cris et menaçant de leurs armes de fortunes rouillées. La monture de Norah, bien trop jeune pour être habituée à ce genre de surprise, hennit de terreur. L’animal cabra et sa cavalière tenta cahin-caha de s'agripper aux poils cours du cheval pour ne pas chuter, mais malgré tout, ce fut un rocher saillant qui cueillit Norah, en pleine tête.




De ce qui se passa par la suite, la jeune fille n’en eut pas conscience. Elle resta inconsciente un moment, sans savoir ni où ni avec qui elle était. Après, elle se souviendrait de flashs plein de non-sens. D’hommes tentant de la déshabiller. De sa mère, légèrement vêtue et tachée des restes de son dernier client en train d’hurler « Montr’à Gégé c’que tu cach’entre tes guibolles ! ». De son crâne en train de brûler, de se consumer, tandis que des yeux dansaient devant elle. Mais elle ne pourrait dire s’il s’agissait de rêve ou de réalité. Un instant, elle fut vraiment consciente et réussit à ouvrir péniblement les yeux, mais son corps la tiraillait tellement qu’elle se laissa tout aussitôt sombrer à nouveau. Le temps n’avait plus de sens pour elle. Le jour, la nuit, plus rien n’existait. Elle n’était que sensations et douleurs. Un jour, elle sentit qu’on tentait de la nourrir. De lui faire boire une boisson forte. Puis l’autre, les douleurs revenaient.




« Où que … j’suis ? »
Norah toussa faiblement, la gorge asséchée de ne pas avoir parlé depuis plusieurs jours. Elle entendit quelques pas feutrés, un froissement de tissu, puis une main douce vint toucher son front. Elle semblait glaciale, comme morte. On aurait dit la main de Tyra en personne, venue l’emporter dans Son Royaume. La jeune femme frémit, puis prit conscience petit à petit qu’elle était allongée sur des couvertures rèches et que son corps était enserré de bandages. Il faisait bon et ses douleurs s’étaient amoindries. Malgré tout, la fatigue persistait et elle ne tarda pas à s’endormir à nouveau, sans attendre de réponse, dans un sommeil troublé d’étranges cauchemars.
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MessageSujet: Re: À Lwar. [Meavh]   À Lwar. [Meavh] I_icon_minitimeDim 14 Juil 2013 - 17:19


Aislinn n'avait pratiquement pas quitté l'inconnue depuis le jour où elle avait trouvé refuge dans le Temple de Lwar. Toujours à son chevet, elle lui murmurait des mots doux quand elle s'agitait dans son sommeil et passait un linge humide quand la fièvre la faisait délirer. Il lui arrivait de s'endormir, sa tête posée sur ses bras, à moitié avachie sur la paillasse de la malheureuse. Dans ces cas là, le réveil était toujours douloureux et l'enfant, poussée par le désespoir, venait se blottir contre Meavh  ; le plus souvent, à la faveur de la nuit. Quelques mois plus tôt, ces intrusions n'auraient en rien dérangé l'aveugle, dont le sommeil d'alors se résumait à peau de chagrin. Mais avec la vie paisible de Lockrive, l'étrangère avait peu à peu renoué avec des nuits saines et reposantes. Incapable d'en tenir rigueur à Aislinn, elle se surprit, alors qu'elle caressait doucement le dos de l'enfant pour la troisième fois de l'ennéade, à fulminer silencieusement contre la moribonde. Sans cela, sans doute Andall Meavh ne se serait-elle jamais soucié de son devenir. Elle était bien placée pour savoir que Tyra appelait à elle qui bon lui semblait, quand elle le désirait. Cela ne l'empêcha pas, pourtant, de murmurer quelques paroles rassurantes aux oreilles juvéniles de sa protégée.
«  Tu ne dois pas t'inquiéter comme ça, murmura-t-elle avec douceur — et sommeil — à l'oreille de celle qu'elle avait parfois considéré comme son esprit protecteur. Elle ne peut rêver de meilleures conditions pour se rétablir.  »
Seul le silence lui répondit et il fut bientôt évident qu'Aislinn ne se laisserait pas convaincre. En désespoir de cause, Meavh la poussa doucement hors de son lit. Blessée, l'enfant se laissa pourtant faire, non sans lui couler un long regard de reproche qui disparut quand elle comprit que l'aveugle en faisait autant. Elle hésita, sentant poindre des remords, avant de se laisser convaincre par la voix de son aînée qui lui demandait son bâton. Après s'être exécutée, elle fourra sa petite main dans les doigts fins de l'aveugle et se laissa entraîner dans les couloirs sombres du temple. pas qu'elle eut spécialement besoin d'aide, elle connaissait les dédales de la demeure des filles de Lwar bien mieux que quiconque, pour y avoir vécu la majorité de sa vie. Elle aurait pu s'y aventurer les yeux fermés sans jamais se perdre. Mais elle demeurait une enfant, une enfant confrontée au spectre de la mort et l'obscurité pouvait parfois se montrer bien menaçante.
Plissant les yeux alors qu'elles passaient aux abords d'une torche, la rivoise prit le temps de détailler sa protectrice, juste avant de se laisser engloutir une nouvelle fois par les ombres. Meavh était relativement petite, à peine plus de cinq pieds, et toute en finesse. Ses mains étaient fines, son visage étaient fin, ses jambes étaient fines, ses lèvres étaient fines  ; tout était fin, chez elle. Sa peau était blanche, presque transparente parfois, peu importait le temps qu'elle pouvait passer au soleil. Comme elle portait une longue robe de nuit elle aussi parfaitement immaculée, le vêtement se confondait parfois avec la peau  ; cela donnait une impression étrange, comme si elle pouvait n'être qu'un fantôme, une apparition qu'un souffle de vent pouvait emporter. Ses cheveux, noirs comme le ramage d'un corbeau, étaient longs, incroyablement longs. Quelques mois encore et ils toucheraient le sol. Ils lui donnaient beaucoup de fils à retorde  ! Mais elle aimait les peigner, heures après heures, dès qu'elle en avait l'occasion. Un jour, elle lui avait annoncé que quand elle serait grande, elle aussi aurait les cheveux jusqu'aux genoux. Meavh avait ri, alors, de son rire si doux, comme la caresse d'une plume, et ce souvenir arracha un sourire pensif à Aislinn. Un rire de Meavh était quelque chose de merveilleux, car incroyablement rare. Combien de fois était-ce arrivé, depuis son retour  ?
Le bois frappant le bois l'arracha à ses pensées.
«  Ouvre la porte, Aislinn. » Comme elle s'exécutait, Meavh s'engouffra dans la pièce et laissa malgré elle échapper un léger frisson. Sans trop savoir pourquoi, elle avait un mauvais pressentiment et son front se barra l'espace d'une seconde d'un pli soucieux. Grâce à la lumière tremblotante d'une bougie sur le point de rendre l'âme — Aislinn refusait de laisser l'inconnue dans l'obscurité quand elle était seule et laissait toujours une petite flammèche derrière elle, au cas où l'autre se réveillât — l'enfant eut tout juste le temps de s'en rendre compte et son cœur se serra. Elle vouait pour Meavh une adoration toute enfantine, mélange de sa foi pour Lwar qui semblait veiller sur l'aveugle, de l'étrange magnétisme qu'elle pouvait exercer et de sa confiance aveugle en ce qu'elle considérait de plus en plus comme une parente... sans vraiment savoir de quelle sorte. Elle n'avait jamais connu sa mère, pas plus qu'elle n'avait pu un jour jouer avec sa sœur. «  Où est-elle  ?  » demanda l'aînée des deux dans un murmure et sa cadette se saisit de sa main, l'entraînant vers la paillasse.
Se mettant à genoux avec milles précautions, Meavh tâtonna l'oreiller qui tomba sous sa main, jusqu'à effleurer une chevelure trempée de sueur. Lentement, très lentement, elle remonta jusqu'au front, qu'elle caressa avec délicatesse, le regard perdu devant elle. Dans un silence quasi religieux, Aislinn observait, le cœur au bord des lèvres. Jusqu'à ce que...
«  Où que... j'suis  ?  » On eut dit un croassement plus qu'une voix véritablement humaine, mais l'important n'était pas là et l'enfant poussa un petit cri de joie, sur le point de lui répondre... avant de se figer  : l'inconnue venait, à nouveau, de sombrer dans l'inconscience. Meavh ne s'en rendit pas compte et sa voix emplit l'air. «  Tout va bien, tu es en...
— Elle s'est rendormie,  » la coupa la jeune novice en posant une main sur son épaule. Rendormie. Parce qu'elle n'était plus en danger, pensait désormais Aislinn, qui voyait plus que jamais en Meavh un cadeau des Dieux. Après tout, ne portait-elle pas la marque de Wagyl, elle l'étrangère, l'inconnue, l'ignorante, que rien ne prédestinait à trouver Rive ? Elle était venue, et l'inconnue avait réagi au monde extérieur pour la première fois depuis son arrivée  !
L'aveugle garda le silence, mal à l'aise. Incapable de se départir de son mauvais pressentiment, elle veilla aux côtés de sa petite protégée une femme dont elle ignorait tout, sinon qu'elle aurait un rôle à jouer, le moment venu. Elle aurait juste aimé savoir lequel et dans quoi.


Dernière édition par Meavh le Ven 23 Aoû 2013 - 9:38, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: À Lwar. [Meavh]   À Lwar. [Meavh] I_icon_minitimeMar 16 Juil 2013 - 23:20




Sa torpeur sembla durer des jours entiers. Norah s’endormit d’un sommeil lourd, noir, empli de ses cauchemars incessants. Sa nuit fut humide de sueurs, d’ailleurs, elle ne tarda pas à tremper tant les draps qu’il fallut les changer tant elle s’empêtrait dedans. Elle s’agita quelques fois, la fièvre luttant pour ne pas chuter. Mais la personne qui s’occupait d’elle ralentissait sa progression. Dans ses délires, Norah ressentait sa présence. Elle ne savait si elle était amicale, mais elle l’apaisait. Elle se manifestait parfois sous forme de murmures soufflés dans le silence. Ou de mains qui s'agrippaient à sa peau, arrachant toute douleur de son corps. Quelques heures après, lorsque ses maux se furent apaisés, elle prit à nouveau conscience de ce qui l’entourait. Elle était toujours allongée sur un lit de fortune qui semblait être constitué d’un amas de couvertures, étalées à même le sol. L’obscurité voulut l’ensevelir à nouveau, mais elle lutta pour rester consciente. Autour d’elle, des bruits de pas légers perturbait le silence religieux qui régnait. Ça et là, quelques murmures retentissaient mais c’était tout. Elle ressentait encore les échos douloureux de ses blessures. Mais c’était comme si tout cela était loin d’elle. Hors de portée lorsqu’elle tentait de reprendre conscience, mais suffisamment près pour se faire ressentir.

Elle finit par s’extirper soudainement de sa léthargie. Elle voulut se lever, comme on l’aurait fait lorsque l’on sort d’un trop pénible cauchemar, mais elle lâcha un cri de douleur et ne réussit qu’à déclencher un spasme de souffrance. Quand elle avait l’impression que tout son corps était écrasé sous une masse, dans ses rêves, elle se rappela qu’on lui avait enserré le corps d’étroits bandages qui emprisonnaient de sa poitrine jusqu’au bassin. Maintenant que les effets des calmants s’amenuisaient, elle prit conscience que plusieurs de ses côtes devaient être cassées. Elle ouvrit les yeux mais ne vit rien d’abord. Puis quand elle se fut habituée à l’obscurité, elle tenta comprendre où elle avait atterri.

La pièce était sobre et sombre. Les murs pouvaient être de couleur, mais avec la faible luminosité et la fatigue de ses yeux, tout lui paraissait gris, terne. Le seul mobilier qui habillait la chambre -si seulement ça en était une- se résumait à une commode de bois usé sur lequel se dressait divers breuvages, bouteilles et produits. On l’avait vêtue de fins vêtements en laine pelucheuse qui étaient sûrement plus là pour la forme que pour leur usage. Rien de tout cela ne pouvait lui indiquer où -par les Cinq- elle s’était retrouvée. Ses rares souvenirs ne l’aidaient pas non plus. Tout ce dont elle était sûre, c’est d’avoir semé Gervard et son compagnon, une fois les mur de Diantra franchis. Après, tout se confondait avec ses délires fiévreux. Comment pouvait-elle différencier ce qu’elle avait rêvé de ce qu’elle avait vécu ? Autour d’elle, aucune trace de Morgane, de ses vêtements, de son sac de voyage qu’elle avait emporté avec elle lorsqu’elles s’étaient enfuies de la Taverne du Borgne. Sa mère y était-elle pour quelque chose dans cette histoire ? Elle se rappelait de sa voix, de son visage… Non. Impossible. Était-elle retournée à la capitale ?

Un bruit de gonds la tira de ses réflexions et elle tourna lentement la tête vers la porte. Elle se sentait un peu comateuse mais réussit à apercevoir une enfant venir vers elle, ses pieds nus résonnant contre la pierre. Celle-ci s’accroupit pour s'enquérir de son état. Lorsque Norah bougea, les yeux faiblement ouverts, son visage s’illumina.

« C’est… toi qui m’a soignée ? » La jeune femme prit une pause afin de reprendre son souffle, de se réhabituer à la parole. Lorsqu’on lui tendit un récipient, elle s’y agrippa de ses mains fébriles, comme si elle craignait qu’il ne se brise, et but à grandes gorgées. Lorsqu’elle put à nouveau parler, elle continua :

« Comment je suis arrivée ici ? Que… qu’est-ce qu’il s’est passé ? »
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MessageSujet: Re: À Lwar. [Meavh]   À Lwar. [Meavh] I_icon_minitimeVen 23 Aoû 2013 - 10:21


À genoux face à sa protégée, Aislinn n'était que joie et soulagement. Les bras croisés sur la paillasse de la grande blessée, elle la dévorait des yeux, avec tout l'enthousiasme d'un enfant assistant à ce qu'il prenait pour un miracle.  Lwar l'avait entendue ! Grâce au soutien de la Déesse, la mourante avait déjoué tous les prognostics, donnant tort à toutes les prêtresses qui avaient tenté, à demi-voix, de lui faire comprendre que l'étrangère ne s'en sortirait peut-être pas. Même Meavh avait tenté de la préparer au pire avant de renoncer devant la réaction horrifiée de sa protégée.
Portée par sa joie de voir sa protégée revenir à la vie, Aislinn ne prit pas la peine de remarquer que son action n'était pas celui de Rive et lui répondit dans le patois local. L'abandonnant là quelques secondes, elle se rua vers la cruche posée à quelques pas de là et remplit à ras bord une tasse en étain pleine de poussière. Elle tendit ensuite le précieux calice et fut ravie de le voir se faire engloutir sans autre forme de procès. Elle allait pour répondre une nouvelle fois dans sa « langue » natale quand elle remarqua le plis dubitatif qui barrait le front de son interlocutrice et elle laissa échapper un pouffement.
« Pardon. Tu n'es pas d'ici, c'est ça ? » Les prêtresses le lui avaient dit et répété, sans qu'elle n'y accordât grande foi. Force était de constater, cependant, qu'elles devaient avoir raison. « Tu es à Lockrive, dans le Temple de Lwar ! Des chasseurs t'ont trouvée à moitié morte dans la forêt et t'ont ramenée ici. Les prêtresses t'ont soignée et j'ai pris soin de toi. Et Meavh aussi, un peu ! »
D'ailleurs, elle devait aller la chercher, elle devait lui annoncer la bonne nouvelle ! Après tout, Meavh avait plus d'une fois pris le relais de l'entêtée que pouvait être Aislinn, l'enfant se refusant le sommeil le plus possible pour mieux veiller sur la miraculée. Se redressant, elle demanda un peu de patience et s'esquiva sans autre forme de procès. Dix minutes plus tard, elle revenait, mais pas seule : une femme d'une trentaine d'années lui emboîtait le pas. Elle était petite, à peine plus de cinq pieds, et semblait fatiguée. Elle était vêtue d'une robe de nuit immaculée et le bâton qu'elle tenait fermement devant elle ainsi que ses yeux clos la dénonçaient comme une aveugle.
« Aislinn m'a dit que tu es réveillée, commença-t-elle alors qu'elle s'asseyait, aidée par l'enfant, sur un tabouret juste en face de l'alitée, mais elle n'a pas été capable de me donner ton nom. » Au son de sa voix, il était aisé de deviner qu'elle venait tout juste d'être arraché à un sommeil qu'elle aurait préféré ne pas quitter. Pour autant, elle ne présentait aucun signe d'agacement ou d'hostilité, loin s'en fallait. Au contraire, elle semblait sincèrement rassurée. « Veux-tu nous dire qui tu es ? »
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MessageSujet: Re: À Lwar. [Meavh]   À Lwar. [Meavh] I_icon_minitimeSam 9 Nov 2013 - 16:57

Lockrive... Le nom résonnait dans la tête de Norah, sans rien éveiller en elle. Elle aurait voulu demander des détails mais la gamine qui l'avait informée s'en était allée aussi vite qu'elle avait parlé. Peut-être pas si vite que ça, mais avec la migraine qui lui martelait les tempes, la jeune femme n'avait compris que quelques bribes de ses paroles. Alors qu'elle tenta de se redresser à nouveau sur sa couche, elle eut comme l'impression que le monde se précipitait. Elle tentait de s'extirper de ses couvertures, mais à chaque mouvement, elle s'enfonçait dans le lit à une vitesse vertigineuse. La chambre tournoyait violemment autour d'elle et lui donnait une forte nausée. Norah ferma les yeux afin de tenter de se contrôler et d'éviter de perdre conscience, mais tous ses sens étaient en éveil et son corps continuait l'écho de sa chute. Elle abandonna, pantelante, l'idée de se redresser et s'affala, comme si elle avait épuisé toutes ses réserves pour ce faible effort. Ainsi donc, elle n'était plus à Diantra... Mais comment en était-elle arrivée à s'abimer au point de ne plus pouvoir bouger ? Il lui fallut quelque temps pour reprendre contenance et réussir à rouvrir les yeux. Alors, une nouvelle femme avait fait son apparition dans l'encadrement de la porte. Dans l'obscurité, Norah eut du mal à percevoir ses traits. Sa silhouette même peinait à se détacher du décor sombre qui l'entourait. Sa robe était de la même teinte que les murs de la pièce et son pas était accompagné du clapotement du bois contre la pierre. Lorsqu'elle s'avança plus encore, Norah remarqua ses yeux clos sur ses traits de femme encore jeune qui se dessinaient sous le vacillement d'une bougie, et en déduisit donc qu'elle était aveugle. Contrairement à la gamine, sa voix était posée, calme. Elle prenait un soin particulier à se faire bien comprendre de la blessée :

« Aislinn m'a dit que tu es réveillée, mais elle n'a pas été capable de me donner ton nom. » Un silence. « Veux-tu nous dire qui tu es ? »

Qui était-elle. La question sembla flotter dans les airs, sans recevoir de réponse. Norah essayait de réfléchir, de trouver une réponse à lui donner. Qui était-elle ? La belle Norah, aux seins rosés, qui savait obtenir la satisfaction de sa mère en s'occupant plus que convenablement du bien-être de ses clients ? Non. Cette fille là, elle l'avait abandonnée en même temps que son ancienne vie. Peut-être Isi alors ? Fille de boulanger, qui savait bien comment elle pouvait se procurer de la nourriture pour garnir ses pâtisseries fictives. Merry ? La traine-dans-les-bars qui avait un don bien fondé pour arnaquer les hommes enivrés aux jeux ? Toutes ces existences là étaient liées, qu'elle le voulait ou non, à Diantra et à la vie piteuse qu'elle y menait. Maintenant qu'elle en était partie, elle voulait tourner la page. Oublier ce qui lui avait attiré les malheurs et ce à cause de quoi elle s'était retrouvée dans cette situation.

« Cyrsa. » Elle avait murmuré le mensonge avec la même facilité dont elle avait usé pour tous les autres. « Mon nom est Cyrsa. »

Maintenant, elle devait trouver un prétexte de s'être retrouvée aussi. Avec ses maux de tête, elle eut bien du mal à se concentrer. Ses pensées avaient du mal à se mettre en ordre, sa gorge même était pâteuse et parler semblait comme un défi. Les deux femmes étaient assises à son chevet, les yeux rivés dans les siens. La petite fille semblait visiblement contente qu'elle se fut réveillée, son regard brillait d'une joie silencieuse. Norah se rappela d'avoir un jour été comme elle, innocente et joyeuse des petits bonheurs de la vie. Encore insouciante du monde qui l'attendait. Des horreurs qu'elle traverserait. Avec effort, la jeune femme se ressaisit. Voyant qu'elle n'arrivait pas à tisser de mensonge convainquant, elle décida d'opter pour la vérité, mais judicieusement dosée pour ne pas trop en révéler. Son caractère et la vie qu'elle avait mené avait fait d'elle une personne méfiante envers tout le monde, dont le mensonge était le seul échappatoire pour se tirer de ses ennuis.

« Je... Je ne sais pas comment j'ai ... attéri ici, dit-elle, honnêtement. Je suis parti de chez moi dans l'espoir de rejoindre mon oncle, qui habite vers Ydril... Je... J'étais avec une ménestrelle quand on a été attaqués sur la route par des hommes. Des bandits, sûrement... On a essayé de fuir mais, visiblement, il nous ont rattrapés... Après, c'est le trou noir. Je ne sais plus. Je suis désolée...  Il y eut une pause, puis elle reprit, avant qu'on lui demande des détails sur ses origines : Avez-vous eu des nouvelles de mon amie ? Elle s'appelle... Morgane. Je crois. »

Elle eut soudain un élan de chaleurs et des suées froides. Et si Morgane se trouvait à côté, à quelques pièces d'elle ? Et si elle, prétendrait qu'elle s'appelait Merry et qu'elle prévoyait de se rendre à Meca pour y refaire sa vie ? Quelle sotte était elle ! Son erreur lui fit de nouvelles douleurs de crâne et elle attendit en silence une réponse de l'aveugle. Avec un peu de chance, elles croiraient que ses blessures lui avaient fait perdre la tête et qu'à présent, elle ne savait plus qui elle était... Mais elle n'avait que peu d'espoirs pour se montrer convaincante.
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MessageSujet: Re: À Lwar. [Meavh]   À Lwar. [Meavh] I_icon_minitimeLun 25 Nov 2013 - 12:25

« Tu es en sécurité ici, Cyrsa, répondit Meavh avec une douceur non feinte. Les filles de Lwar prendront soin de toi le temps que durera ta convalescence.


C’est comme Meavh dit, tu seras bien ici ! » affirma Aislinn avec un enthousiasme qui arracha un sourire à l’aînée des trois femmes. Avec tendresse, l’aveugle tendit la main vers la tête de la jeune novice et caressa ses cheveux. Il était bon de voir l’innocence des premières années s’exprimer pleinement dans la voix de sa protégée. Un jour, elle grandirait et ce trésor disparaîtrait avec sa naïveté. Néanmoins, l’ancienne Gardienne soupçonnait que jamais l’enfant n’oublierait sa gentillesse.


Meavh allait pour se redresser, l’heure n’étant guère aux longues conversations. Cyrsa devait être épuisée et avait besoin de repos, de même qu’Aislinn qui demeurait fort jeune pour veiller si tardivement. Le serramiroise, quant à elle, gardait des membres engourdis par la fatigue et croyait pouvoir entendre au loin les chants de sirène de ses draps. La grande blessée était hors de danger, c’était l’essentiel, elle n’en était cependant qu’aux premiers pas de son rétablissement et devait se ménager. Il fut cependant vite évident qu’elle avait la tête trop pleine de questions sans réponses pour que simplement dormir fut une option. Sa voix était hésitante alors qu’elle leur confiait qu’elle n’avait aucune idée de ce qu’elle faisait au nord d’Erac. Son histoire arracha un sourcil surpris à un visage qui était demeuré jusque là impassible. « J’ai bien peur, mon enfant, que tu ne sois encore loin de ta destination. Loqriv borde les falaises de l’Eraçon. Nous sommes aux frontières nord du Médian ; Ydril est à plusieurs jours de voyage, et encore, si tu possèdes une bonne monture. »


Peut-être Cyrsa mentait-elle ; Meavh savait combien il était facile de s’inventer une histoire et combien il était confortable de se cacher derrière une vie factice quand on avait affaire à des inconnus. Ce n’était guère important, finalement, car il demeurait une vérité indéniable : l’étrangère portait dans sa chair les marques de bien des mauvais traitements. Qu’elle fût tombée entre des mains violentes ne faisaient aucun doute ; ils avaient dû simplement continuer leur chemin avec leur nouveau « jouet » sans se soucier de son objectif premier. La miraculée ne sembla guère se formaliser de cet aveu, préférant s’inquiéter du sort de sa compagne de voyage. C’était là une question qu’il ne faisait pas bon de poser avant de s’endormir et Meavh retint un léger soupir. Elle n’avait pas ouï dire qu’un ménestrel eut été trouvée aux côtés de Cyrsa, là-bas dans la forêt. Plus certainement, la pauvre femme était morte. Elle caressa l’idée de lui cacher la vérité pour lui offrir au moins une fin de nuit apaisée mais repoussa fermement l’idée. Ce n’était pas en l’entourant de chimères que la gardienne déchue l’aiderait.


« Je ne savais pas… murmura Aislinn et Meavh devina ses larmes rien qu’au son de sa voix. Je suis désolée, les chasseurs ont ramené que toi. Mais peut-être que… qu’elle va bien, on peut pas savoir !


Paix, répondit l’aveugle sur le même ton en attirant l’enfant contre elle. Nous ne pouvons pas te dire ce qu’est devenue ton amie, mais tu ne pourras pas l’aider dans ton état. Tu as besoin de repos… et toi aussi, Aislinn, » ajouta-t-elle en se relevant. « Demain, nous pourrons plus aisément continuer cette conversation. »


Contre elle, la novice voulut protester mais les doigts de son aînée sur son épaule maintinrent ses lèvres closes. Elle lança un regard désolé à Cyrsa avant de lui souhaiter bonne nuit et de lui promettre de revenir le lendemain aux premières lueurs de l’aube. Ce qu’elle fit, arrivant même largement en avance sur l’astre diurne. Voyant que sa malade était encore plongée dans un sommeil réparateur, elle posa le plateau qu’elle portait à bout de bras sur le bout de la paillasse et s’agenouilla devant elle, les bras croisés posés sur la paille au niveau de sa tête. Elle attendit silencieusement son réveil, en profitant pour prier Lwar pour son salut… et celui de son amie disparue.



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